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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/794/2024

ATA/1284/2024 du 05.11.2024 ( FPUBL ) , ADMIS

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;ÉTABLISSEMENT DE DROIT PUBLIC;EMPLOYÉ PUBLIC;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;POUVOIR D'APPRÉCIATION;LICENCIEMENT ADMINISTRATIF;RÉSILIATION;CONTESTATION DU CONGÉ;FAUTE;FAUTE PROFESSIONNELLE;GRAVITÉ DE LA FAUTE;PREMIERS SECOURS;APPLICATION RATIONE TEMPORIS
Normes : Cst.5.al2; Cst.29.al2; Cst.36.al3; LPAC.21.al3; LPAC.22; LPAC.31.al2; LPAC.31.al3; LEPM.1.al1; LEPM.2.al1; LEPM.2.al2.leta; LTSU.1.al1; LTSU.3.alb; LTSU.6.al1; LTSU.6.al2; RTSU.4.alc; RTSU.4.alf; RTSU.4.alg; HUG-statut.20; HUG-statut.21; HUG-statut.22
Résumé : Annulation de la résiliation des rapports de service d'un préposé à la centrale d'appel d'urgences 144. Analyse de la gravité de la faute commise par le recourant. Bien que celle-ci ne soit pas légère (non-respect des protocoles) et que l'issue des évènements soit dramatique (décès d'un enfant), l'existence d'un lien de causalité prouvé entre la faute du recourant et le décès de l'enfant n'est pas alléguée par l'autorité ni ne ressort du dossier. De plus, aucun antécédent en 20 ans de carrière. Rien ne laisse penser que le recourant puisse réitérer sa faute et ne pas remplir les exigences de son poste et ainsi mettre en péril la santé voire la vie des patients. Résiliation disproportionnée. Réintégration ordonnée, la modification de l'art. 31 LPAC (règle de procédure), entrée en vigueur après le prononcé de la décision litigieuse et avant celui du présent arrêt, n'étant pas applicable au présent cas, vu les modifications fondamentales qu'elle apporte à l'ordre procédural. Admission du recours.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/794/2024-FPUBL ATA/1284/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 novembre 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Livio NATALE, avocat

contre

HÔPITAUX UNIVERSITAIRES DE GENÈVE intimés
représentés par Me Marc HOCHMANN FAVRE, avocat



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1971, a été engagé par les Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) en qualité de préposé à la centrale d'appel d'urgence 144 (ou centrale cantonale d’appels sanitaires urgents ; ci-après : la centrale ou CASU) à 100%, avec entrée en fonction le 1er septembre 2002. Il a été nommé fonctionnaire le 1er septembre 2005.

b. Selon son premier cahier des charges figurant au dossier, non daté, il devait notamment répondre avec efficacité à tous les appels entrants à la centrale, en veillant à maintenir dans les cas graves et dans la mesure du possible la communication jusqu'à l'arrivée des secours afin de prodiguer les conseils d'assistance premiers secours, suivre précisément la procédure de régulation sanitaire, déterminer les priorités et le type d'intervention le plus adapté à la situation et déclencher la procédure adéquate. Il devait également poser les questions indispensables au correspondant et interpréter les réponses données, au besoin en effectuant les contrôles nécessaires.

Son cahier des charges a été actualisé le 27 février 2020. Ses tâches n'ont fondamentalement pas changé.

c. Il a fait l'objet d'entretiens d'évaluation de développement et des compétences (ci‑après : EEDC) les 4 décembre 2002, 22 octobre 2003, 25 octobre 2004, 13 mai 2005 et 3 juin 2014. Les évaluations étaient respectivement bonne, excellentes (trois fois) et bonne.

d. Le 31 janvier 2020 s'est tenue une formation continue dont le sujet était « triage initial et arrêt cardio-respiratoire » (ci-après : ACR). Cette même formation a été dispensée une nouvelle fois le 31 octobre 2020 ; A______ a participé à la seconde formation.

Le document de présentation réalisé à l'appui de la formation mentionnait notamment que la respiration était présente dans plus de 50% des ACR lors de l'appel, de sorte que la détection était difficile. En outre, la question de la normalité de la respiration était essentielle et était devenue obligatoire : « comment est-ce que la personne respire ? ou : la personne respire-t-elle normalement ? ». Pour le protocole de triage initial, les deux questions clefs étaient l'état de conscience et la normalité de la respiration. Le but du protocole initial était d'abord de détecter les ACR, puis les grands troubles de la conscience et de la respiration. Selon le schéma illustrant le protocole de triage initial, si la personne n'était pas consciente et respirait anormalement, il y avait un cas d'ACR. Si la personne était consciente et respirait normalement ou anormalement, il convenait de continuer l'évaluation.

La détection de l'ACR à l'appel était fondamentale ; c'est pourquoi le protocole initial devait être strictement respecté. La réanimation guidée téléphoniquement devait être proposée systématiquement et de manière directive.

e. Le 6 février 2020, le docteur B______, médecin adjoint et responsable de la centrale, a transmis aux régulateurs de la centrale de nouveaux protocoles « délégués » d'évaluation de la respiration et d'assistance téléphone à la réanimation, précisant que l'application de ces nouveaux protocoles était immédiatement obligatoire pour ceux qui avaient suivi la formation du 31 janvier 2020. Il en irait de même pour ceux qui ne l'avaient pas encore suivie, une fois que tel serait le cas.

Le Dr B______ a précisé qu'il revoyait toutes les situations d'ACR et réécoutait les enregistrements. Les collaborateurs ne devaient donc pas être étonnés de recevoir des courriels individuels lorsqu'il estimerait que certaines situations qu'il aurait analysées devraient être améliorées.

f. Le 6 février 2021, le Dr B______ a transmis aux régulateurs de la centrale de nouveaux protocoles mis à jour, ceux-ci entrant en vigueur immédiatement.

Selon ces protocoles, lorsqu'un enfant était inconscient, il convenait de demander au témoin de s'approcher de l'enfant et d'évaluer la respiration en guidant le témoin. En l'absence de respiration après 6 secondes, il convenait d'annoncer « ACR » à haute voix à la centrale, alarmer les premiers répondants et faire commencer la réanimation. En cas de respiration dans les 7 secondes, il fallait faire mettre l'enfant en position latérale de sécurité et rester en ligne pour réévaluer la situation toutes les 30 secondes environ.

B. a. Le 20 août 2021, A______ exerçait sa fonction de régulateur à la centrale.

b. À 16h05, A______ a reçu l'appel d'une témoin signalant un enfant au sol.

La transcription de l'appel par les HUG, telle qu'elle figure dans le rapport d'événement indésirable grave (ci-après : EIG) du 13 septembre 2021 (cf. infra C.c), révèle la conversation suivante :

-          Témoin : « […] il y a un petit garçon qui s'est écroulé […] il fait des bruits bizarres, il est étendu par terre et on ne comprend rien. Est-ce que vous pourriez venir, ce n'est pas quelqu'un que je connais ? »

-          A______ : « l'enfant a quel âge environ ? »

-          Témoin : « je dirais 10-11 ans… il fait moi…moi...moi. »

-          A______: « d'accord et il s'est passé quoi ? »

-          Témoin: « on n'en sait rien, on l'a trouvé par terre »

-          A______ : « il a fait un malaise ? »

-          Témoin : « on n'en sait rien, il y a un autre monsieur qui est avec lui et qui l'a trouvé par terre, on dirait qu'il est tombé de quelque part. »

-          A______ : « est-ce qu'il saigne […] ? »

-          Témoin : « […] non, il ne saigne pas. »

-          A______ : « bon on va arriver Madame ».

c. Après avoir mis fin à l'appel, A______ a mis en œuvre des secours par hélicoptère. L'hélicoptère de la REGA est intervenu dix minutes après la fin de l’appel au plus tard, à 16h15.

d. Selon le rapport d'EIG du 13 septembre 2021 (cf. infra C.c), l'enfant a été retrouvé sur le côté, présentant des mouvements de gasping. Son visage était cyanosé. Le premier rythme constaté était une fibrillation ventriculaire encore correctement organisée, sans pouls palpable. Après que des soins ont été prodigués, le médecin de l'hélicoptère a demandé une ambulance afin de transporter l'enfant jusqu'aux HUG, où ce dernier est arrivé à 16h58. Il est décédé le 23 août 2021.

C. a. Le 30 août 2021, A______ a été convoqué à un entretien de service. La lettre de convocation précisait que ce dernier se rapportait, en particulier, au non‑respect des protocoles et procédures, à l'événement du 20 août 2021 et à l'attitude adoptée vis-à-vis de cette situation.

b. A______ a été absent pour cause de maladie du 31 août 2021 au 30 avril 2022.

c. Le 13 septembre 2021, le Dr B______, C______ (responsable opérationnel de la CASU) et D______(responsable des ressources humaines ; ci-après : RH) ont rédigé un rapport d'EIG, en lien avec l'événement du 20 août 2021.

Selon ce rapport, étaient présents le 20 août 2021 à la centrale trois régulateurs d'urgence, un médecin, trois assistants de régulation et un infirmier coordinateur. Il y avait une activité avec une charge normale : dix événements d'urgences traités entre 15h30 et 16h30, pour les trois régulateurs présents.

L'appel de la témoin ainsi que les circonstances dans lesquelles l'enfant a été retrouvé par l'équipe médicale étaient retranscrits (cf. supra B).

Lors de son passage à la centrale, deux heures après l'événement, le Dr B______ avait demandé pourquoi les premiers répondants n'avaient pas été engagés. A______ avait répondu que l'ACR n'avait pas été identifié pendant l'appel car l'appelante était stressée, si bien qu'il n'arrivait pas à obtenir les informations. Après avoir réécouté l'appel, le Dr B______ avait fait prendre conscience à l'intéressé que le pronostic de l'enfant dépendait essentiellement de ces dix minutes où rien n'avait été fait. A______ lui avait répondu qu'il devait faire une prise d'appel courte car d'autres appels pouvaient arriver. Le Dr B______ lui avait rappelé que l'appel ne pouvait être raccroché sans que l'évaluation consistant à détecter un ACR soit effectuée, même si d'autres appels entraient, et qu'il avait le protocole « enfant inconscient » sous les yeux. A______ avait acquiescé et dit qu'il en tiendrait compte.

Une discordance était constatée entre l'appel téléphonique (pas de question posée sur la respiration) et la documentation effective sur le dossier médical du patient (« présence d'une respiration normale »). Selon le système informatique (reproduit sur le rapport), le régulateur avait d'abord choisi la réponse « respire anormalement ou ne respire pas » puis avait choisi « respire normalement ».

d. Une analyse complémentaire portant sur les évaluations effectuées par A______ en août 2021, intégrée au rapport du 13 septembre 2021 et motivée par l'importante discordance entre la procédure qui aurait dû être suivie et ce qui avait été réellement effectué, d'une part, et la documentation qui ne correspondait pas à l'enregistrement audio, d'autre part, a été menée.

Avaient été extraits 112 dossiers. Seuls avaient été sélectionnés ceux où le patient présentait supposément un trouble de la conscience au moment de l'appel, soit 24 dossiers. L'analyse avait porté sur deux critères. En premier lieu, est-ce que les questions obligatoires (conscience et normalité de la respiration), en vigueur depuis plus de 15 ans à la centrale, avaient été posées ? En second lieu, comment les réponses à ces questions avaient-elles été documentées ? Le système informatique de la centrale imposait le passage par ces deux questions avant de continuer l'évaluation du patient.

La question relative à l'état de conscience n'avait pas été posée dans 42% des cas (10/24) ; celle relative à la respiration ne l'avait pas été dans 74% des situations (17/23). En outre, l'état de conscience avait été documenté de manière inexacte dans 21% des cas (5/24) et non documenté dans 25% des cas (6/24). La respiration l'avait été de manière inexacte dans 65% des cas (15/23) et non documentée dans 26% des cas (6/23).

En conclusion, pour les 24 situations évaluées, A______ n'avait pas suivi le protocole d'évaluation en vigueur. La non-application du protocole de régulation ayant conduit à l'EIG du 20 août 2021 n'était pas un événement isolé. La documentation médicale était erronée dans la plupart des dossiers de régulation.

e. L'entretien de service a eu lieu le 14 septembre 2021 en présence d’A______ (accompagné de son conseil), de D______, du Dr B______ et de C______. Un compte rendu a été rédigé.

Selon ce dernier, une écoute de la bande-son de régulation du 20 août 2021 a été effectuée à deux reprises. Il était reproché à A______ de ne pas avoir suivi le protocole de triage initial, ni celui d'évaluation d'un enfant inconscient lors de l'EIG du 20 août 2021. A______ aurait dû nécessairement poser la question sur la respiration de l'enfant. La bonne application de la procédure d'entrée en régulation faisait partie du métier de base du régulateur ; le protocole était présent sur le système informatique et en version plastifiée sur le bureau des régulateurs.

A______ a indiqué qu'il avait changé de protocole en cours d'appel car la témoin avait dit, à propos de l'enfant : « il a fait moi…moi…moi », si bien qu'il pensait que ce dernier était conscient. Il ne pouvait rien tirer de la témoin, celle-ci étant stressée.

C______ a répondu que ces bruits pouvaient être un gasp et que, pour éviter une mauvaise interprétation, les questions devaient être posées. De plus, si les effectifs ne permettaient certes pas la supervision, celle-ci n'était pas pour autant abandonnée.

A______ reprochait au Dr B______ de ne pas avoir été présent dans la salle de régulation au moment de l'appel d'urgence. Il avait appuyé sur le buzzer mais le Dr B______ n'était pas venu. Il se sentait très mal pour l'enfant décédé et sa famille.

Le Dr B______ a informé A______ de l'analyse complémentaire portant sur les évaluations effectuées par ce dernier en août 2021 et lui a fait part des résultats. Il a été relevé que les deux questions essentielles du protocole de la centrale avaient été posées telles que prescrit seulement trois fois sur les 24 dossiers et que la documentation correspondait aux questions posées par A______ seulement dans trois cas sur les 24 dossiers. Le protocole de détection des ACR n'était pas respecté.

À l'issue de l'entretien, A______ a été informé que la situation pouvait donner lieu à des sanctions pouvant aller jusqu'à la résiliation des rapports de service.

f. Après avoir reçu le rapport du 13 septembre 2021 ainsi que le compte rendu de l'entretien du lendemain, A______ a transmis ses observations dans le délai imparti à cet effet.

Il sollicitait des corrections du compte rendu et des ajouts, qui figuraient dans un compte rendu modifié annexé à son courrier. Il remettait en cause le comportement du Dr B______, notamment un défaut de supervision de sa part, et son impartialité. L'enquête devait être menée par des personnes n'ayant aucune inimitié à son égard.

g. Le 19 octobre 2021, les HUG ont accusé réception des observations de A______. Ils ont relevé que plusieurs de ses citations n'avaient pas été mentionnées lors de l'entretien. Dans la mesure où A______ demandait à pouvoir écouter les bandes d'enregistrement de régulation mentionnées dans le rapport du 13 septembre 2021, ils acceptaient d'organiser un nouvel entretien de service.

h. Le second entretien de service a eu lieu le 8 novembre 2021 en présence de l'intéressé, de D______, du Dr B______ et de C______. Un compte-rendu a été rédigé.

Les bandes-son citées dans le rapport du 13 septembre 2021 ont été écoutées, avec lecture de chaque fiche de régulation remplie par A______, puis commentées par le Dr B______.

À l'issue des écoutes, A______ a indiqué ne pas être en mesure de s'exprimer sur « les faits » et qu'il le ferait par écrit.

i. Après avoir reçu le compte rendu de l'entretien du 8 novembre 2021, A______ a transmis ses observations dans le délai imparti à cet effet. Il sollicitait des rectifications du compte rendu et a commenté chaque bande-son écoutée.

j. Le 8 février 2022, les HUG ont indiqué à A______ que ses explications ne permettaient de justifier ni son comportement ni le non-respect des protocoles et qu'une procédure de reclassement serait mise en œuvre.

D. a. A______ a été libéré de son obligation de travailler le 29 avril 2022, avec effet au 1er mai 2022.

b. Le 20 mai 2022, les HUG ont un établi un certificat de travail intermédiaire de A______.

c. Le 7 juin 2022, A______ a été reçu par E______ (spécialiste des RH en « gestion des talents ») en vue de l'établissement d'un bilan de compétences. À l'issue de l'entretien, des recommandations ont été formulées à l'attention de l'intéressé.

d. Un second entretien a eu lieu le 5 juillet 2022. Il avait pour but de présenter à A______ les résultats du bilan « AssessFirst » réalisé par E______.

Selon le rapport, parmi les postes en concours au sein des HUG, aucun ne correspondait à son profil. Il était invité à solliciter sa responsable des RH pour un point de situation.

e. Le 26 juillet 2022, il a été reçu par F______, spécialiste en réinsertion professionnelle et maintien en emploi aux HUG, en vue de l'évaluation de la pertinence de la mise en place d'un accompagnement en vue d'un reclassement.

f. Avec l'accord des HUG, il a effectué un stage d'observation à la centrale d'urgences de l'aéroport.

g. Par courriel du 9 novembre 2022 adressé à l'ensemble des responsables des RH des HUG, G______ (responsable aux RH) a indiqué rechercher un poste, au sein de leur secteur, correspondant aux capacité de A______.

Entre les 9 novembre et 9 décembre 2022, elle n'a reçu que des réponses négatives (seize), en raison de l'absence de postes vacants ou de l'absence de postes correspondant au profil de A______.

h. Le 1er décembre 2022, F______ a adressé à A______ le résumé de ses constatations pendant la période de suivi.

A______ avait manifesté son intérêt pour trois domaines. Or, aucun poste n'était disponible dans les mois suivants et en perspective de 2023. D'autres pistes avaient été explorées et A______ avait indiqué qu'il ne souhaitait plus exercer une activité impliquant une pression telle que celle ressentie dans son activité de régulateur.

i. Le 12 décembre 2022, G______ a interpelé H______ pour obtenir des informations concernant les postes de chef d'équipe brancardier et chef d'équipe régulateur des transports. Deux jours plus tard, H______ a répondu que le premier poste était déjà repourvu dans le cadre du service. Pour le second poste, qui était un remplacement, elle recherchait une personne ayant de l'expérience dans le brancardage.

j. Le 19 décembre 2022, A______ a précisé à G______ qu'il lui avait indiqué qu'il ne souhaitait plus travailler à la centrale avec une hiérarchie qui dysfonctionnait, et non pas qu'il ne souhaitait plus exercer une activité impliquant une pression telle que celle ressentie dans son activité de régulateur.

k. Le 25 janvier 2023, A______ a été reçu en entretien pour un poste de chauffeur au sein du secteur distribution. Selon le courrier du 22 février 2023 de I______, responsable des RH au département d'exploitation, adressé à J______ (assistante de K______, responsable des RH succédant à G______), sa candidature n'avait pas été retenue, l'intéressé ne pouvant justifier d'une expérience minimum de trois ans dans la livraison de marchandise.

l. Un entretien s'est tenu le 15 mars 2023 entre K______ et A______.

Par courriel du lendemain, K______ a confirmé à A______ que les HUG étendraient les recherches de reclassement à l'État de Genève, l'intéressé y ayant donné son accord.

m. Par courriel du 30 mars 2023, K______ a demandé aux partenaires institutionnels de l'État de Genève des HUG s'ils disposaient d'un poste pour A______.

Entre les 30 mars et 2 mai 2023, il n'a reçu que des réponses négatives (dix), soit en raison de l'absence de postes vacants, soit en raison de l'absence de postes adaptés au profil de A______.

n. Le 1er juin 2023, K______ a indiqué à A______ que les HUG n'avaient reçu aucun retour positif des partenaires institutionnels. La procédure de reclassement était arrivée à son terme et la procédure suivrait son cours.

o. Après plusieurs échanges d'écritures entre les HUG et A______ au sujet de la procédure de reclassement, L______, adjoint de direction des RH, a indiqué à A______ que ses interrogations avaient déjà obtenu des réponses et qu'il demanderait au département de prendre une décision.

p. Par décision du 1er février 2024, déclarée exécutoire nonobstant recours, les HUG ont résilié les rapports de service de A______, pour motif fondé, avec effet au 31 mai 2024, « pour les raisons évoquées en détails lors des entretiens de service des 14 septembre et 8 novembre 2021 ». Ils l'ont libéré de son obligation de travailler, avec maintien de son salaire jusqu'à cette date.

E. a. Par acte remis à la poste le 4 mars 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant principalement à son annulation et à sa réintégration. Subsidiairement, sa réintégration devait être proposée et une indemnité équivalant à 20 mois de son dernier traitement brut devait lui être allouée. Il a conclu à titre préalable à l'octroi de l'effet suspensif, à la mise en œuvre d'une enquête administrative en lien avec la régulation du 20 août 2021 et l'organisation de la centrale, à ce que les HUG produisent tous les documents sur lesquels se fondait le rapport du 13 septembre 2021 ainsi qu'à son audition et celle de seize témoins.

Le motif de licenciement n'était pas fondé et le rapport du Dr B______ était inexact et incomplet. Il convenait d'ordonner une enquête administrative diligentée par des acteurs externes et indépendants afin de déterminer les responsabilités de chacun. Il avait subi l'absence de supervision en centrale. Les HUG ne s'étaient jamais assurés que les protocoles étaient respectés par les collaborateurs. Dès lors, il était disproportionné de le licencier sans qu'un blâme ou un avertissement lui ait été notifié au préalable. Enfin, la procédure de reclassement avait été inexistante.

b. Les HUG ont conclu au rejet de la requête de restitution de l'effet suspensif.

