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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3428/2014

ATA/341/2015 du 14.04.2015 ( LIPAD ) , REJETE

Recours TF déposé le 27.05.2015, rendu le 18.09.2015, REJETE, 1C_273/15
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3428/2014-LIPAD ATA/341/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 avril 2015

 

dans la cause

 

Madame A______

et

B______

représentées par Me Jamil Soussi, avocat

contre

C______
représentée par Me François Bellanger, avocat

et

Monsieur D______, appelé en cause
représenté par Me Charles Poncet, avocat



EN FAIT

1) C______ est une fondation au sens des art. 80 et ss du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CC - RS 210), avec siège à Genève, ______.

C______ est subventionnée par l’État de Genève, la Ville de Genève (ci-après : la ville) et le canton de Vaud selon une convention de subventionnement quadriennal, couvrant actuellement l’exercice 2013 à 2016. La subvention de l’État de Genève et de la ville s’élève à CHF 19'000'000.-, prise en charge à raison de la moitié par chacune de ces collectivités publiques, ce qui correspond à environ 72 % du budget d’exploitation de C______, le solde étant principalement assuré par des sponsors privés.

2) C______ a engagé dès le 1er janvier 2012 Monsieur D______ en qualité de directeur général.

3) Elle a mis fin aux relations de travail qu’elle entretenait avec lui le 12 juillet 2012.

4) Un litige a surgi entre l’employeur et l’employé au sujet de ce licenciement et M. D______ a saisi le Tribunal des Prud’hommes du canton de Genève d’une demande en paiement d’un montant de CHF 1'800'000.-.

5) Ce litige a été résolu en 2013 par un accord transactionnel conclu entre les parties qui a conduit au versement d’une indemnité de licenciement.

6) L’existence de cet accord a été révélée par un communiqué de presse du 1er novembre 2013 émis par C______. À teneur dudit communiqué, les parties étaient convenues de ne pas divulguer le détail de l’accord intervenu, notamment le montant de l’indemnité versée ceci pour des raisons de confidentialité.

7) Par courriel du 8 novembre 2013, Madame A______, journaliste à B______ a requis de Madame F______, présidente de C______, l’accès à la convention transactionnelle précitée, respectivement au montant de la transaction, en se prévalant des droits que la loi sur l’information du public, l’accès aux documents et la protection des données personnelles du 5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08) lui conféraient sur ce point.

8) Le 8 mars 2013, Mme E______ a refusé de faire droit à cette requête laquelle était susceptible de porter atteinte à la sphère privée. Dès lors, des intérêts prépondérants s’opposaient à la communication de la convention transactionnelle précitée.

9) Le 14 novembre 2013, Mme A______ a déposé une demande de médiation auprès du préposé cantonal à la protection des données et à la transparence du canton de Genève (ci-après : le préposé).

10) La procédure de médiation n’a pas abouti. Dès lors, le préposé a rédigé le 29 septembre 2014 une recommandation préconisant que E______ communique à Mme A______ la convention de départ conclue entre E______ et M. D______, à défaut des montants « versés au dédommagement de ce dernier ».

Bien qu’étant une fondation de droit privé, E______ était soumise à la LIPAD dès lors que la ville et l’État de Genève exerçaient sur elle une maîtrise effective par le biais d’un subventionnement à hauteur d’un montant supérieur à 50 % de son budget de fonctionnement. S’agissant de l’accès du public à une convention établie sous seing privé, l’existence d’une clause de confidentialité convenue entre les parties ne pouvait permettre a priori d’empêcher l’accès aux documents, le caractère secret au public de celui-ci étant une qualification qui relevait de la loi seule et qui échappait à la volonté des parties. Les informations relatives au contenu d’une convention transactionnelle étaient sans nul doute de nature à favoriser la libre formation de l’opinion publique des citoyens et leur participation à la vie publique, dans la mesure où ce contenu touchait à la gestion financière d’une institution subventionnée à hauteur de plus de 50 % par des collectivités publiques cantonales et communales. Aucun intérêt privé de l’ex-directeur général à garder secret les montants de la transaction ne pouvait l’emporter sur l’intérêt public à la communication de cette information.

