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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/326/2011

ATAS/274/2015 du 02.04.2015 ( AI ) , REJETE

Recours TF déposé le 05.06.2015, rendu le 09.10.2015, SANS OBJET, 9c_371/2015, 9C_371/2015
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/326/2011 ATAS/274/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 2 avril 2015

8ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié au PETIT-LANCY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Me Christian van GESSEL

 

 

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITE DU CANTON DE GENEVE, sis rue des Gares 12, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Arrivé en Suisse en 1988 et naturalisé en 2003, Monsieur A______, né en 1967, est titulaire d’une « pré-licence » en gestion d’entreprise touristique délivrée par une université turque et d’un certificat d’apprentissage à la Poste Suisse (ci-après : la Poste), où il a travaillé comme facteur dès 1991 à 100%. Entre 1994 et 1997, il a entrepris des études universitaires en sciences économiques, puis en droit, tout en travaillant à 50%. Ayant échoué aux examens, il a repris son activité à la Poste à 100%.

2.        Le 25 juillet 2001, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office cantonal d’assurance-invalidité (OAI) tendant à l’octroi d’un reclassement dans une nouvelle profession et/ou d’une rente. Il a fait valoir qu’il se trouvait en incapacité de travail à la suite d’un accident de football survenu le 3 février 2000 (choc au niveau de la nuque).

3.        Incapable de travailler à 100% du 3 février au 31 mai 2000, il a subi une rechute le 15 août 2000, et a été mis en arrêt de travail à 100% jusqu’au 9 octobre 2000. A cette date, il a repris le travail à 50%.

4.        Un scanner de la colonne cervicale, effectué par le Dr B______ le 8 mars 2000, a mis en évidence une hernie discale intra-canalaire C5-C6 latéralisée du côté droit, une protrusion discale à l’étage sus-jacent et un petit osteophyte intra-canalaire à l’étage sous-jacent. A l’étage C4-C5, il y avait une protrusion du matériel discal le long de la paroi antérieure du sac thécal.

5.        Deux électroneuromyographies, effectuées le 23 mars et le 8 septembre 2000 par le docteur C______, neurologue, n’ont montré aucun signe d’atteinte des nerfs médians aux carpes ou d’atteinte lésionnelle radiculaire C7-C8, ni de signes lésionnels dans les territoires radiculaires compris entre C5 et C8-D1 au membre supérieur droit. Selon ce spécialiste, il pouvait s’agir d’une irritation radiculaire C7 ou C8 droite, liée à ce canal étroit, sans véritable hernie discale, qu’il valait la peine de continuer à traiter conservativement, sans intervention chirurgicale.

6.        Dans un courrier du 20 avril 2000 au docteur D______ (médecin traitant depuis février 2000), le docteur E______, neurochirurgien et chef de service adjoint aux H.U.G., a indiqué qu’en dehors de l’image effective d’un débord discal C5-C6 gauche, dans un contexte de canal très large, on pouvait observer une clinique très nettement favorable avec disparition du syndrome radiculaire compressif.

7.        Dans un rapport d’IRM cervicale du 29 août 2000, la Dresse G______ a mentionné une discopathie protrusive cervicale étagée prédominant en C5-C6, avec composante de petite hernie discale para médiane droite et ébauche du canal cervical rétréci de C4 à C6 sur lésions dégénératives disco-vertébrales. En C6-C7, il existait une discopathie protrusive sans hernie constituée. Le cordon médullaire cervical était de taille et de signal conservés.

8.        Dans un courrier du 11 décembre 2000, le Dr E______ a estimé, à la suite du Dr D______, que le patient faisait une véritable fixation sur ses plaintes, qui ne s’expliquaient pas sur le plan radiologique, au vu du « modeste débord C5-C6 ».

9.        Dans un rapport du 15 mars 2001, le médecin d’arrondissement de la SUVA (Dr F______), après avoir retenu une nouvelle rechute depuis le mois d’août 2000, a constaté des signes de spondylodiscarthrose et discopathie étagée au niveau cervical avec rétrécissement des trous de conjugaison de C3 à C5. L’état n’était pas encore stabilisé. A cet égard, le Dr F______ s’est fondé sur une radiographie de la colonne cervicale pratiquée le 14 mars précédent, montrant une discrète scoliose cervicale sinistro-convexe, une rectitude de tout le segment cervical, une discopathie modérée à sévère étagée de C3 à C6 et une spondylo-discathrose modérée C6-C7 avec ostéophytes antérieurs et postérieurs, ainsi qu’une diminution des trous de conjugaison C3-C4 et C4-C5 à gauche et une minime diminution du trou de conjugaison C3-C4 droit. L’apophyse odontoïde était parfaitement centrée et le canal cervical était de dimension normale.

10.    D’après les conclusions d’un rapport de la Clinique romande de réadaptation (CRR) du 11 juillet 2001, où il a séjourné du 11 avril au 16 mai 2001 à la demande de la SUVA, avec réalisation de stages aux Etablissement publics pour l’intégration (EPI), le patient présentait des cervico-dorsalgies chroniques, des discopathies protrusives cervicales étagées C5-C6, et un canal cervical rétréci C4-C6. Il pouvait reprendre son activité à 50%, moyennant évitement du port répété de charges, ainsi que les mouvements répétitifs au-dessus des épaules. Cette activité pouvait être envisagée sur un plein temps. L’employeur et le patient avaient adhéré à cette proposition.

Aux ateliers, le patient avait effectué toutes sortes de travaux légers, mais lorsque les mouvements étaient répétitifs, celui-ci se plaignait de cervicalgies et tous les travaux effectués au-dessus du niveau des épaules et les transports de charges supérieures à 5 kg avaient été refusés par lui en raison des probables douleurs. Le patient pouvait se montrer aussi coopératif et ponctuel que dysphorique et plaintif avec une attitude collante. Ses plaintes semblaient disproportionnées par rapport à la situation objective.

A la rubrique « capacité de travail actuelle », le rapport mentionne : « 0% du 17.05.01 au 20.05.01. 50% du 21.05.01 au 11.06.01. A réévaluer par la suite ».

11.    Une échographie des parties molles du cou pratiquée par la Dresse G______ le 10 juillet 2001 n’a montré aucune anomalie des masses musculaires para-vertébrales et trapéziennes bilatérales.

12.    Selon le questionnaire pour employeur du 3 août 2001, l’assuré travaillait depuis février 1991 comme facteur (distribution des lettres à vélomoteur), à plein temps (42h. par semaine). Suite à son accident, il était occupé au tri du courrier et à « l’aide générale », depuis le 9 octobre 2000. Son dernier salaire s’élevait à CHF 69'795.- par an « + 13ème salaire », depuis le 1er janvier 2001.

13.    Dans un rapport du 29 août 2001 destiné à l’OAI, le Dr D______ a posé les diagnostics, ayant des répercussions sur la capacité de travail, suivants : contusion cervicale para-médiane, discopathie protrusive cervicale étagée prédominant en C5-C6 et petite hernie discale para-médiane droite ; ébauche de canal étroit C4-C6 sur lésion dégénérative disco-vertébrale ; irritation radiculaire C7-C8 droite ; cervico-dorsalgie chronique post-traumatique ; troubles statiques du dépens antérieur de la tête avec disbalance musculaire des muscles de la ceinture cervico-scapulaire. A ce titre, l’intéressé avait subi une incapacité complète de travail du 4 février au 8 octobre 2000, une incapacité à 50% du 9 octobre 2000 au 28 février 2001, une incapacité totale du 1er mars au 10 juin 2001, puis à 50% depuis le 11 juin 2001, pour une durée indéterminée. Dans l’activité habituelle de facteur, la capacité de travail exigible était de 50% depuis le 11 juin 2001 ; dans une activité adaptée, sans port de poids supérieur à 3 kg, ni flexions de la tête, la capacité de travail résiduelle était « vraisemblablement 50% ». Le praticien a en outre retenu les limitations fonctionnelles suivantes : limitation du bras droit, inclinaison du buste, tenue du corps dans la même position plus de 2-3 heures par jour, se baisser, travail en hauteur /sur échelle, mouvements répétitifs du tronc, flexion du tronc.

14.    Dans un courrier à l’OAI (non daté), reçu le 10 octobre 2001, l’employeur a indiqué que l’assuré avait pu reprendre une activité à raison de 50% depuis le 4 juin 2001, au tri du courrier et non sur un service de distribution. A ce dernier propos, une note d’entretien téléphonique avec l’employeur, rédigée par le gestionnaire du dossier AI le 19 octobre suivant, précise : « Faux, occupé à faire de la distribution allégée ».

15.    Selon un avis du médecin-conseil de l’AI du 26 octobre 2001, l’assuré présentait de l’arthrose de la colonne cervicale, avec discopathie, mais l’IRM ne confirmait pas la présence d’une hernie discale. Une sollicitation très importante de la nuque pouvait expliquer la survenance de douleurs, ce qui pouvait être le cas comme facteur de courrier. « Mais voir pour un poste avec moins de sollicitations de la nuque et on peut s’attendre à une capacité de 100% (50% dans ce métier) ».

16.    Le 27 août 2001, l’assuré a été victime d’un accident de circulation (« coup du lapin »), à la suite duquel il a constaté une recrudescence de ses maux de tête, une exacerbation de ses difficultés mnésiques et des troubles de la concentration.

17.    Le 29 octobre 2001, l’OAI a confié le dossier à sa division de réadaptation professionnelle, afin d’évaluer les possibilités de reclassement professionnel de l’assuré dans une activité adaptée.

18.    Une tomodensitométrie axiale computérisée (TAC) cervicale du 4 décembre 2001 a mis en évidence une protrusion discale en C4-C5 de localisation médiane et paramédiane gauche appuyant discrètement sur la partie antérieure gauche du fourreau dural ; une protrusion discale ostéophytaire en C5-C6 et « surtout » C6-C7, de localisation paramédiane gauche appuyant sur la partie antérieure gauche du fourreau dural à l’émergence de racine C7 gauche ; cervicarthrose étagée prédominant en C6-C7. Les trous de conjugaisons étaient libres et il n’existait pas de tassement vertébral.

19.    Dans un rapport du 15 mars 2002 destiné à l’OAI, le docteur H______, de la permanence médico-chirurgicale de Chantepoulet SA, a estimé que l’activité de facteur n’était plus exigible. Une activité adaptée était envisageable à 100%, depuis le 27 novembre 2001, dans un poste évitant les mouvements répétitifs, le port de charges de plus de 5 kg, la position à genoux et accroupie, l’inclinaison du buste, le travail en hauteur.

20.    Un examen myographique effectué le 25 mars 2002 par le docteur I______, neurologue, au niveau de la musculature cervicale et brachiale, des deux côtés dans les myotomes C2-D1, n’a mis en évidence aucun signe de dénervation pouvant être attribué à une lésion radiculaire. Tout au plus pouvait-on observer à gauche une minime dénervation dans le rhomboïde.

21.    Dans un courrier du 4 septembre 2002, le Dr J______, médecin-conseil de la Poste, a attesté que l’assuré était totalement inapte à travailler en tant que fonctionnaire de distribution, ainsi que pour toute autre activité impliquant la station debout et le port de charges supérieures à 5 kg. Dans une activité adaptée, le cas échéant avec possibilité d’alterner les positions, l’assuré serait apte à travailler immédiatement, d’abord à 50%, puis rapidement à 100%.

22.    Dans deux notes datées des 9 septembre et 14 décembre 2002, le médecin-conseil de l’AI a retenu que l’activité de facteur pouvait solliciter « trop » la colonne cervicale, « donc voir pour une activité mieux adaptée (100%) » ; l’atteinte et les troubles observés étaient légers, « donc si son travail impose des mouvements répétitifs très fréquents, alors il faut voir pour un travail mieux adapté. Donc c’est un cas très limite pour justifier un changement de travail, ce que l’assuré souhaite vivement, car il a une bonne formation de base et qu’il n’est probablement pas très intéressé par son travail à la poste. Dans son métier actuel, le médecin traitant parle d’une diminution de 50%, donc il persiste certainement une bonne capacité de travail résiduelle. Mais nouvel accident le 27.8.2001 : à voir. Du moins, on sait que le problème central antérieur ne l’empêchait pas de conduire ».

23.    Dans un rapport du 26 août 2002 destiné au docteur K______, médecin traitant généraliste, le docteur L______, spécialiste en médecine interne, a diagnostiqué des cervicalgies chroniques. Le patient était en incapacité de travail totale depuis le 27 novembre 2001 et était définitivement inapte à reprendre une activité en tant que fonctionnaire de distribution. Il pouvait être autorisé à occuper, à plein temps, un poste de travail ne nécessitant pas de port de charges supérieures à 5 kg, étant précisé que « si on pouvait alterner les positions assis/debout, ce serait mieux, mais pas indispensable ».

24.    Dans un rapport du 20 septembre 2002, le Dr M______, chef de clinique à la Division de rhumatologie des H.U.G., a retenu que le patient présentait des cervicalgies chroniques évoluant depuis février 2000. Sur le plan radiologique, plusieurs examens de scanner et IRM avaient montré des troubles dégénératifs de C3 à C7 avec surtout ostéophytose vertébrale postérieure prédominant en C5-C6 et C6-C7 avec discrète diminution du trou de conjugaison (i.e. : foramen intervertebral) C6-C7 à gauche. La situation était cependant supportable et contrôlée sous un traitement d’acupuncture et d’antalgiques et moyennant l’exclusion de l’activité professionnelle qui nécessitait des ports de charge répétés et n’était probablement plus exigible. Le patient présentait une symptomatologie invalidante qui s’était chronicisée. Selon le consensus de la CRR du 11 juillet 2001, l’assuré pouvait reprendre une activité professionnelle adaptée à 50%.

25.    Dans un rapport du 26 janvier 2003, le Dr K______ a renvoyé pour l’essentiel aux conclusions du Dr L______ du 26 août 2002, « qui résumait très bien la situation ». Il a en outre préconisé le financement de trois années de formation auprès de la Haute école de gestion de Genève, le patient ayant un niveau universitaire.

26.    Dans un courrier du 19 mai 2003, la Poste a informé l’OAI que l’intéressé avait été déclaré inapte à poursuivre son activité professionnelle au sein de l’entreprise. De l’avis de son service médical, celui-ci pourrait avoir une capacité de travail d’au moins 50%, voire même de 100% dans une activité adaptée.

27.    Du 1er septembre au 14 novembre 2002, l’assuré a entrepris, apparemment de lui-même, une formation en informatique de gestion auprès de l’Ecole supérieure d’informatique de gestion de Genève (ESIG), d’une durée de deux ans. Il n’a toutefois pas pu terminer l’examen de programmation, en raison, selon ses déclarations, du maintien d’une position trop statique et de pression au niveau de la nuque, et de son incapacité à gérer le stress.

28.    Selon le rapport de la division de réadaptation professionnelle du 18 juin 2003, l’assuré avait indiqué qu’étant peu habile manuellement, un stage au CIP (initialement prévu du 24 février au 25 mai 2003) ne serait guère porteur.

29.    Par décision du 20 juin 2003, l’OAI a pris en charge, rétroactivement, le reclassement professionnel suivi par l’assuré à l’ESIG, octroyé des indemnités journalières AI d’attente du 15 novembre 2002 au 31 août 2003, et mis celui-ci au bénéfice d’un reclassement professionnel en qualité d’informaticien de gestion auprès de l’ESIG du 1er septembre 2003 au 31 décembre 2005.

30.    Par courrier du 23 mars 2004, la Poste a résilié les rapports de service pour le 30 septembre 2004, rapports finalement prolongés au 30 novembre suivant.

31.    Malgré le bon investissement de l’assuré, le reclassement entrepris auprès de l’ESIG a dû être interrompu au 30 juin 2004, en raison, selon ses déclarations, d’un certain ralentissement psychomoteur et de difficultés de concentration (cf. certificat du docteur N______, du service de neurologie des HUG. du 11 janvier 2005 et lettre de l’OAI à la Poste du 28 juillet 2004).

32.    Dans ce dernier certificat, le Dr N______ relève que l’examen radiologique mettait en évidence des protrusions discales étagées, une plus marquée à droite, en particulier au niveau C6, sans qu’il y eût une hernie franche. Les déficits liés aux cervicalgies post-traumatiques étaient relativement légers, même s’ils avaient indéniablement une conséquence sur le mode de vie et les capacités professionnelles du patient.

33.    Dans un rapport d’examen neuropsychologique du 4 novembre 2005, Madame O______, psychologue, a attesté que le tableau neuropsychologique était dominé par d’importantes difficultés attentionnelles et des problèmes cognitifs qui entraînaient des répercussions significatives sur le rendement du patient. Au vu de l’importance de ses difficultés psychiques, il était difficile de se prononcer de manière fiable sur la sévérité des troubles. Dans ce contexte, une prise en charge psychothérapeutique était préconisée, de même qu’une évaluation préprofessionnelle.

34.    Dans un courrier du 9 mars 2006, la doctoresse P______, médecin traitant, spécialisée en médecine interne, a préconisé la mise en oeuvre d’une expertise multidisciplinaire pour déterminer « l’impact et la responsabilité de chacun des accidents » sur la symptomatologie actuelle.

35.    En réponse à une demande de l’OAI, le Dr K______, dans un courrier du 24 avril 2006, a indiqué qu’il était difficile de se prononcer sur l’existence d’éléments pouvant faire penser à un problème psychiatrique. Une prise en charge psychiatrique n’était pas prévue, mais elle n’aurait aucun sens en l’absence de toute motivation ou demande de la part du patient ; « elle serait par contre certainement très utile sous forme d’expertise que vous pourriez demander ».

36.    Le 30 mai 2006, l’OAI a confié une expertise psychiatrique au docteur Q______. Dans son rapport du 10 juillet 2006, l’expert a en particulier relevé que l’inactivité dans laquelle l’expertisé se trouvait depuis cinq ans était un terrain plus que favorable à l’amplification d’une fixation sur la symptomatologie douloureuse. Il a en outre exclu toute atteinte ou limitation psychiatrique. Compte tenu de l’âge et des bonnes qualités intellectuelles de l’expertisé, il était impératif, en vue d’éviter une évolution vers la sinistrose et une aggravation du tableau clinique, de reprendre le projet d’une nouvelle orientation de réadaptation, adaptée à son état, l’intéressé ne pouvant plus effectuer des travaux lourds à plein temps, à l’instar de ce qu’avaient préconisé les Drs K______ et N______.

37.    Dans son avis du 22 août 2006, le médecin-conseil de l’AI a estimé que l’échec de la formation en informatique proposée en 2002 ne relevait pas d’une atteinte psychiatrique et s’est demandé si ce projet n’avait pas été trop ambitieux pour l’assuré. Afin de déterminer si les cervicalgies représentaient un handicap pour une activité de type bureau, il a préconisé une expertise orthopédique.

38.    Dans son rapport d’expertise du 25 novembre 2006, le docteur R______ (spécialiste FMH en orthopédie et chirurgie), après avoir fait effectuer de nouvelles radiographies de contrôle le 3 octobre précédent, a posé les diagnostics suivants : status après nombreux accidents ayant atteint le rachis cervical (1999, 2000, 2001 et 2005) ; spondylose et spondylarthrose cervicale de la moitié inférieure du rachis cervical avec raideur partielle du rachis cervical inférieur et protrusion discale à deux niveaux, sans hernie discale manifeste ; très léger trouble du rachis lombaire par petite bascule du bassin à droite ; spondylolisthésis L5-S1 du premier degré avec spondylolise probable L5 bilatérale.

L’expert a estimé que l’état de la colonne vertébrale, fragilisée par quatre accidents successifs, était pratiquement stabilisé et pourrait être entretenu et amélioré par des mesures ciblées bien appliquées. Si le patient ne retrouvait pas une activité professionnelle régulière, même éventuellement partielle au début, il s’installerait dans cette chronicité et le pronostic deviendrait défavorable. Tous les médecins consultés, au nombre de « 16 ! », étaient d’accord pour considérer le patient comme incapable de travailler comme facteur, totalement et de manière définitive depuis 2001 ; les constatations radiologiques montraient qu’il y avait « quand même » une pathologie sous-jacente, même relativement modérée, qui pouvait expliquer ces douleurs. L’examen clinique avait montré une petite limitation de mobilité du rachis cervical, mais sans aucun trouble neurologique, ce qui avait du reste été constaté par les Drs C______, S______ et N______. Des mesures de réadaptation professionnelle, proposées depuis plusieurs années déjà par le Dr K______, étaient envisageables « dès maintenant » à 100%, dans une activité ne nécessitant pas de position debout prolongée, mais une alternance debout et assis, sans exercices répétitifs et sans soulèvement de poids « importants ». Les mesures qui avaient été proposées à l’assuré n’avaient malheureusement pas été pratiquées d’une manière idoine : en effet, la CRR l’avait fait poncer, avec des exercices répétitifs, en position debout, la tête penchée en avant sur un établi, ce qui était certainement contre-indiqué ; les études en informatiques, théoriquement favorables, nécessitaient également une position de la tête souvent penchée en avant, souvent relativement immobile, ce qui n’était pas favorable. Trouver un travail adapté était certes difficile, mais il fallait à tout prix éviter d’envoyer le patient dans un atelier de formation professionnelle, et se diriger plutôt vers une profession intellectuelle. Il n’était pas question d’améliorer une capacité de travail dans la dernière activité à la Poste ; pour favoriser une adaptation dans une activité adaptée, la poursuite de l’acupuncture, de la prise d’anti-inflammatoires et la reprise d’une bonne physiothérapie semblaient efficaces. Une activité de type bureau, permettant de fréquents changements de position et éliminant toute station assise la tête penchée en avant en permanence, semblait adaptée aux limitations du patient.

L’expert a précisé ne pas avoir retrouvé la petite hernie discale décrite dans le rapport d’IRM cervicale du 29 août 2000. Le radiologue y avait alors également décrit une ébauche de canal cervical rétréci de C4 à C6, « mais que le Dr E______ n’avait pas considéré comme tel ». L’IRM de la colonne cervicale du 14 mars 2001 montrait peut-être une ébauche de scoliose cervicale, mais, selon l’expert, les trous de conjugaison n’étaient pas particulièrement diminués, contrairement à ce qu’avait retenu le radiologue.

Enfin, l’expert avait l’impression, tout comme le Dr E______ à l’époque, que les plaintes du patient étaient essentiellement subjectives. Il n’avait pas trouvé de justification clinique évidente à des plaintes aussi importantes. Il était vrai, cependant, que « cette spondylose cervicale et ces cervicarthroses pouvaient être douloureuses, mais que dans une position correcte de la tête, sans devoir se pencher en avant tout le temps, sous bonne physiothérapie et acupuncture, le patient devrait pouvoir être réadapté dans une activité protégeant sa colonne vertébrale ». En outre, l’expert n’avait pas pu élucider la raison pour laquelle celui-ci ne pouvait pas soulever plus de 5 kg sans avoir mal à la nuque. Il ne trouvait pas non plus de raisons cliniques évidentes empêchant une réadaptation dans une activité autre que les PTT « et qui soit bien adaptée à son handicap ».

39.    Dans un avis du 12 décembre 2006, le médecin-conseil de l’AI a estimé que l’assuré disposait d’une capacité de travail de 100% si l’on pouvait trouver un poste de travail tenant compte de ses limitations fonctionnelles, soit épargnant la nuque et permettant des positions alternées sans port de charges.

40.    En novembre 2006, l’assuré a entrepris (à ses frais, semble-t-il) une formation continue sur le patrimoine et le tourisme.

41.    Le 6 février 2007, l’assuré s’est inscrit à l’assurance-chômage. Dans sa demande d’indemnité, il a précisé être à la recherche d’un emploi à 100% adapté à son état de santé. Compte tenu de sa longue période d’incapacité de travail, son dossier a été soumis au groupe de décisions en matière d’assurance-chômage de l’office cantonal de l’emploi, service juridique. Par décision du 8 juin 2007, cet office l’a déclaré apte au placement depuis le 6 février 2007, compte tenu en particulier d’un certificat du Dr K______ du 16 avril 2007, confirmant que celui-ci pouvait travailler à 100% dès le 1er avril 2007, sous réserve de travaux lourds.

