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Décisions | Chambre civile

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C/16811/2022

ACJC/281/2025 du 27.02.2025 sur JTPI/4882/2024 ( OO ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 04.04.2025, 4A_166/2025
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16811/2022 ACJC/281/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 20 FEVRIER 2025

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 24ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 22 avril 2024, représentée par Me Cyrus SIASSI, avocat, SIASSI McCUNN BUSSARD, avenue de Champel 29, case postale 344, 1211 Genève 12,

et

B______ SA, sise ______, France, intimée, représentée par Me Rodolphe GAUTIER, avocat, Walder Wyss SA, rue du Rhône 14, case postale, 1211 Genève 3.

 


EN FAIT

A. Par jugement du 22 avril 2024, reçu par A______ SA le 23 avril 2024, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure ordinaire, a débouté A______ SA de toutes ses conclusions (ch. 1 du dispositif), prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______ à concurrence des montants de 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 49'221 fr. 80, 25'729 fr. 60, 13'970 fr. 80 et 48'037 fr. 30 avec suite d'intérêts à 9% (ch. 2), arrêté les frais judiciaires à 20'320 fr. et les a compensés avec les avances versées par A______ SA, laissées à la charge de celle-ci (ch. 3), condamné A______ SA à payer à B______ SA 22'000 fr. au titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B. a. Par acte expédié le 23 mai 2024 au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ SA a appelé de ce jugement, concluant à son annulation et, cela fait, à ce qu'il soit constaté que A______ SA ne doit pas à B______ SA les montants de 55'933 fr. 90 plus intérêt à 9% dès le 10 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêt à 9% dès le 11 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêt à 9% dès le 21 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêt à 9% dès le 21 octobre 2019, 49'221 fr. 80 plus intérêt à 9% dès le 21 octobre 2019, 25'729 fr. 60 plus intérêt à 9% dès le 26 octobre 2019, 13'970 fr. 80 plus intérêt à 9% dès le 31 octobre 2019 et 48'037 fr. 30 plus intérêt à 9% dès le 13 novembre 2019, que A______ SA ne doit pas à B______ SA les frais judiciaires en 750 fr., respectivement les dépens en 4'400 fr. auxquels elle a été condamnée au terme du jugement de mainlevée provisoire du 16 août 2022 (JTPI/9465/2022) rendu dans la cause C/2______/2022, et que la poursuite n°1______ n'ira pas sa voie. A titre subsidiaire, elle a conclu à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal pour instruction dans le sens des considérants. A______ SA a par ailleurs conclu au déboutement de B______ SA de toutes ses conclusions, avec suite de frais et dépens.

b. B______ SA a conclu, avec suite de frais, au rejet de l'appel. Préalablement, elle a conclu à la recevabilité de la pièce 59 nouvellement produite par elle et à l'irrecevabilité de certains allégués et pièce produits par A______ SA.

c. A______ SA a répliqué et persisté dans ses conclusions.

d. B______ SA a dupliqué et persisté dans ses conclusions.

e. Les parties ont été informées par avis du 13 décembre 2024 du greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

 

C. Les éléments suivants résultent du dossier soumis à la Cour.

a. B______ SA est une société de droit français, sise à C______ [France], active dans le domaine du transport maritime, appartenant au groupe B______.

Le groupe B______, dont la société mère est B______ SA, fonctionne avec un système de réseau d'agences établies dans les ports où il est actif. B______ SA a notamment une agence à D______ [BS] (B______ AGENCY SA), au Brésil (B______/E______ LTDA) et en Allemagne (B______ DEUTSCHLAND GMBH). Ces agences sont en contact avec les clients et se chargent des opérations de transport. Elles peuvent intervenir en qualité d'agent de la société mère que ce soit pour les contrats de transport, les factures et les confirmations de réservation.

b. A______ SA est une société sise à Genève, active dans le négoce de marchandises en tout genre et leur transport, ainsi que dans le domaine de la logistique et du conseil.

Son administrateur est F______, lequel dispose d'une signature individuelle.

c. B______ SA et A______ SA étaient liées par un Credit Agreement en vertu duquel la seconde pouvait commander des prestations de transport maritime en s'acquittant ultérieurement du fret sur présentation d'une facture de la première, dans les limites stipulées par ledit contrat.

Aux termes de ce contrat, B______ DEUTSCHLAND GMBH agissait en qualité d'agent de B______ SA.

d.  Au mois de septembre 2018, le groupe B______ et A______ SA sont convenues d'ajouter la société G______ SWITZERLAND SA dans le Credit Agreement.

G______ SWITZERLAND SA est une société sise à Fribourg dont le but est la gestion de transport de marchandises en tout genre, toutes activités dans le domaine de la logistique, conseils en logistique et trading, trading en particulier de fret et de matières premières ainsi que les instruments de gestion qui y sont liés. Son administratrice, avec signature individuelle, est H______.

e. Pour ce faire, B______ SA et A______ SA ont décidé que cette dernière devait signer une lettre de garantie. C'est ainsi que A______ SA a envoyé, le 5 octobre 2018, un projet de lettre de garantie à B______ SA, dont la teneur était la suivante :

"I hereby guarantee the business performance conducted by G______ Switzerland SA with the group of companies B______. This guarantee will cover execution, operations and payments that would be under the name of G______ Switzerland SA."

Soit en traduction libre : " Par la présente, je garantis les activités commerciales conduites par G______ Switzerland SA envers le groupe de sociétés B______. Cette garantie couvre l'exécution, les opérations et les paiements qui seraient au nom de G______ Switzerland SA."

 f.a Le 6 décembre 2018, A______ SA a émis une garantie dont la teneur est la suivante :

"A______, hereby guarantee in the sense of Art. 111 of the Swiss Code of obligation the business performance contacted [sic] by G______ Switzerland SA with the group of companies B______. This guarantee will cover execution, operations and payments that would be under the name of G______ Switzerland SA up to an amount of CHF 3 MILLION…this agreement is governed by Swiss Law with Swiss jurisdiction at the official domicile of guarantor."

Soit en traduction libre : " Par la présente, A______ garantit au sens de l'art. 111 du Code suisse des obligations les activités commerciales conduites par G______ Switzerland SA envers le groupe de sociétés B______. Cette garantie couvre l'exécution, les opérations et les paiements qui seraient au nom de G______ Switzerland SA pour un montant maximal de 3'000'000 fr. Cet accord est soumis au droit suisse et à la compétence des tribunaux suisses au domicile du garant".

f.b Ce document a été signé par F______ pour le compte de A______ SA.

f.c Lors de l'audience de débats principaux du 5 décembre 2023 tenue par-devant le Tribunal, F______ a confirmé avoir lu le document du 6 décembre 2018 avant de le signer mais a assuré qu'il n'était "pas conscient qu'il deviendrait responsable pour G______ SWITZERLAND SA". Il s'agissait pour lui d'un geste commercial envers cette société. Il a affirmé que B______ SA ne lui avait jamais expliqué le sens de l'article 111 CO, qu'il n'avait pas lu cette disposition avant de signer le document et qu'il n'avait pas non plus pris de conseil juridique. La représentante de B______ SA lui avait indiqué que ce document avait été émis par le département juridique de B______ SA et qu'il devait le signer.

Par ailleurs, F______ a expliqué que G______ SWITZERLAND SA et A______ SA étaient en relations commerciales et qu'il existait un lien de confiance entre elles, la première s'occupant de la réservation des conteneurs pour la seconde, raison pour laquelle A______ SA avait accordé des liquidités à G______ SWITZERLAND SA.

g. Entre les mois de juillet et septembre 2019, G______ SWITZERLAND SA a commandé auprès du groupe B______ huit transports maritimes entre le Brésil et la Chine.

Selon les Booking request, les commandes ont été passées par G______ BRAZIL AGENCIAMENTO en qualité de Booking party, G______ SWITZERLAND SA figurant en qualité de Deciding party et de Freight payer.

Sur la base de ces commandes, B______/E______ LTDA et B______ AGENCY SA ont émis des Booking confirmation à l'attention de G______ BRAZIL AGENCIAMENTO.

h. Aux mois de septembre et octobre 2019, B______ DEUTSCHLAND GMBH a adressé, au nom et pour le compte de B______ SA, les huit factures de fret à G______ SWITZERLAND SA relatives aux commandes de transport maritime susmentionnées, à savoir :

- facture 3______ du 9 septembre 2019 : 61'200 USD,

- facture 4______ du 10 septembre 2019 : 61'200 USD,

- facture 5______ du 20 septembre 2019 : 53'856 USD,

- facture 6______ du 20 septembre 2019 : 61'200 USD,

- facture 7______ du 20 septembre 2019 : 61'200 USD,

- facture 8______ du 24 septembre 2019 : 28'152 USD,

- facture 9______ du 30 septembre 2019 : 20'808 USD,

- facture 10_____ du 14 octobre 2019 : 52'560 USD.

Ces factures totalisent un montant de 400'176 USD. Elles étaient payables à 30 jours, le débiteur en retard s'exposant à des intérêts moratoires de 0.75% par mois, soit 9% par an.

i. Les montants réclamés n'ont pas été payés par G______ SWITZERLAND SA, à l'exception d'un acompte de 5'520 USD, porté en déduction de la facture 9______, réduisant le total des factures dues à 394'656 USD.

j. Par courrier du 16 juillet 2020, B______ (AGENCY) AG, à D______ [BS], agissant en qualité d'agent de B______ SA, a fait appel à la garantie émise par A______ SA et l'a invitée à s'acquitter de la somme de 394'626 fr. sous dix jours.

k. Le 24 mars 2021, B______ SA a adressé à A______ SA une mise en demeure pour la somme précitée, avec les intérêts.

l. Par courrier du 12 mai 2021, A______ SA a fait valoir que G______ SWITZERLAND SA avait contesté devoir le montant litigieux à B______ SA. Celle-ci ne contestait pas les factures émises relatives aux commandes passées, mais faisait valoir un préjudice subi en raison d'instructions non suivies. A______ SA demandait à B______ SA de justifier sa créance envers G______ SWITZERLAND SA afin de pouvoir se déterminer.

m. Le 20 mai 2021, B______ SA a fait notifier à A______ SA un commandement de payer, poursuite n° 1______, portant sur les sommes de 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 49'221 fr. 80, 25'729 fr. 60, 19'017 fr. 50 et 48'037 fr. 30, plus intérêts à 9% à partir de diverses dates.

La cause de l'obligation était la garantie du 6 décembre 2018 en relation avec les factures adressées à G______ SWITZERLAND SA.

n. A______ SA y a formé opposition.

o. Par jugement JTPI/9465/2022 du 16 août 2022, le Tribunal a notamment prononcé la mainlevée de l'opposition formée par A______ SA au commandement de payer, poursuite n° 1______, à concurrence des montants de 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 49'221 fr. 80, 25'729 fr. 60, 13'970 fr. 80 (soit la contrevaleur de 15'288 USD correspondant à 20'808 USD - 5'520 USD) et 48'037 fr. 30 avec suite d'intérêts à 9%, et a condamné A______ SA à verser à B______ SA les montants de 750 fr. en remboursement des frais judiciaires et de 4'400 fr. à titre de dépens.