11) Le 13 octobre 2014, C______ a écrit à Mme A______. Elle refusait de communiquer le texte de la convention conclue entre C______ et M. D______. Elle n’acceptait pas le contenu de la recommandation du préposé et considérait que des intérêts privés prépondérants s’opposaient à la transmission de cette convention.

Cette décision pouvait faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) dans un délai de trente jours.

12) Par acte déposé le 11 novembre 2014, Mme A______ et B______ ont saisi la chambre administrative d’un recours contre le refus contenu dans la décision du 13 octobre 2014 de C______, concluant à l’annulation de celle-ci et à la communication de la convention de départ ainsi que des modalités de départ de M. D______. Le refus de communiquer la convention incriminée constituait une violation du droit d’accès aux documents d’une institution publique, conférée par la LIPAD. C______ n’avait pas la possibilité, par le bais d’une clause de confidentialité convenue dans le cadre d’une convention passée sous seing privé, de soustraire celle-ci à l’accès du public autorisé par la loi. Il y avait un intérêt public prépondérant, compte tenu du montant de la transaction en jeu, que le public soit informé des chiffres de la transaction, pour pouvoir se faire une idée de la bonne ou de la mauvaise tenue des comptes d’un organisme subventionné par l’État de Genève et la ville dont ils payaient en définitive les salaires et indemnités des employés.

13) Par courrier du 12 novembre 2014, le juge délégué a transmis à C______ le recours de Mme A______ et B______ en lui accordant un délai au 15 décembre 2014 pour répondre et transmettre un exemplaire de la convention qu’elle avait conclue avec M. D______. Cette convention lui serait communiquée sous le sceau de la confidentialité. Tant Mme A______ que B______ n’y auraient accès avant qu’il ait été statué de manière définitive sur le recours.

14) Dans un délai prolongé au 15 janvier 2015, C______ a répondu au recours, concluant préalablement à l’appel en cause de M. D______. Le recours de B______ devait être déclaré irrecevable, celle-ci ne pouvant se prévaloir d’aucun intérêt digne de protection puisqu’elle n’avait pas été la destinataire de la recommandation du préposé et de la décision de refus d’accès au document du 13 octobre 2014 qu’elle n’avait notifiée qu’à Mme A______.

L.e recours de cette dernière, devait être rejeté. Le refus qu’elle lui avait opposé était conforme à la loi. Bien que la liste des exceptions soulevées au droit d’accès au document soit suffisamment détaillée et complète pour qu’une saine pesée des intérêts puisse intervenir, une marge d’appréciation subsistait au-delà de celle-ci. En effet, certains des intérêts en jeu pouvaient appartenir simultanément à des intérêts publics ou privés suivant l’angle sous lequel on les considérait. C’est cette marge d’appréciation qu’il convenait de faire intervenir. En l’occurrence, c’était à tort que la communication du document litigieux était préconisée en faisant prévaloir le besoin d’information de la part du public et lui permettre de contrôler si les décisions prises respectaient les exigences légales. En effet, la convention litigieuse s’inscrivait dans un cadre transactionnel indépendamment des dispositions légales applicables dans la résolution d’un litige de droit du travail. En outre, contrairement à ce qu’avait affirmé le préposé, la convention comportait des informations relatives aux prestations de travail de M. D______, dont la nature ne revêtait aucune importance pour le public et n’avait pas à être dévoilée. C______ admettait son assujettissement à la LIPAD. Toutefois, par le biais du communiqué de presse du 1er novembre 2013, annonçant le règlement du litige, elle avait satisfait à ses obligations de transparence et n’avait pas à aller plus loin. Mme A______ s’était prévalue du besoin du public à être informé de la bonne ou mauvaise tenue des comptes d’une fondation subventionnée. Elle admettait donc que le but qu’elle poursuivait en demandant l’accès au document n’était pas d’informer le public mais de porter atteinte aux intérêts légitimes tant de C______ que de M. D______.

15) Avec les écritures précitées, C______ a communiqué au juge délégué sous pli fermé une copie de la convention litigieuse que ce dernier, dans le dossier de la procédure, a isolé des pièces consultables par les recourantes. Deux annexes citées dans celle-ci n’étaient pas jointes. Le juge délégué a renoncé à en demander la production, leur contenu étant explicité dans le texte soumis.

16) Après un échange d’écritures sur appel en cause, le juge, par décision du 11 février 2015, a ordonné l’appel en cause de M. D______ et lui a accordé un délai au 9 mars 2015 pour se déterminer sur le recours. Cette décision a été notifiée aux parties et est entrée en force.

17) Le 27 février 2015, M. D______ a conclu au rejet du recours. Il s’opposait à la communication de la convention du 1er novembre 2013. Il était tenu par une obligation de confidentialité qui résultait de l’accord transactionnel conclu avec C______. La demande d’accès au document attentait à sa sphère privée. L’accord intervenu avait été conclu au terme d’une longue et acrimonieuse procédure judiciaire. Ce type d’accord était typiquement visé par les exceptions prévues par la LIPAD pour autoriser le refus de la transmission d’un document public. Il voyait mal en quoi la communication de l’accord pourrait être d’une utilité quelconque. Il avait été titulaire d’un contrat de travail d’une durée de cinq ans. Le licenciement intervenu était contraire au droit et l’accord passé entre les parties constituait une solution qui avait empêché une condamnation inéluctable de C______.

18) Le 10 mars 2015, à la suite de la réception d’une lettre de clôture transmise aux parties par le juge délégué, les recourantes ont répliqué, persistant dans leurs conclusions. L’interprétation de la LIPAD faite par l’intimée et l’appelé en cause était erronée. Une clause de confidentialité convenue entre des parties ne pouvait empêcher le public d’accéder au document visé par la LIPAD. La sphère privée ne protégeait donc pas la confidentialité de la convention de solde de compte conclue entre M. D______ et C______. Si la convention était conforme au droit et à l’équité, on ne voyait pas en quoi elle pourrait nuire aux parties en présence. Si tel n’était pas le cas, soit si elle était insolite ou excessive, il existerait un intérêt public prépondérant à en connaître le contenu, ce qui était précisément le but de la LIPAD. Concernant les effets pécuniaires de la convention, l’intérêt des contribuables de connaître ce qu’il advenait de l’utilisation des deniers publics par les fondations subventionnées l’emportait sur les intérêts privés des cadres desdites fondations.

19) Sur ce, comme mentionné aux parties le 10 mars 2015, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) La chambre administrative est la juridiction compétente pour connaître des recours formés contre les décisions finales des institutions concernées refusant l’accès à un document dans le cadre de la LIPAD (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2) Les art. 28 et 30 LIPAD prévoient une procédure particulière pour permettre aux particuliers de solliciter des institutions concernées l’accès aux documents désirés. Une demande doit être formulée à l’institution par l’intéressé. Cette dernière doit consulter les institutions tierces dont les intérêts sont protégés par l’art. 26 LIPAD (art. 28 al. 4 LIPAD). L’acceptation, ou le refus, de la demande d’accès doit être signifié aux intéressés avec l’indication que le préposé peut être saisi d’une demande de médiation dans les dix jours suivants cette communication (art. 28 al. 6 et 30 al. 2 LIPAD). En cas d’échec de la médiation, le préposé émet une recommandation qu’il notifie aux parties. Si celui-ci considère que l’accès à la documentation doit être autorisé, l’institution requise a un délai de dix jours pour notifier sa décision (art. 30 al. 5 LIPAD). C’est contre celle-ci que le recours auprès de la chambre administrative est ouvert (art. 60 LIPAD).

3) En l’occurrence, cette procédure, qui s’impose à toute personne requérant l’accès à un document en vertu de la LIPAD n’a été respectée que par Mme A______. Son recours, interjeté dans le délai légal de l’art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10 ), est ainsi recevable.

En revanche, B______, préalablement à son recours, n’a ni requis pour son compte la production du document litigieux ni n’a a fortiori participé à la procédure de médiation. Le passage par cette phase constituant un préalable nécessaire au recours devant la chambre de céans et l’intervention d’un tiers dans un contentieux n’étant prévu ni par la LPA ni par la LIPAD ou une autre loi, son recours est irrecevable.

4) La LIPAD a pour but de favoriser la libre information de l’opinion et la participation à la vie publique (art. 1 LIPAD). En édictant cette loi, le législateur a érigé la transparence au rang de principe aux fins de renforcer tant la démocratie que le contrôle de l’administration et de valoriser l’activité étatique et favoriser la mise en œuvre des politiques publiques (MGC 2000 45/VIII 7671 ss). Le principe de transparence est un élément indissociable du principe démocratique et de l’État de droit prévenant notamment des dysfonctionnements et assurant au citoyen une libre formation de sa volonté politique (ATA/307/2008 du 10 juin 2008 ; Alexandre FLUCKIGER, Le projet de loi sur la transparence in : L’administration transparente, Thierry TANQUEREL et François BELLANGER [éd], 2002,
p. 142).

5) Le champ d’application de la LIPAD en matière d’accès aux documents en possession d’institutions est réglé à l’art. 3 al. 1 et 2 LIPAD. Selon l’art. 3 al. 2 LIPAD, font en particulier partie desdites institutions les personnes morales ou autres organismes de droit privé sur lesquels une ou plusieurs des institutions visées à l’al. 1 exercent une maîtrise effective par le biais, alternativement d’une participation majoritaire à leur capital social (ch.1) ; d’un subventionnement égal ou supérieur à 50% de leur budget de fonctionnement, mais au minimum de CHF 50'000.- (ch. 2) ; de la délégation en leur sein de représentants en position d’exercer un rôle décisif sur la formation de leur volonté ou la marche de leurs affaires (ch. 3).

Il est à noter que, concernant l’assujettissement à la LIPAD des personnes morales et autres institutions de droit public, le choix du législateur genevois est plus large que celui du législateur fédéral qui a prévu l’assujettissement à la loi fédérale sur le principe de la transparence dans l’administration du 17 décembre 2004 (Rtrans - RS 152.3) aux seules entités privées qui édictent des actes ou rendent en première instance des décisions au sens de l’art. 5 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021).

En l’espèce, C______ est subventionnée à hauteur de 72 % de son budget d’exploitation par l’État de Genève et par la ville, qui sont deux entités soumises à la LIPAD en vertu, le premier, de l’art. 3 al. 1 let. a LIPAD et, la seconde, de
l’art. 3 al. 1 let. b LIPAD. Le présent contentieux est donc soumis aux dispositions de cette loi.

6) Selon l’art. 24 LIPAD, toute personne a accès aux documents en possession des institutions, sauf exception prévue ou réservée par cette loi (art. 24 al. 1 LIPAD). L’accès comprend la consultation sur place des documents ou l’obtention de copies des documents (art. 24 al. 2 LIPAD).

7) L’art. 25 LIPAD prévoit que les documents sont tous les supports d’information détenus par une institution contenant des renseignements relatifs à l’accomplissement d’une tâche publique (al. 1). Constituent notamment des documents les messages, rapports, études, procès-verbaux approuvés, statistiques, registres, correspondances, directives, prises de position, préavis ou décisions (al. 2). Pour les informations qui n’existent que sous forme électronique, l’impression qui peut en être obtenue sur support papier par un traitement informatique est un document (al. 3). En revanche, les notes à usage personnel, les brouillons ou autres textes inachevés ainsi que les procès-verbaux encore non approuvés ne constituent pas des documents (al. 4).

8) Dans le domaine de la LIPAD, l’intérêt personnel et la qualité du demandeur n’interfèrent en aucune manière dans l’examen de ces conditions. Bien que le cercle des bénéficiaires de l’accès à l’information ne soit pas précisé dans le texte de ces dispositions (ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3), l’exposé des motifs figurant dans le rapport du Conseil d’État à l’appui du projet de loi précise que le droit d’accès aux documents est un droit reconnu à chacun, sans restriction liée notamment à la démonstration d’un intérêt digne de protection du requérant. Dès lors qu’un document doit être considéré comme accessible à une personne en vertu du principe de la transparence (et non en vertu des dispositions sur la protection des données personnelles ou des droits inhérents à la qualité de partie à une procédure), il n’y a pas de raison d’en refuser l’accès à d’autres personnes. Les exceptions prévues à l’art. 26 LIPAD constituent ainsi des clauses de sauvegarde pour les informations qui ne doivent pas être portées à la connaissance du public. Dès lors, ce qui est décisif dans l’application de la LIPAD, c’est le contenu même de l’information sollicitée et non la qualité du requérant (ATA/390/2011 du 21 juin 2011 consid. 7b  ; ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3 ; Mémorial du Grand Conseil - MGC 2000/VIII, séance 45, pp. 7691-7692).

9) L’adoption de la LIPAD a renversé le principe du secret de l’administration pour faire primer celui de la publicité. Toutefois, l’application de la LIPAD n’est pas inconditionnelle. En effet, dans la mesure où elle est applicable, elle ne confère pas un droit d’accès absolu et fait l’objet d’exceptions, aux fins notamment de garantir la sphère privée des administrés et de permettre le bon fonctionnement des institutions (ATA/211/2009 du 28 avril 2009 ; ATA/307/2008 du 10 juin 2008 consid. 3 ; MGC 2000/VIII 7694).

10) Selon l’art. 26 al. 1 LIPAD, sont soustraits au droit d’accès les documents à la communication desquels un intérêt public ou privé prépondérant s’oppose. Tel est le cas lorsque l’une ou l’autre des hypothèses visées à l’art. 26 al. 2 let. a 
à g LIPAD sont réalisées. Au regard de la problématique soulevée dans la présente cause, sont notamment soustraits à la consultation, les documents dont l’accès :

– entraverait notablement le processus décisionnel ou la position de négociation d’une institution (art. 26 al. 2 let. c LIPAD) ;

– rendrait inopérantes les restrictions légales à la communication de données personnelles à des tiers (art. 26 al. 2 let. f LIPAD) ;

– porterait atteinte à la sphère privée ou familiale (art. 26 al. 2  let. g LIPAD) ;

– révélerait des informations sur l’état de santé d’une personne (art. 26 al. 2 let. h LIPAD) ;

– révélerait des informations couvertes par des secrets professionnels, de fabrication ou d’affaires, le secret fiscal, le secret bancaire ou le secret statistique (art. 26 al. 2 let. i LIPAD) ;

– révélerait d’autres faits dont la communication donnerait à des tiers un avantage indu, notamment en mettant un concurrent en possession d’informations auxquelles il n’aurait pas accès dans le cours ordinaire des choses (art. 26 al. 2 let. j LIPAD).

Tel est également le cas pour les notes échangées entre les membres d’une autorité collégiale ou entre ces derniers et leurs collaborateurs (art. 26  al. 3 LIPAD) ou les documents à l’accès desquels le droit fédéral ou une loi cantonale fait obstacle (art. 26 al. 4 LIPAD).

11) Ainsi que l’intimée et l’appelé en cause s’en prévalent, la convention litigieuse est assortie d’une clause de confidentialité. Si l’existence d’une telle clause met en exergue une volonté des parties contractuelles de maintenir le contenu de celle-ci dans leur sphère privée et peut être prise en considération à ce titre dans la pesée des intérêts commandée par l’art. 26 al. 1 LIPAD, elle ne peut conduire à exclure la mise en œuvre sur ce document des droits d’accès conférés par la LIPAD.

12) Selon les travaux préparatoires, l’exception au droit d’accès aux documents lorsqu’il implique une atteinte notable à la sphère privée peut concerner la sphère privée d’administrés ou d’institutions. Elle n’exclut pas automatiquement l’accès à tout document dès l’instant que celui-ci concernerait la sphère privée d’un tiers mais requiert une pesée des intérêts en présence. Le Conseil d’État, dans son message, donnait l’exemple suivant en rapport avec la communication d’informations qu’autoriserait la LIPAD : « un avocat mandaté par une institution doit s’attendre à ce que le montant des honoraires qu’il perçoit du chef de ce mandat soit le cas échéant communiqué à des tiers, dès lors qu’il s’agit de l’utilisation des ressources de l’institution chargée de l’accomplissement de tâches de droit public, bien que cette information concerne sa sphère privée économique » (MGC 2000/VIII 7697).

13) En l’occurrence, le document ou l’information (montant de la transaction) dont la communication est demandée est en lien avec la résolution d’un conflit de droit du travail au sens de l’art. 319 al. 1 CC, qui ressortit donc au droit privé, concernant les rapports entre une institution, certes soumise à la LIPAD, et l’un de ses employés. Il ne touche pas à l’exécution d’une tâche publique par l’institution considérée, dans le cadre de laquelle des informations seraient données, et dans le cadre de laquelle on pourrait admettre que le montant des honoraires d’un mandataire extérieur à l’institution, engagé dans l’exécution de cette tâche, pourrait être communiqué, à l’instar de ce que préconise le message du Conseil d’État dont la teneur vient d’être rappelée. La communication de documents ou de l’information portant sur les rapports que l’institution soumise à la LIPAD entretient avec ses employés est délicate dans la mesure où elle peut toucher à la sphère privée de ceux-ci, que l’employeur doit préserver, à teneur de l’art. 328 CC. Certes, l’existence d’une procédure prud’homale a été révélée au public avec le montant maximal réclamé par l’employé à titre d’indemnité. Toutefois, si le conflit de droit du travail aboutit à une solution transactionnelle, cela ne signifie pas qu’automatiquement, l’institution doive, en vertu de la LIPAD, donner accès au contenu de celle-ci ou au montant de la transaction.

Si la communication de ce document peut présenter un intérêt public, il se résume à la possibilité de connaître plus de détails sur la façon dont le conflit a été résolu mais cette information resterait incomplète. Une convention transactionnelle est par essence conclue sans reconnaissance de responsabilité, les parties se mettant d’accord pour clore le litige moyennant le versement d’un montant convenu dont le détail n’est pas communiqué. La communication au public d’un tel document ou de ses données essentielles ne permettrait pas à ce dernier d’obtenir une information adéquate, dès lors qu’elle serait tronquée. Certes, le montant exact de la transaction pourrait par ce biais être connu. Néanmoins, aucun détail sur la façon dont il a été arrêté n’étant en règle générale donné - et ne l’ayant été dans le cas particulier - l’intérêt public à sa communication cède le pas à la protection de la sphère privée du travailleur, dès lors que ce dernier n’est pas d’accord avec sa communication. La question de la communication au public de données se rapportant à la résolution d’un conflit de droit du travail opposant une institution soumise à la LIPAD à l’un de ses employés doit être réglée sans distinction selon la fonction occupée par celui-ci. Dans ce cadre, la protection de la sphère privée du travailleur prévaut sur l’intérêt public à la communication de données concernant le fonctionnement d’une collectivité ou d’une institution soumise à la LIPAD.

Pour les motifs qui précèdent, le recours de Mme A______ sera rejeté.

14) Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 1’000.- sera mis à la charge conjointe et solidaire de Mme A______ et de B______ (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure sera allouée à C______, arrêtée à CHF 1’000.- à charge de Mme A______ et de B______, prises conjointement et solidairement. De même, une indemnité de procédure sera allouée à M. D______, arrêtée à CHF 1'000.- à charge de Mme A______ et de B______, prises conjointement et solidairement (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare irrecevable le recours interjeté le 11 novembre 2014 par B______ contre la décision de C______ du 13 octobre 2014 ;

déclare recevable le recours interjeté le 11 novembre 2014 par Madame A______ contre la décision de C______ du 13 octobre 2014 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1’000.- à la charge conjointe et solidaire de Madame A______ et de B______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’000.- à C______, à la charge conjointe et solidaire de Madame A______ et de B______  ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’000.- à Monsieur D______, à la charge conjointe et solidaire de Madame A______ et de B______  ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt, en copie, à Me Jamil Soussi, avocat des recourantes, à Me François Bellanger, avocat de C______, ainsi qu’à Me Charles Poncet, avocat de Monsieur D______, appelé en cause.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :