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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/989/2022

ATA/464/2023 du 02.05.2023 sur JTAPI/1453/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/989/2022-PE ATA/464/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 mai 2023

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Me Mirolub Voutov, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23  décembre 2022 (JTAPI/1453/2022)


EN FAIT

A. a. Monsieur A______, né le ______ 1967, ressortissant du Brésil, réside en Suisse depuis trente ans selon ses déclarations. Il est arrivé dans le canton de Berne où il a obtenu des autorisations de courte durée.

b. Le 22 août 2007, à Fribourg, M. A______ a épousé
Madame B______, ressortissante portugaise titulaire d'une autorisation d'établissement à Bienne. Le 29 août 2008, il a été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial par le canton de Berne. Cette autorisation est échue depuis le 28 août 2013. Le divorce de Monsieur et Madame AB______ est entré en force le 24 septembre 2013.

Le 6 juillet 2015, l'office d'État civil de Chêne-Bougeries a classé sans suite la demande d'ouverture d'un dossier de mariage entre M. A______ et Madame C______, née le ______ 1996, ressortissante brésilienne, titulaire d’une autorisation de séjour, aujourd’hui échue. Le couple avait la possibilité d'introduire une nouvelle procédure préparatoire de mariage dès la production d'un document constatant le séjour légal en Suisse de M. A______.

c. Lors d’une déclaration à la police, le 16 mars 2020, M. A______ a indiqué être père de plus de vingt enfants. Il ressort notamment du dossier les descendants suivants :

- D______, laquelle est aujourd’hui mère d’un garçon, domiciliés à Büren an der Aare ;

- E______, domicilié à Bienne ;

- F______, domiciliée à Nidau, mère de deux filles ;

- G______ ;

- H______, né le ______ 1994 à Berne de l’union de M. A ______ avec Madame I______, citoyenne suisse ;

- J______, né le ______ 2003 à Bienne de son union avec Madame B______ ;

- K______, née le ______ 2006 à Genève de son union avec Mme B______ ;

- L______, née le ______ 2014 à Genève de son union avec Madame C______. M. A______ l’a reconnue le 22 juillet 2016 ;

- M______, né le ______ 2017 à Genève de son union avec Mme C______ ; selon l'attestation du Centre de consultation spécialisé en autisme datée du 12 février 2020, M______ présentait un trouble du spectre autistique et un retard important au niveau communicationnel et socio-émotionnel. Il bénéficiait de la prise en charge quotidienne et régulière par son père, lequel était très impliqué dans le suivi de son enfant et avait un rôle très actif dans la prise en charge de son fils. Parallèlement, le père de M______ s'occupait de l'enfant à plein temps et était suivi en guidance parentale dans le centre.

- N______, née le ______ 2018 à Genève de son union avec Mme C______ ;

- O______, née le ______ 2019 à Genève de son union avec Mme C______.

Les quatre enfants LMNO______ et leur mère ont fait l’objet d’une décision de renvoi de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) du 24 février 2022. Celle-ci percevait une aide de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) depuis le 1er mai 2014 pour un montant total de CHF 301'003.-.

d. M. A______ a fait l’objet de douze condamnations pénales depuis le 10 février 2004, date à laquelle la Cour de cassation pénale de Lausanne l’a notamment condamné à un emprisonnement de trente mois pour agression, brigandage, conduite en état d’ébriété, sous retrait du permis de conduire et insoumission à une décision de l'autorité.

Il a été condamné pour incitation à l’entrée, à la sortie ou au séjour illégal (le 8 décembre 2010 par le Ministère public [ci-après : MP] de Berne), à des lésions corporelles simples (le 2 décembre 2012 par le MP de Genève), pour séjour illégal (le 27 février 2013 par le MP de Berne) et pour vol le 7 janvier 2015 (par le MP de Neuchâtel).

Six autres condamnations ont trait à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), notamment des conduites de véhicules sans le permis de conduire, dérobades et conduites en état d’ébriété (condamnations du 28 juin 2012 par le MP de Lausanne ; le 29 mai 2013 par le MP de Genève) ainsi que le 27 janvier 2014 par le MP de Berne pour non restitution de permis et/ou plaques de contrôle ; de même que des condamnations le 29 décembre 2014 par le MP de Genève (conducteur en incapacité de conduire), le 8 octobre 2015 par le MP de Genève pour, notamment, conduite d’un véhicule défectueux, sans permis et le 10 octobre 2016 pour circulation sans assurance responsabilité civile, non restitution du permis et/ou plaques. Selon l'extrait du casier judiciaire du 23 février 2022, une enquête pénale est en cours au MP de Genève depuis le 4 février 2022, pour, notamment, conduite sans permis de circulation, sans autorisation ou sans assurance-responsabilité civile.

Selon l'extrait du casier judiciaire daté du 1er octobre 2021, une enquête pénale est en cours au MP de Genève depuis le 17 mars 2020, pour contrainte sexuelle et contrainte.

e. Selon l'extrait du registre des poursuites daté du 21 juillet 2021, M. A______ faisait l'objet de poursuites et de quarante-cinq actes de défaut de biens totalisant CHF 161'921.-.

f. Selon l'attestation d'aide financière de l'hospice du 13 juillet 2021, M. A______ a été au bénéfice de prestations financières du 1er juin 2016 au 28 février 2019, puis du 1er mai 2019 jusqu'à la date de l'attestation. De l'année 2017 à l'année 2021, l'intéressé a perçu un montant d'aide sociale supérieur à CHF 91'733.-.

Précédemment, selon le courriel du département des affaires sociales de la Ville de Bienne daté du 2 août 2021, M. A______ avait été soutenu du 22 novembre 2000 au 14 juin 2004 et du 12 septembre 2008 au 31 décembre 2014. Le montant de l'aide sociale perçue pendant ces périodes se montait à CHF 338'088.-. Il était toutefois marié jusqu'au 24 septembre 2013 et solidairement responsable de la dette sociale contractée par son épouse pendant le mariage.

Par courrier du 30 juillet 2013, le service de la population de la Ville de Bienne a constaté qu'il faisait l'objet d'actes de défaut de bien pour plus de CHF 300'000.-. Ce courrier relevait qu'il se trouvait en situation de chômage chronique bien qu'il fût titulaire d'un permis B.

B. a. Par formulaire M daté du 26 novembre 2014 et réceptionné à l'OCPM le 7 janvier 2015, M. A______ a déposé une demande de changement de canton. Il indiquait être arrivé à Genève le 29 octobre 2014.

b. Le 1er octobre 2021, l'OCPM a informé de son intention de refuser la demande d'octroi d'une autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse.

c. M. A______ a fait valoir ses observations le 11 février 2022.

d. Par décision du 24 février 2022, l’OCPM a refusé d'autoriser son changement de canton à destination du canton de Genève, de lui délivrer une autorisation de séjour et a prononcé son renvoi de Suisse.

M. A______ remplissait un motif de révocation d'une autorisation de séjour, car il attentait de manière répétée à la sécurité et l'ordre publics en Suisse, comme l'indiquaient les dix condamnations inscrites à son casier judiciaire. Il remplissait également les motifs d'une révocation en raison de sa dépendance à l'aide sociale. Aucun élément du dossier ne permettait par ailleurs de considérer qu'un renvoi au Brésil le placerait dans une situation de rigueur, étant rappelé qu'il était arrivé en Suisse, lors de son séjour actuel, à l'âge de 39 ans. Il ne pouvait pas non plus se prévaloir d'une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée en Suisse. Enfin, il ne pouvait se prévaloir de la protection de la vie familiale, car il n'entretenait aucune relation sous l'angle économique avec ses enfants vivant à Genève ou à Bienne, en raison de sa dépendance à l'assistance sociale sociale de longue date. Enfin, une décision relative à la constatation de la fin des autorisations de séjour de son épouse actuelle et des quatre enfants du couple et prononçant également leur renvoi de Suisse faisait l'objet d'une décision séparée du même jour.

C. a. Par acte du 28 mars 2022, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre la décision du 24 février 2022, concluant à son annulation. Il vivait en Suisse depuis plus de trente ans, il avait plusieurs enfants majeurs et également six enfants mineurs habitant actuellement Suisse. Il n'avait jamais travaillé dans son pays d'origine et, en cas de retour immédiat, n'aurait pas d'endroit où loger. Le délai de traitement de sa demande de permis de séjour était supérieur à sept ans. Il avait été dans l'impossibilité de trouver un travail, faute d'être en possession d'un permis de séjour valable. Il était dans une situation de cas de rigueur avéré, dès lors qu'un éventuel renvoi pourrait le mettre en danger, notamment sous l'angle de sa réintégration. Tous ses enfants, membres de sa famille et amis proches se trouvaient en Suisse. Il n'avait plus de liens avec son pays d'origine. Les effets négatifs de son renvoi se feraient sentir sur son état de santé et celui de ses enfants mineurs, qui faisaient également l'objet d'une décision de renvoi, ainsi que leur mère.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, l’intéressé a persisté dans ses conclusions.

d. Par écriture spontanée du 22 août 2022, M. A______ a transmis au TAPI copie d'un contrat de travail du 8 juillet 2022 avec l'entreprise P______, sise à Grenchen, soit Granges, dans le canton de Soleure, pour un salaire horaire brut de CHF 24.19.

e. L'OCPM a rappelé qu'il n'avait pas la compétence d'autoriser, même à titre provisoire, l'exercice d'une activité lucrative dans un autre canton. Il appartenait à M. A______ et à son employeur de vérifier auprès des autorités bernoises si cette activité était autorisée pendant la durée de la présente procédure.

f. Par jugement du 23 décembre 2022, le TAPI a rejeté le recours. Deux motifs de révocation d’autorisation de séjour étaient réalisés à savoir, d’une part, le fait que M. A_____ avait attenté de manière grave et répétée à la sécurité et l’ordre publics et, d’autre part, le fait qu’il dépendait de l’aide sociale. Le refus d’autoriser le changement de canton de l’intéressé était fondé. Par ailleurs, il ne remplissait pas les conditions du cas individuel d’extrême gravité, notamment son intégration, laquelle devait être qualifiée d’extrêmement mauvaise. Il ne pouvait se prévaloir de la présence en Suisse de ses enfants mineurs et des besoins particuliers de M______, ces derniers, ainsi que leur mère, faisant également l’objet d’une décision de renvoi de Suisse et étant tous de nationalité brésilienne.

D. a. Par acte du 2 février 2023, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à son annulation et à ce qu’il soit ordonné au TAPI et à l’OCPM de renouveler son permis. Subsidiairement, la cause devait être renvoyé au TAPI pour examen et renouvellement de son permis. Encore plus subsidiairement, il devait être sursis à l’exécution de son renvoi. Il souhaitait produire plusieurs nouveaux documents et sollicitait un délai supplémentaire de trente jours pour compléter son recours. Les art. 30 al. 1 let. b et 62 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) avaient été violés. Sa situation personnelle ne ressortait pas du dossier, notamment la présence de tous les membres de sa famille ainsi que les conséquences de la très longue attente d’une décision de l’OCPM concernant son statut administratif.

b. Le 6 février 2023, il a transmis un chargé de deux pièces, à savoir le jugement querellé et la décision d’assistance juridique et a persisté dans ses conclusions.

c. L’OCPM sa conclu au rejet du recours, lequel reprenait les arguments présentés devant le TAPI.

d. Sur ce, les parties ont été informées, le 9 mars 2023, que la cause était gardée à juger.

e. Le contenu des pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Est litigieux le bien-fondé de la décision de l’OCPM refusant la demande du recourant de changer de canton de domicile et de lui accorder une autorisation de séjour dans le canton de Genève.

3.             Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers (LEI- RS 142.20) et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, avant le 1er janvier 2019 sont régies par l’ancien droit, étant précisé que les dispositions pertinentes dans le cas d’espèce n’ont pas été modifiées.

4.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Brésil.

4.1 L'art. 37 LEI dispose que le titulaire d’une autorisation de séjour a droit au changement de canton s’il n’est pas au chômage et qu’il n’existe aucun motif de révocation au sens de l’art. 62 LEI (al. 2).

Selon l'art. 62 al. 1 LEI, une autorisation de séjour peut être révoquée notamment si l’étranger attente de manière ou répétée à la sécurité et l’ordre publics en Suisse, les met en danger (let. c) ou que lui-même, ou une personne dont il a la charge, dépend de l’aide sociale (let. e).

4.2 En l’espèce, le recourant serait arrivé à Genève en décembre 2014, alors que son autorisation de séjour dans le canton de Berne était échue depuis le 28 août 2013. Pour ce motif déjà il ne remplit pas les conditions de l’art. 37 LEI, n’étant pas au bénéfice d’une autorisation de séjour au moment où il sollicite le changement de canton.

Par ailleurs, il réside sur le territoire cantonal, sans autorisation, depuis plus de huit ans. Il n’a pas de travail, sous réserve d’engagements ponctuels et du récent contrat qu’il a produit devant le TAPI pour une activité dans une société soloroise dès le 11 juillet 2022. Aucune fiche de salaire n’est produite depuis cette date et aucun document n’atteste de la réalité de la prise d’emploi. L’intéressé fait l’objet, à Genève, de nombreuses poursuites et actes de défaut de biens pour un montant supérieur à CHF 160'000.-. Il a dépendu de l’hospice du 1er juin 2016 au 28 février 2019 et à nouveau depuis le 1er mai 2019. Il n’indique pas, depuis la dernière attestation, ne plus avoir besoin de son soutien. La mère de ses quatre derniers enfants, âgés respectivement de 4 à 9 ans, est aussi au bénéfice des prestations de l’hospice pour elle-même et les mineurs, selon la décision produite par le recourant.

Avant de venir dans le canton de Genève, l’intéressé avait bénéficié de prestations d’aide sociale du canton de Berne pour un montant supérieur à CHF 245'000.-. En 2013, il faisait l’objet d’actes de défaut de biens dans ledit canton pour plus de CHF 300'000.-. Le service de la population de la ville de Bienne évoquait un chômage chronique bien que l’intéressé ait été titulaire, à l’époque, d’un permis B.

Le recourant étant dépendant de l’aide sociale, à l’instar d’au moins quatre enfants dont il a la charge, remplit la condition de l’art. 62 al. 2 let. e LEI d’une possible révocation de son autorisation de séjour. Il remplit aussi la condition de la let. c au vu de ses nombreuses condamnations pénales.

Un refus d’autorisation de changer de canton est partant fondé.

5.             Le recourant sollicite une autorisation de séjour pour cas d’extrême gravité.

5.1 L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

5.2 L'art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur au moment des faits, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant (let. a), du respect de l'ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021,
ch. 5.6.12).

5.3 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; directives LEI, ch. 5.6).

5.4 La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en oeuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

5.5 La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (ATA/353/2019 précité consid. 5d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

5.6 En l'espèce, le recourant est arrivé en Suisse, sans titre de séjour, il y a trente ans environ, soit dans les années 1990 selon ses dires. Il a été mis au bénéfice d’autorisations de séjour de courte durée, puis d’une autorisation de séjour pour regroupement familial, dans le canton de Berne, entre le 29 août 2008 et le 28 août 2013. Depuis cette date, il fait l’objet d’une simple tolérance des autorités helvétiques.

Dans le cadre de l'analyse sous l'angle du cas de rigueur, son intégration est mauvaise. Le recourant n’a pas d’emploi régulier, dépend depuis de nombreuses années, tant lui-même que sa famille, de l’aide sociale pour des montants très importants. Il fait l’objet de nombreuses dettes tant à Genève, depuis son arrivée en 2014, que précédemment dans le canton de Berne. Son intégration professionnelle ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle au sens de la jurisprudence. Ses connaissances professionnelles acquises, notamment, en qualité de déménageur, d’aide cuisinier, de chauffeur, dans le nettoyage notamment ou sa formation d’emballeur, n'apparaissent pas spécifiques à la Suisse ; le recourant ne fournit en tout cas aucune pièce ou explication, qui permettrait de retenir que tel serait le cas. Si le recourant indique avoir en Suisse de nombreux descendants, enfants voire petits-enfants, il ne démontre pas entretenir avec ceux-ci des liens étroits, sous réserve d’attestations évoquant son investissement pour son fils atteint d’un trouble du spectre autistique. Les quatre attestations produites devant le TAPI, par des enfants domiciliés en Suisse allemande et qui insistent sur la nécessité que leur père reste en Suisse, doivent être relativisées. D’une part, elles proviennent de membres de sa famille. D’autre part, elles ont toutes été écrites, le même jour, avec un texte quasiment identique et dactylographiées avec la même police, atténuant ainsi très fortement la force probante des documents censés prouver l’intensité de la relation qui les lie à leur parent. Pour le surplus, le recourant ne démontre pas qu’il aurait tissé des liens amicaux et affectifs à Genève d'une intensité telle qu'il ne pourrait être exigé de sa part de poursuivre ses contacts par les moyens de télécommunication modernes. Il n'allègue pas non plus qu'il se serait investi dans la vie sociale, associative ou culturelle à Genève ou en Suisse. Il ne peut dès lors être retenu qu'il aurait fait preuve d'une intégration sociale exceptionnelle.

La condition du respect de l'ordre juridique suisse lui est clairement défavorable au vu de son casier judiciaire très fourni en multiples infractions, notamment plusieurs en lien avec la conduite de véhicules automobiles sans permis ou en état d’ébriété ainsi que pour diverses infractions telles que brigandage, lésions corporelles simples, dérobades, vol, violation d’une obligation d’entretien notamment. À cela s’ajoutent non seulement les infractions à la LEI, mais également la procédure pénale actuellement en cours pour contrainte et contrainte sexuelle.

La durée du séjour du recourant est certes longue. Elle doit toutefois être fortement relativisée dès lors qu’il n’est au bénéfice que d’une simple tolérance depuis l’échéance de son permis en 2013. Il ne peut par ailleurs pas tirer argument du temps pris par l’administration à rendre une décision pour justifier une absence de revenus. Il aurait pu solliciter d’être autorisé à travailler pendant la durée de la procédure ce qu’il n’a fait que très ponctuellement et au demeurant démontre qu’il avait connaissance de cette opportunité.

S'agissant des possibilités de réintégration dans l'État de provenance, les compétences acquises en Suisse tant en français que dans le domaine professionnel pourront être mises en valeur au Brésil. Même à considérer que le recourant séjourne en Suisse depuis trente ans, celui-ci, aujourd’hui âgé de 56 ans, aurait vécu vingt-six ans au Brésil. Il y a passé son enfance, adolescence et le début de sa vie d'adulte, soit les périodes déterminantes pour le développement de la personnalité. Il connait les us et coutumes de son pays et en maîtrise la langue. Enfin, il ne fait pas état de problèmes de santé ni d’incapacité de travail. Dans ces circonstances, il n'apparaît pas que sa réintégration soit fortement compromise, quand bien même elle s’avérera difficile compte tenu de la durée de son séjour en Suisse.

Au vu de ce qui précède, le recourant ne se trouve pas dans une situation de raisons personnelles majeures au sens de la loi. L'OCPM n'a donc pas violé la loi ni consacré un abus de son pouvoir d'appréciation en refusant de préaviser favorablement une autorisation de séjour en sa faveur auprès du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM).

6.             Le recourant invoque l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

6.1 Un étranger peut se prévaloir de l’art. 8 § 1 CEDH pour s’opposer à l’éventuelle séparation de sa famille. Pour qu’il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, il doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1). Les relations familiales qui peuvent fonder un droit à une autorisation sont avant tout les rapports entre époux ainsi qu’entre parents et enfants mineurs vivant ensemble (ATF 135 I 143 consid. 1.3.2).

6.2 En l’espèce, parmi les enfants du recourant, cinq sont aujourd’hui mineurs. La plus grande, K______, né le ______ 2006, a aujourd’hui 17 ans. Il n’est pas allégué que le recourant vive avec elle, ni qu’il entretiendrait avec celle-ci des relations étroites qu’il s’agisse de relations personnelles, ou d’une participation aux frais d’entretien de son enfant. Les quatre autres, soit L______, M______, N______ et O______ sont issus de sa relation avec Mme C______ et ont fait, à l’instar de leur mère, l’objet d’une décision de renvoi de l’OCPM du 24 février 2022. Celle-ci n’a pas demandé le renouvellement de son autorisation de séjour, ni celle de ses enfants. L’autorité a ainsi constaté la fin de leur autorisation de séjour. Pour le surplus, elle percevait des prestations financières de la part de l’hospice depuis le 1er mai 2014 pour un montant de CHF 301'003.-, remplissant la condition d’une révocation. Enfin, les autres membres de sa famille sont tous majeurs, le recourant ayant confirmé que ses enfants mineurs étaient issus de ses unions avec Mmes B______ et C______. En conséquence, le recourant ne peut se prévaloir de l’article 8 CEDH.

7.             Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6 et les arrêts cités). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée
(art. 83 al. 1 LEI).

En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour au recourant, l'intimé devait prononcer son renvoi. Pour le surplus, aucun motif ne permet de retenir que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

8.             Il ne sera pas perçu d’émolument, le recourant plaidant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 87 al. 1 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure vu l’issue du litige (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 février 2023 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 décembre 2022 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mirolub Voutov, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Lauber et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 


 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.