Lors de la régulation du 20 août 2021, le recourant avait fait fi des protocoles de la centrale. Il n'avait pas posé les deux questions essentielles et n'avait pas identifié que l'enfant était en ACR. De ce fait, il avait omis de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour augmenter les chances de survie de l'enfant.

Vu la faute grave commise lors de la régulation du 20 août 2021 et les manquements répétés constatés lors des régulations d'août 2021, l'existence d’un motif de licenciement était établie. Le recourant ne pouvait se prévaloir de ne plus avoir fait l'objet d'évaluations concernant l'exercice de ses fonctions depuis 2014. En effet, entre 2020 et 2021, il avait suivi deux formations continues.

c. Dans sa réplique sur effet suspensif, le recourant a relevé que dans la mesure où la témoin avait indiqué que l'enfant disait : « moi, moi, moi », il avait considéré que ce dernier était conscient. Par conséquent, le protocole « enfant inconscient » n'était pas applicable. Si l'enfant parlait, c'était qu'il respirait.

Les régulateurs étaient encore en phase de formation continue pour les protocoles relatifs à l'évaluation et la prise en charge des ACR. Il n'avait jamais fait l'objet de remarques de la part du Dr B______ ni de demandes d'amélioration jusqu'au 20 août 2021, ni de supervision. Or, dans son courriel du 6 février 2020, le Dr B______ avait institué une surveillance continue des appels des régulateurs, à tout le moins dès le mois de février 2020, pour assurer la bonne application des nouveaux protocoles. Le licenciement apparaissait disproportionné eu égard au contexte dans lequel s'inscrivait la mise en place des nouveaux protocoles.

d. Par décision du 23 avril 2024, la chambre administrative a refusé de restituer l'effet suspensif.

e. Dans leur réponse au fond, les HUG ont conclu au rejet du recours et ont repris l'argumentation développée dans leur précédente écriture. Lors de la régulation du 20 août 2021, le recourant avait pris un raccourci inadmissible. Tout soignant exerçant dans le domaine de l'urgence savait qu'un patient en ACR présentait très souvent encore des mouvements respiratoires et émettait parfois des sons pendant quelques minutes. Son argument selon lequel il s'agissait de nouveaux protocoles qui étaient en cours d'assimilation par les régulateurs tombait à faux. En effet, il ne s'agissait pas de nouveaux protocoles mais de mise à jour. Le recourant ne pouvait tirer argument du fait que ses régulations n'avaient pas fait l'objet d'analyses avant l'événement du 20 août 2021. En effet, des écoutes étaient effectuées uniquement lorsqu'un EIG survenait, ce qui n'avait pas été le cas avant la régulation litigieuse.

f. Dans sa réplique au fond, le recourant a relevé que le 20 août 2021, l'équipe de régulation était en sous-effectif, ce qui empêchait la réalisation d'un travail de qualité. Même à supposer que la centrale n'était pas surchargée le 20 août 2021, il n'était pas en mesure de remplir correctement sa fonction, faute de supervision adéquate. Ses compétences n'avaient jamais été remises en cause. Il avait toujours donné entière satisfaction et n'avait jamais fait l'objet d'une sanction. Par ailleurs, la gestion de l'événement du 20 août 2021, considéré comme grave, aurait dû être prise en charge par la cellule EIG, et non pas par le Dr B______.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger le 14 juin 2024, ce dont les parties ont été informées.

h. Dans une écriture spontanée du 24 juin 2024, le recourant a transmis une note d'honoraires de son avocat et a conclu à ce que les HUG soient condamnés à lui verser la somme de CHF 49'763.75 à titre de juste indemnité pour les frais occasionnés par la procédure.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le recourant sollicite diverses mesures d’instruction.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, compte tenu de l'issue du litige, il n'apparaît pas nécessaire de procéder aux actes d'instruction sollicités par le recourant. Ils ne seront donc pas ordonnés.

Par ailleurs, les parties se sont exprimées à plusieurs reprises, par écrit, de manière circonstanciée sur l'objet du litige et ont produit les pièces auxquelles elles se sont référées dans leurs écritures. La chambre de céans dispose ainsi d'un dossier complet qui lui permet de statuer en connaissance de cause.

3.             Le recourant se plaint du caractère disproportionné de la résiliation de ses rapports de service.

3.1 Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée en l'espèce.

Il y a abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d’appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2).

3.2 En tant que membre du personnel des HUG, le recourant est soumis au statut du personnel des HUG du 16 décembre 1999 (ci-après : le statut) en application de l'art. 1 al. 1 let. e de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) et de l'art. 7 let. e de la loi sur les établissements publics médicaux du 19 septembre 1980 (LEPM - K 2 05). Il est aussi soumis à la LPAC et à son règlement d'application du 24 février 1999 (RPAC - B 5 05.01) notamment.

3.3 Les devoirs des membres du personnel des HUG sont énoncés dans le titre III du statut. Ces derniers sont tenus au respect de l'intérêt de l'établissement et doivent s'abstenir de tout ce qui peut lui porter préjudice (art. 20 du statut). Selon l'art. 21 du statut, qui reprend en substance la teneur de l'art. 21 RPAC, les membres du personnel se doivent notamment, par leur attitude, d'entretenir des relations dignes et correctes avec leurs supérieurs, leurs collègues et leurs subordonnés ; de permettre et de faciliter la collaboration entre ces personnes (let. a) ; d’établir une communication respectueuse avec le public, privilégiant l’écoute et la compréhension (let. a) ; de justifier et de renforcer la considération et la confiance dont la fonction publique doit être l'objet (let. c) ; d’adopter un comportement adapté à la situation des personnes malades, en particulier en faisant preuve de tact, de patience, de compréhension et en leur apportant les services dont ils ont besoin (let. d).

Aux termes de l'art. 22 du statut, ils se doivent également de remplir tous les devoirs de leur fonction consciencieusement et avec diligence (al. 1) et notamment de se tenir au courant des modifications et des perfectionnements nécessaires à l'exécution de leur travail (al. 5).

3.4 Les rapports de service peuvent être résiliés pour motif fondé (art. 21 al. 3 LPAC). Selon l'art. 22 LPAC, il y a motif fondé lorsque la continuation des rapports de service n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration, soit notamment en raison de l'insuffisance des prestations (let. a), de l'inaptitude à remplir les exigences du poste (let. b) ou de la disparition durable d'un motif d'engagement (let. c).

Selon les travaux préparatoires relatifs à l'art. 22 LPAC, l’insuffisance des prestations et l’inaptitude à remplir les exigences du poste sont des conditions personnelles qui ne peuvent s’expliciter que dans des cas particuliers (MGC 2005‑2006/IX A 10437).

L'élargissement des motifs de résiliation des rapports de service, lors de la modification de la LPAC entrée en vigueur le 31 mai 2007, n'implique plus de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue difficile, mais qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'administration. L'intérêt public au bon fonctionnement de l'administration cantonale, déterminant en la matière, sert de base à la notion de motif fondé, lequel est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1219/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4c et les références citées). Il faut que le comportement de l'employé – dont les manquements sont aussi reconnaissables pour des tiers – perturbe le bon fonctionnement du service ou qu'il soit propre à ébranler le rapport de confiance avec le supérieur (arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2019 du 24 août 2020 consid. 4.1 et 4.2).

La notion de motifs fondés doit être concrétisée, dans chaque situation, à la lumière des circonstances du cas d’espèce. L’employeur jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour juger si les manquements d’un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l’administration. Les rapports de service étant soumis au droit public, la résiliation est en outre assujettie au respect des principes constitutionnels, en particulier ceux de la légalité (art. 5 al. 1 Cst.), de l’égalité de traitement (art. 8 Cst.), de l’interdiction de l’arbitraire (art. 9 Cst.) et de la proportionnalité (art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. ; ATA/530/2024 du 30 avril 2024 consid. 5.3 et 5.4 et les arrêts cités).

Le principe de la proportionnalité exige que les mesures mises en œuvre soient propres à atteindre le but visé (règle de l'aptitude) et que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) ; il doit en outre y avoir un rapport raisonnable entre ce but et les intérêts compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 140 I 168 consid. 4.2.1). Ainsi, dans le cadre d'une résiliation des rapports de service, l'autorité doit apprécier les actes ou les manquements reprochés à l'intéressé en les situant dans leur contexte, c'est-à-dire en tenant compte d'éventuelles circonstances atténuantes. Il convient de veiller à ce que la mesure soit proportionnée à la faute, c'est-à-dire que celle-ci apparaisse comme plus grave que les manquements faisant habituellement l'objet de mesures disciplinaires moins incisives, comme le retour au statut d'employé en période probatoire. Si les peines légères répriment des manquements bénins, les peines lourdes ne peuvent être prononcées que si le fonctionnaire s'est rendu coupable d'une infraction unique mais spécialement grave ou s'il a commis un ensemble de transgressions qui, prises isolément, ne seraient pas graves, mais dont la gravité résulte de leur répétition (ATA/479/2009 du 29 septembre 2009 consid. 11f et les arrêts cités).

On définit en général la faute comme un manquement de la volonté au devoir imposé par l'ordre juridique. Il peut s'agir d'une faute intentionnelle ou d'une négligence. Traditionnellement, on considère que la faute représente l'aspect subjectif de la responsabilité alors que l'illicéité en constitue l'aspect objectif. Dans l'analyse de la négligence, le manquement est cependant objectivé : le responsable commet une faute lorsqu'il manque à la diligence dont aurait fait preuve une personne de la catégorie à laquelle il appartient (ACJC/207/2024 du 30 janvier 2024 ; Franz WERRO/Michel PERRITAZ, Code des obligations I, Commentaire romand, 3e éd., 2021, n. 56-57 ad art. 41 CO).

3.5 Les justes motifs de résiliation des rapports de travail des fonctionnaires ou employés de l'État peuvent procéder de toutes circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, excluent la poursuite des rapports de service, même en l'absence de faute. De toute nature, ils peuvent relever d'événements ou de circonstances que l'intéressé ne pouvait éviter, ou au contraire d'activités, de comportements ou de situations qui lui sont imputables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_667/2019 du 28 janvier 2021 consid. 6.2 et les arrêts cités ; 8C_638/2016 du 18 août 2017 consid. 4.2 et les références citées). Les conditions justifiant une résiliation ne se déterminent pas de façon abstraite ou générale, mais dépendent concrètement de la position et des responsabilités de l'intéressé, de la nature et de la durée des rapports de travail ainsi que du genre et de l'importance du manquement (ATF 142 III 579 consid. 4.2).

La violation fautive des devoirs de service n’exclut pas le prononcé d’un licenciement pour motif fondé (dit licenciement ordinaire ou administratif). Si le principe même d’une collaboration ultérieure est remis en cause par une faute disciplinaire de manière à rendre inacceptable une continuation des rapports de service, un simple licenciement, dont les conséquences sont moins graves pour la personne concernée, peut être décidé à la place de la révocation disciplinaire (arrêt du Tribunal fédéral 8C_335/2021 du 23 novembre 2021 consid. 3.3).

L'autorité qui inflige une sanction disciplinaire, qui dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation, doit respecter le principe de la proportionnalité. Le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d'intérêt public recherchés. À cet égard, l'autorité doit tenir compte en premier lieu d'éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées pour le bon fonctionnement de la profession en cause et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l'intéressée ou intéressé (ATA/467/2024 du 16 avril 2024 consid. 6.3 et les arrêts cités). Ces principes peuvent s'appliquer mutatis mutandis au prononcé d'une résiliation pour motif fondé.

3.6 La chambre de céans a déjà eu l'occasion de préciser que l'absence d'entretiens d’évaluation des prestations réguliers depuis une certaine période, imputable à l’autorité, désavantageait le travailleur dans l'examen de son évolution professionnelle. Elle ne pouvait lui être préjudiciable durant la période considérée (ATA/287/2018 du 27 mars 2018 consid. 5a).

3.7 Dans un arrêt de 2023, la chambre administrative a dû connaître de la résiliation des rapports de service d'un fonctionnaire exerçant le métier de cardiomobiliste depuis deux décennies. Ce dernier avait pratiqué une intubation sur un enfant de 5 ans alors qu’il n’était pas habilité à le faire. Avant d’intuber cet enfant, il n’avait pas procédé à la préparation nécessaire du matériel. Il ne pouvait pas invoquer l’urgence de la situation. Il était en effet précisément, de par sa fonction, habitué à intervenir dans des situations d’urgence, le cas échéant avec pronostic vital engagé. Par son acte, il avait empêché toute oxygénation de l’enfant entre le moment où la ventilation n’avait plus été pratiquée pour procéder à l’introduction du tube jusqu’à l’arrivée de la médecin cadre. Il n’avait opéré aucune réelle remise en cause de son comportement et, quand bien même il pouvait le regretter, n’en avait pas moins, au stade du recours encore, cherché à en faire porter la responsabilité à d’autres, dont à son employeur pour ne pas avoir mis en place des processus clairs. Dans ces conditions, c’était sans abuser de leur pouvoir d’appréciation que les HUG avaient considéré qu’il y avait une rupture du lien de confiance empêchant la poursuite des rapports de service et justifiant une exception au principe légal du reclassement (ATA/1108/2023 du 10 octobre 2023 consid. 6 et 7.5).

Saisi d'un recours contre l'arrêt précité, le Tribunal fédéral a considéré que l'incident en cause apparaissait comme isolé dans le parcours professionnel du recourant, qui avait travaillé pendant plus de vingt ans aux services de l'État en donnant en principe satisfaction. Aucun manquement du même genre ne lui était d'ailleurs reproché. L'hypothèse qu'il se retrouvât dans la même situation et prît une décision analogue pouvait raisonnablement être écartée. Certes, il avait été qualifié « d'électron libre » lors d'une évaluation intervenue en 2016. L'intubation pratiquée de sa propre initiative et en dehors du cadre protocolaire pouvait confirmer dans une certaine mesure cette appréciation et faire craindre qu'il pût à nouveau agir sans tenir compte des règles et des procédures à suivre au sein de l'unité d'intervention et mettre ainsi en péril la santé voire la vie des patients. En ce sens, les HUG pouvaient faire prévaloir la sécurité, la santé et la vie des patients et considérer qu'un reclassement du recourant dans sa fonction actuelle dans un autre établissement public médical n'était d'emblée pas envisageable. On ne voyait pas pour autant que le comportement du recourant manifesté lors de l'incident empêchait de manière rédhibitoire un éventuel reclassement dans une autre fonction ou à un autre poste au sein des HUG ou d'un autre établissement public médical, qui ne mît pas en jeu la sécurité, la santé ou la vie des patients (arrêt du Tribunal fédéral 1C_609/2023 du 24 mai 2024 consid. 4.3).

3.8 Les établissements publics médicaux du canton de Genève, soit les HUG (art. 1 al. 1 LEPM), fournissent à chacun les soins que son état requiert (art. 2 al. 1 LEPM). Leurs activités sont notamment le diagnostic et le traitement des malades (art. 2 al. 2 let. a LEPM).

La loi sur les transports sanitaires urgents et l’aide sanitaire associée du 29 octobre 1999 (LTSU - K 1 21), a pour but d’assurer la qualité, la rapidité et l’efficacité des secours apportés aux personnes malades et aux personnes blessées dont la vie ou l’intégrité corporelle sont en danger ainsi qu’aux parturientes (art. 1 al. 1 LTSU). Afin d’assurer la bonne exécution de cette tâche d’intérêt public, la LTSU crée une centrale téléphonique centralisant et coordonnant les appels relatifs aux transports sanitaires urgents et à l’aide sanitaire associée (art. 3 let. b LTSU).

La CASU réceptionne tout appel relatif aux transports sanitaires urgents et à l’aide sanitaire associée (art. 6 al. 1 LTSU). Le personnel de régulation de la CASU est constitué de collaborateurs spécialisés dans le domaine de la régulation sanitaire d’urgence, de préférence au bénéfice d’une formation d’ambulanciers professionnels reconnue par l’IAS (art. 6 al. 2 LTSU).

La CASU est dotée des moyens humains et techniques destinés notamment à engager les intervenants sanitaires idoines, nécessaires à la prise en charge la plus rapide et la plus adéquate possibles (téléphonie, radio-communications, GPS, cartographie informatisée) sur l'ensemble de la chaîne de sauvetage (art. 4 let. c RTSU), à assurer l'engagement et la coordination des moyens sanitaires nécessaires en situation particulière planifiée ou imprévue, le cas échéant sur site (art. 4 let. f RTSU) et à documenter les interventions par le biais d'une fiche d'intervention pré‑hospitalière électronique (art. 4 let. g RTSU).

Les transports sanitaires d'urgence, c'est-à-dire le transport de personnes malades ou accidentées, constituent une préoccupation majeure de la population : chacun peut un jour y avoir recours, pour lui-même ou ses proches. En ces circonstances, on désire donc une intervention rapide, adéquate, afin de sauver des vies humaines, à un coût abordable (MGC 1997 21/III 3099). La régulation des interventions présuppose des connaissances spécialisées, ce qui explique que la centrale soit dirigée par un médecin spécialiste des urgences (MGC 1997 21/III 3104).

3.9 En l'espèce, les HUG justifient la résiliation des rapports de service du recourant par la faute grave que ce dernier aurait, selon eux, commise lors de la régulation du 20 août 2021, d'une part. Ils lui reprochent de ne pas avoir interrogé la témoin sur l'état de conscience ni sur la respiration de l'enfant, contrairement à ce que prescrivait le protocole, et de ne pas avoir identifié que l'enfant était en ACR. De la sorte, il avait omis de mettre en œuvre les mesures nécessaires, à savoir annoncer « ACR » à haute voix dans la centrale, alarmer les premiers répondants et faire commencer la réanimation. D'autre part, les HUG lui reprochent ses manquements répétitifs durant les régulations analysées du mois d'août 2021. Compte tenu de l'enjeu de sécurité publique et des patients, le comportement du recourant n'est pas compatible avec le bon fonctionnement de la centrale.

3.9.1 La teneur de l'appel entre la témoin et le recourant ainsi que les mesures prises par ce dernier lors de l'événement du 20 août 2021, telles que relatées dans le rapport du 13 septembre 2021, ne sont pas contestées. Le recourant a posé des questions sur l'âge de l'enfant ; il a demandé ce qu'il s'était passé, si ce dernier avait fait un malaise et s'il saignait. Il n'a ainsi pas interrogé la témoin sur l'état de conscience ni sur la respiration de l'enfant ni guidé une éventuelle réanimation.

Or, selon le protocole de triage appliqué à la centrale, qui doit être strictement respecté selon les HUG, qui ne sont pas contredits sur ce point, la première étape est l'évaluation de la conscience : si le patient ne répond pas à la douleur ou une stimulation vigoureuse, il est considéré comme inconscient. Le cas échéant, il convient d'évaluer sa respiration. Si le patient ne respire pas ou anormalement, il s'agit d'un arrêt cardio-respiratoire. Pour les situations où le patient est inconscient, il existe trois protocoles, actualisés à plusieurs reprises mais dont les principes sont valables depuis quinze ans selon les HUG, qui ne sont pas contredits sur ce point. Le protocole « enfant inconscient » prescrit aux régulateurs les trois étapes suivantes : 1) demander aux témoins de s'approcher de l'enfant ; 2) évaluer la respiration de l'enfant (le régulateur guide le témoin) ; 3) guider la réanimation en l'absence de respiration après sept secondes (et notamment alarmer les premiers répondants) ou rester en ligne et réévaluer la respiration toutes les 30 secondes environ si l'enfant respire dans les sept secondes.

Il apparaît donc que le recourant n'a pas suivi le protocole qu'il connaissait et n'a pas passé par l'étape de l'évaluation de la conscience de l'enfant ni celle de la question de la normalité de la respiration. Celle-ci était essentielle, ce qui a été rappelé lors de la formation continue dont le sujet était « triage initial et arrêt cardio‑respiratoire » à laquelle l'intéressé a participé le 31 octobre 2020. Il n'est pas contesté que l'enfant était en ACR et que le respect du protocole aurait dès lors augmenté les probabilités de le détecter, ce qui aurait ainsi permis au recourant, le cas échéant, de guider immédiatement la réanimation par téléphone.

Le recourant ne peut se prévaloir du fait qu'il a considéré que l'enfant était conscient au motif que la témoin avait indiqué que ce dernier disait : « moi… moi… moi ». En effet, la témoin a commencé par indiquer que l'enfant faisait des bruits bizarres et qu'elle ne comprenait rien ; vu la situation décrite, manifestement confuse mais urgente, et dans la mesure où le protocole prescrit d'évaluer en premier lieu la conscience de l'enfant, on pouvait raisonnablement attendre du recourant qu'il pose des questions supplémentaires afin de s'assurer de l'état de conscience de l'enfant.

Dès lors, en omettant à tort de suivre le protocole qu'il connaissait et qui était à sa disposition, ce qu'il aurait dû faire compte tenu des circonstances du cas d'espèce et ce qui pouvait raisonnablement être attendu de lui, le recourant a manqué de diligence dans l'exécution de son travail (art. 22 al. 1 du statut) et a donc contrevenu à ses devoirs de fonction et aux exigences de son cahier des charges. Il a ainsi commis une faute. Du reste, en soutenant que les manquements des HUG auraient empêché la réalisation d'un travail de qualité, le recourant admet du même coup avoir commis une erreur dans sa régulation du 20 août 2021.

Au vu de ce qui précède, les HUG étaient fondés à reprocher au recourant une faute lors de la régulation du 20 août 2021.

3.9.2 Les manquements répétés durant les régulations analysées du mois d'août 2021 ne sont pas contestés par le recourant. Ils ont été documentés et explicités en détails dans le rapport du 13 septembre 2021. Il n'y a donc pas lieu de s'écarter de la conclusion du rapport à ce sujet, soit que le recourant n'a pas suivi le protocole en vigueur pour les 24 situations analysées. Il a, à cet égard, également commis une faute.

3.10 Reste à déterminer si la gravité de la faute commise lors de la régulation du 20 août 2021 par le recourant ainsi que les manquements observés lors des régulations d'août 2021 pouvaient fonder une résiliation de ses rapports de service.

La faute commise par le recourant n'est pas légère. Il a mal interprété la situation ainsi que les indications qu'il a reçues de la témoin alors qu'il aurait dû et pu les comprendre autrement. En ne détectant pas l'ACR, il n'a pas pu guider immédiatement la réanimation par téléphone, avec pour conséquence que les chances de survie de l'enfant n'ont pas pu être augmentées jusqu'à l'arrivée des secours. Il avait par ailleurs à sa disposition le protocole qu'il connaissait depuis plusieurs années, quand bien même ledit protocole avait été mis à jour au début de l’année 2020. Enfin, son devoir de diligence, qu'il a enfreint, était d'autant plus important que les enjeux liés aux tâches de la centrale et des régulateurs formés à cet effet le sont, puisque celle-ci a notamment pour objectif d'assurer une intervention rapide et adéquate afin de sauver des vies humaines.

Néanmoins, tout manquement aux devoirs de service n'implique pas nécessairement une résiliation des rapports de service, laquelle doit notamment respecter le principe de proportionnalité. En l'occurrence, si l'issue des événements est certes tragique, l'existence d'un lien de causalité prouvé entre la faute du recourant et le décès de l'enfant n'est pas alléguée par les HUG ni ne ressort d'ailleurs du dossier. En outre, celle-là s'inscrit dans le cadre d'une activité, soit la régulation de la centrale, soumise à des exigences particulières d'attention et de gestion du stress, dans laquelle la moindre erreur de jugement peut avoir des conséquences importantes.

Le recourant a travaillé presque 20 ans aux services des HUG en donnant satisfaction, voire entière satisfaction, dans ce domaine particulier, ce que ses EEDC et les nombreux témoignages écrits versés au dossier confirment. Il n'a, à teneur du dossier, fait l'objet d'aucune mesure disciplinaire ni aucune remarque de ses supérieurs. Aucun manquement du même genre ne lui a a fortiori été reproché avant l'EIG du 20 août 2021.

Si des manquements ont certes été observés lors de ses régulations d'août 2021, ce n'est qu'à la suite de l'EIG du 20 août 2021 qu'ils ont été constatés et ses supérieurs hiérarchiques ne les lui ont pas signalés avant la survenance de l'EIG. Ils ne sauraient dès lors être considérés comme des antécédents ayant pour effet d'aggraver la faute du recourant, ce dernier ne pouvant savoir qu'il devait y remédier, faute de supervision (ce que confirment les déclarations de C______ lors de l'entretien de service du 14 septembre 2021) et de retour exprès de sa hiérarchie. À cet égard, contrairement à ce que semblent soutenir les HUG, une supervision ainsi que des retours étaient nécessaires et mêmes attendus, même si le recourant avait suivi des formations, puisque, le 6 février 2020, le Dr B______ a précisé aux régulateurs qu'il revoyait toutes les situations d'ACR – et donc pas uniquement celles faisant suite à un EIG – et réécoutait les enregistrements, si bien que ces derniers « ne devaient pas être étonnés de recevoir des courriels individuels lorsqu'ils estimeraient que certaines situations qu'ils auraient analysées devraient être améliorées ».

L'incident en cause et les manquements observés a posteriori, qui doivent être considérés dans leur ensemble compte tenu de leur proximité dans le temps (moins d'un mois), de leur thématique spécifique commune (détection des ACR) et de l'absence d'observations des superviseurs sur lesdits manquements avant l'incident en cause, ce qui leur incombait, apparaissent ainsi comme un évènement isolé dans le parcours professionnel du recourant, à défaut d'autres reproches qui auraient été dûment constatés et adressés à l'intéressé par les HUG. L'hypothèse qu'il se retrouve dans une situation analogue est certes très vraisemblable mais celle qu'il agisse de la même manière ne l'est pas, compte tenu de l'analyse a posteriori de l'événement de 20 août 2021 et de celle de ses régulations du mois d'août 2021, dont il a eu connaissance et qui ont mis en évidence les points à impérativement améliorer. En outre, en l'absence d'éléments contraires, rien ne laisse à penser qu'il puisse à nouveau agir sans tenir compte des protocoles à suivre et des remarques qui lui ont été adressées pendant l'enquête et ainsi mettre en péril la santé voire la vie des patients.

Dès lors, si son licenciement, qui constitue la mesure la plus incisive, apparaît apte à atteindre le but visé, soit assurer, en l'écartant de la centrale, la sécurité, la santé et la vie des patients, il n'apparaît pas nécessaire pour l'atteindre. En effet, compte tenu de son expérience de vingt ans dans le domaine spécifique de la régulation, de ses compétences professionnelles reconnues et des remarques de ses supérieurs dont il a pris acte, rien ne permet de considérer qu'il ne serait pas capable de mettre en œuvre correctement les protocoles sur les points d'amélioration soulevés ainsi qu'à remplir les exigences de son poste et fournir des prestations suffisantes. Certes, il n'a pas fourni une prestation suffisante le 20 août 2021, mais les HUG n'allèguent pas, ni a fortiori ne démontrent, que ses agissements dans son ensemble dénoteraient chez lui une impossibilité de fournir les prestations exigées par sa fonction, ce d'autant plus compte tenu de son parcours professionnel sans reproche depuis plus de 20 ans.

La faute commise par le recourant n'était ainsi pas de nature à rendre inacceptable la continuation des rapports de services et la résiliation de ces derniers est donc disproportionnée. Dans ce contexte particulier, les HUG ne pouvaient pas retenir que les manquements observés rendraient la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l’administration et ont abusé de leur pouvoir d'appréciation.

La résiliation des rapports de service du recourant ne reposant pas sur un motif fondé, le recours sera admis.

Dès lors, il n’est pas nécessaire d’examiner si, comme le fait valoir le recourant, l’autorité a enfreint les règles relatives à la procédure de reclassement. Il n'est pas non plus nécessaire de déterminer si l'enquête ayant mené à la rédaction du rapport d'EIG a été menée par les personnes habilitées à cet effet, étant toutefois observé que tel n'apparaît pas être le cas à teneur de la directive intitulée « gestion des EIG et des incidents », approuvée par le comité de direction et en vigueur dès le 1er mars 2011 (version n° 2).

4.             Reste à déterminer les conséquences d’une telle résiliation.

À cet égard, il convient de préciser que le recourant a conclu à sa réintégration, en application de l'art. 31 al. 2 LPAC, dans sa teneur jusqu'au 10 mai 2024, exposée ci-après. Dans la mesure où l'art. 31 LPAC a fait l'objet d'une modification entrée en vigueur le 11 mai 2024, soit après le prononcé de la décision litigieuse et avant celui du présent arrêt, qui ne permet plus à la chambre de céans d'ordonner la réintégration, il convient de déterminer le droit applicable ratione temporis et ainsi de déterminer si celle-ci est encore habilitée à ordonner la réintégration de l'intéressé.

4.1 L'art. 31 al. 2 LPAC, dans sa teneur du 19 décembre 2015 jusqu'au 10 mai 2024, dispose que si la chambre administrative retient que la résiliation des rapports de service ne repose pas sur un motif fondé, elle ordonne à l'autorité compétente la réintégration. Sous la réserve d'une impossibilité objective ou subjective de réintégration, dont la preuve incombe à l'employeur et qui ne peut pas être admise à la légère (ATA/287/2018 du 27 mars 2018 consid. 7e et les références citées), la chambre administrative considère que la réintégration ne dépend pas de la bonne disposition de l'employeur, puisque ce dernier n'a pas de choix à cet égard. Cependant, l’employeur ne devrait pas avoir à réintégrer un employé dans toutes les circonstances, suivant l'ampleur des difficultés auxquelles il est confronté. Ainsi, les conditions-cadre juridiques ou les difficultés d'organisation peuvent rendre impossible une réintégration. En outre, des divergences personnelles entre un employé licencié à tort et son supérieur hiérarchique peuvent être d'une telle gravité, que le rapport de confiance entre ces personnes est définitivement anéanti et qu'une réintégration n'est, dans les faits, plus possible (ATA/287/2018 précité consid. 7e et les références citées).

L'art. 31 al. 2 LPAC a été abrogé avec effet au 11 mai 2024. Depuis cette date, si la chambre administrative de la Cour de justice retient que la résiliation des rapports de service ne repose pas sur un motif fondé ou est contraire au droit, elle peut proposer à l’autorité compétente la réintégration (art. 31 al. 3 LPAC).

L'art. 31 LPAC se trouve dans le chapitre III, intitulé « disposition de procédure et contentieux ».

4.2 En principe, le nouveau droit s'applique à toutes les situations qui interviennent depuis son entrée en vigueur. Selon les principes généraux, sont applicables, en cas de changement de règles de droit, les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques (ATF 137 V 105 consid. 5.3.1). En revanche, si la législation change après la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques, la situation doit rester réglée selon l'ancien droit (ATF 136 V 24 consid. 4.3). Sont réservées les dispositions éventuelles du droit transitoire prescrivant un régime juridique qui s'écarte de ces principes (ATA/554/2021 du 25 mai 2021 consid. 4a et les références citées).

Pour les règles de procédure, en l’absence de dispositions transitoires, la jurisprudence admet que le nouveau droit s’applique immédiatement dans son ensemble à toutes les affaires pendantes, pour autant cependant qu’il reste dans une certaine continuité avec le système antérieur, sans en bouleverser les fondements (ATF 137 II 409 consid. 7.4.5 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 140 n. 406). En revanche, l'ancien droit de procédure continue à gouverner les situations dans lesquelles le nouveau droit de procédure marque une rupture par rapport au système procédural antérieur et apporte des modifications fondamentales à l'ordre procédural (ATF 137 II 409 consid. 7.4.5).

4.3 En l'espèce, les règles posées par l'art. 31 LPAC doivent être considérées comme des règles de procédure. En effet, elles donnent à la chambre de céans des indications sur son pouvoir de décision et la manière d'aborder, une fois le recours tranché uniquement, la question procédurale de la réintégration de celui dont la résiliation des rapports de service ne repose pas sur un motif fondé ou est contraire au droit. Elles ne tranchent donc pas des questions de droit matériel. Cette solution s'impose par ailleurs compte tenu de la systématique de la loi, l'art. 31 LPAC se trouvant dans le chapitre III, intitulé « disposition de procédure et contentieux ».

Depuis le 11 mai 2024, la chambre de céans ne peut plus ordonner la réintégration du fonctionnaire. Dans la mesure où la réintégration pouvait être ordonnée pendant plus de huit ans jusque-là et que la chambre de céans ne peut désormais que la proposer, le nouveau droit marque une rupture par rapport au système procédural antérieur et apporte des modifications fondamentales à l'ordre procédural, l'administration ayant désormais le pouvoir de refuser toute réintégration. Par conséquent, et conformément à la jurisprudence précitée, c'est l'ancien droit de procédure, applicable jusqu'au 10 mai 2014 et avant le prononcé de la décision litigieuse, qui doit s'appliquer au présent cas.

Au vu du texte clair de l’art. 31 al. 2 LPAC dans sa teneur jusqu'à cette date, la chambre administrative doit ordonner la réintégration lorsque, comme en l'espèce, la résiliation des rapports de service ne repose pas sur un motif fondé, sous réserve de circonstances très particulières rappelées ci-avant. À cet égard, si le recourant a certes indiqué, avant la décision querellée, qu'il ne souhaitait plus travailler avec le Dr B______ et C______, il a expressément requis sa réintégration dans ses conclusions et ne les a pas modifiées par la suite. Les HUG ne se sont pas prononcés sur cette question et n'ont a fortiori pas allégué, ni prouvé, une impossibilité objective ou subjective de réintégration. Par conséquent, la chambre administrative ne peut qu’ordonner la réintégration du recourant au sein des HUG dans sa fonction de régulateur au sein de la centrale ou dans une fonction similaire.

5.             Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu, les HUG en étant dispensés de par la loi (art. 87 al. 1 2e phr. LPA). Une indemnité de procédure de CHF 1'500.-sera allouée au recourant, à la charge des HUG (art. 87 al. 2 LPA).

Il sied de préciser que quand bien même le recourant a conclu au versement d’une indemnité de CHF 49'763.75, la chambre de céans ne saurait accéder à cette demande. En effet, l’indemnité allouée, de jurisprudence constante, ne constitue qu’une participation aux honoraires d’avocat et la juridiction saisie dispose par ailleurs d’un large pouvoir d’appréciation quant à la quotité de l’indemnité allouée (ATA/1076/2024 du 10 septembre 2024 consid. 2.3), ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), dès lors que ce dernier plafonne l'indemnité à CHF 10'000.- (ATA/1134/2024 du 27 septembre 2024 et les arrêts cités).

Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15’000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 mars 2024 par A______ contre la décision des Hôpitaux universitaires de Genève du 1er février 2024 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision de résiliation des rapports de travail de A______ du 1er février 2024 ;

ordonne la réintégration de A______ au sein des Hôpitaux universitaires de Genève dans sa fonction de régulateur au sein de la centrale d'appel d'urgence 144 ou dans une fonction similaire ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500.- à A______, à la charge des Hôpitaux universitaires de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Livio NATALE, avocat du recourant, ainsi qu'à Me Marc HOCHMANN FAVRE, avocat des Hôpitaux universitaires de Genève.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Claudio MASCOTTO, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. MICHEL

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :