Décisions | Chambre civile
ACJC/686/2025 du 27.05.2025 sur OTPI/293/2025 ( SDF )
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/14830/2024 ACJC/686/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 27 MAI 2025 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______ [GE], requérante sur effet suspensif d'une ordonnance rendue par la 17ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 6 mai 2025, représentée par Me Corinne CORMINBOEUF, avocate, Harari Avocats, rue Ferdinand-Hodler 23, case postale, 1211 Genève 3,
et
Monsieur B______, domicilié ______ [VD], cité, représenté par Me Reza VAFADAR, avocat, VZ Lawyers, rue Charles-Bonnet 2, 1206 Genève.
Attendu, EN FAIT, que par ordonnance SPTPI/87/2024 du 28 juin 2024, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures superprovisionnelles, a ordonné la saisie, en mains de Me C______, notaire, no. ______, rue 1______, [code postal] D______ [VD], de la partie du produit net (soit après remboursement des hypothèques et de toutes autres charges dont le règlement incombe au notaire) de la vente de la maison située sur la parcelle n° 3______, no. ______ avenue 2______, [code postal] E______ [VD], plan n° 4______, revenant à B______, ce à hauteur de 1'400'000 fr;
Que par ordonnance OTPI/293/2025 rendue le 6 mai 2025, le Tribunal, statuant sur mesures provisionnelles, a ordonné la saisie, en mains de Me C______, notaire, no. ______, rue 1______, [code postal] D______, de la partie du produit net (soit après remboursement des hypothèques et de toutes autres charges dont le règlement incombe au notaire) de la vente de la maison située sur la parcelle n° 3______, no. ______ avenue 2______, [code postal] E______, plan n° 4______, revenant à B______, ce à hauteur de 350'000 fr. (ch. 13 du dispositif);
Que le Tribunal a considéré que A______ et les enfants du couple avaient le droit à des contributions d'entretien; qu'il y avait lieu de retenir, sous l'angle de la vraisemblance, une mise en danger sérieuse et actuelle des intérêts de la précitée, liés à l'entretien de la famille; qu'il se justifiait ainsi de bloquer une partie du prix de vente de la maison de E______ sur mesures provisionnelles; qu'afin de déterminer le montant à bloquer, il fallait notamment tenir compte de l'arriéré réclamé par A______ s'agissant de la période allant du 1er octobre 2022 au 30 juin 2023 et des contributions d'entretien dues sur la base de la présente ordonnance de mesures provisionnelles dès le 1er juillet 2023 pendant la durée de la présente procédure; que, par contre, les contributions d'entretien post-divorce en faveur de A______ et celles des enfants qui seront tranchées dans le cadre du jugement au fond ne faisaient pas partie des prétentions à couvrir par l'article 178 CC, de même qu'elles ne pouvaient pas non plus être couvertes en l'état par les articles 132 et 292 CC qui exigeaient l'existence d'une décision exécutoire s'agissant des contributions d'entretien à assurer; qu'il était en l'état difficile de déterminer la durée de la présente procédure, mais il était probable que celle-ci se prolonge au vu du litige entre les parties; que dans ces circonstances, il se justifiait de bloquer un montant de 350'000 fr. en mains du notaire en charge de la vente du bien immobilier sis à E______;
Que par requête du 8 mai 2025, A______ a conclu à ce que la Cour, de justice, statuant sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, restitue l'effet suspensif au chiffre 13 du dispositif de l'ordonnance du 6 mai 2025; qu'elle soutient que l'ordonnance attaquée revient à ne pas protéger ses créances d'entretien post-divorce (rente ou capital) avant qu'un divorce ne soit prononcé, ce qui n'avait pas été l'intention du législateur; que, partant, en limitant l'assiette de la saisie aux arriérés d'entretien depuis octobre 2022 et aux contributions d'entretien durant la procédure en divorce, soit un montant évalué ex aequo et bono à 350'000 fr., à l'exclusion de l'entretien post-divorce pour elle et les enfants, l'ordonnance attaquée contrevenait au droit fédéral;
Que par ordonnance ES/30/2025 du 9 mai 2025 sur mesures superprovisionnelles, la Cour a suspendu l'effet exécutoire attaché au ch. 13 du dispositif de l'ordonnance du 6 mai 2015;
Qu'invité à se déterminer, B______ a conclu au rejet de la requête d'effet suspensif; qu'il a soutenu que A______ cherchait à obtenir un séquestre déguisé, que les montants réclamés à titre de contribution d'entretien étaient disproportionnés et capitalisés jusqu'aux 25 ans des enfants, respectivement 65 ans pour elle, sans tenir compte du principe du clean break, qu'il s'acquittait régulièrement des contributions d'entretien, au moyen d'un ordre permanent et que les conditions d'application de l'art. 132 CC n'étaient pas remplies;
Considérant, EN DROIT, que si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable, l’instance d’appel peut, sur demande exceptionnellement, suspendre le caractère exécutoire de mesures provisionnelles (art. 315 al. 2 let. b CPC); que l’instance d’appel peut décider avant le dépôt de l’appel (art. 315 al. 5 CPC);
Que, saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; qu'elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 138 III 565 consid. 4.3.1, 137 III 475 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_201/2023 du 28 avril 2023 consid. 3.3; 5A_853/2021 du 8 novembre 2021 consid. 5.1; 5A_792/2018 du 6 février 2019 consid. 3.2.2);
Qu'en l'espèce, à ce stade, la quotité du montant qui devrait faire l'objet de la saisie – admise dans son principe par le Tribunal – est difficile à évaluer; que celui-ci dépend de montants qui ne sont pas en l'état fixés, s'il fallait, par hypothèse, suivre la requérante selon laquelle le montant litigieux devrait couvrir des contributions d'entretien post-divorce; qu'il est difficile, en l'état, en l'absence d'appel, de se prononcer sur les chances de succès de celui qui serait déposé; que le refus de l'effet suspensif serait toutefois susceptible de rendre sans objet l'appel qui serait déposé; que pour le surplus, le cité n'a pas rendu vraisemblable que le maintien du blocage de la somme de 1'400'000 fr. pendant la durée de l'éventuelle procédure d'appel serait susceptible de lui causer un préjudice qui pourrait être qualifié de difficilement réparable;
Que la requête d'effet suspensif sera dès lors admise en ce sens que l'ordonnance sur mesures superprovisionnelles du 28 juin 2024 restera en vigueur jusqu'à droit jugé sur l'éventuel appel contre le chiffre 13 du dispositif de l'ordonnance rendue le 6 mai 2025;
Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec l'arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).
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La Chambre civile :
Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise:
Admet la requête formée par A______ tendant à suspendre le caractère exécutoire du chiffre 13 du dispositif de l'ordonnance OTPI/293/2025 rendue le 6 mai 2025 par le Tribunal de première instance dans la cause C/14830/2024 en ce sens que l'ordonnance SPTPI/87/2024 rendue le 28 juin 2024 dans la cause précitée reste en vigueur jusqu'à droit jugé sur l'éventuel appel qui serait déposé par A______ contre le ch. 13 du dispositif de l'ordonnance OTPI/293/2025.
Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt au fond.
Siégeant :
Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.
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Indication des voies de recours :
La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF - RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.