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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3870/2015

ATAS/320/2016 du 18.04.2016 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3870/2015 ATAS/320/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 avril 2016

6ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, représenté par le CENTRE SOCIAL PROTESTANT

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), requérant d’asile macédonien né le ______1990, est arrivé en Suisse en juin 2011, accompagné par sa mère.

2.        Le 25 février 2014, il a déposé une demande de prestations d’invalidité auprès de l’Office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), en invoquant une spina bifida (déformation vertébrale).

3.        En vue d’instruire sa demande, l’OAI a récolté divers rapports, au nombre desquels figurent :

-          un bilan établi le 30 avril 2012 par Mme B______, ergothérapeute. Il est difficile de communiquer avec l’assuré en raison de ses difficultés linguistiques. Ce dernier est indépendant pour le transfert de son fauteuil roulant vers son lit et vers les WC, mais a besoin d’aide pour les soins. À l’extérieur, sa mère l’accompagne fréquemment car s’il peut se déplacer seul sur terrain plat, il doit être aidé et surveillé lorsque le terrain est en pente ou qu’il doit franchir un trottoir. Il est partiellement dépendant d’autrui pour ses soins et sa douche matinale. Pour aller aux toilettes, il bénéficie de WC adaptés. Il peut s’habiller seul sur son lit mais demande souvent de l’aide en raison de douleurs dorsales. C’est sa mère qui fait généralement les courses et la cuisine. En revanche, il peut s’alimenter et déglutir sans problème ;

-          un rapport du 2 juillet 2013 du Dr C______, médecin auprès du Service de neurorééducation des HUG. L’assuré a été opéré d’une scoliose à trois reprise entre mars et mai 2013. Il porte une sonde urinaire sus-pubienne, et doit être assisté pour l’évacuation des selles. Pour se laver et s’habiller, il est assisté par les soins à domicile le matin et par sa mère le soir, car il ne peut s’occuper que de la partie supérieure du corps. Il se plaint d’un manque de stabilité de son fauteuil roulant et d’une perte d’équilibre, engendrant un risque de chute ;

-          un rapport du 23 janvier 2014 du Dr C______. L’assuré commence à sortir seul dans son quartier avec son fauteuil roulant, mais il a toujours des difficultés pour monter les trottoirs. Son ergothérapeute évalue ledit fauteuil ;

-          deux rapports des 10 mars et 14 juillet 2014 de la Dresse D______-, spécialiste en prévention/santé publique et médecin-traitant. L’assuré souffre depuis sa naissance d’une spina bifida, d’une paraplégie complète, d’une cyphoscoliose, d’une displasie des hanches, d’une vessie et d’intestins neurogènes, ainsi que d’un syndrome d’Arnold Chiari. Il présente des limitations en lien avec sa paraplégie et sa déformation rachidienne. Lors de son arrivée en Suisse en 2011, il était déjà incapable de travailler ;

-          un rapport du 25 juillet 2014 du Dr C______, confirmant les diagnostics incapacitants de spina bifida myéloméningocèle opérée ; paraplégie, vessie et intestins neurogènes ; cyphoscoliose sévère opérée ; dysplasie de la hanche, défaut de croissance des membres inférieurs ; syndrome d’Arnold Chiari avec hydrocéphalie traitée dans l’enfance. Jusqu’à son arrivée en Suisse, l’assuré était dépendant de sa mère pour toutes les activités quotidiennes. En 2012, il a été hospitalisé pour des douleurs dorsolombaire, des lésions cutanées, ainsi qu’une incontinence urinaire et fécale. En 2013, il a subi une correction chirurgicale de scoliose. Il reste incapable de sortir seul car il n’a pas pu obtenir le financement d’un système d’entraînement électrique pour son fauteuil roulant. Ses troubles d’équilibre et sa scoliose restreignent sa faculté à porter des objets. Sa capacité de travail est nulle depuis sa naissance.

4.        Par décision du 3 mars 2015, l’OAI a refusé de lui accorder une rente d’invalidité et des mesures d’ordre professionnel, au motif qu’il était déjà invalide lors de son arrivée en Suisse en 2011.

