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Décisions | Assistance juridique

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AC/1174/2025

DAAJ/113/2025 du 04.09.2025 sur AJC/2336/2025 ( AJC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

AC/1174/2025 DAAJ/113/2025

COUR DE JUSTICE

Assistance judiciaire

DÉCISION DU JEUDI 4 SEPTEMBRE 2025

 

 

Statuant sur le recours déposé par :

 

A______ SA, c/o Monsieur B______, ______ [GE],

 

contre la décision du 9 mai 2025 de la vice-présidence du Tribunal civil.

 

 

 


EN FAIT

A.            a. Le 7 juin 2024, à la suite de l'échec de la tentative de conciliation, A______ SA (ci-après : la recourante), représentée par B______, son administrateur et actionnaire unique, a assigné en responsabilité ses anciens avocats C______, D______ et E______, en paiement de dommages-intérêts totalisant la somme de 4'309'275 fr. 43 (C/1______/2024).

Ce litige est survenu dans le contexte d'importations de ______ par la recourante, à un moment où l'imposition sur celui-ci a augmenté de 12% à 25%. La marchandise, entreposée aux ports francs, s'était dégradée et avait dû être détruite. Selon la recourante, ses conseils avaient été défaillants.

b. Le 10 juin 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a requis une avance de frais de 78'000 fr.

c. Les 2 avril et 11 juin 2024, la recourante a requis l'assistance juridique pour cette procédure, limitée à l'exonération des frais.

d. Par décision du 27 juin 2024, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête, parce qu'une personne morale ne pouvait pas obtenir l'assistance juridique et que l'indigence de son ayant-droit économique n'avait pas été démontrée.

e. Par décision DAAJ/116/2024 du 30 juin 2024 (AC/1530/2024), la Cour de justice a rejeté le recours formé par la recourante à l'encontre de cette décision du 27 juin 2024.

En substance, selon la Cour, la recourante soutenait en vain qu'elle aurait dû être interpellée au sujet des ressources financières de son ayant-droit économique, puisque la recourante semblait disposer de bonnes connaissances juridiques, à teneur de son acte de recours.

De plus, "dans la mesure où aucun actif de la recourante n'était en jeu dans le cadre de la procédure au fond", il était douteux qu'elle puisse obtenir l'assistance juridique.

Enfin, en tout état de cause, l'action en responsabilité pouvait durer plusieurs années et rien ne permettait de garantir que sa faillite, déjà prononcée, puis rétractée, ne serait pas à nouveau prononcée avant l'issue de la procédure civile.

f. Par arrêt 4A_680/2024 du 6 janvier 2025, le Tribunal fédéral a déclaré le recours de la recourante irrecevable, pour cause de tardiveté.

g. Le 27 février 2025, la recourante a avisé le Tribunal de ce qu'elle n'était pas en mesure de verser l'avance de frais et a retiré son action en responsabilité, en précisant qu'il s'agissait d'un désistement d'instance et non pas d'action.

h. Par jugement JTPI/3205/2025 du 28 février 2025, le Tribunal a donné acte à la recourante du retrait de sa demande.

B.            a. Par acte du 17 mars 2025, la recourante a renouvelé son assignation à l'encontre de C______, D______ et E______ par-devant le Tribunal, concluant au paiement de dommages-intérêts en 4'309'275 fr. 43 (C/2______/2025).

b. Le 6 mai 2025, la recourante a requis l'assistance juridique à l'appui de cette procédure et a déposé, le lendemain, une motivation et pièces. Elle a rappelé ne plus disposer d'actifs, à la suite de la destruction de son stock [de] ______, et que sa survie dépendait de l'issue de la procédure civile. Elle a fait valoir que sa seconde requête d'assistance juridique se distinguait de la première, car elle produisait les pièces relatives à l'indigence de son ayant-droit économique.

c. Par décision du 9 mai 2025, notifiée le 17 mai 2025, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée.

Selon cette décision, la recourante ne pouvait pas bénéficier de l'assistance juridique en raison de sa personnalité morale. De plus, la Cour lui avait refusé, pour le même litige, le bénéfice de l'assistance juridique. Comme le procès à la base de la nouvelle requête était le même car il opposait les mêmes parties pour une valeur litigieuse identique, les principes évoqués par la Cour demeuraient valables pour refuser la nouvelle requête.

A supposer que l'assistance juridique doive être exceptionnellement accordée à une personne morale, les conditions feraient défaut, puisque son seul actif n'était pas en jeu, la recourante ayant admis ne plus en détenir.

En tout état de cause, les chances de succès de l'action en responsabilité de la recourante étaient nulles, puisqu'à la suite du retrait de sa première action, elle ne pouvait pas la déposer à nouveau, en application de l'art. 65 CPC.

C.           a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 27 mai 2025 à la présidence de la Cour de justice.

Préalablement, la recourante conclut à la recevabilité de son recours. Elle demande à ce que l'Autorité de première instance ordonne la production du dossier complet de la cause C/2______/2025 [actuellement pendante], y compris le dossier de la procédure incidente sur assistance judiciaire AC/1174/2025, bordereaux de pièces respectifs inclus, subsidiairement lui impartisse un délai à cette fin. Elle requiert également de l'Autorité de recours qu'elle ordonne à l'Autorité de première instance de produire le dossier complet de la [précédente] cause C/1______/2024, y compris le dossier de la procédure incidente sur assistance judiciaire AC/1530/2024, les bordereaux de pièces respectifs inclus, subsidiairement lui impartisse un délai à cette fin.

Principalement, elle conclut à l'annulation de la décision de la vice-présidence du Tribunal civil et à l'octroi de l'assistance juridique partielle dans la C/2______/2025, soit l'exonération d'avance de frais, de sûretés et des frais judiciaires. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause en première instance pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.

EN DROIT

1.             1.1 La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 121 CPC et art. 21 al. 3 LaCC), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC et 11 RAJ).

1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.

1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).

2. L'apport des pièces requises préalablement par la recourante ne sera pas ordonné, car celles-ci ne sont pas utiles à la solution du litige.

3.             La recourante reproche à la vice-présidence du Tribunal civil un établissement des faits incomplet et une violation de l'art. 65 CPC pour avoir considéré un retrait de sa première demande en paiement avec désistement d'action, au lieu d'un retrait d'instance, puisque son action en paiement n'avait pas été notifiée aux parties défenderesses. L'Autorité de première instance ne pouvait donc pas, sans commettre un arbitraire, retenir que les chances de succès de son action en paiement étaient nulles.

Elle fait valoir une violation de l'art. 117 let. a CPC, car elle ne dispose plus d'actif, de sorte que la condition relative à un litige portant sur son seul actif ne peut être exigé d'elle, encore moins pour lui refuser l'assistance juridique.

Elle réfute un argument retenu par la DAAJ/116/2024 du 30 septembre 2024 sus évoquée parce que le refus de l'assistance juridique ne saurait se justifier par une éventuelle faillite susceptible d'être prononcée avant le terme de la procédure civile. A son sens, si l'assistance juridique doit être refusée aux personnes morales lorsque la procédure civile ne garantit pas leur survie, cela signifie, a contrario, qu'elle doit être accordée aux personnes morales lorsque la procédure civile garantit leur survie.

3.1 Selon les art. 29 al. 3 Cst. et 117 CPC, toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite.

La Constitution fédérale n'autorise pas inconditionnellement la partie qui a requis en vain l'assistance judiciaire à formuler une nouvelle demande (arrêts du Tribunal fédéral 5A_58/2020 du 13 juillet 2020 consid. 4 et les références citées; 6B_844/2017 du 18 janvier 2018 consid. 2; 4A_410/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3.2). Sous l'angle constitutionnel, il suffit que la partie concernée soit en mesure de requérir une fois l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 5A_58/2020 du 13 juillet 2020 consid. 4 et les références citées; 6B_844/2017 du 18 janvier 2018 consid. 2 et la référence citée).

Une deuxième demande d'assistance judiciaire fondée sur le même état de fait présente les caractéristiques d'une demande de reconsidération à l'examen de laquelle ni la loi ni la Constitution ne confèrent une prétention juridique (ATF 136 II 177 consid. 2.1; arrêts du Tribunal fédéral 2C_275/2024 du 17 février 2025 consid. 3.5; 5A_681/2023 du 6 décembre 2024 consid. 6.2.2 destiné à la publication; 4A_521/2024 du 13 novembre 2024 consid. 3.2; 4A_380/2024 du 11 septembre 2024 consid. 1.3.1; 5A_837/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.3; 5A_886/2017 du 20 mars 2018 consid. 3.3.2 et les références citées).

3.1.1 Si le requérant invoque des faits et des moyens de preuve importants dont il n'avait pas connaissance lors de la procédure précédente ou qu'il lui était déjà impossible, en droit ou en fait, de faire valoir à l'époque ou qu'il n'y avait aucune raison de le faire, il a droit à une révision (pseudo nova; arrêts du Tribunal fédéral 2C_295/2024 du 26 février 2025 consid. 3.2; 2C_275/2024 du 17 février 2025 consid. 3.5; 5A_681/2023 du 6 décembre 2024 consid. 6.2.2; 4A_521/2024 du 13 novembre 2024 consid. 3.2; 5A_837/2023 du 10 janvier 2024 consid. 3.2.3; 5A_886/2017 du 20 mars 2018 consid. 3.3.2 et les références citées).

3.1.2 Si le requérant invoque un changement de situation (vrai nova), l'autorité devra vérifier l'existence de circonstances nouvelles et examiner si celles-ci justifient une entrée en matière et la modification de la décision initiale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_295/2024 du 26 février 2025 consid. 3.2; 2C_275/2024 du 17 février 2025 consid. 3.5; 4A_521/2024 du 13 novembre 2024 consid. 3.2; 4A_380/2024 du 11 septembre 2024 consid. 1.3.2; 5A_521/2021 du 28 avril 2022 consid. 3.1 et les références citées).

Dès lors que la décision portant sur l'octroi de l'assistance judiciaire n'est revêtue que de la force de chose jugée formelle, et non matérielle, une nouvelle requête, fondée sur un changement de circonstances (vrais nova) – à savoir ici la démonstration de "l'irrécouvrabilité" des dépens –, est en effet recevable en tout temps (arrêt du Tribunal fédéral 5A_681/2023 du 6 décembre 2024 consid. 6.2.2).

Il n'existe pas de changement de circonstances si le requérant se contente de fournir de nouveaux moyens de preuve visant à étayer sa situation financière (arrêts du Tribunal fédéral 4A_482/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.3; 4A_410/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3.2).

3.1.3 Selon l'art. 65 CPC, le demandeur qui retire son action devant le tribunal compétent ne peut la réintroduire contre la même partie et sur le même objet que si le tribunal n’a pas notifié sa demande au défendeur ou si celui-ci en a accepté le retrait.

Le demandeur n'est tenu par son obligation procédurale de poursuivre le procès qu'à partir du moment où la demande est notifiée au défendeur. Ainsi, le retrait précoce de la demande, avant sa notification à la partie défenderesse, n'emporte pas désistement d'action, mais uniquement d'instance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_65/2024 du 18 août 2024 consid. 2.2.1; ACJC/223/2023 du 10 février 2023 et les références citées).

3.2 En l'espèce, la question juridique à résoudre est celle de savoir si c'est avec raison ou non que l'Autorité de première instance a refusé l'assistance juridique à la recourante, dotée de la personnalité morale, à l'appui de sa seconde assignation introduite le 17 mars 2025, à l'encontre des mêmes défendeurs et concernant le même litige que sa première assignation, du 7 juin 2024, pour laquelle elle avait requis en vain l'assistance juridique.

Les griefs invoqués par la recourante relatifs à une violation des art. 65 CPC – au demeurant fondée – et 177 let. a CPC ne sont toutefois pas pertinents. En effet, la recourante ne peut pas renouveler une demande d'assistance juridique à l'appui du même litige, pour lequel elle l'avait déjà requise en vain, sans faire valoir de faits nouveaux. Or, il n'existe pas de changement de circonstances parce que la recourante expose aujourd'hui l'indigence de son ayant-droit économique (arrêts du Tribunal fédéral 4A_482/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.3; 4A_410/2013 du 5 décembre 2013 consid. 3.2). Ainsi, elle ne peut pas rattraper aujourd'hui une omission qui lui avait déjà été reprochée par la Cour (DAAJ/116/2024 du 30 septembre 2024).

C'est donc avec raison que la vice-présidence du Tribunal civil a refusé l'assistance judiciaire à la recourante, avec cette précision que la requête du 6 mai 2025 aurait dû être déclarée irrecevable.

Infondé, le recours sera, dès lors, rejeté.

4.             Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :


A la forme
:

Déclare recevable le recours formé le 27 mai 2025 par A______ SA contre la décision rendue le 9 mai 2025 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/1174/2025.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ SA de toutes autres conclusions.

Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.

Notifie une copie de la présente décision à A______ SA (art. 327 al. 5 CPC et 8 al. 3 RAJ).

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Victoria PALLUD, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.