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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2815/2017

ATAS/286/2018 du 03.04.2018 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2815/2017 ATAS/286/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 avril 2018

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1976, domiciliée dans le canton de Genève, assistante de direction, dont le contrat de travail a été résilié le 27 janvier 2016 pour le 31 mars 2016, s’est inscrite au chômage le 29 janvier 2016, auprès de l’office régional de placement (ci-après : ORP) de l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE), dès le 1er avril 2016. Un délai-cadre d’indemnisation a été ouvert en sa faveur du 1er avril 2016 au 31 mars 2018. Monsieur B______ a été désigné comme son conseiller en personnel auprès de l’ORP. À teneur du plan d’actions qu’elle a signé le 11 février 2016, l’assurée s’est engagée à relever quotidiennement sa boîte e-mail privée (liée à l’adresse qu’elle avait communiquée lors de son inscription, à savoir A______@hotmail.com), pour prendre connaissance des communications de l’OCE et y donner suite dans les délais.

2.        Plusieurs convocations à des entretiens de conseil ont été remises à l’assurée en mains propres ou lui ont été envoyées par la poste, mais l’assurée et son conseiller en personnel ont aussi échangé régulièrement par la voie de la messagerie électronique, sans rencontrer de difficulté technique (cf. courriel de l’assurée du 1er septembre 2016 à 13h08 [pièce 31 OCE] ; courriel de l’assurée du 17 octobre 2016 à 16h03 [pièce 36 OCE] ; courriels de l’assurée du 17 octobre 2016 à 16h58, du conseiller en personnel du 19 octobre 2016 à 08h03, de l’assurée du 17 novembre 2016 à 14h53 [pièce 39 OCE] ; courriel de l’assurée du 12 janvier 2017 à 11h44 [pièce 48 OCE] ; courriel de l’assurée du 12 janvier 2017 à 12h35 [pièce 49 OCE] ; courriels de l’assurée du 3 mars 2017 à 12h07, à 12h04, à 12h06 [pièces 55, 57, 59 OCE] ; courriel de l’assurée du 19 avril 2017 à 16h47 [pièce 63 OCE] ; courriel de l’assurée du 20 avril 2017 à 11h49 [pièce 64]).

3.        Lors d’un entretien de conseil qu’elle a eu le 19 avril 2017 avec son conseiller en personnel précité, l’assurée a émis le souhait d’être mise en relation avec une personne au sein de l’OCE qui pourrait répondre à ses questions relatives à l’exportation de l’indemnité de chômage à l’étranger, envisageant d’aller vivre provisoirement chez son père au Portugal.

4.        Par courriel du 4 mai 2017 à 20h15 [pièce 67 OCE] envoyé à l’adresse e-mail précitée de l’assurée, une autre conseillère en personnel, Madame C______, a accusé réception de sa demande d’exportation des prestations de chômage et lui a proposé de discuter concrètement de ce sujet le mercredi suivant, lors d’un entretien pour lequel elle lui envoyait en pièce jointe audit courriel une convocation pour le mercredi 10 mai 2017 à 09h00. L’assurée, qui affirmera n’avoir jamais reçu ce courriel, ne s’est pas rendue à cet entretien.

5.        Par courriel du 8 mai 2017 à 08h15 [pièce 2], l’ORP (depuis l’adresse de messagerie électronique oce-caa-tachesadministratives@etat.ge.ch) a informé l’assurée que son rendez-vous du 1er juin 2017 à 08h15 avec son conseiller en personnel, M. B______, avait été annulé, et que ce dernier lui fixerait un nouveau rendez-vous dès son retour. L’assurée était priée de ne pas répondre à ce courriel.

6.        Souhaitant obtenir un rendez-vous sur le sujet de l’exportation de ses prestations de chômage, l’assurée s’est rendue, le 8 (recte : le 15) mai 2017, au guichet de l’OCE, où son interlocutrice à l’accueil, Madame D______, l’a informée qu’elle avait manqué un rendez-vous en date du 10 mai 2017 avec la conseillère en personnel C______. Vérification faite avec Mme D______ à partir du téléphone portable de l’assurée, il ne se trouvait aucune trace d’un courriel de Mme C______ daté du 4 mai 2017 dans la messagerie électronique de l’assurée, ni dans la boîte de réception, ni dans les dossiers supprimés, ni dans les courriers indésirables, mais un e-mail que l’assurée avait envoyé, en se mettant elle-même en copie, pour un poste d’assistante de direction chez G______ le 4 mai 2017 à 12h40. Avec Mme D______, l’assurée a alors sollicité et aussitôt obtenu un nouveau rendez-vous avec la conseillère en personnel C______, pour le mercredi 17 mai 2017 à 09h00, par le biais d’une convocation datée du 15 mai 2017 remise en mains propres (rubrique signée par l’assurée [pièce 68 OCE]).

7.        Par décision du 16 mai 2017, l’OCE a prononcé à l’encontre de l’assurée une suspension de son droit à l’indemnité de chômage de cinq jours à compter du 11 mai 2017, pour le motif que l’assurée ne s’était pas présentée à l’entretien de conseil du 10 mai 2017 à 09h00, sans fournir d’excuse valable.

8.        Selon l’assurée, lors de l’entretien du 17 mai 2017 sur le sujet de l’exportation des prestations de chômage, la conseillère en personnel C______ a confirmé avoir convoqué l’assurée pour l’entretien manqué du 10 mai 2017 uniquement par le biais d’un courriel, que l’assurée lui a affirmé n’avoir pas reçu, ce à quoi Mme C______ lui a répondu qu’elle ne pouvait rien faire, refusant tant d’inscrire une mention à ce propos dans son dossier que de mettre la boîte de courriels de l’assurée à la disposition du service informatique de l’OCE pour vérification.

9.        Par recommandé du 23 mai 2017, l’assurée a formé opposition à l’encontre de la décision de suspension précitée. Elle n’avait jamais été contactée pour ledit entretien du 10 mai 2017, et n’avait appris qu’une semaine plus tard, en se rendant à l’OCE, qu’une convocation lui aurait été envoyée par courriel. Mme C______ lui avait dit, le 17 mai 2017, qu’aucun courriel ne lui était parvenu mentionnant que son e-mail n’aurait pas été envoyé ou réceptionné avec succès. L’assurée demandait s’il y avait moyen que l’OCE note qu’il lui fallait solliciter une confirmation de réception des courriels qu’il lui enverrait, et elle se disait prête à regarder avec le service informatique de l’OCE pourquoi elle n’avait pas reçu le courriel précité de Mme C______.

10.    Le 31 mai 2017, après que la cheffe de groupe E______ de l’ORP eut demandé au chef de groupe F______ de l’ORP de convoquer rapidement l’assurée sur la question devenant pressante d’une exportation des prestations de chômage (en précisant que, par précaution, il faudrait envisager une convocation par « courrier régulier et mail », car « dernier courrier mail pas reçu »), un nouveau conseiller en personnel, Monsieur G______, a envoyé à l’assurée une convocation pour un entretien de conseil fixé au 6 juin 2017 à 09h00, par un courriel du 31 mai 2017 à 08h48 reproduisant l’essentiel du contenu de la convocation jointe à cet e-mail, en laissant en parallèle un message à l’assurée sur une adresse e-mail « @sms.admin.ch » correspondant à son numéro de téléphone portable et en lui passant un coup de fil.

11.    Par décision sur opposition du 31 mai 2017, l’OCE a rejeté l’opposition de l’assurée et confirmé sa décision initiale du 16 mai 2017. Il appartenait à l’assurée de consulter avec attention sa messagerie électronique afin de prendre connaissance de la convocation de l’ORP, ainsi qu’elle s’y était engagée ; ce moyen de communication était usuel entre l’assurée et l’ORP.

12.    Les 31 mai, 1er, 2, 6, 26 et 27 juin et 3 juillet 2017, l’assurée a échangé des courriels avec le conseiller en personnel G______ concernant un accident de vélo qu’elle avait eu le 30 mai 2017 [pièces 75 et 76 OCE], dont résulte notamment qu’elle suspendait sa demande d’exportation des prestations de chômage au Portugal et que son dossier auprès de l’OCE était annulé en raison de son accident [pièce 78].

13.    Dans l’intervalle, par acte du 29 juin 2017, l’assurée a recouru par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) contre la décision sur opposition précitée. Elle a joint à son recours une copie de la preuve de la réception des courriels qu’elle avait reçus depuis mai 2017 (ne comportant pas la trace de celui de Mme C______ du 4 mai 2017) ainsi que de deux courriels qu’elle avait envoyés et reçus dans le cadre de ses recherches d’emploi le 5 mai 2017. C’était un montant de plus de CHF 1'000.- dont elle se trouvait privée par la suspension de son indemnité de chômage, alors qu’elle avait des difficultés à faire face à ses besoins. L’assurée demandait l’annulation de la décision attaquée, au besoin l’audition comme témoins de Mme D______, M. B______ et M. G______.

14.    Le 25 juillet 2017, l’OCE a communiqué à la CJCAS copie des pièces ayant fondé la décision attaquée, en déclarant persister intégralement dans les termes de cette dernière. L’assurée n’apportait aucun élément nouveau. La messagerie électronique avait été régulièrement utilisée comme moyen de communication entre l’assurée et l’ORP, si bien qu’il paraissait pour le moins surprenant que l’assurée n’ait pas reçu la convocation lui ayant été adressée par ce biais le 4 mai 2017.

15.    Par mémoire du 22 août 2017, l’assurée a objecté que rien ne prouvait, dans les pièces produites par l’OCE, qu’elle avait bien reçu la convocation considérée. Toutes les convocations avaient été contresignées par elle [pièces 12, 15, 19, 23, 30, 34, 47, 52, 61, 68 OCE] ou lui avaient été envoyées par la poste [pièce 43 OCE], de même que divers autres documents (dont les décisions initiale et sur opposition) ; la convocation du 4 mai 2017 pour l’entretien de conseil du 10 mai 2017 était la seule qui lui aurait été envoyée par courriel [pièce 67 OCE]. L’assurée était prête à mettre sa boîte de messagerie électronique à la disposition d’un expert en informatique pour vérification de son affirmation de n’avoir pas reçu ladite convocation. Cela était survenu lorsqu’elle avait demandé à être mise en relation avec une personne spécialisée au sein de l’OCE sur les questions d’exportation des prestations de chômage, dans le but de n’avoir pas à recourir à l’assistance sociale, et elle s’en trouvait pénalisée. Elle persistait à requérir l’annulation de la décision attaquée.

16.    Par duplique du 18 septembre 2017, l’OCE a maintenu sa position. La précaution qu’avait évoquée une cheffe de groupe de l’ORP le 31 mai 2017 d’envoyer une confirmation écrite n’impliquait pas que l’OCE aurait conscience d’un problème lié à l’envoi de courriels. L’assurée affirmait qu’elle s’était rendue à l’OCE le 8 mai 2017 après avoir reçu le courriel d’annulation d’un entretien fixé au 1er juin 2017 et avoir alors appris qu’elle avait manqué un rendez-vous … fixé à deux jours plus tard, ce qui était impossible et soulevait un doute quant à la véracité de ses autres déclarations.

17.    Dans des observations du 4 octobre 2017, l’assurée a indiqué ne pas comprendre l’acharnement de l’OCE à son égard, alors que le courriel qu’elle affirmait n’avoir pas reçu lors de son passage le 8 mai 2017 à l’OCE était censé lui avoir été envoyé le 4 mai 2017. Elle a réitéré la proposition d’entendre Mme D______ comme témoin et de faire analyser sa messagerie électronique par un expert en informatique. La décision attaquée devait être annulée.

18.    Cette écriture a été communiquée à l’OCE le 5 octobre 2017.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1), relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0). Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie, le recours étant dirigé contre une décision sur opposition rendue en application de la LACI.

Le recours a été interjeté en temps utile (art. 60 LPGA), et il satisfait aux exigences de forme et de contenu prescrites par la loi (art. 61 let. b LPGA ; cf. aussi art. 89B LPA).

La recourante a qualité pour recourir, étant touchée par la décision attaquée et ayant un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (art. 59 LPGA).

Le recours est donc recevable.