5.        Cette décision est entrée en force.

6.        Le 23 mars 2015, l’assuré a déposé une demande d’allocation pour impotent.

Il avait besoin d’aide pour se vêtir/dévêtir ; se lever/s’asseoir/se coucher ; préparer ses repas et cuisiner ; se laver/se doucher ; aller aux toilettes ; se déplacer à l’intérieur/à l’extérieur sur sa chaise roulante et entretenir des contacts sociaux. En outre, il était quotidiennement assisté par l’IMAD (institution de maintien à domicile) pour des soins médicaux et sa toilette, et avait besoin d’une surveillance personnelle pour ses tâches quotidienne. Enfin, il nécessitait l’accompagnement durable de sa mère pour faire face aux nécessités de la vie et éviter un isolement.

7.        L’OAI a diligenté une enquête au foyer de E______, domicile de l’assuré, en vue de déterminer son degré d’impotence. Dans son rapport du 2 juillet 2015, l’enquêtrice a indiqué ce qui suit :

-          pour se vêtir et se dévêtir : l’assuré, selon ses dires, avait pris l’habitude de se vêtir seul depuis qu’il était jeune. Sa mère lui préparait ses vêtements sur le canapé, puis il s’habillait de manière autonome. Il avait certes besoin d’aide pour prendre ses habits en haut de l’armoire, mais on pouvait exiger qu’ils soient disposés à sa hauteur. L’aide requise n’était donc ni importante ni régulière ;

-          se lever, s’asseoir, se coucher : en raison de sa maladie, l’assuré était incapable de se tenir debout, depuis toujours. Comme il souffrait d’une escarre fessière du côté gauche, il lui était plus confortable de dormir sur le canapé. Il pouvait faire seul les transferts entre son fauteuil roulant et le canapé ;

-          manger : l’assuré était autonome pour couper les aliments et les porter à sa bouche ;

-          faire sa toilette : l’assuré, qui manquait d’équilibre, ne pouvait pas s’installer sur le siège de douche et se laver seul. Il était donc assisté trois fois par semaine par une infirmière de l’IMAD pour se doucher ; en revanche, il était capable de se coiffer, de se raser et de faire sa toilette seul le matin dans une salle de bain destinée aux handicapés ;

-          aller aux toilettes : l’assuré était autonome, pour autant qu’il puisse utiliser des sanitaires adaptés aux paraplégiques. Cependant, une manière inhabituelle d’aller aux toilettes était retenue (vidange manuelle des selles) ;

-          se déplacer : à l’intérieur du foyer, l’assuré était capable de se mouvoir seul en chaise roulante. Pour l’extérieur, il avait fait l’acquisition d’un système de traction électrique pour son fauteuil roulant, ce qui lui permettait se déplacer seul et d’emprunter les transports publics, notamment pour se rendre à l’hôpital ou au centre commercial de Balexert. L’aide de sa mère et de l’IMAD, sollicitée ponctuellement, ne paraissait ni importante ni régulière ;

-          soins exigés par l’invalidité : trois fois par semaine, une infirmière de l’IMAD surveillait son transit et soignait une escarre sacrée sur sa fesse gauche. Elle devait aussi commander des médicaments et du matériel ;

L’infirmière a précisé que l’assuré parlait un peu le français. En fin d’entretien, elle avait sollicité une traductrice habituée à l’accompagner chez le médecin pour clarifier certains faits et lui expliquer en quoi consistait l’allocation d’impotent. En conclusion, une aide régulière lui paraissait nécessaire depuis toujours pour trois actes ordinaires de la vie, soit se lever, se baigner/se doucher et aller aux toilettes de manière inhabituelle. Par conséquent, elle recommandait l’octroi d’une allocation pour impotent de degré faible depuis mars 2014.

8.        Le 6 juillet 2015, l’OAI, faisant siennes les conclusions de l’enquête, a transmis à l’assuré un projet d’acceptation d’allocation pour impotent de degré faible dès le
1er mars 2014. Il a précisé que son droit était suspendu durant le mois de février 2015, en raison d’une hospitalisation.

