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Décisions | Chambre civile

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C/21140/2016

ACJC/1301/2021 du 12.10.2021 sur JTPI/14279/2020 ( OO ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 16.11.2021, rendu le 15.06.2022, CONFIRME, 2C_908/2021
Descripteurs : demande paiement;responsabilité état;indemnisation suite procédure pénale;incompétence ratione materiae;exception autorité chose jugée;frais
Normes : CPP.429.al1; CPP.429.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21140/2016 ACJC/1301/2021

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 12 OCTOBRE 2021

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 4ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 18 novembre 2020, comparant par Me Philippe GIROD, avocat, boulevard Georges-Favon 24, 1204 Genève, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

LA REPUBLIQUE ET CANTON DE GENEVE, sise rue de l'Hôtel-de-Ville 2, case postale 3964, 1211 Genève 3, intimée, comparant par Me Michel BERGMANN, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/14279/2020 du 18 novembre 2020, reçu le 20 novembre 2020 par A______, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a déclaré la demande en paiement formée par ce dernier à l'encontre de LA REPUBLIQUE ET CANTON DE GENEVE (ci-après : l'ETAT DE GENEVE) irrecevable (chiffre 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 10'000 fr., laissés provisoirement à la charge de celui-ci, sous réserve d'une décision de l'assistance judiciaire (ch. 2), condamné A______ à payer à l'ETAT DE GENEVE 20'000 fr. à titre de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte expédié le 4 janvier 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, dont il sollicite l'annulation. Cela fait, il conclut au rejet des exceptions d'incompétence rationae materiae et d'autorité de la chose jugée soulevées par l'ETAT DE GENEVE et au renvoi de la cause au Tribunal pour instruction et nouvelle décision, sous suite de frais judiciaires et dépens de première instance et d'appel. Subsidiairement, il conclut à la condamnation de l'ETAT DE GENEVE à lui verser les sommes de 3'500'000 fr. et 50'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er novembre 2016, à titre de dommage et intérêts, respectivement de tort moral, sous réserve d'amplification après expertise, avec suite de dépens de première instance et d'appel. Encore plus subsidiairement, il sollicite que les dépens soient mis à la charge de l'ETAT DE GENEVE.

b. Dans sa réponse, l'ETAT DE GENEVE conclut au déboutement de A______ de toutes ses conclusions, sous suite de frais judicaires et dépens.

c. Dans leurs réplique et duplique, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

d. Par avis du greffe de la Cour du 19 avril 2021, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______, né le ______ 1959, est médecin de formation.

b. De mai 2004 à avril 2016, il a fait l'objet d'une procédure pénale, enregistrée sous le numéro de cause P/1______/2004.

c. Par jugement du 7 juin 2010, le Tribunal de police a reconnu A______ coupable d'escroquerie, de tentative d'escroquerie, de faux dans les titres et de lésions corporelles simples.

d. Par arrêt ACJP/172/2011 du 30 septembre 2011, la Chambre pénale de la Cour de justice (ci-après : la Chambre pénale) a annulé le jugement susmentionné et renvoyé la cause au Tribunal de police pour complément d'instruction et nouvelle décision.

e. Par courrier du 25 mars 2014, A______ a indiqué au Tribunal de police ce qui suit :

"Seul je peux juste faire valoir qu'avant mon arrestation le 21 février 2006, et comme le dossier de la cause le démontre (cf. les analyses des comptes où étaient versés mes honoraires), mon gain mensuel était d'environ 10'000 francs, pour une activité à temps partiel, et que si je ne travaillais pas en ce moment-là à temps plein c'était juste parce que je suivais des cours en vue d'un Master en ______ à l'Université G______. (...). J'ai été aussi privé de l'obtention de ce diplôme, car le juge d'instruction avait refusé que j'aille défendre mon mémoire qui avait déjà été rédigé (cf. documents à ce sujet dans le dossier de la cause). C'est un autre dommage que j'ai subi, le blocage, toujours en cours, de mes revenus financiers (trois [comptes] E______ bloqués), m'ayant aussi empêché de payer tant mes deux loyers professionnels (Genève et Lausanne) que mes deux loyers privés (le mien et celui de ma fille), ce qui a abouti à mes expulsions de ces quatre biens locatifs. Ma fille a dû interrompre ses études, et a fait une décompensation psychique grave, avec hospitalisation. Moi-même, radié du registre des médecins en mai 2006, sur demande du juge d'instruction à Mme B______, ______ [fonction] de la Commission de surveillance des professions médicales, laquelle a répercuté la demande auprès de Dr C______, médecin cantonal adjointe chargée des pratiques, ce qui a abouti à un arrêt du Conseil d'état. (...) M. le juge d'instruction D______ a fait écrire un article diffamatoire contre moi dans la "Tribune de Genève". Je peux ainsi aligner les dommages matériels, réputationnels, professionnels, physiques et moraux, personnels et familiaux, par wagons entiers. Mon avocat doit mettre cela en bonne rédaction juridique."

f. Lors de l'audience du 21 novembre 2014, le Président du Tribunal de police a demandé au conseil de A______, dont le défaut avait été constaté, si ce dernier entendait faire valoir des prétentions en indemnité au sens de l'art. 429 al. 1 CPP, s'il était acquitté totalement ou en partie. Le Président a indiqué qu'à défaut, le Tribunal de police considérerait que A______ avait renoncé à une indemnisation. Le Président a également rappelé au conseil de ce dernier que les prétentions devaient être chiffrées et justifiées par pièces.

Il ne ressort pas du procès-verbal que le conseil de A______ a répondu.

Le Président a relevé que la procédure probatoire était clôturée.