2.        a. L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. L'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, être sans emploi ou partiellement sans emploi, avoir subi une perte de travail à prendre en considération, être domicilié en Suisse, avoir achevé sa scolarité obligatoire et n'avoir pas encore atteint l'âge donnant droit à une rente AVS et ne pas toucher de rente de vieillesse de l'AVS, remplir les conditions relatives à la période de cotisation ou en être libéré, être apte au placement et satisfaire aux exigences de contrôle (art. 8 al. 1 LACI). Ces conditions sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2). Elles sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l’ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), ainsi que – dans les limites d’admissibilité de telles directives administratives (ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 p. 5 s. et doctrine et jurisprudence citées) – par les instructions édictées par le secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO) en sa qualité d’autorité de surveillance de l’assurance-chômage chargée d’assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l’indemnité de chômage (Bulletin LACI IC).

La condition de satisfaire aux exigences de contrôle, posée par l’art. 8 al. 1 let. g LACI, renvoie aux devoirs de l’assuré et prescriptions de contrôle prévus par l’art. 17 LACI. Cette disposition-ci impose aux chômeurs des devoirs matériels (al. 1 et 3) – qui concernent la recherche et l’acceptation d’un emploi, ainsi que la participation aux mesures de marché du travail et aux séances et entretiens obligatoires – et des devoirs formels (al. 2) – qui ont pour objet l’inscription au chômage et la revendication régulière des prestations au moyen de formules officielles (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, n. 1 ad art. 17).

b. La violation de ces obligations expose l’assuré à une suspension de son droit à l’indemnité. En effet, selon l’art. 30 al. 1 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu notamment lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c) ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d).

Notamment dans de tels cas, l’assuré adopte un comportement qui, de manière générale, est de nature à prolonger la durée de son chômage. Il n’est en principe pas d’emblée privé de prestations, mais tout d’abord sanctionné en application de l’art. 30 al. 1 let. c ou d LACI, puis, en cas de violations répétées, déclaré inapte au placement, en vertu des art. 8 al. 1 let. f et 15 LACI. Jurisprudence et doctrine s’accordent à dire que, du moins sauf réitérations, la sanction prévue par l’art. 30 al. 1 LACI constitue une manière appropriée et adéquate de faire participer l’assuré au dommage qu’il cause à l’assurance-chômage en raison d’une attitude contraire à ses obligations (ATF 125 V 197 consid. 6a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 208/06 du 3 août 2007 consid. 3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 3 ad art. 17, n. 5 ad art. 30). La suspension du droit à l'indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d'exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, 2ème éd. 2007, p. 2424 n. 825).

c. La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3). L’OACI distingue trois catégories de faute – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI). Des antécédents remontant à moins de deux ans justifient une prolongation de la durée de suspension (art. 45 al. 5 OACI ; Boris RUBIN, op. cit., n. 114 ss ad art. 30).

En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème indicatif à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour les organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas d'espèce et de fixer la sanction en fonction de la faute (arrêt du Tribunal fédéral 8C_425/2014 du 12 août 2014, consid. 5.1).

Sauf pour un manquement d'une aussi faible gravité qu'une absence isolée à un entretien à l'ORP, le prononcé d'une suspension ne suppose pas qu'un avertissement préalable ait été adressé à l'assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_834/2010 du 11 mai 2011 consid. 2.5 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 63 ad art. 30).

d. La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation, qui est soumise à l'examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d'appréciation de manière contraire au droit, soit si elle a commis un excès positif ("Ermessensüberschreitung") ou négatif ("Ermessens-unterschreitung") de son pouvoir d'appréciation ou a abusé ("Ermessens-missbrauch") de celui-ci (arrêts du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2 ; 8C_33/2012 du 26 juin 2012 consid. 2.2 ; arrêt 8C_31/2007 du 25 septembre 2007 consid. 3.1, non publié in ATF 133 V 640 mais dans SVR 2008 ALV n° 12 p. 35). Ce sont aussi l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation qui sont invocables devant la chambre de céans, au titre de la violation du droit (art. 61 al. 1 et 89A LPA), ce qui implique que lorsque la loi confère un pouvoir d’appréciation à un assureur social (comme en l’espèce à l’intimé s’agissant du prononcé de sanctions), la chambre de céans doit uniquement s’assurer qu’il a fait un usage de son pouvoir d’appréciation sans abus ni excès (Stéphane GRODECKI / Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 766 et 1075). Le juge ne s'écarte de l'appréciation de l'administration que s'il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2). Il y a excès du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité exerce un pouvoir d’appréciation que la loi ne lui confère pas ou adopte une autre solution que l’un ou l’autre de celles que la loi lui permet de retenir, ou lorsque, s’estimant liée, n’exerce pas le pouvoir d’appréciation que lui confère la loi (Stéphane GRODECKI / Romain JORDAN, op. cit. n. 767 s.).