9.        L’assuré, représenté par le CENTRE SOCIAL PROTESTANT (ci-après : le CSP), s’y est opposé le 17 août 2015.

Il sollicitait la reconnaissance d’une impotence moyenne, au motif que l’office avait omis de tenir compte de l’aide dont il avait besoin pour se vêtir/se dévêtir, se préparer à manger et se déplacer à l’extérieur. En outre, il avait besoin de soins infirmiers quotidiens pour traiter et désinfecter son escarre. Par ailleurs, l’accompagnement de sa mère lui était nécessaire pour faire face aux nécessités de la vie.

10.    Par décision formelle du 5 octobre 2015, l’OAI a accordé à l’assuré une allocation pour impotent de degré faible dès le 1er mars 2014, au motif qu’il avait besoin d’une aide régulière pour se lever, se baigner/se doucher et aller aux toilettes.

Les arguments soulevés dans l’opposition ne modifiaient pas son appréciation : l’assuré avait déclaré à l’enquêtrice qu’il pouvait s’habiller et se déshabiller seul ; les passages de l’IMAD pour les soins et la toilette avaient déjà été pris en compte, et la préparation des repas n’était pas considérée comme un acte de la vie quotidienne ; enfin, l’acte ordinaire lié aux déplacements ne pouvait être retenu, car l’aide sollicitée n’était que ponctuelle.

11.    Par l’intermédiaire du CSP, l’assuré a interjeté recours le 5 novembre 2015, en concluant, sous suite de dépens, principalement à l’annulation « partielle » de la décision du 5 octobre 2015 et à l’octroi d’une allocation pour impotent de degré moyen, subsidiairement au renvoi du dossier à l’autorité inférieure pour nouvelle décision. Il a également sollicité l’audition de l’enquêtrice de l’OAI.

Son impotence devait être qualifiée de moyenne, car il avait besoin d’aide pour au moins quatre actes ordinaires de la vie et non trois. C’était à tort que l’OAI n’avait pas reconnu son besoin d’aide pour l’acte « se vêtir, se dévêtir » et n’avait pas fait appel à un interprète pour l’enquête, ce qui avait manifestement donné lieu à un malentendu sur ce point. Or, il avait besoin depuis toujours de l’aide de sa mère pour s’habiller, comme en témoignait son médecin traitant. En l’absence d’interprète, il n’avait pas compris les questions qui lui étaient posées, de sorte que l’intimé ne pouvait se fonder sur ses déclarations. Eu égard à sa mauvaise maîtrise du français, un interprète était d’ailleurs systématiquement mandaté pour ses entretiens avec le CSP.

Il a joint un courriel du 20 octobre 2015 transmis au CSP par la Dresse D______-, médecin-traitant : l’enquête lui paraissait erronée, car l’assuré avait besoin d’être assisté par sa mère pour s’habiller et se déshabiller. Cela s’expliquait, en premier lieu, par sa déformation thoracique et sa raideur, qui l’empêchaient de mobiliser le haut de son corps, et, en second lieu, par une déformation du bassin associée à sa paraplégie. Compte tenu de ces limitations, il lui était difficile d’enfiler et de retirer correctement ses pantalons et ses chaussures. Outre l’aide dont il avait besoin pour aller aux toilettes et se laver, des soins étaient parfois nécessaires pour traiter ses escarres.

12.    Invité par la chambre de céans à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du
14 décembre 2015, a conclu au rejet du recours.

L’enquêtrice avait consigné ce que l’assuré lui avait déclaré, à savoir qu’il était habitué à se vêtir seul. Cette affirmation paraissait vraisemblable, car elle avait pu observer la gestuelle de l’assuré, lequel se transférait sans aide sur son canapé. Les difficultés alléguées par la Dresse D______ ne démontraient pas d’impossibilité, et on pouvait raisonnablement exiger de l’assuré qu’il mette ses pantalons en dépit du temps supplémentaire qui lui était nécessaire. À teneur de l’enquête, la mobilité des membres supérieurs paraissait relativement préservée. S’agissant de l’acte « se laver », l’enquêtrice avait constaté que le foyer disposait d’une salle de bain pour handicapés, qu’elle n’avait toutefois pas pu visiter. Pour ses déplacements, l’assuré faisait certes appel à une société de transport, mais seulement ponctuellement. Il admettait d’ailleurs lui-même avoir gagné en autonomie grâce à un système de traction électrique pour son fauteuil roulant.

S’agissant du grief relatif à l’absence d’interprète, l’office avait sollicité l’aide d’une traductrice en fin d’entretien pour clarifier certains faits et expliquer à l’assuré en quoi consistait l’allocation pour impotent. L’enquêtrice avait transmis à l’intéressé sa carte de visite afin qu’il puisse la contacter pour d’éventuelles précisions ou modifications quant au contenu de l’enquête, faculté dont il n’avait pas fait usage.

13.    Le recourant a répliqué le 18 janvier 2016, en persistant dans ses conclusions tendant à l’octroi d’une allocation pour impotent de degré moyen.

Il réitérait ne pas être autonome pour s’habiller. Il pouvait certes accomplir cette tâche seul moyennant des efforts considérables, mais l’aide de sa mère était indispensable lorsqu’il éprouvait plus de difficultés. Cette dernière l’aidait aussi pour ses repas, car s’il pouvait porter la nourriture à sa bouche, il n’était pas en mesure de cuisiner. Pour sa toilette, il était assisté par sa mère ou par l’IMAD et devait s’exécuter rapidement car son foyer ne comportait qu’une salle de bain destinée aux handicapés. Quant aux déplacements, une aide était aussi nécessaire, car deux fois par semaine, il devait faire appel à une société spécialisée ou prendre les transports publics avec un tiers pour se rendre à l’hôpital. La présence d’un tiers était également nécessaire pour le réinstaller dans son fauteuil en cas de chute. Par conséquent, il maintenait avoir besoin d’aide pour au moins quatre acte de la vie quotidienne. Subsidiairement, il faisait valoir un besoin d’accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie, justifiant la reconnaissance d’une impotence moyenne.

14.    L’intimé a dupliqué le 9 février 2016, en maintenant ses conclusions.

À teneur de l’enquête, l’assuré avait certes besoin d’aide pour prendre ses habits en haut de l’armoire, mais on pouvait exiger de lui qu’il les dispose à sa hauteur. Pour ses déplacements, seule une assistance ponctuelle était nécessaire. S’agissant de l’aide pour la toilette et les chutes éventuelles, elle était déjà prise en compte dans les actes ordinaires « se baigner / se doucher » et « se lever ». Enfin, le fait que l’assuré ait besoin d’aide pour accomplir les actes ordinaires de la vie ne suffisait pas pour admettre la nécessité d’un accompagnement durable, car cela reviendrait à tenir compte deux fois du même besoin.

15.    Ce courrier a été transmis au recourant pour information le 11 février 2016. Il n’a pas formulé d’observations.

16.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        La LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, est applicable à la présente procédure.

3.        Le délai de recours est de 30 jours. Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 al. 1 et 56 à 61 LPGA).

4.        Est litigieuse la question de savoir si le recourant a droit à une allocation pour impotent de degré moyen ou seulement léger.

5.        Selon l’art. 42 LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une allocation pour impotent. L’art. 42bis est réservé (al. 1er). L’impotence peut être grave, moyenne ou faible (al. 2).

Est réputée impotente toute personne qui, en raison d'une atteinte à sa santé, a besoin de façon permanente de l'aide d'autrui ou d'une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne (art. 9 LPGA). L’impotence peut être grave, moyenne ou faible (art. 42 al. 2 LAI). Est aussi considérée comme impotente la personne vivant chez elle qui, en raison d’une atteinte à sa santé, a durablement besoin d’un accompagnement lui permettant de faire face aux nécessités de la vie. Si une personne n’a durablement besoin que d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie, l’impotence est réputée faible (art. 42 al. 3 LAI).

Selon l'art. 37 al. 3 du règlement sur l'assurance-invalidité (RAI), il y a impotence de degré faible si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin: a) de façon régulière et importante, de l'aide d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie; b) d'une surveillance personnelle permanente; c) de façon permanente, de soins particulièrement astreignants, exigés par l'infirmité de l'assuré; d) de services considérables et réguliers de tiers lorsqu'en raison d'une grave atteinte des organes sensoriels ou d'une infirmité corporelle, il ne peut entretenir des contacts sociaux avec son entourage que grâce à eux; ou e) d'un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI.

Il y a impotence de degré moyen (art. 37 al. 2 RAI) si l'assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin: d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie (au moins quatre, selon la circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans l'assurance-invalidité [CIIAI], ch. 8009); d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente; ou d'une aide régulière et importante d'autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI.

6.        a. Selon le ch. 8010 de la circulaire sur l'invalidité et l'impotence dans l'assurance-invalidité (CIIAI), les actes ordinaires de la vie les plus importants se répartissent en six domaines:

-          se vêtir, se dévêtir (éventuellement adapter la prothèse ou l'enlever) ;

-          se lever, s'asseoir, se coucher (y compris se mettre au lit ou le quitter) ;

-          manger (apporter le repas au lit, couper des morceaux, amener la nourriture à la bouche, réduire la nourriture en purée et prise de nourriture par sonde) ;

-          faire sa toilette (se laver, se coiffer, se raser, prendre un bain/se doucher) ;

-          aller aux toilettes (se rhabiller, hygiène corporelle/vérification de la propreté, façon inhabituelle d'aller aux toilettes);

-          se déplacer (dans l'appartement, à l'extérieur, entretien des contacts sociaux).

Pour qu'il y ait nécessité d'assistance dans l'accomplissement d'un acte ordinaire de la vie comportant plusieurs fonctions partielles, il n'est pas obligatoire que la personne assurée requière l'aide d'autrui pour toutes ou la plupart de ces fonctions partielles; il suffit bien au contraire qu'elle ne requière l'aide d'autrui que pour une seule de ces fonctions partielles (ch. 8011 CIIAI; ATF 117 V 146 consid. 2). Il faut cependant que, pour cette fonction, l'aide soit régulière et importante. Elle est régulière lorsque la personne assurée en a besoin ou pourrait en avoir besoin chaque jour, par exemple lors de crises se produisant parfois seulement tous les deux ou trois jours mais pouvant aussi survenir brusquement chaque jour ou même plusieurs fois par jour (ch. 8025 CIIAI). L'aide est considérée comme importante lorsque la personne assurée ne peut plus accomplir au moins une fonction partielle ou qu'elle ne peut le faire qu'au prix d'un effort excessif ou d'une manière inhabituelle ou lorsqu'en raison de son état psychique, elle ne peut l'accomplir sans incitation particulière ou encore, lorsque, même avec l'aide d'un tiers, elle ne peut accomplir un acte ordinaire déterminé parce que cet acte est dénué de sens pour elle (ch. 8026 CIIAI).

S’agissant plus particulièrement de l’acte se vêtir/se dévêtir, il y a impotence lorsque l’assuré ne peut lui-même mettre une pièce d’habillement indispensable ou une prothèse ; lorsqu’il peut certes s’habiller seul, mais qu’il faut lui préparer ses habits ou contrôler si sa tenue correspond aux conditions météorologiques ou encore qu’il n’ait pas enfilé ses habits à l’envers (ch. 8014 CIAA).