Le conseil de A______ a plaidé et a conclu à l'acquittement de ce dernier de tous les chefs d'infractions qui lui étaient reprochés.

Le Président a informé les parties que la lecture du dispositif du jugement était fixée au 25 novembre 2014.

A l'issue de l'audience, le Tribunal de police s'est retiré pour délibérer.

g. Par jugement rendu par défaut le 25 novembre 2014, notifié le 9 février 2015, le Tribunal de police a acquitté A______ des chefs d'escroquerie, de tentative d'escroquerie et de faux dans les titres et l'a déclaré coupable de lésions corporelles simples.

Ce jugement ne mentionne pas la question de l'octroi d'une indemnité au sens de l'art. 429 CPP.

h. Par courriel du 8 janvier 2015, A______ a indiqué au Tribunal de police, s'agissant de sa demande d'indemnisation, ce qui suit :

"Pour ce dernier point, je compte vous soumettre des arguments à la fois pour le tort moral gravissime dont ma famille et moi avons souffert et souffrons encore (que j'évalue à 50'000.00 fr.) et pour le dommage économique multiforme subi (ma dette de pension alimentaire envers ma fille - cf. son recours déjà introduit, et qui donne le chiffre de 1'250 fr. x 70 pour les 70 mois de pension alimentaire que je n'ai pu lui payer; mes honoraires non encore envoyés ou encaissés à février, soit environ 100'000.00 fr - une expertise comptable sera nécessaire dans les dossiers de patients pour respecter le secret médical; les 2 ans - 2006 et 2007 sans activité ni revenu aucun, suite à l'arrêté de radiation définitive du 26 mai 2006 qui m'avait exclu de tout travail comme médecin,; les baisses de revenus par la suite - 2008 à ce jour, vu mon impossibilité à trouver un travail salarié stable, à la suite des diffamations par voie de presse notamment, faites dans le cadre de la procédure pénale dès avril 2006 et par la suite - que je chiffre à une perte moyenne de revenu de 10'000.00 fr. par mois en 2008 jusqu'à ce jour; la perte de revenu future, car à la fois j'ai vieilli pour le marché du salariat et reste à jamais stigmatisé, comme m'a prouvé mes recherches vaines d'un emploi ces deux dernières années, ce dont peuvent témoigner le service du médecin cantonal et les HUG contactés - perte future qui peut s'élever à plusieurs centaines de milliers de fr.; mes dettes de loyers et autres; et bien sûr mes 500.00 fr. volés par la police lorsque j'ai été arrêté en février 2006 - vol document dans le dossier sous label 'perte d'argent' à la suite de ma plainte classée sous PP/2______/2006)."

i. Dans sa déclaration d'appel adressée à la Chambre pénale le 2 mars 2015, A______ a conclu à son acquittement du chef de lésions corporelles simples et à ce que l'ETAT DE GENEVE soit condamné à lui verser 3'999'900 fr. à titre d'indemnisation au sens de l'art. 429 CPP.

j. Par ordonnance du 19 juin 2015, la Chambre pénale a notamment ordonné la procédure orale et imparti à A______ un délai échéant le jour de l'audience au plus tard pour déposer des conclusions chiffrées en indemnisation au sens de l'art. 429 CPP, accompagnées de leurs justificatifs.

k. Lors de l'audience de jugement du 16 novembre 2015 par-devant la Chambre pénale, A______ a conclu à une indemnisation d'un montant total de 3'576'604 fr. 40, composé comme suit : 602 fr. 20 de valeurs disparues en prison; 6'000 fr. pour les frais d'inscription à l'Université G______ pour sa fille; 10'000 fr. de frais forfaitaires; 50'000 fr. et 30'000 fr. pour la perte sur honoraires de ses patients en 2005, respectivement pour H______ [VD] et Genève; 30'000 fr. et 20'000 fr. pour la perte sur honoraires de ses patients avant 2005, respectivement pour Nyon et Lausanne; 5'000 fr. et 3'000 fr. pour la perte sur honoraires de ses patients en janvier 2006, respectivement pour H______[VD] et Genève; 30'000 fr. pour la perte sur honoraires de ses patients au bénéfice de l'Al; 2'920'000 fr. pour la perte nette sur ses espérances de gain de 2006 à 2023, date à laquelle il atteindrait l'âge de la retraite; 84'000 fr. pour les dettes de pension alimentaire envers sa fille; 19'200 fr., 13'000 fr. et 3'500 fr. pour diverses dettes de loyer à Genève, 2'200 fr. et 3'500 fr. pour ses dettes de loyer à H______ [VD]; 180'000 fr. pour ses dettes d'impôts et 50'000 fr. à titre de tort moral.

Il a produit un bordereau de pièces constitué des justificatifs de sa demande d'indemnisation et conclu à ce qu'une expertise soit ordonnée afin de déterminer son dommage économique.

Il a également produit un courriel/courrier daté du 21 novembre 2014 qu'il a allégué avoir adressé au Tribunal de police à cette date, par voie électronique et par dépôt à l'ambassade suisse en France, dans lequel il répertoriait son dommage et chiffrait celui-ci à 3'399'900 fr., sous réserve d'expertise. Il ressort de ce courrier/courriel ce qui suit:

"Après ce plan (0), je compte (...)

(6) donner les bases de ma demande d'indemnisation (comme je plaide l'acquittement, et que cette procédure m'a causé du tort moral, tout en me ruinant totalement compromettant irrémédiablement mon avenir professionnel et donc matériel).

6. MA DEMANDE D'INDEMNISATION

6.1. Tort moral (art. ... CPP et art. ... CO)

(...)

6.2 Pertes matérielles (art. ... CPP et art. ... CG)

L'intérêt moratoire de 5% court dès ma radiation le 24 mai 2006, quand ce n'est marqué autrement (dettes de loyers, par exemple).

Mon argent volé par la police lors de mon arrestation: 000440.40

105.00Eur 000120.00

Frais d'inscription à l' [Université] G______, deux ans 006'000.00

Frais forfaitaires de copies, tél, internet, billets train, etc. 010'000.00

Pertes sur honoraires 2005 de mes patients suivis:

- H______ [VD] 050'000.00

- Genève 030'000.00

Pertes sur honoraires de patients suivis avant 2005

- I______ (psy CRE-Vaud) 030'000.00

-H______ 020'000.00

Pertes sur honoraires de patients suivis en janvier 2006

- H______ 005'000.00

- Genève 003'000.00

Pertes sur honoraires de patients en suivis AI 030'000.00

Perte nette sur espérance de gain de 2006 à ma retraite (soit de 2006 à mes 65 ans, en 2023, soit 18 an: 2'920'000.00

Dettes de pensions alimentaires envers ma fille (de 10.2005 à ses 25 ans, en 07.2011, soit 70 mois) 084'000.00

Dettes de loyers à Genève (intérêt 5% dès 10.2005)

- GIM 800 fr. x 24 mois 019'200.00

- HUG 1'000 fr. x 13 mois 013'000.00

- Cabinet rue 3______:700 fr. x 5 mois 003'500.00

Dettes de loyers à Lausanne (intérêt 5% dès 10.2005)

- Avenue de 4______ 550 fr. x 4 mois 002'200.00

- Avenue de 5______ 600 fr. x 10 mois 006'000.00

Dettes d'impôts dès 2005 180'000.00

Autres dettes (caisse-maladie, médecins, etc.) 20'000.00

TOTAL PROVISOIRE, sous réserve d'expertise précise 3'399'900.00

(...) »

l. Par arrêt AARP/158/2016 du 22 avril 2016, la Chambre pénale a annulé le jugement du Tribunal de police du 25 novembre 2014 en tant qu'il avait reconnu A______ coupable de lésions corporelles simples, constaté que l'action pénale dirigée contre ce dernier pour ce chef d'accusation était prescrite et laissé les frais de la procédure à la charge de l'Etat.

Dans ses considérants, la Chambre pénale a relevé que l'existence du courrier/courriel du 21 novembre 2014 que A______ prétendait avoir adressé au Tribunal de police résultait de la seule production du chargé de pièces à l'audience du 16 novembre 2015 et qu'il ressortait du procès-verbal de l'audience par devant le Tribunal de police que ce dernier n'avait pas formulé de prétentions en indemnisation, malgré l'invitation de celui-ci à agir en ce sens. A______ était dès lors forclos à vouloir réparer cette omission en appel, dans la mesure où, par son silence en première instance, il était censé avoir renoncé à ses prétentions.

S'agissant des pertes subies, la Chambre pénale a relevé ce qui suit :

"Une constatation s'impose en tout état. Face aux revendications formulées en appel, il est douteux que le premier juge, en principe compétent pour traiter des prétentions en indemnisation, ait pu les traiter lui-même s'il en avait été nanti, s'agissant notamment de déterminer la quotité des pertes subies sur l'espérance de gain du prévenu jusqu'à la retraite ou des pertes sur ses honoraires de ses patients dans les cantons de Genève et Vaud. Pour ces postes, la solution eût consisté à renvoyer le prévenu à agir par voie civile faute de pouvoir procéder à ses calculs nécessitant des expertises et des calculs actuariels".

A______ n'a pas recouru contre cet arrêt auprès du Tribunal fédéral, de sorte qu'il est devenu définitif.

D. a. Par acte déposé le 10 mars 2017 au greffe du Tribunal, A______ a assigné l'ETAT DE GENEVE en paiement des sommes de 3'500'000 fr. et 50'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er novembre 2016, à titre de dommage et intérêts, respectivement de tort moral, sous réserve d'amplification après expertise, avec suite de dépens.

Il a soutenu avoir subi un dommage total de 4'000'000 fr., soit 3'000'000 fr. à titre de manque à gagner pour avoir été empêché d'exercer son activité de médecin vu son emprisonnement, sa radiation, puis son autorisation d'exercer partielle et limitée à l'activité de médecin salarié et enfin vu l'atteinte à sa réputation (150'000 fr. par année, soit 1'650'000 fr. de 2005 à 2016, 1'112'500 fr. de 2016 à sa retraite et 250'000 fr. après sa retraite), 500'000 fr. à titre d'intérêts sur ce montant et 500'000 fr. à titre de dommage indirect (à savoir les dettes de loyers professionnels et personnel, le dommage résultant de sa détention durant sa procédure de divorce, le dommage résultant de l'absence de paiement de la formation de sa fille, la dette correspondante aux impôts impayés, ainsi que les dettes contractées à l'égard de l'Hospice général) et de dommage réfléchi (à savoir les inconvénients causés à des tiers et principalement les dettes qu'il avait envers sa fille). Il a sollicité la réparation de ce dommage sur la base de l'art. 42 al. 2 CO et des dispositions de la loi sur la responsabilité de l'Etat et des communes (LREC; RS GE A 2 40).

Il a allégué que les faits générateurs de son dommage résultaient de la procédure pénale n° P/1______/2004, soit de la mauvaise instruction du dossier par le juge d'instruction, et des actes et omissions de la Commission de surveillance des professions de la santé et des droits des patients (ci-après : la Commission) (allégués n° 81 à 128). A cet égard, il a, en substance, reproché à celle-ci d'avoir refusé de lui apporter les aides et conseils qu'il avait sollicités, d'avoir collaboré à l'enquête pénale de manière discrète et sans l'informer, d'avoir entrepris, sans vérification légale, les mesures utiles pour permettre aux patients de donner leur accord à la remise de leurs données au juge d'instruction, d'avoir collaborer avec ce dernier "sans faire preuve d'esprit critique" et uniquement à charge, et d'avoir empêché le médecin cantonal de procéder à l'enquête utile à la découverte de la vérité.

b. Par courrier du8 juin 2017, l'ETAT DE GENEVE a soulevé l'exception de prescription et sollicité que le Tribunal limite la procédure à cette problématique.

c. Par ordonnance du 10 novembre 2017, le Tribunal a limité la procédure à la question de la prescription.

d. Dans sa réponse, l'ETAT DE GENEVE a conclu, préalablement, à ce que le Tribunal dise et constate que l'action formée par A______ était prescrite. Au fond, il a conclu au déboutement de ce dernier de toutes ses conclusions.

e. Par jugement JTPI/20032/2018 du 19 décembre 2018, le Tribunal a admis l'exception de prescription et débouté A______ de toutes ses conclusions.

f. Par arrêt ACJC/1885/2019 du 10 décembre 2019, la Cour a annulé le jugement susmentionné et renvoyé la cause au premier juge pour nouvelle instruction dans le sens des considérants.

La Cour a notamment invité le Tribunal à examiner au préalable si le rejet des conclusions en indemnisation de A______ par la Chambre pénale, au motif que ce dernier était forclos à formuler de telles prétentions, lui interdisait ou non d'entrer en matière sur la présente demande en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 22 avril 2016.

g. Dans ses déterminations faisant suite à l'arrêt précité et plaidoiries finales écrites, l'ETAT DE GENEVE a conclu, préalablement, à ce que le Tribunal constate que l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 22 avril 2016 avait autorité de la chose jugée s'agissant des prétentions en indemnisation de A______, qu'il lui était interdit d'entrer en matière sur la demande en paiement de ce dernier, qu'il n'était pas compétent pour statuer sur celle-ci et à ce qu'il déclare ladite demande irrecevable, sous suite de frais judiciaires et dépens. Au fond, il a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions.

L'ETAT DE GENEVE a fait valoir que la Chambre pénale avait correctement retenu que A______ n'avait pas formulé de prétentions chiffrées en premier instance, de sorte qu'il était forclos à vouloir réparer cette omission en appel, ce dernier ayant renoncé à demander une indemnisation. La Chambre pénale avait ainsi examiné les prétentions en indemnisation de A______ et les avaient rejetées, de sorte que l'arrêt AARP/158/2016 du 22 avril 2016 avait autorité de chose jugée sur ce point. En effet, les conclusions prises par ce dernier dans la présente procédure étaient fondamentalement les mêmes. Le complexe de faits sur lequel il s'appuyait était également identique. Il y avait donc identité de l'objet entre les procédures pénale et civile, lesquelles opposaient les mêmes parties. L'absence de mention dans le dispositif de l'arrêt précité du rejet des prétentions de A______ en indemnisation était sans incidence, ledit rejet ressortant clairement des considérants. S'agissant de la compétence à raison de la matière, les prétentions en indemnisation d'un prévenu acquitté à l'égard de l'Etat, au sens de l'art. 429 CPP, ne pouvaient être formulées que par-devant les juridictions pénales, à l'exclusion de celles civiles.

h. Dans ses déterminations et plaidoiries finales écrites, A______ a conclu au déboutement de l'ETAT DE GENEVE de ses conclusions sur les exceptions d'autorité de chose juge et d'incompétence ratione materiae et a persisté dans ses conclusions au fond.

Il a soutenu que ses prétentions en indemnisation n'avaient jamais été jugées par les autorités pénales. Le Tribunal de police n'avait pas examiné celles-ci et la Chambre pénale s'était limitée à constater l'absence de telles conclusions prises devant l'instance inférieure, de sorte qu'elle n'avait pas rendu une décision au sens de l'art. 59 al. 2 let. e CPC. La forclusion retenue par celle-ci était donc formelle et non matérielle. De plus, il n'y avait pas d'identité d'objet entre les deux procédures, ses alléguées relatifs au comportement de la Commission n'ayant pas été examinés par les juridictions pénales. Ces faits étaient indépendants de la procédure pénale et donnaient lieu à un contexte générateur de responsabilité autonome. La condition de l'identité des parties faisait également défaut, l'ETAT DE GENEVE ayant participé aux procédures pénale et civile en des qualités différentes.

S'agissant de la compétence ratione materiae, A______ a soutenu que la jurisprudence avait admis la compétence des juridictions civiles pour statuer sur l'indemnisation d'un prévenu détenu illicitement une fois la procédure pénale close.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré qu'il était incompétent à raison de la matière pour statuer sur la demande en paiement de A______. En effet, les prétentions en indemnisation de ce dernier s'inscrivaient dans le cadre de celles qu'un prévenu acquitté pouvait faire valoir au sens de l'art. 429 CPP. Conformément à la jurisprudence, la compétence pour l'allocation d'une telle indemnité était du seul ressort des autorités pénales.

Par surabondance, le Tribunal a admis l'exception d'autorité de la chose jugée. En effet, les prétentions en indemnisation formulées par A______ reposaient sur le même complexe de faits que celles rejetées par la Chambre pénale dans son arrêt AARP/158/2016 du 22 avril 2016. Les différents postes du dommage étaient identiques à ceux invoqués dans la procédure pénale. La condition d'identité des parties était également remplie, nonobstant le fait que dans la procédure pénale, l'ETAT DE GENEVE était représenté par le Ministère public. Le débiteur visé dans les deux procédures était manifestement le même. En outre, la forclusion constatée par la Chambre pénale était matérielle, de sorte que la non-entrée en matière sur les conclusions en indemnisation de A______ était revêtue de l'autorité de la chose juge et ce, même en l'absence de mention expresse dans le dispositif de l'arrêt précité.

Enfin, le Tribunal a arrêté les dépens, mis à la charge de A______ qui succombait, à 20'000 fr. dans la mesure où la procédure avait été limitée aux questions de la prescription, puis de la recevabilité, de la demande et compte tenu du travail effectué par le conseil de l'ETAT DE GENEVE.

EN DROIT

1. 1.1 Le jugement attaqué constitue une décision finale de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). La valeur litigieuse étant supérieure à 10'000 fr., la voie de l'appel est ouverte (art. 308 al. 2 CPC).

1.2 Formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 et 145 al. 1 let. b CPC), l'appel est recevable.

2. La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). Elle applique la maxime des débats et le principe de disposition (art. 55 al. 1, 58 al. 1 et 247 al. 1 CPC).

3. L'appelant fait grief au Tribunal d'avoir violé le droit et basé son raisonnement sur une constatation incomplète des faits en se déclarant incompétent à raison de la matière et en retenant, par surabondance, qu'il était forclos à agir par la voie civile compte tenu de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 22 avril 2016.

3.1.1 Le tribunal n'entre en matière que sur les demandes et les requêtes qui satisfont aux conditions de recevabilité de l'action (art. 59 al. 1 CPC). Parmi celles-ci figure notamment la compétence matérielle du tribunal saisi (art. 59 al. 2 let. b CPC) et le fait que le litige ne doit pas faire l'objet d'une décision entrée en force (let. e).

3.1.2 L'État de Genève et les communes du canton sont tenus de réparer le dommage résultant pour des tiers d'actes illicites commis soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence par leurs fonctionnaires ou agents dans l'accomplissement de leur travail (art. 2 al. 1 LREC). En revanche, ils ne sont tenus de réparer le dommage résultant pour des tiers d'actes licites commis par leurs magistrats, fonctionnaires ou agents dans l'exercice de leurs fonctions ou dans l'accomplissement de leur travail que si l'équité l'exige (art. 4 LREC).

L'autorité compétente pour statuer sur les demandes découlant de la LREC est le Tribunal de première instance (art. 7 al. 1 LREC).

3.1.3 Aux termes de l'art. 429 al. 1 CPP, le prévenu acquitté totalement ou en partie ou bénéficiant d'une ordonnance de classement a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure (let. a), une indemnité pour le dommage économique subi au titre de sa participation obligatoire à la procédure pénale (let. b) ainsi qu'une réparation du tort moral subi en raison d'une atteinte particulièrement grave à sa personnalité, notamment en cas de privation de liberté (let. c). L'autorité pénale examine d'office les prétentions du prévenu. Elle peut enjoindre à celui-ci de les chiffrer et de les justifier (art. 429 al. 2 CPP).

L'art. 429 CPP fonde ainsi un droit à des dommages et intérêts et à une réparation du tort moral résultant d'une responsabilité causale de l'Etat. La responsabilité est encourue même si aucune faute n'est imputable aux autorités (arrêt du Tribunal fédéral 6B_928/2014 du 10 mars 2016 consid. 2). L'Etat doit réparer la totalité du dommage qui présente un lien de causalité avec la procédure pénale au sens du droit de la responsabilité civile (Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, FF 2006 1313 ch. 2.10.3.1; arrêts du Tribunal fédéral 6B_361/2018 du 15 juin 2018 consid. 4 et 6B_478/2016 du 8 juin 2017 consid. 2).

Dans l'ATF 139 IV 206, rendu le 11 avril 2013, le Tribunal fédéral a retenu que l'autorité pénale devait traiter avec le jugement pénal l'ensemble des prétentions en indemnité du prévenu acquitté. Les prétentions en indemnisation prévues à l'art. 429 al. 1 CPP faisaient ainsi partie du jugement pénal. Tranchées par le juge pénal, dites prétentions entraient dans le cadre des décisions rendues en matière pénale au sens de l'art. 78 al. 1 LTF. Il en découlait que le recours en matière pénale était ouvert à leur égard. Cette solution se distinguait de celle qui prévalait avant l'entrée en vigueur du CPP où les prétentions en dommages-intérêts et tort moral du prévenu acquitté s'inscrivaient dans le cadre d'une action en responsabilité contre le canton reposant sur le droit public cantonal. Avec le CPP, les prétentions en indemnisation ne dépendaient donc plus du droit public cantonal et étaient désormais indissociables de la procédure pénale (consid. 1).

En ce qui concerne la compétence à raison de la matière, c'est donc l'autorité qui met un terme à la procédure, soit celle qui a "procédé à l'abandon de la poursuite pénale", qui est compétente pour décider d'une éventuelle indemnisation (Pitteloud, Code de procédure pénale suisse, Commentaire à l'usage des praticiens, 2012, n° 1344 p. 887).

Conformément à l'art. 429 al. 2 CPP, l'autorité pénale examine d'office les prétentions du prévenu. Elle peut enjoindre celui-ci à les chiffrer et les justifier. Lorsque le prévenu ne réagit pas à l'invitation faite par l'autorité au sens de cet article, son comportement passif peut le cas échéant équivaloir à une renonciation à une indemnisation (arrêts du Tribunal fédéral 6B_130/2020 du 17 septembre 2020 consid. 1.3 et 6B_472/2012 du 13 novembre 2012 consid. 2.4). L'absence de réaction implique que le prévenu est définitivement forclos, de sorte que l'indemnisation ne peut intervenir dans une procédure ultérieure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_842/2014 du 3 novembre 2014 consid. 2.1 et les références citées; Jeanneret/Kuhn, Précis de procédure pénale, 2018, n° 5083 p. 172).

3.1.4 Aux termes de l'art. 431 al. 1 CPP, si le prévenu a, de manière illicite, fait l'objet de mesures de contrainte, l'autorité pénale lui alloue une juste indemnité et une réparation du tort moral.

Le Tribunal fédéral a souligné que l'art. 431 CPP relatif à l'indemnisation du prévenu détenu de manière illicite trouvait principalement application devant l'autorité rendant la décision qui met fin à la procédure pénale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1136/2015 du 18 juillet 2016 consid. 4.4.3). Cela étant, une fois le jugement pénal en force, l'indemnisation de conditions de détention illicites relevait des normes ordinaires en matière de responsabilité de l'Etat (arrêt du Tribunal fédéral 6B_703/2016 du 2 juin 2017 consid. 2.1).

Dans l'arrêt récent 6B_117/2020 du 13 novembre 2020, le Tribunal fédéral a considéré que dans le cadre d'une procédure en responsabilité de l'État intervenant après la clôture d'une procédure pénale, la créance en réparation du tort moral pour une détention dans des conditions illicites ne pouvait pas être compensée avec les frais de procédure sans l'accord du créancier. Le Tribunal fédéral a notamment relevé que au "regard du principe de l'égalité de traitement, les personnes qui n'[avaient] pas, respectivement, pas pu faire valoir leur prétention en réparation financière dans le cadre de la procédure pénale, [devaient] pouvoir bénéficier d'une prestation effective de l'État et ne sauraient se voir opposer l'extinction de leur créance par compensation avec les frais de procédure" (consid. 2.5.3).

3.1.5 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il y a autorité de la chose jugée lorsque la prétention litigieuse est de contenu identique à celle ayant déjà fait l'objet d'un jugement passé en force (identité de l'objet du litige). Dans l'un et l'autre procès, les mêmes parties doivent avoir soumis au juge la même prétention en se basant sur les mêmes faits. L'identité des prétentions déduites en justice est déterminée par les conclusions de la demande et le complexe de faits sur lequel les conclusions se fondent (ATF 141 III 257 consid. 3.2; 140 III 278 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_449/2020 du 23 mars 2021 consid. 3).

L'autorité de la chose jugée s'étend à tous les faits qui existaient au moment du premier jugement, indépendamment du point de savoir s'ils étaient connus des parties, s'ils avaient été allégués par elles ou si le premier juge les avait considérés comme prouvés. L'autorité de la chose jugée entraîne ainsi la forclusion des faits qui n'ont pas été invoqués. En revanche, elle n'empêche pas le dépôt d'une nouvelle demande fondée sur une modification des circonstances survenue depuis le premier jugement - ou, plus précisément, depuis le moment où, selon le droit déterminant, l'état de fait ayant servi de base audit jugement avait été définitivement arrêté. En d'autres termes, l'autorité de chose jugée d'une décision s'étend, selon le principe de la forclusion, à tout ce qui se rattache naturellement à la prétention individualisée et exclut l'invocation de tous les faits qui existaient déjà au moment de la décision (ATF 145 III 143 consid. 5.1, 140 III 278 consid. 3.3; 142 III 413 consid. 2.2.6; arrêts du Tribunal fédéral 4A_449/2020 du 23 mars 2021 consid. 3 et 5.2.2 et 4A_224/2017 du 17 juin 2017 consid. 2.3.1).

En principe, l'autorité de la chose jugée ne s'attache qu'au seul dispositif de la décision, qui a statué matériellement sur la prétention (ATF 121 III 474 consid. a). Toutefois, pour connaître le sens exact et la portée précise du dispositif de la décision, il faut souvent en examiner les motifs qui permettent de savoir quel a été l'objet de la demande et ce sur quoi le juge s'est réellement prononcé (ATF 116 II 738 consid. 2a).

3.2.1 En l'espèce, le Tribunal s'est, à juste titre, déclaré incompétent à raison de la matière pour statuer sur la demande d'indemnisation de l'appelant.

En effet, conformément à la jurisprudence rappelée supra, depuis l'entrée en vigueur du CPP, l'indemnisation d'un prévenu acquitté pour le dommage résultant de la procédure pénale initiée, à tort, à son encontre est du ressort exclusif des autorités pénales. La LREC ne trouve donc pas application dans le cas d'espèce.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, le Tribunal fédéral n'a pas retenu, dans son arrêt 6B_117/2020 du 13 novembre 2020, que la voie civile était ouverte s'agissant de l'indemnisation d'un prévenu acquitté pour le dommage résultant de la procédure pénale. Le Tribunal fédéral a, dans cet arrêt, statué sur la question de la compensation des frais de procédure avec une indemnité due pour détention illicite sur la base de l'art. 431 CPP. Cet arrêt s'inscrit effectivement dans le cadre d'une procédure en responsabilité de l'Etat, cela étant il n'est pas applicable à la présente cause. En effet, il est possible de requérir une indemnisation fondée sur l'art. 431 CPP après la clôture d'une procédure pénale, alors que le droit fédéral impose aux autorités pénales qui ont rendu la décision d'acquittement de statuer sur l'éventuelle question du droit à l'indemnisation au sens de l'art. 429 CPP dans le même jugement.

Il s'ensuit que la constatation de la Chambre pénale dans son arrêt AARP/158/2016 du 22 avril 2016 selon laquelle le Tribunal de police, compétent pour statuer sur l'art. 429 CPP, aurait pu renvoyer l'appelant à agir par la voie civile n'est pas correcte. En tous les cas, cette constatation n'a pas d'incidence sur le raisonnement de la Cour s'agissant de la compétence à raison de la matière, le juge civil n'étant pas lié par les considérations des autorités pénales.

L'appelant ne peut pas se prévaloir d'une "période de transition (2011-2016), marquée par une certaine indécision" s'agissant de l'application de l'art. 429 CPP. En effet, le CPP était en vigueur depuis plusieurs années lorsque le jugement du 25 novembre 2014, prononçant son acquittement, et l'arrêt de la Chambre pénale AARP/158/2016 du 22 avril 2016 ont été rendus et la jurisprudence relative à la procédure à suivre pour une indemnisation existait déjà. En effet, le Tribunal fédéral a relevé dans son arrêt ATF 139 IV 206 du 11 avril 2013 que l'indemnisation au sens de l'art. 429 CPP faisait partie intégrante du jugement pénal et ne dépendait plus du droit public cantonal. L'appelant a fait preuve de négligence en ne recourant pas contre l'arrêt précité de la Chambre pénale et en optant, en lieu et place, pour une procédure en responsabilité de l'Etat. Il ne se justifie donc pas de palier ce manquement et de reconnaître à l'appelant le droit de faire valoir ses prétentions en indemnisation dans le cadre d'une procédure civile.

Le Tribunal n'est donc pas l'autorité compétente pour connaître de la demande en indemnisation de l'appelant portant sur les dommages résultant de la procédure pénale n° P/1______/2004.

A cet égard, l'appelant reproche au premier juge de ne pas avoir pris en compte le volet administratif de ses allégués, soit les "faits générateurs de la responsabilité de l'ETAT tels qu'ils résult[aient] des actes et des omissions de la Commission" (allégués n° 81 à 128 de la demande). Selon l'appelant, il s'agissait de faits différents survenus parallèlement à la procédure pénale n° P/1______/2004, à savoir que la Commission avait aggravé sa situation en prenant part illicitement et secrètement à ladite procédure et en prolongeant les effets de celle-ci, alors qu'elle aurait dû et pu remédier aux erreurs du juge d'instruction. La Commission avait ainsi, selon lui, fait preuve de dysfonctionnements récurrents causant le dommage dont il réclamait réparation.

Il ressort de cette argumentation que les reproches formulés par l'appelant à l'encontre de la Commission sont étroitement liés à l'existence et au déroulement de la procédure pénale n° P/1______/2004, ainsi qu'aux conséquences de celle-ci, notamment s'agissant de l'impossibilité d'exercer son activité professionnelle. En appel, l'appelant ne précise pas, ni a fortiori ne démontre, quelles décisions prises par la Commission ou refusées par celle-ci dans le cadre de son activité d'autorité de surveillance lui auraient causés un dommage indépendant de la procédure pénale. En se limitant à renvoyer la Cour à ses allégués n° 81 à 128 de sa demande, l'appelant ne remplit pas les exigences de motivation à cet égard. Le prétendu dysfonctionnement de la Commission en marge de la procédure pénale n° P/1______/2004 ne saurait donc être considéré comme un autre fait générateur du dommage de l'appelant. Ce dernier ne quantifie d'ailleurs pas le dommage qui résulterait des actions et des omissions de la Commission, d'une part, et du comportement du juge d'instruction, d'autre part, ceux-ci étant intrinsèquement liés (cf. également consid. 3.2.2 § 3 infra).

Il s'ensuit que le dommage allégué par l'appelant résulte de l'existence de la procédure pénale n° P/1______/2004, de la gestion, du déroulement et de la longueur de celle-ci. Or l'indemnisation des conséquences financières et morales d'une procédure pénale pour un prévenu acquitté est du ressort des autorités pénales sur la base de l'art. 429 CPP et non plus des autorités civiles sur la base de la LREC.

Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal a, à bon droit, déclaré la demande de l'appelant irrecevable pour défaut de compétence ratione materiae.

3.2.2 Par surabondance, le Tribunal a également, à juste titre, admis l'exception de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 26 avril 2016.

En effet, dans le cadre de la procédure pénale n° P/1______/2004, l'appelant a fait valoir des prétentions devant la Chambre pénale à hauteur de 3'576'604 fr. 40, composés de 3'088'000 à titre de perte de gain passée et future, 305'400 fr. pour des dettes relatives à ses impôts, ses loyers et sa fille, ainsi que 50'000 fr. à titre de tort moral. Or, dans la présente procédure, l'appelant réclame le paiement de 3'550'000 fr., composés de 3'000'000 fr. à titre de perte de gain passée et future, 500'000 fr. pour des dettes à l'égard de tiers, notamment s'agissant de ses impôts et de sa fille, ainsi que 50'000 fr. à titre de tort moral. Les conclusions et les postes allégués du dommage sont donc quasi identiques dans les deux procédures.

A nouveau, l'appelant ne se prévaut que d'une prétendue collusion et interaction illicite entre la Commission et le juge d'instruction durant la procédure pénale initiée à son encontre. Le premier juge était donc fondé à retenir que les prétentions de l'appelant en indemnisation soulevées dans la présente procédure reposaient sur le même complexe de faits que les prétentions soulevées et rejetées par la Chambre pénale dans son arrêt AARP/158/2016 du 22 avril 2016. Par ailleurs, l'appelant ne peut pas se prévaloir du fait que le complexe de faits de sa demande en paiement est plus étendu que celui soumis à la Chambre pénale, dès lors que l'autorité de la chose jugée s'étend à tous les faits qui existaient au moment du premier jugement, indépendamment de savoir s'ils avaient été allégués. L'appelant admet que le comportement reproché à la Commission constitue des faits connexes intervenus en parallèle de la procédure pénale n° P/1______/2004, de sorte que ceux-ci font partie de l'autorité de chose jugée de l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 26 avril 2016.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, ses prétentions en indemnisation ont été examinées par la Chambre pénale, qui les a rejetées. En effet, les considérants de l'arrêt précité sont clairs et participent à la portée de son dispositif. Comme retenu par la Chambre pénale, l'appelant n'a pas valablement soulevé de prétentions en indemnisation chiffrées et documentées par-devant le Tribunal de police, malgré l'invitation de celui-ci à agir en ce sens. La Chambre pénale a donc estimé que ce dernier était forclos à réparer cette omission en appel, précisant que, par son silence, il avait matériellement renoncé à ses prétentions en indemnisation. L'appelant ne peut pas se prévaloir du fait qu'il était absent et que le jugement de Tribunal de police du 25 novembre 2014 a été rendu par défaut, dès lors qu'il était dûment représenté par son conseil. Il n'a par ailleurs pas recouru auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 26 avril 2016, ce qu'il aurait pu faire s'il estimait que le raisonnement de celle-ci était incorrect.

Enfin, que ce soit dans le cadre de la procédure pénale ou civile, l'appelant a été opposé à l'intimé et ce, même si dans le cadre de la première celui-ci était représenté par le Ministère public. Comme retenu par le Tribunal, le débiteur visé dans les deux procédures est identique. L'appelant n'expose pas les raisons pour lesquelles une approche moins formaliste de la notion d'identité des parties se justifierait dans le cas d'espèce.

Partant, la demande d'indemnisation de l'appelant est également irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt AARP/158/2016 de la Chambre pénale du 26 avril 2016, de sorte que le chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris sera confirmé.

3.2.3 L'appelant soutient in fine que le Tribunal a commis un déni de justice en n'instruisant pas l'ensemble de ses allégués et en limitant l'instruction de la cause aux seules exceptions de prescription et de recevabilité soulevées par l'intimé.

Cela étant, l'appelant indique qu'il "en demandera la constatation en temps opportun par action séparée", mais que ce " déni de justice pèse d'ores et déjà sur toute la procédure et singulièrement sur le jugement entrepris, ce pourquoi son existence [était] ici rappelée".

Ce grief, dont l'appelant ne tire aucune conclusion, ne sera pas traité par la Cour dans la présente décision, compte tenu de la solution retenue.

4. S'agissant des frais de première instance, l'appelant reproche au premier juge de l'avoir condamné à verser 20'000 fr. à l'intimé à titre de dépens, compte tenu de sa situation personnelle.

4.1 Les frais, qui comprennent les frais judiciaires et les dépens (art. 95 al. 1 CPC), sont mis à la charge de la partie succombante (art. 106 al. 1 CPC). Le tribunal peut toutefois s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation lorsque notamment des circonstances particulières rendent la répartition en fonction du sort de la cause inéquitable (art. 107 al. 1 let. f CPC).

La loi accorde au tribunal une marge de manœuvre pour recourir à des considérations d'équité lorsque dans le cas particulier, la mise des frais du procès à la charge de la partie qui succombe apparaît inéquitable. A titre d'exemples de telles circonstances particulières sont mentionnés un rapport de forces financières très inégal entre les parties (arrêt du Tribunal fédéral 4A_535/2015 du 1er juin 2016 conisd. 6.4.1).

Le tribunal dispose d'un pouvoir d'appréciation non seulement quant à la manière dont les frais seront répartis, mais aussi et en particulier quant au fait même de déroger aux principes généraux de répartition résultant de l'art. 106 CPC (ATF 139 III 358 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 4A_535/2015 du 1er juin 2016 consid. 6.4.1).

En l'occurrence, il est évident qu'il existe une grande disparité économique entre les parties, d'autant plus qu'en première instance, l'appelant était au bénéfice de l'assistance juridique, ce qui atteste d'une faible situation financière. Par ailleurs, l'appelant ne défendait pas uniquement des intérêts personnels, dès lors que la question de la compétence des autorités civiles s'agissant de l'application de l'art. 429 CPP revêtait un intérêt plus large.

Dans ces circonstances, il se justifie de faire application de l'art. 107 al. 1 let. f CPC, de sorte que l'appelant ne sera pas condamné à verser des dépens de première instance à l'intimé. Chaque partie supportera donc ses propres dépens de première instance.

Partant, le chiffre 3 du dispositif du jugement entrepris sera annulé et il sera statué à nouveau sur ce point dans le sens qui précède.

4.2 Les frais judiciaires d'appel seront arrêtés à 7'000 fr. (art. 5, 7, 17 et 35 RTFMC) et mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 95 al. 2 et 106 al. 1 CPC). Ce dernier étant au bénéfice de l'assistance juridique, ceux-ci seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève, qui pourra en réclamer le remboursement ultérieurement aux conditions fixées par la loi (art. 122 et 123 al. 1 CPC; art. 19 du Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale [RAJ; E 2 05.04]).

Compte tenu de la disparité économique entre les parties, chacune supportera ses dépens d'appel.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 4 janvier 2021 par A______ contre le jugement JTPI/14279/2020 rendu le 18 novembre 2020 par le Tribunal de première instance dans la cause C/21140/2016.

Au fond :

Annule le chiffre 3 du dispositif de ce jugement et cela fait, statuant à nouveau :

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens de première instance.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 7'000 fr. et les met à la charge de A______.

Dit que les frais judiciaires d'appel seront provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.