42.    Dans le cadre du projet MAMAC (Medizinisch-ArbeitsMarktliche Assessments mit Case Management), visant à réinsérer plus rapidement dans le marché du travail des personnes présentant une problématique complexe, conjointement par l’assurance-chômage, l’assurance-invalidité et l’Hospice général, il a été convenu d’accorder une « 2ème chance » à l’assuré en prenant en charge une formation de dix mois dans le domaine du tourisme auprès de l’Académie de langues et de commerce, du 10 septembre 2007 au 22 juin 2008. En cas de réussite, l’AI prendrait également en charge un stage de trois à six mois dans une agence de voyage (décision de l’OAI du 7 décembre 2007).

43.    Dès le 24 janvier 2008, l’assuré est devenu conseiller communal (législature 2007-2011).

44.    Le 9 mai 2008, il a obtenu un diplôme de guide touristique pour Genève.

45.    Par décision du 30 juin 2008, l’AI a pris en charge un stage de six mois (du 4 août 2008 au 30 janvier 2009) auprès de l’agence de voyage T______, dans le cadre du reclassement professionnel de l’assuré comme agent de voyage et guide touristique.

46.    Par courrier du 8 avril 2010, l’assuré a transmis à l’OAI un rapport d’IRM cervicale du 4 mars 2010 établi par la doctoresse U______, spécialiste en neuroradiologie auprès du Centre de diagnostic radiologique de Carouge, mettant en évidence une cervico-discarthrose pluri-étagée C3-C4 à C6-C7 et entraînant un rétrécissement du canal rachidien cervical ; des sévères discopathies protrusives aux niveaux C4-C5, C5-C6 et C6-C7, s’accompagnant d’une uncarthrose et entraînant un rétrécissement foraminal significatif au niveau C4-C5 des deux côtés ; une discopathie modérée C3-C4 s’accompagnant d’une uncarthrose latéralisée à droite avec rétrécissement foraminal C3-C4 droit. La discopathie protrusive C6-C7 présentait un caractère plus focal au niveau foraminal droit, entraînant un rétrécissement du trou de conjugaison C6-C7 droit, pouvant être à l’origine d’une symptomatologie radiculaire C7 droite. La discopathie C5-C6 s’accompagnait d’une discrète infiltration oedémateuse traduisant un discret caractère inflammatoire (de type Modic I). Il était également constaté une absence de signes de myélopathie cervicale, ainsi qu’en intra-canalaire, une très bonne définition du cordon médullaire cervical.

47.    Dans un avis du 20 avril 2010, le Service médico-régional de l’AI (SMR) a estimé que ces éléments ne constituaient pas une aggravation susceptible a priori de modifier les limitations fonctionnelles de l’assuré retenues par l’expert R______, au vu en particulier de l’absence de myélopathie. L’existence d’un canal cervical rétréci était en effet déjà mentionnée dans l’IRM du 29 août 2000, de même que la protrusion appuyant sur la partie antérieure gauche du fourreau dural de C7 l’avait été dans le CAT cervical du 4 décembre 2001. Les discopathies protrusives étaient déjà présentes.

48.    Dans un projet de décision du 26 octobre 2010, l’OAI a informé l’assuré qu’il envisageait de rejeter la demande de rente, compte tenu d’un degré d’invalidité de 31%. A cet égard, l’office a constaté que la capacité de travail était « restreinte » depuis août 2000, que l’intéressé pouvait travailler à temps complet dans une activité adaptée ne nécessitant pas de formation complémentaire et que la poursuite des mesures de réadaptation ne permettrait pas d’améliorer, voire de consolider la capacité de gain. Il a retenu un salaire sans invalidité de CHF 66'310.- en 2001 (soit CHF 67'709,85 moins CHF 1'399,80 d’allocations familiales, « selon fiches de salaire transmises par La Poste ») et un salaire avec invalidité de CHF 57'019.- en 2001 (salaire ESS 2000, actualisé, TA1, homme, activité simple et répétitive), ramené à CHF 45'615.-, moyennant un abattement de 20% au vu des « limitations fonctionnelles, années de service ».

49.    Ce projet a été notifié directement à l’assuré, sous pli simple du 5 novembre 2010.

50.    Par l’entremise de son précédent conseil, l’assuré a fait opposition par courrier du 9 décembre 2010, concluant à l’octroi d’une rente entière d’invalidité rétroactive dès août 2001, son « invalidité économique dépass(ant) 70% ». Il a en substance fait valoir que la formation de guide touristique lui permettait de travailler deux à trois heures par mois au maximum, raison pour laquelle l’OAI l’avait adressé aux EPI en vue d’une évaluation en atelier (du 7 juin au 2 juillet 2010). Selon les conclusions du rapport de stage, l’assuré pouvait accéder à des travaux de conditionnement légers avec alternance des positions et sans port de charge, ou alors être dirigé vers un poste d’orientation plus relationnelle et sociale. Or, malgré ces constatations, le projet de décision avait retenu qu’il pourrait réaliser un revenu de l’ordre de CHF 5'000.- par mois, ce qui était irréaliste, compte tenu de ses limitations fonctionnelles. En outre, à aucun moment, il n’avait été soumis à une quelconque expertise médicale, ce qui était « incompréhensible, compte tenu de l’ancienneté de son incapacité de travail ». Vu ses problèmes de santé, sa capacité résiduelle de travail ne pouvait en aucun cas « dépasser le 30% du gain qu’il pourrait réaliser sans invalidité ».

51.    Par décision du 15 décembre 2010, reçue le 17 du même mois, l’OAI a confirmé son refus de rente.

52.    Dans son recours posté le 1er février 2011, l’assuré a conclu à l’annulation de ladite décision, respectivement à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès le mois d’août 2001. Préalablement, il a requis la mise en œuvre d’une expertise auprès d’un service d’orientation professionnelle, afin de déterminer les activités exigibles, respectivement son rendement et le revenu espéré. Il a en particulier fait valoir qu’il subissait une incapacité entière de travail depuis le 30 novembre 2001, que la SUVA avait mis fin à ses prestations avec effet au 30 juin 2002 et que ses troubles de santé n’étaient pas contestés par l’OAI, ni le fait que lesdits troubles l’empêchaient d’exercer son ancienne activité à la Poste, « ne serait-ce que pour la distribution du courrier recommandé qui n’impliquait manifestement aucun effort particulier. Venir dès lors affirmer (qu’il) pourrait réaliser des travaux simples et répétitifs avec un plein rendement n’était manifestement pas correct, de même qu’un revenu annuel brut de CHF 57'019.- avec une réduction de 20% ne saurait être retenus ». Ce dernier revenu n’était pas réaliste, car il ne tenait pas compte de ses problèmes de santé qui limitaient « de manière importante » sa capacité de gain et ne visait à l’évidence qu’à aboutir à un taux d’invalidité inférieur à 40 % afin de nier tout droit à une rente ». Durant le stage aux EPI, il avait dû porter une minerve et prendre des antalgiques ; malgré cela, il n’avait pas pu effectuer d’activités sérielles ou impliquant des tractions trop fortes.

Par ailleurs, le salaire sans invalidité de CHF 66'310.- par an en 2001 « n’était pas contesté » (mémoire de recours, p. 4, § 11).

53.    Dans sa réponse du 2 mars 2011, l’OAI a conclu au rejet du recours. En substance, cet office a estimé que le recourant n’avait apporté aucun élément probant susceptible de remettre en cause les expertises des Drs Q______ et R______. La situation médicale avait été parfaitement élucidée, si bien que c’était à bon droit que l’OAI avait retenu une pleine capacité de travail dans une activité adaptée. Le recourant avait en outre déjà bénéficié d’un stage d’évaluation au sein des EPI du 7 juin au 2 juillet 2010, à l’issue duquel il avait été constaté qu’il pouvait accéder à des travaux de conditionnement légers avec alternance des positions et sans port de charge, ou être dirigé vers un poste de réception. Les orientations ainsi retenues étaient suffisantes pour lui permettre de s’orienter seul sur le marché du travail, lequel offrait par ailleurs un éventail suffisamment large d’activités légères, dont un nombre significatif était adaptés aux limitations du recourant et accessibles sans autre formation particulière.

54.    Dans sa réplique du 20 avril 2011, le recourant a sollicité la mise en œuvre d’une nouvelle expertise orthopédique indépendante, alléguant que son état de santé ne lui permettait pas de réaliser un revenu de CHF 45'615.-. A cet égard, il a fait valoir que, dans son expertise qui remontait au 25 novembre 2006, le Dr R______ n’avait pas affirmé qu’il était en mesure, sans une réadaptation professionnelle, d’exercer une activité adaptée aux limitations décrites. Le recourant a également contesté les conclusions des EPI, en tant qu’il pourrait exercer une activité légère de conditionnement. Il a par ailleurs joint l’IRM cervicale du 4 mars 2010 précitée (ci-dessus, § 46), ainsi qu’un rapport de chirurgie orthopédique du Centre hospitalier intercommunal Annemasse-Bonneville, du 5 avril 2011 (docteur V______, chirurgien).

Ce dernier document atteste qu’à l’examen, il n’y avait pas de déficit des deux membres supérieurs ; les réflexes ostéo-tendineux styloïdien, bicipital et tricipital étaient retrouvés à droite, mais absents à gauche ; la mobilité du rachis cervical était douloureuse lors de la rotation gauche de la tête ; on notait également une douleur le long des muscles paracervicaux droits avec localisation exquise au niveau de la bosse occipitale droite évoquant le trajet du nerf d’Arnold ; un test à la Xylo(caïne) avait immédiatement calmé les douleurs ; « le reste des secteurs de mobilité étaient correct ».

55.    Dans sa duplique du 18 mai 2011, l’OAI a maintenu les termes et conclusions de ses précédentes écritures. Il s’est fondé sur un avis du SMR (Dr W______, FMH en médecine interne) du 5 mai 2011, estimant que les dernières pièces médicales ne démontraient pas d’aggravation clinique. Selon le SMR, l’IRM cervicale du 4 mars 2010 était superposable, sur le plan de la description, avec l’IRM du 29 août 2000 décrite dans l’expertise du Dr R______, laquelle ne démontrait qu’une ébauche de canal cervical rétréci, « que le Dr E______, neurochirurgien, n’avait pas considéré comme tel », tout comme l’expert également. Les discopathies protrusives étagées et autres lésions dégénératives disco-vertébrales y étaient déjà décrites, l’électromyogramme effectué par le Dr I______ étant par ailleurs tout à fait normal au niveau cervical. Il était en outre « bien connu » qu’une (simple) image radiologique ne pouvait justifier une incapacité de travail. En l’occurrence, il n’existait pas d’évolution clinique majeure. S’il existait une névralgie d’Arnold, le stade suivant serait d’envisager une infiltration de stéroïdes. Les douleurs lors de la rotation à gauche de la tête avaient déjà été décrites dans l’expertise du Dr R______.

Le SMR mentionne en outre que l’assuré avait effectué un stage à l’agence T______ du 4 août 2008 au 30 janvier 2009, dans le cadre de mesures IPT (ie : Fondation intégration pour tous). Il avait échoué pour la seconde fois à ses examens pour le diplôme d’agent de voyages. Si l’assuré l’expliquait par le fait d’avoir des douleurs cervicales durant son examen informatisé, l’avis de l’employeur était autre, évaluant les connaissances touristiques et informatiques insuffisantes. De plus, une lenteur dans la gestion des tâches avait été relevée, ainsi que certains problèmes de comportement. Cette constellation entrait en résonnance avec l’avis du Dr R______, qui avait indiqué, dans son rapport d’expertise, avoir l’impression que les plaintes importantes du patient étaient essentiellement subjectives, sans justifications cliniques évidentes. Ainsi, l’équipe du MAMAC avait estimé que la profession d’agent de voyages n’était pas indiquée et qu’une mesure de coaching pouvait être mise en place pour aider l’assuré à trouver une activité correspondant à ses limitations fonctionnelles.

56.    Par envoi spontané du 31 mai 2011, le recourant a encore produit les documents suivants :

- un rapport d’IRM cervicale du Centre de radiologie de Gaillard, du 15 avril 2011 (docteur X______, radiologue et chef de clinique à la faculté), mettant en évidence des lésions de discarthrose à prédominance C4-C5 avec hernie discale foraminale C4-C5 gauche, para médiane et foraminale gauche C5-C6, et protrusion C6-C7, préforaminale gauche ; à l’étage C3-C4, protrusion discale globale avec uncarthrose, et rétrécissement foraminal modéré du côté droit ; à l’étage C4-C5, présence d’un hernie discale préforaminale gauche, associée à de l’uncarthrose, responsable d’un rétrécissement des trous de conjugaison de façon bilatérale ; à l’étage C5-C6, protrusion discale globale, et foraminale gauche responsable d’un rétrécissement foraminal gauche ; à l’étage C6-C7, présence d’une hernie discale foraminale gauche responsable d’un rétrécissement foraminal modéré ; à l’étage C7-T1, on ne retenait pas de hernie discale, ni de rétrécissement foraminal marqué ; ces lésions s’accompagnaient d’uncarthrose  et il n’y avait pas de myélopathie cervicarthrosique, le cordon médullaire conservait un calibre satisfaisant avec intégrité de la jonction bulbo-médullaire.

- un rapport de radiographies du rachis cervical, demandé par le Dr V______, du 22 avril 2011, mettant en évidence une discarthrose étagée C4-C5, C5-C6 et C6-C7, ainsi qu’un discret rétrécissement des trous de conjugaison C3-C4 et C4-C5 du côté droit.

- un rapport du service de chirurgie, orthopédie et traumatologie du Centre hospitalier intercommunal Annemasse-Bonneville du 22 avril 2011 (Dr Y______, chirurgien), indiquant que les radiographies du 22 avril 2011 mettaient en évidence une discarthrose étagée C4-C5, C5-C6 et C6-C7 avec un léger rétrécissement des trous de conjugaison du côté droit, alors que l’IRM confirmait une discarthrose étagée à prédominance C4-C5 avec une hernie discale et une protrusion C6-C7 gauche, ce qui était une contradiction avec l’examen clinique ou la névralgie cervico-brachéale est à droite avec un niveau plutôt C7-C8 ». Une infiltration au NAROPEN du nerf d’Arnold droit avait soulagé le patient pendant trois à quatre heures, ce qui encourageait à renouveler l’infiltration avec de la NAROPEINE et de la cortisone. En outre, le patient semblait se plaindre d’un syndrome post-traumatique fait de perte de mémoire, d’irritabilité et de fatigabilité.

- un rapport du docteur Z______, neurochirurgien, du 13 mai 2011, indiquant qu’il existait une douleur au point d’émergence du nerf d’Arnold à gauche et que l’IRM cervicale (du 15 avril 2011) montrait une cervicarthrose importante au niveau C4-C5, C5-C6 et C6-C7 avec un rétrécissement du canal rachidien et une contrainte foraminale pour le fourreau dural. Le patient avait décrit un tableau de névralgie cervico-brachiale tronquée à gauche avec des douleurs cervicales interscapulaires et invalidantes, d’aggravation progressive. A l’examen clinique, il y avait une douleur cervicale, une raideur au niveau de la musculation paravertébrale. Il n’y avait pas de déficit. De la kinésithérapie était prescrite.

Selon le recourant, ces dernières pathologies n’avaient pas été énumérées dans le rapport du Dr R______ du 25 novembre 2006.

57.    Dans ses déterminations du 23 juin 2011, l’OAI a persisté dans ses conclusions. A cet égard, il s’est fondé sur un avis du SMR du 21 juin 2011 (Dr W______), selon lequel les derniers documents produits ne démontraient pas de faits nouveaux susceptibles d’être responsables d’une quelconque aggravation par rapport à l’avis du SMR du 5 mai 2011. Les radiographies des 5 avril et 13 mai 2011 avaient été effectuées par des praticiens différents ayant chacun leur manière de décrire les choses, les uns parlant de protrusions, les autres de proéminence discale. Le rapport du 15 avril 2011 parlait d’une hernie discale au niveau C6/C7 responsable d’un rétrécissement foraminal modéré, lequel, selon le Dr W______, pouvait être dû « aussi bien à une hernie discale qu’à une uncarthrose », alors que celui du 4 mars 2010 évoquait, pour cette même région, une discopathie protrusive avec un caractère plus focal au niveau foraminal D entraînant un rétrécissement du trou de conjugaison. Les conséquences semblaient être les mêmes pour les deux médecins, ce qui était le plus important, attendu que la description radiologique pouvait être légèrement différente. Surtout, le rapport du 15 avril 2011 ne retenait pas de myélopathie cervico-arthrosique et le cordon médullaire conservait un calibre satisfaisant avec intégrité de la jonction bulbo-médullaire. Par ailleurs, l’uncarthrose mise en évidence sur l’IRM du 15 avril 2011, décrite comme responsable avec la hernie d’un rétrécissement des trous de conjugaison (par lesquels les nerfs passent), était déjà décrite dans le rapport du 4 mars 2010 comme entraînant, au niveau C4/C5, un rétrécissement significatif des trous de conjugaison C4/C5 des deux côtés. Dès lors, ce qui risquait de constituer une diminution des trous de conjugaison était déjà présent dans le rapport de mars 2010 et la transformation de ce débord discal circonférentiel en protrusion puis en hernie ne pouvait avoir d’influence sur un canal déjà obstrué. Le peu de changement radiologique survenu en environ une année correspondait bien à l’évolution qu’on était en droit d’attendre d’une arthrose cervicale, lieu où les contraintes de gravité étaient relativement modestes par rapport à d’autres régions du corps. En outre, dans son rapport du 13 mai 2011, le Dr Z______ avait probablement fait une erreur en localisation la névralgie du nerf d’Arnold à gauche, plutôt qu’à droite, comme l’avait constaté le Dr V______ ; ce dernier praticien n’avait posé aucune indication neurochirurgicale.

Concernant la discordance exprimée par le Dr V______ dans son rapport du 22 avril 2011 (discordance relative aux radiographies effectuées le 22 avril 2011 et à l’IRM cervicale du 15 avril 2011), le Dr W______ a relevé que le Dr V______ n’avait évalué la hernie discale C4/C5 et C6/C7 que comme une protrusion ; selon l’IRM, à l’étage C7/T1, on ne retenait pas de hernie discale, ni de rétrécissement foraminal marqué.

58.    Dans ses observations du 27 juillet 2011, le recourant a persisté à demander la mise en œuvre d’une « expertise indépendante ». Dans sa réponse du 2 mars 2011, l’OAI n’avait pas pris en compte l’IRM du 4 mars 2010. De plus, la situation décrite dans l’expertise du Dr R______ n’était pas celle décrite dans l’IRM cervicale du 15 avril 2011, respectivement dans le rapport du Dr V______ du 5 avril 2011, où il était clairement question de hernies au niveau C4-C5 et C6-C7. Dans ces conditions, affirmer que la « situation ayant prévalu à la décision attaquée serait inchangée frisait l’imposture ».

59.    Par envoi du 29 juillet 2011, le recourant a encore transmis un rapport d’IRM du Centre d’imagerie médicale et diagnostique de BETAMAR (Turquie), du 22 juillet 2011, rédigé en turc, ainsi qu’une traduction libre, faisant en particulier état d’une « dégénération » dans tous les disques intervertébraux thoraciques, de protubérances annulaires asymétriques minimales plus manifestes vers la postérieure droite dans les disques intervertébraux Th3-Th4 et Th4-Th5, de protubérances annulaires asymétriques plus manifestes vers l’antérieure et la postérieure droite dans le disque intervertébral Th8-Th9.

60.    Dans un avis du 22 août 2011, le SMR (Dresse AA______) a relevé que, dans sa réponse du 2 mars 2011, l’OAI avait pris en compte l’IRM du 4 mars 2010 dans la mesure où il s’était fondé sur l’avis du SMR du 20 mars 2010, lequel avait bien pris en compte les conclusions de l’IRM du 4 mars 2010 et en avait comparé les conclusions avec celles du rapport d’expertise du Dr R______. Dans son avis du 21 juin 2011, le SMR avait relevé la discordance radio-clinique qui avait échappé au Dr V______ et le fait que ce dernier mettait l’accent plus sur « un syndrome post-traumatique qu’une pathologie somatique », qui, à son avis, pouvait être corrigée par une infiltration de stéroïdes. Ainsi, sur le plan clinique, tous les traitements susceptibles d’apporter une amélioration n’avait pas été réalisés (par exemple administration de Xylocaïne®). La comparaison de l’IRM cervicale de 2011 avec celle de 2010 ne faisait apparaître aucune aggravation clinique : en particulier, il n’existait pas de myélopathie cervico-arthrosique et le cordon médullaire conservait un calibre satisfaisant avec intégrité de la jonction bulbo-médullaire. La traduction de l’examen IRM des vertèbres cervicales du 22 juillet 2011 ne démontrait aucune franche hernie discale et la nomenclature n’était pas différente de celle de l’IRM cervicale du 15 avril 2011 du Dr X______. Quoiqu’il en soit, des modifications radiologiques ne pouvaient constituer en elles-mêmes une quelconque justification d’incapacité de travail, seule la définition des limitations fonctionnelles faisant foi.

61.    Dans ses déterminations du 28 septembre 2011, le recourant a relevé qu’il subsistait des divergences importantes quant aux atteintes à la santé et aux limitations fonctionnelles qui en découlaient et a conclu à la mise en œuvre d’une expertise auprès d’un neurochirurgien. A cet égard, il a encore produit un certificat du docteur AB______, neurochirurgien, du 7 juin 2011, destiné au Dr V______, posant le diagnostic de cervicobrachialgies droites avec irradiation omoplate droite et parésie du triceps droit. L’IRM du 15 avril 2011 mettait en évidence une compression médullaire avec hernie discale médiane, une discarthrose L5-L6 bilatérale et une sténose foraminale C6-C6 bilatérale. Le médecin précisait : « patient susceptible d’être amélioré par un triple Cloward C4 à C7 ».

62.    Dans ses observations du 16 novembre 2011, l’OAI a persisté dans ses conclusions, sur le vu d’un avis du SMR du 14 novembre 2011 (docteur AC______, spécialiste en médecine interne), selon lequel le certificat du Dr AB______ n’apportait rien de nouveau au regard de l’IRM cervicale du 15 avril 2011 effectuée par le Dr X______, lequel n’avait pas retenu de myélopathie cervicarthrosique et avait constaté par ailleurs que le cordon médullaire conservait un calibre satisfaisant avec intégrité de la jonction bulbo-médullaire.

63.    Par courrier du 25 novembre 2011, la chambre de céans a demandé à l’OAI de fournir les documents suivants :

- le rapport médical du Dr H______ du 15 mars 2002, dont seules les annexes figuraient au dossier (sous Doc 23 et Doc 24).

- la copie du rapport de stage aux EPI du 7 juin au 2 juillet 2010 (mentionné dans la réponse de l’OAI du 2 mars 2011).

- les résultats de fin de stage IPT, l'avis de l'employeur et le rapport du MAMAC mentionnés dans l’avis du SMR du 5 mai 2011.

64.    Par courrier du 12 décembre 2011, l’OAI a indiqué que le Dr H______ n’avait pas rempli d’autre rapport que les annexes transmises sous documents 23 et 24 et qu’il ne disposait pas non plus des résultats de fin de stage ITP. Il a en outre précisé que le montant de CHF 67'709,85 (mentionné dans sa note de travail du 26 octobre 2010) résultait de l’addition des salaires mensuels pour l’année 2011 (recte : 2001), tels que fournis par l’employeur.

65.    L’OAI n’a pas communiqué l'avis de l'employeur et le rapport du MAMAC requis. Il a en revanche produit un rapport de stage aux EPI du 16 septembre 2010, lequel proposait une orientation professionnelle dans le domaine du conditionnement léger en milieu adapté, avec alternance de position, ou de la réception, soit un poste d’orientation plus relationnelle et sociale. Le pourcentage de rentabilité de 50% pouvait être amélioré avec de la pratique. Tout au long de son stage, durant lequel il n’avait effectué aucun port de charge, l’assuré avait fait preuve d’un bon engagement, de respect et de ponctualité ; il s’était montré consciencieux, méticuleux, méthodique, motivé et assidu ; il avait toutefois montré des signes de fatigue en fin de journée. Il avait porté une minerve et avait dû arrêter des activités de type sériel (mouvements répétitifs) de longue durée, ainsi que toutes celles qui impliquaient des tractions trop fortes, lesquelles provoquaient, selon ses dires, des douleurs dans la nuque ou des maux de tête. Les douleurs avaient aussi eu une influence sur sa précision et sa concentration, en particulier dans les travaux nécessitant des gestes plus fins. L’assuré avait un rythme de travail lent « lors de la plupart des exercices demandés », compte tenu en particulier de ses oublis, et avait eu de la peine avec les travaux techniques, affirmant ne pas être habitué aux travaux mécaniques.

66.    Par courrier du 20 janvier 2012, le recourant a demandé l’audition du Dr H______ dans la mesure où le rapport de ce dernier du 15 mars 2002 n’existerait pas, selon l’OAI. Il y avait en outre lieu de s’interroger quant au caractère exhaustif du dossier dont disposait l’OAI puisqu’il n’existait pas de résultats de rapport de fin de stage IPT alors que ceux-ci étaient mentionnés dans l’avis du SMR du 5 mai 2011. Il résultait en outre du rapport de stage aux EPI du 7 juin au 2 juillet 2010 un handicap avec une influence sur la capacité de travail, ce que l’office intimé ne contestait pas, tout en retenant toutefois un taux inférieur à celui donnant droit à une rente. Dans la mesure où l’évaluation médicale sur laquelle s’était fondé ledit office n’était pas documentée, il y avait lieu d’ordonner une expertise, laquelle devrait prendre en considération, sur le plan orthopédique, les éléments nouveaux produits durant la présente procédure.

67.    Dans ses déterminations du 9 février 2012, l’OAI a persisté dans ses précédentes conclusions. Il s’est opposé à l’audition du Dr H______, qui lui paraissait superflue au vu des nombreux rapports médicaux figurant au dossier. L’évaluation médicale sur laquelle l’office s’était fondé était parfaitement documentée, le SMR s’étant par ailleurs prononcé de manière circonstanciée dans plusieurs avis, concluant à l’absence de fait nouveau démontrant une quelconque aggravation. En outre, le recourant soutenait de manière erronée qu’il n’existait pas de résultats de fin de stage, étant donné que le rapport des EPI du 16 septembre 2010 permettait de constater qu’il pouvait accéder à des travaux de conditionnement légers permettant l’alternance de positions et sans port de charge, ou être dirigé vers un poste de réception.

68.    Par ordonnance du 12 octobre 2012, la chambre de céans a confié une expertise bidisciplinaire (orthopédique et neurologique) au CHUV, afin de trancher la question controversée du degré de capacité de travail résiduelle de l’assuré depuis août 2001. Elle a invité les experts à faire une appréciation consensuelle du cas s’agissant de toutes les problématiques ayant des interférences entre elles.

69.    A la demande du Service de neurologie du CHUV les examens suivants ont été effectués :

-     un ENMG du 31 janvier 2013 s’est révélé dans les limites de la norme.

-     une IRM cervicale et lombaire du 21 mai 2013 a mis en évidence des discopathies cervicales multi-étagées prédominant aux étages C4-C5, C5-C6 et C6-C7, associées à un canal cervical étroit, cependant sans myélopathie associée, des rétrécissements foraminaux multi-étagés antélisthésis de L5 sur S1 de grade I et rétrécissements foraminaux bilatéraux associés.

-     un examen neuropsychologique du 29 janvier 2013 a conclu au caractère globalement superposable à l’examen du 4 novembre 2005 (cf. ci-dessus, § 33) et retenu que les troubles neuropsychologiques présentés étaient de nature à diminuer la capacité de travail (rapport de la professeure AD______ 11 février 2013).

70.    Dans leur rapport d’expertise du 22 mars 2013, les expertes neurologues (Dresses AE______ et AF______) ont posé les diagnostics suivants, avec influence sur la capacité de travail : cervicalgies chroniques irradiantes au niveau scapulaire droit et au membre supérieur droit, avec spondylose et spondylarthrose cervicale, sans signes radiologiques de myélopathie ou de compression, d’origine probablement multifactorielle (post-traumatique, dégénérative, avec possible composante fonctionnelle) ; troubles neuropsychologiques stables depuis 2005 (manque du mot, ralentissement, troubles exécutifs et attentionnels, troubles mnésiques). Au titre de diagnostic sans influence sur la capacité de travail, elles ont retenu un discret hémi-syndrome sensitivomoteur facio-bracio-crural droit, fluctuant, d’origine fonctionnelle, sans signes objectifs au status. L’incapacité de travail était à 50% depuis 2001, et à long terme, conformément aux constatations faites à la CRR lors des stages aux EPI. La capacité de travail était probablement restée stable depuis 2001. Une activité adaptée serait raisonnablement exigible, sans port de charges, sans mouvement répétés et avec une position de la tête pouvant être changée. Cela nécessitait toutefois, en parallèle, une réhabilitation active avec de la physiothérapie intensive et une activité physique régulière. Une réinsertion professionnelle devrait être effectuée, aux mêmes conditions. Le status montrait en effet un déconditionnement physique qui entretenait probablement les douleurs ; les chances de réussite d’une réinsertion professionnelle étaient « peut-être » (réponse n° 5) ou « tout de même » (réponse n° 10) limitées au vu de la chronicité des symptômes et des précédents échecs de réinsertion professionnelle. La capacité de travail de 50% ne pouvait pas être améliorée par des mesures médicales. Cependant, des cures de physiothérapie et de réhabilitation physique pourraient éventuellement aider l’expertisé à garder sa capacité de travail de 50%. En l’absence de déficit neurologique, de compression radiologique à l’IRM et face à une situation chronique depuis plusieurs années, il n’y avait pas d’indication à une intervention chirurgicale, selon le neurochirurgien (Dr AG______). Depuis janvier 2008, l’expertisé était conseiller municipal et travaillait quelques heures par mois comme guide touristique en turc à Genève. Il était prêt à travailler au maximum à 25%, sans port de charges et sans mouvements répétitifs. Après deux heures d’activité en tant que guide, il se sentait très fatigué, et était obligé de prendre des médicaments pour diminuer la douleur.

Au terme de leur rapport, les expertes ont indiqué rester à disposition pour un consilium avec « les collègues de l’orthopédie ».

71.    Dans leur rapport du 22 mai 2013, les experts orthopédistes (Pr AH______ AI______, Dr AJ______ et Dr AK______) ont posé les diagnostics suivants : status post-nombreux accidents du rachis cervical (1999, 2000, 2001 et 2005) ; cervicobrachialgies droites avec spondylose et spondylarthrose cervicale avec un rétrécissement foraminal relatif multi-étagé, prédominant aux étages C3/C4 et C4/C5 ; spondylolisthésis L5/S1 de grade I. Lors du séjour de l’assuré à la CRR, le médecin de la SUVA avait conclu à une incapacité de travail de 50% avec quelques limitations (éviter les ports de charge dépassant les 5 kg avec une limitation de la période de travail à deux heures et l’évitement de mouvements répétitifs au dessus des épaules). Cette activité ne pouvait être envisagée sur un travail à plein temps.

A cet égard, les experts ont relevé : « Nous connaissons très bien la rigueur qui caractérise les médecins de la SUVA, et après un nouvel accident survenu en 2005, la capacité de travail de travail ne pourra pas être améliorée et elle restera à 50% ». Depuis le 11 juin 2001, et à long terme, la capacité de travail était de 50%. Une activité lucrative adaptée serait raisonnable avec quelques limitations (éviter le port de charges qui dépassent les 5 kg, les mouvements répétitifs au-dessus des épaules, ainsi qu’une position fixe de la tête pendant plusieurs heures). Les chances de succès d’une réadaptation professionnelle étaient diminuées au vu de la chronicité de la symptomatologie douloureuse ainsi que les précédents échecs de formation et de réinsertion professionnelle. L’expertisé pouvait travailler dans n’importe quelle activité adaptée à ses limitations, de préférence dans son domaine de formation (tourisme). La capacité de travail ne pouvait pas être améliorée par des mesures médicales ou chirurgicales, surtout en raison de la chronicité des plaintes.

72.    A la demande de la chambre de céans, le CHUV a transmis un « consilium des expertises d’orthopédie et de neurologie », daté du 21 octobre 2013, cosigné par les Dresses AE______ et AF______, du service de neurologie. Ce document reprend les conclusions des rapports d’expertises des 22 mars et 22 mai 2013 et ajoute que « nos collègues orthopédistes (Dr AK______, Dr AJ______ et le Prof AH______ AI______ et nous-mêmes avons la même appréciation du cas. Nous estimons que Mr A______ est capable de travailler à 50% dès le 11 juin 2001 ». Depuis lors, la capacité de travail était restée stable et le sera probablement à long terme. Le patient présentait des cervicalgies et des cervicobrachialgies évoluant depuis 1999 avec un passage à la chronicité de la symptomatologie douloureuse. On ne pouvait pas s’attendre à une disparition complète de ces douleurs. Une activité lucrative adaptée serait raisonnable avec quelques limitations (éviter le port de charge dépassant les 5 kg, éviter les mouvements répétitifs au-dessus des épaules ainsi qu’une position fixe de la tête pendant plusieurs heures). Une nouvelle réinsertion professionnelle serait à effectuer, bien que les chances de succès fussent diminuées en raison de la chronicité des symptômes. Parallèlement, une réhabilitation physique active, avec de la physiothérapie et de l’activité physique régulière, était préconisée, car le patient présentait un déconditionnement physique.

73.    Par courrier du 25 novembre 2013, le recourant a pris acte que le rapport d’expertise du 22 mars 2013, concluait à une incapacité de travail de 50% depuis 2001, taux qui ne pourrait pas être augmenté. Restait toutefois la question de savoir si la capacité de travail de 50% dans une activité adaptée était d’ores et déjà acquise ou si elle ne le serait qu’après des mesures de réinsertion professionnelle. Cette dernière hypothèse devait être retenue, au vu du contenu du rapport laissant entendre que les chances de réussite d’une réadaptation professionnelle étaient diminuées au vu de la chronicité des symptômes et des précédents échecs de réinsertion professionnelle. Il convenait toutefois d’inviter les experts à se déterminer sur ce point.

74.    Dans ses observations du 25 novembre 2013, l’OAI a estimé que les conclusions du rapport d’expertise du CHUV n’étaient pas convaincantes et a conclu au rejet du recours.

Les experts du CHUV avaient admis que la situation médicale était restée stable depuis 2001 déjà, si bien que leur évaluation de la capacité de travail ne consistait en réalité qu’en une nouvelle appréciation d’un même état de fait. La capacité de travail de 50% retenue par ces experts procédait d’une erreur manifeste, dès lors que le médecin de la SUVA avait au contraire retenu qu’une activité pouvait être envisagée sur un plein temps, avec quelques limitations. Le médecin de la SUVA ne se prononçait alors que sur la capacité de travail dans l’activité habituelle et non pas dans une activité adaptée. Les experts du CHUV ne s’étaient ainsi nullement prononcés sur la capacité de travail dans une activité de remplacement adaptée. Dans son avis du 11 novembre 2013, le SMR avait relevé que les experts judiciaires n’avaient nullement motivé pour quelles raisons la capacité de travail serait limitée à 50%, en l’absence de signe de gravité (mobilité cervicale non-douloureuse, traitement antalgique très limité, et EMG normal). Les experts judiciaires n’avaient pas non plus discuté des deux expertises figurant au dossier, ni, partant, expliqué pourquoi ils s’étaient éloignés de l’évaluation de la capacité résiduelle de travail fixée par les précédents experts, alors même qu’ils avaient confirmé que l’état de santé de l’assuré était resté stable depuis des années. L’appréciation consensuelle avaient été réalisée plus de huit mois après l’examen des neurologues et six mois après celui des chirurgiens.

Par ailleurs, dans un rapport complémentaire du 11 novembre 2013, le SMR (docteur AL______, médecin généraliste) avait indiqué que les cervicalgies ne pourraient être éventuellement incapacitantes, dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles d’épargne du rachis cervical, que si elles étaient très sévères (douleur très intense mal calmée par le traitement), ce que les Dresses AE______ et AF______ n’avaient pas constaté en l’occurrence. Les troubles neuropsychologiques étaient très modérés et stables depuis 2005 et ne pouvaient être le signe d’un syndrome démentiel débutant, ni justifier une incapacité depuis 2001. Les médecins du service d’orthopédie et de traumatologie avaient retenu des cervico-brachialgies droites, des status post-accidents et un spondylolisthésis L5-SI, mais n’avaient pas précisé le caractère incapacitant de chaque atteinte. Or l’assuré ne se plaignait nullement de problème lombaire et on ignorait le type de séquelle post-accident. Les experts judiciaires avaient dressé un tableau tout à fait rassurant (pas de perte de sommeil, pas de douleur très importantes, pas de limitations des activités physiques, absence de signe objectif à l’examen clinique) et confirmaient qu’aucune indication chirurgicale n’était souhaitable. Les médecins du CRR avaient attesté une capacité de travail de 50% pour l’ancienne activité d’employé à la Poste, mais avaient estimé qu’une activité adaptée pouvait être envisagée sur un plein temps. Compte tenu de la stabilité de l’état de santé de l’assuré depuis 2001, il fallait s’en tenir à l’appréciation des précédents experts, en particulier les médecins de la CRR, et considérer que la capacité de travail était pleine pour toute activité strictement adaptée aux limitations fonctionnelles, et ceci depuis 2001.

75.    Par courrier du 19 novembre (recte : décembre) 2013, la chambre de céans a transmis aux experts judiciaires les observations des parties du 25 novembre 2013, ainsi que l’avis du SMR du 11 novembre 2013, et leur a imparti un délai pour se déterminer, de manière concertée, quant à leur contenu, respectivement sur le taux de capacité de travail de l’expertisé dans une activité adaptée.

76.    Dans leur complément d’expertise du 25 février 2014, reçu par le greffe le 4 avril suivant, les Dresses AE______ et AF______ et le docteur AM______, chef de clinique orthopédiste, ont estimé que la capacité de travail de l’expertisé (dans une activité adaptée) était de 50% depuis 2001, « de manière acquise, mais que pour maintenir ces 50%, il faut que le patient bénéficie de physiothérapie, d’une ergonomie de travail en parallèle, et qu’il reçoive une aide pour la recherche de travail par un projet de réinsertion professionnelle supervisé par l’OAI. Effectivement, la chance de réinsertion professionnelle même à 50% est précaire, vu la chronicité des symptômes (ne travaille plus depuis 2001) ». La capacité de travail n’était pas « stable à 50% depuis 2001, mais elle n’avait pas augmenté depuis lors ». Vu la chronicité des symptômes, il était très probable que ceux-ci persistassent dans le futur.

Les experts judiciaires ont insisté « sur l’importance d’une activité adaptée ; ce n’est pas 13 ans après l’arrêt de travail qu’une perception corporelle algique (ne nécessitant pas de déficits objectifs ou de signes para-cliniques pathologiques) va se résoudre dans une activité professionnelle non adaptée ». Bien que l’ENMG fut normal, le patient présentait des cervico-brachialgies chroniques, d’origine probablement multifactorielle (post-traumatique, dégénérative) avec au status une palpation douloureuse de la pointe scapulaire et de l’émergence du triceps à droite, le test de Spurling à gauche déclenchant une douleur à droite. Au vu des examens cliniques et paracliniques, un éventuel geste chirurgical ne pourrait améliorer la situation de douleur chronique.

Dans leur précédent rapport du 22 mars 2013, les expertes avaient retenu une « sensibilité tacto-algique diminuée facio-brachiale et de l’hémitronc droit », et non une « hypersensibilité tacto-algique diminuée » comme retenu par le Dr AL______. Ce signe subjectif n’avait pas été retrouvé à l’examen physique des orthopédistes et n’avait donc pas été pris en considération pour l’évaluation globale de la capacité de travail.

77.    Dans ses déterminations du 19 mai 2014, le recourant, par l’entremise de son nouveau conseil, a relevé que sa capacité de travail de 50% était non seulement subordonnée à des mesures de réinsertion, mais encore à des mesures de physiothérapie et d’ergonomie de travail. Ce n’était qu’à ces conditions qu’il pourrait atteindre une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée. A cet égard, le complément d’expertise du 25 février 2014 était incohérent, puisque le rapport d’expertise du 22 mars 2013 faisait état d’une capacité de travail de 50% tant dans l’ancienne activité que dans une activité adaptée. Aussi, convenait-il d’interpeler les experts sur ce point. L’OAI et son SMR avaient mal interprété le rapport de la CCR du 11 juillet 2001. C’était uniquement l’ancienne activité de facteur qui pouvait être exercée à 50%, activité qui pouvait être répartie « sur » un plein temps. En d’autres termes, dans cette dernière activité, il disposait d’une capacité de travail à 100% avec une diminution de rendement de 50%. En retenant que l’expertisé pouvait reprendre son activité de facteur avec quelques limitations, les médecins de la SUVA s’étaient déterminés implicitement sur une activité adaptée, dans la mesure où « ces précisions sur les limitations sont bien évidemment la qualification même de ce qu’était à leurs yeux une activité adaptée de leur patient ». Dans leur complément d’expertise du 25 février 2014, les experts avaient dûment motivé leur appréciation du taux d’incapacité de travail dans une activité adaptée à 50%.

78.    Dans ses déterminations du 12 juin 2014, l’OAI a maintenu sa position, se fondant sur un avis du SMR du 6 juin 2014 (Dr AL______). Les experts n’avaient pas expliqué les raisons pour lesquelles la capacité de travail était réduite dans une activité strictement adaptée aux limitations fonctionnelles. Si l’expertisé présentait des douleurs depuis treize ans, il s’agissait seulement d’une perception corporelle algique, sans signe objectif, assimilée à un trouble douloureux chronique, ne pouvant être pris en compte au niveau strictement médico-théorique. Concernant les cervico-brachialgies, les experts n’avaient donné aucun élément de gravité permettant de justifier l’incapacité retenue (traitement léger par antalgique de niveau 1, pas de physiothérapie, pas de signe paraclinique en particulier).

79.    Dans leur complément d’expertise du 15 octobre 2014, les experts du CHUV ont relevé que le patient présentait un syndrome douloureux chronique (cervico-brachialgies chroniques) d’origine multifactorielle (post-traumatique, dégénérative, fonctionnelle, « autre »). Au status neurologique, on ne retrouvait certes que peu de signes objectifs, avec une palpation douloureuse de la pointe scapulaire et de l’émergence du triceps à droite, le test de Spurling à gauche déclenchait une douleur à droite. Il était cependant connu qu’un syndrome douloureux pouvait engendrer une souffrance, sans pour autant retrouver un déficit clinique reproductible dans la salle d’examen, mais que celui-ci apparaissait ou se péjorait en situation de travail. La littérature scientifique avait démontré que le syndrome douloureux chronique engendrait des changements dans le système nerveux central qui modifiaient les circuits sensoriels, émotionnels et ceux qui habituellement inhibaient la douleur (« A future without chronic pain : neuroscience and clinical research », Cerebrum 2012). Le syndrome douloureux chronique, contrairement aux douleurs aiguës, engendrait une activité cérébrale aberrante pour des stimuli peu nociceptifs («Cerebral activation during hypnotically induced and imagined pain », Stuart Neuroimage, 2004). L’une de ces régions atteintes par la douleur chronique, le lobe préfrontal dorsolatéral, était impliquée dans la cognition, la planification motrice et la mémoire de travail. Ces changements chimiques, biologiques et structuraux augmentaient le risque de troubles cognitifs et de troubles émotionnels. L’expertisé présentait une atteinte neuropsychologique stable depuis 2005, avec des troubles attentionnels, exécutifs et mnésiques. Les douleurs chroniques étaient habituellement résistantes aux traitements antalgiques. Il n’y avait à l’heure actuelle pas encore de traitement satisfaisant. Au vu de la chronicité du syndrome douloureux, la capacité de travail était diminuée à 50% depuis 2001 « de manière acquise », dans une activité adéquate, sans activité physique importante, par exemple comme guide touristique.

80.    Dans ses déterminations du 20 novembre 2014, le recourant a fait valoir que le rapport d’expertise du 22 mars 2013 et ses compléments des 25 février et 15 octobre 2014 revêtaient pleine valeur probante. Son éventuelle capacité de 50% dans une activité adaptée était encore conditionnée à des mesures de réinsertion professionnelle, ainsi qu’à la possibilité de bénéficier d’une physiothérapie et d’une ergonomie de travail. A défaut, il ne pouvait atteindre ce taux. Plus de treize années s’étaient écoulées depuis ses stages aux EPI en 2001, de sorte que l’on pouvait s’interroger sur les chances réelles de réussite d’une nouvelle réadaptation professionnelle. Depuis 2008, il bénéficiait d’un contrat de travail sur appel de durée indéterminée en tant que guide touristique. Selon son contrat de travail du 17 octobre 2014 signé avec la Fondation AN_______, son salaire horaire était de CHF 120.- brut. En 2012 et en 2013, il avait réalisé un revenu brut de CHF 470.-, respectivement CH 580.-. Cette activité ne lui permettait pas de vivre et devait bien plutôt être considérée comme un loisir. Même si sa capacité de travail théorique pourrait être au maximum de 50%, elle était en pratique bien plus proche de 0%, compte tenu des nucalgies quotidiennes dont il souffrait depuis quatorze années et de son inactivité professionnelle depuis plus de treize années, à l’exception de quelques heures en qualité de guide touristique. On ne pouvait suivre les conclusions du SMR du 25 février 2014, selon lesquelles il ne souffrirait que d’une « perception corporelle algique sans signe objectif », car cet avis faisait complètement fi des nombreuses constatations objectives résultant de son dossier médical (notamment spondylose, spondylarthrose cervicale avec un rétrécissement foraminal relatif multi-étagé, sévère discopathie protrusive, compression médullaire avec hernie discale médiane, cervico-brachialgies chroniques, troubles neurologiques et mnésiques), dont notamment l’IRM cervicale du 4 mars 2010 et l’attestation du Dr AO________ du 15 avril 2011 et celle du Dr AB______ du 7 juin 2011. Malheureusement, il ne disposait plus des nombreux examens réalisés avant 2010, le Dr D______, le syndicat de la Poste et les HUG ayant égaré son dossier médical.

81.    Se fondant sur un nouvel avis du SMR du 28 octobre 2014, l’OAI a maintenu sa position (déterminations du 20 novembre 2014). La limitation de la capacité de travail à 50% dans une activité adaptée était uniquement due à un syndrome douloureux chronique, lequel ne pouvait être considéré à lui seul comme incapacitant. Dans leur rapport du 22 mars 2013, les expertes n’avaient pas fait état de ce syndrome dans les diagnostics posés. Dès lors, la capacité de travail était entière dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles déjà retenues.

82.    Dans leurs déterminations finales du 12 janvier 2015, les parties ont persistés dans leurs conclusions. Le recourant a encore insisté sur l’aspect chronique de son syndrome douloureux, lequel était incapacitant en raison des changements engendrés en particulier dans le système nerveux central. Il souffrait de cervicalgies à droite avec irradiation dans l’omoplate droite et parésie du triceps droit, ce qui l’handicapait fortement dans les gestes de la vie quotidienne, dans la mesure où il était droitier. Incapable de porter des charges, mêmes légères, ni de faire des mouvements au-dessus de l’épaule, ou des mouvements répétés, il ne voyait pas quel type d’activité adaptée il pourrait effectuer, sachant que les mesures de réadaptations avait toutes échoué, qu’aucun travail adapté à ses limitations ne lui avait été finalement proposé et que l’OAI avait estimé qu’il ne nécessitait pas de formation complémentaire.

83.    Sur demande de la chambre de céans, l’OAI a précisé que le salaire mentionné dans le questionnaire pour l’employeur du 3 août 2011 de CHF 69'795.- brut par an plus 13ème salaire, soit un salaire annuel brut de CHF 75'611.-, ne correspondait manifestement pas aux salaires perçus aux cours des années précédentes ainsi qu’ils figuraient sur les comptes individuels AVS, soit CHF 63'430.- en 1998 et CHF 63'465.- en 1999. Il résultait des fiches de salaire mensuelles pour l’année 2001 que l’assuré avait perçu cette année-là CHF 67'710.-. A ce montant, il convenait de déduire CHF 1'399,80 à titre d’allocations familiales (CHF 116,55 x 12), soit un revenu sans invalidité pour 2001 de CHF 66'310.- (courrier du 25 février 2015).

84.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.                                Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ ; RS E 2 05), en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA ; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI ; RS 831.20).

Celle-ci est dès lors compétente pour connaître de la présente cause.

2.                                L'examen du droit à des prestations selon la LAI est régi par la teneur de la LAI au moment de la décision entreprise eu égard au principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits, étant précisé que le juge n'a pas à prendre en considération les modifications du droit ou de l'état de fait postérieurs à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 136 V 24 consid. 4.3). Les dispositions de la 5ème révision de la LAI entrées en vigueur le 1er janvier 2008 sont applicables et les dispositions citées ci-après sont, sauf précision contraire, celles en vigueur à compter du 1er janvier 2008. Toutefois, le droit à la rente s'étendant jusqu'au 31 décembre 2007 s'examine à la lumière des anciennes normes. Les dispositions de la 6ème révision (premier volet) en vigueur depuis le 1er janvier 2012 (RO 2011 5659 FF 2010 1647) ne sont pas applicables.

3.                                Le recourant a présenté sa demande de rente le 25 juillet 2001. En dérogation à l'art. 24 LPGA, l'art. 48 al. 2 LAI, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007, prévoit que si l'assuré présente sa demande de rente plus de douze mois après la naissance du droit, les prestations ne sont allouées que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande. Concrètement, la chambre de céans peut se limiter à examiner si le recourant avait droit à une rente le 25 juillet 2000 (12 mois avant le dépôt de la demande) ou si le droit à une rente était né entre cette date et le 10 décembre 2010, date de la décision attaquée marquant la limite dans le temps du pouvoir d'examen de l'autorité de recours (ATF 130 V 445 consid. 1.2 et 1.2.1).

4. a. Aux termes de l'art. 8 LPGA, est réputée invalidité l'incapacité de gain totale ou partielle qui est présumée permanente ou de longue durée. L'art. 4 LAI précise que l'invalidité peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident. L'al. 2 de cette disposition mentionne que l'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération.

b. Un assuré a droit à un quart de rente s'il est invalide à 40% au moins, à une demi rente s'il est invalide à 50%, à trois quarts de rente s'il est invalide à 60% et à une rente entière s'il est invalide à 70% au moins (art. 28 al. 1 LAI en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 et art. 28 al. 2 LAI en vigueur dès le 1er janvier 2008).

c. Conformément à l'art. 29 al. 1 LAI, le droit à une rente naît dès que l'assuré présente une incapacité durable de 40% au moins (lettre a) ou dès qu'il a présenté, en moyenne, une incapacité de travail de 40% au moins pendant une année sans interruption notable (lettre b voir ATF 121 V 264 consid. 6). D'après la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la lettre a s'applique si l'état de santé de l'assuré est stabilisé et a acquis un caractère essentiellement irréversible, la lettre b si l'état de santé est labile, c'est-à-dire susceptible d'une amélioration ou d'une aggravation (ATF 111 V 21 consid. 2). Une incapacité de travail de 20% doit être prise en compte pour le calcul de l'incapacité de travail moyenne selon la let. b de l'art. 29 al. 1 LAI (VSI 1998 p. 126 consid. 3c). Depuis le 1er janvier 2008, l'art. 28 al. 1 LAI prévoit que l'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: a. sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles b. il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d'au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable c. au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins.

5. a. En l’espèce, les diagnostics retenus par les médecins et les experts ne sont, dans l’ensemble, pas remis en cause. Comme l’a relevé le SMR dans son avis du 21 juin 2011, les radiographies versées au dossier ont été effectuées par des praticiens différents ayant chacun leur manière de décrire les choses, les uns parlant de protrusions, les autres de proéminence ou hernie discale. En particulier, si le rapport d’IRM du 15 avril 2011 - dans la mesure où ce document peut, le cas échéant, être pris en considération (cf. ci-dessous § 6 let. i) - parlait d’une hernie discale au niveau C6/C7 responsable d’un rétrécissement foraminal modéré, ce dernier pouvait être dû aussi bien à une hernie discale qu’à une uncarthrose, alors que le rapport d’IRM du 4 mars 2010 évoquait, pour cette même région, une discopathie protrusive avec un caractère plus focal au niveau foraminal D entraînant un rétrécissement du trou de conjugaison. La description radiologique pouvait ainsi être légèrement différente.

b. Il n’est pas non plus contesté que les affections dont souffre l’assuré l’empêchent totalement d’exercer son ancienne activité de facteur depuis le 3 février 2000, respectivement le 1er février 2001, date d’échéance du délai de carence d'une année prévu par l'art. 28 al. 1 LAI.

c. Seule reste litigieuse l’appréciation de la capacité de travail dans une activité adaptée depuis cette dernière date. Se ralliant à l’évaluation de l’expert R______, ainsi qu’aux avis de son SMR des 20 avril 2010, 5 mai, 21 juin, 22 août et 14 novembre 2011, 11 novembre 2013, et 6 juin 2014, l’OAI estime que l’assuré dispose d’une capacité de travail résiduelle de 100% dans une activité strictement adaptée aux limitations fonctionnelles. De son côté, le recourant allègue ne pouvoir travailler désormais qu’à 50%, voire à 25%, en se fondant sur les conclusions des experts judiciaires AE______, AP_________, AK______, AJ______ et AI______ (cf. rapports d’expertise des 22 mars et 22 mai 2013 et leur complément des 21 octobre 2013 et 15 octobre 2014).

6. a. Le juge des assurances sociales doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle que soit leur provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Avant de conférer pleine valeur probante à un rapport médical, il s'assurera que les points litigieux ont fait l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prend également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu'il a été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale sont claires et enfin que les conclusions sont dûment motivées (ATF 125 V 351 consid. 3a). La jurisprudence a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertise ou de rapports médicaux. Ainsi, le juge ne s'écarte en principe pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale ordonnée par l’administration ou le juge, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa). Au sujet des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). Cette constatation s'applique de même aux médecins non traitants consultés par un patient en vue d'obtenir un moyen de preuve à l'appui de sa requête. Toutefois le simple fait qu'un certificat médical est établi à la demande d'une partie et est produit pendant la procédure ne justifie pas en soi des doutes quant à sa valeur probante (ATF 125 V 351 consid. 3b/dd). Quant aux documents produits par le service médical d'un assureur étant partie au procès, le Tribunal fédéral n'exclut pas que l'assureur ou le juge des assurances sociales statuent en grande partie, voire exclusivement sur la base de ceux-ci. Dans de telles constellations, il convient toutefois de poser des exigences sévères à l'appréciation des preuves. Une instruction complémentaire sera ainsi requise, s'il subsiste des doutes, même minimes, quant au bien-fondé des rapports et expertises médicaux versés au dossier par l'assureur (ATF 122 V 157 consid. 1d et arrêt du Tribunal fédéral 9C_55/2008 du 26 mai 2008 consid. 4.2, concernant les cas où le service médical n'examine pas l'assuré mais se limite à apprécier la documentation médicale déjà versée au dossier). Le simple fait qu'un avis médical divergent – même émanant d'un spécialiste – ait été produit ne suffit toutefois pas à lui seul à remettre en cause la valeur probante d'un rapport médical (arrêt du Tribunal fédéral U 365/06 du 26 janvier 2007 consid. 4.1). Enfin, en cas de divergence d'opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en oeuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante (ATF 125 V 351 consid. 3a).

b. Dans leurs rapports des 22 mars et 22 mai 2013 et leur complément des 21 octobre 2013 et 15 octobre 2014, les experts judiciaires ont motivé leur évaluation de la capacité de travail résiduelle du recourant (50% dans une activité adaptée) en tenant compte avant tout du caractère chronique d’un syndrome douloureux depuis 2001. A cet égard, ils ont retenu que l’expertisé présentait un déconditionnement physique de plus de treize ans, lequel entretenait probablement les douleurs. Ils se sont également ralliés à l’estimation des médecins de la SUVA, « dont nous connaissons très bien la rigueur », singulièrement au rapport de la CRR du 11 juillet 2001, tout en précisant que cette capacité de travail ne pouvait pas être améliorée après un nouvel accident survenu en 2005. Ils ont encore expliqué qu’un syndrome douloureux pouvait engendrer une souffrance, sans que l’on puisse pour autant retrouver un déficit clinique reproductible dans la salle d’examen, « mais que celui-ci apparaissait ou se péjorait en situation de travail ».

c. Indépendamment du fait que la simple référence à « la rigueur » des médecins de la SUVA ou à la survenance d’un « nouvel accident survenu en 2005 » ne constitue pas une motivation suffisante, pareille argumentation n’est pas convaincante. En effet, dans leur rapport du 11 juillet 2001, les médecins de la CRR se sont uniquement prononcés sur la capacité de travail de l’assuré dans son activité auprès de la Poste, et non pas dans une activité de remplacement. D’autre part, même s’il apparaît important, le déconditionnement présenté par l’assuré, en relation notamment avec les cervicalgies, ne présente pas en soi les caractéristiques d'une atteinte à la santé (comp. arrêt du Tribunal fédéral 9C_512/2007 du 25 avril 2008 consid. 3.2). La longue période d'inactivité du recourant depuis 2001 – soit neuf années si l’on s’en tient à la date déterminante de la décision attaquée du 15 décembre 2010 - n’est dès lors pas, en tant que telle, déterminante du point de vue de l'assurance-invalidité pour juger de l'exigibilité ou non d'une reprise d'activité professionnelle (arrêt du Tribunal fédéral I 794/03 du 9 août 2004 consid. 4.1). Dans son expertise psychiatrique du 10 juillet 2006, qui répond à toutes les conditions permettant de lui reconnaître une pleine valeur probante (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a), le Dr Q______ avait d’ailleurs déjà exclu toute atteinte psychiatrique en l’occurrence, quand bien même l’inactivité dans laquelle se trouvait alors l’expertisé depuis cinq ans était un terrain plus que favorable à l’amplification d’une fixation sur la symptomatologie douloureuse.

d. Les considérations formulées par les experts judiciaires ne permettent pas non plus de renverser la présomption selon laquelle les effets des troubles somatoformes douloureux ou un autre syndrome semblable dont l'étiologie est incertaine - à l’instar du syndrome douloureux finalement retenu par ces derniers en l’espèce - peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 132 V 65 consid. 4.2.1). En effet, on ne retrouve pas en l’occurrence les critères défavorables permettant d’admettre - à titre exceptionnel - comme non exigible un effort de volonté en vue de surmonter la douleur et de la réintégration dans un processus de travail suppose (ATF 130 V 352 consid. 2.2.3 ; Mosimann, Somatoforme Störungen : Gerichte und (psychiatrische) Gutachten, RSAS 1999, p. 1 ss et 105 ss). En particulier, il n'y a pas eu de perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, étant donné que le recourant a continué d'avoir une certaine activité. Ainsi, celui-ci a pu décrocher un diplôme de guide touristique en mai 2008 et travaille depuis lors en cette qualité quelques heures par mois, sur appel. Il a également été en mesure d’exercer la charge, occasionnelle, de député municipal entre 2008 et 2011. Au demeurant, on rappellera que dans son rapport du 30 mai 2006, l’expert psychiatre avait exclu toute atteinte ou limitation psychiatrique en l’occurrence.

e. Certes, une péjoration de l'état de santé du recourant ne peut être exclue lors de la reprise d’une activité professionnelle à plus ou moins long terme. Il n'y a toutefois pas lieu de la prendre en considération de façon anticipée dans le cadre de l'évaluation de la capacité de travail, ce d'autant plus qu'une rechute n'est, par définition, ni prévisible ni quantifiable (comp. arrêt du Tribunal fédéral 9_485/2013 du 1er avril 2014 consid. 4.3.1). Les conséquences négatives d'une reprise du travail par le recourant apparaissent au demeurant seulement vraisemblables, ce qui ne suffit pas à établir un fait dans un procès en matière d'assurances sociales (ATF 126 V 360 consid. 5b).

f. Quant à la référence à la littérature médicale concernant l’impact des douleurs sur le plan neurologique, elle ne suffit pas pour se convaincre d'une incapacité d'exercer à plein temps une activité adaptée aux limitations de l’assuré, ni pour admettre, d'une façon générale, qu'une telle atteinte entraîne en tant que telle une incapacité de travail de 50%. Au demeurant, les experts judiciaires n’ont pas indiqué les raisons pour lesquelles ils s’écartaient sur ce point de l’appréciation de l’expert R______, respectivement de celle, entre autres, du Dr K______ (cf. consid. 6 g, ci-après).

g. En revanche, il convient d’accorder une valeur probante supérieure au rapport d’expertise du Dr R______ du 25 novembre 2006, ainsi qu’aux avis subséquents du SMR, concluant à une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée. Certes, quelques années se sont écoulées entre le moment où cet expert a examiné l’assuré et le jour où la décision litigieuse a été rendue (15 décembre 2010). Ce fait n'altère pas pour autant la valeur probante de son expertise (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a). Seul est décisif le fait que les conclusions de ce médecin n'ont pas été remises en cause par un avis médical pertinent à ce jour. En particulier, le Dr R______ a effectué un examen approfondi de l’intéressé, s’est déterminé en pleine connaissance de l'anamnèse et a dûment pris note des plaintes de celui-ci en les mettant en relation avec les éléments objectifs constatés lors de l'examen clinique et a dûment motivé pour quelles raisons il a estimé que l'assuré bénéficiait encore d'une capacité de travail résiduelle de 100% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles. Cet expert a indiqué que des mesures de réadaptation professionnelle étaient envisageables « dès maintenant » (rapport, p. 19), laissant ainsi entendre que l’expertisé disposait d’une capacité de travail entière dans une activité adaptée depuis le 25 novembre 2006 au moins, date à laquelle il a établi son rapport d’expertise. Le Dr R______ a d’ailleurs précisé que ces mêmes mesures avaient déjà été proposées par le Dr K______ « depuis plusieurs années » (cf. notamment rapport de ce dernier du 26 janvier 2003, renvoyant au rapport du Dr L______ du 26 août 2002), mais qu’elles n’avaient pas été pratiquées de manière idoine à la CRR en juin 2001. On peut donc en inférer que l’assuré disposait a priori d’une telle capacité de travail depuis l’été 2001 au plus tôt. Cette conclusion est corroborée par les différents médecins ayant ensuite examiné l’assuré. Ainsi, dans son rapport du 15 mars 2002, le Dr H______ a estimé qu’une activité adaptée était envisageable à 100%, depuis le 27 novembre 2001, dans un poste évitant les mouvements répétitifs, le port de charges de plus de 5 kg, la position à genoux et accroupie, l’inclinaison du buste, le travail en hauteur (voir aussi, dans ce sens, le courrier du Dr J______, médecin-conseil de la Poste, 4 septembre 2002). Le Dr L______ et le Dr K______ ont également confirmé cette estimation (rapports des 26 août 2002 et 26 janvier 2003 ; voir également l’avis du service médical de la Poste du 19 mai 2003). Par ailleurs, postérieurement à l’expertise du Dr R______, le médecin-traitant lui-même a attesté le maintien d’une capacité complète de travail dans une activité adaptée (certificat du Dr K______ du 16 avril 2007, cité dans la décision de l’OCE du 9 juin 2007), l’assuré s’étant par ailleurs déclaré apte à travailler à 100% dans une activité adaptée lorsqu’il s’est inscrit à l’assurance-chômage en février 2007. Dans un avis du 20 avril 2010, le SMR a encore relevé que l’IRM cervicale du 4 mars 2010 ne mettait pas en évidence d’aggravation significative de la situation médicale par rapport à celle constatée par le Dr R______ en novembre 2006.

h. Le recourant ne saurait non plus se prévaloir du fait que les mesures de réadaptation dont il a bénéficié ont été interrompues prématurément pour les raisons de santé alléguées par lui, dès lors que les données médicales l'emportent sur les constatations qui peuvent être faites à l'occasion d'un stage d'observation professionnelle, ces dernières étant susceptibles d'être influencées par des éléments subjectifs liés au comportement de l'assuré pendant le stage (ATF 125 V 256 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_28/2012 du 20 juin 2012 consid. 5.2). Pour les mêmes raisons, il convient de relativiser les conclusions des maîtres de stage des EPI, selon lesquelles l’assuré disposait d’une « rentabilité de 50% » (rapport du 16 septembre 2010). Au demeurant, les auteurs de ce rapport ont admis que ce taux n’était pas définitif et pouvait « être amélioré avec de la pratique ».

i. Le recourant soutient encore que, dans son expertise, le Dr R______ n’a pas pris en compte les pathologies ressortant de l’IRM cervicale du 15 avril 2011, du rapport de radiographie du rachis cervical du 22 avril 2011 et du rapport du Dr Z______ du 13 mai 2011, faisant en particulier état d’un rétrécissement du canal rachidien au niveau C4-C5, C5-C6 et C6-C7. Ces documents semblent toutefois se rapporter à un état de santé postérieur à la date déterminante de la décision litigieuse du 15 décembre 2010. Ils ne peuvent donc en principe pas être pris en compte pour fixer la capacité de travail de l'assuré en l'espèce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_899/2013 du 24 février 2014 consid. 4.3). Quoiqu’il en soit, les experts judiciaires ont constaté que les rétrécissements dégénératifs du canal cervical, la diminution des trous de conjugaison ou les protrusions mises en évidence dans le rapport d’IRM cervicale du 4 mars 2010, respectivement les hernies discales mentionnées dans le rapport d’IRM cervicale du 15 avril 2011, n’avaient pas produit des symptômes sévères, et, partant, handicapant, comme par exemple une myélopathie par compression médullaire (cf. rapport des Dresses AE______ et AF______ du 22 mars 2013). Ces experts n’ont pas non plus confirmé l’existence d’une atteinte radiculaire significative (évoquée, au demeurant, uniquement sous forme hypothétique dans le rapport de la Dresse U______ du 4 mars 2010). Ils n’ont pas d’avantage fait état d’une sensible aggravation de l’état de santé de l’expertisé postérieurement à l’expertise du Dr R______ du 25 novembre 2006, estimant, au contraire, que la capacité de travail de 50% dans une activité adaptée retenue par la CRR dans son rapport du 11 juillet 2001 était restée stable. C’est le lieu de relever que, contrairement à ce qu’avait avancé le recourant dans ses observations du 28 septembre 2011, en se basant sur les conclusions (erronées) du Dr AB______ du 7 juin précédent, le rapport d’IRM du 15 avril 2011 n’a nullement mis en évidence une compression médullaire, mais attesté, au contraire, que le cordon médullaire conservait un calibre satisfaisant avec intégrité de la jonction bulbo-médullaire et qu’il n’existait pas non plus de myélopathie cervico-arthrosique. Enfin, on notera que le rapport de la CRR du 11 juillet 2001, que le Dr R______ a dûment pris en considération dans son rapport d’expertise du 25 novembre 2006, mentionnait déjà l’existence du canal cervical rétréci en C4-C6 apparaissant dans l’IRM cervicale du 4 mars 2010.

j. Dans ces conditions, il faut admettre que, du point de vue juridique, le recourant est en mesure, nonobstant ses douleurs engendrant les limitations fonctionnelles précitées, de reprendre à 100% une activité professionnelle strictement adaptée à celles-ci.

7. Le salaire sans invalidité retenu par l’office intimé n’étant pas contesté, ni critiquable, il n’y a pas lieu d’y revenir.

8. Le salaire avec invalidité de CHF 57'019.- en 2001 (salaire ESS 2000, actualisé, TA1, homme, activité simple et répétitive) doit être confirmé. En effet, vu le large éventail d'activités simples et répétitives (qui correspondent à un emploi léger respectant les limitations fonctionnelles observées) que recouvre le marché du travail en général - et le marché du travail équilibré en particulier - (arrêt I 383/06 du 5 avril 2007 consid. 4.4), on doit admettre qu'un nombre significatif d'entre elles, ne nécessitant aucune formation spécifique, sont adaptées aux problèmes de santé du recourant (comp. arrêts du Tribunal fédéral 9C_788/2012 du 4 mars 2013 consid. 6 et I 25/05 du 30 septembre 2005 consid. 4.1 concernant plus particulièrement une activité sans mouvements répétitifs du rachis), à l’instar de travaux de conditionnement légers ou d’une activité de réceptionniste proposés par les EPI (cf. ci-dessus § 53), ou encore d’une activité de type bureau, comme l’a suggéré l’expert R______ (rapport du 25 novembre 2006, p. 20), voire dans le domaine de formation de l’assuré (tourisme76z) (rapport d’expertise du 22 mai 2013, p. 8, § 9).

En conséquence, un complément d'expertise en vue de déterminer le genre d'activités adaptées à son handicap, comme le demande le recourant, n’est pas nécessaire. C’est le lieu de rappeler que pour évaluer l'invalidité, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si une personne invalide peut être placée eu égard aux conditions concrètes du marché du travail ; il convient uniquement de se demander si elle pourrait encore exploiter économiquement sa capacité résiduelle de travail lorsque les places de travail disponibles correspondent à l'offre de la main d'oeuvre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_25/2012 du 25 avril 2012 consid. 3.5).

9. Le taux d’abattement de 20% sur le salaire d’invalide retenu par l’OAI apparaît justifié, au vu des restrictions personnelles de l’intéressé à des activités légères (évitant en particulier les mouvements répétitifs au-dessus des épaules, l’inclination du buste et le port de charges, épargnant la nuque et permettant des positions alternées). A noter qu’un abattement supplémentaire de 5% - l'abaissement maximal admis par la jurisprudence étant de 25% (ATF 126 V 728 consid. 5) -, pour tenir compte d’un léger ralentissement psychomoteur ou de légères difficultés de concentration que les médecins ont retenus, sans pour autant en évaluer précisément les répercussions sur la capacité de travail (cf. certificat du Dr N______ du 11 janvier 2005, rapport de la psychologue O______ du 4 novembre 2005 et rapport d’expertise des Dresses AE______ et AF______ du 22 mars 2013), n’aurait pas pour autant permis à l’assuré d’atteindre le seuil d’accès de 40% requis pour l’octroi d’une rente d’invalidité (CHF 66'310 – CHF 42'764) x CHF 66'310 : 100 = 36%).

10. Conformément à la suggestion du MAMAC, à laquelle le SMR semble s’être rallié (cf. ci-dessus, § 55), et à celle des experts judiciaires (cf. rapport complémentaire du 25 février 2014), il conviendra d’accorder à l’assuré une aide au placement (art. 18 al. 1 LAI) pour l’aider à trouver une activité correspondant à ses limitations fonctionnelles, compte tenu par ailleurs de sa longue absence du marché du travail et au risque éventuel de surcharge psychologique liée à une réinsertion professionnelle après une quinzaine d’années d’inactivité à ce jour. Le cas échéant, il incombera à l’office intimé de prendre également en charge les frais d’une prise en charge psychiatrique, en vue de permettre à l’assuré de reprendre graduellement une activité professionnelle, étant précisé qu’il ne s’agit pas de soigner une affection psychique comme telle, mais de fournir une prestation s’apparentant à une aide au placement (cf. ATFA du 28 août 2001, I 128/01, consid. 3).

11. Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté.

12. L’émolument, fixé à CHF 500.-, est mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 69al. 1bis LAI).

 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le recours est rejeté au sens des considérants.

3.        Met un émolument de CHF 500.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Florence SCHMUTZ

 

Le président suppléant

 

 

 

 

Jean-Louis BERARDI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le