Concernant l’acte ordinaire de manger, il y a impotence, selon le ch. 8018 CIAA, lorsque la personne assurée ne peut pas se nourrir avec des aliments préparés normalement sans l’aide d’autrui (arrêt du Tribunal fédéral 8C_728/2010). Il y a impotence lorsque la personne assurée peut certes manger seule mais ne peut pas couper ses aliments elle-même, lorsqu’elle ne peut manger que des aliments réduits en purée ou encore lorsqu’elle ne peut les porter à sa bouche qu’avec ses doigts (RCC 1981 p. 364).

b. L’art. 38 RAI définit l’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie. Selon le 1er alinéa, le besoin d’un accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 42, al. 3, LAI, existe lorsque l’assuré majeur ne vit pas dans une institution mais ne peut pas en raison d’une atteinte à la santé: vivre de manière indépendante sans l’accompagnement d’une tierce personne (let. a), faire face aux nécessités de la vie et établir des contacts sociaux sans l’accompagnement d’une tierce personne (let. b), ou éviter un risque important de s’isoler durablement du monde extérieur (let. c). Si une personne souffre uniquement d’une atteinte à la santé psychique, elle doit pour être considérée comme impotente, avoir droit au moins à un quart de rente (al. 2). N’est pris en considération que l’accompagnement qui est régulièrement nécessaire et lié aux situations mentionnées à l’al. 1. En particulier, les activités de représentation et d’administration dans le cadre des mesures tutélaires au sens des art. 398 à 419 du code civil ne sont pas prises en compte (al. 3). L’accompagnement visé dans cette disposition ne comprend ni l'aide de tiers pour les six actes ordinaires de la vie, ni les soins ou la surveillance personnelle. Il représente bien plutôt une aide complémentaire et autonome, pouvant être fournie sous forme d'une aide directe ou indirecte à des personnes atteintes dans leur santé physique, psychique ou mentale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1056/2009 du 10 mai 2010 consid. 2). La circulaire CIIAI précise que l’accompagnement est régulier lorsqu’il est nécessité en moyenne au moins deux heures par semaine sur une période de trois mois (ch. 8053). Le Tribunal fédéral a admis la conformité de cette circulaire à la loi (ATF 133 V 450 consid. 6.2). Il y a encore lieu de souligner que l'accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie constitue une aide complémentaire et autonome par rapport à l'aide pour accomplir les six actes ordinaires de la vie, de sorte que l'aide déjà prise en compte sous l'angle du besoin d'assistance pour ces actes ne peut fonder un droit à une allocation au sens de l'art. 38 RAI (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1056/2009 du 10 mai 2010 consid. 4.2).

7.        En ce qui concerne la valeur probante d'un rapport d'enquête, il est essentiel qu'il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il s'agit en outre de tenir compte des indications de la personne assurée et de consigner les opinions divergentes des participants. Enfin, le contenu du rapport doit être plausible, motivé et rédigé de façon suffisamment détaillée en ce qui concerne chaque acte ordinaire de la vie et sur les besoins permanents de soins et de surveillance personnelle et finalement correspondre aux indications relevées sur place. Le seul fait que la personne désignée pour procéder à l'enquête se trouve dans un rapport de subordination vis-à-vis de l'office AI ne permet pas encore de conclure à son manque d'objectivité et à son parti pris. Il est nécessaire qu'il existe des circonstances particulières qui permettent de justifier objectivement les doutes émis quant à l'impartialité de l'évaluation (ATF 130 V 61 consid. 6.2 p. 63; cf. 125 V 351 consid. 3b/ee p. 353; cf. arrêt 9C_406/2008 du 22 juillet 2008 consid. 4.2).

8.        a. Selon la jurisprudence (DTA 2001 p. 169), le juge cantonal qui estime que les faits ne sont pas suffisamment élucidés a en principe le choix entre deux solutions : soit renvoyer la cause à l’administration pour complément d’instruction, soit procéder lui-même à une telle instruction complémentaire. Un renvoi à l’administration, lorsqu’il a pour but d’établir l’état de fait, ne viole ni le principe de simplicité et de rapidité de la procédure, ni la maxime inquisitoire. Il en va cependant autrement quand un renvoi constitue en soi un déni de justice (par exemple, lorsque, en raison des circonstances, seule une expertise judiciaire ou une autre mesure probatoire judiciaire serait propre à établir l’état de fait), ou si un renvoi apparaît disproportionné dans le cas particulier (RAMA 1993 n° U 170 p. 136). À l’inverse, le renvoi à l’administration apparaît en général justifié si celle-ci a constaté les faits de façon sommaire, dans l’idée que le tribunal les éclaircirait comme il convient en cas de recours (voir RAMA 1986 n° K 665 p. 87). La récente jurisprudence du Tribunal fédéral prévoyant que la Cour ordonne une expertise au besoin ne saurait en effet permettre à l'assurance de se soustraire à son obligation d'instruire (ATF 137 V 210 ; cf. notamment ATAS/588/2013 du 11 juin 2013 ; ATAS/454/2013 du 2 mai 2013 ; ATAS/139/2013 du 6 février 2013).

b. Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b; ATF 122 V 157 consid. 1d).

9.        a. En l’espèce, l’intimé admet un besoin d’aide pour les actes ordinaires se lever, se doucher et aller aux toilettes, tandis que le recourant se prévaut d’un besoin d’aide pour trois actes supplémentaires soit se vêtir/se dévêtir, manger et se déplacer à l’extérieur. Par ailleurs, il soutient qu’un accompagnement durable lui est nécessaire pour faire face aux nécessités de la vie.

b. Eu égard aux indications contraires résultant de plusieurs pièces concordantes du dossier, la chambre de céans estime que l’enquête n’est pas probante lorsqu’elle relate que l’assuré s’habille systématiquement seul. En effet, le bilan d’ergothérapie de 2012 stipule que l’assuré demande « souvent » de l’aide à sa mère pour s’habiller en raison de douleurs dorsales, ce que les rapports des Drs C______ et D______ tendent à corroborer, en précisant que cette aide est liée notamment à des douleurs dorsales et à une déformation du thorax et du bassin, qui restreignent la mobilité du haut du corps et, par conséquent, l’aptitude de l’assuré à mettre ses pantalons et ses chaussures.

S’il paraît fort vraisemblable que l’assuré doit à certaines occasions être assisté par sa mère pour s’habiller, le dossier ne contient aucune indication précise sur la fréquence à laquelle cette aide lui est prodiguée, de sorte qu’il s’avère en l’état impossible de se prononcer sur son caractère régulier au sens de l’art. 37 al. 2 RAI.

Pour ce premier motif déjà, il se justifie de renvoyer le dossier à l’intimé pour qu’il complète l’instruction.

c. S’agissant des déplacements à l’extérieur, l’enquête constate que l’assuré a fait l’acquisition d’un système de motorisation « Swiss-trac » pour son fauteuil roulant, lequel lui permet de circuler seul et d’emprunter les transports publics.

On doit admettre avec l’intimé que l’assuré est capable de se déplacer seul depuis qu’il possède ce dispositif, lequel est précisément destiné à améliorer son autonomie à l’extérieur. Certes, l’intéressé soutient avoir besoin d’une aide résiduelle pour ses trajets à l’hôpital. Il précise toutefois n’effectuer ces déplacements que deux fois par semaine. Par conséquent, l’aide dont il se prévaut depuis l’acquisition du Swiss-trac n’est pas quotidienne et ne peut donc être qualifiée de régulière au sens de l’art. 37 RAI.

En revanche, pour la période précédant l’acquisition de cet appareil, l’assuré ne pouvait guère se déplacer seul. Cette conclusion résulte implicitement de l’enquête et s’impose également au regard des rapports versés au dossier, notamment du bilan d’ergothérapie et du rapport du Dr C______ de juillet 2014. Toutefois, la date à laquelle l’assuré a obtenu cet appareil ne ressort pas du dossier. Partant, il appartiendra à l’intimé de procéder aux clarifications nécessaires sur ce point également.

d. Le recourant se prévaut également d’un besoin d’assistance pour l’acte ordinaire « manger », en faisant valoir que c’est sa mère qui lui fait ses courses et la cuisine.