e. Selon l’art. 30 al. 2 LACI, l’autorité cantonale prononce les suspensions au sens de l'al. 1 (not. let. d). Dans d’autres cas, ce sont les caisses qui statuent.

3.        a. En l’espèce, la recourante conteste que la condition première du prononcé d’une sanction à son encontre, à savoir la commission d’une faute, soit réalisée, pour le motif que – affirme-t-elle – elle n’a jamais reçu la convocation à l’entretien du 10 mai 2017 à 09h00 auquel l’intimé lui reproche de ne pas s’être présentée. Il est évident que la recourante ne saurait être sanctionnée pour, le cas échéant, ne s’être pas rendue à un entretien dont elle aurait ignoré l’existence même.

La question est donc de savoir s’il doit être admis que la recourante a reçu ladite convocation.

b. De façon générale s’applique dans le domaine des assurances sociales la règle qu’une preuve stricte n’est en principe pas exigée. Sauf dispositions contraires de la loi, il y a lieu de se fonder sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; 126 V 353 consid. 5b ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a ; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, Procédure et contentieux, in Droit de la sécurité sociale, vol. II, éd. par Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, vol. II, 2015, p. 483 ss, 517 s.).

C’est essentiellement dans le domaine des prestations des assurances sociales que cet assouplissement du degré de preuve requis se justifie, en considération du fait que les faits en la matière sont souvent hypothétiques et que la médecine n’est pas toujours une science exacte (Ghislaine FRÉSARD-FELLAY, op. cit., p. 517 ; Ueli KIESER, ATSG Kommentar, 3ème éd., 2015, n. 46 ss ad art. 43). Selon la jurisprudence, la règle du degré de vraisemblance prépondérante est toutefois suffisante au stade de l'administration de masse, en ce qui concerne la preuve de faits déterminants pour la notification d'une communication (ATF 121 V 5 consid. 3b, p. 6, 119 V 7 consid. 3c/aa p. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_711/2009 du 26 février 2010 consid. 4.2 ; 9C_639/2007 du 25 février 2008). Il n’en reste pas moins que la preuve de la notification d’une communication incombe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. Si la notification d’un acte envoyé sous pli simple ou sa date sont contestées et s’il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l’envoi (arrêt du Tribunal fédéral 9C_37/2009 du 14 mai 2009 consid. 3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 28 ss et 57 ad art. 1).

4.        a. En l’espèce, il sied préalablement de rectifier un élément de la chronologie des faits. Il est en effet manifeste que la recourante fait erreur lorsqu’elle écrit, même à réitérées reprises, qu’elle s’est rendue le 8 mai 2017 au guichet de l’intimé, après avoir reçu un courriel de ce dernier l’informant qu’un entretien auquel elle avait été convoquée pour le 1er juin 2017 à 08h15 avec le conseiller en personnel B______ était annulé, et que c’est à cette occasion qu’elle a appris de son interlocutrice, Mme D______, qu’elle avait manqué un rendez-vous le 10 mai 2017 avec la conseillère en personnel C______. Le 8 mai 2017, deux jours avant l’entretien considéré, la recourante ne pouvait encore avoir manqué ce dernier. C’est une semaine plus tard, le 15 mai 2017, que les faits précités se sont produits, soit le jour même où, à sa demande, une nouvelle convocation, datée de ce 15 mai 2017, a été remise à la recourante en mains propres, contre signature, pour le surlendemain, 17 mai 2017 à 09h00.

Il n’y a pas lieu d’inférer de cette erreur manifeste que la véracité des allégations de la recourante doit être mise en doute.

b. L’intimé ne nie pas que la conseillère en personnel chargée de contacter la recourante sur la question spécifique de l’exportation des prestations de chômage n’a envoyé que par courriel une convocation à la recourante pour l’entretien fixé au 10 mai 2017, sans se préoccuper de la bonne réception de ce message électronique, et il n’apporte pas la preuve que ce courriel a bien été reçu dans la messagerie électronique de la recourante.

S’il est vrai que des échanges par courriels étaient déjà intervenus avec succès entre la recourante et le précédent conseiller en personnel de cette dernière, il n’en résulte pas une présomption que ledit courriel du 4 mai 2017 à 20h15 est bien parvenu dans la sphère de puissance de la recourante, même si cette dernière s’était engagée à relever quotidiennement sa boîte e-mail privée. Il faut constater d’une part que la recourante n’avait aucun intérêt à ne pas se rendre audit entretien, qu’elle avait sollicité en vue de savoir si et à quelles conditions elle pourrait bénéficier d’une exportation des prestations de chômage si elle se rendait au Portugal chez son père, et d’autre part que, à teneur du dossier, elle avait été convoquée à des entretiens de conseil systématiquement par des convocations lui ayant été remises en mains propres contre signature [pièces 12, 15, 19, 23, 30, 34, 47, 52, 61, 68 OCE] ou envoyées par la poste [pièce 43 OCE]. L’ORP a d’ailleurs pris soin de doubler l’envoi de son courriel suivant du 31 mai 2017 à 08h48 de prise de contact avec la recourante pour s’assurer de la bonne réception de ce message électronique. Il serait disproportionné d’effectuer une expertise informatique de la messagerie électronique de la recourante pour déterminer si le courriel considéré du 4 mai 2017 à 20h15 était bien arrivé dans ses courriers reçus, voire dans ses spams.

c. La chambre de céans estime que, dans ce complexe de faits, il ne peut être retenu comme prouvé, ni même comme hautement vraisemblable, que la recourante a effectivement reçu le courriel considéré, et donc qu’une faute peut et doit lui être reprochée.

5.        Au demeurant, il résulte de l’ensemble du dossier que la recourante a toujours pris ses obligations de chômeuse et de bénéficiaire de prestations très au sérieux.

Or, selon la jurisprudence (arrêt du Tribunal fédéral 8C_928/2014 du 5 mai 2015 consid. 5.1 et jurisprudence citée), l'assuré qui a oublié de se rendre à un entretien et qui s'en excuse spontanément, ne peut être suspendu dans l'exercice de son droit à l'indemnité si l'on peut considérer par ailleurs qu'il prend ses obligations de chômeur et de bénéficiaire de prestations très au sérieux. Tel est le cas, notamment, s'il a rempli de façon irréprochable ses obligations à l'égard de l'assurance-chômage durant les douze mois précédant cet oubli (arrêts 8C_675/2014 du 12 décembre 2014 consid. 3; 8C_447/2008 du 16 octobre 2008 consid. 5.1, in DTA 2009 p. 271 et la référence). La jurisprudence a aussi précisé que lorsque l'assuré manque par erreur ou inattention un entretien de conseil et de contrôle, mais prouve néanmoins, par son comportement en général, qu'il prend ses obligations de chômeur au sérieux, il n'y a pas lieu de le suspendre dans son droit à l'indemnité pour comportement inadéquat (arrêt C 209/99 précité). Dans cette affaire, un assuré avait manqué un entretien de conseil car il avait inscrit la mauvaise date dans son agenda, et ne s'en était rendu compte que lorsque l'autorité lui avait reproché son absence. La sanction infligée avait alors été levée par le Tribunal fédéral.

Si, contrairement à ce que retient la chambre de céans, il fallait considérer que le courriel du 4 mai 2017 à 20h15 était bien parvenu dans la messagerie électronique de la recourante et que celle-ci l’avait par exemple effacé par inadvertance, il faudrait admettre que l’intimé devait renoncer à lui infliger une suspension de son droit à l’indemnité de chômage.

6.        Le recours sera donc admis et la décision attaquée (s’étant substituée à la décision initiale) sera annulée.

7.        La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

* * * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision sur opposition de l’office cantonal de l’emploi du 31 mai 2017.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

Le président

 

 

 

 

Raphaël MARTIN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le