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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3262/2023

ATA/1453/2024 du 10.12.2024 sur JTAPI/304/2024 ( PE ) , ADMIS

Recours TF déposé le 28.01.2025, 2C_64/2025
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3262/2023-PE ATA/1453/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 décembre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Pierre GABUS, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 avril 2024 (JTAPI/304/2024)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1985, est ressortissant érythréen.

b. À une date inconnue, il s’est marié au Soudan, de façon non-officielle, à B______, née le ______ 1992, également de nationalité érythréenne.

c. Trois enfants sont issus de cette union : C______, née le ______ 2012, D______, née le ______ 2015, et E______, né le ______ 2019.

d. La famille est arrivée en Suisse le 1er août 2014.

e. A______ y a déposé une demande d’asile et a été auditionné, dans ce cadre, le 19 février 2016 par le secrétariat d’État aux migrations (ci‑après : SEM). Il a notamment indiqué ne pas avoir effectué son service militaire en Érythrée. À la question de savoir pour quelle raison il n’avait pas été envoyé à l’armée pendant ou après sa sortie de prison, il a répondu « Je vous l’ai dit tout à l’heure qu’il y avait quelqu’un qui me suivait de l’extérieur et j’avais aussi le papier » (le Tesrih, une sorte de laissez-passer soudanais).

f. Par décision du 20 septembre 2016, le SEM a rejeté la demande d’asile, mais admis provisoirement A______ en Suisse, en raison de certaines particularités de sa situation.

Ses allégations relatives à une prétendue détention n’étaient pas vraisemblables et celles concernant son départ illégal d’Érythrée ne pouvaient être considérées comme vraisemblables. Il avait produit uniquement une copie en mauvais état de sa carte d’identité érythréenne. Un départ légal d’Érythrée n’était en principe possible qu’avec un passeport valide et un visa de sortie. Depuis plusieurs années, ces visas étaient établis par les autorités érythréennes à de rares personnes considérées comme loyales, dans des conditions très restrictives et moyennant le paiement d’une forte somme d’argent. Les enfants à partir de 11 ans, les hommes ayant moins de 54 ans et les femmes ayant moins de 47 ans n’avaient en principe pas le droit de se faire délivrer un visa.

Il ressortait de son audition du 19 février 2016 qu’il avait obtenu sa carte d’identité en se rendant à Hagaz avec sa tante paternelle. Pour obtenir ce document, il fallait que quelqu’un témoigne de son origine érythréenne. Sa tante paternelle avait dit « c’est le fils de mon frère ». On lui avait demandé pourquoi il n’avait pas obtenu une carte identité au Soudan, où il disait être né. Il avait répondu : « Quand j’avais l’âge pour avoir une carte identité, je n’avais personne, ni père, ni mère. Je suis allé en Érythrée avec ma tante paternelle. Après quelque temps, j’ai obtenu ma carte d’identité ». Il avait perdu sa carte d’identité en Libye. Elle se trouvait dans « la moitié de ses affaires », dans une voiture autre que celle dans laquelle il voyageait.

g. En septembre 2016, l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a délivré à A______ un permis F (admission provisoire), lequel a été renouvelé pour la dernière fois en septembre 2023, avec une validité allant jusqu’au 19 août 2024.

h. Le 29 novembre 2019, A______ a déposé auprès de l’OCPM une demande de transformation de son permis F en permis B (autorisation de séjour), pour lui-même, son épouse et leurs enfants.

De septembre 2014 à octobre 2018, il avait exercé des activités auprès de l’F______, à raison de cinq après-midi par semaine. Depuis le 1er janvier 2019, il travaillait auprès de G______, avec un contrat à durée indéterminée. Sa famille se sentait bien intégrée à Genève, ses deux filles étaient à l’école aux Eaux‑Vives et ils parlaient tous couramment le français. Ils n’avaient pas de dettes et n’étaient pas connus des services de police.

Étaient notamment joints une attestation de l’hospice du 28 août 2019, selon laquelle A______ et sa famille n’étaient plus aidés financièrement depuis le 1er mai 2019, une attestation de la participation de A______ à un cours de français écrit A1 à B1 du 10 avril au 28 juin 2018, une attestation de scolarité de ses deux filles, un extrait de son casier judiciaire suisse du 5 mai 2019, attestant qu’il ne faisait l’objet d’aucune condamnation pénale, et un extrait de registre des poursuites du 26 novembre 2019, attestant qu’il ne faisait pas l’objet de poursuites ni d’acte de défaut de biens.

i. Le 17 décembre 2019, l’OCPM a fait savoir aux époux qu’ils n’avaient déposé aucun passeport ou pièce de légitimation originale reconnue en cours de validité. Or, il était en droit d’attendre d’une personne admise provisoirement, sans qualité de réfugiée, qu’elle entreprenne des démarches pour se faire établir un passeport attestant de son identité, le permis F ne constituant pas une preuve formelle de l’identité de son titulaire. Ils étaient invités à déposer leurs passeports originaux en cours de validité auprès du SEM. Ils devaient également lui transmettre une attestation de niveau A1 (CECR) à l’oral de français, l’attestation de participation à un cours de français que A______ avait remise étant insuffisante.

j. A______ a transmis à l’OCPM le résultat de ses tests de français FIDE, au niveau B1 à l’oral.

k. Par jugement du 12 juillet 2021, Tribunal civil de première instance (ci-après : TPI) a laissé l’autorité parentale conjointe aux époux sur leurs enfants, attribué à la mère leur garde et réservé au père un droit de visite usuel, d’un week-end sur deux ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires.

l. Le 2 septembre 2021, l’OCPM a indiqué à A______ qu’à la suite de la séparation du couple, leur situation administrative était désormais traitée séparément. Il ne l’avait toujours pas renseigné sur les démarches entreprises dans le but d’obtenir un passeport national valable et dans quel délai ce document pourrait être en sa possession. Sans réponse de sa part dans le délai imparti, il se prononcerait en l’état du dossier

m. Le 30 novembre 2021, l’OCPM a informé A______ de son intention de refuser d’accéder à sa requête.

n. L’intéressé s’est déterminé sur ce projet de décision en relevant que la production d’un passeport national valable ne faisait pas partie des conditions nécessaires à l’octroi d’une autorisation de séjour. Une copie des pièces de légitimation suffisait.

Dès son arrivée en Suisse, il avait remis une copie de sa pièce d’identité érythréenne au SEM. Ce document permettait d’attester son identité, dès lors qu’il y était indiqué son nom, son prénom, son sexe, sa date de naissance, son lieu de naissance, son adresse ainsi que sa profession. En outre, cette carte d’identité avait été délivrée par les autorités érythréennes ; elle comprenait d’ailleurs, en bas de page, le tampon officiel du gouvernement ainsi qu’un numéro de carte d’identité.

Il n’avait pas pu remettre l’original de sa carte d’identité au SEM car il l’avait perdue au cours du voyage effectué par la mer jusqu’en Europe. La copie de sa carte d’identité permettait d’établir son identité ainsi que son appartenance à l’État d’Érythrée, car ce document indiquait que la carte d’identité était délivrée aux résidents érythréens. Cette carte d’identité était encore valable puisqu’elle avait été délivrée pour une durée indéterminée. Ce document constituait une pièce de légitimation valable et reconnue, laquelle permettait d’attester son identité. Il avait bel et bien collaboré à l’établissement des faits déterminants. L’OCPM n’était pas légitimé à refuser de soumettre son dossier avec un préavis positif au SEM.

Il remplissait toutes les conditions exigées pour l’octroi d’une autorisation de séjour, reprenant les éléments pertinents à cet égard.

o. Par décision du 21 février 2022, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête de A______.

Celui-ci résidait en Suisse depuis 2014, avait une activité professionnelle stable et n’était pas dépendant de l’aide sociale. Il ne faisait pas l’objet de poursuites et n’avait jamais été condamné. Toutefois, il n’était pas en mesure de présenter de passeport national valable et n’avait pas apporté la preuve des démarches entreprises en ce sens. Le seul document qu’il avait déposé auprès de l’autorité fédérale était une copie de sa carte d’identité, l’original ayant été perdu.

Dans la mesure où il n’avait pas démontré qu’il était dans l’incapacité d’obtenir un passeport national valable, il ne remplissait pas les critères prévus aux art. 84 al. 5 let. b (sic) de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 31 de l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

p. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : TAPI) contre cette décision.

Depuis l’indépendance en 1993, le régime érythréen avait supprimé la plupart des libertés individuelles. La situation des droits de l’homme dans le pays était très préoccupante. En raison de la violence qui y régnait, des rafles menées par les autorités gouvernementales contre les civils et du fait qu’il n’avait pas effectué son service national, il avait décidé de fuir l’Érythrée une première fois en 2008, puis une seconde fois en 2009 pour le Soudan, d’où il était venu en Suisse en 2014.

À son arrivée en Suisse, il avait déposé une demande d’asile accompagnée d’une copie de sa carte d’identité. Cette demande avait été refusée par le SEM au motif qu’il ne remplissait pas les conditions requises pour la reconnaissance de la qualité de réfugié. À aucun moment, son identité n’avait été remise en cause.

Il était parfaitement intégré en Suisse où il résidait depuis août 2014. Il était indépendant de l’F______ depuis mai 2019, n’était connu ni de l’office des poursuites, ni des services de police, parlait couramment le français et bénéficiait d’une attestation de langue française de niveau B1, soit un niveau supérieur à celui exigé. Il remplissait donc toutes les conditions nécessaires à l’octroi d’une autorisation de séjour.

L’identité d’une personne pouvait être établie par d’autres moyens que la production d’un passeport, à savoir par une pièce d’identité. Aucune base légale n’exigeait la production d’un passeport national valable comme pièce de légitimation. L’art. 84 al. 5 LEI ne faisait aucune mention de la production d’un passeport national valable, parmi les critères d’examen d’une demande d’autorisation de séjour déposée par un étranger admis provisoirement. La même conclusion s’imposait s’agissant de l’art. 31 al. 1 OASA.

Au regard de tous ces éléments, il avait fourni une pièce de légitimation valable, délivrée par un État reconnu par la Suisse attestant de son identité.

Il ne s’était pas annoncé auprès de l’ambassade d’Érythrée en Suisse pour plusieurs motifs. Il craignait pour sa sécurité et celle de sa famille, notamment sa tante paternelle restée au pays. Il avait quitté l’Érythrée sans être au bénéfice d’un visa de sortie. Si les autorités érythréennes l’apprenaient, il était à craindre qu’il s’exposerait lui-même et sa famille à des représailles de la part du gouvernement. Même si l’on devait considérer qu’il aurait dû s’annoncer auprès des autorités compétentes pour demander un passeport national valable, ce dernier ne lui aurait sans doute pas été délivré. La délivrance d’un passeport national était soumise à des conditions strictes, à savoir la preuve du paiement de l’impôt sur le revenu de 2% et à la signature d’une lettre d’excuse destinée au gouvernement. Or, il était fermement opposé au régime actuel. Dans un tel contexte, l’absence de démarches de sa part était justifiée et ne constituait pas un défaut de collaboration.

q. Par jugement du 7 novembre 2022, le TAPI a rejeté le recours.

Sous réserve de la question de la preuve de son identité, l’OCPM ne contestait pas que A______ satisfaisait à l’ensemble des autres conditions légales lui permettant d’obtenir une autorisation de séjour au sens des art. 84 al. 5 et 58 al. 1 LEI ainsi que 31 OASA. Il était présent en Suisse depuis près de huit ans, travaillait, était entièrement autonome sur le plan financier, n’avait aucune dette, n’avait jamais troublé l’ordre, ni la sécurité publiques et maîtrisait correctement le français.

L’admission provisoire de A______ s’était inscrite dans le cadre du droit d’asile où l’évaluation de la vraisemblance de son identité s’appréciait selon des critères propres. Elle lui avait été accordée car son renvoi de Suisse s’avérait impossible au regard des circonstances particulières de sa situation.

En revanche, lors de la délivrance d’un permis de séjour en application de l’art. 84 al. 5 LEI, les conditions légales relatives notamment à l’établissement de l’identité s’appliquaient. Les autorités étaient alors légitimées à exiger que la personne fasse ce qui pouvait être raisonnablement exigé d’elle pour établir cette identité. Les conditions posées par les autorités érythréennes pour la délivrance de documents d’identité, en particulier la présentation d’excuses par le biais d’une lettre de regret (« Regret Form »), ou le paiement rétroactif d’un impôt pour les personnes résidant hors d’Érythrée n’étaient pas disproportionnées. A______ pouvait donc valablement se voir opposer par l’OCPM l’obligation de requérir des documents d’identité officiels auprès de la représentation de son pays en Suisse.

r. Par acte du 7 décembre 2023, A______ a recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice.

L’exigence de la production d’un passeport national valable, dans le cadre de la délivrance d’une autorisation de séjour pour un étranger admis provisoirement en Suisse, ne découlait d’aucune base légale, notamment ni de l’art. 84 al. 5 LEI ni de l’art. 31 al. 2 OASA. Les directives et circulaires du SEM, domaine des étrangers, (ci-après : directives LEI) du SEM, qui n’avaient pas force obligatoire, n’exigeaient qu’une pièce de légitimation valable et reconnue, sans en donner de quelconque définition. Il n’existait pas de liste exhaustive dans la loi de ce qui pouvait être reconnu comme tel au stade d’une demande d’autorisation de séjour. L’octroi d’une autorisation de séjour ne pouvait alors pas être conditionné à la production d’un tel document.

Il citait un arrêt vaudois aux termes duquel était posé le principe selon lequel l’étranger n’était pas impérativement tenu d’entreprendre des démarches auprès de son ambassade, mais qu’il pouvait suivre la procédure visant à faire constater l’impossibilité subjective ou objective d’obtenir un document d’identité.

Le document d’identité, dont la copie avait été déposée au SEM, portait, en bas de page, le tampon officiel du gouvernement érythréen ainsi qu’un numéro. Sa teneur n’avait à aucun moment été remise en cause par les autorités suisses. Aucun doute n’avait jamais été soulevé quant à son identité ou à son origine, notamment aux termes de la décision du SEM du 20 septembre 2016 refusant sa demande d’asile. Les démarches en vue de l’obtention d’un passeport national valable constituaient un obstacle insurmontable, soit une impossibilité objective et subjective. Elles l’exposeraient, en cas de retour même futur dans son pays, au risque d’être enrôlé de force dans l’armée, de subir des actes de maltraitance physique, voire d’être placé en détention pour une longue durée.

s. A______ a encore relevé que le Tribunal fédéral avait notamment retenu que le maintien du statut précaire de l’admission provisoire par rapport à l’autorisation de séjour pouvait constituer une atteinte au droit à la protection de la vie privée au sens de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Il rappelait qu’il était parfaitement intégré en Suisse et comptait y demeurer de manière durable et permanente, de sorte qu’il devait bénéficier de la protection de cette disposition. La doctrine critiquait fortement la position adoptée par les autorités suisses consistant à subordonner l’octroi d’une autorisation de séjour à la délivrance d’un passeport. Pour les ressortissants érythréens, comme lui, les conséquences en étaient dévastatrices, vu l’obligation de s’acquitter d’une taxe de la diaspora et de signer une lettre par laquelle il reconnaissait avoir trahi son pays en le quittant, avoir commis des crimes et accepter toutes les sanctions qui pourraient en découler.

t. Par arrêt du 21 mars 2023, la chambre administrative a admis partiellement le recours et renvoyé la cause, pour complément d’instruction dans le sens des considérants et nouvelle décision, à l’OCPM.

C’était conformément à la loi que l’OCPM conditionnait la délivrance d’une autorisation de séjour à A______ au dépôt d’un document d’identité valable, étant relevé que les conditions d’une durée de séjour en Suisse de plus cinq ans et des exigences du cas de rigueur, qui s’appliquaient par renvoi de l’art. 84 al. 5 LEI, étaient réalisées en l’espèce.

A______ ne prétendait pas qu’il lui serait impossible de solliciter la délivrance d’un passeport auprès de l’ambassade d’Érythrée en Suisse. Il soutenait toutefois qu’il existait des obstacles insurmontables qui ne lui étaient pas imputables, l’empêchant d’entreprendre cette démarche, de sorte que l’OCPM devait se contenter de la seule copie de sa carte d’identité. L’allégation selon laquelle des représailles le viseraient de même que sa tante restée au pays, dans la mesure où il avait quitté l’Érythrée sans être au bénéfice d’un visa de sortie, ne suffisaient pas à démontrer une impossibilité objective d’obtenir un passeport. Tel était également le cas de l’exigence de la preuve de paiement de l’impôt sur le revenu de 2%.

En revanche, la signature d’une lettre d’excuses destinée au gouvernement pourrait constituer un tel obstacle, de même que le risque d’un enrôlement de force dans l’armée ou de mauvais traitements tels qu’allégués. Si le recourant ne prétendait pas vouloir retourner en Érythrée à court ou long terme, il n’existait aucune garantie, à teneur du dossier, que le SEM ne décide pas, à un moment ou à un autre, de révoquer son admission provisoire et de prononcer son renvoi. Ainsi, il n’existait aucune garantie qu’il ne fasse pas l’objet à l’avenir d’un renvoi en Érythrée et que partant, en particulier de par la signature d’une lettre de regret, il ne subisse des mauvais traitements notamment à la suite d’un enrôlement militaire. Dès lors, il n’était pas certain que l’absence de démarches de sa part pour l’obtention du passeport requis ne serait pas justifiée, de sorte qu’il ne pouvait être dit qu’un défaut de collaboration lui était opposable. Ce point devait être instruit.

u. Le 30 mars 2023, A______ a invité l’OCPM à prendre acte de son impossibilité d’obtenir un passeport et d’émettre un préavis favorable à l’octroi d’un permis B en sa faveur auprès du SEM.

v. Par courrier du 1er mai 2023, le SEM a indiqué à l’OCPM, qui l’avait interpellé à la suite de l’arrêt de la chambre administrative, qu’il n’avait pas connaissance d’une mise en danger systématique et généralisée des ressortissants érythréens en raison de la signature du formulaire de regret de la part des autorités érythréennes en cas de retour dans ce pays. Selon les informations en sa possession, l’attitude de ces autorités dépendait essentiellement de la question de savoir si ces personnes retournaient dans leur pays volontairement ou sous la contrainte, de même que de la question de leur statut au regard du service militaire national avant leur départ.

Dans la mesure où A______ n’avait pas indiqué lors de sa procédure d’asile avoir refusé d’effectuer son service militaire ou avoir déserté du service national, il n’était ni un déserteur ni un réfractaire et ne pouvait ainsi se voir reproché d’avoir enfreint la « Proclamation on National Service » de 1995. Il ne pouvait donc pas être conclu à une mise en danger concrète et sérieuse de sa personne au sens de l’art. 3 CEDH en cas de renvoi en Érythrée, quand bien même il aurait signé une lettre de regret.

A______ n’était pas appelé à quitter la Suisse. Hormis l’absence de passeport, due à sa volonté de ne pas entreprendre les démarches nécessaires, il semblait remplir toutes les autres conditions pouvant conduire à l’octroi d’une autorisation de séjour durable.

w. Le 22 mai 2023, reprenant les explications fournies par le SEM, l’OCPM a informé l’intéressé de son intention de refuser sa requête au motif qu’il ne souhaitait pas entreprendre les démarches nécessaires auprès des autorités de son pays d’origine en Suisse afin d’obtenir un passeport national valable.

x. Dans ses observations A______ a expliqué qu’il n’avait pas effectué son service militaire en Érythrée, contrairement aux dires du SEM. Vu sa situation de déserteur, réfractaire au service militaire, si un jour il devait revenir en Érythrée, il serait exposé à un enrôlement de force dans l’armée et à des mauvais traitements contraires à l’art. 3 CEDH.

La communauté internationale était unanime pour considérer que la situation des droits de l’Homme en Érythrée restait désastreuse. Elle ne montrait aucun signe d’amélioration et continuait d’être caractérisée par de graves violations des droits de l’Homme.

y. Par décision du 15 septembre 2023, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête de A______ du 29 novembre 2019.

L’intéressé n’avait pas entrepris les démarches nécessaires auprès des autorités de son pays d’origine en Suisse afin d’obtenir un passeport national valable, de sorte qu’il ne remplissait pas les conditions des art. 84 al. 5 let. b LEI et 31 OASA. Il pouvait être raisonnablement exigé qu’il entreprenne de telles démarches, la signature d’une lettre de regret ne constituant nullement, dans son cas concret, un obstacle. Ses explications n’étaient enfin pas de nature à modifier sa position.

B. a. A______ a recouru contre cette décision au TAPI, concluant principalement à l’octroi en sa faveur d’une autorisation de séjour. Préalablement, il a requis l’audition d’un représentant de l’OCPM.

Son droit d’être entendu avait été violé. L’OCPM n’avait pas motivé la décision litigieuse, sans expliquer pourquoi il n’avait pas pris en compte ses observations. Pire, il n’avait fait que répéter les propos du SEM, qui avait lui-même omis un fait essentiel à la résolution du litige, à savoir qu’il n’avait pas effectué son service national avant de quitter l’Érythrée et qu’il était considéré comme un réfractaire aux yeux des autorités érythréennes. Si le SEM avait pu se méprendre, on ne comprenait pas pour quel motif l’OCPM, dont l’attention avait été spécifiquement attirée sur ce point, n’en avait pas tenu compte. Un représentant de l’OCPM devait être entendu afin de comprendre pourquoi l’ATA/278/2023 n’avait in fine pas été suivi.

Les art. 84 al. 5 LEI et 31 OASA étaient violés. L’OCPM persistait à retenir que la signature d’une lettre de regret ne constituerait aucunement, dans son cas concret, un obstacle à l’obtention d’un passeport érythréen et refusait ainsi de soumettre un préavis positif au SEM alors qu’il remplissait toutes les conditions nécessaires à l’octroi d’une autorisation de séjour et qu’aucun défaut de collaboration ne pouvait lui être opposé. La signature d’une lettre d’excuse couplée au fait qu’il n’avait pas effectué son service national présentait, en cas de retour même futur dans son pays, des risques certains d’être enrôlé de force dans l’armée, de subir des actes de maltraitance physique et d’être placé en détention pour une durée indéterminée. II était dès lors inconcevable d’exiger de sa part qu’il mette sa dignité, son intégrité physique de même que sa liberté de mouvement en péril pour obtenir un document d’identité original. Par ailleurs, il y avait une recrudescence de l’enrôlement forcé entre le milieu et la fin de l’année 2022 et sous sa forme actuelle, le service national était inextricablement lié au travail forcé et à des pratiques analogues à de l’esclavage.

Des juridictions administratives étrangères avaient reconnu que la composante militaire du service national violait l’ art. 3 CEDH et constituait à ce titre un motif suffisant d’octroi de la protection (Pays-Bas) ou que les personnes réfugiées et requérantes d’asile érythréennes ne pouvaient plus être contraintes de se procurer des papiers auprès de l’ambassade érythréenne pour avoir accès aux documents de voyage allemands, dans le but de les protéger de la pression et de la coercition fréquemment exercées par les fonctionnaires de l’ambassade et du consulat (Allemagne)

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Il avait récolté des renseignements auprès du SEM, conformément à l’ATA/278/2023, relatifs aux problématiques alléguées par l’intéressé concernant les démarches en vue d’obtenir un passeport national auprès des autorités de son pays.

c. Par jugement du 8 avril 2024, le TAPI a rejeté le recours.

Le SEM avait exposé que l’attitude des autorités érythréennes en relation avec une éventuelle mise en danger des ressortissants érythréens en raison de la signature d’une lettre de regret en cas de retour dans ce pays dépendait essentiellement de la question de savoir si les personnes en cause retournaient dans leur pays volontairement ou sous la contrainte, de même que la question du statut que ces personnes avaient au regard du service militaire national avant leur départ.

A______ n’avait pas indiqué lors de sa procédure d’asile avoir refusé d’effectuer son service militaire ou avoir déserté du service national, de sorte qu’il n’était ni un réfractaire ni un déserteur, avec pour effet qu’il ne pouvait pas être conclu à une mise en danger concrète et sérieuse de sa personne au sens de l’art. 3 CEDH en cas de renvoi en Érythrée même s’il avait signé une lettre de regret.

L’intéressé affirmait qu’il avait indiqué, en particulier lors de son audition dans le cadre de sa demande d’asile, ne pas avoir accompli son service militaire en Érythrée. Il était exact que celui-ci avait soutenu ne pas avoir effectué son service militaire. Le SEM avait cependant relevé qu’il n’avait ni refusé de l’accomplir ni déserté. L’élément pertinent n’était donc pas, selon le SEM, l’accomplissement ou non du service militaire, mais le refus de l’effectuer ou le fait de l’interrompre. Or, A______ n’ayant ni refusé le service militaire ni déserté, l’OCPM pouvait considérer que l’exigence de signer une lettre de regret ne constituait pas une impossibilité objective d’obtenir un passeport.

Enfin, l’allégation selon laquelle le précité n’aurait pas accompli son service national ne reposait sur aucun élément concret. Ses explications à cet égard n’étaient pas crédibles, ce qu’avait déjà relevé le SEM. Il n’était ainsi pas établi qu’il n’avait pas accompli son service militaire. Faute d’éléments contraires, il ne pouvait être considéré que l’intéressé risquait d’être poursuivi par les autorités érythréennes pour un motif en relation avec le service militaire.

Étant donné que les conditions pour la transformation du permis F en autorisation de séjour étaient réalisées, comme reconnu tant par le SEM que par l’OCPM, la signature d’une lettre de regret aurait pour effet la délivrance d’un passeport érythréen à A______, puis, avec cette pièce, l’octroi d’une autorisation de séjour.

C. a. Par acte déposé le 8 mai 2024 à la chambre administrative, A______ a recouru contre ce jugement, dont il a demandé l’annulation. Il a sollicité son audition et celle de témoins, notamment de son épouse, ainsi que l’octroi d’une autorisation de séjour.

Le TAPI avait violé son droit d’être entendu en ne donnant pas suite à ses réquisitions de preuve. Le jugement violait les art. 8 et 13 CEDH ainsi que les art. 84 al. 5 LEI et 31 OASA. Son identité n’avait jamais été remise en cause. Il travaillait depuis plus de cinq ans pour le même employeur, à satisfaction de celui‑ci, n’avait pas de dettes, était parfaitement intégré, comme l’étaient ses enfants qui poursuivaient des études régulières à Genève. Comme cela avait déjà été constaté par la chambre administrative, la signature d’une « lettre de regret » était susceptible de mettre sa vie en danger en cas de retour. Le SEM avait estimé que s’il n’avait pas accompli ses obligations militaires, la signature de ladite lettre le mettrait en danger, l’absence de service national étant considéré comme une désertion. Or, il n’avait jamais effectué de service militaire.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours, se référant au jugement entrepris.

c. Dans sa réplique, le recourant s’est étonné de l’absence de détermination de l’OCPM sur ses arguments. Cet office avait admis qu’il n’avait pas accompli ses obligations militaires en Erythrée. Ainsi, la signature de la lettre d’excuse ne pouvait être exigée de sa part. Un arrêt du Tribunal administratif allemand du 11 octobre 2022 avait retenu que l’on ne pouvait contraindre un ressortissant d’Erythrée à signer une telle lettre ; une telle contrainte était contraire à l’art. 8 CEDH.

d. Lors de l’audience qui s’est tenue le 10 juillet 2024 devant la chambre administrative, le recourant a confirmé qu’il travaillait toujours pour G______ à 100 %, ne faisait pas l'objet de poursuites, vivait séparé de son épouse auprès de qui ses enfants vivaient essentiellement. Il les voyait régulièrement, à savoir un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires.

Le représentant de l’OCPM a déclaré que selon cet office, le recourant n'avait pas établi qu'il n'avait pas effectué son service militaire en Erythrée.

A______ a déclaré qu’il était né au Soudan. En raison d'une maladie, il s’était rendu en Érythrée en 2009, où il était resté environ un an et demi chez sa tante. Il avait suivi un traitement traditionnel. Sa tante souhaitait qu’il signe des papiers afin qu'elle puisse devenir propriétaire d'un bien immobilier dont il avait hérité. Pendant son séjour en Érythrée, il avait été appréhendé par les forces de l'ordre et incarcéré parce qu’il n'avait pas fait le service militaire. Son état de santé étant défaillant et grâce aussi à l'intervention de sa tante, il avait pu quitter la prison et le pays par des voies non officielles. C'était la raison pour laquelle il ne pouvait pas produire d'attestation officielle relative à ses obligations militaires. En principe, à la fin de son incarcération, il aurait dû accomplir son service militaire. La durée de celui-ci n'était pas déterminée ; elle pouvait être de plusieurs années.

L’OCPM a indiqué être d'accord que le fait de devoir démontrer un fait négatif était difficile. Il se fondait sur la position du SEM qui in fine devait approuver un changement de statut. Il a précisé qu’il n'éprouvait aucun doute sur l'identité du recourant et qu’il n'était, en l'état et à sa connaissance, « absolument pas question que le SEM revienne sur l'admission provisoire ».

e. Dans le délai imparti, le recourant a indiqué l’adresse de son épouse et de H______, dont il demandait l’audition. L’OCPM a informé la chambre de céans que la demande de transformation de permis de l’épouse du recourant avait été refusée le 8 octobre 2021 ; aucun recours n’avait été formé par l’intéressée contre cette décision.

f. L’épouse du recourant ne s’est pas présentée à l’audience du 2 octobre 2024.

f.a Selon les explications du recourant, son épouse opérait une confusion entre le conflit conjugal et la situation administrative de son mari. Dans ces circonstances, il renonçait à son audition. Il a rajouté que ses enfants souffraient du fait de ne pas pouvoir voyager en dehors de la Suisse. Sa fille avait dû renoncer en 2021 à un voyage en Italie organisé par son école de danse. Elle n’allait pas non plus pouvoir participer au voyage prévu l'année prochaine en Autriche. Cette situation l’affectait également. Il vivait depuis dix ans à Genève et s’y était intégré.

f.b Le témoin H______ a déclaré qu’il connaissait le recourant depuis 2004. Lui‑même était arrivé en 2004 en provenance de l'Érythrée à Kassala (Soudan) où il avait fait sa connaissance, le recourant étant alors son voisin. Lui-même était parti du Soudan en 2006 pour la Lybie et était arrivé en Suisse en passant par l'Italie en 2008. Pendant ce temps, il était resté en contact avec un ami du recourant qui l'avait informé du fait que celui-ci était parti avec une cousine en Erythrée et y avait été incarcéré.

Le recourant lui avait expliqué que le service militaire était obligatoire en Erythrée. Les jeunes de 18 ans ne pouvaient échapper au service militaire que s'ils avaient un certificat médical ou une autre nationalité. Les soldats encerclaient les jeunes, les attachaient les uns aux autres et les emmenaient à l'endroit où ils devaient accomplir leur service. L'ami du recourant lui avait expliqué que c'était ce qui était arrivé à ce dernier lorsqu'il était retourné en Érythrée. Lorsque lui-même avait posé la question au recourant pourquoi il était retourné dans son pays d'origine, il lui avait répondu que c'était pour des raisons de santé. Ils avaient de nouveau eu des contacts entre eux en 2010 ou en 2011.

Le recourant lui avait alors dit que les soldats étaient venus le chercher et qu'il avait été incarcéré, à la prison de Wia. Il s'agissait d'un complexe comportant plusieurs prisons. Le témoin pensait qu'il avait pu quitter la prison en raison de ses problèmes de santé, mais ne se souvenait plus précisément si c'était ce qu'il lui avait dit. Il ne lui avait pas dit comment il avait ensuite quitté le pays ; en tous cas, le témoin ne s'en souvenait pas, ces faits remontant à longtemps.

La situation était la même pour tous les jeunes Érythréens. C'était la raison pour laquelle ils n’abordaient pas tellement leur situation en particulier par rapport au service militaire. Lui-même ne posait pas non plus de questions pour éviter que d'autres puissent avoir des problèmes, par exemple de savoir comment ils avaient quitté le pays.

Il était exact que le recourant n'avait pas accompli ses obligations militaires en Érythrée et que cela avait été la cause de son incarcération.

g. Dans ses dernières observations, le recourant a relevé qu’il ne pouvait poursuivre pendant de nombreuses années l’incertitude de son statut actuel. Le témoin auditionné par la chambre administrative avait confirmé qu’il n’avait pas accompli ses obligations militaires. L’exigence d’une pièce d’identité valable n’était pas prescrite par l’art. 84 al. 5 LEI. De toute manière, son identité n’était pas remise en cause. Aussi, la production d’un tel document ne pouvait être requise de sa part, compte tenu du fait qu’il n’avait pas rempli ses obligations militaires.

Enfin, le Tribunal fédéral avait récemment rappelé qu’après dix ans de séjour en Suisse, un étranger admis provisoirement devait, en cas d’intégration réussie, bénéficier d’une autorisation de séjour.

h. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Il a été fait droit aux actes d’instruction sollicités par le recourant. À supposer que le TAPI ait violé le droit d’être entendu du recourant – ce qui n’est pas établi –, la violation du droit d’être entendu serait ainsi réparée par la chambre de céans, qui dispose du même pouvoir d’examen que le TAPI.

3.             Est litigieux le refus de convertir le permis F du recourant en autorisation de séjour.

3.1 L'art. 84 al. 5 LEI prévoit que les demandes d'autorisation de séjour déposées par un étranger admis à titre provisoire et résidant en Suisse depuis plus de cinq ans doivent être examinées de manière approfondie en fonction de son niveau d'intégration, de sa situation familiale et de l'exigibilité d'un retour dans son pays de provenance. Cette disposition ne confère certes pas un droit – automatique – à une autorisation de séjour après une certaine durée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_198/2023 du 7 février 2024 consid. 1.1.3, non publié in ATF 150 I 93), mais elle exige de prendre en compte et d'analyser les paramètres cités (intégration, situation familiale et exigibilité du renvoi) lors de l'examen d'une demande en ce sens (ATF 147 I 268 consid. 5.2.1).

3.2 L'intérêt public à l'admission provisoire réside dans le fait que cette mesure se substitue, en principe pour une durée limitée, à la mise en œuvre du renvoi lorsque celui-ci s'avère inexécutable (art. 83 LEI). L'admission provisoire coexiste donc avec la mesure de renvoi entrée en force, dont elle ne remet pas en cause la validité. L'admission provisoire n'équivaut pas à une autorisation de séjour, mais fonde un statut provisoire qui réglemente la présence en Suisse de l'étranger tant et aussi longtemps que l'exécution du renvoi apparaîtra comme impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (ATF 147 I 268 consid. 4.2.1 ; 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3 ; 137 II 305 consid. 3.1). L'admission provisoire est levée lorsque les conditions ne sont plus remplies et le renvoi de Suisse est alors ordonné (art. 84 al. 1 et 2 LEI). A contrario, l'intérêt public au maintien de l'admission provisoire s'amenuise à mesure qu'il apparaît que le renvoi ne pourra pas être ordonné dans un avenir prévisible (arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2023 du 23 juillet 2024 destiné à la publication, consid. 6.1).

3.3 En ce qui concerne le degré d'intégration requis selon l’art. 84 al. 5 LEI, la jurisprudence retient que, pour prétendre à l'obtention d'une autorisation de séjour, la personne admise à titre provisoire doit avoir fourni un « certain effort d'intégration » (ATF 147 I 268 consid. 5.3). Dans ce contexte, il s'agit d'examiner les liens personnels, sociaux et économiques noués en Suisse, en tenant compte de la situation personnelle (âge, santé, origine) et familiale de la personne (ATF 147 I 268 consid. 5.2). En cas d'intégration insuffisante, le refus d'octroyer une autorisation de séjour en lieu et place de l'admission provisoire sera considéré comme admissible sous l'angle de l'art. 8 par. 2 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 2C_157/2023 précité consid. 6.2 ; ATF 147 I 268 consid. 4.4; arrêt de la CourEDH Aristimuño Mendizabal c. France du 17 janvier 2006 [req. n° 51431/99], § 73).  

3.4 La notion de « vie privée » de l'art. 8 CEDH est une notion large qui ne peut pas faire l'objet d'une définition exhaustive. Cette disposition protège le droit à l'épanouissement personnel, que ce soit sous la forme du développement personnel ou sous celle de l'autonomie personnelle (arrêt de la CourEDH Bărbulescu c. Roumanie du 5 septembre 2017 [req. n° 61496/08], § 70, cité in ATF 150 I 93 consid. 6.5). L'art. 8 CEDH garantit à l'individu une sphère dans laquelle il peut poursuivre librement le développement et l'épanouissement de sa personnalité (arrêts de la CourEDH A.-M.V. c.Finlande du 23 mars 2017 [req. n° 53251/13], § 76 et les références ; Nada c. Suisse du 12 septembre 2012 [req. n° 10593/08], § 151 s., cités in ATF 150 I 93 consid. 6.5). L'art. 8 CEDH protège également « le droit de nouer et d'entretenir des liens avec ses semblables et le monde extérieur et englobe, parfois, des aspects de l'identité sociale d'un individu, de sorte que l'ensemble des liens sociaux entre les immigrés établis et la communauté dans laquelle ils vivent fait partie intégrante de la notion de vie privée » (arrêts de la CourEDH Hoti c. Croatie du 26 avril 2018 [req. no 63311/14], § 119 ; Hasanbasic c. Suisse du 11 juin 2013 [req. no 52166/09], § 48; ATF 144 I 266 consid. 3.6).

3.5 Selon une jurisprudence constante de la CourEDH, la CEDH ne garantit pas le droit pour un étranger d'entrer ou de résider dans un pays particulier et les États contractants ont le droit de contrôler l'entrée, le séjour et l'éloignement des non-nationaux. Toutefois, des mesures restreignant le droit d'une personne de séjourner dans un pays peuvent, dans certains cas, donner lieu à une violation de l'art. 8 CEDH s'il en résulte des répercussions disproportionnées sur la vie privée et/ou familiale de l'intéressé (arrêt de la CourEDH Kuric et autres c. Slovénie du 26 juin 2012 [req. no 26828/06], § 355 et les nombreux arrêts cités).

Dans sa jurisprudence relative à la régularisation des conditions de séjour après de longs séjours légaux ou tolérés (par opposition à des séjours illégaux, arrêt de la CourEDH Ghadamian c. Suisse du 9 mai 2023 [req. no 21768/19], § 46), mais précaires, la CourEDH retient que « l'art. 8 CEDH ne va pas jusqu'à garantir à l'intéressé le droit à un type particulier de titre de séjour (permanent, temporaire ou autre), à condition que la solution proposée par les autorités lui permette d'exercer sans entrave ses droits au respect de la vie privée et familiale ». La CourEDH se penche sur les répercussions sur le plan matériel et moral du statut en droit des étrangers pour déterminer si ce statut entraîne une ingérence dans la vie familiale et/ou privée (arrêts de la CourEDH arrêts de la CourEDH Hoti c. Croatie du 26 avril 2018 [req. no 63311/14], § 121 ; B.A.C. c. Grèce du 13 octobre 2016 [req. n° 11981/15], §§ 40-44 ; Aristimuño Mendizabal c. France du 17 janvier 2006 [req. n° 51431/99], §§ 71-72).  

Dans les affaires Hoti c. Croatie et Sudita Keita c. Hongrie, la CourEDH a conclu à une violation de l'art. 8 CEDH en raison des difficultés rencontrées, par des requérants apatrides, pour régulariser leur situation juridique, pendant quarante ans pour le premier et quinze ans pour le second, couplées aux retombées négatives de la précarité de leur statut sur leur vie privée pendant toutes ces années (arrêts de la CourEDH Sudita Keita c. Hongrie du 12 août 2020 [req. no 42321/15], §§ 32-42 ; Hoti c. Croatie du 26 avril 2018 [req. no 63311/14], §§ 125 à143). Dans l'affaire Abuhmaid c. Ukraine, la CourEDH a conclu à la non-violation de l'art. 8 CEDH en lien avec l'art. 13 CEDH, car le requérant disposait, sur le plan interne, de différentes procédures pour éventuellement régulariser sa situation (arrêt de la CourEDH Abuhmaid c. Ukraine du 12 janvier 2017 [req. no 31183/13]).

3.6 Dans sa jurisprudence, le Tribunal fédéral retient que le statut d'admis provisoire peut, dans certaines situations, porter atteinte à la vie privée telle que protégée par l'art. 8 CEDH. Pour déterminer si tel est le cas, le Tribunal fédéral examine si les inconvénients juridiques et factuels que ce statut présente par rapport à celui conféré par une autorisation de séjour entraînent, dans le cas concret, une ingérence dans la vie privée (ATF 150 I 93 consid. 6.6 ; 147 I 268 consid. 1.2.5).

Le Tribunal fédéral a aussi retenu que l'admission provisoire comportait des contraintes pour voyager à l'étranger qui dépassaient le simple désagrément de devoir accomplir des démarches administratives et que cette restriction dans la mobilité pouvait être considérée, dans le cas d'un séjour de longue durée et selon les circonstances, comme une atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 150 I 93 consid. 6.7.1). Il est également admis que les détenteurs d’un permis F ont une situation plus difficile sur le marché du travail (ATA/919/2019 du 21 mai 2019).

3.7 Selon l’art. 89 LEI, durant son séjour en Suisse, l’étranger doit être muni d’une pièce de légitimation valable et reconnue au sens de l’art. 13 al. 1 LEI. Selon l’art. 90 LEI, il doit collaborer à la constatation des faits déterminants pour l’application de la LEI et notamment se procurer une pièce de légitimation (art. 89) ou collaborer avec les autorités pour en obtenir une (let. c).

Il ne peut être exigé des réfugiés reconnus (y compris les réfugiés admis provisoirement) et des requérants d'asile dont la procédure d’asile n’est pas close qu'ils prennent contact avec les autorités compétentes de leur État d'origine. Pour ces personnes, la condition de la justification de l'identité peut être considérée comme remplie si les indications fournies au cours de la procédure relevant du droit d'asile sont vraisemblables, exemptes de contradictions et qu’aucun alias n'a été utilisé. En revanche, on est en droit d'exiger de la part de requérants d'asile déboutés dont la procédure d'asile est définitivement close ou d’étrangers qui ont été admis provisoirement en Suisse qu'ils contactent les autorités compétentes de leur État d'origine ou de provenance pour se faire établir une pièce de légitimation valable et reconnue au sens de l'art. 13 al. 1 LEI. Dans de tels cas, si l'intéressé allègue se trouver dans l'impossibilité de se faire établir une pièce de légitimation, c'est à lui qu'il incombe de fournir la preuve de l'impossibilité objective d'obtenir de son pays d'origine un passeport national valable (ATA/278/2023 du 21 mars 2023 consid. 4.2 et les nombreuses références citées).

3.8 Dans l’arrêt précité concernant le recourant, la chambre administrative a retenu que la signature d’une lettre d’excuses destinée au gouvernement érythréen pourrait constituer un tel obstacle, de même que le risque d’un enrôlement de force dans l’armée ou de mauvais traitements tels qu’allégué. Si le recourant ne prétendait pas vouloir retourner en Érythrée à court ou long terme, il n’existait aucune garantie que le SEM ne décide pas, à un moment ou à un autre, de révoquer son admission provisoire et de prononcer son renvoi. Dans cette hypothèse, il n’existait aucune garantie qu’il ne fasse pas l’objet d’un renvoi en Érythrée et que partant, en particulier de par la signature du « Regret form », il ne subisse des mauvais traitements notamment à la suite d’un enrôlement militaire. Dès lors, il convenait d’établir si l’absence de démarches de sa part pour l’obtention du passeport requis était justifiée. Le dossier était renvoyé sur ce point à l’OCPM afin d’instruire si le défaut de collaboration du recourant dans l’obtention d’une pièce d’identité lui était opposable.

Dans un arrêt subséquent du 7 novembre 2023 concernant également un ressortissant érythréen, la chambre administrative a confirmé que la perception d’un impôt de 2% sur le revenu ne constituait pas un empêchement pour un ressortissant érythréen d’obtenir un passeport. En revanche, tel pouvait être le cas de l’obligation de signer la lettre d’excuses, par laquelle ledit ressortissant « regrett[ait] d'avoir commis une infraction en n'accomplissant pas le service national et [était] prêt à accepter une sanction appropriée en temps voulu ». Il convenait d’instruire davantage si l’absence de démarches de la part du recourant pour l’obtention du passeport requis était justifiée, de sorte que le dossier était renvoyé à l’OCPM pour compléter l’instruction sur ce point (ATA/1194/2023).

4.             En l’espèce, il n’est pas contesté que le recourant réside depuis dix ans en Suisse et est au bénéfice d’une admission provisoire depuis plus de cinq ans.

Il ressort du dossier qu’il n’a pas de poursuites, ni fait l’objet de condamnations pénales. Depuis 2019, il est financièrement indépendant, œuvrant pour le même employeur. Lors des audiences qui ont eu lieu devant la chambre administrative, il s’est exprimé en français. Le recourant remplit ainsi les conditions de l’art. 84 al. 5 LEI pouvant conduire à l’octroi d’une autorisation de séjour durable, comme l’a d’ailleurs constaté le SEM dans son courrier du 1er mai 2023 et le reconnaît également l’OCPM.

Reste à déterminer si l’absence de passeport due à sa volonté de ne pas entreprendre les démarches nécessaires auprès de l’Ambassade d’Érythrée en Suisse s’oppose, comme retenu par l’OCPM, à l’octroi de l’autorisation de séjour.

La lettre de regret – que le recourant se refuse de signer – doit être signée par toute personne n’ayant pas accompli ses obligations militaires ou ayant quitté de manière illégale le pays (rapport de l’European Asylum Support Office (EASO) de septembre 2019, p. 9 ss, publié sur le site du SEM https://www.sem.admin.ch/ sem/fr/home/international-rueckkehr/herkunftslaender.html). Après l’arrêt de la chambre de céans invitant l’OCPM à clarifier si les risques encourus par le recourant en cas de signature de la lettre de regret, préalable nécessaire à la délivrance d’un passeport par les autorités érythréennes, permettaient de renoncer à cette exigence, le SEM a indiqué, le 1er mai 2023, que l’attitude des autorités érythréennes en cas de retour en Érythrée d’un ressortissant ayant signé la lettre de regret dépendait essentiellement de la question de savoir si celui-ci retournait dans son pays volontairement ou sous la contrainte ainsi que de son statut au regard du service militaire national avant son départ. Seul un déserteur ou un réfractaire au service militaire risquait, en cas de retour après avoir signé une lettre de contrition, une mise en danger concrète et sérieuse de sa personne au sens de l’art. 3 CEDH.

In casu, les motifs pour lesquels le recourant soutient avoir été incarcéré en Érythrée ne sont pas établis. Lors de ses auditions durant la procédure d’asile, il a déclaré avoir été appréhendé alors qu’il souhaitait retourner en Érythrée pour y rejoindre sa tante. Il a indiqué ne pas savoir pour quel motif il avait été incarcéré. Ce n’est que dans la présente procédure qu’il a soutenu avoir été arrêté parce qu’il n’avait pas accompli ses obligations militaires. Le témoin entendu par la chambre de céans s’est fondé sur ce que d’autres personnes lui avaient rapporté et ses déclarations sont restées générales. Ainsi et compte tenu notamment des déclarations mêmes du recourant, il ne peut être retenu qu’il aurait été incarcéré pour avoir été considéré par son pays d’origine comme un déserteur ou un réfractaire au service militaire.

Il ressort cependant du dossier et des déclarations constantes du recourant, tant durant la procédure d’asile qu’au cours de la présente procédure, qu’il n’a pas accompli ses obligations militaires en Érythrée. L’OCPM ne soutient d’ailleurs pas le contraire. La question de savoir si, dans ces conditions, le recourant pourrait être considéré comme un réfractaire par les autorités de son pays est délicate. Les observateurs – comme d’ailleurs l’EASO citée par le SEM – demeurent prudents quant aux risques encourus par des ressortissantes érythréens partis à l’étranger sans avoir accompli leurs obligations militaires. L’EASO relève, en effet, qu’en l’absence d’informations officielles relatives au traitement réservé aux ressortissants érythréens dans une telle situation, elle se fondait sur des récits individuels. En raison des punitions arbitraires et incohérentes, chaque cas pouvait donner lieu à un autre traitement (rapport précité, p. 10). Au vu de ces éléments, il n’est ainsi pas possible de retenir qu’en signant la lettre de regret, le recourant ne s’exposerait pas, en cas de retour dans son pays, à des traitements prohibés par l’art. 3 CEDH. Partant, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir signé cette lettre.

Par ailleurs, il n'apparaît pas que le statut d'admis provisoire du recourant pourrait être levé dans un avenir prévisible. Le représentant de l’OCPM a d’ailleurs indiqué lors de l’audience du 10 juillet 2024 qu’il n’était « absolument pas question que le SEM revienne sur l'admission provisoire ». Compte tenu de l’absence, dans un avenir prévisible, de la levée de l'admission provisoire, l’intérêt public au maintien de celle-ci, apparaît relativement faible. Le recourant, comme d’ailleurs ses enfants et son épouse, seront ainsi amenés à poursuivre leur vie en Suisse avec ce statut précaire. Celui-ci implique, conformément à la jurisprudence citée plus haut (consid. 3.6), des contraintes pour voyager à l'étranger qui dépassent le simple désagrément de devoir accomplir des démarches administratives. Outre la restriction dans la mobilité qu’entraîne le statut de détenteur de permis F, celui-ci rend également la position du recourant plus difficile sur le marché du travail.

Au vu de l'ensemble de ces circonstances, l'intérêt privé du recourant, dont l’intégration réussie est établie, à être mis au bénéfice d'une autorisation de séjour l'emporte sur l'intérêt public au maintien d'une admission provisoire. Parant, il y a lieu d’admettre le recours et d’annuler le jugement querellé ainsi que la décision de refus de l’OCPM. Le dossier sera renvoyé à cet office afin qu’il préavise favorablement auprès du SEM la transformation du permis L du recourant en autorisation de séjour.

5.             Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée au recourant pour les deux instances cantonales (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 8 mai 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 avril 2024 ;

au fond :

l’admet et annule ce jugement ainsi que la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 15 septembre 2023 ;

renvoie le dossier à l’office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu'il ne sera perçu aucun émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à A______, à la charge de l'État de Genève (office cantonal de la population et des migrations) ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre GABUS, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

 

le greffier-juriste :

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

C. MASCOTTO

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.