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Décisions | Chambre civile

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C/22642/2024

ACJC/1348/2025 du 03.10.2025 sur OTPI/520/2025 ( SDF )

Normes : CPC.315
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/22642/2024 ACJC/1348/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 3 OCTOBRE 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, Royaume-Uni, appelant d'une ordonnance rendue par la 7ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 8 août 2025, représenté par Me Sirin YÜCE, avocate, Charles Russell Speechlys SA, rue de la Confédération 5, 1204 Genève,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par
Me Philippe KOHLER, avocat, Walder Wyss SA, rue du Rhône 14, case postale,
1211 Genève 3.

 


Attendu, EN FAIT, que par ordonnance du 8 août 2025, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures provisionnelles dans le cadre d’une action en modification d’un jugement de divorce, a attribué à B______ la garde de C______, né le ______ 2015, D______, née le ______ 2018 et E______, né le ______ 2019 (ch. 1 du dispositif), autorisé B______ à entreprendre seule les démarches permettant de scolariser les enfants dans une école privée à Genève (ch. 2), réservé à A______ un droit de visite sur les enfants qui s'exercera, sauf accord contraire des parties un week-end sur deux à Genève du vendredi après l'école ou à une heure compatible avec le vol aérien jusqu'au dimanche à 19h00 ou à une heure compatible avec le vol aérien de retour et les week-ends fériés impliquant au moins trois jours de congé durant lesquels les enfants pourront se rendre à F______ (ch. 3), précisé la manière dont les parents se répartissaient les vacances des enfants (ch. 4) ainsi que la manière dont se dérouleraient les échanges téléphoniques (avec ou sans vidéo) durant le temps de garde entre les enfants et l'autre parent (ch. 5), condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, allocations familiales non comprises, à titre de contribution à l'entretien de C______ le montant de 7'300 fr., de D______ le montant de 6'200 fr. et de E______ le montant de 5'700 fr., dès le prononcé de l’ordonnance (ch. 6), statué sur les frais et dépens (ch. 7 et 8) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 9);

Que par acte déposé à la Cour de justice le 12 septembre 2025, A______ a formé appel contre cette ordonnance; qu’il a conclu à son annulation et, cela fait, au renvoi de la cause au Tribunal pour instruction de la cause au fond et à ce que, dans ce cadre, il soit ordonné à B______ de produire l’ensemble des pièces permettant de déterminer ses revenus et sa fortune et à ce qu’il soit ordonné au SEASP d’établir un complément de rapport répondant notamment à différentes questions;

Qu’il a préalablement conclu à la suspension du caractère exécutoire des ch. 1 à 6 du dispositif de l’ordonnance attaquée; qu’il a relevé que selon la convention de divorce, les parties exerçaient une garde alternée 60%-40% et que dans son rapport du 26 mai 2025, le SEASP recommandait que la garde des enfants lui soit attribuée; qu’en raison de son emploi du temps, il ne pourrait être à Genève que le samedi matin et ne verrait ainsi les enfants que 3,5 jours par mois, alors qu’il les avait 40% du tempos jusqu’alors; que concernant les contributions d’entretien, il était obligé de s’acquitter de montants supérieurs à son disponible;

Qu’invitée à se déterminer, B______ a conclu au rejet de la requête d’effet suspensif; que les enfants avaient vécu jusqu’à présent avec elle la semaine et il avait été convenu en janvier 2025 qu’elle les amènerait un week-end par mois à F______; que A______ dispose d’une fortune de 1'700'000 fr., susceptible de lui rapporter 10'000 fr. par mois et il dispose de moyens financiers suffisants pour s’acquitter des contributions d’entretien;


 

Considérant, EN DROIT, que l'appel n'a pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 2 let. b CPC); qu’à teneur de l'art. 315 al. 4 let. b CPC, l'exécution des mesures provisionnelles peut toutefois être exceptionnellement suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable;

Que le préjudice difficilement réparable peut être de nature factuelle; il concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès ; que le dommage est constitué, pour celui qui requiert les mesures provisionnelles, par le fait que, sans celles-ci, il serait lésé dans sa position juridique de fond et, pour celui qui recourt contre le prononcé de telles mesures, par les conséquences matérielles qu'elles engendrent ; que, saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III consid. 6.3 et les références; arrêts 5A_718/2022 du 23 novembre 2022 consid. 5.1; 5A_200/2022 du 28 septembre 2022 consid. 4.1; arrêt 5A_978/2016 du 16 février 2017 consid. 4);

Que l'autorité d'appel doit faire preuve de retenue et ne suspendre le caractère exécutoire de la décision de première instance que dans des cas exceptionnels (cf. art. 315 al. 4 let. b CPC); elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation lui permettant de tenir compte de l'ensemble des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF
138 III 565 consid. 4.3.1; 137 III 475 consid. 4.1 et les auteurs cités; arrêts 5A_474/2024 du 23 août 2024 consid. 5; 5A_206/2024 du 7 juin 2024 consid. 3.1.1);

Qu’en matière de garde, des changements trop fréquents peuvent être préjudiciables à l'intérêt de l'enfant ; que par conséquent, lorsque la décision de mesures protectrices ou provisionnelles statue sur la garde ou modifie celle-ci de sorte que l'enfant devrait être séparé du parent qui prenait régulièrement soin de lui au moment de l'ouverture de la procédure ayant donné lieu à la décision attaquée, le bien de l'enfant commande, dans la règle, de maintenir les choses en l'état et de laisser celui-ci auprès de la personne qui lui sert actuellement de référence ; que la requête d'effet suspensif du parent qui entend conserver la garde doit ainsi être admise, sauf si le maintien de la situation antérieure met en péril le bien de l'enfant ou encore si l'appel paraît sur ce point d'emblée irrecevable ou manifestement infondé (ATF 144 III 469 consid. 4.2.1; 138 III 565 consid. 4.3.2; arrêt 5A_206/2024 du 7 juin 2024 consid. 3.1.2);

Que la suspension de l'exécution d'une décision condamnant l’appelant au paiement d'une somme d'argent peut se justifier si ce paiement expose le débiteur à des difficultés financières ou si le recouvrement du montant payé, en cas d'admission du recours, apparaît aléatoire en raison, généralement, de la solvabilité douteuse du créancier (ATF 107 Ia 269 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_129/2025 du 2 mai 2025 consid. 2; 5A_130/2025 du 29 avril 2025 consid. 4; 6B_349/2025 du 28 avril 2025 consid. 3); que dans le cas d'une créance d'entretien, il faut cependant tenir compte du fait que les mesures provisionnelles prises par le juge de première instance ne doivent pas être rendues inopérantes à la légère, ainsi que des conséquences qu'une suspension de l'exécution des pensions alimentaires peut avoir pour le créancier concerné (arrêts du Tribunal fédéral 5A_285/2025 du 5 juin 2025, consid. 3.2; 5A_661/2015 du 2 décembre 2015 consid. 5.2);

Qu’en l’espèce, la garde des enfants était assurée durant la semaine par la mère avant que ne soit rendue l’ordonnance entreprise, de sorte que la décision attaquée n’engendre pas de changement à cet égard pour les enfants; que l’ordonnance attaquée prévoit certes, en ce qui concerne le droit de visite, une réglementation différente que celle qui prévalait antérieurement, mais que l’exercice de celui-ci selon des modalités différentes durant la procédure d’appel n’est vraisemblablement pas contraire au bien des enfants, qui, à teneur de l’ordonnance peuvent voir leur père un week-end sur deux alors que la réglementation antérieure prévoyait un week-end par mois; que la requête d’effet suspensif sera dès lors rejetée à cet égard;

Que concernant les contributions d’entretien, si le Tribunal a considéré que l’appelant percevait des revenus de 31'340 fr. et supportait des charges de 17'000 fr., il a fixé les contributions d’entretien litigieuses en précisant qu’il tenait également compte des dividendes que l’appelant devrait toucher en plus des actions qu'il détient et du produit de la vente de plusieurs millions de francs de ses biens immobiliers en Suisse, de sorte qu'il aurait les moyens financiers nécessaires pour couvrir, sur mesures provisionnelles, l'intégralité des charges susvisées des enfants; que le recourant ne conteste pas avoir vendu des appartements à G______ [VD] pour un montant de plus de deux millions de francs; qu’il ne peut dès lors être retenu, prima facie, que le paiement du montant des contributions d’entretien durant la procédure d’appel, aux moyens de ses revenus, voire de sa fortune pour une durée limitée, entame son minimum vital; que la requête d’effet suspensif sur ce point n’est dès lors pas fondée;

Qu’au vu de ce qui précède, la requête tendant à la suspension du caractère exécutoire de l’ordonnance attaquée sera rejetée;

Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec l'arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire de l’ordonnance entreprise :

Rejette la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire de l’ordonnance OTPI/520/2025 rendue le 8 août 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/22642/2024.

Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt au fond.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF - RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.