Décisions | Chambre civile
ACJC/1060/2025 du 08.08.2025 sur JTPI/3128/2025 ( OO )
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/9522/2020 ACJC/1060/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU VENDREDI 8 AOÛT 2025 |
Entre
Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par la 2ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 24 février 2025, représenté par Me Vanessa NDOUMBE NKOTTO, avocate, OratioFortis Avocates, rue Etienne-Dumont 22, 1204 Genève,
et
Madame B______, domiciliée ______, intimée, représentée par Me Monica KOHLER, avocate, rue Marignac 9, case postale 324, 1211 Genève 12.
Attendu, EN FAIT, que le 26 mai 2020, B______ a formé une demande unilatérale en divorce, complétée le 30 janvier 2023, concluant principalement à ce que le Tribunal de première instance prononce le divorce et condamne A______ à lui verser une somme de 6'700 fr. à titre de contribution à son entretien sans limitation dans le temps, dise que sa part sur les avoirs de prévoyance professionnelle de A______ s'élève à 800'000 fr., ordonne en tant que de besoin la compensation du montant lui revenant dans le cadre du partage des avoirs de prévoyance professionnelle avec la part lui revenant sur la villa conjugale, liquide le régime matrimonial des époux et, ce faisant, lui attribue la pleine propriété de la villa sise route 1______ no. ______ à C______ [GE], ordonne au conservateur du Registre foncier de procéder au transfert de ce bien, en pleine propriété, à son nom, et condamne A______ à lui rembourser une somme de 3'521 fr. 55 correspondant aux frais médicaux non remboursés du fait de l'annulation de sa couverture d'assurance;
Que, par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 23 juin 2023, le Tribunal, statuant sur requête de B______, a ordonné le blocage, jusqu'à droit jugé ou accord entre les parties, de la moitié des avoirs de prévoyance accumulés par A______ entre le ______ 1987 [date du mariage] et le 26 mai 2020 auprès de la [caisse de pension] D______ dans le cadre de son emploi auprès du E______;
Que, par courriel du 1er décembre 2023, la D______ a avisé B______ de ce que l'ordonnance sur mesures superprovisionnelles du 23 juin 2023 ne pouvait être exécutée;
Vu le jugement du 24 février 2025 par lequel le Tribunal, statuant par voie de procédure ordinaire, a dissous par le divorce le mariage contracté le ______ 1987 à F______ (Kenya) par les époux A______, né le ______ 1962, et B______, née le ______ 1963, tous deux de nationalité kenyane (ch. 4 du dispositif), attribué à B______ la propriété exclusive des parcelles n° 2______, n° 3______ et 1/5ème de la parcelle n° 4______ de la commune de C______, dont les parties sont actuellement copropriétaires, de même que l'ensemble des droits et obligations relatifs à ce bien immobilier (ch. 5), ordonné au Conservateur du Registre foncier d'inscrire B______ en qualité de seule et unique propriétaire des parcelles n° 2______, n° 3______ et 1/5ème de la parcelle n° 4______ de la commune de C______ (ch. 6), dit qu'aucune soulte n'était due par B______ pour l'attribution en pleine propriété des parcelles n° 2______, n° 3______ et 1/5ème de la parcelle n° 4______ de la commune de C______ (ch. 7), dit que le régime matrimonial des époux, limité aux seuls biens mobiliers et immobiliers sis en Suisse, était liquidé (ch. 8), arrêté le montant de l'indemnité équitable due par A______ en faveur de B______ selon l'article 124e CC à 337'590 fr. et ordonné en conséquence à la D______, [à l'adresse] ______ [GE], de prélever la somme de 337'590 fr. du compte de A______ (réf 5______, pension n° 6______) et de la transférer sur le compte de B______ auprès de [la banque] G______, relation bancaire 7______, IBAN 8______ (ch. 9), condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, la somme de 2'200 fr. à titre de contribution d'entretien à compter de l'entrée en force du présent jugement et sans limite dans le temps (ch. 10), arrêté les frais judiciaires à 8'885 fr., les a mis à la charge des parties pour moitié chacune, soit 4'442 fr. 50, les a compensés partiellement avec les avances de frais en 1'360 fr. versées par A______, condamné A______ à verser la somme de 3'082 fr. 50 aux Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de frais judiciaires et dit que la part en 4'442 fr. 50 à charge de B______ serait provisoirement supportée par l'Etat de Genève, sous réserve toutefois d'une décision ultérieure de remboursement de l'Assistance judiciaire selon l'article 123 CPC (ch. 11), dit qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 12) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 13);
Attendu que, par acte déposé au greffe universel du Pouvoir judiciaire le 31 mars 2025, A______ a formé appel contre le jugement du 24 février 2025, en concluant, principalement, à l'annulation des chiffres 1, 2, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 13 de son dispositif et, pour ce qui concerne le point sur lequel porte la requête d'exécution anticipée, à ce que la Cour de justice dise que la somme due à B______ à titre d'indemnité équitable au sens de l'art. 124e CC sur les avoirs de retraite accumulés par A______ durant le mariage s'élève à 235'673 fr. 88, subsidiairement à 255'625 fr. 50;
Qu'il a notamment produit, à l'appui de son appel, un courrier du 25 mars 2025 de la D______ l'informant de ce que B______ avait requis l'institution de lui verser le montant de l'avoir de prévoyance qui lui revenait conformément au jugement du Tribunal du 24 février 2025, et lui impartissant un délai au 25 avril 2025 pour se déterminer à ce sujet, avec la précision que "the decision by the Pension Fund's H______ is expected to be taken soon";
Que, dans sa réponse, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions;
Qu'à titre préalable, elle a sollicité l'exécution anticipée du chiffre 9 du dispositif du jugement précité, soit le paiement immédiat de la somme de 337'590 fr. dans un délai de 10 jours dès la notification de la décision à intervenir;
Qu'elle a fait valoir qu'à teneur de deux courriels des 1er décembre 2023 et 25 mars 2025, la D______ n'entendait pas retenir indéfiniment les avoirs de prévoyance de l'appelant dans l'attente d'un règlement judiciaire et qu'il existait un risque concret de transfert définitif des fonds à l'appelant, susceptible de lui causer un préjudice irréparable;
Que A______ s'est opposé à l'exécution anticipée requise;
Qu'il a exposé qu'il ne ressortait nullement du courriel le plus récent de la D______ que celle-ci refuserait de respecter le jugement du Tribunal, n'aurait plus les avoirs de l'appelant en ses mains ou risquerait de lui transférer l'intégralité de ceux-ci, de sorte que l'intimée ne démontrait pas que l'effet suspensif attaché au jugement attaqué porterait atteinte à ses intérêts, alors qu'une exécution anticipée du chiffre 9 du dispositif de ce jugement risquait de causer à l'appelant un préjudice difficilement réparable;
Considérant, EN DROIT, que, le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties après le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel est régie par le nouveau droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC);
Que la Cour est saisie d'un appel au sens de l'art. 311 ss CPC;
Que l'appel suspend la force de chose jugée et le caractère exécutoire de la décision dans la mesure des conclusions prises en appel (art. 315 al. 1 CPC);
Que, selon l'art. 315 al. 4 let. a CPC, si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable, l'instance d'appel peut, sur demande, autoriser l'exécution anticipée et ordonner au besoin des mesures conservatoires ou la fourniture de sûretés;
Que l'effet suspensif de l'appel constituant la règle, l'exécution anticipée ne doit être accordée qu'exceptionnellement, lorsque les circonstances l'exigent, notamment si une des parties est exposée, à défaut, à subir un préjudice difficilement réparable; qu'en la matière, l'instance d'appel dispose d'un large pouvoir d'appréciation (Jeandin, CR-CPC, 2019, n. 4 ad art. 315 CPC);
Que le préjudice difficilement réparable de l'art. 315 CPC résulte d'un dommage principalement de nature factuelle, concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès : l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3);
Qu'en l'espèce, contrairement à ce qu'allègue l'intimée, il ne ressort pas prima facie des pièces dont elle se prévaut que la caisse de pension de l'appelant serait sur le point de verser à ce dernier ses avoirs de retraite (sous réserve de la rente qu'il perçoit déjà);
Qu'en effet, la première, du 1er décembre 2023, concerne l'inexécutabilité d'une décision de nature provisoire par l'institution en question, tandis que la seconde, du 25 mars 2025, informe l'appelant de la demande de versement formée par l'intimée et l'invite à se déterminer avant qu'une décision ne soit prise sur ce point;
Dans cette mesure, l'intimée n'étaye pas ses allégations selon lesquelles un transfert des fonds en question en faveur de l'appelant serait imminent;
Qu'ainsi, elle ne rend pas vraisemblable le risque d'une atteinte à ses prétentions sur les avoirs de prévoyance professionnelle accumulés pendant le mariage si le chiffre 9 du jugement entrepris n'était pas immédiatement exécuté;
Que d'un autre côté, l'appelant risquerait de subir un préjudice difficilement réparable si la caisse de pension concernée devait verser à l'intimée le montant de l'indemnité déterminé par le Tribunal et contesté en appel à hauteur de 100'0000 fr. environ;
Qu'au vu de ce qui précède, il n'y a pas lieu de déroger au principe de l'effet suspensif à l'appel et la requête d'exécution anticipée sera rejetée;
Qu'il sera statué sur les frais relatifs à la présente décision dans l'arrêt au fond.
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PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :
A la forme :
Rejette la requête formée par B______ le 2 juillet 2025 tendant à ce que l'exécution anticipée du chiffre 9 du dispositif du jugement JTPI/3128/2025 rendu le 24 février 2025 par le Tribunal de première instance soit ordonnée.
Dit qu'il sera statué sur les frais relatifs à la présente décision dans l'arrêt au fond.
Siégeant :
Madame Stéphanie MUSY, présidente ad interim; Madame Camille LESTEVEN, greffière.
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.