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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4248/2019

ATAS/642/2021 du 21.06.2021 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4248/2019 ATAS/642/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 juin 2021

10ème Chambre

 

En la cause

 

Madame A______, domiciliée à Carouge, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Sébastien LORENTZ

 

 

 

recourante

contre

 

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, Genève

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après: l'assurée ou la recourante), née le ______ 1969, divorcée, employé de commerce, travaillait en tant que secrétaire 2 auprès de la B______ de l'État de Genève, depuis le 1er septembre 2000. En date du 9 août 2006, elle a présenté une première demande de prestations auprès de l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : l'OAI ou l'intimé): depuis mars 2005, elle avait subi plusieurs périodes d'incapacité de travail, totale ou partielle. Elle était atteinte de la maladie de Lyme, diagnostiquée le 9 mars 2005 ; elle était suivie par le docteur C______ (ci-après : le médecin traitant), spécialiste FMH en médecine interne, ainsi que par l'unité de neuro-ophtalmologie des HUG. Cette affection entraînait des problèmes de vision, l'obligeant à porter des lunettes spéciales.

2.        Dans un rapport du 18 septembre 2006 le Dr C______ expliquait notamment qu'anamnestiquement, depuis début mars 2005, sa patiente présentait des troubles visuels avec photophobie, d'importantes céphalées pulsatiles avec nausées et vomissements. Les douleurs se situaient surtout dans les régions périorbitaires, prédominant à gauche. Après de nombreux examens et un suivi en ophtalmologie et en neuro-ophtalmologie le diagnostic d'encéphalopathie de Lyme avait finalement été posé en février 2006; traité à la Rocephine 2 gr/jour pendant 21 jours, l'état de santé de la patiente s'était amélioré. Elle se plaignait toujours d'un certain degré de photophobie, d'une gêne au niveau de la mobilité des yeux surtout à gauche, parfois d'une vision floue, de fréquentes céphalées périorbitaires, de troubles de la concentration et de la lecture, le tout augmentant considérablement si elle devait travailler plusieurs heures devant un écran d'ordinateur. Au moment de l'établissement de ce rapport, elle n'avait pas de traitement spécifique, présentait une évolution favorable mais lente de la maladie, avec recrudescence des symptômes présentés au début, en cas de fatigue ou d'efforts de concentration ou de lecture, surtout sur ordinateur. Elle ne pouvait dès lors reprendre le travail à 100 %. L'atteinte à la santé avait des répercussions sur son activité professionnelle: elle n'avait plus la même faculté de concentration ni de lecture. L'activité exercée jusqu'à l'époque, n'était exigible qu'à hauteur de 75 % (six heures par jour), et il y avait une diminution du rendement (50 %). Des mesures pouvant améliorer la capacité de travail (ci-après : CT) étaient possibles: diminution du temps de travail, surtout devant un écran d'ordinateur. Une autre activité n'était pas exigible. Capacités professionnelles: elle pouvait rester en position assise quatre heures par jour et en position debout deux heures par jour, en alternant les positions; elle ne pouvait se tenir ni à genoux, ni accroupie; elle pouvait se déplacer à pied, utiliser les deux bras, lever, porter ou déplacer des charges jusqu'à 15 kg; elle pouvait se baisser, accomplir des mouvements des membres et du dos; un environnement à forte luminosité et chargé de poussière devait être évité. Elle avait une bonne motivation pour la reprise du travail, et le degré d'absentéisme prévisible en raison de l'état de santé du traitement médical était moyen.

3.        Dans un rapport du 16 mars 2007, le médecin traitant indiquait que l'état de santé s'améliorait; sans changement de diagnostic. La patiente parvenait à travailler 75 % depuis juin 2006, mais il était impossible de dire si l'on assisterait à une récupération complète. Le traitement actuel consistait dans le repos partiel et le port de lunettes spéciales; la compliance était optimale et il y avait une bonne concordance entre les plaintes et l'examen clinique.

4.        Le 23 août 2007, le docteur D______, spécialiste FMH en neurologie, qui avait suivi la patiente de février 2007 à avril 2007, indiquait que, suite à des céphalées et une importante photophobie, la patiente avait été investiguée au début 2006 aux HUG; un diagnostic de neuro-borréliose avait été posé, et un traitement anti-infectieux mis en place. Il reconnaissait lui-même la borréliose, au vu des éléments cliniques et paracliniques, mais il n'avait pas d'arguments solides pour une neuro- borréliose. Lors de sa dernière consultation, en avril 2007, l'état de la patiente s'était amélioré grâce à un traitement antibiotique, et la photophobie avait diminué très nettement, au point que la patiente envisageait de reprendre une activité à 100 %.

5.        Dans un avis médical du 5 septembre 2007, la permanence du service médical régional (ci-après : le SMR) avait proposé, au vu des documents médicaux réunis, de demander un examen du poste de travail par le service de réadaptation et, sur cette base, déterminer si des moyens auxiliaires supplémentaires pouvaient augmenter la CT.

6.        Un bilan psychologique à la recherche de difficultés de mémoire et de concentration a été effectué en septembre 2007 (Madame E______, psychologue FSP-neuropsychologue FSP), qui concluait que l'examen neuropsychologique avait pu objectiver, chez cette patiente très inquiète de ses troubles, une fatigabilité intellectuelle importante, puisqu'elle survenait au bout de 45 minutes de travail intellectuel; il en résultait une atteinte significative à la qualité de la performance de la patiente, même sur des tâches relativement simples; on notait également une baisse globale de l'efficience attentionnelle, ralentie dans toutes ses modalités, et un faible rendement aux tâches nécessitant une attention soutenue.

7.        Un rapport du 23 octobre 2007 du docteur F______, spécialiste FMH en neurologie, concluait que la symptomatologie d'appel se résumait à des nausées, vertiges, lourdeur des yeux et une lenteur d'idéation, volontiers favorisée par une activité professionnelle accrue, au décours d'une hypothétique maladie de Lyme. L'examen neurologique était sans anomalie. Ce spécialiste avait certaines réticences à retenir le diagnostic de maladie de Lyme, l'antibiothérapie étant préconisée sur la base des seules sérologies; la clinique n'était guère évocatrice d'une telle affection, même s'il y avait eu d'authentiques piqûres de tiques et que des sérologies attestaient le contact; les plaques érythémateuses n'évoquaient guère un érythème multiforme; les lésions étaient multiples, prurigineuses, sans véritable relation directe avec les piqûres, des années s'étant écoulées. Il n'avait pas d'explication pour la photophobie, la symptomatologie vertigineuse méritait selon lui des investigations neuro-ORL, raison pour laquelle il avait adressé la patiente au docteur G______, spécialiste FMH en ORL, consultant en oto-neurologie aux HUG.

8.        Le Dr G______ avait conclu, dans un rapport de consultation spécialisée du 12 novembre 2007, que cette patiente avait présenté un déficit vestibulaire brusque de l'oreille gauche; rétrospectivement ceci pouvait expliquer les symptômes, dès le départ. La patiente décrivait spontanément une diplopie verticale, des troubles de la fixation avec un décalage entre le mouvement de la tête et des yeux, une gêne à toute stimulation du champ visuel périphérique (simulation opto-cinétique). La symptomatologie actuelle était expliquée par une mauvaise compensation chez une patiente probablement à forte dépendance visuelle.

9.        Dans un avis du 7 juillet 2008, le SMR avait résumé le dossier médical, après avoir fait reconvoquer l'assurée auprès du Dr G______: le service médical relevait que cette dernière avait été en incapacité de travail à taux variables depuis mars 2005 ; des troubles ophtalmologiques et une fatigabilité avaient été attribués à une maladie de Lyme, la CT étant de 75 % depuis juin 2006. L'assurée avait subi différents examens neuro-ophtalmologiques et une évaluation neuropsychologique. Le poste de travail avait été aménagé, dans le cadre de l'intervention du service de placement de l'OAI, pour tenir compte de ses troubles ophtalmologiques (écrans d'ordinateur spéciaux). Le diagnostic posé (maladie de Lyme) était mis en doute par les Dr F______ et G______, ce dernier diagnostiquant un déficit vestibulaire brusque à gauche, mal compensé, présent depuis possiblement mars 2005, attestant du caractère handicapant d'une telle atteinte dans la profession de l'assurée. Il avait adressé cette dernière à une physiothérapeute spécialisée en rééducation des troubles de l'équilibre. Dans son dernier rapport (4 juin 2008), ce spécialiste avait conclu que, malgré un traitement approprié, le déficit vestibulaire était toujours présent. Selon lui une réadaptation professionnelle était indispensable.

10.    Diverses démarches avaient été entreprises pour l'adaptation supplémentaire du poste de travail de l'assurée, cette dernière, aimant son travail actuel, étant réticente à entreprendre une réadaptation professionnelle. Le 30 juin 2009, le SMR avait retenu que l'atteinte à la santé relevait de séquelles neuro-ophtalmologiques d'une maladie de Lyme, que la CT exigible dans l'activité habituelle, comme dans une activité adaptée, était de 75 % dès le mois de juin 2006, et que l'adaptation du poste de travail ne permettait pas d'améliorer la CT au-delà de 75 %; c'était à ce poste que l'assurée déployait le maximum de ses possibilités. Dans un rapport de réadaptation professionnelle (fin d'examen) du 4 novembre 2009, le service de réadaptation de l'OAI (ci-après: REA) avait retenu en substance que l'assurée présentait une CT de 75 % dans toute activité professionnelle adaptée, dont son activité habituelle; il en découlait que des mesures professionnelles n'entraient pas en ligne de compte et qu'ainsi il était proposé à l'OAI de considérer que l'assurée présentait un degré d'invalidité de 25 %, taux insuffisant pour ouvrir le droit des prestations économiques au sens de la loi sur l'assurance-invalidité.

11.    Par décision du 6 juillet 2010, après audition, l'OAI avait octroyé à l'assurée une rente pour une durée limitée: trois quarts de rente ordinaire du 9 au 30 mars 2006 basée sur un degré d'invalidité de 65 %, puis une demie-rente ordinaire basée sur un degré d'invalidité de 50 % du 1er avril au 31 mai 2006. Cette décision est entrée en force faute d'avoir fait l'objet d'un recours.

12.    L'assurée a continué à travailler, malgré son atteinte à la santé.

13.    Elle a toutefois déposé une nouvelle demande de prestations le 15 juin 2015, s'appuyant sur le rapport médical du docteur H______, spécialiste FMH en médecine interne, ayant succédé, dès le 11 juin 2014, à son précédent médecin traitant qui avait pris sa retraite. Elle travaillait en qualité de secrétaire 3 à 75 % auprès de la B______ de l'État. L'atteinte à la santé relevait de la maladie de Lyme. Outre son médecin traitant, elle était suivie par des spécialistes (ORL, neurologue, ophtalmologue et psychiatre). Dans son rapport médical sur formulaire OAI (révision adulte) du 4 mai 2015, le Dr H______ retenait en substance les diagnostics incapacitants de séquelles neuro-ophtalmologiques d'une maladie de Lyme (2005), de syndrome vestibulaire séquellaire et de dépression réactionnelle liée à de mauvaises conditions de travail influant sur les symptômes (F32.1, Z56.5). Quant à l'évolution et modification de l'état de santé depuis la précédente décision, il relevait une augmentation de l'intensité et de la durée des symptômes: photophobie, vertiges, nausées. Symptômes actuels: nystagmus, vertiges, céphalées, nausées, troubles de la concentration, déclenchés après la plupart des mouvements du corps ou des yeux (par ex. lecture à l'écran) ou une luminosité trop importante (par ex., face à une fenêtre). Anamnestiquement, depuis octobre 2014, nette dégradation de la symptomatologie; dans un premier temps amélioration durant le week-end avec un repos maximal, mais progressivement les symptômes devenaient plus forts, la période de récupération plus longue et, malgré un arrêt de travail, les jours asymptomatiques devenaient très rares. Constatations médicales: déficit vestibulaire avec instabilité de l'équilibre; la patiente corrigeait principalement la vue; or, l'acuité visuelle dynamique semblait réduite et la cornée était déformée. Les examens médicaux auprès des spécialistes étaient peu perturbés, la patiente étant mal surtout après: en particulier la neuropsychologue relevait que les performances étaient bonnes dans les conditions cadrées de l'examen, ce qui n'était pas représentatif de ce qui se passait dans la vie de tous les jours, où les fonctions vestibulaires étaient plus largement mises à contribution. Traitement actuel: pas de physiothérapie encadrée; exercice à domicile sur la base de ce que la patiente avait appris par le passé; l'adaptation des lentilles de contact spécifiques était en cours; psychothérapie de soutien. Elle avait été en incapacité totale de travail du 22 octobre 2014 au 16 janvier 2015, puis à 50% (du 75 %) du 16 janvier au 6 mars 2015, et à nouveau à 100 % dès le 9 mars 2015, actuellement en cours. Le généraliste traitant estimait que la CT dans la dernière activité habituelle était de 0%, et il était très difficile d'imaginer, dans l'état actuel, une activité adaptée; une fois le problème visuel amélioré/stabilisé (tant acuité que photophobie), la situation pourrait être réévaluée. Restrictions dans l'activité exercée: intolérance à la lumière forte (adaptation de l'ambiance et écran), perte de l'accommodation visuelle après 30 minutes consécutives de lecture (papier ou écran): la patiente n'arrivait plus à accommoder en fonction de la distance; récupération après plusieurs heures à plusieurs jours; faible tolérance aux déplacements et mouvements des yeux (nécessité de faire les choses lentement). Manifestation au travail: environnement adapté pouvant être source de conflits, si les locaux étaient partagés (surtout en ce qui concerne la lumière/stores). Mesures d'adaptation: sous réserve de la possible amélioration de l'intolérance aux mouvements du corps et des yeux par l'adaptation de verres de contact: optimalisation de la correction de la photophobie; besoin d'un bureau adapté (éclairage indirect, avec variateur d'intensité, rideaux, stores baissés), probablement individuel car ses besoins étaient spécifiques et difficiles à accepter pour des collègues; journées brèves (ex. 4h/j.) avec charge de travail réaliste par rapport au temps imparti; la complexité (des tâches confiées) n'était pas problématique, mais il était important que le temps soit suffisant pour pouvoir faire les choses lentement.

14.    Par avis du 14 juillet 2015, le SMR a considéré que selon les documents en sa possession, il existait une aggravation de l'état de santé de l'assurée depuis octobre 2014. Il invitait le gestionnaire de l'OAI à lancer l'instruction auprès des spécialistes traitants (Dresse I______, FMH en ORL, Dresse J______, FMH en neurologie, Dr K______, FMH en ophtalmologie, et Dresse L______, FMH en psychiatrie).

15.    La Dresse J______ a répondu à l'OAI le 11 août 2015 à un questionnaire type, auquel était annexées les copies de ses rapports de consultation spécialisée des 16 décembre 2014 et 8 avril 2015. Elle situait anamnestiquement le début de la longue maladie en juin 2014; elle admettait une CT exigible dans l'activité habituelle de 20 %, et de 50 % dans une activité adaptée; mais dans ses réponses au questionnaire, elle a indiqué que l'incapacité de travail était de 100 % dès octobre 2014 (« à vérifier avec le médecin traitant »), et de 80 % de juin 2014 à mars 2015 (date de sa dernière consultation), puis selon évolution (« à vérifier avec le médecin traitant »); selon son dernier rapport de consultation spécialisée le bilan neuropsychologique était décrit comme normalisé, en comparaison avec l'examen de 2007 et montrait uniquement une légère fragilité de l'attention soutenue, à terme. La patiente expliquait cette amélioration par sa situation actuelle, avec un travail à mi-temps et le fait que son enfant était plus indépendant. Une prise en charge ophtalmologique (en cours) avait été proposée. À la demande de la patiente, cette dernière avait été adressée à la consultation ORL pour prise en charge de la probable sinusite, mais également afin de réévaluer l'atteinte vestibulaire décrite par le passé.

16.    La psychiatre traitante (Dresse L______), a répondu à l'OAI le 18 septembre 2015. Elle suivait la patiente depuis le 24 janvier 2014, régulièrement, sur une base hebdomadaire; elle retenait le diagnostic de trouble anxieux en lien avec les troubles somatiques (depuis l'apparition des troubles de la vision et de l'équilibre); anamnestiquement, outre les troubles anxieux mentionnés, elle relevait un isolement social et professionnel ainsi que des difficultés financières; le pronostic dépendait de son état somatique et de sa situation sociale secondaire; la consultation thérapeutique hebdomadaire consistait en un travail d'adaptation à sa situation actuelle; l'état de santé physique et psychique de la patiente ne lui permettait pas de reprendre une activité professionnelle actuellement; les incapacités physiques entraînaient une incapacité psychique; la patiente avait un sentiment d'incapacité, et se forçait à accomplir sa mission malgré ses incapacités physiques, jusqu'à l'effondrement.

17.    L'ORL traitante (Dresse I______) a établi un rapport le 29 septembre 2015. Elle retenait le diagnostic de déficit vestibulaire gauche ancien, depuis 2008). La patiente avait été en traitement ambulatoire auprès d'elle du 13 au 16 mars 2015 (avant elle, Dr G______); elle avait suivi des traitements de physiothérapie vestibulaire en 2008 et 2014; anamnestiquement, elle notait les symptômes de vertiges, céphalées et photophobie; le déficit vestibulaire n'était pas compensé; le pronostic était réservé. Quant à la CT, elle renvoyait au médecin traitant. Pas de réadaptation possible: la patiente avait déjà fait une tentative, infructueuse.

18.    Dans un avis du 23 février 2015 (recte: 2016), le SMR, se fondant sur les conclusions des divers médecins traitants, avait de la peine à se prononcer sur la CT résiduelle (exigible) et considérait comme incontournable la mise en place d'une expertise neurologique avec volet neuro-ophtalmologie si l'expert le jugeait nécessaire. Le SMR proposait de soumettre le dossier au service de neurologie du CHUV.

19.    Le service de neurologie du département des neurosciences cliniques du CHUV (Prof M______ et Dr N______, médecin assistant) a rendu son rapport le 11 août 2016. Les experts n'ont retenu aucun diagnostic neurologique incapacitant, relevant qu'actuellement il n'existait aucun argument en faveur d'une neuroborréliose; pour les troubles fonctionnels ils ont insisté sur la nécessité d'un suivi psychiatrique. Les experts considéraient la CT comme entière (100 %) tant pour l'activité exercée à ce jour que dans une activité correspondant aux aptitudes de l'assurée.

20.    Dans un avis du 6 décembre 2016, le SMR, rappelant les divers avis des médecins traitants, a relevé que les experts CHUV avait retenu dans les constatations objectives une oculomotricité discrètement saccadée, une diplopie, une diminution de la sensibilité au niveau V1 et V2 gauche, une hypoesthésie de tout le bras gauche et de l'hémi-abdomen, à partir du nombril à gauche jusqu'à tout le membre inférieur gauche; les troubles neurologiques étaient en rapport avec une surcharge fonctionnelle, la CT étant selon eux de 100 % dans l'activité habituelle et dans une activité adaptée. Le SMR s'écartait des conclusions des experts pour les raisons suivantes: les troubles sensitifs de la branche gauche du trijumeau, avec photophobie, étaient décrits depuis 2005 par le Prof O______, médecin-chef du service d'ophtalmologie des HUG, qui évoquait la présence d'une neuropathie (rapport du 7 décembre 2005); une IRM cérébrale pratiquée en mars 2006 avait montré une prise de contraste évoquant un processus inflammatoire des espaces méningés, que le Dr P______, neurologue aux HUG, décrivait déjà à l'époque (troubles sensitifs de l'hémicorps gauche); dans son avis du 7 novembre 2007, le Dr G______ décrivait un déficit vestibulaire gauche mal compensé, avec un test Halmagyi positif à gauche, responsable de la photophobie, des céphalées avec nausées et vomissements. Sur le plan psychiatrique, le psychiatre traitant qui prenait l'assurée en charge depuis 2014, ne faisait jamais état d'une pathologie psychiatrique pouvant être à l'origine d'une surcharge fonctionnelle. A lecture de l'ensemble des pièces médicales, le SMR avait de la peine à comprendre les divergences des différentes prises de position des spécialistes et de l'expert concernant la CT. En effet, ce dernier considérait qu'elle était de 100 %, tout en retenant des limitations fonctionnelles. Le SMR proposait une mise en situation (COPAI), afin de lever les doutes et se prononcer sur la CT, en tenant compte des limitations fonctionnelles suivantes: intolérance à la lumière, troubles de l'équilibre, céphalées, pas de travail avec stimuli visuels ou mouvements de la tête; pas de travail sur un plan instable, pas de travail devant un écran, ou en hauteur.

21.    Un premier entretien a eu lieu le 4 avril 2017, dans le cadre de la mesure de réadaptation professionnelle proposée. Depuis la précédente entrevue (précédente demande de prestations), l'assurée avait repris son activité habituelle à 75 % moyennant certaines adaptations. En juin 2014, elle avait ressenti une péjoration de son état, elle avait rechuté notamment sur le plan visuel et de l'équilibre. À son retour de vacances, elle avait rencontré des difficultés par rapport à l'une de ses collègues qui partageait le bureau avec elle et qui ne supportait pas la luminosité avec les stores baissés. En octobre 2014, elle était à nouveau en incapacité totale de travail. En juillet 2015 elle avait tenté une reprise à 25 %; devant coacher une nouvelle collaboratrice, elle n'avait tenu que quelques jours. Elle avait tenté sans succès de solliciter les RH, le SPE et le groupe de confiance. Elle avait été licenciée pour fin février 2016, ayant épuisé son droit au traitement en cas de maladie. Elle vivait actuellement d'une rente LPP provisoire et sa fille l'aidait à payer le loyer. Elle décrivait des vertiges et un « mal de mer » continu, avec des nausées. Les symptômes s'accentuaient en cas de sollicitation visuelle comme la lecture ou de stimuli en vision périphérique, de mouvements de la tête, et de mouvements oculaires. Chaque étape de sa journée lui demandait du repos et de la récupération dans une position spécifique afin de lui faire passer les nausées. Ce phénomène se produisait après les repas et elle était contrainte de se reposer dans une position spécifique (mi-assise/mi-couchée), pendant une période pouvant durer plusieurs heures. Sur le plan professionnel, elle estimait ne plus être en mesure de produire quoi que ce soit, la gestion de son quotidien étant déjà largement entravée. Elle s'était montrée perplexe lorsque le service de réadaptation lui avait expliqué le principe d'une mesure COPAI (art. 69 RAI). Elle indiquait souhaiter collaborer, mais, craintive, s'interrogeait sur l'impact qu'aurait une telle mesure dans son quotidien, et sur les implications en termes de récupération; il lui avait été expliqué que ces mesures pouvaient être adaptées et qu'elle serait médicalement encadrée.

22.    À la suite de cet entretien, une mesure d'observation professionnelle a été octroyée, auprès des Établissements publics pour l'intégration (EPI) du 19 juin au 16 juillet 2017.

Dans un rapport de synthèse du 8 août 2017, les EPI ont conclu à l'impossibilité d'envisager une période de réadaptation dans le premier marché de l'emploi, même à temps partiel. L'assurée avait participé à cette mesure à mi-temps (aucune augmentation du temps de présence n'avait pu être envisagée), son rythme de travail, son tonus et sa résistance physique étaient inexploitables dans le milieu économique. Toutes les activités (position assise à privilégier) et/ou les déplacements étaient effectués avec précaution et lenteur, l'assurée maintenant le cou raide et le regard fixe afin d'éviter tout mouvement de la tête et/ou mouvements brusques pouvant déclencher des vertiges, nausées et perte d'équilibre. De plus, elle cherchait en permanence à se protéger de la lumière (elle portait un chapeau et des lunettes médicales sombres), ce qui avait nécessité de limiter au maximum les sources lumineuses. Les adaptations répétées de l'environnement et du poste de travail ainsi que l'aménagement systématique de toutes les tâches (interruption régulière après 20 minutes, seules quelques étapes étaient réalisées dans chaque service, temps de récupération long, ) n'avaient permis d'effectuer qu'une partie très restreinte des exercices d'évaluation, rendant toute mesure de rendement impossible. Les compétences pressenties suite au poste occupé, de secrétaire de direction, n'avaient pu être mises en valeur, tout travail derrière un écran étant arrêté après quelques minutes; s'ajoutaient des craintes permanentes de l'assurée quant à son état de santé. Ce contexte très adapté ne correspondait pas aux exigences de retour dans le milieu économique. L'assurée avait été sortie des effectifs des EPI au 16 juillet 2017.

23.    Dans un rapport du 3 août 2017, le Docteur Q______, FMH en médecine interne générale et médecin consultant des EPI relevait que l'assurée se plaignait de troubles multiples présentés de manière très spectaculaire, ce qui laissait penser que la composante subjective était majeure dans les signes allégués. Elle se plaignait principalement de troubles de la concentration, de troubles visuels avec photophobie, et de perturbation de l'équilibre, accompagnés de nausées au moindre mouvement. Le comportement adopté (port de chapeau, de lunettes sombres, recherche de locaux assombris incompatibles avec une activité professionnelle) rendait toute évaluation professionnelle pratiquement irréalisable (aucun rendement dans aucune activité testée). On peinait cependant à comprendre comment l'assurée, avec ce comportement, avait réussi à venir au COPAI au volant de sa voiture, de même qu'elle irait, selon elle, au cinéma au moins une fois par mois Il semblait que toutes les propositions thérapeutiques faites au cours des dernières années avaient été disqualifiées (sans le moindre effet). Il lui paraissait actuellement impossible de poser un diagnostic neurologique ou physique cohérent, rejoignant en cela les conclusions du Prof M______(expertise neurologique du CHUV). Face à une inobservabilité complète, un comportement dont la cohérence échappait, à des conclusions médicales contradictoires, force était de conclure que toute activité professionnelle suivie était impossible actuellement, quelles qu'en soient les raisons.

24.    L'OAI, suivant l'avis du SMR du 29 août 2017, a dès lors considéré qu'une nouvelle expertise neurologique était nécessaire.

25.    Par courrier du 29 septembre 2017, l'assurée a contesté le rapport des EPI: ce document comportait des incohérences et surtout des faits non réels. Dès le premier jour de son stage, les EPI lui avaient fait comprendre que son cas était particulier et qu'ils ne disposaient pas des structures adéquates pour réaliser son évaluation. Pendant toute la période d'expertise elle avait été exposée non seulement à un environnement trop lumineux, mais elle avait dû monter et descendre les escaliers, avait été soumise à des stimuli visuels accrus, mais elle avait également subi de l'isolement, ainsi que des propos déplacés et non professionnels. Tous les étages étant illuminés par de grandes fenêtres et des néons, ses déplacements avaient pu se faire avec le port d'un chapeau et de lunettes foncées (pour contrer la photophobie). Les salles qui lui avaient été attribuées étant inadéquates en termes de luminosité, il ne lui était plus possible de contrer le déclenchement de la photophobie suivie de nausées et de vertiges, rendant sa vision de plus en plus floue et donc tous ses mouvements plus lents. Elle avait néanmoins continué à faire son possible pour accomplir au mieux les tâches demandées. Son état se dégradait de jour en jour; elle avait présenté un certificat médical, le 3 juillet 2017, attestant de son incapacité visuelle à effectuer des exercices écrits. Cette consigne médicale avait été refusée, l'exercice ayant continué jusqu'au dernier jour (14 juillet 2017). Elle a relevé divers passages du rapport, remettant dans le contexte les propos qui lui étaient attribués. Elle s'était sentie insultée et offensée par certains propos tenus à son égard par le responsable du stage ou le médecin consultant. Elle a produit divers documents médicaux, établis à sa demande, notamment par son médecin traitant et sa psychiatre, appuyant les commentaires de leur patiente par rapport au déroulement du stage d'observation professionnelle et du rapport des EPI. En substance, le médecin traitant s'est dit choqué par le traitement qui avait été réservé à sa patiente, et la psychiatre traitante a observé que ce qui était décrit comme des plaintes subjectives dans le rapport des EPI correspondait pourtant à la réalité quotidienne de sa patiente, laquelle possédait des ressources pour surmonter ses problèmes de santé, une bonne estime d'elle-même et des capacités d'adaptation.

26.    Le premier expert pressenti ayant décliné la mission qui lui était confiée, le SMR a préconisé de confier cette expertise au professeur R______, spécialiste FMH en neurologie, qui a rendu son rapport le 9 août 2018. Selon cet expert, l'évaluation neurologique, neuropsychologique, ainsi que l'IRM actuelle permettent d'écarter toute pathologie neurologique organique évolutive ou séquellaire. L'évaluation révèle en revanche des signes fonctionnels, notamment lors des tests neurologiques de coordination, mais il n'y a pas d'élément en faveur d'un effort submaximal lors des tests de validation neuropsychologique. Par ailleurs, l'expert confirme l'absence d'arguments en faveur d'une ancienne neuroborréliose. L'évolution clinique était caractérisée par la fluctuation depuis 2005 autour des mêmes plaintes, essentiellement dans le cadre de ce qui a été objectivé comme une atteinte vestibulaire brusque du côté gauche, sans pathologie ophtalmologique pouvant expliquer la photophobie et les troubles visuels. Cela dit, l'évolution objective était certainement favorable, comme déjà constaté dans l'expertise neurologique du CHUV, et lors de l'évaluation actuelle qui ne montrait pas d'atteinte significative au niveau vestibulaire séquellaire. Malgré des fluctuations dans l'incapacité professionnelle, et sans causalités psychologiques ou organiques démontrées pour la péjoration de 2014, force était de relever l'absence de toute pathologie organique neurologique permettant d'expliquer une incapacité de travail même partielle. La patiente ne prenait aucun traitement et par ailleurs s'estimait incapable de reprendre toute activité professionnelle en relation avec ses plaintes, malgré l'absence de substrat organique. Il n'y avait pas de suivi psychiatrique régulier, malgré les consultations épisodiques chez la Dresse L______, et ceci devrait peut-être être révisé à la vue de la négativité d'une cause cérébrale organique. Au niveau de la cohérence et de la plausibilité, les éléments objectivables étaient purement fonctionnels et ne traduisaient pas de pathologie organique sous-jacente, même séquellaire. Il estimait qu'un avis d'expert psychiatre pourrait être utile vu la situation anticipée sur le plan professionnel et les limitations privées décrites par la patiente. Quant aux capacités, ressources et difficultés, l'expert ne retenait aucune limitation objective d'origine organique qui permette de justifier une limitation des activités privées ou professionnelles, tant sur le plan neurologique de base que sur le plan cognitif. En conclusion l'expert estimait que la CT dans l'activité exercée jusqu'ici était de 100 % sur le plan neurologique organique, à évaluer éventuellement sur le plan psychiatrique; mêmes conclusions et observations par rapport à la CT dans une activité adaptée.

27.    Par avis médical du 20 septembre 2018, le SMR a rappelé qu'au vu de nombreuses incohérences du dossier en particulier celles relevées par le Dr Q______, une nouvelle expertise neurologique avait été effectuée en juillet 2018. Devant la normalité des examens neurologiques, neuropsychologiques et des examens complémentaires, en particulier l'angio-IRM cérébrale et cervicale, l'expert excluait toute atteinte neurologique. Il préconisait un avis psychiatrique. Au vu de la concordance des deux rapports d'expertises neurologiques, on pouvait conclure que l'assurée ne présentait pas d'atteinte neurologique, en particulier les conséquences d'une neuroborréliose. Mais il était nécessaire, pour se positionner sur les conséquences du trouble de conversion (évoqué par l'expert), de demander une expertise psychiatrique.

28.    L'experte désignée, la doctoresse S______, FMH en psychiatrie et psychothérapie, a rendu son rapport le 2 janvier 2019. L'experte n'a retenu aucun diagnostic psychiatrique invalidant et, sans effet sur la CT, le diagnostic d'épisode dépressif réactionnel, actuellement en rémission (F32), depuis 2014. Elle a précisé à cet égard que ses médecins traitants évoquaient une symptomatologie dépressive réactionnelle, mais sans jamais en détailler les symptômes et sans qu'un traitement antidépresseur n'ait été nécessaire; les échanges avec l'expert n'avaient pas permis d'apporter plus de précisions quant à ses symptômes dépressifs réactionnels. Lors des entretiens, l'expertisée n'évoquait aucun élément dépressif floride tout au long des années ayant suivi le début de sa maladie en 2005, et de même quand elle évoquait avoir pris pendant trois ans un traitement antidépresseur à la fin des années 90', ne rapportant aucun symptôme dépressif actif, mais plus un traitement qui aurait été introduit en préventif. Cette explication semblait peu plausible au vu de la pratique usuelle de l'utilisation des traitements antidépresseurs; ainsi, l'experte retenait comme possible qu'à cette époque elle ait présenté une réelle symptomatologie dépressive pour laquelle ce traitement aurait été introduit, et qu'elle n'en gardait pas de souvenirs, car elle n'aurait pas ressenti alors un impact sur son quotidien; sans rapport médical de l'époque on ne pouvait toutefois pas retenir comme certitude cette hypothèse et l'on ne pouvait ni confirmer ni infirmer un épisode dépressif à la fin des années 90'. L'expertisée s'étant battue toute sa vie pour avancer, mettant en place d'importants mécanismes de défense de type refoulement et rationalisation, la reconnaissance pour elle de la présence réelle de symptômes dépressifs (passés, à la fin des années 90', et depuis 2014 puisque rapporté par ses thérapeutes sous forme d'une dépression réactionnelle) pourrait être assimilée à un échec de sa résilience pour laquelle elle mettait toute son énergie depuis tant d'années. Le détail des observations de l'experte seront évoqués dans la mesure utile dans les considérants. L'experte estimait néanmoins important qu'elle poursuive sa thérapie actuelle, celle-ci lui permettant peut-être avec le temps d'accéder à ses émotions dépressives sans que cela n'entraîne un effondrement dépressif, mais aussi narcissique et une dépression franche réactionnelle. Raison pour laquelle elle retenait le diagnostic de dépression réactionnelle sur la base des rapports médicaux des médecins traitants qui en faisaient mention, en rémission vu l'absence de symptomatologie dépressive à l'examen, et donc non invalidant. Au vu des symptômes somatiques présentés par l'expertisée, l'examinatrice a par ailleurs recherché la présence possible d'un trouble somatoforme, mais ne l'a pas retenu. Au vu des motifs pour lesquels le SMR avait retenu comme nécessaire la mise en place d'une expertise psychiatrique (conséquences du), l'experte n'a pas non plus retenu le diagnostic de trouble de conversion évoqué par l'expert neurologue. En termes d'évolution personnelle et professionnelle ainsi que de l'état de santé, y compris de la situation psychique sociale et médicale actuelle de l'assurée, l'experte a retenu qu'actuellement l'intéressée décrivait un impact majeur des symptômes vestibulaires sur son quotidien, ce que confirmaient ses médecins traitants, mais sans impact sur sa santé psychique. Les limitations de ses activités étaient en lien direct, selon l'expertisée, avec ses symptômes somatiques et les difficultés financières qui découlaient de son absence de revenus depuis plus de deux ans, mais pas en lien avec une quelconque souffrance psychique. Quant à l'évolution à ce jour des traitements, mesures de réadaptation, etc., et discussion des chances de guérison, l'assurée était au bénéfice d'une prise en charge psychothérapeutique depuis 2014, suspendue durant six mois en 2018 car la patiente n'en voyait pas la nécessité, mais reprise spontanément depuis octobre dernier après que l'expertise neurologique de juillet 2018 ait suggéré une atteinte psychiatrique à l'origine de sa symptomatologie. Aucune thérapeutique médicamenteuse récente n'était rapportée. L'examinatrice estimait que la poursuite de la prise en charge psychothérapeutique était importante même en l'absence de diagnostic psychiatrique, mais une telle prise en charge ne pouvait pas être exigible; elle ne pouvait qu'être recommandée. L'experte avait également passé en revue la cohérence et la plausibilité, n'objectivant aucun élément divergeant dans le cas particulier. Quant aux capacités ressources et difficultés, l'expertisée avait montré, lors des entretiens, une évidente envie d'aller mieux, ce que confirmaient ses médecins traitants, la décrivant comme compliante et impliquée activement dans ses soins. Du point de vue psychiatrique, l'experte ne retenait aucune limitation fonctionnelle et concluait à une CT pleine et entière dans toute activité (habituelle de secrétaire et toute activité correspondant à ses aptitudes).

29.    Dans un avis du 1er mars 2019, le SMR reprenant les éléments médicaux recueillis dans le cadre de la nouvelle demande de prestations, et les conclusions de l'expertise psychiatrique, a retenu qu'au vu de l'absence d'atteintes psychiatrique et neurologique avérées, il fallait considérer que la situation médicale de l'assurée ne s'était aucunement modifiée depuis la précédente décision de 2010.

30.    Le 2 juillet 2019 le service REA a conclu qu'au vu des conclusions du SMR qui ne retenait aucune atteinte neurologique ni psychologique dans son dernier avis, les conditions pour des mesures professionnelles n'étaient pas remplies.

31.    Par courrier du 29 août 2019, l'OAI a adressé à l'assurée, en son domicile élu, Caritas, un projet de refus de prestations. Après une nouvelle étude de l'ensemble des pièces du dossier, dans le cadre de la nouvelle demande (15 juin 2015), après expertises et bilan d'observation, l'office ne reconnaissait aucune aggravation depuis la décision du 6 juillet 2010.

32.    Par courrier du 30 septembre 2019, l'assurée, représentée par son mandataire, a contesté le projet de décision susmentionné. Depuis 2005, elle souffrait d'une borréliose provoquant principalement des troubles de la vue (photophobie) et de l'oreille interne avec nausées et pertes d'équilibre. En raison de ses affections, et malgré une prise en charge médicale pluridisciplinaire régulière, elle n'était jamais parvenue à reprendre l'exercice d'une activité professionnelle. Sur le plan personnel elle était très limitée dans toutes ses activités quotidiennes, ne supportant ni le bruit ni la lumière et se sentant très agressée en cas d'exposition à ces éléments; sa vie sociale se retrouvait également très limitée. L'OAI était ainsi prié de revoir sa position et de la mettre au bénéfice de prestations de l'assurance-invalidité.

33.    Par courrier du 15 octobre 2019, l'OAI a notifié à l'assurée, une décision par laquelle il n' "entrait pas en matière" sur la demande de prestations, reprenant les éléments du projet de décision.

34.    Par mémoire du 18 novembre 2019, l'assurée, représentée par son nouveau conseil, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'un recours contre la décision susmentionnée. Elle concluait principalement à l'annulation de la décision entreprise et à l'octroi d'une rente d'invalidité à 100 % à compter du 15 juin 2015 et, subsidiairement, au renvoi du dossier à l'intimé pour nouvelle décision avec l'injonction de prendre en compte toutes les affections à sa santé; le tout avec suite de frais, dépens et indemnité. Dans le rappel des faits d'instruction de la procédure administrative, elle s'en prenait essentiellement au stage d'observation auprès des EPI et au rapport final de cette institution, relevant que ses propres observations et celles de son médecin traitant au sujet de la manière dont cette mesure professionnelle avait été conduite et ses conséquences sur la dégradation de son état de santé n'avaient pas été prises en compte par l'intimé. L'OAI, persistant à refuser de prendre en compte son état de santé, écartant systématiquement en particulier la vestibulopathie, le déficit vestibulaire périphérique, les vertiges visuels et les nombreuses conséquences dues à la compensation que son cerveau effectue, avait notifié une décision de refus de mesure professionnelle et de rente. Elle avait consulté le professeur T______ à l'hôpital ophtalmique Jules-Gonin à Lausanne. Ce spécialiste avait rendu son rapport en date du 28 janvier 2019: ses conclusions étaient incontestables, ce spécialiste expliquant que la patiente avait été diagnostiquée avec une vestibulopathie ainsi que des vertiges visuels. Sur la base des recommandations du Prof T______, elle avait consulté la Prof U______ a l'Hôpital de l'Ile à Berne, laquelle, dans son rapport du 27 septembre 2019, confirmait les conclusions de ses confrères et consœurs, constatant qu'actuellement la patiente souffrait toujours d'un conflit visuo-vestibulaire important, qui la handicapait dans sa vie quotidienne, malgré les différentes mesures, en partie de correction visuelle, qui avaient été entreprises. La recourante reprochait en substance à l'OAI d'avoir fait appel en tant qu'experts, certes à deux éminents neurologues, mais dont l'un serait spécialisé dans les maladies cérébro-vasculaires, et l'autre dans les maladies démyélinisantes comme la sclérose en plaques, alors que, compte tenu de sa problématique, de toute évidence complexe, il eut été judicieux de se tourner vers un expert mieux focalisé, tel que les Prof T______ et U______. Elle observait que cette dernière, spécialiste ORL, dirigeant l'oto-neurologie du Centre des vertiges de l'hôpital bernois, avait débuté son suivi et rendu son rapport le 27 septembre 2019: elle était absolument affirmative sur l'existence d'une atteinte spécifique (polynévrite des nerfs crâniens V1 et VII gauches) avec l'existence d'un conflit visuo-vestibulaire important à l'origine des vertiges et de la fatigue cognitive. Elle estimait qu'une rééducation valait la peine d'être tentée pour obtenir certaines améliorations à long terme. Elle déclarait également qu'il était clair que sur le plan professionnel, actuellement, une réintégration n'était pas envisageable dans le contexte d'une place de travail en dehors de chez elle, confirmant ainsi l'évaluation du Prof T______ qui ne pouvait pas être affirmatif sur une solution pour la lecture de près. (Ndr. Le détail des rapports de ces deux médecins seront évoqués dans la mesure utile dans les considérants). La recourante remarquait que l'« observation ratée aux EPI » était un exemple concret supplémentaire de sa santé très fragile et des atteintes très handicapantes dans sa vie quotidienne, et donc dans une activité professionnelle. Par conséquent, la réadaptation n'étant pas possible pour l'instant, elle avait droit à une rente d'invalidité à 100 %.

35.    L'intimé s'est prononcé par courrier du 16 décembre 2019, auquel était annexé un nouvel avis du SMR du 16 décembre 2019. Il a conclu au rejet du recours. Il a précisé d'emblée qu'il fallait comprendre sa décision comme un refus de prestations et non pas comme refus d'entrée en matière. L'OAI était surpris par l'argumentation soutenue par la recourante au sujet du contenu des avis du SMR, dont elle citait des extraits manifestement altérés tout en s'indignant d'un contenu ne correspondant clairement pas au rapport visé, certains passages de son recours énonçant même le contraire de ce qu'écrivait l'auteur du rapport. La recourante se plaignait aujourd'hui du choix des experts, alors que tant en ce qui concerne la désignation du Prof M______ que celle du Prof R______, la procédure suivie respectait scrupuleusement son droit d'être entendue et elle n'avait formulé à cet égard aucune remarque. Dans la mesure où les nombreuses expertises diligentées avaient précisément pour but d'élucider la nature de l'atteinte à la santé et son éventuelle aggravation, il était superflu de considérer que les spécialistes qualifiés ne sauraient se prononcer sur l'état de santé de la recourante. Le mandat d'expertise 2016 avait été confié au service de neurologie du CHUV, précisant qu'un volet neuro-ophtalmologique pouvait être réalisé si les experts le jugeaient nécessaire. Par ailleurs, les rapports produits par les médecins de l'assurée ne faisaient pas état d'une aggravation notable de sa santé, et relevaient majoritairement des éléments déjà connus de l'office et pris en compte dans la précédente décision (2010). Les critiques à l'égard du rapport des EPI n'étaient pas fondées, notamment en ce qui concerne les contradictions mises en évidence entre les plaintes de l'assurée et son comportement au quotidien, contradictions d'ailleurs également relevées dans le rapport d'expertise du Prof R______. Enfin, les nouvelles pièces médicales produites à l'appui du recours (rapports des Prof T______ et U______) datés respectivement des 29 janvier et 27 septembre 2019 – ndr. antérieurs à la décision entreprise - confirmaient, comme le relevait le SMR dans son avis (annexé à la réponse au recours), les atteintes déjà retenues dans le cadre de la procédure antérieure, sans évolution notable: la Prof U______ mettait en effet en évidence un déficit vestibulaire périphérique gauche (canalaire et partiellement otolithique), toujours mal compensé chez cette assurée présentant des symptômes liés à un conflit visuo-vestibulaire. Ce médecin précisait que l'assurée aurait dû bénéficier dès le départ d'une physiothérapie vestibulaire plus intensive. À ce sujet, le SMR rappelait que le Dr G______ (ORL - Otoneurologie HUG), dans ses rapports des 12 novembre 2007 et 4 juin 2008, signalait une atteinte vestibulaire périphérique mal compensée, gênant l'assurée dans son travail devant l'ordinateur. Il indiquait la nécessité d'une physiothérapie vestibulaire. La Prof U______ signalait qu'en 2014 l'assurée présentait une presbytie qui allait déstabiliser l'ensemble de ses entrées visuelles avec des troubles de focalisation et de lecture. Le Prof T______ conseillait l'utilisation de verres mono-focale au lieu de verres progressifs, notamment à l'extérieur lors des déplacements. La Prof U______ évoquait des troubles cognitifs; le Prof R______ et la Dresse S______, dans leurs expertises respectives, en 2018, avaient toutefois retenu l'absence de troubles neuropsychologiques. Quant au Prof T______, après un examen neuro-ophtalmologique minutieux, ce spécialiste ne retenait aucune pathologie oculaire, notamment aucune dysfonction des voies visuelles afférentes et aucun trouble oculomoteur; l'assurée ne présentait qu'un astigmatisme mixte et une presbytie; selon lui les plaintes de l'assurée étaient évocatrices de deux problèmes distincts liés: - une vestibulopathie pouvant expliquer les vertiges visuels. Cette sensation survenait quand l'input visuel ne correspondait pas à l'input vestibulaire; - dans le cadre de la presbytie, l'assurée éprouvait des difficultés avec les verres progressifs; d'où la proposition de lunettes mono-focale pour la distance, lorsqu'elle se promenait; et pour le travail, elle pourrait porter soit des verres progressifs soit des verres de proximité/verres de travail type Acces. Ainsi les éléments au dossier ne permettaient pas de retenir une nouvelle atteinte à la santé, ni une aggravation notable de l'état de santé de l'assurée.

36.    Par courrier du 27 janvier 2020, le conseil de la recourante a transmis à la chambre de céans un courrier de sa mandante, adressé personnellement à la juridiction, à titre de réplique; document complété par un courrier de son médecin généraliste traitant, adressé lui aussi à la chambre de céans, aux bons soins de sa patiente.

En substance, la recourante rappelait que son atteinte à la santé remontait à 2005. Il avait fallu attendre deux ans pour qu'un diagnostic permettant un traitement adéquat fût trouvé. Entre-temps elle avait formulé une demande de prestations AI. Elle avait pu retrouver une capacité de gain à 75 % en 2007, tout en pouvant assumer en plus ses obligations quotidiennes. C'est ainsi que sa demande de prestations avait été rejetée en 2010. Elle avait pu tenir la situation jusqu'à ce que sa vision de près et la mobilité synchronisée des deux yeux ne la lâchent en 2014. Elle était désormais privée de son endurance pour accomplir non seulement les tâches et activités se situant à longueur de bras (lire, écrire, cuisiner, etc.) mais aussi de pouvoir compenser et gérer la perte vestibulaire ainsi que de répondre aux exigences de son métier et de la vie quotidienne. Ce nouvel état l'avait conduite à présenter une nouvelle demande AI en 2015, n'étant plus capable de travailler, et à peine de gérer son quotidien moyennant une organisation très précautionneuse. L'intimé persévérait à prétendre que son état ne s'était pas aggravé depuis 2010, alors que ses médecins traitants l'avaient mise en arrêt de travail et qu'elle continuait à suivre un programme de rééducation vestibulaire, en utilisant quatre paires de lunettes pour aider ses yeux à faire leur travail, de loin, de près, dans une forte luminosité ou non. Elle reprenait ensuite ses critiques à l'égard du stage d'observation professionnelle aux EPI et la manière dont elle y avait été traitée. Depuis mai 2019 elle exerçait une nouvelle rééducation vestibulaire prescrite par la Prof U______, qui pouvait s'appliquer en effectuant les activités du quotidien dans un environnement adapté : elle décrivait ainsi la répartition de ses occupations sur la semaine. Toutefois, malgré tous les moyens auxiliaires de vue et une rééducation vestibulaire assidue, ses capacités n'atteignaient pas la stabilité et l'endurance qui lui avait permis de reprendre le travail en 2007. Ainsi ne pouvait-elle accepter qu'on lui refuse le droit aux prestations de l'assurance-invalidité, tant pour une réorientation ou réinsertion professionnelle que sur le plan financier (rente). Évoquant le diagnostic posé par le Dr G______, à l'époque, évoquant une forte dépendance visuelle, - il retenait un déficit vestibulaire brusque à gauche, mal compensé -, elle allègue que le mot « brusque » traduisait bien la soudaine dégradation de sa situation en 2014 et le caractère aggravé de son atteinte actuelle, comparativement à la situation passée et ouvrait très probablement un droit à une rente complète de la part de l'assurance-invalidité. Dans son courrier du 26 janvier 2020, le Dr H______ expliquait sa démarche comme un complément au courrier de sa patiente, sous forme d'un apport théorique pour soutenir la compréhension de la situation de la recourante par un lecteur non médecin. Il décrivait ainsi les mécanismes et l'interaction des diverses sources d'information de l'organisme humain permettant d'assurer le sens de l'équilibre.

37.    L'intimé s'est déterminé par courrier du 6 février 2020, après avoir soumis le courrier du Dr H______ au SMR. Ce service médical a observé dans un avis du 5 février 2020 que la pièce nouvelle ainsi produite n'apportait aucun élément clinique objectif nouveau du cas d'espèce, le médecin expliquant la physiopathologie en lien avec les troubles de l'équilibre.

38.    Le conseil de la recourante a sollicité l'audition de son médecin traitant généraliste ainsi que de sa psychiatre, par courrier du 28 février 2020.

39.    La chambre de céans a entendu les parties en comparution personnelle le 14 septembre 2020:

La recourante a déclaré qu'elle n'avait pas de traitement médicamenteux. Le seul traitement qu'elle suivait actuellement consistait dans une méthode de rééducation auprès de la Dresse U______ à Neuchâtel; elle n'avait pas de séances régulières au cabinet. Elle lui avait remis une brochure qui décrit les exercices à faire au quotidien pour lui permettre de compenser la perte des fonctions du vestibule de l'oreille interne avec la vue: chaque déplacement de la tête était compensé avec les yeux, car si elle dissociait les mouvements de la vue, des nausées, vertiges et vomissements apparaissaient très rapidement. Lorsqu'elle faisait sa lessive, elle était en principe assise sur un petit tabouret, pour lui permettre les mouvements nécessaires, et réduire ainsi le temps de récupération après ses activités. Au niveau ménager, elle préparait à manger, mais ne passait ni l'aspirateur ni ne nettoyait les sols. Pour passer la poussière, elle devait procéder très lentement et en plusieurs étapes. Ce genre d'activités la fatiguaient très vite: cela déclenchait très vite des vertiges, et elle devait alors se reposer dans une pièce sombre, les yeux fermés, immobile jusqu'à l'atténuation des symptômes. S'agissant des consultations de la Dresse U______, la fréquence était d'une fois tous les 3 mois; le prochain rendez-vous aurait toutefois lieu au début de l'année prochaine. Lors du dernier entretien, au mois d'août sauf erreur, elle lui avait conseillé de retourner voir le Prof. T______, pour voir ce qui pouvait être entrepris pour améliorer la perspective visuelle et éviter le déclenchement des symptômes habituels. La première fois qu'elle l'avait vu, il préconisait la prescription de plusieurs paires de lunettes (pour la vision de près et de loin). Toutefois, d'accord avec lui, elle avait décidé avec le Dr V______ de faire des lunettes à verres progressifs, bombés pour pouvoir aménager les filtres de protection et bénéficier de cette protection sur les côtés. Elle voyait son ophtalmo en principe une fois par année, depuis 2019. Avant c'était une fois tous les 3 mois, avec chaque fois ou presque la modification de la correction visuelle. Elle ne voyait plus de neurologue : la Dresse J______ l'avait reçue une fois au début de son suivi auprès du Dr H______, dans le cadre d'un bilan complet, mais la neurologue lui avait indiqué que sa problématique, ORL et ophtalmo, n'était pas de son ressort. Elle consultait encore, à la demande, sa psychiatre traitante, la Dresse W______, mais ne pratiquait toutefois aucune thérapie auprès d'elle; pas de médicaments non plus à prendre dans ce domaine-là. Elle était en revanche toujours suivie, à la demande aussi, par le Dr H______, son médecin traitant généraliste, qui ne la traitait toutefois pas pour son affection invalidante. Elle a expliqué que lorsque son état de santé s'était détérioré, en 2014, elle avait consulté la Dresse W______, car elle avait besoin d'un soutien pour affronter sa situation en relation avec l'environnement où elle devait vivre avec les autres avec l'aggravation de son état, gérer ses relations professionnelles et familiales, sans que l'émotionnel prenne le dessus. Elle a persisté à solliciter l'audition de son généraliste traitant, doutant fort que la Prof U______ se déplace pour venir témoigner.

40.    La chambre de céans a procédé à l'audition du Dr H______ le 8 février 2021; l'intimé, excusé, ne s'étant pas présenté.

41.    Le témoin a déclaré être le médecin généraliste de la recourante depuis janvier 2014. Hormis les problèmes médicaux en rapport avec la demande de prestations AI en cours, il s'était occupé de problèmes divers, par exemple d'une hypercholestérolémie qui n'est pas invalidante en tant que telle. Il la voyait environ 7 à 8 fois par année. Lors des consultations, les problèmes médicaux évoqués sont beaucoup en lien avec ses problèmes de vision et d'équilibre, mais cela était plus intense au début de son intervention, car une dégradation de ses capacités était apparue, notamment en lien avec l'installation de la presbytie, ce qui avait déséquilibré la situation à l'époque. La situation était par la suite devenue également plus intense au niveau des consultations, à l'époque du stage d'observation aux EPI, période qu'il qualifiait de "calamiteuse". S'agissant de l'aggravation de l'état de santé, au cœur de la problématique juridique, il n'avait, à un double titre, pas pu évaluer personnellement l'aggravation de l'état de santé par rapport à l'état antérieur (en raison de ma spécialité médicale de généraliste, mais aussi parce qu'il avait commencé à suivre sa patiente au moment de la retraite de son précédent généraliste). Néanmoins, en faisant connaissance avec elle, il avait recueilli ses plaintes et impressions qui, ajoutées au dossier dont il disposait, lui permettaient de constater la cohérence entre les plaintes et la présentation clinique. Il avait en réalité fonctionné comme un "chef de gare": son rôle consistait à orienter la patiente vers les bons spécialistes, et également à recueillir et analyser les divers rapports médicaux de ces derniers; il centralisait l'information. Sa patiente voyait toujours des spécialistes, mais à une fréquence bien réduite: sa problématique était désormais bien identifiée, la spécialiste principale étant la Dresse U______ à Neuchâtel, qui donne ses consignes sans nécessairement avoir besoin de voir la patiente; un autre aspect rendant difficile des consultations régulières de spécialistes était aussi une certaine précarité financière, (frais de déplacement, prise en charge de la franchise, ou de la quote-part notamment); à cela s'ajoutent encore les frais de lunettes, non pris en charge par l'assurance-maladie. Sur question du conseil de la recourante, il a confirmé avoir des contacts réguliers avec les autres médecins traitants, notamment le Dr V______, ophtalmologue, mais également avec l'opticien, qui s'occupe beaucoup de l'aspect de photophobie. Pour développer un peu sa perception du dossier, sur le plan médical en tant que tel, l'évolution de l'état de santé n'était pas très rapide: elle pouvait s'observer par poussées, dans le sens d'une dégradation. L'essentiel était de réaliser que la situation de la patiente est très complexe: sa problématique se situait non seulement sur le plan vestibulaire, mais également sur le plan visuel; le problème de photophobie, qui en tant que tel est séparé de la question des vertiges, mais qui en cas de trop forte intensité lumineuse, provoque des douleurs, implique un besoin de plus d'obscurité, et dans cette situation, on observe un déficit d'informations visuelles, qui génère des vertiges. À cela s'ajoute encore la problématique actuelle de la presbytie. Pour pallier à la dégradation de son état de santé, ou la ralentir, la mesure principale consiste dans la pratique d'exercices d'auto-rééducation, d'adaptation au quotidien pour une meilleure tolérance. Il avait également noté une problématique dans le domaine des assurances sociales, et en particulier dans la gestion du dossier de l'AI. L'examen de la situation ne s'était pas fait très rapidement, et par des étapes où l'on avait pu constater d'une part des erreurs, et d'autre part, des phases contre-productives: il avait notamment relevé une approche surprenante de la part du Prof R______, neurologue, dans le cadre de son expertise. À gros traits, il avait résumé le dossier que l'OAI lui avait soumis, avec les erreurs qu'il comportait, en les répercutant dans le cadre de son expertise, et surtout, niant la problématique vestibulaire (en ce sens qu'il considérait qu'elle était ancienne et désormais résolue), et par ailleurs que le reste des affections apparaissait mineur, ce qui avait conduit à des erreurs). Quant aux aspects contreproductifs dans l'instruction du dossier, il faisait essentiellement référence au stage d'intégration aux EPI, qu'il avait commenté et critiqué dans son rapport du 26 septembre 2017 (pièce 17 recourante), dont il confirmait les termes. Le rapport d'examen de la Professeure U______ était en revanche beaucoup plus robuste. La problématique de sa patiente tenait au fait que sa maladie n'était pas reconnue par les instances de l'AI; or, elle ne lui permettait pas de travailler. Il considérait en effet qu'elle était totalement (100%) incapable de travailler. D'une part, la vue allait encore se détériorer (évolution de la presbytie); et d'autre part, les exercices de rééducation ayant pour but de reprogrammer l'équilibre, ne pouvaient laisser espérer des améliorations que sur plusieurs années. A son sens l'évaluation d'une incapacité totale de travail tenait au fait que les problèmes de vertiges rendaient très difficile tout ce qui est "doubles tâches": par exemple, le fait de prendre des notes pendant un entretien téléphonique, de se déplacer dans la rue en marchant, puisque la deuxième tâche consiste alors à éviter de tomber en raison des vertiges. Or, toutes ces doubles tâches provoquaient une fatigue et une fatigabilité accrues. Dans la pratique, il ne voyait donc pas d'emploi où l'on n'aurait pas besoin de faire deux choses à la fois. Sur demande du conseil de la recourante, il a précisé que l'état de santé de sa patiente avait également des effets sur l'accomplissement des tâches habituelles. Dans ce contexte également, les doubles tâches étaient fréquentes. Et là encore, les exercices d'auto-rééducation avaient pour but de "détricoter" les doubles tâches, pour étaler ces activités en deux tâches plutôt qu'une double. En conclusion, la situation de sa patiente étant très complexe, la négation par le Prof R______ de l'actualité du problème vestibulaire faussait considérablement l'appréciation juste à retenir. Si ce problème vestibulaire n'existait pas, la vie de sa patiente serait beaucoup plus facile, sa capacité de gain existerait sans doute, mais ce problème existait bel et bien, comme l'a décrit avec précision la Professeure U______ dans son rapport du 27 septembre 2019 (pièce 19 recourante) notamment à la page 2, où les abréviations VHIT et VNG concernent précisément les tests permettant de vérifier la fonction vestibulaire.

Sur quoi, la chambre de céans a informé la recourante de ce qu'elle transmettrait copie du procès-verbal d'audience à l'intimée en lui impartissant un délai pour d'éventuelles observations au sujet des déclarations du Dr H______, après avoir au besoin soumis ces dernières à l'appréciation du SMR.

42.    L'intimé s'est déterminé par courrier 24 février 2021. Il a persisté dans ses conclusions et produit l'avis du SMR du 22 février 2021, au sujet des déclarations du Dr H______ devant la chambre de céans: en substance le médecin traitant explique la physiologie de l'atteinte de l'assurée. Il critique l'expertise neurologique du Prof R______ en tant qu'il ne reconnaît pas l'actualité du problème vestibulaire, et critique le stage effectué aux EPI. Il estime l'incapacité de travail de sa patiente totale, en raison des vertiges qui empêchent des « doubles tâches ». Il cite la Prof U______ qui reconnaît le problème vestibulaire, notamment par les tests qu'elle a pratiqués. Pour le SMR, en effet, le Prof R______ a utilisé des tests simples pour exclure un trouble vestibulaire, comme tout neurologue, tandis que l'ORL a, à sa disposition, des tests plus spécifiques, qui permettent d'analyser et de diagnostiquer les troubles vestibulaires périphériques; ce qui a permis à la Prof U______ de retenir le diagnostic de déficit vestibulaire périphérique persistant. Ce diagnostic est connu depuis 2007 et il est stable. C'est pourquoi, après avoir exclu une atteinte neurologique et/ou psychiatrique associée, le SMR a conclu, dans son avis du 16 décembre 2019, que l'assurée présentait un conflit visuo-vestibulaire lié à un déficit vestibulaire périphérique gauche, connu de longue date, n'ayant visiblement pas évolué depuis la dernière décision de l'OAI en 2010. Les arguments du médecin traitant ne modifiaient donc pas l'appréciation du SMR.

43.    Dans d'ultimes observations du 31 mars 2021, la recourante, par la plume de son conseil, a persisté dans ses conclusions; elle a rappelé que lors de la première demande de prestations en 2006, le conflit vestibulaire n'était pas diagnostiqué, ni comme atteinte, ni comme symptôme. Il a été constaté par le Dr G______ en 2007 lors des examens qu'il a pratiqués. En 2018, le Prof T______ a posé le diagnostic d'altération du réflexe vestibulo-oculaire. En 2019 la Prof U______ confirmait le trouble vestibulaire. Comme l'expliquait le généraliste traitant, la santé de la recourante se dégrade avec le temps, en particulier en raison de l'apparition et du développement de la presbytie qui réduit à néant les faibles capacités d'adaptation du système visuo-vestibulaire. Il s'agit d'un phénomène naturel qui était prévisible, mais qui n'en existait pas moins et qui ne pouvait pas être arrêté. La discipline de vie à laquelle s'astreint la recourante (respect des consignes médicales [auto-rééducation quotidienne], limitation des sollicitations visuelles, vivre dans un environnement peu lumineux, permet de réduire les vertiges et nausées, mais en aucun cas de restaurer une CT. La recourante ne peut plus aller faire ses courses alimentaires seules, devant toujours être accompagnée de quelqu'un. Enfin la caisse de prévoyance LPP avait accordé une rente provisoire, à la suite de l'avis non discutable de son médecin-conseil quant à l'incapacité de travail de l'assurée.

44.    Par courrier du 23 avril 2021, l'OAI, considérant que le courrier de la recourante du 31 mars 2021 n'apportait aucun élément objectif, n'avait aucune remarque supplémentaire à apporter.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 83 LPGA).

4.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

5.        Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d’invalidité, singulièrement sur la question de savoir si son état de santé s'est aggravé depuis la dernière décision de l'assurance-invalidité entrée en force, du 6 juillet 2010, après audition, qui avait reconnu à l'assurée le droit à une rente pour une durée limitée: trois quarts de rente ordinaire du 9 au 30 mars 2006 basée sur un degré d'invalidité de 65 %, puis une demie-rente ordinaire basée sur un degré d'invalidité de 50 % du 1er avril au 31 mai 2006.

6.        a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire signifie que l’assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d’office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s’attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A LPA; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY/ Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA; ATF 125 V 193 consid. 2; 122 V 157 consid. 1a; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3; ATF 129 III 18 consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1).

d. Une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD- FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l’exercice d’un moyen de droit, le contenu d’une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b; 119 V 7 consid. 3c/bb; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

7.        Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70 % au moins, à un trois-quarts de rente s’il est invalide à 60 % au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins.

Pour évaluer le taux d’invalidité, le revenu que l’assuré aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

8.        a. Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d’invalidité était insuffisant - ou, comme dans le cas d'espèce, n'a été allouée que partiellement et pour une durée limitée dans le temps -, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l’assuré rend plausible que son invalidité ou son impotence s’est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 87 al. 2 et 3 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]). Cette exigence doit permettre à l’administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d’écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l’assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 130 V 64 consid. 5.2.3; ATF 125 V 412 consid. 2b; ATF 117 V 198 consid. 4b ainsi que les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_137/2018 du 3 septembre 2018 consid. 2.2).

b. Lorsqu’elle est saisie d’une nouvelle demande, l’administration doit commencer par examiner si les allégations de l’assuré sont, d’une manière générale, plausibles. Si tel n’est pas le cas, l’affaire est liquidée d’entrée de cause et sans autres investigations par un refus d’entrée en matière (ATF 117 V 198 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_137/2018 précité consid. 2.2). Le juge ne doit examiner comment l’administration a tranché la question de l’entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c’est-à-dire quand l’administration a refusé d’entrer en matière en se fondant sur l’art. 87 RAI et que l’assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l’autorité judiciaire n’est en revanche pas nécessaire lorsque l’administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 114 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_316/2011 du 20 février 2012 consid. 3.2).

c. L'exigence relative au caractère plausible ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir (Damien VALLAT, La nouvelle demande de prestations AI et les autres voies permettant la modification de décisions en force, RSAS, 2003, p. 396 ch. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 724/99 du 5 octobre 2001 consid. 1c/aa).

Lors de l'appréciation du caractère plausible d'une modification déterminante des faits influant sur le droit aux prestations, on compare les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision administrative litigieuse et les circonstances prévalant à l'époque de la dernière décision d'octroi ou de refus des prestations (ATF 130 V 64 consid. 2; ATF 109 V 262 consid. 4a).

d. Lorsque l’administration entre en matière sur une nouvelle demande de prestations, elle doit examiner la cause au plan matériel - soit en instruire tous les aspects médicaux et juridiques - et s’assurer que la modification du degré d’invalidité rendue vraisemblable par l’assuré est effectivement survenue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2012 du 9 juillet 2012 consid. 4). Selon la jurisprudence, elle doit procéder de la même manière que dans les cas de révision au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (ATF 133 V 545 consid. 6), c’est-à-dire comparer les circonstances existant lorsque la nouvelle décision est prise avec celles qui existaient lorsque la dernière décision reposant sur un examen matériel du droit à la rente est entrée en force (ATF 133 V 108 consid. 5; ATF 130 V 71 consid. 3.2.5) pour apprécier si dans l’intervalle est intervenue une modification sensible du degré d’invalidité justifiant désormais l’octroi d’une rente. Si elle constate que les circonstances prévalant lors de la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (cf. ATF 133 V 108 consid. 5.3.2) ne se sont pas modifiées jusqu’au moment de la nouvelle décision, et que le degré d’invalidité n’a donc pas changé, elle rejette la nouvelle demande. Dans le cas contraire, elle est tenue d’examiner s’il y a désormais lieu de reconnaître un taux d’invalidité ouvrant le droit à une prestation ou augmentant celle-ci. En cas de recours, le même devoir d’examen matériel incombe au juge (ATF 117 V 198 consid. 3a et ATF 109 V 114 consid. 2a et b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_721/2014 du 16 juin 2015 consid. 3.1).

9.        Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux:

a. Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

b. Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Étant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

c. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

d. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

e. On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

f. Les constatations médicales peuvent être complétées par des renseignements d’ordre professionnel, par exemple au terme d'un stage dans un centre d'observation professionnel de l'assurance-invalidité, en vue d'établir concrètement dans quelle mesure l'assuré est à même de mettre en valeur une capacité de travail et de gain sur le marché du travail. Il appartient alors au médecin de décrire les activités que l'on peut encore raisonnablement attendre de l'assuré compte tenu de ses atteintes à la santé (influence de ces atteintes sur sa capacité à travailler en position debout et à se déplacer; nécessité d'aménager des pauses ou de réduire le temps de travail en raison d'une moindre résistance à la fatigue, par exemple), en exposant les motifs qui le conduisent à retenir telle ou telle limitation de la capacité de travail. En revanche, il revient au conseiller en réadaptation, non au médecin, d'indiquer quelles sont les activités professionnelles concrètes entrant en considération sur la base des renseignements médicaux et compte tenu des aptitudes résiduelles de l'assuré. Dans ce contexte, l'expert médical et le conseiller en matière professionnelle sont tenus d'exercer leurs tâches de manière complémentaire, en collaboration étroite et réciproque (ATF 107 V 17 consid. 2b; SVR 2006 IV n° 10 p. 39).

g.En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé susceptible d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

10.    En l'espèce, s'il est vrai que le dispositif de la décision entreprise mentionne - contrairement au projet de décision du 29 août 2019 - que l'OAI n'entrait pas en matière, cette expression est manifestement erronée. En effet, dès lors qu'à la suite de l'avis du SMR du 14 juillet 2015, par lequel le service médical admettait la plausibilité de l'aggravation, recommandant implicitement à l'OAI d'entrer en matière et de lancer l'instruction médicale nécessaire pour déterminer si cette aggravation, plausible à ce stade, était avérée, l’administration a effectivement instruit complètement la cause, mettant notamment en œuvre plusieurs expertises confiées à des médecins indépendants. Du reste, dans sa réponse au recours, l'OAI a précisé d'emblée qu'il fallait comprendre sa décision comme un refus de prestations et non pas comme un refus d'entrée en matière. L'administration étant entrée en matière, ce point n'est pas litigieux, de sorte que la chambre de céans n'a pas à examiner comment l'OAI a tranché cette question. Au vu de la jurisprudence citée précédemment, il s'agit de déterminer, si dans le cas particulier, l'OAI a bien instruit tous les aspects médicaux et juridiques pour s’assurer que la modification du degré d’invalidité rendue vraisemblable par l’assurée était effectivement survenue, ceci en comparant les circonstances existant lorsque la nouvelle décision a été prise, avec celles qui existaient lorsque la dernière décision reposant sur un examen matériel du droit à la rente (6 juillet 2010) est entrée en force, pour apprécier si dans l’intervalle une modification sensible du degré d’invalidité justifiant désormais l’octroi d’une rente était intervenue.

11.    Comme rappelé précédemment, l'exigence relative au caractère plausible ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir. Ainsi, le fait d'admettre comme plausible une possible aggravation de l'état de santé de l'assurée depuis la dernière décision en force n'exclut pas qu'aux termes de l'instruction plus poussée, que l'administration doit entreprendre après être entrée en matière, celle-ci aboutisse en définitive à la conclusion que la modification (ici l'aggravation) de l'état de santé depuis la dernière décision en force ne soit en réalité, - et ceci au degré de la vraisemblance prépondérante exigée en matière d'assurances sociales -, pas survenue.

12.    La nouvelle demande de prestations, du 15 juin 2015 indiquait, selon la pièce médicale annexée (rapport du nouveau généraliste traitant, le Dr H______ du 4 mai 2015) que depuis octobre 2014 l'état de santé de l'assurée était affecté par une nette dégradation de la symptomatologie. Ce médecin retenait pour l'essentiel les diagnostics incapacitants de séquelles neuro-ophtalmologiques d'une maladie de Lyme (2005), de syndrome vestibulaire séquellaire et de dépression réactionnelle liée à de mauvaises conditions de travail influant sur les symptômes (F32.1, Z56.5). Quant à l'évolution et la modification de l'état de santé depuis la précédente décision, il relevait une augmentation de l'intensité et de la durée des symptômes de photophobie, vertiges et nausées.

a. Pour déterminer si l'aggravation de l'état de santé, admise comme plausible dans un premier temps, était avérée, l'OAI a interpellé les spécialistes consultés par l'assurée:

- la Dresse J______, neurologue, consultée par la recourante de fin novembre 2014 au début mars 2015, retenait les diagnostics incapacitants de: - déficit vestibulaire gauche depuis 2008, troubles visuels d'origine multifactorielle depuis 2005, dépression réactionnelle et céphalées de tension depuis 2005; et sans effet sur la CT: possible neuroborréliose traitée en 2005; elle situait anamnestiquement le début de la longue maladie en juin 2014; elle admettait une CT exigible dans l'activité habituelle de 20 %, et de 50 % dans une activité adaptée; mais dans ses réponses au questionnaire, elle a indiqué que l'incapacité de travail était de 100 % dès octobre 2014 (« à vérifier avec le médecin traitant »), et de 80 % de juin 2014 à mars 2015 (date de sa dernière consultation), puis selon évolution (« à vérifier avec le médecin traitant »); les restrictions physiques mentales ou psychiques étaient: céphalées, photophobie et troubles visuels (responsable des difficultés pour travailler à l'ordinateur), fatigue et vertiges (pouvant être à l'origine de troubles cognitifs: concentration et mémoire); elle précisait que du point de vue médical l'activité exercée n'était plus exigible; le rendement était réduit; une activité adaptée ne nécessitant pas de travail à l'ordinateur, sans changements fréquents de la position et sans travail en hauteur était possible à 50 % ; dans son dernier rapport de consultation spécialisée, elle observait que la symptomatologie actuelle de la patiente ne pouvait être mise en relation avec la neuroborréliose diagnostiquée en mars 2005; la description de la persistance de l'aggravation de la symptomatologie neurologique avait nécessité des examens complémentaires ne permettant pas d'objectiver l'atteinte des nerfs périphériques ni du système nerveux central, ni l'atteinte des nerfs optiques. Le bilan neuropsychologique était décrit comme normalisé en comparaison avec l'examen de 2007 et montrait uniquement une légère fragilité de l'attention soutenue, à long terme. La patiente expliquait cette amélioration par sa situation actuelle, avec un travail à mi-temps et le fait que son enfant soit plus indépendant. Quant à la nouvelle symptomatologie de céphalées, il s'agissait probablement de céphalées de tension aggravées dans un contexte de troubles visuels ainsi que d'une éventuelle sinusite. Elle avait adressé la patiente, à la demande de cette dernière, à la consultation ORL pour prise en charge de la probable sinusite, mais également afin de réévaluer l'atteinte vestibulaire décrite par le passé ;

- La psychiatre traitante (Dresse L______), suivait la patiente depuis le 24 janvier 2014, régulièrement, sur une base hebdomadaire; elle retenait le diagnostic de trouble anxieux en lien avec les troubles somatiques (depuis l'apparition des troubles de la vision et de l'équilibre); anamnestiquement, outre les troubles anxieux mentionnés, elle relevait un isolement social et professionnel ainsi que des difficultés financières; le pronostic dépendait de son état somatique et de sa situation sociale secondaire; la consultation thérapeutique hebdomadaire consistait en un travail d'adaptation à sa situation actuelle. CT: l'état de santé physique et psychique de la patiente ne lui permettait pas de reprendre une activité professionnelle actuellement; les incapacités physiques entraînaient une incapacité psychique; la patiente avait un sentiment d'incapacité, et se forçait à accomplir sa mission malgré ses incapacités physiques, jusqu'à l'effondrement;

- L'ORL traitante (Dresse I______) retenait le diagnostic de déficit vestibulaire gauche ancien, (depuis 2008). La patiente avait été en traitement ambulatoire auprès d'elle du 13 au 16 mars 2015 (avant elle, Dr G______); elle avait suivi des traitements de physiothérapie vestibulaire en 2008 et 2014; anamnestiquement, elle notait les symptômes de vertiges, céphalées et photophobie; à l'examen clinique elle retenait une hyperréflexie gauche à 28° et 40°. Pronostic: le déficit vestibulaire n'était pas compensé; le pronostic était réservé. Quant à la CT, elle renvoyait au médecin traitant;

b.    Au vu de l'avis du SMR à ce stade, l'OAI avait mis en œuvre une première expertise neurologique (rapport du 11 août 2016) confiée au service de neurologie du département des neurosciences cliniques du CHUV (Prof M______ et Dr N______). Il en ressortait que les experts ne retenaient aucun diagnostic neurologique incapacitant, relevant qu'actuellement il n'existait aucun argument en faveur d'une neuroborréliose; et sans incidence sur la CT, le diagnostic de migraine. Interaction des diagnostics: pas de diagnostic de neuroborréliose; pour les troubles fonctionnels ils proposaient une prise en charge psychiatrique. Sur le plan neurologique la CT était entière (100 %) tant pour l'activité exercée à ce jour que dans une activité correspondant aux aptitudes de l'assurée; les experts insistaient sur la nécessité d'un suivi psychiatrique;

- le SMR s'était toutefois écarté des conclusions des experts du CHUVpour les raisons suivantes: les troubles sensitifs de la branche gauche du trijumeau, avec photophobie, étaient décrits depuis 2005 par le Prof O______, médecin-chef du service d'ophtalmologie des HUG, qui, dans son rapport du 7 décembre 2005 évoquait la présence d'une neuropathie; et une IRM cérébrale pratiquée en mars 2006 avait montré une prise de contraste évoquant un processus inflammatoire des espaces méningés. Le Dr P______, neurologue aux HUG, décrivait déjà les mêmes troubles sensitifs de l'hémicorps gauche. Dans son avis du 7 novembre 2007, le Dr G______ décrivait un déficit vestibulaire gauche mal compensé, avec un test Halmagyi positif à gauche, responsable de la photophobie, des céphalées avec nausées et vomissements. Sur le plan psychiatrique, la psychiatre traitante qui prenait l'assurée en charge depuis 2014, ne faisait jamais état d'une pathologie psychiatrique pouvant être à l'origine d'une surcharge fonctionnelle. A lecture de l'ensemble des pièces médicales, le SMR peinait à comprendre les divergences des différentes prises de position des spécialistes et de l'expert concernant la CT. En effet, ce dernier considérait qu'elle était de 100 %, tout en retenant des limitations fonctionnelles. Le SMR considérait dès lors qu'il convenait d'effectuer une mise en situation (COPAI), mesure dont il sera question, dans la mesure utile, dans les considérants qui suivront;

c.    Par la suite, l'OAI, suivant l'avis du SMR, a mis en œuvre une seconde expertise neurologique mise en place par l'OAI, l'expert (prof R______) a rendu son rapport le 9 août 2018. L'expertise a été effectuée sur la base de l'étude du dossier à disposition, l'examen de la patiente le 20 juillet 2018, l'anamnèse et l'examen neurologique, un bilan neuropsychologique détaillé effectué le même jour ainsi que sur une IRM cérébrale et angio-IRM endocrinienne cervicale effectuée le 20 juillet 2018 à la clinique de Montchoisi. L'expert a retenu comme diagnostic une ancienne atteinte vestibulaire gauche décrite, sans élément séquellaire significatif détectable actuellement. Comportement: photophobie sans explication ophtalmologique décrite. Absence de pathologie neurologique organique. Les évaluations neurologique et neuropsychologique, ainsi que l'IRM actuelle permettaient d'écarter toute pathologie neurologique organique évolutive ou séquellaire. L'évaluation révélait en revanche des signes fonctionnels, notamment lors des tests neurologiques de coordination; mais il n'y avait pas d'élément en faveur d'un effort submaximal lors des tests de validation neuropsychologique. Par ailleurs, comme certains confrères (Dr X______ et F______) l'expert confirmait l'absence d'arguments en faveur d'une ancienne neuroborréliose, chez cette patiente qui n'avait jamais présenté d'arguments neurobiologiques convaincants à ce sujet. L'évolution clinique était caractérisée par la fluctuation depuis 2005 autour des mêmes plaintes, essentiellement dans le cadre de ce qui avait été objectivé comme une atteinte vestibulaire brusque du côté gauche, sans pathologie ophtalmologique pouvant expliquer la photophobie et les troubles visuels. Cela dit, l'évolution objective était certainement favorable, comme déjà constaté dans l'expertise neurologique du CHUV, et lors de l'évaluation actuelle qui ne montrait pas d'atteinte significative au niveau vestibulaire séquellaire (pas de nystagmus même sous lunettes de Frenzel, pas d'inhibition pathologique ou exacerbation du réflexe vestibulo-oculaire lors des tests ad hoc, absence de toute atteinte posturale ou ataxique ou organique, contrastant avec les phénomènes de gesticulation fonctionnelle de rattrapage). Malgré des fluctuations dans l'incapacité professionnelle, et sans avoir de causalités psychologiques ou organiques démontrées pour la péjoration de 2014, force était donc de relever l'absence de toute pathologie organique neurologique permettant d'expliquer une incapacité de travail même partielle. La patiente ne prenait aucun traitement, mais par ailleurs elle s'estimait incapable de reprendre toute activité professionnelle en relation avec ses plaintes, malgré l'absence de substrat organique. Il n'y avait pas de suivi psychiatrique régulier, malgré les consultations épisodiques chez la Dresse L______, et ceci devrait peut-être être révisé à la vue de la négativité d'une cause cérébrale organique lors de la présente expertise. Au niveau de la cohérence de la plausibilité, les éléments objectivables étaient purement fonctionnels et ne traduisaient pas de pathologie organique sous-jacente, même séquellaire. Dans ce contexte, un avis d'expert psychiatre pouvait être utile vu la situation anticipée sur le plan professionnel et les limitations privées décrites par la patiente. Quant aux capacités, ressources et difficultés, l'expert ne retenait aucune limitation objective d'origine organique qui permette de justifier une limitation des activités privées ou professionnelles, tant sur le plan neurologique de base que sur le plan cognitif. En conclusion l'expert estimait que la CT dans l'activité exercée jusqu'ici était de 100 % sur le plan neurologique organique, à évaluer éventuellement sur le plan psychiatrique ; mêmes conclusions et observations par rapport à la CT dans une activité adaptée.

d.   L'experte psychiatre désignée par la suite par l'OAI, la Dresse S______, avait rendu son rapport le 2 janvier 2019. L'expertise se basait sur deux entretiens avec l'expertisée, les 31 octobre et 23 novembre 2018 (total: 240 minutes), plusieurs entretiens téléphoniques: avec le généraliste traitant (20'), la psychiatre traitante (15'), l'ORL traitante (10'), la fille, la sœur et le frère de l'expertisée, l'étude du rapport de l'ophtalmologue traitant (remis par l'expertisée lors du premier entretien) ainsi que sur l'étude du dossier de l'OAI. Après avoir procédé à une anamnèse très précise et détaillée, l'experte n'a retenu aucun diagnostic psychiatrique invalidant et, sans effet sur la CT, le diagnostic d'épisode dépressif réactionnel, actuellement en rémission (F32), depuis 2014. Elle a précisé à cet égard que les médecins traitants évoquaient une symptomatologie dépressive réactionnelle, mais sans jamais en détailler les symptômes et sans qu'un traitement antidépresseur n'ait été nécessaire; les échanges avec l'expert n'avaient pas permis d'apporter plus de précisions quant à des symptômes dépressifs réactionnels. Lors des entretiens, l'expertisée n'évoquait aucun élément dépressif floride tout au long des années ayant suivi le début de sa maladie en 2005, même sur question spécifique. Il en était de même quand elle évoquait avoir pris pendant trois ans un traitement antidépresseur à la fin des années 90', ne rapportant aucun symptôme dépressif actif, mais plus un traitement qui aurait été introduit en préventif. Selon l'experte, cette explication semblait peu plausible car pas du tout en lien avec la pratique usuelle de l'utilisation des traitements antidépresseurs; mais ceci ne restait qu'une hypothèse basée sur la pratique courante. Ainsi, l'experte retenait comme possible qu'à cette époque l'assurée ait présenté une réelle symptomatologie dépressive pour laquelle ce traitement aurait été introduit, et qu'elle n'en gardait pas de souvenirs, car elle n'aurait pas ressenti alors d'impact sur son quotidien. Toutefois sans rapport médical de l'époque on ne pouvait pas retenir cette hypothèse comme une certitude et l'on ne pouvait ni confirmer ni infirmer un épisode dépressif à la fin des années 90'. L'expertisée s'étant battue toute sa vie pour avancer, ne pas rester prisonnière des violences vécues enfant, mettant pour cela en place d'importants mécanismes de défense de type refoulement et rationalisation; la reconnaissance pour elle de la présence réelle de symptômes dépressifs (passés, à la fin des années 90', et depuis 2014, puisque rapportés par ses thérapeutes sous forme d'une dépression réactionnelle) pourrait être assimilée à un échec de sa résilience pour laquelle elle mettait toute son énergie depuis tant d'années. Cette absence de souvenirs de ce vécu dépressif serait ainsi en lien direct avec un mécanisme de défense et non pas avec un déni actif et volontaire. Il fallait aussi retenir que c'était très probablement grâce à ces mécanismes de défense qu'elle avait pu avancer dans la vie, malgré les importants écueils dont celle-ci avait été jalonnée; les forcer pour les faire tomber, même au cours d'un travail psychothérapeutique, risquerait d'entraîner une décompensation dépressive sévère, surtout si l'on suspectait un terrain dépressif possible (antécédents dépressifs non exclus), qui la fragiliserait sur ce plan-là. L'experte estimait au contraire important qu'elle poursuive sa thérapie actuelle, celle-ci lui permettant peut-être avec le temps d'accéder à ses émotions dépressives sans que cela n'entraîne un effondrement dépressif, mais aussi narcissique et une dépression franche réactionnelle. Raison pour laquelle elle retenait le diagnostic de dépression réactionnelle (sur la base des rapports médicaux des médecins traitants qui en faisaient mention), en rémission, - et donc non invalidant vu l'absence de symptomatologie dépressive à l'examen, lors des entretiens avec l'expert et aux échelles diagnostiques passées. Au vu des symptômes somatiques présentés par l'expertisée, l'examinatrice a par ailleurs recherché la présence possible d'un trouble somatoforme. Après avoir passé en revue les caractéristiques de ce diagnostic, et les avoirs examinés au regard des exigences de la jurisprudence de 2015, elle ne l'a pas retenu. Au vu des motifs pour lesquels le SMR avait retenu comme nécessaire la mise en place d'une expertise psychiatrique (conséquences du trouble de conversion évoqué par l'expert neurologue), l'experte n'a pas non plus retenu ce diagnostic. En termes d'évolution personnelle et professionnelle ainsi que de l'état de santé, y compris de la situation psychique, sociale et médicale actuelle de l'assurée, l'experte a retenu qu'actuellement l'intéressée décrivait un impact majeur des symptômes vestibulaires sur son quotidien, ce que confirmaient ses médecins traitants, mais sans impact sur sa santé psychique. Les limitations de ses activités étaient en lien direct, selon l'expertisée, avec ses symptômes somatiques et les difficultés financières qui découlaient de son absence de revenus depuis plus de deux ans, mais pas en lien avec une quelconque souffrance psychique. Quant à l'évolution à ce jour des traitements, mesures de réadaptation, etc., et discussion des chances de guérison, l'experte observait que l'assurée était au bénéfice d'une prise en charge psychothérapeutique depuis 2014, suspendue durant six mois en 2018 car la patiente n'en voyait pas la nécessité, mais reprise spontanément depuis octobre dernier (2018), après que l'expertise neurologique de juillet 2018 ait suggéré une atteinte psychiatrique à l'origine de sa symptomatologie. Aucune thérapeutique médicamenteuse récente n'était rapportée. Dans le contexte évoqué on pouvait toutefois estimer que les traitements médicamenteux avaient été conduits tel qu'attendu. L'examinatrice estimait que la poursuite de la prise en charge psychothérapeutique était importante même en l'absence de diagnostic psychiatrique, justement pour limiter l'impact psychique des symptômes somatiques et donc diminuer le risque de développer une réelle symptomatologie psychiatrique, qui pourrait alors être aussi invalidante. En l'absence de diagnostic psychiatrique, une telle prise en charge ne pouvait pas être exigible; elle ne pouvait qu'être recommandée. Si l'on revenait à l'hypothèse, non prouvable actuellement et donc non retenue, d'une étiologie psychique à ses symptômes, la poursuite de la psychothérapie seule permettrait de la confirmer ou de l'infirmer avec certitude au long, voire très long cours, un tel travail de mise à la conscience de traumatisme enfoui prenant toujours de nombreuses années (pour autant que cela soit le cas de l'expertisée, ce qui n'était aucunement une certitude actuellement), deuxième point qui devrait encourager l'expertisée à poursuivre sa psychothérapie. L'augmentation de la fréquence des séances serait nécessaire si l'on voulait espérer faire un travail suffisamment intense pour permettre le retour du refoulé, quel qu'il soit (traumatique ou pas), seul chemin qui permettrait de confirmer ou d'infirmer avec certitude l'hypothèse de la conversion suggérée par le SMR. L'expert avait également passé en revue la cohérence et la plausibilité, n'objectivant aucun élément divergeant dans le cas particulier. Quant aux capacités ressources et difficultés, l'expertisée avait montré, lors des entretiens, une évidente envie d'aller mieux, ce que confirmaient ses médecins traitants, la décrivant comme compliante et impliquée activement dans ses soins, ce qui avait également été le cas au cours de l'expertise. Du point de vue psychiatrique, l'experte ne retenait aucune limitation fonctionnelle et concluait à une CT pleine et entière dans toute activité (habituelle de secrétaire et toute activité correspondant à ses aptitudes). Elle avait enfin répondu à toutes les questions posées.

13.    Il y a tout d'abord lieu de relever que l'instruction médicale, tendant à déterminer si l'aggravation plausible de l'état de santé de la recourante était avérée, a été menée d'une manière diligente et complète, les avis successifs du SMR ayant notamment conduit à la mise en place de trois expertises, notamment deux expertises neurologiques, le SMR s'étant en effet quelque peu écarté des conclusions de la première expertise (CHUV), pour des motifs sur lesquels il sera revenu ci-dessous.

14.    S'agissant des trois expertises (deux expertises neurologiques, du CHUV et du prof R______, et psychiatrique de la Dresse S______) la chambre de céans considère que tous les critères jurisprudentiels sont réunis pour que l'on puisse leur reconnaître une pleine valeur probante.

S'agissant de la première expertise neurologique, qui retenait une pleine CT tant par rapport à l'activité habituelle que dans une activité adaptée, le SMR s'était certes écarté des conclusions des experts du CHUV, apparemment en raison du fait que l'absence de diagnostic neurologique semblait l'interpeller, dès lors que, plusieurs médecins évoquaient de telles pathologies notamment le Prof O______ (fin 2005), qui avait décrit des troubles sensitifs de la broche gauche du trijumeau avec photophobie, évoquant la présence d'une neuropathie, mais également le Dr P______, par la suite et, et le Dr G______ qui, en novembre 2007, décrivait un déficit vestibulaire gauche mal compensé responsable de la photophobie, des céphalées avec nausées et vomissements. Le SMR ne comprenait pas non plus les divergences entre les diverses prises de position des spécialistes et celle de l'expert concernant la CT. À ce sujet, il relevait que selon l'expert la CT était de 100 %, malgré le fait qu'il retenait des limitations fonctionnelles. Les conclusions de ce premier expert ont toutefois, sur le plan de la CT notamment, été confirmées par le second expert neurologue. Ce second avis d'expert permet à la chambre de céans de remettre la première expertise neurologique en perspective, et de relativiser la pertinence des motifs pour lesquels le SMR s'était distancé à l'époque des conclusions du CHUV. Une lecture attentive du rapport du CHUV montre en effet que les experts n'avaient pas ignoré les diagnostics retenus en 2005 et 2007 par les médecins susmentionnés: il est fait mention du contenu des rapports sous la rubrique « bref extrait du dossier », d'une part; mais s'agissant en particulier de la CT retenue dans ce rapport, ce que le SMR semblait concevoir comme une contradiction ne l'était pas en réalité: force est en effet de constater que si les experts ont en effet conclu à une CT de 100% quelle que soit l'activité, ils avaient clairement répondu à la question V. 4 (quelles sont les limitations fonctionnelles ?): « Pas de limitation fonctionnelle d'un point de vue neurologique. À réévaluer d'un point de vue psychiatrique. Le renvoi du SMR aux pages 7 et 8 du rapport se référait pour ce qui concerne d'éventuelles limitations, à la consignation des plaintes de l'expertisée. Or, les experts ne retenaient pas de limitations sur le plan neurologique, « à réévaluer du point de vue psychiatrique ». Au vu des remarques du SMR l'ayant conduit à s'écarter des conclusions des experts du CHUV, il n'est pas inutile de rappeler que ces derniers se prononçaient en 2016, dans le contexte d'une évaluation sur la question de savoir s'il y avait eu depuis 2010 une aggravation incapacitante de l'état de santé de l'assurée; et les conclusions auxquelles ils parvenaient au terme de leur examen sont cohérentes, exemptes de contradictions. Le SMR a d'ailleurs fini par s'y rallier (avis des 20 septembre 2018 et 1er mars 2019), ce service médical constatant notamment la concordance entre les deux avis d'experts neurologues.

Quant à l'expertise psychiatrique, la chambre de céans constate que l'experte a démontré, comme ses collègues neurologues, une pleine connaissance du dossier et une analyse particulièrement fouillée de la situation de l'expertisée, aboutissant à des conclusions cohérentes, logiques, et exempte de contradictions. On relèvera en particulier qu'elle a soigneusement analysé l'éventuelle problématique somatoforme (quand bien même aucun médecin ne l'avait sérieusement envisagé jusqu'alors), en excluant finalement ce diagnostic à la lumière des indicateurs jurisprudentiels ; elle a également exclu, faute d'éléments pertinents actuellement au dossier, l'hypothèse de la conversion, retenu par le SMR à sa recommandation de la mise en place d'une expertise psychiatrique.

15.    Dans le cadre de la procédure de recours, l'assurée remet en cause le choix des experts neurologues successivement désignés par l'OAI, estimant que leur spécialisation respective (maladie cérébro-vasculaire pour l'un, maladie démyélinisantes pour l'autre) ne leur permettait pas d'appréhender correctement la complexité de son cas. Elle estime qu'il eut été judicieux de se tourner vers un expert mieux focalisé, tels le Prof T______, titulaire et médecin-chef de l'unité de neuro-ophtalmologie de l'hôpital ophtalmique Jules-Gonin ou la prof U______, FMH en ORL médico-faciale, consultante otoneurologie qu'elle avait consultés.

À cet égard, il sied tout d'abord d'observer, à l'instar de ce qu'a relevé l'intimé dans ses écritures, qu'au moment de désigner ces experts, l'OAI a expressément donné l'occasion à la recourante de se prononcer non seulement sur la mission, mais également au sujet des experts pressentis. Elle n'avait à l'époque soulevé aucune objection ni formulé d'autre proposition d'expert. Quoi qu'il en soit, les experts désignés étaient parfaitement à même de se prononcer sur la problématique posée, celle-ci entrant manifestement dans leur domaine de spécialisation, quand bien même chacun d'eux peut se prévaloir d'un domaine de prédilection.

16.    Plus insolite est en revanche le fait que la recourante n'ait songé qu'au stade du recours, de produire d'une part, le rapport du Prof T______ du 28 janvier 2019, consulté par elle, sur demande de consultation spécialisée de son ophtalmologue traitant, pour la première fois le 21 janvier 2019, et qui avait procédé à un bilan neuro-ophtalmologique; et d'autre part la copie du rapport de bilan otoneurologique (du 27 septembre 2019) auquel la Prof U______ avait procédé à la demande du médecin traitant de la recourante entre le 3 avril et le 4 septembre 2019. Ces deux rapports sont en effet antérieurs à la décision entreprise (15 octobre 2019, époque où l'assurée était déjà assistée d'un conseil qui avait notamment formulé les objections motivées au projet de décision préalable sans même mentionner ces médecins).

a. Le Prof T______ a procédé à un bilan neuro-ophtalmologique en janvier 2019. Il a relevé anamnestiquement l'apparition, en 2005, de nausées et vision floue qui, après de multiples investigations, avaient abouti au diagnostic de neuro-Lyme et un traitement de Rocephin intraveineux durant 21 jours. En 2007 la patiente avait présenté des vertiges, et une vestibulopathie avait été mise en évidence. Elle était alors suivie par le Dr G______ et une rééducation O.R.L./postural ainsi que la prescription de filtres FL-41 avaient été prescrites par ce médecin. Elle avait alors pu réintégrer son travail de secrétaire de direction à 75 % de 2008 à 2014, relevant qu'auparavant elle travaillait à 100 %. En 2014, elle avait ressenti une diminution de la vision de près, pour laquelle elle avait consulté ; un essai de verres de contact avec été effectuée. Depuis 2014 elle était à l'arrêt de travail. En juillet 2017 une tentative de réinsertion professionnelle par l'OAI avait (aux dires de la patiente) amené une « aggravation de la situation », la patiente décrivant alors une diminution de la vision, diminution de sa capacité à se déplacer, un ralentissement de ses mouvements et un besoin plus important pour les filtres. Les plaintes actuelles consistaient en une sensation de déséquilibre, vertiges et nausées, engendrés par les changements de position du corps et/ou de la tête ; symptômes de vertiges et de malaises engendrés par les mouvements autour d'elle ; elle ne pouvait plus regarder un film d'action à la télévision, et était gênée par les mouvements des gens déambulant autour d'elle; elle avait beaucoup de peine à se déplacer dans un supermarché en raison de tous les défilements de tous les objets sur les rayons, sur sa gauche et sur sa droite. Avec des verres progressifs (prescrits récemment), la patiente ressentait un grand handicap à déambuler étant donné que, pour voir net les marches et les trottoirs, elle devait baisser la tête et ceci engendrait des vertiges. Changements fréquents de lunettes, car, « les valeurs changent ». Les examens auxquels il a procédé, dans le cadre du status ont donné des résultats satisfaisants : - acuité visuelle statique : de loin, avec lunettes, 80 % des deux côtés (ddc), améliorable à 100 % ddc (indication des corrections nécessaires) ; de près, avec ses lunettes, 100 % ddc. Acuité visuelle dynamique : de loin, avec ses lunettes, 100 % ddc, la rotation de la tête de gauche à droite et vice versa n'entraînant qu'une légère diminution de la vision à 80 %, (mais avec une diplopie verticale binoculaire) ; de près, avec ses lunettes, 100 % binoculaires ; la rotation de la chaise vers la gauche ou vers la droite n'entraînait aucune diminution de l'acuité visuelle (mais la patiente devait « tenir ses yeux »). L'examen du champ visuel était, pour l'essentiel, normal, avec, au test de l'Octopus, quelques zones de diminution de sensibilité essentiellement supérieure, de manière non systématisée, ddc. Oculomotilité: pas de limitation, pas de nystagmus, pas de douleur (ndr. Ces constatations correspondent à celles du prof R______ dans son rapport d'août 2018). Les mouvements de poursuite étaient harmonieux, les saccades étaient précises et la convergence était bonne (par moment les saccades étaient hypsométriques et par moment il existait un léger espace de convergence, mais la patiente était très crispée durant ses mouvements oculaires. En substance l'examen orthoptique montrait une légère exophorie, sinon il était dans les limites de la norme. Les autres examens étaient également dans la norme. Le spécialiste a relevé que la mesure des diverses lunettes de la patiente montrait des réfractions très différentes, l'astigmatisme étant surcorrigé pour deux de ses quatre paires de lunettes. Sur un plan strictement neuro-ophtalmologique, cette patiente ne présentait qu'un astigmatisme mixte et une presbytie, et ne présentait donc aucune pathologie oculaire, aucune dysfonction des voies visuelles afférentes et aucun trouble oculomoteur. Les symptômes qu'elle mentionnait actuellement étaient très évocateurs de deux problèmes distincts mais liés : - une partie des symptômes vertigineux dont elle se plaignait était très évocatrice d'une vestibulopathie ; le spécialiste relevait qu'en 2007 le diagnostic en question avait été posé et un traitement de rééducation par physiothérapie posturale avait permis d'améliorer la situation. La patiente mentionnait qu'elle aurait bénéficié à nouveau, récemment, d'une telle rééducation, mais sans succès. Compte tenu de la symptomatologie actuelle et de l'incapacité de cette patiente, un nouvel avis neuro-otologique serait souhaitable, raison pour laquelle il avait suggéré la Prof U______ ; - une autre partie des symptômes vertigineux était explicable par des vertiges visuels; on retrouvait ce phénomène chez des patients qui avaient subi ou qui avaient une vestibulopathie non encore diagnostiquée. Il n'y avait malheureusement pas de traitement spécifique pour les vertiges visuels, mais environ 50 % des patients présentant de tels vertiges étaient améliorés par la physiothérapie posturale ; - la difficulté qu'éprouvait cette patiente avec les verres progressifs était facilement explicable par les vertiges de type vestibulaire périphérique qu'elle présentait; en effet pour regarder clairement là où elle allait mettre les pieds, elle était obligée de baisser la tête (et non pas seulement les yeux), ce qui induisait des vertiges. Une paire de lunettes monofocale, pour la distance seulement, était souhaitable lorsqu'elle se promenait; pour le travail, elle pourrait porter, soit des verres progressifs soit des verres de proximité/verre de travail type Acces. Elle reprendrait contact avec son ophtalmologue et son opticien pour la correction des deux paires de lunettes surcorrigées. En conclusion il n'avait malheureusement pas d'autres propositions d'investigation, de traitement ou de prise en charge.

b. Quant à la Prof U______, elle a tout d'abord décrit la situation anamnestique avec la survenue de troubles visuels au niveau de l'œil gauche en 2005, rappelant l'essentiel des investigations menées à l'époque et les diagnostics de déficit vestibulaire périphérique gauche mise en évidence par le Dr G______ en 2007, suivi d'une prise en charge dans le cadre d'une réhabilitation otoneurologique. Elle note ensuite qu'en 2014 une presbytie s'était progressivement installée, qui allait déstabiliser l'ensemble des entrées visuelles avec, sur le plan symptomatique, des troubles de focalisation et de lecture. Depuis cette période la patiente mentionnait une sensation d'être continuellement en mouvement. La fixation d'une cible ne permettait pas de stabiliser la symptomatologie, typiquement en marchant dans la rue. Elle utilisait en revanche de manière plus spécifique les informations proprioceptives qui lui permettaient de gérer plus ou moins sa symptomatologie. Elle décrivait une nette amélioration lorsqu'elle se déplaçait dans l'obscurité ; depuis 2014 la patiente mentionnait l'incapacité de pouvoir effectuer une double tâche comme, par exemple, se déplacer tout en conversant avec la personne qui l'accompagne; la lecture était difficile et une association de multitâches, tel qu'on les rencontre quotidiennement dans la vie sociale et professionnelle, était devenu très compliquée voire impossible. Sur le plan auditif, la patiente décrivait depuis environ deux ans des troubles de la discrimination verbale, en milieu calme ou bruyant. Il n'y avait pas de fluctuations d'audition, mais il existait un acouphène, sous forme d'un sifflement, intermittent, non latéralisable. Le bilan otoneurologique auquel elle avait procédé mettait en évidence une discrète surdité de perception gauche, avec une composante rétrocochléaire, de même qu'un déficit vestibulaire périphérique canalaire et partiellement otolithique à gauche. Cet examen, pratiqué 14 ans après la survenue de la symptomatologie, de même que l'anamnèse évoquaient d'emblée une polynévrite des nerfs crâniens V1 et VIII gauche, dans le contexte, probablement, de la borréliose. La patiente souffrait toujours d'un conflit visuo- vestibulaire important, qui la handicapait dans sa vie quotidienne, malgré les différentes mesures, en particulier de correction visuelle, qui avaient été entreprises. Elle s'étonnait en revanche de constater que dès le départ la patiente n'avait pas reçu un programme de physiothérapie vestibulaire intensive, à faire quotidiennement, selon un programme d'exercices bien précis. Depuis 14 ans, la patiente avait développé des stratégies comportementales pour pouvoir gérer le mieux possible cette dépendance visuelle, qui n'était pas seulement liée à une mauvaise compensation, mais également à la neuropathie du V1, décrite par le Prof O______ (2005). La Prof U______ avait donc introduit la physiothérapie vestibulaire, selon le programme proposé, à faire quotidiennement et à pratiquer en fonction de sa tolérance. Lors du premier contrôle du 22 mai (2019), la patiente décrivait un sentiment de diminution du manque d'ancrage au sol, en situation de luminosité correcte, mais décrivait par contre de fortes céphalées. Elle décrivait également une meilleure fluidité dans les mouvements, sauf en cas de coordination très fine. Toutefois la sensation d'ébriété restait constante et une double tâche, telle qu'elle lui avait proposé, était toujours impossible à réaliser. Lors du dernier contrôle du 4 septembre (2019) il existait une petite amélioration, en particulier dans la double tâche de type repassage - écoute de la musique, mais la patiente constatait toujours une saturation très rapide dans l'exécution de multitâches. Il lui était par exemple très difficile de faire son ménage et de cuisiner ensuite. La prof U______ lui avait proposé de continuer son programme de physiothérapie vestibulaire quotidien, à son rythme, et avait introduit une autre double tâche cognitive, associant le calcul mental. Un nouveau contrôle était prévu à la mi-novembre (2019). Elle expliquait, à destination du généraliste traitant qu'il s'agissait d'une situation très complexe : le déficit vestibulaire périphérique était toujours mal compensé chez une patiente à prédominance visuelle; la présence également d'une neuropathie du V1 péjorait la situation. Quant aux troubles cognitifs et, en particulier, la difficulté d'effectuer des multitâches, ils pourraient aussi être attribués partiellement à l'impact cognitif d'un déficit vestibulaire périphérique; sur le plan pratique, elle pensait peut-être possible, mais à long terme, de pouvoir installer une reprogrammation, en particulier dans le contexte des multitâches. Toutefois la patiente ayant déjà établi des stratégies bien précises, l'introduction d'une telle orientation allait demander beaucoup de temps. Selon cette spécialiste, il était donc clair que, sur le plan professionnel, actuellement, une réintégration n'était pas envisageable dans le contexte d'une place de travail à l'extérieur de chez elle.

c. La chambre de céans constate, à l'instar de l'intimé et de son service médical (avis du SMR du 16 décembre 2019) que le Prof T______ conclut que sur un plan strictement neuro-ophtalmologique, cette patiente ne présentait qu'un astigmatisme mixte et une presbytie, et ne présentait donc aucune pathologie oculaire, aucune dysfonction des voies visuelles afférentes et aucun trouble oculomoteur. Il a effectivement retenu l'existence d'une vestibulopathie, laquelle pouvait expliquer les vertiges visuels décrits par la patiente, et proposait le port de lunettes monofocale pour la distance seulement, soit lorsqu'elle se promène; il a identifié des anomalies de correction pour deux des quatre paires de lunettes qu'elle portait, à corriger. Vu l'absence de pathologie oculaire, respectivement neuro-ophtalmologique incapacitante, ce spécialiste - dont ce n'était d'ailleurs probablement pas le rôle - ne s'est pas formellement prononcé sur la CT de la patiente, sinon indirectement, dans la mesure où il préconisait « pour le travail » le port de lunettes équipées de verres progressifs ou de verres de proximité/verres de travail type Acces, de sorte que l'on doit admettre, au degré de la vraisemblance prépondérante, que pour ce spécialiste, sur le plan oculaire, la CT de la patiente ne posait pas problème. Cela dit, comme rappelé ci-dessus, le Prof T______ a évoqué la vestibulopathie, diagnostiquée chez la patiente en 2007 déjà, et a notamment expliqué certains symptômes décrits par la recourante, en particulier les "vertiges visuels ", comme les conséquences de cette pathologie. On remarquera également que les conclusions du Prof T______ corroborent la description des symptômes neurologiques objectifs évoqués par le Prof M______ (expertise CHUV du 11 août 2016). Au final, l'avis médical du Prof T______ ne permet pas de conclure que l'état de santé de la patiente, par rapport à ce qu'il était au moment où la dernière décision de l'OAI a été rendue en juillet 2010, se soit aggravé depuis lors, en particulier depuis 2014 comme la recourante le prétend.

S'agissant de l'avis médical de la Prof U______, on doit en retenir que le bilan otoneurologique auquel elle a procédé apparemment sur plusieurs mois mettait en évidence un déficit vestibulaire périphérique gauche (canalaire et partiellement otolithique), toujours mal compensé, la recourante présentant ainsi des symptômes liés à un conflit visuo-vestibulaire. Cette atteinte était toutefois connue, existante, probablement depuis 2005, selon le Dr G______ qui l'avait diagnostiquée en 2007, et qui à l'instar de la Prof U______ avait déjà recommandé une physiothérapie spécifique vestibulaire qui avait du reste permis à l'assurée de voir son état de santé s'améliorer, ce qui lui avait permis de reprendre son activité antérieure à 75 % dès juin 2006. Cette spécialiste se disait toutefois étonnée de constater que dès le départ (en 2005 et à tout le moins en 2007), la patiente n'ait pas reçu un programme de physiothérapie vestibulaire intensive, à faire quotidiennement, selon un programme d'exercices bien précis, raison pour laquelle elle a réintroduit ce type de traitement que l'assurée disait avoir suivi à l'époque, puis, selon ses explications, plus récemment, mais sans succès (rapport du Prof T______ p. 2 dernier §). Raison pour laquelle, selon la Dresse U______ le programme des exercices bien précis qu'elle a prescrits à la recourante devait se faire quotidiennement, à la mesure de la tolérance de l'intéressée. De ce point de vue, à comprendre la spécialiste, il semble regrettable que la recourante n'ait pas bénéficié d'emblée (en 2005) d'une telle physiothérapie posturale intensive et quotidienne, ce qui aurait probablement contribué à une amélioration (plus) rapide de son état de santé et de sa symptomatologie ; en revanche on ne saurait en déduire une détérioration de l'état de santé depuis 2014. La spécialiste a en outre retenu, comme c'était déjà le cas à l'époque du Prof O______, une neuropathie V1, qui péjorait encore la situation. Il n'empêche qu'au-delà de la répercussion dans son rapport des plaintes subjectives de la patiente, on peine également à trouver dans cet avis médical des éléments objectifs et des explications convaincantes permettant de confirmer une aggravation avérée de l'état de santé de la recourante, depuis la dernière décision en force de l'OAI.

Il ne s'agit pas ici de nier l'existence des troubles de santé dont la recourante est atteinte, qui ont, depuis de nombreuses années, des conséquences sur sa qualité de vie, et d'autres conséquences regrettables d'ordre financier et matériel - qui, quant à eux, ne sont pas du ressort de l'assurance-invalidité -; mais la question litigieuse réside précisément dans le fait de savoir si depuis la dernière décision de l'OAI en force (2010), l'état de santé, et lui seul, s'est aggravé au point d'avoir des conséquences sur les droits de l'assurée aux prestations de l'assurance-invalidité.

Il convient toutefois d'observer, par rapport à l'époque où la recourante situe l'aggravation supposée de son état, qu'elle indiquait, dans le cadre d'un entretien qu'elle avait eu en avril 2017 avec le service de réadaptation, chargé de faire le point de la situation dans la perspective d'une mesure d'observation professionnelle, que la péjoration de son état, notamment sur le plan visuel et de l'équilibre, remontait à juin 2014, époque où la charge de travail était semble-t-il importante; elle expliquait que plus elle réalisait des efforts de vision, plus le système vestibulaire dysfonctionnait. Il ressort toutefois de ses explications que des circonstances plus personnelles et relationnelles aient joué un rôle non négligeable à l'époque: l'arrivée d'un nouveau directeur dans le service où elle travaillait, et le refus de la collaboratrice - qui travaillait dans le même espace qu'elle - de travailler dans des conditions à faible luminosité paraissent avoir eu un effet délétère sur ses relations au travail, d'autant qu'elle n'avait pas pu obtenir - malgré ses interventions auprès de plusieurs services différents -, les nouveaux aménagements de son poste de travail qu'elle estimait nécessaires. Elle s'est donc retrouvée en arrêt de travail complet dès octobre 2014. D'autres éléments du dossier montrent, une fois encore sans minimiser l'importance des troubles qui perturbent sa vie depuis 2005, que l'on doit également relativiser les plaintes subjectives de l'assurée: à l'instar des remarques des EPI et de son médecin-conseil notamment, on ne peut qu'être surpris de constater que malgré le tableau sombre décrit par l'assurée et son médecin traitant, elle est tout de même capable de conduire un véhicule - et à cet égard, ses explications pour le justifier ne sont guère convaincantes. C'est d'ailleurs incidemment le lieu de relever que l'avis du médecin traitant, tant dans ses rapports écrits que dans ses déclarations devant la chambre de céans n'apportent guère de contribution convaincante pour l'appréciation de la question litigieuse. Rappelant qu'il suit sa patiente depuis le début de l'année 2014, il a logiquement consenti, lorsque de son audition par la chambre de céans, ne pas avoir pu constater personnellement une aggravation de cet état de santé par rapport à ce qu'il était au moment où la dernière décision de l'OAI a été rendue (2010), précisant toutefois pouvoir en attester d'une part au vu du dossier qu'il avait à disposition, et d'autre part, avec le temps, au vu des plaintes de sa patiente, dans le cadre du rapport de confiance unissant le thérapeute et son patient. Il ne s'agit pas ici de douter de sa bonne foi ou de son objectivité, mais de garder à l'esprit, selon la jurisprudence, qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, le juge ne saurait perdre de vue la divergence existant entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), et le fait que le médecin traitant, en vertu de ce rapport de confiance, aura tendance à aller dans le sens de son patient, à la différence de l'expert qui, de par sa mission, à un rôle plus objectif. Ainsi, on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2). Ce qui n'est pas le cas de l'avis du Dr H______.

17.    Au vu de ce qui précède, la chambre de céans considère que les conclusions auxquelles l'intimé est parvenu au terme de l'instruction complète qu'il a menée, l'amenant à considérer que l'aggravation de l'état de santé alléguée par la recourante, n'était pas démontrée, au degré de la vraisemblance prépondérante, quand bien même a priori elle paraissait plausible, ne sont pas critiquables. Le recours sera dès lors rejeté.

Cela étant, il est précisé, à l'attention de la recourante, qu'il ne s'agit pas ici de considérer que toute atteinte à sa santé aurait disparu depuis la dernière décision rendue par l'OAI, entrée en force, mais bien plutôt de constater que celle-ci, qui subsistait en juillet 2010, mais qui, en cours de route, notamment en raison des mesures prises, tant sur le plan médical que par rapport à sa place de travail, lui avait permis de reprendre une activité professionnelle, n'a guère évolué depuis cette époque, et en tout cas pas de manière à influencer ses droits aux prestations de l'assurance-invalidité.

18.    Bien que la procédure ne soit pas gratuite, la recourante plaidant au bénéfice de l'assistance juridique partielle, la chambre de céans renonce à percevoir un émolument.

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, au sens des considérants.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le