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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/800/2024

ATA/759/2024 du 25.06.2024 ( AIDSO ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/800/2024-AIDSO ATA/759/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 juin 2024

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre


SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES intimé



EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1955 (ci-après : le bénéficiaire), est marié depuis le 19 septembre 2012 à B______, née le ______ 1993.

Rentier de l’assurance-vieillesse et survivants (ci-après : AVS), il perçoit des prestations complémentaires fédérales et cantonales à l’AVS/AI (ci‑après : PC) depuis le 1er janvier 2019.

b. Selon le jugement du Tribunal civil de première instance du 14 mai 2009, A______ doit contribuer à l’entretien d’C______, né le ______ 2007 d’une précédente relation (ci-après : l’enfant), à hauteur de CHF 700.- par mois dès l’âge de 13 ans.

Le bénéficiaire perçoit une rente complémentaire pour l’enfant de CHF 701.- par mois depuis le 1er janvier 2021.

c. L’épouse exerce une activité indépendante dont elle tire un bénéfice net de CHF 515.- par année. Depuis août 2023, elle exerce également une activité dépendante à 60%, dont le salaire net s’est élevé à CHF 1'000.90 en août, à CHF 3'004.70 en septembre, à CHF 3'726.35 en octobre, à CHF 3'425.50 en novembre et à CHF 4'534.60 en décembre 2023.

B. a. En juin 2023, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a initié une révision du dossier de A______ et constaté que son épouse exerçait une activité lucrative indépendante.

Les 22 juin, 28 septembre et 5 décembre 2023 ont été rendues des décisions en matière de PC tenant compte des gains de l’épouse, contre lesquelles le bénéficiaire a formé opposition.

Le 28 septembre 2023, le SPC a parallèlement rendu une décision de refus en matière de prestations d’aide sociale, contre laquelle opposition a aussi été formée.

b. Par décisions du 31 janvier 2024, statuant en matière de PC d’une part, et de prestations d’aide sociale d’autre part, le SPC a rejeté les oppositions. Dans l’examen de celle formée contre la décision du 28 septembre 2023 en matière de prestations d’aide sociale, il s’est appuyé sur des plans de calcul de prestations pour quatre périodes définies à partir du 1er juillet 2023. Il en ressortait que les ressources du couple, incluant les PC, étaient supérieures à leurs dépenses reconnues.

Du 1er juillet au 31 décembre 2023, ces dernières ont été arrêtées à CHF 53'580.- par année, comprenant les besoins de base de CHF 22'620.-, le loyer et les charges locatives de CHF 17'796.-, les cotisations AVS de CHF 539.70 et les primes d’assurance obligatoire de soins de CHF 12'624.-.

Dès le 1er janvier 2024, les dépenses reconnues ont été portées à CHF 55'429.-, tenant compte de besoins de base de CHF 23'076.- et de primes d’assurance obligatoire de soins de CHF 14'017.20.

Quant au revenu déterminant, il a été arrêté annuellement à :

-               CHF 71'171.- pour la période du 1er au 30 juillet 2023, comprenant les PC (subsides LAMal compris) de CHF 49'627.-, la rente AVS de CHF 21'024.- (ne comprenant pas la rente complémentaire pour enfant de CHF 8'412.-) et les gains de l’épouse de CHF 515.- ;

-               CHF 73'574.- pour la période du 1er au 31 août 2023, comprenant les PC de CHF 40'019.-, la rente AVS de 21'024.-, les gains de l’épouse CHF 12'525.- et les intérêts de l’épargne de CHF 5.50 ;

-               CHF 79'886.- pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2023, comprenant les PC de CHF 14'609.-, la rente AVS de CHF 21'024.-, les gains de l’épouse de CHF 44'248.- et les intérêts de l’épargne de CHF 5.50 ;

-               CHF 73'574.- pour la période dès le 1er janvier 2024, comprenant les PC de CHF 16’002.-, la rente AVS de 21'024.-, les gains de l’épouse de CHF 44'288.- et les intérêts de l’épargne de CHF 5.50.

Il en résultait, pour ces quatre périodes, une différence négative entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant de respectivement CHF 17'591.-, CHF 19'994.‑, CHF 26'306.- et CHF 25'891.-.

C. a. Par acte posté le 1er mars 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales) contre les décisions du 31 janvier 2024.

Il a conclu principalement à leur annulation et à l’allocation de PC complètes à lui‑même, son épouse et son enfant dès le mois d’octobre 2023, incluant un paiement rétroactif de CHF 9'329.05 et de CHF 4'664.55 pour la période de septembre à décembre 2023 et de janvier à mars 2024. Il a conclu subsidiairement à l’allocation de PC complètes tenant compte de l’inexistence de gains hypothétiques de son épouse.

Dans le calcul des prestations d’aide sociale, les dépenses reconnues ne comprenaient pas la pension alimentaire effectivement payée pour l’enfant de CHF 9'610.-, soit mensuellement CHF 700.- de contribution d’entretien et CHF 110.- pour des cours de boxe thaïe.

Le salaire net de l’épouse devait être arrêté à CHF 39'828.- par année à partir du 1er septembre 2023 ou, encore mieux, à CHF 15'595.- pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2023, correspondant à ses gains effectifs. Lui-même n’avait reçu au titre de PC que CHF 3'165.- de septembre à décembre 2023, rien en janvier 2024 et que CHF 166.- en février 2024.

L’aide sociale s’avérait toutefois hypothétique puisque d’un montant comparable et d’un caractère subsidiaire aux PC, lesquelles étaient effectivement dues.

b. La chambre des assurances sociales, qui a enregistré le recours sous la procédure A/799/2024, a parallèlement transmis celui-ci à la chambre administrative la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) en vue de son examen en tant qu’il portait sur les prestations d’aide sociale, ce qui a donné lieu à l’ouverture de la présente procédure.

c. Le SPC a conclu au rejet du recours.

Dans les dépenses reconnues, le forfait mensuel pour l’entretien avait été arrêté à CHF 1'540.- (CHF 1'006.- × 1.53 [2 personnes]) de juillet à décembre 2023 et à CHF 1'578.- (CHF 1'031.- × 1.53 [2 personnes]) à partir du 1er janvier 2024, auxquels s’ajoutait un supplément d’intégration de CHF 345.- (CHF 225.- × 1.53 [2 personnes]. Ces montants représentaient CHF 22'620.- pour l’année 2023 et CHF 23'076.- pour l’année 2024.

Le loyer annuel, comprenant le loyer net de CHF 1'353.- et les charges de CHF 130.-, représentait CHF 17'796.- par année.

Il avait été tenu compte des cotisations sociales de l’épouse pour personnes sans activité lucrative, à hauteur de CHF 539.70 par an, auxquelles cette dernière avait été astreinte quoiqu’elle exerçât une activité salariée depuis le 25 août 2023.

Les montants annuels des primes d’assurance-maladie, de CHF 12'624.- pour l’année 2023 et de CHF 14'017.20 pour l’année 2024, résultaient des primes mensuelles du bénéficiaire et de l’épouse, de CHF 508.60 et CHF 543.40 pour 2023, et de CHF 593.50 et CHF 574.60 pour 2024.

Le montant de la contribution à l’entretien de l’enfant n’avait pas été pris en considération puisqu’il était inférieur à celui de CHF 701.- de la rente AVS pour enfant perçue par le bénéficiaire.

Les revenus déterminants comprenaient la rente AVS du bénéficiaire de CHF 1'752.- par mois, soit CHF 21'024.- par année. Les gains tirés par l’épouse de son activité indépendante s’élevaient à CHF 515.- par année. Ceux résultant de son activité salariée représentaient, après annualisation sur la base des fiches de salaire, CHF 12'010.80 en août 2023 et CHF 43'773.45 dès le 1er septembre 2023. Le montant annualisé de CHF 5.50 au titre d’intérêts sur l’épargne portait sur la part sociale de CHF 200.- détenue par le bénéficiaire auprès de la banque RAIFFEISEN.

Il avait été tenu compte dans les revenus des PC, contrairement à la jurisprudence de la Cour de justice résultant de l’ATA/265/2024 du 27 février 2024. Les PC ne faisaient en effet pas partie des revenus exclus de manière exhaustive par l’art. 22 al. 2 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04). L’art. 4 de la loi sur le revenu déterminant unifié du 19 mai 2005 (LRDU - J 4 06), auquel renvoyait l’art. 22 al. 1 LIASI, ne comportait qu’une liste exemplative de sources de revenus à prendre en considération. Il n’importait dès lors pas que les PC n’y figurent pas, ce d’autant moins que l’art. 4 LRDU mentionnait la prise en considération de l’ensemble des revenus. L’art. 9 al. 1 LIASI indiquait de surcroît que les prestations d’aide financières étaient subsidiaires à toute autre source de revenus, en particulier aux prestations d’assurances sociales fédérale et cantonales. Les normes et les commentaires de la conférence suisse des institutions d’action sociale (ci-après : les normes CSIAS ; les commentaires CSIAS), non contraignants mais largement reconnus, confirmaient que toutes les ressources financières devaient être prises en considération dans le calcul des prestations de l’aide sociale, y compris les PC et autres allocations que les rentes AVS.

d. Le bénéficiaire a répliqué, sans modifier ses conclusions concernant les prestations d’aide sociale, et requérant en sus le prononcé d’une amende contre le SPC, l’un de ses juristes, sa directrice et le Conseiller d’État en charge du département de la cohésion sociale.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la chambre des assurances sociales puis transmis à la chambre administrative, compétente en matière d’aide sociale, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 3 al. 2 et 52 LIASI).

Il est rappelé qu’en tant qu’il concerne le calcul des PC, le recours est pendant devant la chambre des assurances sociale dans la procédure A/799/2024.

2.             Le recourant conteste certains éléments des plans de calcul du SPC.

2.1 L’art. 8 al. 1 LIASI expose que la personne majeure qui n’est pas en mesure de subvenir à son entretien ou à celui des membres de la famille dont il a la charge a droit à des prestations d’aide financière.

Selon l’art. 9 al. 1 LIASI, les prestations d’aide financière sont subsidiaires à toute autre source de revenu, aux prestations découlant du droit de la famille ou de loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe du 18 juin 2004 (loi sur le partenariat, LPart - RS 211.231), ainsi qu’à toute autre prestation à laquelle le bénéficiaire et les membres du groupe familial ont droit, en particulier aux prestations d’assurances sociales fédérales et cantonales, et aux prestations communales, à l’exception des prestations occasionnelles.

L’art. 13 al. 1 LIASI précise que les prestations d’aide financière sont accordées au demandeur et au groupe familial dont il fait partie (al. 1). Le groupe familial est composé du demandeur, de son conjoint, concubin ou partenaire enregistré vivant en ménage commun avec lui, et de leurs enfants à charge (al. 2). Les enfants à charge sont les enfants mineurs ainsi que les enfants majeurs jusqu’à l’âge de 25 ans révolus pour autant qu’ils soient en formation ou suivent des études régulières et qu’ils fassent ménage commun avec le demandeur (al. 3 1ère phrase).

Aux termes de l’art. 21 LIASI, ont droit aux prestations d’aide financière les personnes dont le revenu mensuel déterminant n’atteint pas le montant destiné à la couverture des besoins de base et dont la fortune ne dépasse pas les limites fixées par le règlement d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01 ; al. 1). Font partie des besoins de base (al. 2) : le forfait pour l'entretien fixé par le RIASI (let. a.) ; le loyer ainsi que les charges […] (let. b) ; la prime d’assurance-maladie obligatoire des soins […] (let. c).

L’art. 22 LIASI prescrit de prendre en compte les revenus et les déductions sur le revenu prévus aux art. 4 et 5 LRDU, sous réserve des exceptions figurant aux al. 2 et 3 (al. 1), lesquelles ne sont pas pertinentes en l’espèce. Sont notamment déduites sur le revenu les contributions d’entretien versées à l’un des parents pour les enfants sur lesquels il a l’autorité parentale dans les limites et aux conditions fixées par le RIASI (al. 4). Sont assimilées aux ressources de l’intéressé celles des membres du groupe familial (al. 6).

Selon l’exposé des motifs relatifs aux 22 et 23 LIASI, ces dispositions ont été adaptées de manière à faire référence à la LRDU (MGC 19-20 décembre 2013, session III, p. 31).

Aux termes de l’art. 24 LIASI, le revenu déterminant le droit aux prestations d'aide financière est égal au revenu calculé en application de l’art. 22 LIASI, augmenté d'un quinzième de la fortune calculée en application de l’art. 23 LIASI.

2.2 La LRDU s’applique à toutes les prestations sociales sous condition de ressources qui font l’objet de l’art. 13 LRDU (art. 2 al. 1 LRDU). Elle a pour principe fondateur une méthode de calcul unique pour toutes les prestations sociales sous condition de ressources versées par l’État de Genève, compatible avec l’ensemble d’entre elles (MGC [En ligne], Séance 11 du jeudi 19 décembre 2013 à 14h, Disponible sur https://ge.ch/grandconseil/data/texte/PL11326.pdf p. 13, 15 et 17 [consulté le 20 juin 2024]).

L’art. 13 al. 1 LRDU définit dans quel ordre doivent être demandées les prestations catégorielles et de comblement (let. a et b). Sont compris dans les prestations catégorielles les subsides de l’assurance-maladie (let. a, ch. 1), et dans les prestations de comblement les PC (let. b, ch. 2 à 5), ainsi que, en dernière position, l’aide sociale aux rentiers AVS/AI (ch. 9).

Aux termes de l’art. 3 LRDU, le revenu déterminant unifié sert de base pour le calcul du droit à une prestation au sens des art. 8 à 10 LRDU (al. 1). Les éléments énoncés aux art. 4 à 7 LRDU (chapitre II) constituent le socle du revenu déterminant unifié (MGC précité p. 20). Ils se définissent conformément à la législation fiscale genevoise, en particulier la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08). Sont réservées les exceptions prévues par la LIASI, par la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10) et la LRDU (al. 2). Les prestations mentionnées à l’art. 13 LRDU s’ajoutent au socle du revenu déterminant unifié, selon l’art. 8 al. 3 LRDU (al. 3) Pour la définition de l’unité économique de référence dont fait partie le demandeur, la loi spéciale fondant la prestation demandée s’applique (al. 4).

Aux termes de l’art. 4 al. 1 LRDU, le socle du revenu déterminant unifié comprend l’ensemble des revenus. Il s’agit notamment du produit de l'activité lucrative dépendante au sens de l'art. 18 LIPP (let. a), du produit de l'activité lucrative indépendante au sens des art. 19, 20 et 21 LIPP (let. b) et des prestations provenant de la prévoyance au sens de l’article 25 LIPP, à l’exclusion de l’allocation pour impotent et de la contribution d’assistance au sens des dispositions de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10) et de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20 ; let. f). Le socle du revenu déterminant unifié comprend également les autres prestations sociales non comprises à l’art. 13 LRDU (let. h).

Les art. 8 ss LRDU concernent le calcul du revenu déterminant unifié (chapitre IIA ; MGC précité, p. 22). Ce calcul est individuel. Il s’applique aux personnes majeures et à l’ensemble des prestations sociales visées à l’art. 13 LRDU (art. 8 al. 1 LRDU). Lorsqu’une prestation catégorielle ou de comblement est octroyée en application de la hiérarchie des prestations sociales visée à l’art. 13 LRDU, son montant s’ajoute au socle du revenu déterminant unifié […] et le nouveau montant sert de base de calcul pour la prestation suivante (art. 8 al. 3 LRDU).

Plus généralement, conformément à l’art. 11 LRDU, les prestations sociales doivent être demandées, accordées ou refusées dans l’ordre prévu à l'art. 13 LRDU (al. 1). En l’absence de décision sur la prestation se situant avant dans la hiérarchie et à laquelle le demandeur peut prétendre, ce dernier n’obtient en principe pas la prestation suivante dans la hiérarchie (al. 2). Si une prestation demandée est obtenue, il en est tenu compte dans le revenu servant de base de calcul pour la prestation suivante (al. 3).

2.3 En l’espèce, le recourant et l’épouse forment une unité économique à l’aune de l’art. 13 LIASI, de sorte que l’autorité intimée a dûment pris en considération les revenus et besoins de base de l’un et de l’autre. Le calcul du forfait pour l’entretien (art. 2 al. 1 let. a RIASI), supplément d’intégration inclus, du loyer et des primes d’assurance n’est pas contesté. Le recourant invoque vainement en sus des frais relatifs à l’entretien de l’enfant. Celui-ci ne fait en effet pas ménage commun avec lui, et le recourant perçoit une rente complémentaire AVS pour enfant couvrant le montant de la contribution due à l’entretien du précité.

Dans le calcul du revenu déterminant, le recourant critique la fixation des gains tirés par l’épouse de son activité dépendante dès le 1er septembre 2023, considérant qu’ils devraient être arrêtés à CHF 39'828.-, voire même à CHF 15'595.-, soit au montant limité à ce qu’elle a concrètement perçu en 2023 au titre de salariée. Or, le montant arrêté par l’autorité intimée dans sa réponse, de CHF 43'773.45 pour la période dès le 1er septembre 2023, n’est pas critiquable, puisque légèrement inférieur à la moyenne annualisée des salaires nets effectivement perçus entre septembre et décembre 2023 ([CHF 3'004.70 + CHF 3'726.35 + CHF 3'425.- + CHF 4'534.-] ÷ 4 mois × 5 mois = CHF 44'070.15). Il ne se justifie pas de tenir compte du montant inférieur perçu au mois d’août 2023, et encore moins de ne pas annualiser les gains de l’épouse, les plans de calcul ayant tous été réalisés sur une base annuelle.

Le recourant ne conteste à juste titre pas que les PC priment l’aide sociale et qu’elles doivent en conséquence être prises en considération dans le calcul du revenu déterminant.

La LIASI définit en effet expressément l’aide sociale comme subsidiaire à tout autre revenu, en y incluant spécifiquement les prestations des assurances sociales fédérales et cantonales. La LRDU, qui s’applique à toutes les prestations sociales sous conditions, dont l’aide sociale (art. 2 al. 1 et 13 al. 1, let. b, ch. 9 LRDU), prévoit expressément la prise en considération des PC au-delà du socle du revenu déterminant (art. 13 al. 1, let. b, ch. 2 à 5). Il découle plus spécifiquement des art. 3 al. 3, 8 al. 3 et 13 al. 2 LRDU que l’aide sociale aux rentiers se situe en dernière position de la hiérarchie des prestations sociales ; le revenu déterminant pertinent pour son calcul doit dès lors intégrer les montants de toutes les autres prestations sociales, soit en particulier ceux des PC. L’art. 3 al. 2 LRDU réserve certes l’application de la LIASI, mais seulement en référence à la définition du socle du revenu déterminant (art. 4 à 7 LRDU), et non aux prestations sociales énumérées à l’art. 13 LRDU, comprenant les PC, lesquels s’ajoutent en tous les cas audit socle. L’art. 22 al. 1 LIASI renvoie aux art. 4 et 5 LRDU, mais sans exclure l’application de l’art. 13 LRDU. Ce renvoi, suivi d’une réserve des exceptions prévues aux alinéas suivants, vise ainsi à souligner que la LIASI prévoit des déductions et des exclusions spécifiques pour définir le socle du revenu déterminant (cf. art. 22 al. 2 à 5 LIASI versus art. 5 LRDU ; cf. également la définition de la fortune prise en compte selon l’art. 23 LIASI et son intégration au revenu selon l’art. 24 LIASI, s’écartant de celles définies aux art. 6, 7 et 8 al. 2 LRDU), sans déroger pour le surplus à la LRDU, comme le confirme l’extrait de l’exposé des motifs y relatif.

Certes, selon la jurisprudence citée par l’autorité intimée (ATA/265/2024 du 27 février 2024 consid. 4, renvoyant à l’ATA/213/2023 du 7 mars 2023 consid. 2.6), l’art. 8 al. 3 LRDU ne s’applique pas au calcul du revenu déterminant pour les prestations d’aide sociale. L’art. 24 LIASI, lex specialis, fait uniquement référence au revenu déterminant calculé en application de l’art. 22 LIASI, augmenté d’un quinzième de la fortune calculée en application de l’art. 23 LIASI. Contrairement à l’art. 8 LRDU, l’art. 24 LIASI n’inclut pas les prestations de comblement dans le calcul du revenu déterminant.

Il résulte toutefois de l’interprétation de la lettre et de la systématique de la LIASI et de la LRDU que, si les art. 22 à 24 LIASI, au titre de lex specialis, dérogent bien aux art. 4 à 7 et 8 al. 2 LRDU, ils ne concernent que le socle du revenu déterminant. Doit ensuite y être ajouté le montant des prestations catégorielles ou de comblement mentionnées à l’art. 13 LRDU, selon l’ordre prévu par cette norme, conformément à l’art. 8 al. 3 LRDU. Contrairement à la jurisprudence précitée, il y a donc lieu d’admettre que la LIASI ne déroge pas à cette règle, laquelle s’applique à l’ensemble des prestations sociales visées à l’art. 13 LRDU (art. 8 al. 1 LRDU). La solution inverse n’est en outre pas compatible avec le caractère subsidiaire de l’aide sociale, consacré par plusieurs dispositions des deux lois (art. 9 al. 1 LIASI, art 8 al. 3, 11 et 13 al. 1 LRDU).

Aussi, en l’espèce, le montant des PC doit être intégré au revenu déterminant.

Les PC, contestées, doivent certes encore être examinées par la chambre des assurances sociales. En tenant toutefois compte de leurs montants, tels qu’arrêtés en l’état par l’autorité intimée, dans les revenus déterminants du recourant et de l’épouse, il apparaît que ceux-ci dépassent la couverture de leurs besoins de base, de sorte que le recourant ne peut pas prétendre à des prestations d’aide sociale.

3.             Il ne sera pour le surplus pas donné suite à ses conclusions visant le prononcé d’une amende contre l’autorité intimée, certains de ses membres ou le Conseiller d’État dont elle dépend, irrecevables conformément à la jurisprudence constante de la chambre de céans (ATA/439/2022 du 26 avril 2022 consid. 12a). L’autorité et les personnes précitées ne revêtent de toute manière pas la qualité de recourantes et aucun emploi abusif de la procédure ne peut leur être imputé (art. 88 LPA).

Mal fondé, le recours sera rejeté.

 

4.             La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 3 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, le recourant ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 al. 1 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er mars 2024 par A______ contre la décision du service des prestations complémentaires du 31 janvier 2024 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu'au service des prestations complémentaires.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, juges.

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. MAZZA

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :