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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2509/2019

ATA/1238/2021 du 16.11.2021 sur JTAPI/472/2020 ( ICCIFD ) , REJETE

Recours TF déposé le 20.12.2021, rendu le 12.04.2022, RETIRE, 2C_1036/2021, 2C_1057/2020
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2509/2019-ICCIFD ATA/1238/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 novembre 2021

4ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Rémi Sacerdote, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
8 juin 2020 (JTAPI/472/2020)


EN FAIT

1) Le litige porte sur deux demandes de sûretés notifiées à Monsieur A______ en garantie de l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2008 à 2012 ainsi que 2015 et 2016.

2) À teneur du registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), M. A______, originaire d'Inde, est arrivé en Suisse (Genève) en 1979 et a acquis la nationalité suisse en 1991. Entre 1988 et 1993, il était domicilié au chemin B______ à C______. Après avoir quitté la Suisse le 15 février 1993, il est revenu à Genève, le 1er avril 1995, en provenance de Paris, et s'est à nouveau domicilié à l'adresse précitée à C______ .

Sont également domiciliés à cette adresse, depuis leur mariage en 1996, son épouse, Madame D______ , et leurs trois enfants : E______ et F______ , nées le ______1997, et G______, né le ______ 2000.

3) Le groupe H______ est dirigé par le père du contribuable,
Monsieur I______, et ses trois oncles, Messieurs J______, K______ et L______, et est actif dans une dizaine de secteurs économiques (véhicules automobiles, hydrocarbures, banque et finance, technologies de l’information, énergies, médias, immobilier, santé, développement de projets, trading).

Selon le site internet du groupe H______, celui-ci emploie plus de cent cinquante mille personnes à travers le monde. Selon le magazine Forbes, en mars 2016, la fortune globale du conglomérat, basé à Londres, équivalait à USD xxx, soit la XXX ème fortune mondiale.

4) Dans leurs déclarations fiscales 2008 à 2012, 2015 et 2016, le contribuable et son épouse, assujettis de manière illimitée, ont mentionné les montants suivants.


 

Pour l’ICC :

Année fiscale

Revenu brut

(en CHF)

Revenu brut activité indépendante

(en CHF)

Revenu brut immobilier

(en CHF)

Revenu net

(en CHF)

Fortune brute immobilière

(en CHF)

Dettes chirographaires et hypothécaires

(en CHF)

Fortune nette

(en CHF)

2008

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2009

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2010

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2011

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2012

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2015

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2016

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

Pour l’IFD :

Année fiscale

Revenu brut

(en CHF)

Revenu brut activité indépendante

(en CHF)

Revenu brut immobilier

(en CHF)

 

Revenu net

(en CHF)

2008

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2009

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2010

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2011

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2012

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2015

xxx

xxx

xxx

 

xxx

2016

xxx

xxx

xxx

 

xxx

5) Par courrier du 11 novembre 2013, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a sollicité des époux A______ des informations en lien avec la période fiscale 2008.

6) Le 30 janvier 2014, l’AFC-GE a invité le contribuable à lui fournir des informations et pièces justificatives concernant sa fortune mobilière, en particulier s’il faisait partie des bénéficiaires de trusts détenant le groupe H______, ses revenus de ses activités au sein des sociétés dudit groupe, les relevés de tous ses comptes bancaires et comptes courants auprès de sociétés dudit groupe. Le contribuable devait aussi fournir les relevés de ses cartes de crédit ainsi que les documents relatifs à ses dettes hypothécaires.

7) Le 8 février 2014, le contribuable a expliqué que la fortune du groupe H______ était en partie détenue par un trust discrétionnaire, dont il n’était ni fondateur, ni administrateur. Il ne pouvait ni savoir qui en étaient les bénéficiaires, ni avoir accès à l’acte de constitution. Il était administrateur ou membre du conseil d’administration de plusieurs sociétés du groupe H______, et le seul compte bancaire qu’il possédait se trouvait à la banque M______ SA (ci-après : M______) à Genève, auprès de laquelle il avait deux hypothèques, l’une pour sa résidence de C______ et l’autre pour un chalet à N______. Il avait mandaté la société O______ pour le règlement de ses factures et de ses dépenses personnelles (cartes de crédit) et de propriétés.

8) Le 25 juin 2014, le contribuable a transmis à l’AFC-GE les relevés de sa carte de crédit pour les années 2008 à 2012.

9) Par courriers recommandés des 12 décembre 2014, 25 novembre 2015, 2 décembre 2016 et 20 novembre 2017, l’AFC-GE a informé le contribuable qu’elle interrompait la prescription du droit de procéder à la taxation pour les années fiscales 2009, 2010, 2011 et 2012.

10) Par courriers des 22 août et 6 novembre 2017, le contribuable a transmis à l’AFC-GE une attestation de X______ confirmant que les frais de scolarité de ses trois enfants étaient pris en charge depuis 2003 par leur grand-père, les contrats de prêt avec M______, un tableau résumant ses dépenses privées de 2008 à 2012 par catégories de frais ainsi qu'un tableau détaillant les frais professionnels payés par carte de crédit en 2008.

11) Lors d'une entrevue dans les locaux de l'AFC-GE le 20 novembre 2017, cette dernière a indiqué au contribuable qu'elle estimait que ses frais professionnels se montaient à 30 % du total des frais de carte de crédit et lui a présenté un tableau concernant l’année fiscale 2008, selon une méthodologie qu’elle entendait appliquer pour toutes les années. Elle lui a fixé un délai pour accepter ou non cette proposition.

Le 14 mars 2018, le contribuable a demandé à discuter du pourcentage des dépenses professionnelles, ce que l’AFC-GE a pris comme un refus de sa proposition.

12) Le 23 mars 2018, l’AFC-GE a invité le contribuable à lui remettre le détail de tous les comptes bancaires détenus par lui et/ou son épouse auprès d’établissements bancaires en Suisse et à l’étranger, notamment auprès de M______ pour les années 2008 à 2012, les relevés mensuels de tous les comptes bancaires détenus pour ces années ainsi que le détail des titres détenus pendant cette même période par lui et/ou son épouse dans des entreprises suisses ou étrangères.

13) Le 7 juin 2018, le contribuable s’est déclaré disposé à accepter la proposition de règlement de l’AFC-GE, à savoir : admission de 30 % de ses frais/dépenses avec les cartes de crédit à titre professionnel (70 % étant alors considérés comme faisant partie de son train de vie privé) ; les écolages pris en charge par son père étaient ajoutés à son train de vie ; l’accord était subordonné au fait que l’AFC-GE acceptait de considérer que les prêts consentis par M______ étaient de véritables prêts « at arm’s length ».

14) Par courriel du 12 juin 2018, l’AFC-GE a indiqué au contribuable les montants déterminés en fonction de son train de vie qui seraient repris, sous réserve d’éléments de revenus supplémentaires, à titre de revenu pour les années 2008 à 2012, à savoir respectivement : CHF xxx, CHF xxx, CHF xxx, CHF xxx et CHF xxx.

L’AFC-GE attendait dès lors la confirmation de son accord sur la reprise de ces montants à titre de revenu imposable minimum, ainsi qu’une réponse de sa part à sa demande de renseignements du 23 mars 2018. Une fois cette confirmation reçue, elle serait en mesure de se déterminer sur la reconnaissance des prêts pour la période sous revue. Des intérêts moratoires seraient en outre prélevés sur les montants d’impôts, conformément à la loi.

15) Le 20 juin 2018, le contribuable a donné son accord à la proposition de l’AFC-GE. Il n’avait toutefois pas encore pu récolter tous les documents faisant l’objet de la demande de renseignements du 23 mars 2018.

16) Le 4 juillet 2018, le Ministère public du canton de Genève a informé l’AFC-GE de l’instruction d’une procédure pénale (1______) ouverte notamment du chef d’infractions à la législation sur les étrangers, d’usure et de traite d’êtres humains à l’encontre du contribuable, de son épouse, de son père et de sa mère. La procureure indiquait notamment que les prévenus résidaient ensemble, avec les trois enfants de M. et Mme A______, dans une villa, dont ils étaient copropriétaires, au chemin B______ à C______ . Selon les éléments recueillis, depuis l’année 1997 en tout cas, mais très vraisemblablement depuis bien plus tôt, pour entretenir cette propriété ainsi que subvenir aux soins et aux besoins de ses occupants, notamment la cuisine, la lessive, les soins corporels, la garde des enfants, etc., les prévenus avaient mis sur pied, en collaboration avec des membres de leur famille en Inde ainsi qu’avec l’aide de leurs employés en Suisse, un système de recrutement d’employés de maison indiens.

17) Le 6 juillet 2018, le contribuable a transmis à l’AFC-GE les relevés bancaires des comptes ouverts à O______, la P______ et M______.

18) Le 18 juillet 2018, l’AFC-GE a consulté le dossier pénal et obtenu plusieurs pièces relatives au train de vie de la famille A______, qu’elle a transmises à la division des affaires pénales et enquêtes de l'administration fédérale des contributions (ci-après : DAPE).

19) Le 8 août 2018, le Ministère public genevois a informé l’AFC-GE qu’une autre procédure pénale (3______) était ouverte à l’encontre du contribuable pour faux dans les titres et lui a demandé copie des déclarations fiscales 2015 à 2017.

20) Le 30 août 2018, l’AFC-GE a demandé au contribuable de lui fournir des informations complémentaires relatives à des montants crédités sur les comptes nos 4______ et 5______ auprès de M______. L’AFC-GE a renouvelé sa demande le 5 octobre 2018.

21) Le 18 avril 2019, le Conseiller fédéral en charge du Département fédéral des finances (ci-après : DFF) a autorisé l'administration fédérale des contributions
(ci-après : AFC-CH) à mener une enquête en collaboration avec l’AFC-GE à l’encontre notamment du contribuable et de son père. Les motifs de cette enquête étaient notamment les suivants : « Les éléments au dossier laissent également penser que I______ est, de concert avec d’autres membres de la famille A______, un ayant droit économique du trust Q______ (île de Man), sans que la fortune y relative soit déclarée. Ils laissent en outre penser que, dans le cadre de versements effectués par des sociétés indirectement contrôlées par Q______, dont notamment la société W______, d’importantes distributions dissimulées ont été effectuées entre autre en faveur de MM. I______ et M. A______, sans que celles-ci soient déclarées au titre de revenus par ces derniers. ( ) Selon les estimations, les montants soustraits pendant la période allant de 2009 à 2017 pourraient porter ( ) pour M. A______, sur plus de
CHF xxx s’agissant des revenus, ( ). Si l’on se base sur ces chiffres, les rappels IFD et ICC devraient avoisiner un total de ( ) CHF xxx pour M. A______, ( ). En l’espèce, des soupçons fondés concernant de graves infractions fiscales ressortent des documents transmis ».

22) Le 1er mai 2019, la DAPE a ouvert une enquête pénale, en raison de soupçons fondés que des soustractions continues de montants importants d’impôt ou une instigation/complicité à de telles soustractions avaient été commises par les précités. Le contribuable « aurait commis, durant les périodes fiscales 2009 à 2017, des soustractions portant sur des montants importants d’impôt sur le revenu par le fait que le contribuable aurait omis de déclarer des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles.

Le même jour, la DAPE a ordonné la perquisition de la propriété sise à C______ .

23) Les 8 et 16 mai 2019, la DAPE a procédé à la perquisition ordonnée et mis sous scellés ou séquestré de nombreux documents, matériel informatique, clés et coffre-fort.

24) Le 24 mai 2019, l’AFC-GE a informé le contribuable et son épouse de l’ouverture d’une procédure en tentative de soustraction d’impôt pour les années 2008 à 2012 et 2015 à 2016. Des éléments portés à sa connaissance lui permettaient d'envisager que des éléments de leurs revenus et de leur fortune pouvaient ne pas avoir été déclarés.

25) Par courriers recommandés du 28 mai 2019, l’AFC-GE a notifié au contribuable deux demandes de sûretés pour des montants de respectivement CHF xxx, avec intérêts à 5% dès le 29 mai 2019, pour l’ICC, et CHF xxx, avec intérêts à 3% dès le 29 mai 2019, pour les exercices fiscaux 2008 à 2012 et 2015 à 2016, indiquant comme motifs : « les droits du fisc sont menacés ».

26) Le 28 mai 2019, l’AFC-GE a adressé à l’office des poursuites de Genève (ci-après : OP) deux ordonnances de séquestre correspondant aux montants susmentionnés et portant sur tous biens, avoirs, pièces, valeurs, titres, droits, créances, notamment comptes courants, dépôt, coffres forts, sous nom propre, désignation conventionnelle, pseudonyme ou numéro, dont était titulaire
M. A______ ou dont il était ayant droit économique ou co-ayant droit économique, en mains de M______ ainsi que les rendements de ceux-ci ; des comptes en mains de la R______ SA, ainsi que les rendements de ceux-ci ; des comptes en mains de O______ AG, ainsi que les rendements de ceux-ci ; de tous objets de valeurs, notamment bijoux, diamant, pierres précieuses, entreposés dans les locaux loués dans le dépôt des S______, compartiment n. 2______ ; de toutes actions, participations, ou toute créance, droit ou certificat incorporant la titularité des actions/participations, ou découlant de la titularité des actions/participations, tel que le droit aux dividendes (courants ou échus) ou au dividende de liquidation, de la société T______ SA, 1204 Genève, dont était titulaire M. A______ ou dont il était ayant droit économique, au siège de la société et/ou en mains de M. A______ ; de toutes actions, participations, ou toute créance, droit ou certificat incorporant la titularité des actions/participations, ou découlant de la titularité des actions/participations, tel que le droit aux dividendes (courants ou échus) ou au dividende de liquidation, de la société U______ SA, 1204 Genève, dont était titulaire M. A______ ou dont il était ayant droit économique, au siège de la société et/ou en mains de M. A______ ; de biens immobiliers sis à Anières et C______ , dont M. A______ était co-propriétaire ou qui étaient propriété de T______ SA, ainsi que les fruits de celles-ci.

27) Par courriel du 17 juin 2019, l'AFC-GE a remis au contribuable un tableau détaillant les estimations des montants des « rappels » et intérêts sur « rappels » d’impôt, ainsi que des amendes :


Année

fiscale

Revenu
imposable
(en CHF)

Estimation
rappel ICC

(en CHF)

Estimation intérêts sur rappel ICC

(en CHF)

Estimation

amende ICC

(en CHF)

Estimation

rappel IFD

(en CHF)

Estimation

intérêts sur rappel IFD

(en CHF)


Estimation

amende

(en CHF)

IFD

2008

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2009

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2010

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2011

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2012

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2015

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

2016

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

Total

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

xxx

Totaux ICC et IFD

xxx

xxx

L’AFC-GE a également interpellé le contribuable pour savoir si, comme déjà demandé par courriel du 4 juin 2019, une autre mesure de garantie poursuivant le même but que des sûretés, telles des garanties bancaires, pouvait être proposée.

28) Par acte du 28 juin 2019, le contribuable a recouru contre les demandes de sûretés de l’AFC-GE par-devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), en concluant, principalement, à leur annulation et, subsidiairement, à ce qu’il soit constaté que les montants des sûretés étaient excessifs.

Il n’était ni actionnaire, ni ayant droit économique de U______ SA.

Les demandes de sûretés n’étaient pas suffisamment motivées. Elles ne lui permettaient pas de saisir la réalité des motifs pour lesquels les droits de l’AFC-GE étaient menacés. Il avait admis le principe de la proposition de rectification et était dans l’attente de la validation finale par la direction de l’AFC-GE.

Il était domicilié en Suisse et y disposait de relations bancaires connues du fisc genevois. Rien ne permettait de douter du fait qu’il honorerait sa dette. Il avait collaboré à la procédure cantonale et à l’enquête fédérale. Les montants des créances fiscales projetées étaient bien supérieurs à la réalité et ne reposaient a priori sur aucun élément concret. Quand bien même l’on admettrait l’existence d’une demande de sûretés, son montant serait excessif.

