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Décisions | Chambre civile

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C/16826/2018

ACJC/1008/2022 du 27.07.2022 sur JTPI/2183/2021 ( OS )

Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/16826/2018 ACJC/1008/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MERCREDI 27 JUILLET 2022

 

Entre

1) Les mineures A______ et B______, domiciliées ______[GE],

2) Madame C______, domiciliée ______[GE], requérantes sur mesures provisionnelles, comparant toutes par Me Marie BERGER, avocate, BRS Berger Recordon & de Saugy, boulevard des Philosophes 9, 1205 Genève, en l'Étude de laquelle elles font élection de domicile,

et

Monsieur D______, domicilié ______[GE], cité, comparant par Me Marco CRISANTE, avocat, rue du Conseil-Général 18, 1205 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile.

 


Attendu, EN FAIT, que les jumelles A______ et B______, nées le ______ 2016 à Genève sont issues de la relation entretenue par C______ et D______ entre 2015 et 2017;

Que D______ est également le père de deux enfants issus d'une relation antérieure, E______, née le ______ 2007 et F______, né ______ 2009, dont il partage la garde avec la mère; qu'il est depuis le _____ 2022 le père d'une fille prénommée G______;

Qu'un conflit aigu oppose C______ et D______ depuis leur séparation en 2017;

Que par jugement du 23 février 2021, le Tribunal a instauré l'autorité parentale conjointe d'D______ et C______ sur A______ et B______, attribué la garde des enfants à C______, fixant un droit aux relations personnelles progressif entre D______ et A______ et B______ s'exerçant selon les modalités suivantes :

- Durant deux mois, un week-end sur deux du vendredi à la sortie de la crèche au lundi matin au retour à la crèche, ainsi qu'une nuit à quinzaine du lundi soir à la sortie de la crèche au mardi matin au retour à la crèche,

- Puis, durant deux mois selon les mêmes modalités, mais avec la nuit du lundi au mardi toutes les semaines,

- Puis, dès la rentrée scolaire 2021/2022, selon les mêmes modalités, plus pendant la moitié des vacances scolaires,

- Chaque année, A______ et B______ devaient passer le 24 décembre auprès de leur mère, jusqu'au lendemain matin et le 25 décembre auprès de leur père jusqu'au lendemain matin;

Que le passage des enfants d'un parent à l'autre devait avoir lieu à la crèche ou au bas de l'immeuble de C______, sans contact direct entre les parents;

Que la curatelle d'organisation et de surveillance du droit de visite était maintenue, mais le curateur était relevé de ses fonctions en vue de son remplacement par une personne investie de la même mission, mais pouvant porter un regard neuf sur la situation et créer un lien de confiance avec les parents;

Que C______ a fait appel de ce jugement, concluant notamment à réduire le droit de visite (nuit du lundi au mardi une semaine sur deux et non pas toutes les semaines; nombre de semaines de vacances réduit au début mais augmentant pour atteindre la moitié de vacances scolaires à partir de 2023) de D______;

Qu'il ressort de la procédure que les parents admettent entretenir des relations exécrables et en imputent chacun la faute à l'autre;

Que l'organisation et l'exercice du droit de visite en pâtit;

Que de nombreux incidents ont émaillé l'exercice du droit de visite; que la police a dû parfois intervenir;

Que le 9 décembre 2021, C______ a déposé devant la Cour une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles tendant notamment à l'établissement d'un rapport complémentaire par le SEASP, et à la suspension du droit de visite de D______ sur ses filles jusqu'à reddition de ce rapport;

Que par arrêt ACJC/1672/2021 du 15 décembre 2021, la Cour, statuant sur requête de mesures superprovisionnelles, a rejeté la requête de mesures superprovisionnelles formée le 9 décembre 2021 par C______ en vue de la suspension des relations personnelles entre les enfants A______ et B______ et leur père D______ et fixé une audience;

Que le 20 décembre 2021, le SPMi a sollicité du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection), notamment, qu'il autorise un droit de visite de D______ un weekend sur deux, du vendredi 16h00 dès la sortie de l'école au lundi matin 8h00 à la rentrée des classes; que le Tribunal de protection a rendu une ordonnance sur mesures superprovisionnelles en ce sens;

Qu'à l'issue de l'audience du 21 décembre 2021 devant la Cour, C______ a persisté dans sa requête de mesures provisionnelles tout en la modifiant dans le sens des modalités d'exercice d'un droit de visite selon la demande du SPMi du 20 décembre 2021; que D______ a conclu au rejet de la requête;

Qu'à ce jour, aucune décision n'a été rendue sur cette requête;

Que le 18 juillet 2022, C______ a sollicité que la Cour supprime tout droit de visite de D______ sur les enfants A______ et B______ durant les vacances scolaires, subsidiairement ordonne à celui-ci, sous la menace de l'art 292 CP, de venir chercher les filles à 16h00 en bas de leur immeuble à raison d'un week-end sur deux et, toujours sous la menace de l'art. 292 CP, de les ramener le lundi à l'issue de son droit de visite en bas de l'immeuble, à 8 heures ou toute autre heure de la matinée que la Cour trouvera adéquate; qu'elle fait valoir que D______ maintient ad aeternam sa position visant à garder les filles auprès de lui en violation des décisions judiciaires; qu'ainsi, le 4 juillet 2022, la police a dû intervenir au domicile des parents du cité pour ramener les enfants à leur mère; que le 15 juillet 2022, D______ n'a pris les filles qu'à 18 heures, au lieu de 16 heures; que le 18 juillet 2022, les enfants ne sont rentrées chez leur mère qu'à midi, au lieu de 8 heures; que D______ s'est montré très grossier à l'égard de C______, lors de leurs échanges;

Que par déterminations du 25 juillet 2022, D______ admet avoir à quelques reprises prolongé de quelques heures le droit de visite dont il jouit; qu'il a conclu au rejet de la requête du 18 juillet 2022;

Considérant, EN DROIT, que selon l'art. 261 al. 1 CPC, le juge ordonne les mesures provisionnelles nécessaires lorsque le requérant rend vraisemblable qu'une prétention dont il est titulaire est l'objet d'une atteinte et que cette atteinte risque de lui causer un préjudice difficilement réparable;

Que l'octroi de mesures superprovisionnelles présuppose que le requérant ait pris des conclusions en ce sens dans sa requête de mesures provisionnelles. Que lorsque la requête ne contient que des conclusions tendant au prononcé de mesures superprovisionnelles, il faut considérer que celles-ci valent aussi implicitement à titre de conclusions provisionnelles (BOVEY, FAVROD-COUNE, Petit Commentaire, CPC, 2020, n° 2 ad art. 265 CPC et les références citées);

Qu'en l'espèce, le cité ayant pu se déterminer sur la requête du 18 juillet 2022, il sera statué sur mesures provisionnelles, quand bien même les seules conclusions prises par la requérante l'étaient à titre superprovisionnel;

Que l'art. 273 al. 1 CC prévoit que le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances. Que le droit aux relations personnelles est conçu comme un droit-devoir réciproque qui sert en premier lieu les intérêts de l'enfant (ATF 131 III 209 consid. 5; arrêt du Tribunal fédéral 5A_983/2019 du 13 novembre 2020 consid. 7.1). Que le bien de l'enfant constitue la règle fondamentale, les intérêts des parents devant être relégués au second plan. Qu'il faut choisir la solution qui, au regard des données de l'espèce, est la mieux à même d'assurer à l'enfant la stabilité des relations nécessaires à un développement harmonieux des points de vue affectif, psychique, moral et intellectuel (ATF 142 III 617 consid. 3.2.3, 141 III 328 consid. 5.4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_983/2019 du 13 novembre 2020 consid. 7.1; 5A_498/2019 consid. 2);

Que si les relations personnelles compromettent le développement de l'enfant, si les père et mère qui les entretiennent violent leurs obligations, s'ils ne se sont pas souciés sérieusement de l'enfant ou s'il existe d'autres justes motifs, le droit d'entretenir ces relations peut leur être retiré ou refusé (art. 274 al. 2 CC). Que le retrait de tout droit à des relations personnelles constitue toutefois une ultima ratio et ne peut être ordonné que si les effets négatifs des relations personnelles ne peuvent être maintenus dans des limites supportables pour l'enfant. Que le droit de la personnalité du parent non détenteur de l'autorité parentale, le principe de la proportionnalité, mais également le sens et le but des relations personnelles, interdisent leur suppression complète si le préjudice engendré pour l'enfant par leur maintien peut être écarté ou limité par d'autres mesures appropriées, notamment par la mise en œuvre d'un droit de visite surveillé ou accompagné (ATF 122 III 404 consid. 3c; ATF 120 II 229 consid. 3b/aa; arrêts du Tribunal fédéral 5A_699/2017 du 24 octobre 2017 consid. 5.1; 5A_184/2017 du 9 juin 2017 consid. 4.1 et les références);

Qu'en l'espèce, la requérante allègue qu'une nouvelle crise parentale s'est produite récemment, soit les 4 et 18 juillet 2022, ayant nécessité, pour la première, l'intervention de la police et du SPMI, D______ persistant à ne pas respecter les horaires du droit de visite et se montrant grossier et insultant à son égard lors du passage des enfants;

Que le cité ne prétend pas respecter les horaires du droit de visite mais soutient que la requérante est chicanière et vise uniquement à lui nuire, alors qu'il souhaite seulement passer davantage de temps avec ses filles; que la requérante ne fait preuve d'aucune souplesse;

Qu'il n'existe pas d'éléments suffisants, en l'occurrence, pour remettre en cause un droit aux relations personnelles judiciairement fixé et pour lequel les dispositions adéquates ont été prises, compte tenu de son exercice particulièrement problématique depuis la séparation des parties, sous la forme d'une curatelle d'organisation et de surveillance du droit de visite et d'une remise des enfants sans contact entre les parents;

Qu'il appartient aux parents de se plier à ce dispositif et au modalités prévues, soit notamment les horaires;

Que s'il est acquis que les relations entre les parents sont exécrables, ce qui n'est pas récent, il n'est pas rendu vraisemblable que des actes de maltraitance, physique ou psychique, auraient été commis par le père sur ses enfants, permettant de suspendre le droit à des relations personnelles pour une durée indéterminée alors qu'un encadrement suffisant du droit de visite existe depuis plusieurs années, qui n'a jamais fait état de tels actes;

Que la fixation et la répartition des frais judiciaires et des éventuels dépens relatifs à la présente décision seront renvoyées à l’arrêt au fond.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur requête de mesures provisionnelles :

Rejette la requête de mesures provisionnelles formée le 18 juillet 2022 par C______ et les mineures A______ et B______ en vue de la suspension des relations personnelles entre celles-ci et leur père D______.

Renvoie la question des frais à l’arrêt au fond.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente ad interim; Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indications des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1 et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF – RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 113 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.