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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3134/2024

ATA/1340/2024 du 14.11.2024 sur JTAPI/1036/2024 ( MC ) , ADMIS

Recours TF déposé le 18.12.2024, 2C_637/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3134/2024-MC ATA/1340/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 novembre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

COMMISSAIRE DE POLICE recourant

contre

A______ intimé
représenté par Me Dina BAZARBACHI, avocate

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 octobre 2024 (JTAPI/1036/2024)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______1987, est originaire de la République de Guinée.

b. Depuis son arrivée en Suisse, il a été condamné à six reprises, notamment pour infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121 ; trafic de stupéfiants) et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20).

B. a. Après avoir été placé en détention administrative en vue de son renvoi le 12 avril 2019 et s'être vu notifier, le 21 avril 2019, une interdiction d'entrée prononcée à son encontre le 18 avril 2019 par le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) et valable jusqu'au 17 avril 2022, A______ a été transféré en Espagne le 29 avril 2019.

b. Il est revenu en Suisse à une date indéterminée malgré l'interdiction dont il faisait l'objet.

c. Il a été interpellé le 10 janvier 2020 à Genève pour, notamment, séjour illégal et trafic de cocaïne et d'ecstasy.

d. Le 11 janvier 2020, A______ s'est vu interdire par le commissaire de police l’accès à l’ensemble du territoire genevois pour une durée de 12 mois.

e. A______ n'ayant à réitérées reprises pas respecté l'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève, il a été condamné le 18 août 2020 par le Tribunal de police pour, notamment, infraction à l'art. 119 al. 1 LEI, mais également pour infraction à l'art. 19 al. 1 let. d LStup, pour les faits ayant conduit à son interpellation le 10 janvier 2020.

f. Le 30 août 2021, le commissaire de police a prononcé à l'encontre du précité une mesure d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de 18 mois en raison de la vente à un tiers de deux boulettes et un parachute de cocaïne.

g. Par jugement du Tribunal de police du 19 juin 2024, A______ a été déclaré coupable d'infraction à l'art. 19 al. 1 let. d LStup et de séjour illégal. Une mesure d'expulsion judiciaire d'une durée de trois ans a également été prononcée à son encontre sur la base de l'art. 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

h. Le 7 septembre 2024, A______ s'est vu notifier une décision de non‑report d'expulsion judiciaire, après que la possibilité d'être entendu lui eut été donnée le 30 août 2024.

i. Il a été libéré le 14 septembre 2024, puis remis entre les mains des services de police.

j. Le 14 septembre 2024 à 14h23, le commissaire de police a prononcé à l’encontre de A______ une interdiction de quitter le territoire de la commune de Vernier tel que délimité par le plan annexé à ladite décision, pour une durée de douze mois.

Cette décision précisait que, le 28 novembre 2023, la reprise de la demande de soutien en vue de l'identification de l'intéressé avait été initiée auprès du SEM, laquelle était toujours en cours, A______ étant inscrit pour les prochaines auditions centralisées pour la Guinée, qui devaient avoir lieu courant 2024.

C. a. Par acte déposé au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) le 24 septembre 2024, A______ a fait opposition à cette décision.

b. A______ a été convoqué pour l’audience du 26 septembre 2024 devant le TAPI par courriel adressé à son conseil le 24 septembre à 11h37.

c. Lors de l’audience du 26 septembre 2024, ni A______ ni son conseil ne se sont présentés. La représentante du commissaire de police a conclu au rejet de l’opposition et à la confirmation de l’assignation.

d. Par jugement du 26 septembre 2024, le TAPI a rejeté l'opposition et confirmé la décision d'assignation prononcée le 24 septembre 2024.

e. Sur recours de A______, la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) a annulé ce jugement par arrêt du 16 octobre 2024 (ATA/1222/2024).

Ni le précité ni son conseil n'avaient été valablement atteints par la convocation que leur avait adressé le TAPI par le seul courriel du 24 septembre 2024, privant l'intéressé de l'occasion de s'exprimer oralement devant la juridiction de première instance, ce qui constituait une violation de son droit d'être entendu qui ne pouvait être réparée devant la chambre administrative.

La cause était renvoyée au TAPI afin qu'il convoque une audience et rende un nouveau jugement.

D. a. Par courrier au TAPI du 22 octobre 2024 reçu le même jour, le conseil de A______ a relevé que depuis la réception de l'arrêt susmentionné le 18 octobre 2024 à midi, le TAPI n'avait convoqué aucune audience, ce qui entraînait un dépassement du délai légal de 96 heures dans lequel devait être examinée la légalité et l'adéquation d'une assignation territoriale. Le TAPI était ainsi invité à rendre un jugement levant la décision litigieuse.

b. Par courriel du 22 octobre 2024, le TAPI a transmis le courrier susmentionné au commissaire de police en l'invitant à se prononcer avant le 23 octobre 2024 à 16h00.

c. Parallèlement, le TAPI a convoqué les parties pour une audience prévue le 24 octobre 2024, tout en les avertissant que celle-ci serait annulée si, dans l'intervalle, un jugement annulant la mesure d'assignation d'un lieu de résidence était rendu.

d. Dans le délai imparti, le commissaire de police s'est déterminé sur le courrier de A______ du 22 octobre 2024, concluant à ce que le TAPI maintienne l'audience prévue le 24 octobre 2024. En substance, il résultait de la jurisprudence qu'un dépassement du délai prévu par la loi pour le contrôle judiciaire d'une mesure de contrainte n'entraînait pas nécessairement l'annulation de cette dernière, cette question devant être résolue au terme d'une pesée des intérêts en présence. En l'occurrence, le délai de 96 heures dans lequel devait statuer le TAPI n'avait commencé à courir qu'à partir de sa saisine, « soit dès la notification dudit jugement ». Le dépassement du délai de 96 heures devait être relativisé, compte tenu du fait que l'assignation territoriale n'emportait qu'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle et que A______ représentait une menace indéniable pour la sécurité et l'ordre public, étant précisé qu'il n'avait pas respecté son obligation de se présenter tous les mercredis à la police, la première fois le mercredi 18 septembre 2024.

e. Par jugement du 24 octobre 2024, le TAPI a admis l'opposition formée le 24 septembre 2024 et annulé l’assignation à résidence du 14 septembre 2024.

Le TAPI était tenu de statuer dans un délai de 96 heures courant dès sa saisine, selon l'art. 9 al. 1 let. a LaLEtr. Cette saisine était celle qui découlait de l'opposition elle-même, comme cela découlait logiquement de la LaLEtr, puisque le TAPI ne pouvait être amené à contrôler la légalité et l'adéquation d'une assignation d'un lieu de résidence que lorsqu'il était saisi par l'opposition formée contre cette décision par son destinataire (art. 8 al. 1 LaLEtr).

Par conséquent, contrairement à ce que soutenait le commissaire de police, ce n'était pas la notification de l'ATA/1122/2024 qui constituait la saisine du TAPI, mais bien la réception par le TAPI de l'opposition formée par A______ à l'encontre de la décision litigieuse. Le moment où débutait le délai prévu par l'art.  9 al. 1 let. a LaLEtr était indissociablement lié à la réception de l'opposition par le TAPI, car la ratio legis de la disposition précitée était précisément d'offrir à l'opposant la garantie que la restriction apportée à sa liberté sera examinée dans un (court) délai déterminé par le moment à partir duquel le TAPI était en mesure de traiter son opposition. Ce délai ne devait ainsi pas souffrir de retard lié par exemple à des questions d'organisation interne du TAPI, ou, de manière générale, être exposé à des aléas qui échappaient à la maîtrise de l'opposant.

Certes, la jurisprudence avait admis qu'un dépassement des délais prévus par la loi pour le contrôle des mesures de contrainte prévues par la LEI n'avait pas pour conséquence nécessaire l'annulation de la décision querellée. Cela ne pouvait cependant amener à considérer que n'importe quel dépassement du délai prévu par la loi serait admissible et que la décision litigieuse devrait dans tous les cas être maintenue. Non seulement une telle interprétation sortirait-elle du cadre de la jurisprudence susmentionnée, qui mettait en avant une pesée des intérêts au cas par cas, mais elle conduirait à réduire les délais légaux à de simples délais d'ordre, ce qu'à l'évidence ils n'étaient pas vu les enjeux auxquels ils étaient liés.

En l'occurrence, on ne parlait pas d'un dépassement du délai légal se comptant en heures ou même en quelques jours, mais équivalant pratiquement à un mois. Il ne pouvait y avoir de guérison d'un tel dépassement, étant rappelé qu'en tout état, la présente affaire ne concernait pas l'auteur de crimes graves.

E. a. Par acte posté le 4 novembre 2024 et reçu le 5 novembre 2024, le commissaire de police a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant à son annulation et au renvoi de la cause au TAPI pour audition des parties et nouveau jugement.

Le jugement du 26 septembre 2024 avait été rendu dans le délai prévu par l'art. 9 al.  1 let. a LaLEtr. L'arrêt de la chambre administrative du 16 octobre 2024 avait annulé le jugement précité et n'avait pas constaté sa nullité ; il avait renvoyé la cause au TAPI pour tenue d'une audience et nouveau jugement. C'était de manière inexpliquée que le TAPI n'avait pas tenu d'audience dans les 96 heures suivant la notification de l'arrêt de la chambre administrative, laquelle n'aurait pas manqué d'annuler elle-même la décision d'assignation à résidence si les délais légaux ne pouvaient plus être respectés.

La situation rencontrée était inédite, et le TAPI ne tenait aucunement compte du fait qu'elle découlait exclusivement de ses propres manquements.

b. Le 8 novembre 2024, A______ a conclu au rejet du recours.

Le TAPI n'avait encore pas examiné la légalité et l'adéquation de la décision d'assignation à résidence le concernant. Il était ainsi inutile de se questionner sur le point de départ du délai légal prévu par l'art. 9 al. 1 let. a LaLEtr, dès lors que ledit délai était quoi qu'il en fût largement dépassé.

c. Sur ce, la cause a été gardée à juger.


 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Le litige porte sur la décision du TAPI d'annuler, après annulation de son premier jugement et renvoi de la cause par la chambre de céans, la décision d'assignation à résidence litigieuse pour non-respect du délai de l'art. 9 al. 1 let. a LaLEtr.

2.1 La compétence d’ordonner l'assignation à un lieu de résidence incombe au canton qui exécute le renvoi ou l’expulsion (art. 74 al. 2 LEI). Ces mesures peuvent faire l’objet d’un recours auprès d’une autorité judiciaire cantonale ; le recours n’a pas d’effet suspensif (art. 74 al. 3 LEI).

2.2 Pour les cas de détention administrative (art. 75 à 78 ss LEI), c'est la LEI elle‑même qui prévoit que la légalité et l’adéquation de la détention doivent être examinées dans un délai de 96 heures par une autorité judiciaire (art. 80 al. 2 LEI).

Il s'agit d'un délai impératif qui s'impose de manière contraignante aux autorités (ATF 137 I 23 consid. 2.4.5). La violation du délai maximal légal est susceptible de conduire à la libération de l'étranger, à moins qu'un intérêt public prépondérant ne s'y oppose (ATF 122 II 154 consid. 3a). À cet égard, le Tribunal fédéral retient que toute violation du délai impératif fixé à l'art. 80 al. 2 LEI n'entraîne pas nécessairement la libération de l'étranger détenu au titre des mesures de contrainte ; cela dépend des circonstances du cas d'espèce. Il faut notamment tenir compte de l'importance de la règle violée pour la sauvegarde des droits de l'intéressé. Par ailleurs, l'intérêt à garantir l'efficacité d'un renvoi peut s'opposer à une remise en liberté immédiate. Cet intérêt pèse d'un poids tout particulier et peut l'emporter, dans la balance, lorsque l'étranger constitue un danger pour l'ordre et la sécurité publics (arrêt du Tribunal fédéral 2C_992/2014 du 20 novembre 2014 consid. 5.1 et les arrêts cités).

2.3 Les interdictions de quitter un territoire assigné ou de pénétrer dans une région déterminée peuvent faire l'objet d'une opposition auprès du TAPI, dans un délai de 10 jours à compter de leur notification, pour contrôle de leur légalité et de leur adéquation (art. 8 al. 1 LaLEtr).

Le TAPI examine la légalité et l'adéquation de l'assignation territoriale dans les 96 heures au plus après sa saisine en cas d'interdiction de quitter un territoire assigné (art. 9 al. 1 let. a LaLEtr). Il peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police (art. 9 al. 1 2e phr. LaLEtr).

Le recours à la chambre administrative doit être formé par écrit dans les 10 jours qui suivent la notification de la décision attaquée ; il n’a pas d’effet suspensif (art. 9 al. 1 LaLEtr). La chambre administrative statue dans les 10 jours qui suivent sa saisine ; elle est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle (art. 9 al. 2 LaLEtr). Elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; le cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger. Elle notifie sa décision motivée à l’étranger, à son mandataire, ainsi qu’aux autorités concernées (art. 9 al. 3 LaLEtr).

2.4 L'art. 29a de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) donne à toute personne le droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire jouissant d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit, la Confédération et les cantons pouvant, par la loi, exclure l'accès au juge dans des cas exceptionnels. Cette norme étend donc le contrôle judiciaire à toutes les matières, y compris aux actes de l'administration, en établissant une garantie générale de l'accès au juge plus large que celle qui découle de l'art. 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH – RS 0.101 ; ATF 149 I 146 consid. 3.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_584/2023 du 28 mars 2024 consid. 2.1). Le droit au contrôle judiciaire garanti par l'art. 29a Cst. n'existe toutefois que dans le cadre des règles de procédure en vigueur (ATF 143 I 344 consid. 8.2 ; 141 I 172 consid. 4.4 ; 137 II 409 consid. 4.2).

2.5 Le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 et 30 Cst.) est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 IV 302 consid. 3.1 ; 135 I 187 consid. 2.2). Selon la jurisprudence, sa violation peut cependant être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; 135 I 279 consid. 2.6.1). Toutefois, une telle réparation doit rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte qui n'est pas particulièrement grave aux droits procéduraux de la partie lésée (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1).

2.6 Si la juridiction administrative admet le recours, elle réforme la décision attaquée ou l’annule ; si elle le juge nécessaire, elle peut renvoyer l’affaire à l’autorité qui a statué pour nouvelle décision (art. 69 al. 3 LPA ; voir aussi l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_227/2023 du 15 avril 2024 consid. 7.1).

Conformément au principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, l'autorité à laquelle le Tribunal fédéral renvoie une cause est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral. Cette autorité est donc liée par ce qui a déjà été définitivement tranché par le Tribunal fédéral et par les constatations de fait qui n'ont pas été attaquées devant lui ou qui l'ont été sans succès (ATF 148 I 127 consid. 3.1 ; 143 IV 214 consid. 5.2.1). Ce raisonnement vaut, mutatis mutandis (les arrêts de seconde instance cantonale n'étant pas, au contraire de ceux du Tribunal fédéral, immédiatement définitifs), également pour les arrêts de renvoi de la deuxième instance cantonale à la première.

2.7 Dans différents domaines, un jugement ou un arrêt annulé par l'instance supérieure peut néanmoins déployer certains effets juridiques du fait qu'il a été rendu. Il en va notamment ainsi du respect de la prescription pénale, puisque même si le jugement de première instance est annulé par la cour d'appel, le prononcé du jugement aura arrêté la prescription de l'action pénale (art. 97 al. 3 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0 ; ATF 143 IV 450 consid. 1.2 et les arrêts cités).

2.8 En l'espèce, l'ATA/1222/2024 a constaté la violation du droit d'être entendu de l'intimé et a renvoyé la cause au TAPI afin qu'il convoque une audience et rende un nouveau jugement. Or, le TAPI ne s'est pas conformé à ces instructions dès lors qu'il n'a pas procédé à une audience, alors même que les juridictions inférieures sont tenues par les arrêts de renvoi qui leur sont adressés.

Par ailleurs, le délai de 96 heures prévu à l'art. 9 al. 1 let. a LaLEtr a bien été respecté, dès lors que l'opposition a été déposée le 24 septembre 2024 et que le jugement a été rendu le 26 septembre 2024. Le point de vue développé dans le jugement du TAPI, à savoir que l'annulation dudit jugement a fait que le délai a continué à courir, ne peut être suivi.

En effet, cette manière de voir affaiblit, voire invalide partiellement la protection juridique associée aux mesures de contrainte. Le législateur genevois a prévu deux instances judiciaires pour ce type de contentieux, soit le TAPI qui doit statuer dans les 96 heures dès le dépôt de l'opposition, et la chambre administrative qui dispose de 10 jours pour se prononcer sur un éventuel recours. Dès lors, si l'on adopte la position défendue dans le jugement attaqué, une annulation du jugement par la chambre de céans avec renvoi à la première instance judiciaire – comme en l'espèce – aboutira presque toujours à une annulation de la mesure de contrainte initiale, même dans le cas inverse de celui d'espèce, soit celui où le TAPI aurait annulé la mesure tout en ne convoquant pas régulièrement le commissaire de police – cas dans lequel une partie n'aurait ainsi pas d'accès effectif à le deuxième instance pourtant prévue par le législateur.

On ne saurait dès lors retenir que l'annulation du jugement de première instance a eu pour effet de continuer à faire courir le délai de 96 heures, qui a bien été respecté, tout comme celui de 10 jours pour statuer en seconde instance cantonale. Il convient donc d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la cause au TAPI, qui devra convoquer une audience et statuer sur le bien-fondé et l'adéquation de la mesure d'assignation à un territoire déterminé.

La question de savoir si un nouveau délai de 96 heures commence à courir à partir de la notification au TAPI de l'arrêt de la chambre de céans est exorbitante au présent litige.

3.             La procédure étant gratuite (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03), aucun émolument de procédure ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 novembre 2024 par le commissaire de police contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 octobre 2024 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement précité ;

renvoie la cause au Tribunal administratif de première instance pour tenir une audience et prononcer un nouveau jugement ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt au commissaire de police, à Me Dina BAZARBACHI, avocate de A______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFFINEN, Eleanor McGREGOR, Michèle PERNET, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

N. GANTENBEIN

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :