Décisions | Chambre civile
ACJC/144/2025 du 31.01.2025 sur JTPI/8612/2024 ( OO )
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/23538/2023 ACJC/144/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU JEUDI 30 JANVIER 2025 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par la 21ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 8 juillet 2024 et citée sur requête en fourniture de sûretés en garantie des dépens, représentée par
Me Christian LÜSCHER, avocat, CMS von Erlach Partners SA, Esplanade de Pont-Rouge 9, case postale 1875, 1211 Genève 26,
et
Monsieur B______, domicilié ______, intimé et requérant sur requête en fourniture de sûretés en garantie des dépens, représenté par Me Rémy BUCHELER, avocat, Pont-Rouge Avocats, route des Jeunes 9, 1227 Les Acacias.
Attendu, EN FAIT, que par jugement du 8 juillet 2024, le Tribunal de première instance a débouté A______ de ses conclusions en modification de jugement de divorce (ch. 1 du dispositif), donné acte à cette dernière et à B______ de leur engagement à mettre en place un suivi thérapeutique individuel pour leur fils C______, les y condamnant en tant que de besoin (ch. 2), exhorté les précités à entreprendre un travail de co-parentalité auprès d'un organisme spécialisé compétent (ch. 3), mis les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., pour moitié à charge de chaque partie, dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5);
Que par acte expédié le 10 septembre 2024 à la Cour de justice, A______ a formé appel contre ce jugement; qu'elle a conclu, avec suite de frais judicaires et dépens, à l'annulation des ch. 1, 4 et 5 de son dispositif et, cela fait, à ce que les ch. 4 et 5 du dispositif du jugement de divorce JTPI/2682/2023 du 28 février 2023 soient modifiés en ce sens qu'une garde alternée de l'enfant C______ était prononcée et exercée selon les modalités indiquées;
Que par acte expédié à la Cour le 31 octobre 2024, B______ a répondu à l'appel, concluant, au fond, à son rejet et à la confirmation du jugement attaqué, avec suite de frais judiciaires et dépens;
Qu'il a préalablement conclu à ce qu'il soit ordonné à A______ de fournir des sûretés en garantie des dépens; qu'il a soutenu que l'art. 99 al. 3 let. b CPC n'était pas applicable à la procédure de modification d'un jugement de divorce; que par ailleurs, A______ paraissait insolvable; qu'il ressortait de ses diverses déclarations devant le Tribunal, dans la présente procédure ainsi que dans une autre, qu'elle alléguait avoir ni revenus, ni fortune; que sa situation faisait dès lors craindre que les dépens auxquels elle serait condamnée ne soient pas versés;
Qu'invitée à répondre à la requête de sûretés, A______ a conclu à son rejet avec suite de frais; qu'elle a soutenu que l'art. 99 al. 3 let. b CPC s'appliquait également à la procédure de modification du jugement de divorce et qu'elle n'était pas insolvable;
Que B______ a répliqué le 21 décembre 2024, persistant dans ses conclusions;
Que le 21 janvier 2025, les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger sur requête de sûretés en garantie des dépens;
Considérant, EN DROIT, que l'article 99 al. 1 CPC prévoit que le demandeur doit, sur requête du défendeur et pour autant que l'une ou l'autre des conditions énumérées sous lettres a à d soit remplie, fournir des sûretés en garantie du paiement des dépens;
Que l'institution des sûretés a pour but de donner au défendeur une assurance raisonnable que, s'il gagne son procès, il pourra effectivement recouvrer les dépens qui lui seront alloués à la charge de son adversaire : le procès implique en effet des dépenses que le défendeur n'a pas choisi d'exposer et dont il est juste qu'il puisse se faire indemniser si la demande dirigée contre lui était infondée (Suter/Von Holzen, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung (ZPO), 4ème éd. 2025, n. 2 ad art. 99 CPC; Tappy, Commentaire romand, Code de procédure civile, 2ème éd., 2019, n. 3 ad art. 99 CPC);
Que selon l'art. 99 al. 1 CPC, le demandeur doit fournir des sûretés en garantie du paiement des dépens notamment lorsqu'il paraît insolvable, notamment en raison d’une mise en faillite, d’une procédure concordataire en cours ou de la délivrance d’actes de défaut de biens (let. b) ou lorsque d’autres raisons font apparaître un risque considérable que les dépens ne soient pas versés (let. d);
Qu'à teneur du texte de la loi, seul le défendeur de première instance peut requérir des sûretés du demandeur; que néanmoins, des sûretés peuvent également être exigées en deuxième instance (ATF 141 III 554, consid. 2.5.1; Hofman/Baeckert, in Basler Kommentar, 4ème éd., 2025, Schweizerische Zivilprozessordnung, n. 13 ad art. 99 CPC);
Que selon le Tribunal fédéral, un recourant ne peut demander des sûretés en déposant simultanément sa réponse sur le recours, car il n'a plus d'intérêt à les obtenir, ayant déjà exposé en réalité tous les frais susceptibles de justifier des dépens en sa faveur (ATF 118 II 87 consid. 2, JdT 1993 I 316; 79 II 295 consid.3, JdT 1954 I 528; arrêt du Tribunal fédéral 4A_188/2007 du 13 septembre 2007 condid. 1.4); que le Tribunal fédéral a appliqué la jurisprudence précitée au cas d'une demande de sûretés présentée par l'intimé à un appel ou un recours selon les art. 308 CPC ou 319 CPC (ATF
141 III 554);
Qu'en l’espèce, le requérant a été informé par avis du greffe de la Cour du 12 septembre 2024 de ce que la citée avait formé appel contre le jugement du 8 juillet 2024; qu'il aurait par conséquent dû, dès réception de cet avis, prendre des conclusions en fourniture de sûretés, sans attendre qu’un délai pour répondre au fond lui soit imparti, étant relevé que les motifs invoqués à l'appui de la requête étaient connus puisqu'ils se fondent sur des déclarations de la citée devant le Tribunal;
Que dès lors, la demande de sûretés formée dans le cadre du mémoire réponse doit être considérée comme tardive puisque tous les frais du requérant pour la procédure d'appel devant la Cour ont déjà été engagés; que des frais en relation avec une éventuelle duplique sont hypothétiques et seraient quoi qu'il en soit limités; que la requête sera dès lors déclarée irrecevable;
Qu'en tout état de cause, le requérant n'a pas allégué que la citée ferait l'objet de poursuites ou que des actes de défaut de biens auraient été délivrés à son encontre; qu'il n'a par ailleurs fourni aucune indication ni produit aucun titre permettant de connaître la situation financière de la citée; que les simples déclarations de cette dernière, toutes générales, invoquées par le requérant ne sont pas suffisantes pour retenir que ce dernier courrait un risque qui pourrait être qualifié de considérable que les dépens qui lui seraient dus ne soient pas versés; que les conditions de l'art. 99 al. 1 let. b ou d CP ne seraient, partant, pas réunies; que la requête était donc, en tout état de cause, infondée;
Que le requérant, qui succombe, sera condamné aux frais judiciaires de la présente décision (art. 106 al. 1 CPC), arrêtés à 300 fr. (art. 21 RTFMC) et compensés avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC);
Qu'il sera également condamné aux dépens de la requérante, arrêtés à 400 fr. (art. 85 et 88 RTFMC).
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La Chambre civile :
Statuant sur requête en constitution de sûretés en garantie des dépens :
Déclare irrecevable la requête en constitution de sûretés formée par B______ dans la cause C/23538/2023.
Arrête les frais judiciaires de la présente décision à 300 fr., les met à la charge de B______ et les compense avec l'avance de même montant fournie par ce dernier, qui reste acquise à l'Etat de Genève.
Condamne B______ à verser à A______ la somme de 400 fr. à titre de dépens.
Siégeant :
Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Paola CAMPOMAGNANI et
Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.
Le président : Laurent RIEBEN |
| La greffière : Sandra CARRIER |
Indication des voies de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF indéterminée.