Décisions | Assistance juridique
DAAJ/102/2025 du 12.08.2025 sur AJC/1807/2025 ( AJC ) , ADMIS
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE AC/2379/2018 DAAJ/102/2025 COUR DE JUSTICE Assistance judiciaire DÉCISION DU MARDI 12 AOUT 2025 |
Statuant sur le recours déposé par :
Monsieur A______, domicilié ______, représenté par Me B______, avocate,
contre la décision du 14 avril 2025 de la vice-présidence du Tribunal civil.
A. a. Par décision du 4 septembre 2018, la vice-présidence du Tribunal de première instance a octroyé l'assistance juridique à A______ (ci-après : le recourant) pour la procédure auprès du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/1______/2006, limité à la première instance et à 8h00 d'activité d'avocate, audiences et forfait courriers/téléphone en sus. Me B______, avocate, a été désignée pour défendre les intérêts du recourant.
b. Par décision du 6 septembre 2022, la vice-présidente du Tribunal de première instance a étendu le bénéfice de l'assistance juridique de 4h00 d'activité d'avocate supplémentaires, soit 12h00 au total, audiences et forfait courriers/téléphones en sus, ledit octroi étant subordonné au versement d'une participation mensuelle de 400 fr. dès le 1er octobre 2022.
B. a. Par courrier du 4 avril 2025, le conseil du recourant a produit son état de frais pour la période du 29 août 2018 au 25 mars 2024 pour un montant de 3'209 fr. 80.
b. Par décision d'indemnisation du 9 avril 2025, le greffe de l'assistance juridique (ci-après : GAJ) a accordé et versé la somme de 3'206 fr. 65 au conseil du recourant.
C. a. Par décision du 14 avril 2025, notifiée le 1er mai 2025, la vice-présidence du Tribunal civil a condamné le recourant à rembourser la somme de 3'206 fr. 65 fr. à l'État de Genève, correspondant au montant versé à son avocate à l'issue de la procédure pour l'activité déployée en sa faveur. Il a été retenu que le recourant n'avait, jusqu'à présent, versé aucune mensualité. Il était précisé que "[p]our le surplus, la personne bénéficiaire n'a[vait] allégué aucun changement de sa situation financière depuis la date de l'octroi susmentionné", de sorte que le "remboursement des prestations de l'Etat [était] donc présumé exigible en application de l'art. 4 al. 2 RAJ".
b. Le dossier de première instance ne contient pas d'interpellation du recourant relative à l'évolution de sa situation financière.
D. a. Par acte expédié le 12 mai 2025 à la Présidence de la Cour de justice, le recourant a formé recours contre la décision du 14 avril 2025, concluant, sous suite de frais et dépens, à ce qu'il soit constaté que sa situation financière ne lui permettait pas de rembourser l'assistance judiciaire et à l'annulation de la décision entreprise.
Le recourant a produit des pièces nouvelles.
b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.
c. Par arrêt DAAJ/66/2025 du 26 mai 2025, la Vice-présidente de la Cour a admis la requête d'effet suspensif assortissant le recours formé par le recourant contre la décision rendue le 14 avril 2025.
1. 1.1. Les décisions de remboursement prises par la vice-présidence du Tribunal de première instance, rendues en procédure sommaire (art. 119 al. 3 CPC), peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la présidence de la Cour de justice (art. 121 CPC, 21 al. 3 LaCC, 11 et 19 al. 5 RAJ), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 LOJ et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RSG E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours (art. 321 al. 1 CPC) dans un délai de dix jours (art. 321 al. 2 CPC).
1.2. En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.
1.3. Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 121 CPC), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515, p. 453).
2. À teneur de l'art. 326 al. 1 CPC, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables dans le cadre d'une procédure de recours.
En l'espèce, les pièces 0, 1, 3 et 6 produites par le recourant sont recevables, soit parce qu'elles ont été soumises à l'Autorité de première instance, soit parce qu'elles comprennent des décisions judiciaires connues de la vice-présidence de la Cour. En revanche, les pièces 2, 4 et 5 sont des pièces nouvelles irrecevables.
3. 3.1. Eu égard à sa nature formelle, la violation du droit d'être entendu doit être examinée en premier lieu (arrêt du Tribunal fédéral 5A_662/2022 du 17 novembre 2022 consid. 3.3.1 et les références citées).
Selon l'art. 29 al. 2 Cst, les parties ont le droit d'être entendues.
Ce droit comprend notamment, pour l'intéressé, celui de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1; 145 I 167 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_679/2022 du 25 avril 2023 consid. 4.1).
Le droit d'être entendu étant de nature formelle, sa violation conduit en principe à l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 I 11 consid. 5.3; 142 II 218 consid. 2.8.1; 137 I 195 consid. 2.2; 135 I 279 consid. 2.6.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_210/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.4; 5A_662/2022 du 17 novembre 2022 consid. 3.3.1).
Le droit d'être entendu n'est toutefois pas une fin en soi; il constitue un moyen d'éviter qu'une procédure judiciaire aboutisse à un jugement vicié en raison de la violation du droit des parties de participer à la procédure. Ainsi, lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation de ce droit a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_210/2023 du 28 septembre 2023 consid. 3.4).
Selon l'art. 4 RAJ, en règle générale et pour autant que cela ne porte pas atteinte aux besoins fondamentaux de la personne requérante et de sa famille, l'assistance juridique est assortie du versement d'une participation mensuelle valant remboursement anticipé des prestations de l'Etat au sens de l'art. 123 al. 1 CPC (al. 1). A l'issue de la procédure, le remboursement des prestations de l'Etat est réputé exigible à concurrence du versement de 60 mensualités, sous réserve de l'art. 123 CPC (al. 2).
Selon l'art. 19 RAJ, lorsque l'assistance juridique est assortie du versement d'une participation mensuelle valant remboursement anticipé des prestations de l'Etat, la personne bénéficiaire est condamnée, à l'issue de la procédure, au paiement des frais dont elle a été exonérée et au remboursement des montants versés par l'Etat, sous déduction des mensualités déjà payées (al. 1). La somme due à ce titre ne peut excéder l'équivalent de 60 mensualités si la situation de la personne bénéficiaire ne s'est pas améliorée (al. 2). Si la situation de la personne bénéficiaire s'est améliorée ou si elle est de toute manière en mesure d'effectuer un paiement, le paiement de l'intégralité des prestations de l'Etat peut être exigé (al. 3).
3.2. En l'espèce, la décision du 14 avril 2025 a condamné le recourant à payer 3'206 fr. 65 pour les honoraires versés par l'assistance juridique, en relation avec la procédure C/1______/2006, sans que le GAJ, contrairement à sa pratique constante, n'ait préalablement invité le recourant à actualiser sa situation financière.
Il s'ensuit que le droit d'être entendu du recourant a été violé. Exiger son respect ne représente pas une fin en soi, puisque le réexamen de sa situation financière était un préalable nécessaire avant de rendre une décision de remboursement, afin que l'Autorité de première instance statue en connaissance de cause.
Autrement dit, la vice-présidence du Tribunal civil ne pouvait pas appliquer les art. 4 al. 2 et 19 al. 1 RAJ en présupposant ou en présumant que la situation financière du recourant était demeurée inchangée, faute d'indications contraires de ce dernier, mais devait expressément l'interpeler afin de statuer sur la base d'une situation financière actualisée au terme de la procédure au fond engagée.
Le recours est fondé, de sorte que la décision du 14 avril 2025 de la vice-présidence du Tribunal civil sera annulée et la cause renvoyée en première instance pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
Point n'est besoin, dès lors, d'examiner les autres griefs du recourant.
4. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, l'État de Genève sera condamné à verser au recourant 400 fr. à titre de dépens (ATF 140 III 501 consid. 4).
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PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé par A______ le 12 mai 2025 contre la décision rendue le 14 avril 2025 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/2379/2018.
Au fond :
Annule la décision entreprise.
Cela fait :
Renvoie la cause à la vice-présidence du Tribunal civil pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
Déboute A______ de toutes autres conclusions.
Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours.
Condamne l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à verser la somme de 400 fr. à A______, à titre de dépens.
Notifie une copie de la présente décision à A______ en l'Étude de Me B______ (art. 137 CPC).
Siégeant :
Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Victoria PALLUD, greffière.
Indication des voies de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.