Skip to main content

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1735/2020

ATAS/436/2021 du 06.05.2021 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

.rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1735/2020 ATAS/436/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 mai 2021

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, sans domicile connu, représenté par le Service de protection de l'adulte (D______)

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

1.        Le 7 avril 2017, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) a institué une mesure de curatelle de représentation et de gestion en faveur de Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né en ______ 1970, de nationalité espagnole.

2.        Celui-ci, en date du 8 décembre 2017, a déposé une demande de prestations auprès de l'office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après : OAI), en invoquant une dépression et un problème d'alcool apparus quatre ans auparavant environ et entraînant une totale incapacité de travail.

3.        Le dossier établi par l'OAI contient, notamment :

-          une demande de renseignements adressée le 12 décembre 2017 au Centre médical des B______ ;

-          une demande de renseignements adressée le 16 février 2018 au Centre C______ ;

-          une sommation adressée le 27 mars 2018 à l'assuré en personne, à l'adresse du D______, lui expliquant que son médecin traitant n'avait pas répondu aux demandes de renseignements médicaux et lui demandant d'intervenir directement auprès de lui ;

-          un courrier adressé le 5 avril 2018 au D______ demandant à ce dernier de faire le nécessaire auprès des médecins de l'assuré afin qu'ils répondent aux questions qui leur avaient été adressées en dates des 12 décembre 2017 et 16 février 2018 ;

-          une sommation adressée le 15 mai 2018 à l'assuré, à l'adresse du D______, reprenant les termes de la sommation du 27 mars 2018 en le rendant une nouvelle fois attentif aux dispositions légales traitant de l'obligation de renseigner et de collaborer ;

-          la réponse du 1er juin 2018 du docteur E______, spécialiste FMH en médecine générale, et de Madame F______, spécialiste FSP en psychothérapie, indiquant que l'assuré avait débuté un suivi à la Fondation C______ en janvier 2015 pour une dépendance à l'alcool, qu'il souffrait également d'une forte anxiété ; l'assuré avait travaillé en qualité d'opérateur logistique chez G______ dans la maintenance, puis douze ans dans le domaine de la sécurité ; il émargeait à l'aide sociale depuis novembre 2011, avait été sans domicile fixe, puis hébergé depuis l'automne 2016 dans des hôtels ; une médication lui avait été prescrite dans le but de diminuer l'appétence à l'alcool, qui avait été stoppée en raison d'un manque de compliance ; sur le plan psychiatrique, un état anxiodépressif avait justifié la prescription d'un antidépresseur et d'une médication anxiolytique en septembre 2015 ; là encore, la compliance s'était avérée irrégulière ; entre 2017 et 2018, l'assuré ne s'était plus rendu qu'irrégulièrement au Centre C______, de sorte que les signataires du courrier n'étaient pas en mesure de répondre aux questions qui leur étaient posées ; étaient néanmoins retenus à titre de diagnostics : des troubles mentaux et du comportement liés à l'utilisation d'alcool, un syndrome de dépendance, une phobie sociale et un épisode dépressif sévère entraînant une totale incapacité de gain à court et moyen terme ;

-          un avis du Service médical régional de l'AI (SMR) du 13 novembre 2018 notant que la dépendance à l'alcool semblait secondaire à l'anxiété et qu'il y avait eu un arrêt de tout suivi depuis le 8 décembre 2017, qu'aucun élément médical postérieur ne figurait au dossier et qu'il était dès lors nécessaire de demander à l'assuré, par l'intermédiaire de sa curatrice, de consulter un psychiatre de son choix, aux frais de l'OAI, afin d'obtenir un rapport médical initial ;

-          un courrier adressé en ce sens au D______ le 15 novembre 2018 ;

-          la réponse du D______ du 29 novembre 2018, indiquant que le choix de l'assuré s'était porté sur le docteur H______;

-          une demande de renseignements adressée au Dr H______ par l'OAI le 5 mars 2019 ;

-          un dernier rappel adressé au Dr H______ le 18 avril 2019 ;

-          une sommation adressée à l'assuré au D______ le 18 avril 2019, l'informant que le médecin n'avait pas répondu aux demandes de renseignements et attirant une nouvelle fois l'attention sur l'obligation de collaborer et les conséquences en cas de non-respect de celle-ci ;

-          un courrier adressé le 4 juillet 2019 au D______ demandant si l'assuré était suivi par un médecin ou s'il avait été revu en consultation de la Fondation C______ ;

-          une réponse par courriel de la curatrice de l'intéressé, le 1er juillet 2019, indiquant que renseignement pris auprès du médecin qui devait assurer le suivi, l'assuré n'avait pas donné suite à plusieurs de ses rendez-vous, de sorte que le praticien n'était pas en mesure d'établir un rapport ;

-          un rappel adressé le 23 août 2019 par l'OAI au D______ ;

-          un courriel adressé à la curatrice le 3 octobre 2019 ;

-          un courriel du même jour répondant que celle-ci avait quitté le service ;

-          une sommation formelle adressée le 13 novembre 2019 au D______, demandant une nouvelle fois à celui-ci si l'assuré était suivi ou s'il avait été revu par la Fondation C______, avec un délai au 8 janvier 2020 ;

-          un courrier adressé directement à l'assuré, à l'adresse du D______, le 15 janvier 2020, l'informant que, malgré cette sommation adressée au D______, l'OAI ne disposait toujours pas d'éléments suffisants pour statuer sur sa demande et évaluer son droit aux prestations et lui fixant un nouveau délai au 24 février 2020 ;

-          un projet de décision de refus de prestations du 13 mars 2020 adressé au D______.

4.        Par décision du 18 mai 2020, l'OAI a rejeté la demande de prestations de l'assuré au motif qu'en l'état du dossier, l'existence d'une atteinte à la santé ayant des répercussions durables sur sa capacité de gain n'avait pas été rendue vraisemblable.

5.        Par écriture du 18 juin 2020, Monsieur I______, du D______, a interjeté recours auprès de la Cour de céans en sa qualité de curateur de l'assuré, au nom et pour le compte de ce dernier.

6.        Invité à se déterminer, l'intimé, dans sa réponse du 8 juillet 2020, a conclu au rejet du recours.

L'intimé souligne en l'espèce, que malgré plusieurs rappels et sommations, tant à l'assuré, qu'à son représentant et ses médecins, il n'a pu obtenir les éléments médicaux nécessaires à l'appréciation de la situation.

En l'absence d'un empêchement valable pouvant justifier de tels manquements, c'était à juste titre qu'il a statué en l'état du dossier.

7.        Le 29 juillet 2020, le D______, auquel le dossier avait pourtant été mis à disposition pour consultation par la Cour de céans en date du 9 juillet 2020, a allégué n'avoir toujours pas reçu copie du dossier de l'OAI et a sollicité une nouvelle prolongation au 31 août 2020 pour compléter son argumentation.

8.        Finalement, par écriture du 31 août 2020, le D______ a relevé que le Dr E______, et Madame F______, de la Fondation C______, avaient posé les diagnostics de troubles mentaux et du comportement liés à l'utilisation d'alcool, de phobie sociale et d'épisode dépressif sévère.

Le D______ constate qu'aucun élément postérieur à cet avis médical n'a pu être recueilli par l'intimé.

Il fait valoir que la curatrice attitrée de l'assuré a quitté l'institution à l'époque des demandes de renseignements, ce qui explique qu'un suivi n'a pu être assuré correctement.

Il en tire la conclusion que l'absence de réponse aux rappels et sommations de l'office est due à des erreurs d'organisation à l'interne du D______, ce dont il demande qu'il soit tenu compte.

Selon lui, cette omission ne saurait être considérée comme inexcusable, dans la mesure où elle n'est pas due à un refus de collaboration, mais au départ de la curatrice initialement désignée par le TPAE. Il en irait de même du comportement de l'assuré lui-même, puisqu'aucun rappel ou sommation ne lui a été adressé directement.

9.        Par écriture du 17 septembre 2020, l'intimé a persisté dans ses conclusions en rejet du recours.

L'intimé allègue que par courriers des 15 novembre, 30 novembre 2018, 4 juillet, 23 août 2019, courriel du 3 octobre 2019 et sommation du 13 novembre 2019, il a tenté d'obtenir des documents médicaux auprès du D______, sans succès.

Il rappelle qu'au nombre des tâches incombant au curateur, figure l'obligation de s'assurer, régulièrement et de manière diligente, que les droits auxquels son protégé peut prétendre, notamment en matière d'assurance-invalidité, sont respectés.

Devant le constat qu'aucun document médical suffisant n'avait pu être obtenu pour statuer sur le droit aux prestations, l'OAI était légitimé à rendre la décision litigieuse, dans la mesure où la preuve d'une atteinte invalidante n'a pu être apportée à satisfaction de droit.

En effet, si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas pour autant du fardeau de la preuve.

 

EN DROIT

 

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.        Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était alors déjà pendant devant la Cour de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 83 LPGA).

4.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

5.        Le litige porte sur la question de savoir si c'est à juste titre que l'intimé a nié au recourant le droit à des prestations en statuant en l'état du dossier, vu son absence de collaboration.

6.        Aux termes de l'art. 43 al. 1 1ère phrase LPGA, l'assureur examine les demandes, prend d'office les mesures d'instruction nécessaires et recueille les renseignements dont il a besoin. L'assuré doit se soumettre à des examens médicaux et/ou techniques si ceux-ci sont nécessaires à l'appréciation du cas et qu'ils peuvent être raisonnablement exigés de sa part (art 43 al. 2 LPGA).

Si l'assuré ou d'autres requérants refusent de manière inexcusable de se conformer à leur obligation de renseigner ou de collaborer à l'instruction, l'assureur peut se prononcer en l'état du dossier ou clore l'instruction et décider de ne pas entrer en matière. Il doit alors avoir adressé une mise en demeure écrite les avertissant des conséquences juridiques et leur impartissant un délai de réflexion convenable (art. 43 al. 3 LPGA).

7.        En l'espèce, le caractère inexcusable du manque de réaction du D______, ne fait aucun doute, bien qu'il s'en défende. À cet égard, il suffira de relever que la première sommation adressée au D______ remonte à avril 2018, alors que le départ de la curatrice invoqué par le service n'est intervenu que durant l'automne 2019 et ne saurait donc expliquer l'absence de réponse du D______.

Quoi qu'il en soit, celui-ci ne saurait invoquer des règles d'organisation interne pour se défausser de ses obligations envers l'intimé et son pupille.

Enfin, on rappellera que, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une partie répond de toute faute commise par ses auxiliaires (ATF 114 Ib 69ss consid. 2 et 3 ; André GRISEL, Traité de droit administratif, vol II, Neuchâtel 1984, p. 897; Alfred KÖLZ / Isabelle HÄNER, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, Zürich 1993, p. 98, ch. 151), de sorte que la faute du curateur est malheureusement imputable à l'assuré lui-même, dont les rares éléments médicaux recueillis permettent de penser que l'attitude et son absence de collaboration sont imputables précisément à son problème d'addiction à l'alcool et non à sa seule mauvaise volonté.

Dans ces circonstances, on ne saurait reprocher à l'OAI d'avoir statué sur la base du dossier, au vu de l'échec de ses multiples et réitérées tentatives d'obtenir un rapport médical digne de ce nom.

Encore faut-il vérifier si c'est à juste titre que l'intimé, au vu du seul document médical recueilli en dépit de l'attitude du recourant, a rejeté la demande de ce dernier.

8.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain. De plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

En vertu de l'art. 28 al. 2 LAI, l'assuré a droit à une rente entière s'il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s'il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

9.        a. Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; ATF 102 V 165 consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l'existence d'une atteinte à la santé psychique suppose la présence d'un diagnostic émanent d'un expert (psychiatre) et s'appuyant selon les règles de l'art sur les critères d'un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

b. Dans l'ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ;ATF 132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

c. L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

d. Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d'évaluation normative et structurée si elle n'est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu'il n'existe aucun indice en faveur d'une incapacité de travail durable ou lorsque l'incapacité de travail est niée sous l'angle psychique sur la base d'un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d'éventuelles appréciations contraires n'ont pas de valeur probante du fait qu'elles proviennent de médecins n'ayant pas une qualification spécialisée ou pour d'autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l'absence d'un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n'a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

10.    Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d'analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-          Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.     Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2) 

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-          Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l'évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

11.    Selon la jurisprudence applicable jusqu'ici, un syndrome de dépendance primaire à des substances psychotropes (dont l'alcool) ne pouvait conduire à une invalidité au sens de la loi que s'il engendrait une maladie ou occasionnait un accident ou s'il résultait lui-même d'une atteinte à la santé physique ou psychique ayant valeur de maladie. Cette jurisprudence reposait sur la prémisse que la personne souffrant de dépendance avait provoqué elle-même fautivement cet état et qu'elle aurait pu, en faisant preuve de diligence, se rendre compte suffisamment tôt des conséquences néfastes de son addiction et effectuer un sevrage ou à tout le moins entreprendre une thérapie par (cf. notamment ATF 124 V 265 consid. 3c).

Dans un arrêt du 11 juillet 2019 (ATF 145 V 215), le Tribunal fédéral est parvenu à la conclusion que sa pratique en matière de syndrome de dépendance ne peut plus être maintenue. D'un point de vue médical, les syndromes de dépendance et les troubles liés à la consommation de substances diagnostiqués lege artis par un spécialiste doivent également être considérés comme des atteintes (psychiques) à la santé significatives au sens du droit de l'assurance invalidité (consid. 5.3.3 et 6).

Le caractère primaire ou secondaire d'un trouble de la dépendance n'est plus décisif pour en nier d'emblée toute pertinence sous l'angle du droit de l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.1.1). Par conséquent, il s'agit, comme pour toutes les autres troubles psychiques, de déterminer selon une grille d'évaluation normative et structurée (à cet égard, ATF 141 V 281) si, et le cas échéant, dans quelle mesure un syndrome de dépendance diagnostiqué par un spécialiste influence dans le cas concret la capacité de travail de l'assuré. La gravité de la dépendance dans un cas particulier peut et doit être prise en compte dans la procédure de preuve structurée (ATF 145 V 215 consid. 6.3). Ceci est d'autant plus important que dans le cas des troubles de la dépendance - comme dans celui d'autres troubles psychiques - il y a souvent un mélange de troubles ayant valeur de maladie ainsi que de facteurs psychosociaux et socio-culturels. L'obligation de diminuer le dommage (art. 7 LAI) s'applique également en cas de syndrome de dépendance, de sorte que l'assuré peut être tenu de participer activement à un traitement médical raisonnablement exigible (art. 7 al. 2 let. d LAI). S'il ne respecte pas son obligation de diminuer le dommage, mais qu'il maintient délibérément son état pathologique, l'art. 7b al. 1 LAI en liaison avec l'art. 21 al. 4 LPGA permet le refus ou la réduction des prestations (consid 5.3.1).

12.    Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration ou l'instance de recours a besoin de documents que le médecin ou d'autres spécialistes doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 256, consid. 4; ATF 115 V 133 consid. 2).

13.    a. Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2). a)

b. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3 ; ATF 122 V 157 consid.1c).

c. Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351, consid. 3b/bb).

14.    En l'espèce, force est de constater que le seul rapport médical que l'intimé a pu obtenir est celui de la Fondation C______, qui, s'il retient certes des diagnostics (troubles mentaux et du comportement liés à l'utilisation d'alcool, syndrome de dépendance, phobie sociale et épisode dépressif sévère) et conclut à une totale incapacité de travail, convient néanmoins qu'il est impossible de répondre aux questions posées puisque l'assuré ne s'est plus présenté après 2018.

Les tentatives de l'intimé pour réinstaurer un suivi médical à ses propres frais sont demeurées vaines.

En conséquence, il a été impossible à l'intimé d'éclaircir la question de savoir si l'alcoolisme du recourant et ses autres atteintes psychiques pouvaient ou non être qualifiés d'invalidants au vu des différents indicateurs posés par la jurisprudence.

Il découle de ce qui précède que l'existence de troubles psychiques ayant une incidence sur la capacité de travail n'est pas démontrée au degré de la vraisemblance prépondérante requis en matière d'assurances sociales, de sorte que c'est à juste titre que l'intimé a rejeté la demande de prestations sur la base du dossier.

Eu égard aux considérations qui précèdent, le recours est rejeté.


15.     

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renonce à percevoir l'émolument.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le