Contrairement à ce qu’il semble croire, l’acte « manger » ne recouvre ni la cuisine ni les courses : ces tâches ne font pas partie des fonctions partielles énumérées au chiffre 8010 CIIAI, à savoir apporter le repas au lit, couper des morceaux, amener la nourriture à la bouche, la réduire en purée et l’absorber par sonde. Il ne ressort ni de l’enquête ni du recours que ces fonctions partielles pourraient être entravée en l’espèce. L’assuré n’a donc pas besoin d’aide pour accomplir l’acte ordinaire « manger » visé par l’art. 37 RAI.

Cela étant, lorsqu’un assuré est empêché par son handicap d’accomplir ses travaux ménagers, notamment de cuisiner et de faire ses courses - ce qui pourrait être le cas ici au vu des indications données dans le bilan d’ergothérapie et la demande de prestations - il convient selon la jurisprudence de retenir un besoin d’accompagnement pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 38 al.1 let. a RAI, étant précisé que ces activités représentent selon l’expérience générale un investissement temporel d’au moins deux heures par semaine (arrêt du Tribunal fédéral 9C_1056/2009 du 10 mai 2010, consid. 4.3).

Toutefois, force est de constater que l’OAI n’a pas du tout investigué la nécessité d’un accompagnement durable au sens de l’art. 38 al. 1 let. a RAI, bien que celle-ci ait été mentionnée dans la demande d’allocation pour impotent. L’enquêtrice a simplement répondu « non » à la question de savoir si l’assuré en avait besoin (chiffre 4.2 de l’enquête), sans motiver les raisons pour lesquelles cet accompagnement lui paraissait superflu. Sur ce point, on précisera que l’argument soulevé par l’intimé dans sa duplique pour écarter toute nécessité d’un accompagnement durable ne lui est d’aucun secours, car le besoin d’accompagnement éventuel est lié ici aux tâches ménagères et non aux actes ordinaires déjà pris en compte.

Pour ce motif également, il se justifie de renvoyer le dossier à l’administration afin qu’elle examine si les limitations du recourant l’empêchent d’accomplir ses tâches ménagères, et, dans l’affirmative, lui reconnaisse un besoin d’accompagnement durable.

e. Pour le reste, l’incidence éventuelle sur la valeur probante de l’enquête du fait qu’une traductrice a été sollicitée en fin d’entretien plutôt qu’au début peut être laissée ouverte, dès lors qu’indépendamment du sort réservé à ce grief, l’instruction doit être complétée, comme cela vient d’être exposé.

10.    En définitive, la chambre de céans constate que la cause est insuffisamment instruite, de sorte qu’elle n’est pas en mesure de statuer définitivement sur le degré d’impotence du recourant.

Partant, il se justifie d’admettre partiellement le recours, d’annuler la décision litigieuse et de renvoyer la cause à l’OAI afin qu’il complète l’enquête ménagère, tant en ce qui concerne les actes ordinaires se vêtir/se dévêtir et se déplacer à l’extérieur, que sur la question de la nécessité d’un accompagnement durable au sens de l’art. 38 al. 1 RAI. On rappellera à cet égard qu’il n’appartient pas à la juridiction cantonale de suppléer aux carences de l’instruction de l’administration. Eu égard aux difficultés linguistiques alléguées, l’intimé mandatera un interprète pour réaliser ce complément d’instruction, puis rendra une nouvelle décision portant sur le droit à une allocation pour impotent.

11.    Au vu de ce renvoi et dans la mesure où l’instruction entreprise par l’intimé est incomplète, l’audition sollicitée par le recourant est rejetée, par appréciation anticipée des preuves.

12.    Le recourant, qui est représenté, obtient partiellement gain de cause, de sorte qu’il a droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixe en l’occurrence à CHF 2'500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA ; RS E 5 10 ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA ; RS E 5 10.03).

La procédure de recours en matière de contestation portant sur l’octroi ou le refus de prestations de l’assurance-invalidité étant soumise à des frais de justice, un émolument de CHF 200.- est mis à charge de l’intimé (art. 69 al. 1 bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement et annule la décision du 5 octobre 2015.

3.        Renvoie le dossier à l’intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

4.        Condamne l’OAI à verser au recourant une indemnité de CHF 2'500.- à titre de dépens.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Alicia PERRONE

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le