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Décisions | Chambre civile

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C/9615/2021

ACJC/854/2025 du 24.06.2025 sur ACJC/1119/2022 ( SDF ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9615/2021 ACJC/854/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 24 JUIN 2025

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], demandeur en révision de l'arrêt ACJC/1119/2022 rendu le 30 août 2022 par la Chambre civile de la Cour de justice, représenté par Me Daniela LINHARES, avocate, MALBUISSON AVOCATS, galerie Jean-Malbuisson 15, case postale 1648, 1211 Genève 1,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], défenderesse, représentée par Me Liza SANT'ANA LIMA, avocate, SANT'ANA LIMA AVOCATS SA, rue de Lausanne 69, case postale, 1211 Genève 1.

 

 

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTPI/16030/2021 rendu le 21 décembre 2021, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, a autorisé les époux A______ et B______ à vivre séparés (ch. 1 du dispositif), condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, la somme de 600 fr. à compter du 17 mai 2021 au titre de contribution à son entretien (ch. 2), attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal (ch. 3), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 4), arrêté les frais judiciaires à 500 fr., répartis à raison de la moitié à la charge de chacun des époux, sous réserve du bénéfice de l'assistance judiciaire (ch. 5), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 6), condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 7) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8).

b. Par arrêt ACJC/1119/2022 du 30 août 2022, la Cour de justice, statuant sur l'appel formé par l'épouse, a annulé le chiffre 2 du dispositif de ce jugement et, statuant à nouveau sur ce point, condamné A______ à verser à B______, par mois et d'avance, la somme de 1'500 fr. à compter du 17 mai 2021 au titre de contribution à son entretien, le jugement attaqué étant confirmé pour le surplus.

La Cour a déclaré irrecevable la pièce nouvelle déposée par B______ à l'appui de son appel, à savoir un "contrat sous seing privé d'achat et de vente" daté du 1er mai 2021, aux termes duquel la précitée s'engageait à vendre un bien immobilier sis à C______ (Brésil) à sa fille. Dans la partie "EN FAIT" de son arrêt, la Cour a retenu que l'épouse était propriétaire d'une maison au Brésil, qu'elle avait déclaré au Tribunal que ce bien n'était pas loué et qu'elle avait l'intention de le vendre.

S'agissant de la situation financière des époux, la Cour a retenu que A______ bénéficiait d'un excédent mensuel de 2'056 fr. (6'000 fr. de revenus - 3'944 fr. de charges), alors que B______ faisait face à un déficit de 932 fr. (2'380 fr. de revenus - 3'312 fr. de charges). En sus de son salaire, l'épouse avait perçu une aide financière de la part de sa fille et de son beau-fils en 2020 (à hauteur de 1'600 fr.) et en 2021 (à hauteur de 11'000 fr.). Quand bien même cette aide aurait été versée à la suite d'une vente immobilière, ainsi que l'alléguait A______, il n'y avait pas lieu de contraindre l'épouse à puiser dans sa fortune pour subvenir à son entretien, dès lors que l'époux disposait des revenus suffisants pour ce faire. En outre, contrairement à ce que soutenait l'époux, il n'avait pas été rendu vraisemblable que l'épouse pourrait retirer un revenu locatif de sa maison au Brésil, étant relevé que l'on ignorait dans quel état se trouvait ce bien.

c. Le recours formé par A______ contre l'arrêt précité a été déclaré irrecevable par arrêt du Tribunal fédéral du 20 décembre 2022 (5A_758/2022).

B. a. Par acte déposé le 23 décembre 2024 au greffe de la Cour, A______ a demandé la révision de l'arrêt ACJC/1119/2022 du 30 août 2022, concluant, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que la Cour ordonne préalablement l'apport de la procédure C/9615/2021, annule l'arrêt ACJC/1119/2022 précité et, cela fait, dise qu'il ne devait aucune contribution à l'entretien de B______ et condamne celle-ci à lui rembourser 64'500 fr. "à titre de contributions d'entretien versées sans cause".

Il a allégué que, suite au prononcé de l'arrêt ACJC/1119/2022, il avait déposé une demande unilatérale en divorce devant les autorités portugaises et qu'un jugement de divorce venait d'être rendu. Dans le cadre de cette procédure, il avait découvert que B______ était toujours propriétaire d'un bien immobilier sis à C______ (Brésil). Selon lui, cela démontrait que ce bien n'avait jamais été vendu, qu'il était loué depuis plusieurs années et que son ex-épouse avait menti sur ses revenus, notamment "sur les rentes perçues au Brésil". L'arrêt de la Cour, basé sur des constatations erronées, devait donc être révisé.

A l'appui de ses allégations, il a produit notamment un "certificat de valeur vénale", émis le 8 octobre 2024, selon lequel B______ était propriétaire d'un bien immobilier, soit un terrain de 232.62 m2 avec une "superficie bâtie" de 87.63 m2, d'une valeur vénale de 21'507 BRL (soit env. 3'200 fr., au taux de 1 BRL = 0.1486 fr.). Il a également produit une "fiche d'enregistrement immobilier - contribuable", émise le 16 octobre 2024, indiquant qu'en 2024, B______ était propriétaire de ce bien immobilier.

A______ a fait valoir que, même en faisant preuve de diligence, il n'aurait pas pu produire ces pièces devant la Cour. Il lui avait fallu plusieurs mois pour obtenir ces renseignements et il avait dû payer un avocat au Brésil à cet effet. A l'époque du prononcé de l'arrêt ACJC/1119/2022, il pensait que son ex-épouse avait vendu sa maison au Brésil puisqu'elle avait produit un contrat de vente immobilière devant la Cour. Il ne pouvait pas se douter qu'il s'agissait "d'un faux document". Ce n'était que dans le cadre de la procédure de divorce qu'il avait découvert que son ex-épouse était toujours propriétaire de ce bien et qu'elle l'avait loué. Or, "si la Cour avait eu connaissance de tous ces éléments, à savoir la fortune de [B______] et les revenus locatifs, elle n'aurait jamais octroyé de contribution à [l'ex-épouse]" et "cette dernière aurait été condamnée à prouver qu'elle ne percevait pas de rente au Brésil".

b. Dans sa réponse du 24 avril 2025, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a produit plusieurs pièces.

c. Dans ses déterminations du 9 mai 2025, A______ a persisté dans ses conclusions.

Il a produit sa fiche de salaire pour le mois d'avril 2025, ainsi qu'un "avis de droit" daté du 5 mai 2025, à teneur duquel B______ était toujours propriétaire de sa maison au Brésil, le contrat de vente du 1er mai 2021 ne respectant pas les exigences légales du transfert de propriété selon le droit brésilien.

d. Dans ses déterminations du 21 mai 2025, B______ a persisté dans ses conclusions.

e. La cause a été gardée à juger le 12 juin 2025, ce dont les parties ont été avisées le jour même.

EN DROIT

1. 1.1 En vertu de l'art. 328 CPC, une partie peut demander la révision de la décision entrée en force au tribunal qui a statué en dernière instance.

La demande de révision doit être formée dans les 90 jours à compter de celui où le motif de révision est découvert; la demande est écrite et motivée (art. 329
al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, le demandeur fonde sa demande de révision de l'arrêt ACJC/1119/2022 du 30 août 2022 sur un fait qu'il allègue avoir découvert en octobre 2024. Le demandeur a déposé sa demande de révision en décembre 2024, soit moins de 90 jours après la découverte du motif de révision allégué.

Par conséquent, la demande de révision est recevable.

2. 2.1 Selon l'art. 328 al. 1 let. a CPC, une partie peut demander la révision de la décision entrée en force au tribunal qui a statué en dernière instance lorsqu'elle découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'elle n'avait pu invoquer dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits et moyens de preuve postérieurs à la décision.

La révision pour le motif tiré de la découverte de faits nouveaux suppose la réalisation de cinq conditions : le requérant invoque un ou des faits; ce ou ces faits sont "pertinents", dans le sens d'importants, c'est-à-dire qu'ils sont de nature à modifier l'état de fait qui est à la base du jugement et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte; ces faits existaient déjà lorsque le jugement a été rendu: il s'agit de pseudo-nova, c'est-à-dire de faits antérieurs au jugement ou, plus précisément, de faits qui se sont produits jusqu'au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables et le requérant n'a pas pu, malgré toute sa diligence, invoquer ces faits dans la procédure précédente (ATF 147 III 328 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_406/2024 du 30 septembre 2024 consid. 4.1).

Quant à la demande de révision fondée sur la découverte de preuves concluantes, elle suppose aussi la réunion de cinq conditions : les preuves doivent porter sur des faits antérieurs (pseudo-nova); elles doivent être concluantes, c'est-à-dire propres à entraîner une modification du jugement dans un sens favorable au requérant; elles doivent avoir déjà existé lorsque le jugement a été rendu (plus précisément jusqu'au dernier moment où elles pouvaient encore être introduites dans la procédure principale); elles doivent avoir été découvertes seulement après coup et le requérant n'a pas pu les invoquer, sans faute de sa part, dans la procédure précédente (ATF 147 III 238 consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_406/2024 du 30 septembre 2024 consid. 4.2). Il n'y a pas motif à révision du seul fait que le tribunal paraît avoir mal interprété des faits connus déjà lors de la procédure principale. L'appréciation inexacte doit être la conséquence de l'ignorance ou de l'absence de preuve de faits essentiels pour le jugement (arrêt du Tribunal fédéral 4A_406/2024 du 30 septembre 2024 consid. 4.1).

Dans les deux cas, le requérant doit démontrer qu'il ne pouvait pas invoquer le fait ou le moyen de preuve dans la procédure précédente malgré toute la diligence dont il a fait preuve. Il faut conclure à un manque de diligence lorsque la découverte d'éléments nouveaux résulte de recherches qui auraient pu et dû être effectuées dans la procédure précédente. On n'admettra qu'avec retenue l'existence de motifs excusables, car la révision ne doit pas servir à remédier aux omissions de la partie requérante dans la conduite du procès. On ne saurait toutefois reprocher au requérant de n'avoir pas fait preuve de la diligence requise lorsque la partie adverse lui a caché des éléments pertinents dont il n'avait pas et n'aurait pas non plus dû avoir connaissance (arrêt du Tribunal fédéral 4A_71/2021 du 13 juillet 2021 consid. 5.1.3).

2.2 En l'espèce, le demandeur se prévaut de deux pièces nouvelles qui, selon lui, attesteraient du fait qu'à l'époque du prononcé de l'arrêt ACJC/1119/2022, la défenderesse était toujours propriétaire d'un bien immobilier sis au Brésil, alors que le contrat de vente immobilière du 1er mai 2021, produit par la défenderesse à l'appui de son appel, pouvait laisser penser le contraire.

Il appert toutefois que les moyens de preuve nouveaux dont se prévaut le demandeur ne sont ni pertinents, ni concluants au sens de la jurisprudence susmentionnée. En effet, dans son arrêt du 30 août 2022, la Cour a écarté la pièce produite par l'ex-épouse en vue de documenter la vente de sa maison au Brésil et retenu que l'intéressée en était toujours propriétaire, de sorte que les pseudo nova invoqués par le demandeur n'établissent pas un fait qui n'aurait pas été pris en considération dans l'arrêt dont il sollicite la révision. Par conséquent, la question de la validité du contrat de vente du 1er mai 2021 - sur laquelle les parties se sont longuement exprimées - est dénuée de pertinence.

Par ailleurs, ces moyens de preuve nouveaux ne démontrent pas que la défenderesse aurait loué (ou aurait pu louer) sa maison au Brésil avant le 30 août 2022. C'est dès lors en vain que le demandeur soutient que des revenus locatifs auraient dû être pris en considération par la Cour pour déterminer si l'ex-épouse avait droit à une contribution d'entretien. Enfin, c'est dans le cadre d'un recours au Tribunal fédéral que le demandeur aurait dû, le cas échéant, critiquer l'arrêt ACJC/1119/2022 en tant que celui-ci a retenu qu'il n'avait pas été rendu vraisemblable que l'ex-épouse pourrait retirer un revenu locatif de sa maison au Brésil.

La condition posée par l'art. 328 CPC - selon laquelle les faits et moyens de preuves nouveaux doivent être propres à entraîner une modification du jugement dans un sens favorable au demandeur - n'est ainsi pas réalisée.

Compte tenu de ce qui précède, la question de savoir si le demandeur aurait pu obtenir, en agissant avec diligence, ces moyens de preuve dans la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale n'a pas besoin d'être tranchée.

Par conséquent, la demande en révision sera rejetée.

3. Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr. (art. 43 RTFMC), seront mis à la charge du demandeur, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et compensés avec l'avance fournie qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

Le demandeur sera en outre condamné aux dépens de sa partie adverse, lesquels seront arrêtés à 1'000 fr., TVA et débours compris, au regard de l'activité déployée par le conseil de la défenderesse (art. 84 RTFMC; art. 20, 23 et 25 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable la demande en révision formée le 21 décembre 2024 par A______ contre l'arrêt ACJC/1119/2022 rendu le 30 août 2022 par la Cour de justice dans la cause C/9615/2021.

Au fond :

Rejette cette demande.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à B______ la somme de 1'000 fr. à titre de dépens.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.