Ce jugement a été confirmé par arrêt ACJC/1578/2022 de la Cour du 24 novembre 2022.

D. a. Dans son action en libération de dette expédiée au greffe du Tribunal le 5 septembre 2022, A______ SA a conclu à ce qu'il soit dit et constaté qu'elle ne doit pas à B______ SA les montants de 55'933 fr. 90 plus intérêts à 9% dès le 10 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêts à 9% dès le 11 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêts à 9% dès le 21 octobre 2019, 55'933 fr. 90 plus intérêts à 9% dès le 21 octobre 2019, 49'221 fr. 80 plus intérêts à 9% dès le 21 octobre 2019, 25'729 fr. 60 plus intérêts à 9% dès le 26 octobre 2019, 13'970 fr. 80 plus intérêts à 9% dès le 31 octobre 2019 et 48'037 fr. 30 plus intérêts à 9% dès le 13 novembre 2019, qu'elle ne lui doit pas les frais judiciaires de 750 fr. ni les dépens de 4'400 fr. auxquels elle a été condamnée dans le jugement de mainlevée provisoire JTPI/9465/2022 du 16 août 2022 et que la poursuite n° 1______ n'ira pas sa voie.

A______ SA a soutenu que la garantie émise le 6 décembre 2018 devait être qualifiée de cautionnement et non de porte-fort. Elle a relevé qu'il ne saurait être tiré de la seule référence à l'article 111 CO faite dans la garantie que celle-ci consacrerait un porte-fort au sens de cette disposition. Elle a également souligné qu'un des indices en faveur d'un porte-fort était la présomption, au jour de l'émission de la garantie, que le débiteur principal ne pourrait probablement pas s'exécuter, assurant que tel n'était pas le cas en l'espèce. En outre, l'obligation du garant correspondait ici étroitement à celle du débiteur principal et était définie par référence à celle-ci, puisqu'elle s'était engagée à garantir l'exécution des engagements contractuels de G______ SWITZERLAND SA envers les sociétés du groupe B______. Enfin, elle a soutenu ne pas avoir d'intérêt propre et direct dans l'affaire à conclure mais que le but de la garantie était de renforcer la solvabilité de G______ SWITZERLAND SA. Pour ces raisons, la garantie devait être qualifiée de cautionnement.

Rappelant ensuite que la faculté d'en appeler au cautionnement était conditionnée à la validité des dettes garanties, elle a exposé que les factures litigieuses étaient contestées et que les identités des sociétés ne correspondaient pas, contestant toute représentation de G______ SWITZERLAND SA et de B______ SA par ses agents.

b. Par réponse du 5 mai 2023, B______ SA a conclu au déboutement de A______ SA de toutes ses conclusions et à ce qu'il soit dit que la poursuite n° 1______ ira sa voie.

Elle a soutenu qu'il ressortait sans équivoque de la lettre même de la garantie que A______ SA s'était engagée à garantir les dettes de G______ SWITZERLAND SA en tant que porte-fort ainsi qu'en témoignait la référence à l'article 111 CO. L'on ne se trouvait pas en présence de simples personnes physiques ou d'une partie faible qu'il conviendrait de protéger d'un engagement excessif en tant que porte-fort et pour lesquelles une présomption en faveur d'un cautionnement s'imposerait. Au contraire, les parties étaient des sociétés commerciales expérimentées, actives à l'international dans le domaine du transport et des marchandises où les garanties étaient fréquentes. Selon elle, l'engagement de A______ SA était indépendant. La garantie pouvait donc être mise en œuvre par le seul fait que G______ SWITZERLAND SA ne s'était pas exécutée, peu importe les motifs pour lesquels elle ne l'avait pas fait, sans que A______ SA ne puisse invoquer les éventuelles exceptions de G______ SWITZERLAND SA.

Elle a encore ajouté être la créancière des factures impayées et que G______ SWITZERLAND SA en était la débitrice.

c. Le Tribunal a entendu les parties lors de l'audience de débats principaux du 5 décembre 2023.

F______ a expliqué s'être opposé au paiement lorsqu'il y avait eu appel à la garantie car G______ SWITZERLAND SA affirmait ne pas devoir cet argent. Il a évoqué que B______ SA avait indiqué qu'elle n'allait pas libérer le cargo. Elle l'avait cependant fait dans certaines destinations après avoir reçu de l'argent. Il avait demandé à G______ SWITZERLAND SA le paiement sollicité par B______ SA à plusieurs reprises mais elle lui avait répondu qu'ils devaient se battre ensemble contre B______ SA.

Cette dernière a expliqué qu'il était habituel dans le domaine des compagnies maritimes que les documents de transport, à savoir le Booking requests, Booking reservations, Bill of Lading et les factures, soient émis par des agences.

d.  Dans leurs plaidoiries finales du 1er mars 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

e. A réception des dernières écritures, le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a retenu que A______ SA avait signé, le 6 décembre 2018, une garantie "au sens de l'article 111 CO" aux termes de laquelle elle garantissait l'exécution des obligations commerciales contractées par G______ SWITZERLAND SA vis-à-vis du groupe B______, dont l'exécution de ses prestations et des paiements dus à ce dernier. Par ce document, A______ SA avait clairement manifesté sa volonté de payer, sans réserve ni condition, jusqu'à concurrence de 3'000'000 fr., les dettes contractées par G______ SWITZERLAND AG vis-à-vis du groupe B______. Contrairement à ce que A______ SA soutenait, l'interprétation littérale de la clause de garantie litigieuse plaidait en faveur d'un porte-fort. En effet, les termes employés étaient précis et détaillés, se référaient expressément à la disposition légale pertinente du porte-fort, et émanaient de la société B______ SA, rompue aux affaires au plan international et en particulier dans le domaine du transport international où les garanties étaient fréquentes. De plus, A______ SA était une société de droit suisse, basée à Genève, et donc familière avec la législation suisse et ses nuances. Elle avait également rédigé un premier projet de garantie dont le contenu était quasiment identique à celui signé, seule la référence à l'article 111 CO ayant été ajoutée.

F______, en tant qu'homme d'affaire et administrateur de A______ SA, n'était pas fondé à prétendre qu'il ignorait l'engagement qu'il prenait en signant ce document. En outre, il avait été convenu entre les parties que A______ SA devait signer une lettre de garantie afin que G______ SWITZERLAND SA puisse bénéficier du Credit Agreement. En signant un tel document, il ne pouvait pas comprendre autrement que A______ SA deviendrait responsable pour G______ SWITZERLAND SA. Il n'y avait aucune raison de penser que le texte de la garantie ne correspondait pas à la volonté des parties. Quant au défaut d'intérêt personnel de A______ SA à l'établissement de la garantie, il semblait au contraire qu'elle en avait un dans la mesure où G______ SWITZERLAND SA était une société affiliée avec laquelle elle avait un lien de confiance puisque celle-ci s'occupait de la réservation des conteneurs pour elle. Enfin, la présomption prévue par la jurisprudence en faveur du cautionnement n'était d'aucun secours à A______ SA puisqu'en matière de garanties émises dans un cadre commercial international, comme en l'espèce, celles-ci étaient présumées indépendantes. La garantie du 6 décembre 2018 devait ainsi être qualifiée de porte-fort.

Concernant les créances objets de la poursuite litigieuse, A______ SA soutenait que B______ SA n'avait pas démontré le bien-fondé de sa créance, relevant notamment le manque de clarté du rôle joué par les différentes sociétés du groupe. Or, le Tribunal a relevé qu'en tant qu'obligation indépendante, la garantie du 6 décembre 2018 pouvait exister même si le tiers, soit G______ SWITZERLAND SA, n'était pas débiteur du bénéficiaire ou si son obligation était nulle ou invalidée. En tout état, le Tribunal a considéré que les créances invoquées contre G______ SWITZERLAND AG étaient suffisamment établies par les pièces du dossier. En conséquence, le dommage causé à B______ SA en raison desdites factures impayées était, lui aussi suffisamment établi, ce qui justifiait l'appel à la garantie émise par A______ SA. Ce dommage correspondait au solde encore dû de ces factures avec les intérêts moratoires. A______ SA échouait ainsi dans la démonstration de la non existence ou du défaut d'exigibilité de la dette constatée par le titre de mainlevée provisoire.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement entrepris ayant été communiqué aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.

1.2 Interjeté contre une décision finale (308 al. 1 let. a CPC), dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC), auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de trente jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 142 al. 1, et 311 CPC), l'appel est recevable.

1.3 Sont également recevables la réponse de l'intimée ainsi que les réplique et duplique des parties, déposées dans les délais légaux, respectivement impartis à cet effet (art. 312 al. 2, 316 al. 1 CPC).

1.4 S'agissant d'un appel, la Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2. Les parties ont allégué des faits nouveaux et déposé des pièces nouvelles dans le cadre de la procédure d'appel.

2.1 La Cour examine d'office la recevabilité des faits et moyens de preuve nouveaux en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd. 2016, n. 26 ad art. 317 CPC).

L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (arrêt 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.1). S'agissant des vrais nova ("echte Noven"), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova ("unechte Noven"), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

2.2.1 En l'espèce, les nouveaux faits allégués par l'intimée, soit les décisions relatives à la procédure de faillite visant l'appelante, portent sur des événements postérieurs à la clôture des débats de première instance. Produits à l'appui de la première écriture de l'intimée dans le cadre de la procédure d'appel, ils l'ont été sans retard, de sorte qu'ils sont recevables. Ils ont été intégrés dans l'état de fait ci-dessus.

2.2.2 L'appelante allègue des faits nouveaux concernant l'exécution, par l'intimée, de ses obligations envers G______ SWITZERLAND SA, en particulier le fait que l'intimée aurait violé les instructions de G______ SWITZERLAND SA en relation avec le mode de prise en charge du coût du fret maritime (all. 10 à 20 de l'appel et pièce D du chargé de l'appelante). Il s'agit de faits antérieurs à la clôture des débats de première instance, comme en atteste la pièce produite à cet égard, soit des courriels datant de 2019. Au sujet des raisons qui l'auraient empêchée de formuler ces nova devant le Tribunal, l'appelante se borne à affirmer que les courriels des 10 et 11 décembre 2019 entre G______ SWITZERLAND SA et B______ SA, dont F______ était en copie, n'étaient plus en possession de son administrateur, ce dernier les ayant effacés conformément à la politique générale de son entreprise, et ne lui auraient été communiqués par G______ SWITZERLAND SA qu'avant le dépôt de son appel. Or, même à suivre l'appelante, on ne voit pas en quoi elle n'aurait pas pu obtenir ces courriels de G______ SWITZERLAND SA ni allégué les faits qu'ils comportent prétendument avant la clôture des débats de première instance, étant admis qu'elle en avait alors déjà une parfaite connaissance.

L'appelante n'ayant pas démontré avoir fait preuve de la diligence requise, les faits nouveaux qu'elle allègue doivent être déclarés irrecevables.

Au demeurant, ces faits ne sont pas pertinents pour l'issue du litige. En effet, compte tenu de la qualification de la garantie qui doit être retenue, la question de savoir si l'intimée a correctement exécuté ses obligations envers G______ SWITZERLAND SA ne se pose pas (cf. consid. 4 et 5 infra).

3. L'appelante fait en premier lieu grief au Tribunal d'avoir établi les faits de manière inexacte.

3.1 Elle lui reproche tout d'abord d'avoir retenu qu'elle-même et la société G______ SWITZERLAND SA étaient affiliées, leurs liens n'étant en réalité que commerciaux. Elle estime en outre important de relever qu'en date du 5 octobre 2018, l'intimée lui avait envoyé un projet de lettre de garantie qui ne contenait aucune référence à un quelconque engagement de porte-fort selon l'art. 111 CO.

Il est exact qu'une affiliation entre l'appelante et G______ SWITZERLAND SA n'a pas été établie et n'est soutenue par aucune des parties. L'état de fait a donc été corrigé en ce sens. En revanche, le jugement entrepris mentionne, à juste titre, que c'est l'appelante qui a envoyé un premier projet de garantie à l'intimée (jugement entrepris, n. 7 p. 2 et pièces 13 et 14 intimée). La teneur de ce premier projet, dont il ressort effectivement que la référence à l'art. 111 CO n'y figurait pas, a pour le surplus été intégrée dans l'état de fait retenu par la Cour.

3.2 L'appelante expose encore que l'ajout de la référence à l'art. 111 CO dans la version définitive de la garantie a été fait sans aucune explication et que F______ avait confirmé avoir signé ce document sans connaître le sens de l'art. 111 CO et sans avoir pris conseil sur sa portée, ayant légitimement et de bonne foi pensé qu'au vu de ses relations avec l'intimée et G______ SWITZERLAND SA, il lui était demandé de s'engager à titre de caution et non de porte-fort. Or, la plupart de ces affirmations figurent dans le jugement entrepris (n. 9, p. 3 et consid. E, p. 11 s). Quant au fait que F______ aurait déclaré devant le Tribunal qu'il avait pensé s'engager à titre de caution, force est de constater qu'une telle déclaration ne ressort pas du procès-verbal d'audience du 5 décembre 2023 que l'appelante cite à l'appui de son allégué. Il n'y a dès lors pas lieu de compléter ou de corriger l'état de fait du Tribunal sur ces points.

Enfin, l'appelante soutient que le Tribunal n'a pas procédé à l'examen des circonstances ayant précédé la signature de la garantie. Ce grief, qui relève de l'examen des conditions de l'art. 18 CO, sera traité ci-après.

4. 4.1 Sur le fond, l'appelante soutient qu'en qualifiant la lettre de garantie du 6 décembre 2018 de porte-fort, le Tribunal a violé les art. 18 et 492 ss CO. Cet engagement constituait un cautionnement, si bien qu'elle était en droit d'opposer à l'intimée les exceptions et objections découlant du contrat sous-jacent, soit celles que G______ SWITZERLAND SA pouvait opposer à l'intimée pour refuser de s'exécuter.

L'appelante reproche en particulier au Tribunal de s'être uniquement livré à une interprétation littérale de la garantie, alors que les termes employés dans ce document n'étaient ni précis ni détaillés. La seule référence à l'art. 111 CO dans le texte n'était pas déterminante, étant encore relevé qu'elle ne figurait pas dans le projet de lettre de garantie initial. Par ailleurs, F______, qui ne maîtrisait pas la langue française et n'était pas juriste, avait signé ce document sans connaître le sens de l'art. 111 CO et sans avoir pris conseil sur sa portée, pensant qu'au vu de ses relations avec l'intimée et G______ SWITZERLAND SA, il lui était demandé de s'engager à titre de caution et non de porte-fort. Partant, les critères permettant de distinguer le cautionnement de l'engagement de porte-fort, appliqués au cas d'espèce, devaient conduire à retenir que la déclaration émise par l'appelante dans le document du 6 décembre 2018 constituait un engagement accessoire, soit un cautionnement, étant encore souligné qu'en cas de doute, un tel instrument devait être privilégié par rapport au porte-fort.

4.2.1 Celui qui se porte fort promet au stipulant le fait d'un tiers et s'engage à lui payer des dommages-intérêts si ce tiers ne s'exécute pas (art. 111 CO). Dans la promesse de porte-fort analogue au cautionnement, le fait promis consiste en l'exécution d'une obligation du tiers envers le stipulant. Dans tous les cas, celui qui se porte fort assume une obligation indépendante; celle-ci peut exister même si le tiers n'est pas débiteur du bénéficiaire ou si son obligation est nulle ou invalidée (ATF 125 III 305 consid. 2b et les références, JdT 2000 I 635).

La garantie est, en principe, exigible dès que la prestation du tiers n'est pas effectuée au moment convenu (ATF 131 III 606 consid. 4.2.2 et les références citées). Le dommage à réparer consiste dans la différence entre la situation patrimoniale du bénéficiaire telle qu'elle est et telle qu'elle serait si le tiers avait eu le comportement promis; sauf convention contraire, les dommages-intérêts doivent être fixés conformément aux règles usuelles régissant l'inexécution des obligations (arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2007 du 10 décembre 2007 consid. 6.1).

En cas de cautionnement, la caution s'engage envers le créancier à garantir le paiement de la dette contractée par le débiteur (art. 492 al. 1 CO). Le cautionnement revêt un caractère accessoire en ce sens qu'il ne peut exister que sur une obligation valable (art. 492 al. 2 CO; ATF 125 III 305 précité, ibidem).

4.2.2 Le critère de distinction essentiel entre ces deux espèces de garantie réside dans l'accessoriété, c'est-à-dire le lien de dépendance de l'engagement de la caution à l'égard de l'obligation du débiteur principal. Dans le cautionnement - contrat accessoire -, le garant assure la solvabilité du débiteur ou l'exécution d'un contrat, alors que le porte-fort promet au stipulant une prestation comme telle, indépendamment de l'obligation du tiers. Contrairement à la caution, le porte-fort doit exécuter sa prestation même si l'obligation à la charge du tiers n'a pas pris naissance, est nulle ou frappée d'invalidité (ATF 125 III 305 précité, ibidem et les références).

La jurisprudence voit un indice en faveur du porte-fort lorsque l'obligation du garant est définie de manière indépendante et que la garantie est donnée à un moment où l'on sait que le débiteur principal ne pourra probablement pas s'exécuter. Elle voit plutôt un indice en faveur du cautionnement lorsque l'obligation du garant correspond exactement à celle du débiteur principal et qu'elle est définie entièrement par référence à celle-ci (ATF 125 III 305 précité, ibidem et les arrêts cités). La référence au contrat de base ne permet cependant pas à elle seule de conclure à l'existence d'un engagement accessoire, car la garantie indépendante n'est jamais totalement séparée du contrat de base, puisque, même dans ce cas, le bénéficiaire doit au moins alléguer l'inexécution (ATF 131 III 511 consid. 4.3 et les références).

Bien qu'il ne revête pas non plus de caractère déterminant (ATF 125 III 305 précité, ibidem et les arrêts cités), l'existence d'un intérêt personnel du garant, distinct de celui du débiteur principal, constitue un indice important pour distinguer le cautionnement du porte-fort. Un tel intérêt direct existe lorsque le débiteur est une société et le garant son ayant-droit économique (ATF 129 III 702 consid. 2.6, JdT 2004 I 535; arrêt du Tribunal Fédéral 4A_440/2018 du 10 décembre 2018 consid. 6).

Le fait que le garant se soit engagé à payer "à première demande" constitue un indice en faveur de l'existence d'une garantie indépendante. Enfin, si la renonciation du garant à opposer "une quelconque exception ou objection" ne constitue pas nécessairement, selon la jurisprudence, une raison d'opter en faveur d'une garantie indépendante, la doctrine lui attribue une portée décisive (ATF 131 III 511 précité, ibidem).

Compte tenu du but de protection dévolu aux art. 492ss CO, normes qui tendent à éviter qu'un garant ne s'engage à la légère, il convient d'opter, en cas de doute sur la nature de l'engagement, en faveur du cautionnement (ATF 125 III 305 consid. 2b). Cela étant, les garanties émises dans un cadre commercial international sont présumées indépendantes (ATF 131 III 511 consid. 4.3; 113 II 434 consid. 2c; arrêt du Tribunal fédéral 5A_15/2018 du 16 avril 2019 consid. 4.4.4).

4.2.3 En présence d'un litige sur l'interprétation d'un contrat, la jurisprudence prévoit que le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO; ATF 144 III 93 consid. 5.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1 et les références). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais aussi le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat, des projets de contrat, de la correspondance échangée ou encore de l'attitude des parties après la conclusion du contrat, établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 140 III 86 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_152/2017 du 2 novembre 2017 consid. 4.1).

Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre. Il s'agit d'une interprétation selon le principe de la confiance. D'après ce principe, la volonté interne de s'engager du déclarant n'est pas seule déterminante; une obligation à sa charge peut découler de son comportement, dont l'autre partie pouvait, de bonne foi, déduire une volonté de s'engager. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 précité consid. 5.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_431/2019 du 27 février 2020 consid. 5.1 et les références).

Dans l'interprétation objective, la jurisprudence n'attache pas d'importance décisive au fait que les parties ont utilisé une expression juridique précise. En effet, la qualification juridique dépend du sens et du but d'un contrat et l'art. 18 al. 1 CO prescrit clairement qu'il ne faut pas s'arrêter aux dénominations peut-être inexactes que les parties ont employées (ATF 125 III 305 précité ibidem). Le Tribunal fédéral a en particulier retenu, s'agissant de la distinction entre cautionnement, porte-fort et reprise cumulative de dette (art. 143 CO; cf. ATF 129 III 702 précité consid. 2.4.1), qu'il serait trop facile d'éluder la protection dont bénéficie la caution (art. 493 CO) s'il suffisait d'employer les termes de porte-fort ou de codébiteur solidaire, dont l'intéressé ne connaît pas la portée. Aussi une interprétation littérale stricte n'est-elle justifiée qu'à l'égard de parties qui sont rompues à l'usage de ces termes ou possèdent une formation juridique acquise en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 5A_849/2012 du 25 juin 2013 consid. 2.2.1 avec références aux ATF 125 III 305 précité ibidem et 129 III 702 consid. 2.4.1).

A défaut, l'accord des parties doit attester que le garant connaissait réellement la portée de son engagement et révéler les motifs qui ont détourné les parties de conclure un cautionnement. Outre ces hypothèses, l'engagement solidaire est encore admis lorsque le garant a un intérêt propre et marqué à l'exécution de l'obligation ou qu'il en retire un avantage, que le créancier a connaissance de cet intérêt et qu'il peut donc apercevoir le motif pour lequel le garant se déclare prêt à assumer une obligation identique à celle du débiteur (ATF 129 III 702 précité consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 5A_739/2012 précité consid. 8.2.4).

Subsidiairement, si l'interprétation selon le principe de la confiance ne permet pas de dégager le sens de clauses ambiguës, celles-ci sont à interpréter en défaveur de celui qui les a rédigées, en vertu de la règle "in dubio contra stipulatorem" (ATF 133 III 61 consid. 2.2.2.3; 122 III 118 consid. 2a).

4.3.1 En l'espèce, ainsi que l'a observé le Tribunal, la garantie litigieuse comporte un caractère autonome. L'appelante ne s'est pas limitée à assurer le paiement d'une dette particulière contractée par G______ SWITZERLAND SA, mais garantissait l'exécution de toute obligation de celle-ci vis-à-vis de toute société du groupe B______, sans aucune autre condition. La garantie se réfère en outre expressément à la disposition légale pertinente du porte-fort. Par ce document, l'appelante a ainsi manifesté sa volonté de payer, sans réserve ni condition, jusqu'à concurrence de 3'000'000 fr., les dettes contractées par G______ SWITZERLAND SA vis-à-vis du groupe B______.

L'appelante relève un défaut d'intérêt personnel à l'établissement de la garantie, rappelant qu'elle n'est pas affiliée à G______ SWITZERLAND SA. Or, outre qu'il ne s'agit là que d'un critère à prendre en compte parmi d'autres, il sied de relever que F______ a expliqué avoir signé cette garantie car sa société et G______ SWITZERLAND SA étaient en relations commerciales, la seconde s'occupant de la réservation des conteneurs pour la première. En cela, l'appelante avait un intérêt à ce que son partenaire commercial soit ajouté au Credit Agreement conclu avec l'intimée, la condition en étant que l'appelante garantisse l'exécution des obligations de son partenaire envers l'intimée.

Enfin, la présomption prévue par la jurisprudence en faveur du cautionnement ne s'applique pas en l'espèce, puisqu'en matière de garanties émises dans un cadre commercial international, celles-ci sont présumées indépendantes.

Partant, l'engagement signé par l'appelante constitue, d'un point de vue matériel, un porte-fort et non un cautionnement.

Or, comme l'a retenu le Tribunal, il n'y a pas de raison de penser que le texte de la garantie ne correspondait pas à la réelle et commune intention des parties.

En effet, comme on l'a vu et contrairement aux allégations de l'appelante, F______ n'a pas déclaré avoir pensé qu'il engageait sa société à titre de caution et non de porte-fort. Il a seulement expliqué avoir remarqué la référence à l'art. 111 CO mais ne pas avoir lu cette disposition et n'avoir pas pris de conseil juridique avant de signer ce document, n'ayant dès lors pas conscience qu'il "deviendrai[t] responsable pour G______ SWITZERLAND SA". Ce défaut de conscience, qui ressort uniquement des déclarations d'une partie devant le Tribunal et n'est étayé par aucun autre élément au dossier, paraît peu crédible. En effet, il était convenu entre les parties que l'appelante devait émettre une garantie afin que G______ SWITZERLAND SA puisse bénéficier du Credit Agreement. Dans ce contexte, l'appelante, société active dans le négoce international, ne pouvait pas ignorer, en préparant elle-même (sous réserve de la mention de l'art. 111 CO ajoutée par l'intimée) puis en signant un tel document, qu'elle promettait l'exécution des obligations de G______ SWITZERLAND SA envers l'intimée, l'unique limitation découlant du plafond fixé, à hauteur de 3 millions de francs. Au demeurant, le fait que son administrateur ne maîtrise pas le français est sans pertinence, la garantie étant rédigée en langue anglaise.

4.3.2 A supposer que la qualification de porte-fort ne soit pas conforme à la volonté de l'appelante, au motif que son administrateur n'était pas pleinement conscient de l'engagement qu'il prenait vis-à-vis de l'intimée et des risques auxquels il exposait sa société, l'interprétation objective des manifestations de volonté conduirait quoi qu'il en soit au même résultat.

Les termes employés dans la lettre de garantie décrivent clairement la portée de l'engagement de l'appelante, à savoir que celle-ci garantissait l'exécution de toute obligation de G______ SWITZERLAND SA vis-à-vis de toute société du groupe B______, sans aucune autre condition. Même si elle allègue ne pas être versée dans la matière juridique, l'appelante ne prétend à aucun moment qu'elle n'était pas en mesure de saisir la portée, en droit suisse, des termes qu'elle avait elle-même employés, étant souligné qu'elle est une société suisse, active dans le domaine du négoce international de marchandises où le recours à des garanties est usuel et où une présomption en faveur des garanties indépendantes s'applique. L'appelante ne soutient du reste pas qu'elle ignorait alors la différence entre une garantie indépendante et une garantie accessoire, si bien qu'il n'y a pas lieu d'exclure une interprétation littérale de l'accord.

Au regard de ces éléments, l'intimée pouvait partir de bonne foi du principe qu'en signant cette lettre, l'appelante confirmait qu'elle avait compris et accepté de se lier par les termes qui étaient stipulés.

Dans ces circonstances, le principe "in dubio contra stipulatorem" invoqué par l'appelante ne lui est d'aucun secours.

Considérant ce qui précède, le jugement entrepris doit être confirmé en tant qu'il retient que l'engagement de l'appelante envers l'intimée constitue un porte-fort et non un cautionnement.

5. L'appelante prétend que G______ SWITZERLAND SA ne devait pas les montants correspondants aux factures impayées dès lors que l'intimée avait violé ses propres obligations envers cette dernière. Aussi, en tant que simple caution, l'appelante ne saurait être recherchée pour ces montants.

Non seulement l'argument de l'appelante est fondé sur des faits nouveaux irrecevables (cf. consid. 3 supra), mais il repose de surcroît sur une qualification juridique de la garantie litigieuse qui a été écartée selon ce qui précède. On se limitera dès lors à rappeler que, contrairement au cautionnement qui revêt un caractère accessoire en ce sens qu'il ne peut exister que sur une obligation valable, l'engagement de porte-fort est indépendant; il suffit que la prestation du tiers ne soit pas effectuée pour la garantie puisse être mise en œuvre, sans égard aux objections éventuelles que le tiers aurait pu invoquer.

Partant, l'obligation de l'appelante découlant de la garantie existe indépendamment des éventuelles objections de G______ SWITZERLAND SA, dénuées de toute efficacité dans le cadre de l'appel à garantie.

Ce grief est ainsi infondé, dans la mesure de sa recevabilité.

6. Dans un ultime grief, l'appelante soutient que l'appel à la garantie était abusif au sens de l'art. 2 al. 2 CC. Elle expose que l'intimée avait procédé au transport et à la livraison des marchandises en violation des instructions de G______ SWITZERLAND SA, soit selon un mode de prise en charge du fret non agréé, lequel avait eu des répercussions financières importantes pour celle-ci.

6.1 Un appel à la garantie est abusif notamment lorsque le bénéficiaire a fautivement empêché l'exécution de la part du débiteur principal (par exemple, en cas de demeure du créancier selon l'art. 91 CO), lorsque le débiteur principal a indubitablement exécuté sa prestation, ou encore lorsqu'il vise à couvrir un dommage sans lien avec la relation de base garantie, notamment parce que le bénéficiaire tente de faire valoir une prétention non couverte par le but de la garantie en cause (arrêts du Tribunal fédéral 4A_709/2016 du 6 avril 2017 consid. 2.3, 4A_111/2014 du 31 octobre 2014 consid. 3.3; Haldy, Garanties personnelles privées, thèse, Lausanne 2022, p. 218 et les références citées).

Il ne suffit pas que la garantie ne soit pas justifiée sous l'angle des rapports entre le donneur d'ordre et le bénéficiaire ou qu'un litige existe entre eux quant à l'exécution du contrat les liant, puisque la garantie est par nature indépendante du rapport de valeur (ATF 131 III 511 consid. 4.6). Pour qu'il y ait abus, il faut que le bénéficiaire, de mauvaise foi, poursuive un objectif totalement étranger au contrat de base (arrêt du Tribunal fédéral 4A_709/2016 précité, ibidem).

6.2 Comme on le comprend, l'appelante estime que l'appel à la garantie est abusif dans la mesure où l'intimée a mal exécuté ses obligations résultant du rapport de base avec G______ SWITZERLAND SA.

Ici encore, l'appelante tente de s'affranchir sans droit du caractère indépendant du porte-fort.

Il suffit dès lors de rappeler que le but de la garantie était précisément de couvrir l'éventualité d'un défaut de paiement de G______ SWITZERLAND SA dans le cadre de ses activités commerciales avec l'intimée. Le lien entre l'appel à la garantie et la relation de base garantie est donné dans la mesure où le dommage subi par l'intimée a été causé par le comportement visé par la garantie, soit le défaut de paiement de G______ SWITZERLAND SA.

Il s'ensuit que le grief de l'appelante est sans fondement.

En définitive, c'est à juste titre que le Tribunal a retenu que le dommage causé à l'intimée en raison des factures impayées était suffisamment établi, ce qui justifiait l'appel à la garantie émise par l'appelante.

7. Au vu de ce qui précède, le jugement entrepris sera confirmé en tant qu'il retient que les conditions d'exécution de la garantie du 6 décembre 2018 sont réalisées, qu'il condamne l'appelante à verser à l'intimée les sommes de 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 55'933 fr. 90, 49'221 fr. 80, 25'729 fr. 60, 13'970 fr. 80 et 48'037 fr. 30 avec suite d'intérêts à 9% et qu'il prononce la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer.

8. Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 8'000 fr. (art. 5, 17, et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront compensés avec l'avance de frais de 18'000 fr. fournie par celle-ci, qui demeure acquise à l'Etat de Genève à due concurrence (art. 111 al. 1 CPC). Le solde de 10'000 fr. sera donc restitué à l'appelante.

L'appelante sera en outre condamnée à verser à l'intimée des dépens d'appel de 8'000 fr. (art. 105 al. 2, 111 al. 2 CPC; art. 84, 85 et 90 RTFMC), débours compris (art. 25 et 26 LaCC) et sans TVA compte tenu du siège de l'intimée à l'étranger (cf. ATF 141 IV 344 consid. 4.1).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ SA contre le jugement JTPI/4882/2024 rendu le 22 avril 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/16811/2022.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 8'000 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense entièrement avec l'avance versée par celle-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève à due concurrence.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à restituer à A______ SA le solde de son avance de frais, soit 10'000 fr.

Condamne A______ SA à verser 8'000 fr. à B______ SA à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Madame Stéphanie MUSY, Madame Pauline ERARD, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.