Il était contraire au principe de la présomption d’innocence de garantir une amende qui n’avait pas encore été prononcée. De plus, en l’absence de démonstration d’une faute grave, il n’y avait pas de raison d’estimer d’ores et déjà l’amende à 100% de l’impôt éludé. En outre, les intérêts de retard selon un taux de 5% pour l’ICC étaient disproportionnés et infondés.

Enfin, les sûretés requises portaient atteinte à la garantie de la propriété d’une manière disproportionnée au regard de ses moyens, dès lors que l’AFC-GE avait pris en compte des actifs ne lui appartenant pas.

29) L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Les droits du fisc étaient menacés pour plusieurs motifs. Les éléments du dossier laissaient penser que le contribuable avait systématiquement dissimulé à l'AFC-GE une part considérable de ses revenus et de sa fortune des années durant (2008 à 2012, 2015 et 2016) et s'exposait à devoir acquitter des suppléments d'impôt, des intérêts et des amendes élevés. De plus, le contribuable et son épouse faisaient l'objet d'une enquête pénale ouverte par la DAPE en raison de soupçons fondés sur des soustractions continues de montants importants d'impôt. Il ressortait de cette enquête pénale que le contribuable avait omis de déclarer des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles, ce qui rendait sa situation complexe et opaque, et permettait de penser que d'importants fonds avaient été transférés hors de Suisse. Le contribuable et son épouse faisaient également l'objet d'une procédure pénale pour infraction à la législation sur les étrangers, usure, traite d'êtres humains et faux dans les titres, dont il ressortait qu'ils avaient dissimulés à l'AFC-GE une part considérable de leurs revenus et de leur fortune des années durant. Le contribuable avait ainsi caché l'existence de comptes bancaires et d'un coffre aux S______, dont les fonds étaient importants, ce qui laissait également penser que d'importants fonds avaient pu être transférés hors de Suisse. Le contribuable n’avait répondu que partiellement aux demandes de renseignements et malgré les nombreuses discussions menées depuis 2014, l'AFC-GE n'était toujours pas en mesure de procéder à la taxation des périodes fiscales en cause, au vu de la complexité du dossier et des questions restées ouvertes. Les écarts entre la situation patrimoniale déclarée et celle estimée selon les pièces qui résultaient du dossier du Ministère public demeuraient importants. Enfin, le contribuable disposait d'une fortune considérable, lui permettant de changer de domicile en fonction de ses intérêts ponctuels.

Ces différents éléments suffisaient pour que soit reconnue l'existence d'un péril à l'endroit des droits du fisc, sous le seul angle de la vraisemblance et dans le cas d'un examen prima facie tel que prévu par la loi.

Si la demande de sûretés était levée, la Confédération Suisse et le canton de Genève se retrouveraient confrontés au risque de subir un préjudice financier irréparable, dès lors que l'AFC-GE se retrouverait dans l'impossibilité de recouvrer sa créance, vu le risque important que le contribuable transfère l'ensemble de sa fortune mobilière dans d'autres États, étant relevé que le contribuable n'avait pas répondu à sa demande de lui fournir d'autres garanties. La créance en cause était par ailleurs vraisemblable et le montant des sûretés n'apparaissait pas manifestement disproportionné.

Le contribuable avait déclaré un revenu de l'activité indépendante et sa fortune immobilière sans mentionner ses comptes bancaires. L'AFC-GE avait repris les montants déterminés lors de l'enquête pénale de la DAPE. Cette dernière avait estimé le train de vie annuel de l’intéressé en 2017 à CHF xxx sur la base des différents documents à sa disposition (budget, dépenses, etc.). Elle avait ensuite déterminé que 50 % de son train de vie était financé par des dons qu'il aurait reçus chaque année de son père. Le 50 % restant correspondait au salaire imposable provenant de son activité pour le groupe H______ et équivalait au montant des reprises. Pour les années antérieures, la DAPE avait à chaque fois diminué les revenus de 5%. Ainsi, les reprises s'étaient élevées à CHF xxx pour 2017, puis à CHF xxx pour 2016, etc.

30) Le contribuable s'est encore déterminé par écrit le 20 décembre 2019 ainsi que les 3 et 26 février 2020, tandis que l'AFC-GE s'est déterminée les 16 janvier, 13 février et 4 mars 2020.

Leurs écritures concernaient principalement l'existence de la créance fiscale et le montant de la garantie.

a. Le contribuable a par ailleurs maintenu que les demandes de sûretés n'étaient pas justifiées. Il n'avait pas été condamné et contestait les faits qui lui étaient reprochés. L'AFC-GE ne faisait que des allégations, sans apporter aucune preuve permettant de considérer qu'il avait commis les soustractions fiscales reprochées. S'il s'était déclaré prêt à accepter la proposition de l'AFC-GE, c'était à titre transactionnel, mais sans reconnaître qu'il aurait omis de déclarer certains éléments.

Si les discussions avaient effectivement pris du temps, il avait fourni les informations demandées par l'AFC-GE. Les droits du fisc étaient d'autant moins en péril qu'il avait accepté la proposition de reprises formulée par cette dernière, quand bien même il l'estimait injustifiée.

b. L'AFC-GE s'est notamment étonnée du fait que le contribuable prétendait qu'il n'y avait pas de lien entre la procédure pénale ouverte à son encontre et les griefs formulés contre lui en matière fiscale. Elle a par ailleurs maintenu que les droits du fisc étaient menacés pour les motifs exposés dans sa précédente écriture.

31) Par jugement du 8 juin 2020, le TAPI a très partiellement admis le recours dans la mesure où l’intérêt mentionné sur la demande de sûretés et l’ordonnance de séquestre du 28 mai 2019, relatives à l’ICC, s’élevait à 2,6 % et s’appliquait exclusivement aux montants estimés des reprises d’impôts 2008 à 2012, 2015 et 2016. De la même façon, pour l’IFD, l’intérêt s’élevait à 3 %.

Plusieurs éléments permettaient de considérer que les droits du fisc apparaissent menacés. Le contribuable faisait l'objet de deux procédures pénales ouvertes par le Ministère public du canton de Genève : l'une pour infraction à la législation sur les étrangers, usure et traite d'êtres humains et l'autre pour faux dans les titres. La lettre du chef du DFF du 18 avril 2019 à l'AFC-CH indiquait que des « soupçons fondés concernant de graves infractions fiscales », ressortaient des documents transmis, de sorte qu'il autorisait cette dernière à mener une enquête en collaboration avec l'AFC-GE à l'encontre du contribuable. Les éléments non déclarés (salaires et/ou distributions dissimulées de revenu provenant de Q______ et/ou de sociétés du groupe H______, comptes bancaires et coffre aux S______) portaient sur sept années et sur des suppléments d'impôt, intérêts et amendes élevés. Ces procédures demeuraient ouvertes et le risque existait que d'importants fonds soient transférés à l'étranger. En outre, le contribuable venait d'une grande famille établie en Inde et au Royaume-Uni, laquelle disposait d'une fortune considérable, lui permettant de changer facilement de domicile.

Il a également considéré que les montants de revenu calculés par le fisc étaient vraisemblables et n'étaient pas disproportionnés.

32) Par acte mis à la poste le 10 juillet 2020, M. A______ a interjeté recours par-devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, en concluant à son annulation, excepté en ce qui concernait la détermination des intérêts, ainsi qu’à l’annulation des demandes de sûretés du 29 mai 2019 et des séquestres. Subsidiairement, il concluait à la réduction des sûretés en retranchant du montant les amendes hypothétiques.

L’intégralité des points contestés devant le TAPI demeurait litigieuse à l’exception de la détermination des intérêts. Les droits du fisc n’étaient pas menacés. Aucune condamnation pénale n'avait été prononcée et il contestait les faits reprochés. S'agissant de l'une des procédures pénales, plusieurs plaignants avaient retiré leur plainte et abandonné leurs conclusions civiles. Il était domicilié avec sa famille depuis vingt-cinq ans à C______ et n’avait jamais exprimé l’intention de déménager. La structure de son patrimoine n’avait pas été modifiée depuis de nombreuses années. Les allégations du fisc n’étaient confirmées par aucune pièce au dossier. Il avait par ailleurs collaboré à la procédure cantonale. Aucun cas de séquestre n'était rempli.

Il contestait avoir omis de déclarer durant de nombreuses années des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles. Q______ était propriétaire des actions d’U______. Or, son nom ne figurait pas dans la liste des bénéficiaires de cette dernière. Il n’était donc pas l’ayant droit économique des sociétés détenues par Q______, notamment U______, ni des actifs et participations de celle-ci. Les montants retenus comme représentant son train de vie par l’AFC-GE ne reposaient que sur des documents internes du fisc et n’expliquaient pas en quoi ils correspondaient à ses revenus.

La créance fiscale relative à l’amende n’existait pas aussi longtemps qu’elle n’avait pas été établie. De plus, en l’absence de démonstration d’une faute grave, il n’y avait pas de raison d’estimer d’ores et déjà que l’amende serait de 100 % du montant des impôts soustraits. L’exigence du caractère vraisemblable de la créance fiscale au jour de la demande n’était pas remplie, cette créance n’existant pas s’agissant de l’amende. Le fait de lui demander une garantie pour des amendes violait par ailleurs le principe de la présomption d’innocence.

L’autorité fiscale était en même temps le créancier et l’autorité prononçant la mesure de séquestre, ce qui était contraire aux garanties de procédure. Les sûretés requises portaient atteinte à ses droits patrimoniaux sur l’ensemble de ses biens sis en Suisse et violaient donc la garantie de sa propriété.

Etait joint un chargé comprenant différentes pièces, dont un document qu’il a dénommé « extrait du registre des bénéficiaires d’U______ ».

33) L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Le recourant n’apportait aucun élément probant apte à renverser la vraisemblance des revenus dissimulés. Les conditions pour demander des sûretés étaient remplies, le recourant faisant l’objet de deux procédures pénales, dont il ressortait qu’il avait dissimulé une part considérable de ses revenus et de sa fortune pendant des années. Le fait de disposer d’une « structure trustale » rendait sa situation complexe et opaque, permettant de penser que d’importants fonds avaient été transférés hors de Suisse. Le recourant venait d’une grande famille établie en Inde et au Royaume-Uni disposant d’une fortune considérable lui permettant de changer facilement de domicile. Il n'avait répondu que partiellement aux demandes de renseignements. Sa volonté de conclure l'accord transactionnel le 7 juin 2018, après de nombreuses discussions depuis 2014, n'était pas étrangère à l'ouverture de la procédure pénale à son encontre pour faux dans les titres.

34) Dans sa duplique, le recourant a relevé que malgré les perquisitions et les nombreuses pièces saisies, ni l'AFC-GE ni la DAPE n'avaient été en mesure de produire le moindre document démontrant qu'il avait perçu des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles. Il avait accepté la proposition transactionnelle de reprises de l’AFC-GE, ce qui démontrait que les droits du fisc n’étaient pas menacés. Aucun bordereau n'avait toutefois été encore émis.

35) Par arrêt du 17 novembre 2020, la chambre administrative a rejeté le recours.

Le motif de la constitution des sûretés était constitué par la mise en danger objective des droits du fisc. Il ressortait notamment des éléments mis au jour par le Ministère public genevois puis par la DAPE que l'intéressé avait un train de vie ne correspondant pas aux revenus et fortune déclarés. L'AFC-GE avait déterminé le revenu découlant de ses activités pour le groupe H______ comme équivalent au montant des reprises et avait considéré que 50 % de son train de vie était financé par des dons de son père. L'intéressé était par ailleurs administrateur unique avec signature individuelle des deux sociétés. Le fait que Q______ soit un trust irrévocable discrétionnaire n'excluait pas qu'il ait pu bénéficier de distributions, même si celles-ci relevaient du pouvoir d'appréciation du trustee. Enfin, l'intéressé avait acquiescé à une proposition de reprises faite par l'AFC-GE et n'apportait aucun élément susceptible de renverser les conclusions retenues par le fisc au sujet de ses revenus. C'était donc à juste titre que le TAPI avait retenu que les conditions prévues par la loi pour l'exigence de sûretés ainsi que pour leur fixation étaient remplies.

Par ailleurs, le Tribunal fédéral avait déjà eu l'occasion de dire qu'il semblait à première vue également justifié de tenir compte d'une éventuelle amende dans le montant des sûretés réclamées.

36) Par arrêt du 17 août 2021, le Tribunal fédéral a admis le recours de M. A______, annulé l'arrêt précité et a renvoyé la cause à la chambre administrative pour qu'elle expose un état de fait et motive sa décision.

Dès lors que M. A______ et son épouse étaient domiciliés en Suisse, le premier motif de sûretés mentionné par les art. 169 al. 1 LIFD et 38 al. 1 LGIP n'était pas donné. Seul le second motif prévu par ces dispositions entrait en considération et il fallait examiner si les droits du fisc à l'encontre des intéressés paraissaient effectivement menacés.

Or, la chambre administrative s'était contentée d'indiquer que l'intéressé avait un train de vie ne correspondant pas aux revenus et à la fortune déclarés et qu'il n'avait pas contesté efficacement la vraisemblance des montants calculés par le fisc. Ces éléments ne fournissaient pas d'indication sur la mise en danger des créances en cause. Ils ne renseignaient pas sur le potentiel risque de voir l'intéressé se soustraire à ses obligations ni ne permettaient, en particulier, de se prononcer sur les arguments de celui-ci lorsqu'il écartait en tel risque en invoquant sa bonne collaboration avec les autorités et la présence en Suisse d'immeubles lui appartenant. L'arrêt était partant insuffisamment motivé.

37) Dans ses observations du 8 octobre 2021, le recourant a conclu à l'annulation des demandes de sûretés.

Le séquestre était mal fondé. Il résidait à Genève avec sa famille depuis plus de vingt-cinq ans et y avait son centre de vie. Il était propriétaire de biens immobiliers en Suisse et avait collaboré avec les autorités fiscales, ce qui était de nature à exclure toute menace à l'égard de celles-ci. Les conditions nécessaires à l'octroi de sûretés n'étaient ainsi pas remplies.

38) L'AFC-GE a prié la chambre administrative d'examiner si les immeubles dont le recourant était propriétaire en nom propre et qui étaient situés en Suisse représentaient la valeur totale qui reviendrait au fisc à l'issue d'une vente aux enchères, inférieure ou supérieure à la créance de l'AFC-GE, de manière à ce que la chambre administrative détermine si les droits du fisc étaient menacés. Si cette valeur était inférieure à la créance totale de l'AFC-GE, les droits du fisc étaient menacés.

39) Le recourant a souligné qu’il revenait à l'autorité fiscale de prouver ou à tout le moins de rendre vraisemblable que le paiement de l'impôt était menacé et pas à la chambre administrative d'estimer la valeur de ses biens immobiliers pour déterminer si une telle menace existait.

Étaient joints à son écriture :

-          Un rapport d'expertise du 5 juillet 2021 d'un cabinet d'architecture genevois à teneur duquel la villa sise à C______ , dont le contribuable était copropriétaire au côté de son père et de l'un de ses frères, MM. I______ et V______, était un bien rare dont la valeur vénale pouvait être estimée à CHF xxx ;

-          Une estimation du 17 août 2021 d'une régie immobilière selon laquelle la valeur vénale du chalet, dont il était seul propriétaire à teneur de l'extrait du registre foncier annexé, pouvait être estimée à CHF xxx.

Un gage immobilier grevait la villa de C______ à hauteur de CHF xxx et il n'était propriétaire de ce bien qu'à hauteur d'environ 20 %. Partant, en cas de vente aux enchères, la somme de CHF xxx pourrait revenir à l'AFC-GE. Il était par ailleurs l'unique propriétaire du chalet, lequel n'était grevé d'aucun gage immobilier. Le montant qui reviendrait à l'AFC-GE en cas de vente de ses biens immobiliers serait donc largement supérieur à la prétendue créance fiscale de celle-ci.

40) Le 1er novembre 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) La recevabilité du recours a déjà été admise par arrêt de la chambre de céans du 17 novembre 2020 (ATA/1167/2020) et le présent arrêt fait suite à l'arrêt du Tribunal fédéral du 17 août 2021 (2C_1057/2020).

2) Le litige porte sur les demandes de sûretés en matière fiscale relatives aux exercices fiscaux 2008 à 2012 ainsi que 2015 et 2016.

Le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à la chambre de céans afin qu'elle se prononce sur la mise en danger des créances en cause ainsi que le potentiel risque de voir le recourant se soustraire à ses obligations.

3) a. La prescription ou la péremption sont des questions de droit matériel que la chambre administrative, à l'instar du Tribunal fédéral, examine d'office lorsqu'elles jouent en faveur du contribuable (ATF 138 II 169 consid. 3.2 ; ATA/976/2021 du 21 septembre 2021 consid. 2a) tant pour l'IFD que les ICC, lorsque celles-ci se fondent sur le droit fédéral (ATF 138 II 169 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 4). Ces questions doivent également être examinées dans le cadre d'une demande de sûretés. En effet, lorsqu'une créance fiscale est prescrite, elle n'est plus exigible, de sorte que des sûretés ne peuvent plus être requises pour la garantir (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 du 17 août 2021 consid. 3.1 ; 2C_85/2020 du 6 octobre 2020 consid. 5.6.4).

b. Aux termes de l'art. 120 al. 1 première phrase de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), le droit de procéder à la taxation se prescrit par cinq ans à compter de la fin de la période fiscale. La prescription ne court cependant pas ou est suspendue pendant les procédures de réclamation, de recours ou de révision (art. 120 al. 2 let. a LIFD). Par ailleurs, un nouveau délai de prescription commence à courir lorsque l'autorité prend une mesure tendant à fixer ou faire valoir la créance d'impôt et en informe le contribuable ou une personne solidairement responsable avec lui du paiement de l'impôt (art. 120 al. 3 let. a LIFD). La prescription du droit de procéder à la taxation est acquise dans tous les cas quinze ans après la fin de la période fiscale (art. 120 al. 4 LIFD).

Selon la jurisprudence, toutes les mesures des autorités tendant à la fixation de la prétention fiscale et portées à la connaissance du contribuable, de mêmes que de simples lettres ou injonctions, interrompent le délai de prescription. La notion d'acte tendant au recouvrement de la créance peut même comprendre des communications officielles qui n'annoncent qu'une taxation ultérieure et dont le but se limite précisément à interrompre le cours de la prescription (ATF 139 I 64 consid. 3.3 ; 137 I 273 consid. 3.4.3 ; 126 II 1 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_810/2017 du 16 août 2018 consid. 4.1 et 4.2 ; 2C_1098/2014 du 1er décembre 2015 consid. 5.1).

La réglementation en droit cantonal est identique à la LIFD. En particulier, l'art. 22 al. 3 let. a de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc -D 3 17) relatif à l'interruption du délai de prescription, a la même teneur que l'art. 120 al. 3 let. a LIFD.

La loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) ne contient pas de disposition particulière relative à l'interruption de la prescription. L'art. 47
al. 1 LHID retient uniquement que le droit de taxer se prescrit par cinq ans à compter de la fin de la période fiscale; en cas de suspension ou d'interruption de la prescription, celle-ci est acquise dans tous les cas quinze ans après la fin de la période fiscale.

c. Avant le 1er janvier 2017, la poursuite de la tentative de soustraction se prescrivait par six ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative de soustraction avait été commise (ancien art. 184 al. 1
let. a et al. 2 LIFD).

Depuis le 1er janvier 2017, la poursuite pénale se prescrit toujours par six ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative de soustraction a été commise (art. 184 al. 1 let. a LIFD). Selon l'art. 184 al. 2 LIFD actuellement en vigueur, la prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente (art. 182 al. 1 LIFD) avant l'échéance du délai de prescription. L'art. 58 al. 1, al. 2 let. a et al. 3 LHID, en vigueur depuis le 1er janvier 2017, a un contenu identique à celui de
l'art. 184 LIFD ; il est directement applicable si les cantons n'ont pas adapté leur législation au 1er janvier 2017 (art. 72s LHID ; cf. art. 77 LPFisc dont l'al. 2 diffère de l'art. 58 al. 3 LHID).

En matière d'ICC, la poursuite pénale pour tentative de soustraction d'impôt se prescrit donc par quatre ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative a été commise (art. 77 al. 1 let. a LPFisc).

En vertu des art. 205f LIFD et 78f LHID, le nouveau droit est applicable au jugement des infractions commises au cours des périodes fiscales précédant le 1er janvier 2017 s'il est plus favorable que le droit en vigueur au cours de ces périodes fiscales. Dans la mesure où il empêche la prescription de courir, en particulier durant la procédure devant le Tribunal fédéral, le nouveau droit se révèle être en principe moins favorable aux contribuables que l'ancien droit. Il est en revanche plus favorable si aucune décision n'a été rendue dans les dix ans à compter de la fin de la période fiscale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 4.3 ; 2C_444/2018 du 31 mai 2019 consid. 4.3 et les références citées).

d. En l'espèce, le droit de procéder à la taxation du recourant pour les exercices fiscaux 2008 à 2012 ainsi que 2015 et 2016 n'est pas prescrit, dès lors que la prescription absolue de quinze ans n'est pas encore intervenue et qu'à teneur du dossier, l'AFC-GE a régulièrement, à tout le moins depuis 2013, interrompu le délai de prescription par des courriers ou des courriels en lien avec la taxation desdites années fiscales.

Par ailleurs, concernant la poursuite pénale pour l'infraction de tentative de soustraction d'impôt reprochée au recourant pour les périodes fiscales 2009 à 2012 et 2015 à 2016, le délai de prescription n'a pas encore commencé à courir, en l'absence de décisions de taxation définitives.

4) a. Les sûretés destinées à garantir l'impôt fédéral direct sont régies à
l'art. 169 LIFD. Si le contribuable n'a pas de domicile en Suisse ou que les droits du fisc paraissent menacés, l'administration cantonale de l'impôt fédéral direct peut exiger des sûretés en tout temps et même avant que le montant d'impôt ne soit fixé par une décision entrée en force. La demande de sûretés indique le montant à garantir ; elle est immédiatement exécutoire. Dans la procédure de poursuite, elle produit les mêmes effets qu'un jugement exécutoire (art. 169
al. 1 LIFD).

b. L'art. 78 LHID prévoit que les cantons peuvent disposer que les décisions de sûretés des autorités fiscales cantonales compétentes sont assimilées à des ordonnances de séquestre au sens de l'art. 274 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1). La LHID ne prévoit donc pas de règle d'harmonisation contraignante pour les cantons en matière de sûretés (arrêt du Tribunal fédéral 2C_85/2020 précité consid. 6).

c. L'art. 38 al. 1 de la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales du 26 juin 2008 (LPGIP - D 3 18), en vigueur depuis le 1er janvier 2009 (et donc applicable aux sûretés litigieuses des périodes fiscales 2009 à 2012 et 2015 à 2016) prévoit que si le contribuable n'a pas de domicile en Suisse ou que les droits du fisc paraissent menacés, le département peut exiger des sûretés en tout temps et même avant que le montant de l'impôt ne soit fixé par une décision entrée en force ; la demande de sûretés, sommairement motivée, indique le montant à garantir ; elle est immédiatement exécutoire ; dans la procédure de poursuite, elle est assimilée à un jugement exécutoire au sens de l'art. 80 LP.

Avant cette date, la demande de sûretés en droit genevois était réglée par l'art. 371A de la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP - D 3 05 ; applicable aux sûretés litigieuses pour la période fiscale 2008) qui prévoyait que si le contribuable n'avait pas de domicile en Suisse ou que les droits du fisc paraissaient menacés, le département pouvait : a) arrêter en mains de toutes personnes et tous établissements les fonds et valeurs appartenant ou ayant appartenu au contribuable, tout paiement fait au mépris de ces retenues étant inopposable à l'administration fiscale et engageant la responsabilité de ceux qui l'avaient fait ; b) exiger des sûretés en tout temps et même avant que le montant de l'impôt ne soit fixé par une décision entrée en force. La demande de sûretés indiquait le montant à garantir, et elle était immédiatement exécutoire. Dans la procédure de poursuite, elle produisait les mêmes effets qu'un jugement exécutoire. La demande de sûretés était assimilée à l'ordonnance de séquestre, au sens de l'art. 274 LP. Le séquestre était opéré par l'office des poursuites compétent.

d. Tant l'art. 38 al. 1 LPGIP que l'ancien art. 371A al. 1 LCP reprennent les termes de l'art. 169 al. 1 LIFD, si bien que les principes exposés en matière d'IFD ont également vocation à s'appliquer à l'ICC (ATF 145 III 30 consid. 7.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1057/2020 précité consid. 7.1 ; 2C_85/2020 précité consid. 6.1).

5) L'autorité fiscale est chargée d'encaisser les impôts dus. En cas de besoin, elle peut exiger des garanties de la part du contribuable, sous la forme notamment d'une demande de sûretés, assimilable à une ordonnance de séquestre ; de par sa nature, la demande de sûretés en matière d'impôt constitue une mesure provisionnelle de droit public, qu'elle règle une situation de façon temporaire en attente d'une décision principale ultérieure ou qu'elle intervienne une fois la décision de taxation entrée en force (ATF 134 II 349 consid. 1). Les sûretés au sens de l'art. 169 LIFD ne constituant qu'une mesure provisionnelle, elles n'ont pas d'influence sur l'existence ni sur le montant de la créance fiscale et ne préjugent en rien de celle-ci (arrêts du Tribunal fédéral 2C_689/2019 du 15 août 2019 consid. 2.2.7 ; 2C_669/2016 du 8 décembre 2016 consid. 2.3.2).

6) a. Selon la jurisprudence, pour qu'une demande de sûretés au sens de l'art. 169 al. 1 LIFD soit valable, il est nécessaire : 1) que l'un des cas de séquestre mentionnés dans cette disposition soit réalisé, à savoir l'absence de domicile en Suisse ou le fait que les droits du fisc paraissent menacés, 2) que l'existence de la créance fiscale paraisse vraisemblable et 3) que le montant de la garantie exigée ne se révèle pas manifestement exagéré (arrêt du Tribunal fédéral 2C_85/2020 précité consid. 5.1 et références).

b. L'art. 169 al. 1 LIFD prévoit deux hypothèses pouvant donner lieu à des sûretés. L'hypothèse générale est celle dans laquelle le paiement de la créance fiscale apparaît menacé. Dans le cadre de l'hypothèse spéciale, la loi admet également la constitution de sûretés dans les cas où le contribuable n'a pas de domicile en Suisse, ce qui se justifie dans la mesure où une créance de droit public de la Confédération, d'un canton ou d'une commune ne peut donner lieu à une exécution forcée hors de Suisse (arrêts du Tribunal fédéral 2C_543/2018 du 30 octobre 2018 consid. 2 ; 2C_669/2016 précité consid. 2.1).

Pour ce qui est de l'hypothèse générale, il suffit que le recouvrement de la créance fiscale paraisse objectivement « menacé » au regard de l'ensemble des circonstances pour que l'une des conditions posées à l'exigence de sûretés par le fisc soit réunie (arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2017 du 30 mai 2017 consid. 6.2 ; 2A.611/2006 du 18 avril 2007 consid. 4.1).

Une seule déclaration incomplète du revenu ou de la fortune imposable, de même qu'une seule soustraction fiscale ne suffisent pas en tant que telles à retenir la mise en danger des droits du fisc. En revanche, la dissimulation systématique par le contribuable de sa situation de revenu et de fortune, en particulier la mise de côté d'argent liquide pour un montant de plusieurs centaines de milliers de francs permet de conclure à une mise en danger objective des droits du fisc. Parle aussi en faveur d'une telle conclusion le fait que le patrimoine du contribuable soit facilement réalisable ou transférable à l'étranger. Si le simple fait de posséder une nationalité étrangère ne permet pas à lui seul de retenir une mise en danger des droits du fisc, il convient de considérer à cet égard le maintien par le contribuable de relations de famille et d'affaires avec son (autre) pays d'origine (arrêt du Tribunal fédéral 2A.746/2004 du 16 juin 2005 consid. 3.1 et les arrêts cités).

L'art. 169 LIFD n'exige pas que le contribuable ait adopté un comportement ou une manière d'agir spéciale ; il suffit que le paiement de la créance fiscale apparaisse objectivement menacé, sur la base de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce. C'est le cas notamment lorsque l'activité soumise à l'impôt permet au contribuable de se soustraire le cas échéant à l'exécution forcée de sa créance par le dessaisissement ou le transfert à l'étranger de valeurs patrimoniales, ou lorsque le contribuable travestit systématiquement sa situation patrimoniale aux autorités de taxation. Pour juger du danger que le contribuable se soustraie à ses obligations fiscales, la facilité de vente et la mobilité des actifs existant revêtent une grande importance. Le comportement passé du contribuable peut aussi constituer un indice de la mise en danger de la créance fiscale, en particulier le dépôt de requêtes dilatoires, la remise de comptes incomplets ou l'absence de transmission des documents requis (arrêt du Tribunal fédéral 2A.237/2006 du 9 janvier 2007 consid. 2.2 et les arrêts cités).

La possession d’immeubles en Suisse n’entraîne fondamentalement pas de mise en danger des droits du fisc, car les immeubles ne sont pas immédiatement aliénables (Hans FREY, in Martin ZWEIFEL, Michael BEUSCH, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, art. 169, § 29, p. 2706). La possession de biens immobiliers en Suisse peut ainsi conduire à renoncer à des sûretés, pour autant que ceux-ci puissent garantir l'ensemble de la créance présumable (arrêt du Tribunal fédéral 2C_273/2019 du 16 septembre 2019 consid. 3.1.1).

7) Lorsqu'ils doivent statuer sur un recours portant sur une demande de sûretés, le Tribunal fédéral, tout comme la chambre de céans, limitent leur examen à un contrôle prima facie de la situation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1057/2020 précité consid. 5.2 ; 2C_85/2020 précité consid. 6.1).

8) a. La chambre de céans a notamment confirmé que les droits du fisc étaient menacés dans le cadre d’un contribuable américain, domicilié à Genève, au bénéfice d’une autorisation d’établissement, avec sa fille de quinze ans, scolarisée dans une école internationale, pour les motifs suivants. Si un risque de déplacement de son domicile à l'étranger paraissait peu probable vu ses relations personnelles à Genève, l’intéressé, qui exerçait une activité indépendante, ne maintenait pas moins des relations économiques relativement étroites avec les États-Unis, par le biais notamment de trusts et de « partnerships » dans des structures immobilières américaines. Il avait omis, pendant près de dix ans, de mentionner dans ses déclarations un grand nombre d'éléments de fortune et de revenu. Son patrimoine avait la caractéristique d’être mobile ou aisément transférable. Il ne possédait enfin plus aucun bien immobilier en Suisse, ce qui aurait pu permettre de renoncer à tout ou partie des sûretés (ATA/1851/2019 du 20 décembre 2019, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_85/2020 précité).

b. Elle en a fait de même dans le cas d’un contribuable – au demeurant père du recourant – qui avait continué à résider dans le canton de Genève avec son épouse à tout le moins jusqu'en 2018, alors qu’ils avaient annoncé leur départ pour Monaco le 15 juillet 2007. Il apparaissait qu’ils avaient omis de déclarer leur revenu et leur fortune aux autorités fiscales genevoises, compte tenu du maintien de leur domicile fiscal en Suisse. Le contribuable avait clôturé une grande partie de ses comptes bancaires en Suisse, et ses biens immobiliers en Suisse ne suffisaient pas à couvrir les dettes fiscales estimées. Son train de vie, qui impliquait des moyens financiers qui lui permettraient de changer rapidement de lieu de vie et de transférer sa fortune mobilière, étaient autant d'éléments qui permettaient de considérer que les droits du fisc apparaissaient menacés (ATA/1166/2020 du 17 novembre 2020, confirmé dans une large mesure par l’arrêt du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité).

9) Le recourant considère qu’aucun cas de séquestre ne serait rempli. C’est précisément sur ce point que l’affaire a été renvoyée à la chambre de céans dans l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral.

Il n'est pas contesté que le recourant a son domicile en Suisse, de sorte que le premier cas de séquestre mentionné par l'art. 169 al. 1 LIFD n'entre pas en considération. Il convient dès lors d'examiner si les droits du fisc à l'encontre du contribuable paraissent menacés au sens de cette disposition.

Il est vrai que le recourant réside depuis de très nombreuses années en Suisse, dont il détient la nationalité depuis 1991. Il y vit, dans une maison à C______ – dont il est copropriétaire avec son père et son frère , aux côtés de son épouse et de leurs trois enfants âgés respectivement de bientôt 24, 24 et 21 ans. Selon les données de l'OCPM, il n'a quitté la Suisse, ces dernières années, que durant un peu plus de deux ans, entre 1993 et 1995, soit avant son mariage et la naissance de ses enfants. Il dispose ainsi de relations personnelles et familiales importantes à Genève. Cela étant, il convient de relever que ses trois enfants sont dorénavant de jeunes adultes, de sorte qu’il ne serait pas inenvisageable que le recourant seulement, ou avec son épouse, quitte la Suisse. Dès lors que le recourant appartient à une famille extrêmement fortunée et active dans de très nombreux secteurs d’activités, et ce à travers de nombreux pays, il n’aurait dans ce cas de figure aucune difficulté à travailler et vivre dans un autre pays.

Il ressort des éléments mis au jour, tant par l’AFC-GE dans un premier temps, que par le Ministère public genevois puis la DAPE par la suite, que le recourant avait, durant les années litigieuses, un train de vie ne correspondant pas aux revenus et fortune déclarés. L’AFC-GE a dans un premier temps, en 2018, soumis un accord au recourant contenant les montants déterminés en fonction de son train de vie qui seraient repris à titre de revenu pour les années 2008 à 2012, sous réserve d’éléments de revenu supplémentaires. Si le recourant indique s'opposer aux constats de l’AFC-GE, il admet avoir acquiescé à une proposition de reprises faite par l'AFC-GE à titre transactionnel. Il ne ressort toutefois pas du dossier qu’un tel accord aurait été conclu.

Par ailleurs, le recourant fait l’objet de deux procédures pénales, dont il ressort qu’il aurait dissimulé une part considérable de ses revenus et de sa fortune pendant des années. Le contribuable aurait, entre autres, caché l'existence de comptes bancaires et d'un coffre aux S______, dont les fonds seraient importants, ce qui laisse également penser que d'importants fonds auraient pu être transférés hors de Suisse. S’il est exact que le recourant bénéficie de la présomption d’innocence, n’ayant à ce jour fait l’objet d’aucune condamnation définitive dans le cadre de ces procédures, il ne ressort pas du dossier que celles-ci auraient été classées ou seraient en passe de l’être.

La DAPE a en outre ouvert une enquête pénale, en raison de soupçons fondés que des soustractions continues de montants importants d’impôt ou une instigation/complicité à de telles soustractions auraient été commises par le recourant. Ce dernier aurait commis, durant les périodes fiscales 2009 à 2017, des soustractions portant sur des montants importants d’impôt sur le revenu par le fait qu’il aurait omis de déclarer des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles.

En outre, le recourant est administrateur unique avec signature individuelle des deux sociétés, dont il allègue n'être ni actionnaire ni ayant droit économique sans toutefois fournir d'explications à ce sujet. Le fait que Q______ soit un trust irrévocable discrétionnaire n'exclut toutefois pas qu’il ait pu bénéficier de distributions, même si celles-ci relèvent du pouvoir d'appréciation du trustee.

Il apparaît dès lors, dans un examen prima facie, vraisemblable que le recourant aurait soustrait d’importantes sommes d’argent durant de nombreuses années, travestissant ainsi systématiquement sa situation patrimoniale aux autorités de taxation. Il détient par ailleurs plusieurs comptes bancaires auprès d’O______, de la P______ mais surtout de M______, laquelle fait partie du groupe H______ dirigé par la famille du recourant. Son patrimoine, principalement constitué d’avoirs bancaires, apparaît ainsi aisément transférable.

Contrairement à ce que prétend le recourant, sa collaboration n’est par ailleurs pas sans faille. Alors même qu’il était en pourparlers avec l’AFC-GE pour établir le montant de ses revenus et de sa fortune durant les exercices litigieux, il n’a pas spontanément annoncé l’existence d’un coffre aux S______ ni celle de certains comptes bancaires, qui semblent avoir été découverts postérieurement dans le cadre des procédures pénales. De même, il ne ressort pas du dossier que le recourant aurait répondu à la demande de l’AFC-GE de lui fournir d’autres garanties financières pour éviter les demandes de sûretés.

Ainsi, même si l’existence de relations personnelles à Genève est indéniable, les différents éléments précités tendent à considérer que les droits du fisc sont objectivement en danger.

Se pose encore la question de savoir si l’existence de biens immobiliers en Suisse pourrait permettre de renoncer à des sûretés. Le recourant a produit des documents permettant d’établir qu’il est seul propriétaire d’un bien immobilier sis à N______, estimé, selon l’expertise privée qu’il a produite, à CHF xxx. S’il allègue que ce bien n’est grevé d’aucun gage immobilier, il n’en apporte toutefois pas la preuve. En outre, à teneur des données librement accessibles en ligne du Registre foncier, il est copropriétaire, avec son père et l’un de ses frères, d’une villa sise à C______ , dans laquelle il réside d’ailleurs avec sa famille. Selon l’estimation privée qu’il a produite, ce bien est estimé à CHF xxx. Si le recourant a exposé être copropriétaire à hauteur de 20 % de ce bien, lequel serait, toujours selon ses explications, grevé d’un gage immobilier à hauteur de CHF xxx ; il n’apporte aucune pièce permettant d’établir ces deux éléments. La réalisation dudit bien en vue de désintéresser le fisc pourrait par ailleurs s’avérer compliquée, compte tenu du fait que le recourant détient ce bien en copropriété avec son père et son frère.

Dans ces circonstances, il n’est pas possible de confirmer que les biens immobiliers du recourant permettraient de garantir l’ensemble de la créance présumable. Le recourant n’a d’ailleurs jamais offert lesdits biens immobiliers en garantie pour permettre de renoncer à tout ou partie des sûretés.

Ces différents éléments rendent vraisemblable que les droits du fisc sont objectivement en danger.

10) Il convient dès lors d’examiner les autres conditions de validité d’une demande de sûretés, à savoir que l'existence de la créance fiscale paraisse vraisemblable et que le montant de la garantie exigée ne se révèle pas manifestement exagéré.

À cet égard, le recourant considère que l’autorité intimé n’a pas prouvé que les montants des revenus et fortune calculés par ses soins sont vraisemblables. Il estime en particulier que les amendes ne pourraient pas donner lieu à des sûretés avant d’avoir été prononcées et confirmées. Il considère également que la présomption d’innocence aurait été violée, tout comme la garantie de sa propriété.

a. S'agissant de l'existence de la créance fiscale, le niveau de preuve exigé est celui de la simple vraisemblance. L'existence d'une créance fiscale se détermine sur la base d'un examen préjudiciel et prima facie de la situation. L'art. 169 al. 1 LIFD n'exige pas que les montants réclamés soient fixés définitivement (« même avant que le montant d'impôt ne soit fixé par une décision entrée en force »). Lorsque la créance n'est pas définitive, le montant présumé de l'impôt fait l'objet d'un examen sommaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_85/2020 précité consid. 5.1 et références).

La loi prévoit expressément qu'il n'y a pas lieu d'attendre une décision entrée en force pour exiger des sûretés ; dès lors, en cas de rappel d'impôt, il convient d'examiner si les reprises effectuées par le fisc et éventuellement contestées par le contribuable doivent être tenues pour plausibles (arrêt du Tribunal fédéral 2A.446/2006 précité consid. 5.1 ; ATA/1851/2019 précité consid. 4c), étant précisé qu'elles ne doivent pas être manifestement exagérées (Peter LOCHER, Kommentar zum Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, vol. III, 2015, n. 37 ad art. 169 LIFD).

b. L’art. 185 al. 1 LIFD prévoit que les amendes et les frais résultant de la procédure pénale sont perçus selon les art. 160 et 163 à 172 LIFD. Dès lors que cette disposition renvoie notamment à l'art. 169 LIFD, les sûretés prévues par cette disposition peuvent donc aussi porter sur des créances d'amende (ATF 145 III 30 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.1 ; Pierre CURCHOD, in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN [éd.], commentaire romand, IFD, 2ème éd. 2017, n. 3 ad art. 169 LIFD).

Une demande de sûreté peut également concerner une amende qui n'a pas encore été prononcée et porter sur le montant présumé de celle-ci (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.1 ; Pierre CURCHOD, op. cit., n° 5 ad art. 169 LIFD). D'ailleurs, le créancier qui a fait opérer un séquestre - lequel peut être demandé en tout temps sur la base de la demande de sûretés - sans poursuite ou action préalable peut le valider notamment en ouvrant la procédure d'amende, qui est assimilée à une action en reconnaissance de dette au sens de l'art. 279 LP (ATF 145 III 30 consid. 7.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.1).

Le Tribunal fédéral a déjà relevé que les demandes de sûretés peuvent servir à garantir le paiement des amendes envisagées, mais ne préjugent en rien de la culpabilité du contribuable, de sorte que la présomption d'innocence n'est ainsi pas violée (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.2).

c. La garantie de la propriété est ancrée à l'art. 26 al. 1 Cst. Elle n'est toutefois pas absolue. Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale (al. 1), être justifiée par un intérêt public (al. 2) et respecter le principe de la proportionnalité (al. 3). Ce principe exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins contraignante (règle de la nécessité) et qu'il existe un rapport raisonnable entre le but visé et les intérêts publics ou privés compromis (règle de la proportionnalité au sens étroit) (ATF 141 I 20 consid. 6.2.1; 140 I 168 consid. 4.2.1; 135 I 233 consid. 3.1).

La garantie de la propriété n'empêche en principe pas le prononcé de restrictions provisoires (séquestre civil, pénal ou administratif) destinées à assurer l'exécution de décisions finales ultérieures (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.3 ; 1C_6/2016 du 27 mai 2016 consid. 3.8).

L'exécution de la demande de sûreté ou du séquestre conduit à une restriction du droit de propriété. La réalisation anticipée d'un bien séquestré ou dans le cadre d'une poursuite en prestation de sûretés constitue une atteinte grave à la garantie de la propriété, de sorte qu’il convient d'examiner si les conditions de l'art. 36 al. 1 Cst. sont remplies (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1059/2020 précité consid. 6.2.4 ; 1B_461/2017 du 8 janvier 2018 consid. 2.1).

d. En l'espèce, comme susmentionné, il ressort des enquêtes pénales, et notamment de celle de la DAPE, que le recourant aurait commis, durant les périodes fiscales 2009 à 2017 des soustractions portant sur des montants importants d’impôt sur le revenu par le fait qu’il aurait notamment omis de déclarer des salaires et/ou des distributions dissimulées de revenu versés par Q______ et/ou ses sociétés filles.

Le recourant est administrateur unique avec signature individuelle des deux sociétés, dont il allègue n'être ni actionnaire ni ayant droit économique sans toutefois fournir d'explications claires à ce sujet. Par ailleurs, le fait que Q______ soit un trust irrévocable discrétionnaire n'exclut pas que le recourait ait pu bénéficier de distributions, même si celles-ci relèvent du pouvoir d'appréciation du trustee. Par ailleurs, le document produit par le recourant, censé mentionner les bénéficiaires effectifs d’U______ (détenue par Q______), cite le nom de trois personnes étant respectivement les personnes de contrôle du trustee et du protector de Q______. Or, comme relevé à juste titre par l’AFC-GE, il est douteux que les bénéficiaires effectifs du trust soient en même temps les personnes de contrôle du trustee et du protector de celui-ci.

Il ressort des explications fournies par l'AFC-GE qu’elle s’est fondée sur l'enquête pénale de la DAPE pour fixer le montant de la créance fiscale. Pour l’année 2017, le train de vie du recourant a été estimé à CHF xxx, sur la base de différents documents à sa disposition (budget, dépenses, etc.). Le DAPE a notamment déterminé que 50 % du train de vie du recourant était financé par des dons de son père. Il a également considéré que les 50 % restant correspondait au salaire imposable pour ses activités pour le groupe H______. L’AFC-GE a déterminé que le revenu découlant des activités du recourant pour le groupe H______ équivalait au montant des reprises (soit 50 % de son train de vie). Pour les années antérieures à 2017, le montant des revenus a, à chaque fois, été diminué de 5 %. Ainsi, pour l’ICC par exemple, les reprises (revenu imposable) estimées s'élèvent à CHF xxx pour 2017, puis à CHF xxx pour 2016, CHF xxx pour 2015, etc. La fortune du recourant n'a pas fait l'objet de reprises. Le montant des amendes a été fixé à une fois le montant de l’impôt soustrait. Les reprises ont ainsi été estimées au total à CHF xxx en ICC et CHF xxx en IFD. La chambre de céans considère qu’à teneur des pièces figurant au dossier, le montant des créances fiscales tel que fixé par l’AFC-GE apparaît comme étant plausible dans le cadre de l'examen prima facie qui prévaut à ce stade.

Il convient en particulier de relever qu’à teneur de la jurisprudence susmentionnée, l'absence du prononcé d'une amende ne s'oppose pas à des demandes de sûretés pour garantir le paiement de celle-ci. De même, une demande de sûretés pour des amendes envisagées ne préjuge en rien de la culpabilité du contribuable, de sorte que la présomption d'innocence n'est ainsi pas violée. Par ailleurs, l’estimation du montant des amendes à une fois le montant de l’impôt soustrait est conforme aux dispositions légales y relatives qui prévoient que la quotité de l'amende est, en général, fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée (art. 175 al. 2 LIFD ; art. 56 al. 2 LHID ; art. 69 al. 2 LPFisc). Cette estimation des amendes n’est ainsi pas excessive.

En outre, la restriction à la garantie de la propriété repose sur une base légale suffisante (art. 169 LIFD, en lien avec les art. 38 al. 1, 67, 69 et 88 ss LP). Les mesures de sûretés en cause visent à garantir le paiement d’éventuelles créances d’impôt et d'amendes pour tentatives de soustraction fiscale et relèvent donc d’un intérêt public. Enfin, les demandes de sûretés ont un caractère provisoire. Le recourant reste propriétaire des montants séquestrés et peut éviter la réalisation des biens saisis en fournissant d'autres sûretés. Les mesures en cause restent ainsi proportionnées. Les conditions de l'art. 36 Cst. sont partant respectées.

11) Finalement, le recourant critique le fait que l’autorité fiscale puisse être en même temps le créancier et l’autorité prononçant la mesure de séquestre.

Selon l'art. 170 al. 1 1ère phr. LIFD, la demande de sûretés, que l'administration cantonale de l'impôt fédéral direct peut exiger en tout temps si le contribuable n'a pas de domicile en Suisse ou que les droits du fisc paraissent menacés (art. 169 LIFD), est assimilée à une ordonnance de séquestre au sens de l'art. 274 LP. Pour cela, il faut toutefois que la première contienne toutes les informations exigées pour la seconde (art. 274 al. 2 LP ; ATF143 III 573 consid. 4.1.1).

L'autorité compétente pour prononcer le séquestre fiscal n'est pas le juge mais l'autorité fiscale. Elle accorde le séquestre, indépendamment du lieu de situation des objets à séquestrer. L'opposition au séquestre (art. 278 LP) n'est pas recevable (art. 170 al. 2 LIFD et 78 LHID). En revanche, le débiteur peut recourir contre la décision de sûretés selon les voies de recours ordinaires (art. 169 al. 3 LIFD ; ATF 143 III 573 consid. 4.1.1).

La compétence de l’autorité fiscale ne saurait dès lors être remise en question, malgré sa qualité de créancière.

Entièrement mal fondé, le recours doit donc être rejeté.

12) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 juillet 2020 par Monsieur M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 juin 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 3'000.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Rémi Sacerdote, avocat du recourant, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, Mme Pedrazzini Rizzi, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :