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Décisions | Chambre civile

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C/15944/2016

ACJC/745/2023 du 06.06.2023 sur JTPI/10960/2021 ( OO ) , JUGE

Recours TF déposé le 13.07.2023, 4A_375/2023
Normes : CPC.317.al1; CO.85.al1; CO.86.al1+2; CO.87.al1
En fait
En droit

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15944/2016 ACJC/745/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 6 JUIN 2023

 

Entre

A______ SA, sise ______ [GE], appelante d'un jugement rendu par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 1er septembre 2021, comparant par Me Lucien FENIELLO, avocat, Budin & Associés, rue De-Candolle 17, case postale 166, 1211 Genève 12, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, comparant par Me Daniel KINZER, avocat, CMS von Erlach Partners SA, rue Bovy-Lysberg 2, case postale 5067, 1211 Genève 3, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/10960/2021 rendu le 1er septembre 2021, notifié à A______ SA le 13 février 2021, le Tribunal de première instance (ci-après, le Tribunal) a déclaré irrecevables les allégués et pièces produites par A______ SA dans ses déterminations du 14 octobre 2020 (chiffre 1 du dispositif), condamné A______ SA à verser à B______ 45'844 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le 1er décembre 2010 (ch. 2), arrêté les frais à 18'200 fr., mis ceux-ci à la charge de A______ SA, condamné celle-ci à payer 18'200 fr. à l'Etat de Genève (ch. 3) ainsi que 18'000 fr. TTC à B______ à titre de dépens (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice (ci-après, la Cour) le 13 octobre 2021, A______ SA a formé appel de ce jugement et sollicité son annulation. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour déclare recevables les allégués et pièces invoqués dans ses déterminations du 14 octobre 2020, déclare irrecevables les conclusions contenues dans les déterminations de B______ du 14 octobre 2020 et déboute celle-ci de toutes ses conclusions, sous suite de frais judiciaires et dépens.

b. B______ a requis le versement de sûretés en garantie des dépens pour la procédure d'appel.

La Cour a rejeté sa requête par arrêt ACJC/71/2022 du 21 janvier 2022, qui a été confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 13 septembre 2022 (______/2022).

c. Sur le fond, B______ a conclu au déboutement de A______ SA de ses conclusions d'appel.

d. Les parties ont répliqué, respectivement dupliqué, et persisté dans leurs conclusions.

e. Par avis du 21 février 2023, la Cour a informé les parties de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier :

a. B______, de nationalité russe, est domiciliée à Genève.

b. A______ SA, dont le siège est à Genève, a notamment pour but la gestion de fonds de placements, la gestion de patrimoine et le conseil en placement et en investissement.

C______ a été administrateur de A______ SA à compter du 2 juillet 2007, avec signature individuelle. Ses pouvoirs ont été radiés le ______ 2011. Avant d'exercer ces fonctions, C______ était directeur adjoint au sein de D______ (ci-après, également, la banque).

c. Le 14 juin 2007, B______ a ouvert un compte bancaire auprès de la banque.

Un formulaire "Profil client" a été rempli à cette occasion. A la rubrique "origine de la relation", la mention "connaissance personnelle du gestionnaire de D______" a été cochée et il a été précisé que cette origine était "familiale". La case "gérant indépendant" a également été cochée et le nom de A______ SA ajouté. Il a été précisé que le client était connu par C______ depuis plus de 10 ans.

En outre, B______ a désigné, sur le formulaire "Pouvoir d'administration", A______ SA en qualité de représentant "avec droit de substitution pour tous les rapports d'affaires actuels et futures du titulaire avec la D______. Le représentant peut exercer tous les droits dévolus au Titulaire, notamment pour acheter et vendre des titres, des devises, faire tout investissement, réinvestissement, encaissement et conversion, exercer et réaliser des droits de souscription".

d. Dans le courant de l'année 2009, A______ SA, soit pour elle C______, a donné des ordres à la banque en rapport avec le compte dont B______ était titulaire. Ces ordres ont été rédigés sur un papier à l'en-tête de A______ SA et signés par C______.

e. Entre octobre et décembre 2010, C______ a imité à trois reprises la signature de B______ pour instruire D______ de débiter son compte, étant précisé que ces instructions étaient rédigées comme si elles émanaient de la cliente elle-même.

f. La banque a exécuté ces instructions, ce qui a entraîné les opérations suivantes :

-          Le 15 octobre 2010, la banque a débité le compte de B______ de 180'000 euros en faveur de E______ SA. La banque a prélevé 5 euros de frais.

-          Le 1er décembre 2010, la banque a débité le compte de B______ de 45'844 fr. en faveur de F______ SA.

-          Le 10 décembre 2010, la banque a remis en espèces à C______ la somme de 15'000 euros, en débitant le compte de B______ de 20'104.82 dollars américains.

g. Fin 2010, A______ SA a appris que C______ avait "effectué diverses opérations douteuses". Elle a alors décidé de révoquer son mandat d'administrateur avec effet immédiat, puis elle l'a dénoncé au Ministère public en février 2011.

h. B______ a découvert les agissements de son gestionnaire le 18 février 2011 et a déposé une plainte pénale.

i. Par jugement du Tribunal correctionnel du 21 juin 2016, C______ a été reconnu coupable d'abus de confiance et de faux dans les titres au détriment de B______ notamment.

Il a été condamné à une peine privative de liberté de trois ans, sous déduction de 65 jours de détention avant jugement. Il a également été condamné à verser à B______, à titre de réparation du dommage matériel, les montants de 241'830 fr. et 65'380 fr. plus intérêts à 5%, ainsi que les sommes de 12'130 fr. et 9'199 fr. 45 plus intérêts à 5% à titre de dépens pour la procédure pénale.

j. Par demande déposée en vue de conciliation le 15 août 2016, déclarée non conciliée le 29 septembre 2016, puis introduite devant le Tribunal le 5 janvier 2017, B______ a assigné A______ SA en paiement de 241'830 fr. plus intérêts à 5% dès le 15 octobre 2010, 65'380 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er décembre 2010, 12'130 fr. plus intérêts à 5% dès le 27 novembre 2011 et 9'199 fr. 45 plus intérêts à 5% dès le 21 juin 2016.

Subsidiairement, elle a conclu au paiement des montants de 180'005 euros plus intérêts à 5% dès le 15 octobre 2010, 45'844 fr. plus intérêts à 5% dès le 1er décembre 2010, 20'107.82 dollars américains plus intérêts à 5% dès le 10 décembre 2010, 12'130 fr. plus intérêts à 5% dès le 27 novembre 2011 et 9'199 fr. 45 plus intérêts à 5% dès le 21 juin 2016.

Dans ses allégués, non contestés par A______ SA, B______ a précisé que le taux de change applicable était de 1 euro = 1.343 fr. au 15 octobre 2010, respectivement de 1 dollar américain = 0.97 fr. au 10 décembre 2010.

k. A______ SA a conclu, préalablement, à ce que le Tribunal déclare irrecevables les conclusions subsidiaires de B______ et, au fond, rejette la demande.

l. Par jugement JTPI/11095/2017 du 6 septembre 2017, le Tribunal a débouté B______ des fins de sa demande, au motif que les agissements de C______ ne pouvaient pas être imputés à A______ SA. La Cour a confirmé ce jugement par arrêt ACJC/1300/2018 du 25 septembre 2018,

Statuant sur le recours en matière civile interjeté par B______, le Tribunal fédéral – par arrêt ______/2018 du 17 janvier 2020 – a annulé l'arrêt ACJC/1300/2018 susvisé et renvoyé la cause à la Cour pour suite de la procédure et nouvelle décision dans le sens des considérants.

En substance, le Tribunal fédéral a considéré que les actes de C______ étaient imputables à A______ SA en raison de la qualité d'organe de celui-là au sein de celle-ci et du rapport fonctionnel entre l'activité délictuelle et la qualité d'organe. Il a par ailleurs pris acte du fait que B______, par courrier du 7 novembre 2019, avait réduit ses conclusions à 45'884 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 1er décembre 2010. Cela étant, dès lors que l'arrêt attaqué n'avait pas examiné la question du montant du dommage, ni par la force des choses la question de l'imputation du montant de 370'000 fr. que B______ avait reçu de la banque (cf. attendu m. infra), il n'appartenait pas au Tribunal fédéral de déterminer à ce stade comment ce montant devait être imputé et s'il était loisible à l'intéressée de choisir de l'imputer sur les premier et troisième ordres de paiement litigieux (cf. attendu f. supra).

La cause devait donc être renvoyée à la Cour pour examen et décision sur les quatre autres conditions qu'étaient le dommage, l'acte illicite, la faute et le lien de causalité entre l'acte illicite et le dommage. En particulier, il lui appartiendrait de se prononcer sur le dommage, eu égard aux conclusions réduites de B______ et à l'imputation dont celle-ci se prévalait, ainsi que sur la faute ou le fait concomitant de la cliente en tant que facteur d'exclusion de la responsabilité de A______ SA, respectivement facteur de réduction de la réparation du dommage.

m. Invitée à se déterminer sur l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral, B______ a conclu, par observations du 14 octobre 2020, à ce que la Cour annule le jugement JTPI/11095/2017 du 6 septembre 2017 et condamne A______ SA à lui verser la somme de 45'844 fr. plus intérêts à 5% dès le 21 juin 2019, sous suite de frais judiciaires et dépens de première instance et d'appel. Elle a expressément souligné que sa conclusion en paiement de 45'844 fr. plus intérêts concernait le second ordre litigieux (cf. attendu f. supra).

Elle a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

Elle a notamment précisé que par convention du 20 juin 2019 conclue avec D______, une indemnité de 370'000 fr. lui avait été allouée, puis versée le 21 juin 2019, sans toutefois valoir reconnaissance de la responsabilité de la banque. Cette indemnité devait être déduite du montant total réclamé à A______ SA, puisque qu'elle avait été versée en compensation des agissements de C______. Les intérêts relatifs aux différentes créances réclamées avaient été arrêtés au 21 juin 2019 et chiffrés à 138'928 fr. Elle a également allégué avoir supporté des frais judiciaires à hauteur de 5'000 fr. dans le cadre de la procédure civile qu'elle avait initiée contre la banque (C/1______/2015).

Dans cette procédure, le Tribunal a – par jugement JTPI/10208/2019 du 9 juillet 2019 – pris acte du retrait par B______ de son action et de l'acceptation de ce retrait par la banque, arrêté les frais judiciaires à 5'200 fr., imputés à B______ et laissés provisoirement à la charge de l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire, et compensé les dépens.

Concernant l'imputation de l'indemnité reçue de la banque sur le montant réclamé à A______ SA, B______ a d'abord imputé les intérêts en 138'000 fr. et les frais judiciaires en 5'000 fr. relatifs à la cause C/1______/2015, ainsi qu'une estimation des dépens en 15'800 fr. dans la même cause, portant ainsi le solde de l'indemnité à 210'272 fr. Elle a ensuite imputé le montant de 210'272 fr. sur la première créance en capital de 241'830 fr. et relevé que l'indemnité était entièrement absorbée par cette première créance. En conséquence, elle réduisait ses conclusions au deuxième montant en capital de 45'844 fr., lequel demeurait pleinement dû.

n. Dans ses observations du 14 octobre 2020, A______ SA a conclu, principalement, au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, subsidiairement, à son déboutement à hauteur de 12'989 fr. 37 (contrevaleur de 13'054.31 dollars américains au taux du 7 novembre 2019) et, en sus, à la réduction par moitié de l'indemnité due à B______ en raison de sa faute concomitante, plus subsidiairement, à la réduction par moitié de l'indemnité due à B______ en raison de sa faute concomitante, le tout sous suite de frais judiciaires et dépens.

Elle a allégué des faits nouveaux (allégués n. 51 à 70) et produit des pièces nouvelles, notamment les documents d'ouverture de compte auprès de D______ ainsi que les conditions générales de la banque. Elle a allégué le fait que B______ avait choisi le mode de correspondance "banque restante" avec la banque et n'avait pas réagi à temps au premier ordre illicite. Par conséquent, une faute concomitante ayant contribué à la survenance du dommage, voire à son aggravation, avait été commise.

o. Par arrêt ACJC/1869/2020 du 22 décembre 2020, compte tenu de l'importance des problématiques restant à élucider et du principe du double degré de juridiction, la Cour, après annulation du jugement JTPI/11095/2017, a renvoyé la cause au Tribunal pour instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants de son arrêt et de l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral.

La Cour a rappelé que selon le Tribunal fédéral, les instances cantonales avaient considéré, à tort, que les agissements de C______ n'étaient pas opposables à A______ SA, alors que les deux premières conditions de la responsabilité de l'art. 722 CO étaient réunies eu égard aux ordres de paiement litigieux. Il y avait lieu dès lors d'examiner les quatre autres conditions qu'étaient le dommage, l'acte illicite, la faute et le lien de causalité entre l'acte illicite et le dommage. En particulier, il fallait se prononcer sur le dommage, au regard des conclusions réduites de B______ et à l'imputation dont celle-ci se prévalait, ainsi que sur la faute ou le fait concomitant de la précitée en tant que facteur d'exclusion de la responsabilité de A______ SA.

L'issue du litige étant incertaine, la Cour a par ailleurs délégué la répartition des frais de la procédure d'appel au Tribunal, conformément à l'art. 104 al. 4 CPC. Elle a arrêté les frais judicaires d'appel à 8'000 fr. et les dépens d'appel à 10'500 fr., débours et TVA compris, y compris pour la procédure consécutive au renvoi.

p. Lors de l'audience de débats d'instruction du 17 mai 2021, les parties ont sollicité du Tribunal qu'il ordonne l'apport des écritures et pièces produites devant la Cour le 14 octobre 2020.

Par ordonnance du 31 mai 2021, le Tribunal a donné suite à cette requête.

q. Lors de l'audience du 21 juin 2021, les parties ont plaidé et persisté dans leurs conclusions, après quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

D. Dans le jugement entrepris, le premier juge a, préalablement, statué sur la recevabilité de faits et pièces nouveaux invoqués par les parties, point sur lequel il sera revenu plus en détail dans la partie EN DROIT ci-après. Au fond, il a rappelé que le Tribunal fédéral avait admis que les deux premières conditions de la responsabilité fondée sur l'art. 722 CO étaient réalisées, soit la qualité d'organe de C______ et la commission de l'acte dans la gestion des affaires de A______ SA. L'existence d'un dommage était établie à hauteur de 307'210 fr. à la suite des ordres frauduleux, montant auquel s'ajoutaient les frais de défense pénale en 21'329 fr. 45, les intérêts en 138'928 fr. et les frais judiciaires en 5'000 fr. Procédant à l'imputation sur ces montants de la somme de 370'000 fr. reçue de la banque à titre d'indemnité, le Tribunal a d'abord couvert les intérêts, les frais de défense pénale et judiciaires, puis la première dette exigible (soit l'ordre portant sur 180'000 euros, convertis en 241'830 fr.), qui n'était pas entièrement couverte. Il convenait donc d'allouer le montant correspondant au deuxième ordre litigieux, soit 45'844 fr. Le caractère illicite, la faute et le rapport de causalité ont été admis. Aucune faute concomitante n'a été retenue.

Vu l'issue de la procédure, le Tribunal a mis l'entier des frais judiciaires (10'200 fr. pour la procédure de première instance + 8'000 fr. pour la procédure d'appel) et des dépens (7'500 fr. + 10'500 fr.) à la charge de A______ SA.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable pour avoir été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131 et 311 CPC), contre une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC) rendue dans une affaire patrimoniale dont la valeur litigieuse est, compte tenu des prétentions élevées en première instance, supérieure à 10'000 fr. (art. 91 al. 1 et 308 al. 2 CPC).

Le mémoire de réponse est également recevable pour avoir été déposé dans le délai et la forme prescrits par la loi (art. 312 CPC). Il en va de même des écritures subséquentes des parties (art. 316 al. 2 CPC; sur le droit à la réplique spontanée : cf. ATF 146 III 97 consid. 3.4.1 et les références citées).

1.2 La Chambre de céans revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), dans les limites posées par les maximes des débats et de disposition applicables au présent contentieux (art. 55 al. 1 et 58 al. 1 CPC). La procédure ordinaire s'applique (art. 219 et ss CPC).

2. La première question à traiter est celle de la recevabilité des allégués et pièces dont les parties se sont prévalues dans leurs observations du 14 octobre 2020.

2.1 Selon l'art. 107 al. 2 LTF, lorsque le Tribunal fédéral admet le recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision.

Conformément au principe de l'autorité de l'arrêt de renvoi, l'autorité cantonale à laquelle une affaire est renvoyée est tenue de fonder sa nouvelle décision sur les considérants de droit de l'arrêt du Tribunal fédéral; sa cognition est limitée par les motifs de l'arrêt de renvoi, en ce sens qu'elle est liée par ce qui a déjà été tranché définitivement par le Tribunal fédéral, ainsi que par les constatations de fait qui n'ont pas été critiquées devant lui (ATF 143 IV 214 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_337/2019 du 18 décembre 2019 consid. 4.1 et les références). Elle peut tenir compte de faits et moyens de preuve nouveaux pour autant qu'ils remplissent les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC, mais uniquement sur les points qui ont fait l'objet du renvoi. Ceux-ci ne peuvent être ni étendus, ni fixés sur une base juridique nouvelle (ATF 135 III 334 consid. 2; 131 III 91 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2021 du 20 juillet 2021 consid. 2.1).  

L'admissibilité des nova en appel est régie par l'art. 317 CPC. L'art. 317 al. 1 CPC prévoit que les faits et moyens de preuve nouveaux sont admissibles en appel pour autant qu'ils soient invoqués ou produits sans retard (let. a) et qu'ils n'aient pas pu l'être en première instance, bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b). Ces conditions sont cumulatives (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1 et la référence). S'agissant des vrais nova (echte Noven), la condition de nouveauté posée par la lettre b est sans autre réalisée et seule celle d'allégation immédiate doit être examinée. En ce qui concerne les pseudo nova (unechte Noven), il appartient au plaideur qui entend les invoquer devant l'instance d'appel de démontrer qu'il a fait preuve de la diligence requise, ce qui implique notamment d'exposer précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve n'a pas pu être produit en première instance (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 42 consid. 4.1). Les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont applicables même lorsque la cause est soumise à la maxime inquisitoire sociale (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 142 III 413 consid. 2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2021 du 20 juillet 2021 consid. 3.4.1.2).

En cas de renvoi de la cause à la cour cantonale par le Tribunal fédéral, le moment déterminant pour statuer sur l'admissibilité des faits et moyens de preuve nouveaux demeure la fin des débats principaux ou le début des délibérations de première instance. En effet, l'annulation de la décision cantonale et le renvoi de la cause pour nouvelle décision ont pour effet de reporter la procédure au stade où elle se trouvait immédiatement avant que l'instance d'appel ne se soit prononcée; celle-ci ne se trouve pas saisie d'une nouvelle procédure, mais reprend la procédure qui n'est pas close (arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2021 du 20 juillet 2021 consid. 3.4.1.2 et les références citées).

2.2 En l'espèce, après l'annulation de l'arrêt de la Cour du 25 septembre 2018, le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à celle-ci. Au vu des motifs du renvoi et des exigences liées au droit d'être entendu (voir parmi d'autres et récemment, arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1), la Cour a donné l'occasion aux parties de se prononcer.

A cette occasion, l'appelante, admettant elle-même avoir concentré son argumentation de première instance et d'appel sur la question de la responsabilité de la société pour les agissements de son ancien administrateur, a développé des moyens nouveaux, en fait et en droit, portant sur le lien de causalité, la faute concomitante de l'intimée et un consentement présumé, liés à la conclusion d'une clause dite de "banque restante" avec la banque dont l'intimée était cliente. L'appelante a en outre formulé des observations sur le fait nouveau mentionné dans l'arrêt du Tribunal fédéral, à savoir l'indemnisation de l'intimée par la banque et l'imputation de cette indemnité sur le dommage subi.

Or, dans sa réponse initiale, l'appelante avait expressément exclu de se prononcer sur les autres conditions de sa responsabilité fondée sur l'art. 722 CO, s'exprimant uniquement sur l'imputabilité à elle-même des actes de C______.

Dans le cadre du présent appel, l'appelante fait grief au Tribunal d'avoir violé l'art. 107 al. 2 LTF, son droit d'être entendue, ainsi que les art. 152 et 226 CPC. En substance, elle soutient que son argumentation liée principalement à la clause de banque restante prétendument conclue entre l'intimée et la banque était recevable et aurait dû être examinée par le premier juge.

Ces griefs seront écartés pour les raisons qui suivent.

Comme relevé ci-avant, l'appelante a fait le choix – en première instance – de concentrer son argumentation exclusivement sur l'une des conditions d'application de l'art. 722 CO quant à sa responsabilité. Ce faisant et bien que les autres conditions de cette disposition aient été expressément discutées par l'intimée dans sa demande en paiement, l'appelante a pris le risque (qui s'est en l'occurrence réalisé) que les actes de C______ lui soient imputés et que les autres conditions de la responsabilité soient examinées par le Tribunal, celui-ci n'ayant pas limité la procédure au seul examen de l'imputabilité des actes de l'organe à l'appelante.

Le fait que le Tribunal fédéral a renvoyé la cause à la Cour pour l'examen des autres conditions de l'art. 722 CO ne saurait permettre à l'appelante de se soustraire aux réquisits de l'art. 317 CPC quant à l'allégation de faits nouveaux et à la production de pièces nouvelles. A fortiori, le renvoi subséquent au Tribunal en vertu de l'art. 318 al. 1 let. c CPC ne constitue pas une reprise ab initio de la procédure avec la possibilité pour les parties d'introduire des nova de façon illimitée. Il s'agit au contraire de reprendre la procédure au stade où elle se trouvait immédiatement avant que la Cour ne prononce son arrêt ACJC/1300/2018 du 25 septembre 2018.

Or, il est constant que les faits et pièces nouveaux invoqués par l'appelante, liés essentiellement à la question d'une clause de banque restante et à la connaissance par l'intimée des actes dont elle a été victime, n'ont pas été allégués, ni produits avant que le Tribunal ne garde, pour la première fois, la cause à juger. Ces faits, antérieurs à l'introduction de la présente procédure en 2016, auraient donc pu être allégués bien plus tôt, avant même l'ouverture des débats principaux de première instance (art. 229 CPC a contrario). En attendant jusqu'à la procédure de renvoi par le Tribunal fédéral, l'appelante a tardé à se prévaloir de ces faits. Elle n'apporte aucune justification sur son retard et est donc forclose à s'en prévaloir.

La décision du Tribunal d'écarter ces nova est dès lors fondée.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, les observations de l'intimée du 14 octobre 2020 sont recevables, y compris les conclusions y figurant, car elles comportent de véritables faits nouveaux, qui ne pouvaient pas être allégués précédemment, à savoir la conclusion d'une convention d'indemnisation avec la banque et le versement d'une indemnité en faveur de l'intimée. L'argumentation juridique et factuelle de l'appelante en lien avec ces questions est également recevable, celle-ci n'ayant pas eu l'occasion de se déterminer à cet égard avant le 14 octobre 2020.

Par conséquent, les griefs de l'appelante sur ce point seront rejetés.

Enfin, l'appelante ne saurait se plaindre d'une violation de son droit d'être entendue, le Tribunal ayant correctement appliqué les règles de procédure sur l'admissibilité des allégués et moyens de preuve nouveaux.

3. L'appelante remet en cause le jugement entrepris quant à la question du dommage et de sa quotité.

3.1
3.1.1
L'imputation des actes illicites à la société anonyme est soumise aux conditions de l'art. 722 CO et à celles de la responsabilité aquilienne de l'art. 41 al. 1 CO, soit aux six conditions suivantes: (1) un acte d'un organe; (2) un acte commis dans la gestion des affaires sociales; (3) un dommage; (4) un acte illicite; (5) une faute et (6) un lien de causalité naturelle et adéquate entre l'acte incriminé et le dommage (ATF 121 III 176 consid. 4a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_616/2019 du 17 avril 2020 consid. 4.1.2).

3.1.2 A défaut de terme stipulé ou résultant de la nature de l'affaire, l'obligation peut être exécutée et l'exécution peut en être exigée immédiatement (art. 75 CO).

La créance en dommages-intérêts est exigible dès le moment où l'événement dommageable entraîne des conséquences financières sur le patrimoine du lésé (ATF 131 III 12 consid. 9.1; 81 II 512 consid. 6; arrêts du Tribunal fédéral 4A_548/2013 et 4A_550/2013 du 31 mars 2014 consid. 5.1).

3.1.3 A teneur de l'art. 84 CO, Le paiement d'une dette qui a pour objet une somme d'argent se fait en moyens de paiement ayant cours légal dans la monnaie due (al. 1). Si la dette est exprimée dans une monnaie qui n'est pas la monnaie du pays du lieu de paiement, elle peut être acquittée en monnaie du pays au cours du jour de l'échéance, à moins que l'exécution littérale du contrat n'ait été stipulée par les mots "valeur effective" ou par quelqu'autre complément analogue (al. 2).

L'art. 84 CO traite de la monnaie de paiement des obligations pécuniaires, qu'elles soient de nature contractuelle ou délictuelle (ATF 137 III 158 consid. 3.1). Il n'indique cependant pas dans quelle monnaie est due l'obligation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_503/2021 du 25 avril 2022 consid. 4.1.2).

La jurisprudence déduit de l'art. 84 CO que le jugement doit allouer les conclusions dans la monnaie (le cas échéant étrangère) de la dette (voir entre autres ATF 134 III 151 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_503/2021 du 25 avril 2022 consid. 4.1.2 et les références citées). Le juge suisse ne peut pas prononcer une condamnation dans la monnaie due alors qu'il est saisi de conclusions libellées dans une monnaie erronée. L'art. 58 al. 1 CPC - qui consacre la maxime de disposition - proscrit un tel procédé, le juge ne pouvant allouer un aliud (arrêt du Tribunal fédéral 4A_503/2021 du 25 avril 2022 consid. 4.1.2 et les références citées).

Selon la jurisprudence, les taux de conversion de devises sont des faits notoires (ATF 135 III 88 consid. 4.1; 137 III 623 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1048/2019 du 30 juin 2021 consid. 3.6.5).

3.1.4 A teneur de l'art. 85 al. 1 CO, le débiteur ne peut imputer un paiement partiel sur le capital qu'en tant qu'il n'est pas en retard pour les intérêts ou les frais.

Le débiteur qui a plusieurs dettes à payer au même créancier a le droit de déclarer, lors du paiement, laquelle il entend acquitter (art. 86 al. 1 CO). Faute de déclaration de la part du débiteur, le paiement est imputé sur la dette que le créancier désigne dans la quittance, si le débiteur ne s'y oppose pas immédiatement (art. 86 al. 2 CO).

A teneur de l'art. 87 al. 1 CO, lorsqu'il n'existe pas de déclaration valable, ou que la quittance ne porte aucune imputation, le paiement s'impute sur la dette exigible; si plusieurs dettes sont exigibles, sur celle qui a donné lieu aux premières poursuites contre le débiteur; s'il n'y a pas eu de poursuites, sur la dette échue la première.

Lorsqu'il existe plusieurs créances principales, avec intérêts et frais en sus, l'ordre des créances doit être tout d'abord déterminé par application des art. 86 et 87 CO, puis l'art. 85 CO est appliqué à chacune des créances (Weberk, Berner Kommentar - Die Erfüllung der Obligation, Art. 68-96 OR, 2ème éd. 2005, n. 10 et 11 ad art. 85 CO).

3.1.5 Une action en dommages-intérêts séparée ou ultérieure est exclue de manière générale pour tous les frais qui s'incorporent aux dépens d'un procès selon l'art. 95 al. 3 CPC. En effet, les actions en dommages-intérêts accordées par le droit de la responsabilité civile, notamment par les art. 41 ou 97 CO, ne sont pas disponibles pour éluder les règles spécifiques du droit de procédure civile et procurer au plaideur victorieux, en dépit de ces règles, une réparation que le législateur compétent tient pour inappropriée ou contraire à des intérêts supérieurs (ATF 139 III 190 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 4C.51/2000 du 7 août 2000 consid. 3, in SJ 2001 I 153).

3.1.6 La faute concomitante du lésé peut être un facteur d'interruption du lien de causalité adéquate ou de réduction de l'indemnité qui lui est due. Pour que l'on puisse admettre une interruption du rapport de causalité, il faut que la faute du lésé soit si lourde et si déraisonnable qu'elle relègue le manquement de l'auteur à l'arrière-plan, au point qu'il n'apparaisse plus comme la cause adéquate du dommage (ATF 143 III 242 consid. 3.7; 130 III 182 consid. 5.4; 127 III 453 consid. 5d; 123 III 306 consid. 5b; 121 III 358 consid. 5). Si la faute n'est pas grave au point d'interrompre le lien de causalité adéquate, elle constitue un facteur de réduction de l'indemnité (art. 44 al. 1 CO) si elle a contribué, dans une mesure importante, à créer ou à aggraver le dommage, alors que l'on aurait pu attendre raisonnablement de tout tiers se trouvant dans la même situation qu'il prenne des mesures de précaution susceptibles d'écarter ou de réduire le dommage (ATF 146 III 387 consid. 6.3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_124/2007 du 23 novembre 2007 consid. 5.4.1). La réduction se mesure en tenant compte de la gravité de la faute concomitante du lésé par rapport à la faute de l'auteur (ATF 146 III 387 consid. 6.3.2).

3.2
3.2.1
L'appelante critique l'imputation effectuée par le Tribunal de l'indemnité perçue par l'intimée de la part de la banque sur le dommage subi. Elle reproche à l'intimée et au Tribunal de n'avoir pas spécifié le taux de change applicable pour la conversion en francs suisses des différents postes. Elle soutient par ailleurs que le montant de l'indemnité perçue, soit 370'000 fr., n'a pas été prouvé.

S'agissant de l'imputation proprement dite, l'appelante relève tout d'abord que les prélèvements indus sur le compte bancaire de l'intimée n'ont pas tous eu lieu en francs suisses, mais ont aussi été effectués en euros et en dollars américains. Selon elle, l'indemnité devrait être imputée en premier lieu sur la créance de 180'000 euros, plus les intérêts arrêtés au 7 novembre 2019 (date à laquelle B______ a informé le Tribunal fédéral que la banque lui avait versé 370'000 fr.), soit 261'557.25 euros, convertis en 287'582 fr. selon le taux applicable au 7 novembre 2019; il conviendrait ensuite de l'imputer sur la créance de 45'844 fr., plus les intérêts arrêtés au 7 novembre 2019, soit 66'231 fr.; le solde permettrait ensuite d'éteindre partiellement la créance de 20'104.82 en dollars américains. Par conséquent, dans la mesure où le seul montant encore litigieux était exprimé en dollars américains, les conclusions de l'intimée formulées en francs suisses étaient irrecevables. Enfin, une faute concomitante devait être retenue à la charge de l'intimée, ce qui interrompait le lien de causalité entre l'acte illicite et le dommage, voire entraînait une réduction de l'indemnité due à cette dernière.

3.2.2 Il sera souligné à titre liminaire que l'appelante ne remet plus en cause les conditions de l'art. 722 CO quant à sa responsabilité pour le dommage de l'intimée, sous réserve des griefs qui ont été résumés au considérant 3.2.1.

3.2.3 S'agissant du taux de conversion de l'euro en franc suisse applicable, l'autorité précédente a fait l'économie de le mentionner expressément dans sa décision, ainsi que le relève l'appelante.

Conformément à l'art. 84 al. 2 CO, la banque, débitrice, avait la faculté d'éteindre cette créance en euros par un paiement en francs suisses, ce qui n'est pas contesté.

L'absence de mention du taux de change ne porte pas à conséquence, dès lors que le taux de change applicable est, de par la loi, celui en vigueur au jour de l'échéance de la dette (art. 84 al. 2 CO), soit en l'occurrence le jour de la survenance du dommage (art. 75 CO). De plus, le taux a été dûment allégué par l'intimée en première instance, sans être contesté par l'appelante, et constitue, de toute manière, un fait notoire.

Ainsi, le taux applicable est celui du 15 octobre 2010 concernant le montant de 180'000 euros indûment prélevé du compte de l'intimée ce jour-là. Il était de 1.3423 fr. pour un euro (source fxtop.com) et non de 1.343 comme mentionné dans la demande en paiement de l'intimée. Le capital dû représentait donc 241'614 fr. (180'000 euros x 1.3423).

3.2.4 S'agissant ensuite de la preuve du montant de 370'000 fr. versé par la banque, force est de constater que l'appelante n'a pas contesté devant le Tribunal les allégués de l'intimée sur ce point. Elle est donc forclose pour remettre en cause ce fait pour la première fois en appel (art. 317 al. 1 CPC).

3.2.5 Se pose ensuite la question de l'imputation de l'indemnité de 370'000 fr. versée par la banque sur les créances en dommages-intérêts de l'intimée envers l'appelante.

Sur ce point, le Tribunal a d'abord couvert les intérêts et frais relatifs à toutes les créances, avant de procéder à l'imputation sur le capital de chacune des créances dans l'ordre chronologique de leur échéance. Ce faisant, le Tribunal a méconnu l'articulation entre les art. 85, 86 et 87 CO.

En effet, il convient tout d'abord de déterminer l'ordre dans lequel les créances doivent être couvertes (art. 86 et 87 CO), avant d'imputer les montants déjà perçus sur les intérêts et frais, puis sur le capital de chacune des créances dans l'ordre ainsi déterminé (art. 85 CO).

Comme le souligne l'appelante, il n'a pas été démontré que la banque aurait entendu éteindre les créances en dommages-intérêts de l'intimée dans un certain ordre, ni que des poursuites auraient eu lieu. L'ordre légal et chronologique prévu à l'art. 87 al. 1 in fine CO entre donc seul en considération.

La première dette échue est celle de 241'614 fr. évoquée au consid. 3.2.3 supra. Les intérêts dus en 5 % pour la période allant de l'exigibilité, soit le 15 octobre 2010, au jour du paiement par la banque, soit le 21 juin 2019, représentent 104'900 fr. 75. Ce montant doit être couvert en premier. Doivent aussi être couverts les frais judiciaires supportés par l'intimée dans la procédure dirigée contre la banque et que le Tribunal a pris en compte à concurrence de 5'000 fr. sans que l'appelante ne remette ce point en cause dans son appel. Il n'en va cependant pas de même d'éventuels dépens dus ou versés pour cette procédure : en effet, il résulte du jugement prenant acte du retrait de la demande que les dépens ont été compensés. Le premier juge a ainsi retenu que les dépens à la charge de l'intimée et ceux à la charge de la banque étaient équivalents, de sorte que l'intimée ne subit aucun dommage sur ce point. Aussi, le montant à imputer sur cette créance s'élève à 351'514 fr. 75 (241'614 fr. + 104'900 fr. 75 + 5'000 fr.), ce qui laisse un solde sur l'indemnité versée par la banque de 18'485 fr. 25 (370'000 fr. - 351'514 fr. 75).

Il s'agit ensuite de prendre en compte la seconde créance exigible, soit celle de 45'844 fr., qui correspond aux seules conclusions de l'intimée encore litigieuses à ce stade de la procédure. Les intérêts dus en 5% pour la période allant de l'exigibilité, soit le 1er décembre 2010, jusqu'au jour du paiement par la banque, soit le 21 juin 2019, représentent 19'611 fr. Ce montant est partiellement absorbé par le solde de l'indemnité versée par la banque, laissant un découvert de 1'125 fr. 75 (19'611 fr. - 18'485 fr. 25).

Il s'ensuit que l'intimée peut prétendre au paiement du capital de 45'844 fr. avec intérêts à 5% dès le 22 juin 2019, plus le solde des intérêts en 1'125 fr. 75 pour la période antérieure.

3.2.6 L'intimée a limité ses conclusions à cette créance de 45'844 fr. Il n'y a donc pas lieu d'examiner une éventuelle condamnation concernant le dernier prélèvement illicite. La conclusion en paiement de 45'844 fr. n'est pas remise en cause par l'appelante quant à la monnaie due, le dommage ayant été subi en francs suisses. Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur les griefs de l'appelante liés à la monnaie des conclusions pour les dommages subis en euros et en dollars américains, les deux prélèvements y relatifs n'étant plus litigieux.

3.2.7 Reste à déterminer si une éventuelle faute concomitante de l'intimée entre en considération.

Sur ce point, l'appelante concentre son argumentation exclusivement sur une prétendue clause de banque restante conclue entre l'intimée et la banque, ainsi que sur le fait que l'intimée aurait fautivement omis de réagir après le premier ordre illicite passé par C______.

Or cette argumentation repose entièrement sur des faits nouveaux et irrecevables, comme il a été vu au consid. 2. ci-dessus. En effet, il ne résulte d'aucun fait constaté valablement en première instance que l'intimée aurait pu et dû réagir pour empêcher C______ de perpétrer tout ou partie des actes préjudiciables à ses intérêts. Il n'a en particulier jamais été allégué que l'intimé aurait eu connaissance du dommage qu'elle avait subi avant le mois de février 2011, ni qu'elle aurait pu ou dû en avoir connaissance plus tôt.

L'appelante souligne certes que les ordres donnés par C______ étaient "grossièrement falsifiés et insolites". Toutefois, elle n'a pas allégué que la banque aurait commis une faute en ne les identifiant pas comme illicites et en les exécutant, ni que l'éventuelle faute de la banque aboutirait à une réduction du dommage à un montant inférieur à celui qu'elle doit couvrir. Sa motivation d'appel n'aborde par cette question. Au contraire, elle invoque que seule une intervention de l'intimée aurait permis à la banque de limiter le dommage.

Il s'ensuit qu'aucun fait susceptible d'établir une faute concomitante de l'intimée ne ressort du dossier, de sorte que les griefs de l'appelante sur ce point seront rejetés.

Au surplus, c'est en vain que l'appelante se prévaut d'une violation de son droit d'être entendue : le Tribunal s'étant prononcé sur la recevabilité des faits allégués en lien avec la faute concomitante et ayant conclu que celle-ci n'était pas démontrée, la décision entreprise comporte une motivation suffisante sur cette question.

3.2.8 Par conséquent, le chiffre 2 du dispositif du jugement attaqué sera annulé et il sera statué à nouveau, en ce sens que l'appelante sera condamnée à verser à l'intimée 45'844 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le 22 juin 2019, et 1'125 fr. 75, à titre de solde d'intérêts pour la période antérieure.

4. 4.1 Lorsque l'autorité d'appel statue à nouveau, elle se prononce sur les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC).

Aux termes de l'art. 106 al. 1 CPC, les frais sont mis à la charge de la partie succombante. La partie succombante est le demandeur lorsque le tribunal n'entre pas en matière et en cas de désistement d'action; elle est le défendeur en cas d'acquiescement. Lorsqu'aucune des parties n'obtient entièrement gain de cause, les frais sont répartis selon le sort de la cause (art. 106 al. 2 CPC).

A teneur de l'art. 17 RTFMC, pour une cause dont la valeur litigieuse est comprise entre 30'001 fr. et 100'000 fr., l'émolument forfaitaire de décision est compris entre 2'000 fr. et 8'000 fr.; pour une valeur litigieuse de 100'001 fr. à 1'000'000 fr., il est de 5'000 fr. à 30'000 fr.

4.2 En l'espèce, le Tribunal a arrêté les frais judiciaires à 18'200 fr., comprenant les frais judiciaires de première instance en 10'200 fr. et les frais judiciaires d'appel en 8'000 fr., arrêtés par l'arrêt précédent de la Cour (ACJC/1869/2020) y compris pour la procédure consécutive au renvoi.

Ces montants ne sont pas remis en cause par les parties et sont conformes au tarif applicable de sorte qu'ils ne seront pas modifiés.

Cela étant, les conclusions initiales de l'intimée s'élevaient à près de 330'000 fr., plus intérêts. Elle s'est désisté pour la plus grande partie, de sorte que seuls quelques 45'000 fr. lui sont finalement alloués, soit environ 15%. Il y a donc lieu de mettre à sa charge les frais judiciaires de première instance à concurrence de 85% et à raison de 15% à la charge de l'appelante.

Par conséquent, les frais judiciaires de première instance seront mis à la charge de cette dernière à raison de 1'530 fr. et à la charge de l'intimée à raison de 8'670 fr.

Les frais judiciaires mis à charge de l'intimée seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève, car celle-ci plaide au bénéfice de l'assistance judiciaire (art. 122 al. 1 let. b CPC). L'appelante sera condamnée à verser 1'530 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Les dépens de première instance, dont le montant de 7'500 fr. au total n'est pas critiqué en appel, seront répartis selon la même clé de répartition. Ainsi, l'intimé restera devoir, après compensation, 5'250 fr. à l'appelante.

4.3 S'agissant des frais judiciaires d'appel, ils ont été arrêtés au montant de 8'000 fr. retenu par la Cour dans son précédent arrêt (ACJC/1869/2020).

Ils seront mis à charge de l'appelante qui succombe presque intégralement en appel et partiellement compensés avec l'avance de 2'700 fr. qu'elle a versée. Elle sera condamnée à payer le solde de 5'300 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Quant aux dépens d'appel, arrêtés par le précédent arrêt de la Cour au montant de 10'500 fr., ils seront eux aussi mis intégralement à la charge de l'appelante. Elle sera donc condamnée à verser ce montant à l'intimée.

4.4 Par conséquent, les chiffres 3 à 5 du dispositif du jugement attaqué seront annulés et il sera statué à nouveau dans le sens de ce qui précède.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 13 octobre 2021 par A______ SA contre le jugement JTPI/10960/2021 rendu le 1er septembre 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15944/2016.

Au fond :

Annule les chiffres 2 à 5 du dispositif du jugement entrepris et, cela fait, statuant à nouveau sur ces points :

Condamne A______ SA à verser à B______ 45'844 fr., plus intérêts à 5% l'an dès le 22 juin 2019, et 1'125 fr. 75.

Arrête les frais judiciaires de première instance à 10'200 fr. et les met à la charge de A______ SA à raison de 1'530 fr. et de B______ à raison de 8'670 fr.

Condamne A______ SA à verser 1'530 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit que les frais judiciaires de première instance à charge de B______ sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Condamne B______ à verser 5'250 fr. à A______ SA à titre de dépens de première instance.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 8'000 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense partiellement avec l'avance de 2'700 fr. versée par celle-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ SA à verser 5'300 fr. à l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

 

 

Condamne A______ SA à verser 10'500 fr. à B______ à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.