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Décisions | Tribunal pénal

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P/1447/2023

JTCO/27/2025 du 18.02.2025 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.189; CP.129; LEI.115; LEI.115
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL

Chambre 18


18 février 2025

 

MINISTÈRE PUBLIC

Madame C______, partie plaignante, assistée de Me D______

contre

Monsieur A______, né le ______ 1987, actuellement détenu à la Prison de Champ-Dollon, prévenu, assisté de Me B______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à un verdict de culpabilité des chefs de lésions corporelles graves, de mise en danger de la vie d'autrui, de séquestration, de tentative de contrainte sexuelle, d'entrée illégale et de séjour illégal, au prononcé d'une peine privative de liberté de 4 ans, sous déduction de la détention avant jugement, d'une mesure d'expulsion d'une durée de 7 ans, avec inscription au SIS, dont l'exécution est suspendue au profit de la peine. Il conclut à ce que le prévenu soit condamné aux frais de la procédure et à ce qu'il soit fait bon accueil aux conclusions civiles de la partie plaignante. Il conclut enfin au maintien du prévenu en détention pour des motifs de sureté.

C______ conclut à un verdict de culpabilité des chefs de lésions corporelles graves, de mise en danger de la vie d'autrui, de séquestration, de tentative de contrainte sexuelle, persiste dans ses conclusions civiles et conclut qu'en cas de classement des faits de lésions corporelles, il soit constaté la violation de l'art. 3 CEDH et la violation du droit à une enquête effective.

A______ conclut à son acquittement, au bénéfice de l'erreur sur l'illicéité s'agissant de l'art. 115 LEI, subsidiairement à l'application de l'art. 115 al. 3 LEI. En cas de verdict de culpabilité, il conclut au prononcé d'une peine clémente, assortie du sursis complet, subsidiairement partiel, à ce qu'il soit renoncé à la mesure d'expulsion, subsidiairement à ce qu'il soit renoncé à son inscription au SIS. Il acquiesce aux conclusions civiles s'agissant du point I.2 et conclut à leur rejet pour le surplus. Il conclut au classement de l'infraction de lésions corporelles. Il renonce à faire valoir des conclusions en indemnisation.

EN FAIT

A.a. Par acte d'accusation du 19 décembre 2024, modifié le 13 février 2025, il est reproché à A______ d'avoir, le 28 novembre 2022, vers 20h00, lors d'une prestation sexuelle tarifée avec C______, travailleuse du sexe, dans l'appartement de cette dernière sis rue F______, à G______ [GE], alors qu'elle l'avait rejoint à sa demande dans la salle de bain, fermé la porte de ladite salle de bain, éteint la lumière et assis de force C______ sur les toilettes en la tenant par les mains face à lui qui était totalement nu et, l'obligeant à placer son visage à la hauteur de son pénis et lui disant "mets-toi là", d'avoir tenté de la contraindre à lui prodiguer une fellation sans préservatif, ce qu'elle ne souhaitait pas, puis, alors que C______ était parvenue à se lever pour prendre un préservatif, allumer la lumière et ouvrir la porte et qu'elle se trouvait dos à lui, de l'avoir saisie avec sa main droite, sous la mâchoire, au niveau du cou, son pouce d'un côté et ses doigts de l'autre et, tout en passant son bras gauche par-dessus sa main droite, toujours au niveau du cou, d'avoir serré le cou de C______, laquelle ne pouvait plus bouger ni respirer et donnait des coups de pied contre la douche, avant qu'elle ne perde connaissance, moment où sa colocataire, E______, alertée par le bruit, était sortie de sa chambre et avait vu A______ dans le couloir en train de tenir C______ par le cou, qu'il avait alors lâchée avant de fuir l'appartement nu,

faits qualifiés de tentative de contrainte sexuelle (art. 22 cum art. 189 al. 1 CP).

b. Dans les circonstances de temps et de lieu décrits supra A.a., il est également reproché à A______ d'avoir, en prenant C______ et en la serrant fort au niveau du cou avec son bras, empêché cette dernière de respirer jusqu'à ce qu'elle perdre connaissance, la mettant ainsi, sans scrupule, en danger de mort imminente, tout en lui occasionnant des hématomes au niveau de l'humérus droit, du thorax antérieur gauche et de la fesse droite, une odynodysphagie aux solides et aux liquides (avec changement de voix) et des angoisses et d'avoir, dans ces mêmes circonstances, blessé C______ en la lâchant et la laissant tomber au sol, notamment à l'épaule droite, tout en portant gravement atteinte, sur la durée, à sa santé physique et mentale,

faits qualifiés de mise en danger de la vie d'autrui au sens de l'art. 129 CP et de lésions corporelles graves au sens de l'art. 122 let. c CP, initialement de lésions corporelles simples au sens de l'art. 123 CP.

c. Dans les circonstances de temps et de lieu décrits supra A.a., A______ se voit encore reprocher d'avoir entravé la liberté de mouvement de C______ en l'enfermant dans la salle de bain, en l'obligeant à s'asseoir sur les toilettes puis en la retenant par la force en l'enserrant au niveau du cou pour l'empêcher de sortir,

faits qualifiés de séquestration au sens de l'art. 183 ch. 1 CP.

d. Enfin, il est reproché à A______ d'avoir, à une date indéterminée en mai 2022, pénétré sur le territoire suisse et y avoir séjourné jusqu'au 30 novembre 2022, alors qu'il ne disposait pas des autorisations nécessaires,

faits qualifiés d'entrée illégale et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. a et b LEI).

B. Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure.

Intervention de la police

a.a. A teneur du rapport de renseignements du 14 janvier 2023, le 28 novembre 2022, vers 21h30, la police, à la demande de la CECAL, s'était rendue au n° 1 de la rue F______ dans l'appartement de C______, laquelle exerce le métier de travailleuse du sexe. Sur place, C______ avait expliqué avoir passé du temps dans sa chambre avec un client avant d'avoir été physiquement violentée par ce dernier. Selon ses propos, le client avait ensuite pris la fuite, à pied et totalement nu, abandonnant ses effets personnels sur place.

Il était encore précisé que malgré la proposition de la police, C______ n'avait pas souhaité la venue d'une ambulance.

Une fois le signalement de l'individu transmis sur les ondes, ce dernier n'avait pas pu être retrouvé par la police. Dans les effets personnels du client laissés dans l'appartement, la police avait trouvé un porte-monnaie vide, une carte SWISSPASS au nom de "AA______" et un téléphone portable de marque REDMI comportant une carte SIM marquée SUNRISE.

L'enquête avait ensuite permis de déterminer que "AA_____", dont le nom complet est A______, était logé route H______ 2 – [code postal] J_____ [GE], chez I______, laquelle – contactée dans un premier temps par la police par téléphone le 2 décembre 2022 – avait expliqué qu'il avait logé quelques semaines chez elle avant de précipitamment quitter la Suisse le 30 novembre 2022.

a.b. Des images de vidéosurveillance des TPG et de la centrale de vidéoprotection datées de la soirée des faits étaient annexées au rapport de renseignements. On y apercevait A______ entièrement nu en train de prendre la fuite en courant dans la rue F______, puis de monter dans le tram et de s'asseoir toujours nu à une place, vêtu ensuite d'une veste noire qu'un individu lui avait gracieusement donnée afin qu'il puisse se couvrir.

a.c. Une vidéo prise par une autre travailleuse du sexe montre en outre A______ courir entièrement nu dans le quartier de G______ [GE].

Plainte pénale, déclarations et conclusions civiles de C______

b.a. Le 3 décembre 2022, C______ a déposé plainte pénale à la police pour les faits survenus le 28 novembre 2022. Alors qu'elle est de langue maternelle espagnole, la traduction de ses propos a été effectuée par une policière parlant portugais, ce qui a mené à une transcription imprécise et approximative de ses déclarations, selon elle.

A l'appui de sa plainte, C______ a expliqué que le 28 novembre 2022, alors qu'elle était à la recherche de clients à l'entrée de son appartement, sis rue F______, un homme s'était présenté à elle et lui avait demandé le tarif pour une prestation d'une durée de deux heures. Elle lui avait répondu que le tarif était de CHF 600.- et lorsqu'il avait annoncé avoir seulement CHF 500.- sur lui, elle avait accepté de monter avec lui dans son appartement pour ce prix. Une fois dans sa chambre, elle lui avait demandé à être payée mais il ne lui avait pas donné l'argent et son porte-monnaie, qu'il avait sorti de son jeans, était fermé. La porte de sa chambre était ouverte et le client avait remarqué qu'une autre fille cuisinait dans la pièce d'à côté. Il s'était déshabillé en la regardant et avait commencé à se masturber. Ensuite, toujours en continuant à se masturber et en regardant l'autre fille, il s'était rendu dans la salle de bain, l'avait appelée et lui avait demandé de lui apporter des lingettes humides, ce qu'elle avait fait.

Dès qu'elle était arrivée dans la salle de bain, le client avait éteint la lumière et l'avait tirée par le poignet avec sa main, lui demandant de lui prodiguer une fellation, ce à quoi elle avait répondu que ce n'était pas possible car il n'avait pas encore payé et qu'il ne portait pas de préservatif. Elle a précisé que le client avait pris son porte-monnaie dans la salle de bain pour le lui montrer une seconde fois, alors qu'il était toujours fermé. Lorsque le client l'avait saisie et assise de force sur les toilettes, elle s'était immédiatement relevée pour quitter la pièce et, alors qu'il se trouvait derrière elle, il était parvenu à l'attraper au niveau du cou avec une de ses mains, de manière à l'étrangler, tout en positionnant son deuxième bras autour de son cou pour l'empêcher de sortir de la salle de bain. Il avait serré tellement fort que cela lui avait provoqué un hématome au bras droit et qu'elle avait perdu connaissance un instant.

A son réveil, l'individu n'était plus présent et elle était entourée de plusieurs travailleuses du sexe. Une collègue lui avait expliqué que lorsqu'elle était inconsciente, sa colocataire, soit la fille qui cuisinait, avait ouvert la porte de la salle de bain et l'avait vue au sol. Sa colocataire avait alors été saisie par les cheveux par l'individu avant de sortir de l'appartement affolée et de crier d'appeler la police. L'individu avait quant à lui pris la fuite, totalement nu, en laissant ses habits et effets personnels dans la chambre. C______ a encore spécifié que sa colocataire qui cuisinait portait ce soir-là des écouteurs dans les oreilles, raison pour laquelle elle n'était probablement pas intervenue plus rapidement malgré les cris. En outre, les blessures qui ressortaient du certificat médical qu'elle avait déposé à l'appui de sa plainte pénale étaient dues au fait qu'elle avait tenté de se débattre lorsque le client la tenait par la gorge.

C'était la première fois qu'elle voyait ce client et il lui avait indiqué être cubain, avoir 37 ans et que c'était l'anniversaire de son père, lequel était décédé. Il était de corpulence assez forte, avait les cheveux rasés sur les côtés et un peu bouclés sur le dessus. Il avait aussi un tatouage au niveau de la poitrine.

b.b. Entendue par-devant le Ministère public le 22 novembre 2023, C______ a confirmé la teneur de sa plainte pénale, tout en précisant qu'avant son agression, elle était restée deux heures dans sa chambre avec A______ en train d'écouter de la musique. Durant cette période, ils n'avaient pas entretenu de relation sexuelle et il lui avait simplement demandé qu'elle lui fasse une fellation et qu'elle danse. Ils étaient tous les deux nus et il lui avait aussi proposé de boire de la bière avec lui, ce qu'elle avait refusé car elle n'aimait pas l'alcool.

Elle a ajouté qu'en plus de s'être masturbé à plusieurs reprises en regardant sa colocataire, E______, A______ avait essayé de lui parler et lui avait même demandé d'aller toquer à la porte de la chambre de sa colocataire pour lui dire qu'il lui donnerait CHF 50.- pour continuer à la regarder, ce qu'elle avait refusé. C______ a confirmé que A______ s'était ensuite rendu dans la salle de bain et qu'il l'avait appelée pour qu'elle lui donne une serviette humide, ce qu'elle avait fait.

Après avoir immédiatement fermé la porte avec le verrou et éteint la lumière, il l'avait assise sur la lunette des toilettes en lui tenant les mains et souhaitait qu'elle lui fasse une fellation sans préservatif. A ce moment-là, il se trouvait devant le lavabo. Elle lui avait alors dit d'attendre un moment et lorsqu'elle s'était levée pour ouvrir le verrou et rallumer la lumière, il l'avait attrapée par la gorge et étranglée, en mettant sa main droite sous la mâchoire, le pouce d'un côté et les doigts de l'autre côté du cou. Ensuite, il lui avait passé son autre bras par-dessus au niveau du cou et avait serré alors qu'elle ne pouvait pas bouger et avait des difficultés à respirer.

Elle avait néanmoins réussi à donner des coups de pied contre la douche afin d'alerter sa colocataire, mais cette dernière avait des écouteurs. Elle ne pouvait alors plus respirer ni bouger et avait perdu connaissance. Lorsqu'il avait entendu que sa colocataire était en train d'ouvrir la porte de sa chambre, il avait ouvert la porte de la salle de bain, l'avait relâchée et elle était tombée par terre, sur les genoux, sans force. Elle ne savait pas si elle avait eu des pertes d'urines lors de l'étranglement et pensait qu'il l'avait serrée au niveau de la gorge pendant dix ou quinze minutes, mais ne se souvenait pas exactement.

Lorsque sa colocataire l'avait aperçue, cette dernière avait lâché la vaisselle qu'elle tenait dans les mains et était sortie de l'appartement en courant et en criant "police". Il avait alors attrapé la colocataire par les cheveux puis était parti en courant, tout nu. Toutes les autres travailleuses du sexe présentes ce soir-là s'étaient rassemblées près d'elle mais elle ne pouvait pas parler car elle ne pouvait plus respirer. Ensuite, lorsqu'elle avait aperçu qu'il était sorti de l'appartement, elle était sortie aussi pour essayer de l'attraper. Les autres travailleuses du sexe avaient réussi à le filmer en train de fuir, vidéo qui avait été versée à la procédure.

C______ a précisé que, le soir des faits, elle n'avait pas souhaité la venue d'une ambulance car la police lui avait dit de rester sur place. Le lendemain, à son réveil, elle avait appelé "K______" de l'ASPASIE (association genevoise pour la défense des travailleur.ses du sexe) et elle avait finalement eu "L______" au téléphone. Cette dernière avait appelé la police pour avoir des renseignements et la police lui avait dit que si elle voulait porter plainte, il fallait aller à l'hôpital pour obtenir un certificat. Elle s'était alors rendue à l'hôpital et avait attendu plusieurs heures dans la salle d'attente avant d'être prise en charge.

Elle a relaté qu'elle avait un problème à l'épaule suite à son agression, qu'elle manquait de force et que lorsqu'elle faisait des mouvements circulaires, elle craquait. Elle avait aussi entamé un suivi psychothérapeutique et prenait de multiples médicaments pour dormir, à savoir des antidépresseurs, des antidouleurs et des anxiolytiques. L'agression avait aussi eu un impact sur sa capacité professionnelle car elle avait, depuis les faits, peur de rencontrer des nouveaux clients. Elle ignorait enfin pour quelle raison A______ l'avait agressée. Au début, il lui paraissait complément "normal" et, ensuite, il s'était "transformé".

b.c. Lors des audiences de confrontation des 10 septembre 2024 et 9 octobre 2024, C______ a confirmé ses déclarations, ajoutant que A______ mentait lorsqu'il indiquait que le soir des faits, ils avaient seulement prévu de discuter, sans prestation à caractère sexuel. Ils n'avaient en réalité pas discuté de la prestation convenue mais seulement de la durée de deux heures et du prix. Elle a également précisé que lorsqu'ils étaient montés dans l'appartement, elle ignorait que A______ n'avait pas d'argent mais qu'il lui avait ensuite dit qu'elle devait attendre deux heures pour qu'un ami vienne lui apporter l'argent. Son ami l'avait ensuite appelé à plusieurs reprises et il n'avait jamais répondu.

Une fois dans la chambre, A______ lui avait demandé de se déshabiller et de danser à quatre pattes sur de la musique Reggaeton. Il lui avait aussi demandé de lui faire une fellation dans cette position et il s'était déshabillé alors qu'il portait un caleçon bleu.

C______ a confirmé les allers-retours de A______ entre sa chambre et la salle de bain ainsi que les faits survenus dans cette pièce, spécifiant que lorsqu'il l'avait assise de force sur la cuvette des toilettes, il lui avait dit "viens me sucer" en parlant espagnol. A ce moment-là, il s'était mis de côté par rapport à elle et pas de face, ce qui lui avait permis de se relever et de passer pour rallumer la lumière. En outre, au moment où sa colocataire, E______, l'avait vue, il était derrière elle et la tenait par la gorge alors qu'elle était quasiment à genoux car ses jambes ne tenaient plus. Il l'avait alors relâchée et elle était effectivement tombée au sol à genoux. Elle n'a plus mentionné d'évanouissement. Elle a enfin ajouté que lorsqu'ils se trouvaient dans la salle de bain, A______ ne lui avait pas montré son porte-monnaie, contrairement à ce qui ressortait de du procès-verbal de son audition à la police, mais qu'il le lui avait seulement montré dans la chambre.

b.d. Par courrier du 22 janvier 2025, C______ a, par le biais de son Conseil, fait valoir des conclusions civiles et conclu à la condamnation de A______ à lui verser le montant de CHF 17'000.- avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre d'indemnité pour tort moral ainsi que le montant de CHF 500.- avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre de dommages-intérêts.

Rapports et constats médicaux

c.a. À l'appui de sa plainte pénale, C______ a produit un constat médical du 29 novembre 2022, établi par la Dre M______, médecin interne au service de médecine de premier recours des HUG. Selon ce rapport, l'examen médical de C______, intervenu le même jour, mettait en évidence que ses voies aériennes étaient libres, qu'il y avait des stigmates de strangulation, des hématomes au niveau de l'humérus droit, du thorax antérieur gauche et de l'épaule gauche et des douleurs lors de la palpation du rachis cervical et du sacrum. Aucune fracture n'était constatée.

C______ rapportait une odynodysphagie aux solides et aux liquides avec changement de la voix et indiquait aussi avoir perdu connaissance suite à son étranglement. Sur le plan psychique, il était relevé que C______ apparaissait anxieuse et qu'elle avait peur de retourner au travail. Des photos des blessures de C______ se trouvaient annexées au rapport médical et on y apercevait plusieurs volumineux hématomes, notamment au niveau de sa fesse droite, de son cou, de son épaule droite et de son thorax.

c.b. Par le biais de son Conseil, C______ a versé à la procédure les documents complémentaires suivants :

-         un rapport de suivi ambulatoire (HUG-UIMPV) du 8 octobre 2024 dont il ressortait que C______ avait relaté que lors de son agression, elle avait pensé mourir car l'étranglement avait duré de longues minutes. Le rapport soulignait que cette dernière présentait un important tableau symptomatologique post-traumatique et anxio-dépressif réactionnel aux violences physiques, sexuelles et financières subies sur son lieu de travail, ce qui nécessitait le recours à des soins psychiques spécialisées;

 

-         un rapport de consultation chiropratique de la Dre N______ du 14 octobre 2024 qui retenait, comme diagnostics, une arthropathie acromio-claviculaire droite et une possible instabilité gléno-humérale droite, ce qui avait entraîné une prise en charge chiropratique de plusieurs séances;

 

-         des photos de C______ prises juste après les faits, sur lesquelles apparaissaient notamment des lésions sur son cou et sur son visage ainsi qu'un hématome conséquent au niveau de son épaule gauche.

Déclarations des témoins

d.a. Entendue par la police le 10 décembre 2022, I______ a déclaré que A______ était le fils de son mari cubain, lequel était décédé depuis 4 ans. Lorsque A______ était enfant, elle l'avait rencontré seulement à une seule reprise.

Au mois de mai 2022, A______ l'avait appelée et lui avait demandé s'il pouvait venir habiter temporairement à son domicile, ce qu'elle avait accepté. Il était arrivé chez elle deux ou trois jours après l'appel. Durant son séjour à Genève, A______ était en possession de la clé de son appartement et, pour subvenir à ses besoins, elle lui avait donné environ CHF 400.- par mois en échange de quelques travaux de jardinage. Elle avait aussi contracté pour lui un abonnement chez O______ et lui avait acheté un téléphone portable à la FNAC.

Dans la nuit du 28 au 29 novembre 2022, A______ avait frappé à la porte de son appartement car il n'avait pas sa clé et il était complètement nu, sous une veste. Il lui avait expliqué qu'il avait été agressé et qu'on lui avait volé ses affaires. Dans la foulée, il lui avait annoncé qu'il allait partir de chez elle le lendemain pour aller en Espagne, ce qu'il avait effectivement fait le mercredi 30 novembre 2022. La veille de son départ, elle lui avait racheté une carte SIM chez O______ pour pas qu'il ne quitte la Suisse sans téléphone. Elle savait enfin que A______ avait fait de prison à Cuba mais elle ignorait quand il en était ressorti.

d.b. Entendue par la police le 21 décembre 2022, E______ a déclaré que, le 28 novembre 2022, lorsqu'elle était entrée dans l'appartement qu'elle partageait avec C______, cette dernière se trouvait dans sa propre chambre avec un client. Environ deux heures après son arrivée, le client en question était sorti de la chambre pour aller dans la salle de bain alors qu'elle se trouvait dans la cuisine et il l'avait saluée oralement. Elle a précisé que lorsqu'elle cuisinait, le client était déjà passé à plusieurs reprises à ses côtés pour se rendre dans la salle de bain et retourner dans la chambre de C______ et qu'il était très "calme" et "gentil". Lors de ses passages, il était possible qu'il se soit masturbé en la regardant cuisiner mais elle ne s'était pas retournée pour regarder. Elle était ensuite allée manger dans sa propre chambre et lorsqu'elle avait terminé son repas et qu'elle retournait dans la cuisine pour nettoyer son assiette, elle avait vu le client totalement nu, dans le couloir entre la salle de bain et la chambre de C______. L'homme était debout derrière C______ et il avait son bras autour de son cou. C______ était très apeurée et demandait de l'aide pour appeler la police.

Cette scène l'avait fait paniquer et, alors qu'elle s'était dirigée vers la porte d'entrée pour rapidement quitter l'appartement, il l'avait attrapée par les cheveux pour l'empêcher de partir et avait lâché C______. Malgré son emprise, elle était parvenue à se libérer et à sortir de l'appartement. Une fois sur le palier de la porte, l'homme était sorti de lui-même de l'appartement et avait quitté les lieux totalement nu. Elle n'avait à aucun moment vu que C______ avait perdu connaissance et ignorait pourquoi cette dernière avait été agressée par cet individu.

E______ a enfin précisé que l'intéressé avait déjà été son client dans le courant du mois de septembre 2022 et que tout s'était bien passé. Il était même connu des travailleuses du sexe car il en avait fréquenté plusieurs. Elle ne connaissait toutefois pas son identité.

d.c. Lors de l'audience de confrontation du 26 novembre 2024, E______, qui ne s'était pas présentée par-devant le Ministère public à deux reprises auparavant, a d'emblée indiqué qu'elle n'avait pas peur et que, dans la soirée du 28 novembre 2022, elle avait juste vu ce qu'il s'était passé pendant une minute et qu'elle avait déjà dit tout ce qu'elle avait à dire à la police, confirmant ainsi ses précédentes déclarations.

Elle était en tout état très nerveuse de témoigner et n'aimait pas être devant la police. Cela lui donnait l'impression qu'elle avait fait quelque chose de mal et elle ne voulait rien avoir à faire avec cette histoire.

Elle a ajouté qu'elle n'entretenait plus aucune relation avec C______, qu'elles n'étaient pas amies et qu'elles n'habitaient désormais plus ensemble. S'agissant de A______, elle a précisé qu'elle ne le connaissait pas avant les faits. Confrontée alors à ses déclarations faites à la police, elle a finalement expliqué qu'elle ne savait pas si, avant le jour des faits, elle avait déjà été avec lui et qu'elle ne pouvait ainsi pas confirmer si elle l'avait déjà vu auparavant.

Le soir des faits, elle avait constaté que C______ était montée dans l'appartement avec A______, alors qu'elle se trouvait dans la cuisine, en train de cuisiner. Ils étaient allés plusieurs fois aux toilettes ensemble et tout se passait bien. Elle était ensuite allée manger dans sa chambre et lorsqu'elle avait terminé et souhaitait aller laver son assiette dans la cuisine, elle avait vu A______ en train de tenir C______ par le cou avec son bras. Il avait son coude sous la gorge de C______, laquelle était devant lui. C______ était nerveuse et ne bougeait pas. A ce moment-là, cette dernière et A______ étaient dans le couloir de l'entrée, devant la chambre de C______, en face du petit banc. Lorsque A______ avait vu qu'elle avait ouvert la porte de sa chambre, il avait marché en tenant C______ jusqu'à sa chambre. Elle était alors sous le choc et il avait essayé de venir vers elle et de la prendre par les cheveux. Ils étaient tous les trois très nerveux et C______ avait crié "appelle la police". Il avait alors lâché C______, l'avait également lâchée et était parti en courant.

Elle a ensuite confirmé que, selon elle, C______ n'avait pas perdu connaissance, mais qu'elle était bien tombée par terre lorsqu'il l'avait relâchée et qu'après l'incident, cette dernière présentait des bleus. Après les faits, C______ lui avait indiqué qu'elle souhaitait porter plainte et lui avait demandé si elle le souhaitait aussi, ce à quoi elle avait répondu par la négative. Pour le surplus, elles n'avaient jamais reparlé des faits ensemble, même après la réception de la convocation à l'audience de ce jour.

Arrestation, extradition et déclarations de A______

e.a. Selon le rapport de renseignements du 30 août 2023, A______ avait été arrêté en janvier 2023 à P______, en Espagne, pour séjour illégal. A cette occasion, il avait été dactyloscopié sous l'identité complète de A______ [prénoms et noms complets], né le ______ 1987 et détenait un passeport cubain. Une photo de ce dernier, transmise par la police espagnole, était jointe audit rapport.

e.b. Selon le rapport d'arrestation du 13 août 2024, A______ avait été arrêté en Allemagne le 8 juillet 2024 suite au mandat d'arrêt international émis. Après avoir recueilli son consentement préalable à son extradition et constaté sa non-renonciation au principe de spécialité, l'Allemagne avait accordé l'extradition de l'intéressé demandée par les autorités judiciaires suisses sur la base d'un mandat d'arrêt délivré le 15 avril 2024 par le Ministère public. Ce mandat indiquait que A______ était soupçonné de faits constitutifs de tentative de contrainte sexuelle (art. 22 cum 189 al. 1 CP), de mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), de séquestration (art. 183 ch. 1 CP) et d'entrée et de séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b LEI) et ne décrivait pas de lésions corporelles.

f.a. Entendu par la police le 13 août 2024, A______ a contesté les faits, déclarant d'emblée qu'il était incapable de faire cela, qu'il avait deux filles et que ce n'était pas un "violeur".

Le 28 novembre 2022, il avait bu une bière dans un bar et alors qu'il marchait dans la rue, C______, qu'il ne connaissait pas, lui avait proposé ses services. Avant de la rencontrer, il avait déjà payé les services d'une autre travailleuse du sexe et tout s'était bien passé. C'était la première fois qu'il payait pour des prestations sexuelles car il était en deuil, son père étant décédé depuis un an. Il était convenu avec C______ qu'il reste deux heures en sa compagnie, dans l'appartement de cette dernière, et qu'il la paie CHF 200.- après les deux heures.

Une fois dans l'appartement, ils étaient allés directement dans la chambre de C______ et elle avait fermé la porte. Il avait enlevé son pantalon mais n'avait jamais sorti son porte-monnaie. Il était resté seul avec C______ dans la chambre puis s'était rendu dans la salle de bain pour se nettoyer et était retourné dans la chambre. Lors de cette allée et venue, il avait remarqué qu'il y avait une autre travailleuse du sexe qui était en train de cuisiner mais il ne s'était pas masturbé en la regardant et n'avait eu aucune interaction avec elle. Durant les deux heures, C______ lui avait prodigué une fellation protégée, mais il n'avait pas eu d'érection et il ne l'avait pas touchée. Ils avaient alors surtout discuté et dansé un peu. Il a précisé par ailleurs qu'il ne se sentait pas très bien car ils avaient, tous les deux, consommé de la cocaïne.

Après les deux heures, il avait appelé plusieurs fois un ami, dont il ne se souvenait plus le nom, afin qu'il lui apporte CHF 200.- pour payer C______. Comme son ami n'avait pas répondu à ses appels, il avait pris peur et était parti de l'appartement en laissant toutes ses affaires. Il avait craint que le proxénète de C______ ne s'en prenne physiquement à lui, raison pour laquelle il avait fui aussi rapidement et complètement nu. Pour s'enfuir, il avait prétexté vouloir se rendre dans la salle de bain et en avait profité pour partir en courant alors que C______ avait commencé à crier. La seconde travailleuse du sexe se trouvait quant à elle dans sa chambre et ne l'avait donc pas vu partir.

Après sa fuite, il s'était rendu complètement nu chez sa belle-mère, laquelle habitait à la route H______ 2 [GE]. Il lui avait alors menti, prétextant qu'il s'était fait détrousser. Il avait ensuite pris ses affaires et était parti en Allemagne. Depuis lors, il n'avait plus entendu parler de cette histoire et pensait que comme il n'avait pas donné d'argent à C______, elle aurait pu revendre son téléphone qu'il avait laissé chez elle. Il aurait voulu voir C______ en face pour s'excuser et aussi pour la payer plus que le tarif initial et n'avait jamais pensé que cette histoire aurait autant de conséquences. Il ne s'en était jamais pris physiquement à C______ et ne l'avait pas étranglée. Cette dernière racontait des mensonges et il avait commis une seule erreur, à savoir celle de ne pas payer la prestation. C______ savait en plus où il habitait et il pensait qu'elle aurait pu demander l'argent à sa belle-mère et qu'ils en seraient restés là. Ce dont elle l'accusait était faux et très grave.

S'agissant des circonstances de son arrestation en Allemagne, A______ a expliqué qu'après avoir perdu son porte-monnaie, il était allé faire une déclaration de perte dans un poste de police. On lui avait signalé qu'il avait un problème dans l'espace Schengen. Il avait alors tout de suite pensé que c'était en rapport avec le non-paiement de la prestation de C______ mais n'avait jamais pensé qu'elle l'accuserait de viol.

Enfin, il a déclaré être arrivé en Suisse en juillet 2022 afin de se rendre sur la tombe de son père et être resté deux ou trois mois. Il avait vécu chez un ami, lequel habitait dans les environs du quartier Q______ [GE] et non pas chez sa belle-mère, à qui il était tout de même allé rendre visite fréquemment et qui lui avait donné les clés de sa maison. Il était venu en Suisse pour les vacances et ignorait qu'il lui fallait une autorisation.

f.b. Réentendu le même jour par-devant le Ministère public, A______ a confirmé ses déclarations faites à la police, tout en précisant que le tarif convenu avec C______ était seulement de CHF 200.- car ils avaient prévu, dès le départ, qu'il ne la touche pas et simplement qu'ils discutent ensemble. Admettant ensuite qu'ils étaient tous les deux nus, il a ajouté qu'il était aussi prévu qu'il se masturbe en regardant C______ nue mais toujours sans la toucher.

Pour le surplus, A______ a confirmé qu'il n'avait pas enfermé C______ dans la salle de bain, en spécifiant qu'ils ne pouvaient pas rentrer, les deux, ensemble dans ladite pièce, en raison de sa forte corpulence et du fait que la salle de bain était toute petite. Il n'avait, en outre, jamais vu auparavant l'autre fille qui se trouvait aussi dans l'appartement, à savoir E______, et cette dernière racontait aussi des mensonges au sujet des faits. Lors de sa fuite de l'appartement, il n'avait pas fait attention au fait de savoir si C______ avait des blessures. En tout état, ce n'était pas lui qui avait causé les blessures de C______, il ne l'avait pas touchée et a suggéré qu'elle avait dû se donner des coups elle-même.

Deux jours après les faits, il avait fui de chez sa belle-mère car il pensait que quelqu'un allait venir toquer chez elle pour lui demander de l'argent dans la mesure il avait donné le nom de son père à C______ et que tout le monde le connaissait à Genève, notamment au sein la communauté sud-américaine. Il était aussi parti parce qu'il avait honte et que cette histoire avait créé des tensions au sein de sa famille. Il n'était ainsi pas parti pour fuir et lorsqu'on l'avait informé du fait qu'il y avait un problème dans l'espace Schengen en Allemagne, il s'était rendu de son plein gré à la police.

A______ a ajouté qu'il n'avait jamais fait 15 ans de prison à Cuba et qu'il avait raconté ceci à sa belle-mère pour lui expliquer pourquoi il avait voulu partir de ce pays. En réalité, il avait fui Cuba en 2021 car il avait manifesté contre le gouvernement.

f.c. Lors des audiences de confrontation des 10 septembre 2024 et 9 octobre 2024, A______ a maintenu qu'il n'y avait pas eu de prestation à caractère sexuel avec C______, qu'elle ne lui avait ainsi pas prodigué une première fellation protégée dans la chambre et qu'il ne l'avait pas touchée.

Pour le surplus, il a précisé qu'à son arrivée dans l'appartement, il avait pris une douche, ce qu'elle lui avait laissé faire et qu'elle s'était montrée très aimable avec lui. En outre, c'était lui qui avait apporté de la cocaïne et elle lui avait alors présenté une assiette pour qu'ils puissent la consommer ensemble. Il lui avait ensuite raconté sa vie, parlé de son père, de ses amis et lui avait fait écouté sa musique, tout en dansant. Il a aussi spécifié qu'il n'était "pas question de boisson" car il ne buvait pas, tout en se contredisant ensuite, admettant notamment qu'il avait bu dans un bar avant les faits.

A______ a enfin ajouté qu'il souffrait de claustrophobie et qu'il était asthmatique, raisons pour lesquelles il ne pouvait pas se retrouver dans un espace réduit avec une autre personne et n'avait donc pas pu se trouver dans la salle de bain en compagnie de C______. Il était en outre très timoré et avait des vergetures. Il n'avait ainsi jamais enlevé son caleçon car il n'aimait pas qu'on le voie nu.

Autres actes d'instructions

g.a. L'analyse des téléphones de A______ n'a rien amené d'utile à l'enquête.

g.b. Sur demande du Ministère public, la police a procédé à des photographies de l'appartement de C______ ainsi qu'à la prise des mesures de la salle de bain. Le cahier photographique établi à cette occasion a été joint au rapport de renseignements de la police du 23 août 2024. Il en ressortait notamment que la salle de bain mesurait 1,9 mètre en longueur et 1,5 mètre en largeur et qu'elle était composée d'un lavabo, d'une toilette et d'une cabine de douche, laquelle mesurait 0,9 mètre carré.

C. L'audience de jugement a eu lieu le 18 février 2024.

a. A l'ouverture des débats, le Tribunal a informé les parties que la question du classement des faits de lésions corporelles simples et/ou graves se posait en application du principe de spécialité. Sur question préjudicielle, le Conseil de C______ a conclu principalement au renvoi de la procédure au Ministère public afin que ce dernier obtienne une extension de la demande d'extradition, subsidiairement à ce que le Tribunal constate au fond une violation des art. 2 et 3 CEDH. Ces demandes ont été rejetées par le Tribunal, lequel a précisé que la question de l'éventuelle violation des art. 2 et 3 CEDH serait examinée au fond, tel que cela ressort du procès-verbal d'audience.

b. A______ a persisté à nier les faits reprochés en lien avec C______. En particulier, il a d'emblée déclaré que E______, à savoir le témoin qui avait été auditionné par le Ministère public, n'était pas la femme qui était présente dans l'appartement le jour des faits et qu'il l'avait déjà signalé auparavant, ce qui ne ressortait toutefois pas du procès-verbal. Confronté aux photographies des blessures de C______, il a maintenu que ce n'était pas lui qui lui avait causé de telles blessures et qu'elle avait dû se faire cela toute seule, notamment en se "grattant". Au sujet de son départ nu et précipité de l'appartement de C______, il a ajouté qu'en raison de la cocaïne qu'il avait consommée, il avait eu une "paranoïa" en constatant qu'il ne pouvait pas payer pour la prestation et que c'était pour cela qu'il avait fui apeuré. Selon lui, C______ inventait les faits pour se venger du fait qu'il n'avait pas payé la prestation et pour obtenir une compensation financière. Sur question, il a reconnu qu'elle lui avait prodigué une fellation protégée dans la chambre, mais seulement pendant deux minutes. En outre, il s'était rendu au total à trois reprises dans la salle de bain, d'abord pour se doucher, puis pour aller à selle et enfin pour prendre la fuite, sans penser néanmoins à remettre son caleçon au préalable.

A______ a ajouté encore que si, à son arrivée dans l'appartement, il n'avait pas d'argent dans son porte-monnaie, c'était parce qu'il l'avait dépensé auparavant avec une autre travailleuse du sexe et qu'il attendait que son ami lui ramène de l'argent. Il avait dépensé CHF 200.- avec la première travailleuse du sexe, pour une prestation de deux heures, mais comme il n'avait pas réussi à avoir d'érection, il avait voulu essayer avec une autre travailleuse du sexe. Confronté au carton de rendez-vous à la fondation Phoenix, retrouvé par le Tribunal dans son porte-monnaie, il a indiqué ignorer de quoi il s'agissait et pensait que c'était C______ qui l'avait placé là, car elle était "intelligente", ce qu'il a relevé en rigolant. Il a ensuite reconnu avoir fréquenté d'autres travailleuses du sexe entre mai et novembre 2022, soit une dizaine de fois. Enfin, il était d'accord de payer CHF 500.- à C______ pour le paiement de la prestation obtenue, mais non pas CHF 17'000.- pour le tort moral.

S'agissant de son séjour en Suisse, A______ a confirmé être arrivé en Suisse en mai 2022 et avoir résidé chez un ami.

Il ne savait pas qu'il avait besoin d'un visa pour entrer en Suisse. Il était venu pour se rendre sur la tombe de son père et était finalement resté plus longtemps car il avait fait connaissance avec ses frères et il avait besoin d'un moyen de transport pour retourner en Espagne.

c. C______ a confirmé ses précédentes déclarations, précisant qu'elle avait effectivement accepté de prodiguer une fellation protégée à A______ avant d'être payée car il lui avait dit qu'un ami allait lui amener l'argent. Elle n'avait en revanche jamais accepté un tarif de CHF 200.-, lequel correspondait au maximum à une prestation de 40 minutes. Pour le surplus, elle a confirmé le déroulement des faits dans la salle de bain, tout en précisant ce qui suit.

Tout d'abord, elle estimait qu'entre le moment où il l'avait assise sur les toilettes et celui où elle s'était relevée pour allumer la lumière et déverrouiller la porte de la salle de bain, cela avait duré maximum 5 minutes et qu'au total, ils étaient restés dans la salle de bain environ 10 à 15 minutes. A la question de savoir si A______ l'avait empêchée de quitter la salle de bain, elle a secoué la tête négativement, tout en répondant que "oui" dans la mesure où il était en face d'elle et qu'elle était sur les toilettes. Pour la mettre sur les toilettes, il l'avait prise par le bras et lui avait ensuite dit de le "sucer". Elle s'était alors "rebellée" car il la tenait par le bras. Il n'avait rien fait d'autre à ce moment-là et il lui avait ainsi demandé une fellation avec les mots mais pas les gestes. Confrontée sur ce point à l'acte d'accusation et à ses précédentes déclarations, C______ a fini par déclarer que c'était en la tirant pour l'asseoir sur les toilettes qu'il l'avait forcée à lui faire une fellation, tout en confirmant, sur question directe, qu'il avait également approché son pénis près de sa bouche, alors qu'il lui tenait toujours les bras.

Confrontée aux photos de la salle de bain, elle a spécifié que, malgré la petite taille de la pièce, elle était parvenue à se lever et à aller ouvrir le verrou de la porte et allumer la lumière en contournant A______ du côté du lavabo. Elle avait ensuite à peine eu le temps d'allumer la lumière qu'il l'avait saisie par le cou, moment où elle s'était vue dans le miroir placé au-dessus du lavabo. Lorsqu'il l'avait tenue par le cou, il n'avait pas essayé à nouveau de la forcer à lui faire une fellation. Elle a encore précisé qu'elle n'avait pas perdu connaissance et qu'elle n'avait pas eu de perte d'urine, tout en confirmant qu'elle était tombée au sol sur les genoux lorsqu'il l'avait lâchée car elle n'avait plus de force et ne pouvait plus supporter l'étranglement. Elle se trouvait à ce moment-là au niveau de la porte de la salle de bain. S'agissant des hématomes qu'elle présentait après les faits, elle a expliqué que celui présent sur son bras droit était dû au fait que, lorsqu'elle se défendait, son bras tapait la paroi de la salle de bain, alors qu'elle était appuyée contre le mur où se trouvait le rouleau de papier de toilettes, à côté de la porte d'entrée. Elle s'était retrouvé dans cette position car, lorsqu'il l'avait saisie par le cou, il l'avait retournée et tirée en arrière, ce qu'elle a expliqué en mimant régulièrement un mouvement de torsion.

Après les faits, elle avait eu de la peine à avaler sa salive et à boire de l'eau durant 10 à 15 minutes, avait été aphone le soir-même et avait perdu un ton de voix pendant environ une semaine. Suite aux faits, elle avait aussi eu des douleurs dans son épaule et avait subi des infiltrations. Elle n'arrivait par ailleurs plus à dormir, était très stressée et prenait des médicaments.

Sur questions de son conseil, C______ a encore indiqué qu'elle exerçait le métier de travailleuse du sexe à Genève depuis 18 ans. Suite à son agression, elle avait changé son lieu de travail et travaillait désormais à l'hôtel U_____, car il y avait une alarme et plus de sécurité, ce qui n'était pas le cas à rue F______. Elle avait peur désormais de rencontrer des nouveaux clients et en refusait alors davantage, ce qui avait affecté sa capacité à travailler et diminué ses revenus. Finalement, elle n'avait aucune raison d'accuser faussement A______, dont elle avait encore peur, et souhaitait que la procédure l'aide à trouver une solution contre sa peur, car c'était la première fois qu'elle était victime d'une telle agression durant toutes les années qu'elle avait passées à Genève.

D. A______ est né le ______ 1897 à Cuba, pays dont il est originaire et dans lequel il avait effectué son école obligatoire, avant d'entamer une carrière dans la musique. Il est célibataire et a déclaré, lors de ses premières déclarations, être père de quatre enfants, nés de quatre mères différentes. Trois de ses enfants se trouvaient à Cuba avec leur mère respective, tandis que le dernier, né en ______ 2024, se trouvait en Allemagne avec sa compagne, R______. Son père était décédé et sa mère se trouvait aux États-Unis avec sa sœur et ses neveux.

Lors de l'audience de jugement, A______ a maintenu, dans un premier temps, être père de quatre enfants, avant d'indiquer qu'il avait en réalité cinq enfants, mais que le dernier, dont la mère se nommait S______, n'était pas encore né. Ainsi, il avait deux enfants avec la même mère, un autre enfant avec une autre femme, un autre avec R______, qui vivait en réalité au Nicaragua, et le dernier avec S______ qu'il avait connu en Espagne. Il a encore indiqué que sa compagne actuelle se nommait T______ et que c'était elle la mère de son quatrième enfant, née en réalité en février 2021, alors que les noms de ces femmes ne ressortent pas des autorisations de téléphoner depuis la prison.

S'agissant de son parcours migratoire, A______ a expliqué avoir quitté Cuba pour l'Europe en 2021 car il avait manifesté contre le gouvernement cubain. Il était ensuite venu en Suisse en juillet 2022 et s'était rendu, après son départ, en France, puis en Espagne et finalement en Allemagne, pays dans lequel il avait demandé l'asile politique au début de l'année 2023 car il était opposé au régime cubain. Il ne se souvenait toutefois plus très bien des dates et, lors de l'audience de jugement, il a varié en indiquant s'être en réalité rendu en Allemagne seulement en été 2023.

Avant son arrestation, il a exposé avoir travaillé en Allemagne pendant trois mois en qualité de plongeur dans un restaurant pour un salaire d'environ EUR 12.50 par heure, avant de préciser qu'en réalité, il avait travaillé uniquement deux semaines pour un montant de CHF 300.-. S'agissant de ses charges, il a indiqué à la police que, chaque mois, il envoyait CHF 100.- à chacun de ses enfants, avant 'de déclarer à l'audience de jugement envoyer seulement CHF 50.- par enfant. Il a exposé enfin n'avoir pas de dette ni de fortune.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ n'a pas d'antécédent en Suisse. Lors de la procédure, il a déclaré, dans un premier temps, ne pas avoir de condamnation à l'étranger, avant d'admettre, par devant le Ministère public, qu'il avait en réalité purgé une peine de 4 ans et 7 mois de prison à Cuba pour des vols mais qu'il n'avait jamais été condamné par le passé pour des infractions à caractère sexuel. Lors de l'audience de jugement, il a précisé qu'il s'agissait du vol de trois vélos et qu'il était entré en prison en 1999, alors qu'il avait seulement 12 ans.

EN DROIT

Droit applicable, questions préjudicielles et principes d'appréciation des preuves

1.1.1. Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior). Il en découle que l'on applique en principe la loi en vigueur au moment où l'acte a été commis, à moins que la nouvelle loi ne soit plus favorable à l'auteur (ATF 134 IV 82 consid. 6.1 p. 86 s.; arrêt 6B_782/2022 du 17 avril 2023 consid. 3.2 destiné à la publication).

1.1.2. En l'espèce, les faits reprochés au prévenu se sont déroulés avant l'entrée en vigueur du nouveau droit, intervenue le 1er juillet 2023 s'agissant des lésions corporelles simples, de la mise en danger de la vie d'autrui et de la séquestration respectivement le 1er juillet 2024 pour l'infraction de contrainte sexuelle. Le nouveau droit ne lui étant pas plus favorable, l'ancien droit demeure applicable en vertu des principes de la lex mitior et de la non‑rétroactivité de la loi, en particulier l'art. 189 aCP.

1.2.1.1. L'extradition entre la Suisse et l'Allemagne est régie par la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 (RS 0.353.1; CEExtr), entrée respectivement en vigueur pour la Suisse le 20 mars 1967 et pour l'Allemagne le 1er janvier 1977 ainsi que par un accord bilatéral destiné à compléter la CEExtr et à faciliter son application, conclu le 13 novembre 1969 et entré en vigueur le 1er janvier 1977 (RS 0.353.913.61).

Le droit interne, en particulier la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale du 20 mars 1981 (RS 351.1; EIMP) et son ordonnance d'exécution, n'est applicable qu'aux questions qui ne sont pas réglées explicitement ou tacitement par la CEExtr ou par l'accord bilatéral (art. 1 al. 1 EIMP; ATF 122 II 140, consid. 2).

1.2.1.2. La règle de la spécialité est un principe général du droit extraditionnel (ZIMMERMANN, La coopération judiciaire internationale en matière pénale, 3ème éd. 2009, p. 689-690). Elle est notamment exprimée aux art. 14 CEExtr et 38 et 39 EIMP, selon lesquels l'Etat requérant ne saurait poursuivre la personne extradée pour des faits autres que ceux ayant motivé l'extradition, à moins que l'Etat requis, saisi d'une demande formelle d'extension de l'extradition, ne consente à celle-ci.

La protection liée au principe de la spécialité disparaît si la personne extradée ou poursuivie y renonce expressément ou si elle est ramenée sur le territoire de l'Etat requérant par un Etat tiers (cf. art. 38 al. 2 let. a et b EIMP).

1.2.1.3. A teneur de l'art. 329 al. 5 CPP, si la procédure ne doit être classée que sur certains points de l'accusation, l'ordonnance de classement peut être rendue en même temps que le jugement.

1.2.2. En l'espèce, les faits qualifiés de lésions corporelles, visés sous chiffre 1.1.2 de l'acte d'accusation, ne sont pas décrits dans le mandat d'arrêt émis le 15 avril 2024 par le Ministère public genevois aux fins d'arrestation du prévenu, lequel ne vise d'ailleurs pas les art. 122 et/ou 123 CP.

Le prévenu n'a en outre pas renoncé au principe de spécialité à l'occasion de son extradition par l'Allemagne à la Suisse, étant encore précisé que les faits en cause sont antérieurs à la remise du prévenu par les autorités allemandes à la Suisse.

Au vu de l'empêchement de procéder, le Tribunal procédera au classement des faits visés sous chiffre 1.1.2 de l'acte d'accusation, lesquels sont constitutifs de lésions corporelles simples au sens de l'art. 123 CP (qualification détaillée infra section 2.2.3).

1.3.1. Aux termes de l'art. 3 CEDH, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

La CourEDH a déduit de cet article, en lien avec l'art. 8 CEDH, l'obligation positive pour les Etats d'adopter des dispositions pénales incriminant et punissant de manière effective tout acte sexuel non consensuel, y compris lorsque la victime n'a pas opposé de résistance physique, et de mettre concrètement ces dispositions en œuvre par l'accomplissement d'enquêtes et de poursuites effectives (arrêts de la CourEDH J.L. contre Italie du 27 mai 2021, § 117; M.C. contre Bulgarie du 4 décembre 2003, § 153 et 166).

Pour constituer un acte prohibé par l'art. 3 CEDH, un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité. Elle dépend de l'ensemble des données de la cause, notamment de la durée du traitement, de ses effets physiques ou mentaux, ainsi que parfois du sexe, de l'âge et de l'état de santé de la victime.

Le droit à une enquête officielle approfondie et effective n'impose qu'une obligation de moyens, non de résultat. Il n'est donc pas violé du seul fait que les investigations menées n'ont pas permis de faire toute la lumière sur les faits litigieux. Néanmoins, il impose aux autorités de prendre toutes les mesures raisonnables possibles pour obtenir les preuves relatives aux faits en question, soit notamment les dépositions des témoins oculaires, les expertises et, le cas échéant, les certificats médicaux complémentaires propres à fournir un compte rendu complet et précis des blessures, ainsi qu'une analyse objective des constatations médicales, en particulier concernant la cause des blessures. Toute défaillance dans les investigations qui compromet la capacité de celles-ci à établir la cause des blessures ou les responsabilités risque de constituer une violation de l'art. 3 CEDH. Les autorités compétentes doivent agir avec célérité et diligence, de manière à éviter, notamment, toute apparence de tolérance d'actes illégaux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_110/2008 du 27 novembre 2008 consid. 3.2).

1.3.2. En l'espèce, même s'il ne fait aucun doute que l'enquête menée par le Ministère public aurait pu être conduite de façon plus diligente, notamment lors de la mise en œuvre des premiers actes d'investigation, mais l'enquête a toutefois permis la mise en accusation du prévenu, lequel sera in fine reconnu coupable d'infractions aux art. 129 et 189 CP (cf. infra section 2).

En outre, s'agissant plus spécifiquement du classement de l'infraction de lésions corporelles en raison de l'application du principe de spécialité, il n'y a pas lieu non plus de constater de violation du droit à une enquête effective dans la mesure où de telles lésions constituent en réalité des lésions corporelles simples (qualification détaillé infra section 2.2.3), lesquelles n'atteignent pas le seuil de gravité nécessaire à l'application de l'art. 3 CEDH.

Sur la base de ce qui précède, il n'y a pas lieu de constater, dans le dispositif du jugement, une éventuelle violation du droit à une enquête effective.

1.4. Les déclarations de la victime, entendue comme témoin, constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts du Tribunal fédéral 6B_614/2012 du 15 février 2013 consid. 3.2.5, 6B_716/2010 du 15 novembre 2010 consid. 1.3 et 6B_360/2008 du 12 novembre 2008 consid. 4.3). Le juge peut fonder sa condamnation sur les seules déclarations de la victime, ce d'autant plus si celles-ci sont corroborées par d'autres éléments (arrêt du Tribunal fédéral 6B_626/2010 du 25 novembre 2010 consid. 2.2). Il est d'ailleurs fréquent que, dans les délits de nature sexuelle, il n'y ait pas d'autres témoins que la victime elle-même (arrêts du Tribunal fédéral 1P.677/2003 du 19 août 2004 consid. 3.3 et 1A.170/2001 du 18 février 2002 consid. 3.4.1).

Il n'est pas contraire à la présomption d'innocence d'acquérir une conviction de culpabilité sur la base d'un faisceau d'indices, à moins que cette appréciation ne soit arbitraire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_918/2010 du 14 mars 2011 consid. 1.2).

Culpabilité

2.1.1. Selon l'art. 122 CP, est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans quiconque, intentionnellement blesse une personne de façon à mettre sa vie en danger, mutile le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou rend ce membre ou cet organe impropre à sa fonction, cause à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou défigure une personne d'une façon grave et permanente ou encore fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale.

Selon l'art. 123 ch. 1 CP, celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Dans les cas de peu de gravité, le juge pourra atténuer la peine (art. 48a CP).

L'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant toutefois suffisant (DUPUIS et al., Petit commentaire du code pénal, 2ème éd., Bâle, 2017, N 12 ad art. 123 CP et les références citées).

2.1.2. Selon l'art. 129 CP, quiconque, sans scrupules, met autrui en danger de mort imminent, est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Le danger de mort doit être concret et immédiat en ce sens que la possibilité ou vraisemblance d'un décès résulte du cours ordinaire des choses en cas de réalisation d'un comportement du même type, une probabilité de survenance de la mort supérieure à 50% n'est toutefois pas nécessaire; l'immédiateté disparaît ou s'atténue lorsque s'interposent ou surviennent des actes ou d'autres éléments extérieurs (arrêts du Tribunal fédéral 6B_115/2023 du 5 septembre 2023 consid. 1.1.1; 6B_859/2022 du 6 mars 2023 consid. 2.1; 6B_386/2022 du 20 décembre 2022 consid. 2.1; 6B_418/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.1; 6B_526/2021 du 22 décembre 2021 consid. 3.1). La notion de danger de mort de l'art. 129 CP est en particulier plus large que celle de l'art. 140 ch. 4 CP (ATF 121 IV 67 consid. 2d).

S'agissant plus précisément de la strangulation, la jurisprudence a admis qu'il pouvait y avoir danger de mort lorsque l'auteur étranglait sa victime avec une certaine intensité. Ainsi, dans l'arrêt publié aux ATF 124 IV 53, le Tribunal fédéral a retenu que l'auteur qui avait étranglé sa victime, sans pour autant lui causer de sérieuses lésions et sans qu'elle ait perdu connaissance, pouvait se rendre coupable d'une mise en danger de la vie d'autrui. Dans cet arrêt, selon les médecins légistes, la violence décrite pouvait entraîner, bien que rarement, une mort par réflexe cardio-inhibiteur, ou par asphyxie, si elle était suffisamment forte et longue (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 6.1). Par ailleurs, selon le Tribunal fédéral, l'étranglement de sa victime une quinzaine de fois en l'espace de quelques heures, entraînant chez elle des difficultés de déglutition, des hématomes et des œdèmes aux cordes vocales et nécessitant une respiration avec un appareil pendant deux semaines revêt une intensité suffisante pour créer un danger imminent pour la vie d'autrui et une probabilité sérieuse que ce danger se réalise au sens de l'art. 129 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 6.3).

En cas d'étranglement, un danger de mort imminent est notamment admis lorsque l'auteur agit sur la victime avec une intensité (et/ou une durée) telle que des hémorragies congestives ponctuelles au niveau des conjonctives oculaires ou des symptômes d'asphyxie (arrêt respiratoire avec troubles de la conscience) apparaissent comme des constatations tangibles d'un trouble de la circulation sanguine cérébrale. Les conséquences de la strangulation sont importantes : difficultés respiratoires, peur de l'étouffement, enrouement, difficultés à avaler et maux de gorge, douleurs de pression au-dessus du larynx et douleurs à l'ouverture de la mâchoire, marques de strangulation, étourdissement, déchirure du film, perte de conscience, écoulement d'urine et de selles, hémorragies congestives dans les conjonctives oculaires, la peau du visage, les muqueuses du nez et de la bouche, les tympans, la base de la langue, dans la gorge et sur la peau délicate derrière les oreilles. La durée nécessaire d'une compression du cou jusqu'à l'apparition d'hémorragies congestives (hémorragies pétéchiales, pétéchies) n'est pas indiquée de manière uniforme dans la littérature; la durée varie de 10 à 20 secondes au plus tôt à 3 à 5 minutes.

En outre, les hémorragies congestives surviennent certes très souvent en cas d'asphyxie violente et de strangulation, mais elles ne sont pas obligatoires. Une combinaison de plusieurs symptômes n'est en principe pas nécessaire. Contrairement aux hémorragies congestives, la preuve d'une asphyxie – outre d'éventuelles marques de strangulation objectivables sur le cou – ne repose que sur les déclarations subjectives de la personne concernée. Si des symptômes tels que des difficultés à avaler, des difficultés respiratoires ou même une perte de conscience passagère sont décrits, on peut partir du principe que la respiration de la victime était considérablement réduite ou interrompue. En revanche, la description de simples douleurs lors de la déglutition ou d'un enrouement n'est pas de nature à prouver un manque d'oxygène dans le cerveau, en l'absence d'indications (subjectives) supplémentaires ou de résultats objectifs. L'hypothèse d'un danger de mort en cas de strangulation ne dépend pas du fait que la victime subisse des blessures (externes) graves ou qu'elle perde connaissance. Ainsi, les marques de strangulation et les hémorragies congestives ne sont pas nécessaires pour admettre une compression des parties molles du cou et le danger de mort accru qui en résulte éventuellement (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1258/2020 du 12 novembre 2021 consid. 1.4).

Un acte est commis sans scrupule au sens de l'art. 129 CP lorsque, compte tenu des moyens utilisés, des mobiles de l'auteur et des autres circonstances, parmi lesquelles figure l'état de l'auteur, il apparaît comme contraire aux principes généralement admis des bonnes mœurs et de la morale (ATF 114 IV 103 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 6B_144/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).

Plus le danger connu de l'auteur est grand et moins ses mobiles méritent attention, plus l'absence de scrupules apparaît comme évidente (ATF 107 IV 163 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 6S.16/2004 du 13 février 2004 consid. 2.4.1.).

Du point de vue subjectif, il faut que l'auteur ait agi intentionnellement (ATF 133 IV 1 consid. 5.1) et que l'acte ait été commis sans scrupules. L'auteur doit avoir conscience du danger de mort imminent pour autrui et adopter volontairement un comportement qui le crée (ATF 121 IV 67 consid. 2d). Il n'y a dol de mise en danger que si l'auteur a connaissance du danger et le veut en tant que tel. Le dol éventuel ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1297/2017 du 26 juillet 2018 consid. 6.1). Celui qui commet une violente strangulation avec conscience et volonté veut nécessairement mettre la vie de sa victime en danger, à moins qu'il ignore qu'un tel acte peut être fatal (arrêt du Tribunal fédéral 6B_307/2013 du 13 juin 2013 consid. 4.2). En revanche, il ne veut pas, même à titre éventuel, la réalisation du risque, sans quoi il s'agirait d'une tentative d'homicide (ATF 107 IV 163 consid. 3 p. 165).

2.1.3. Selon l'art. 189 al. 1 aCP, se rend coupable de contrainte sexuelle celui qui, notamment, en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel.

L'art. 189 aCP tend à protéger la libre détermination en matière sexuelle (ATF 131 IV 167 consid. 3 p. 169; 122 IV 97 consid. 2b p. 100), en réprimant l'usage de la contrainte aux fins d'amener une personne à faire ou à subir, sans son consentement, un acte d'ordre sexuel. Pour qu'il y ait contrainte en matière sexuelle, il faut que la victime ne soit pas consentante, que l'auteur le sache ou accepte cette éventualité et qu'il passe outre en profitant de la situation ou en utilisant un moyen efficace (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100; arrêts du Tribunal fédéral 6B_802/2021 du 10 février 2022 consid. 1.2; 6B_488/2021 du 22 décembre 2021 consid. 5.4.1). L'art. 189 aCP ne protège des atteintes à la libre détermination en matière sexuelle que pour autant que l'auteur surmonte ou déjoue la résistance que l'on pouvait raisonnablement attendre de la victime (ATF 133 IV 49 consid. 4 p. 52 et l'arrêt cité; arrêts du Tribunal fédéral 6B_802/2021 précité consid. 1.2; 6B_488/2021 précité consid. 5.4.1).

La contrainte sexuelle suppose ainsi l'emploi d'un moyen de contrainte. Il s'agit notamment de l'usage de la violence. La violence désigne l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime dans le but de la faire céder (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100; arrêt du Tribunal fédéral 6B_995/2020 du 5 mai 2021 consid. 2.1). Il n'est pas nécessaire que la victime soit mise hors d'état de résister ou que l'auteur la maltraite physiquement. Une certaine intensité est néanmoins requise. La violence suppose non pas n'importe quel emploi de la force physique, mais une application de cette force plus intense que ne l'exige l'accomplissement de l'acte dans les circonstances ordinaires de la vie.

Selon le degré de résistance de la victime ou encore en raison de la surprise ou de l'effroi qu'elle ressent, un effort simplement inhabituel de l'auteur peut la contraindre à se soumettre contre son gré (ATF 87 IV 66 consid. 1 p. 68; arrêt du Tribunal fédéral 6B_995/2020 précité consid. 2.1). Selon les circonstances, un déploiement de force relativement faible peut suffire. Ainsi, peut déjà suffire le fait de maintenir la victime avec la force de son corps, de la renverser à terre, de lui arracher ses habits ou de lui tordre un bras derrière le dos, ainsi que la presser contre un mur ou la forcer à entrer dans une cabine téléphonique (arrêts du Tribunal fédéral 6B_367/2021 du 14 décembre 2021 consid. 2.2.1; 6B_995/2020 précité consid. 2.1; 6B_326/2019 du 14 mai 2019 consid. 3.2.1 ; CR CP II-QUELOZ/ILLÀNEZ, art. 189 CP N 30).

La liste des moyens de contrainte figurant dans la loi n'est pas exhaustive (ATF 131 IV 170 consid. 3; 128 IV 99). Il suffit que l'auteur exploite une situation qui lui permet d'accomplir ou de faire accomplir l'acte sans tenir compte du refus de la victime. Tel est le cas lorsque la victime est placée dans une situation telle qu'il serait vain de résister physiquement ou d'appeler du secours ou que cela entraînerait un préjudice disproportionné, de sorte que l'auteur parvient à ses fins, en passant outre au refus, sans avoir nécessairement à employer la violence ou la menace (ATF 122 IV 101 consid. b).

Constitue un acte d'ordre sexuel une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l'excitation ou à la jouissance sexuelle de l'un des participants au moins (cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_732/2018 du 18 septembre 2018 consid. 3.1.3; 6B_180/2018 du 12 juin 2018 consid. 3.1; 6B_35/2017 du 26 février 2018 consid. 4.2).

Sur le plan subjectif, l'infraction de contrainte sexuelle est intentionnelle, mais le dol éventuel suffit. L'auteur doit savoir que la victime n'est pas consentante ou, du moins, en accepter l'éventualité, et il doit vouloir ou, tout au moins, accepter qu'elle soit contrainte par le moyen qu'il met en œuvre ou la situation qu'il exploite (arrêt du Tribunal fédéral 6B_822/2014 du 8 janvier 2015 consid. 3.3).

2.1.4. Il y a tentative (art. 22 al. 1 CP) lorsque l'auteur a réalisé tous les éléments subjectifs de l'infraction et manifesté sa décision de la commettre, alors que les éléments objectifs font, en tout ou en partie, défaut (ATF 140 IV 150 consid. 3.4). Le seuil de la tentative est franchi lorsque l'auteur a pris la décision de commettre l'infraction et qu'il a traduit cette intention par un acte. L'auteur doit avoir au moins commencé l'exécution de l'infraction. L'existence d'une tentative doit être constatée du point de vue objectif, mais se fonder sur des critères d'appréciation subjectifs (ATF 140 IV 150 consid. 3.4; 131 IV 100 consid. 7.2.1). D'après la jurisprudence, il y a commencement d'exécution dès que l'auteur accomplit un acte qui représente, dans son esprit, la démarche ultime et décisive vers la réalisation de l'infraction, celle après laquelle il n'y aura en principe plus de retour en arrière, sauf apparition ou découverte de circonstances extérieures compliquant trop ou rendant impossible la poursuite de l'entreprise (ATF 131 IV 100 consid. 7.2.1; arrêts du Tribunal fédéral 6B_92/2020 du 7 avril 2020 consid. 1.1.2; 6B_157/2017 du 25 octobre 2017 consid. 3.1).

2.1.5. L'art. 183 ch. 1 CP réprime d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque, sans droit, arrête une personne, la retient prisonnière, ou, de toute autre manière, la prive de sa liberté ou quiconque, en usant de violence, de ruse ou de menace, enlève une personne.

La séquestration consiste à retenir une personne en l'obligeant, par un moyen de contrainte, à rester où elle se trouve (ATF 119 IV 216 consid. 2f; arrêt du Tribunal fédéral 6B_448/2012 du 22 novembre 2012 consid. 3.2). L'entrave doit être d'une certaine intensité et d'une certaine durée. Les exigences en matière de durée ne sont cependant pas très élevées, quelques minutes étant suffisantes. Il suffit par ailleurs que le moyen utilisé par l'auteur soit propre à empêcher la victime de partir. La séquestration est réalisée dès que la victime est privée de sa liberté de mouvement (arrêt du Tribunal fédéral 6S.506/2002 du 11 mars 2003 consid. 2.2; DUPUIS et al., op. cit., N 8 ss ad art. 183 CP).

Pour que l'infraction de séquestration soit réalisée, l'intention est exigée. Le dol éventuel suffit (DUPUIS et al., op. cit., N 36 ad art. 183 CP).

2.1.6.1. Quant au concours, la jurisprudence et la doctrine retiennent que le viol ou la contrainte sexuelle absorbent uniquement les lésions corporelles simples (art. 123 et 125 CP) et les voies de fait (art. 126 CP) nécessaires à l'acte de viol ou de contrainte sexuelle (CR CP II-Queloz/Illànez, N 42 ad art. 190; MAIER, in Basler Kommentar, Bâle, 2019, N 80 ad art. 189; CORBOZ, les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., 2010, N 50 ad art. 189; STRATENWERTH / JENNY, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil I, 7ème éd., Berne 2010, chap. 8, N 22; arrêt du Tribunal fédéral 6S.710/1999 du 1er décembre 1999, consid. 6.2; arrêt du Tribunal fédéral 1C_269/2019, consid. 2.3).

2.1.6.2. Les art. 183 et 189 ou 190 CP s'appliquent en concours lorsque, par la façon dont il prive la victime de sa liberté, l'auteur dépasse ce qui est indispensable pour commettre un viol ou une contrainte sexuelle (ATF 98 IV 97, JdT 1973 IV 71; ATF 98 IV 314, JdT 1973 IV 138). Il en va de même, notamment, pour l'article 189 CP (contrainte sexuelle) (DUPUIS et al., op. cit., N 41 ad art. 183).

Le concours réel entre la séquestration et le viol suppose que l'auteur restreigne la liberté de la victime dans une plus grande mesure que ne l'implique la perpétration du viol. L'art. 183 CP ne sera retenu, en plus de l'art. 189 et/ou 190 CP, que si l'on discerne une atteinte à la liberté allant au-delà de ce qui est lié nécessairement à la commission de la contrainte sexuelle ou du viol (CORBOZ, op.cit., N 49 ad art.189 CP); l'auteur doit enlever la victime dans un premier temps ou la retenir après la commission de l'infraction (DUPUIS et al., op. cit., N 45 ad art. 189 CP; MAIER, in Basler Kommentar, Bâle, 2019, N 79 ad art. 189 CP; cf. aussi BJP 1987 N 271).

2.1.6.3. L'infraction visée par les art. 183 et 184 CP peut être retenue en concours avec les lésions corporelles importantes, sinon graves au sens de l'art. 122 CP, infligées à la personne séquestrée (ATF 106 IV 363 consid. 4f; arrêt du Tribunal fédéral 6S.145/2003 du 13 juin 2003).

Lorsque la séquestration ou l'enlèvement sont commis par un moyen qui remplit les conditions d'une autre infraction – comme par exemple la menace ou la contrainte –, il y a concours imparfait et l'art. 183 CP est seul applicable, à moins que les menaces ou la contrainte aillent au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser les conditions de l'art. 183 CP (Dupuis et al., op. cit., n. 41 ad art. 183 CP).

2.1.6.4. Les infractions de lésions corporelles simples et de mise en danger de la vie d'autrui entrent en concours idéal (Roth/Berkemeier, in Basler Kommentar, Bâle, 2019, N 41 ad. art. 123; CR CP II-Rémy, N 25 ad art. 123; DUPUIS et al., op. cit., N 27 ad. art. 123), ce qui a été confirmé par le Tribunal fédéral, puisque l'intention de blesser autrui n'est pas comprise dans l'art. 129 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6S.131/2003 du 13 août 2003 consid. 2.2), sauf si la mise en danger imminente découle des lésions corporelles graves subies auquel cas l'art. 122 absorbe l'art. 129 CP (CR-CP, op cit. N 29 ad art. 129 CP).

2.1.7. A teneur de l'art. 115 al. 1 let. a LEI, est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque contrevient aux dispositions sur l'entrée en Suisse (art. 5).

Conformément à l'art. 5 LEI, tout étranger doit, pour entrer en Suisse, remplir les conditions suivantes : avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d'un visa si ce dernier est requis (let. a), disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b), ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) et ne faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement (let. d). Ces prescriptions sont cumulatives (AARP/323/2017 consid. 3.3.2 et 3.3.3).

2.1.8. L'art. 115 al. 1 let. b LEI prévoit qu'est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque séjourne illégalement en Suisse, notamment après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation ou du séjour autorisé. Un séjour illégal en Suisse doit être reconnu dès que la personne est demeurée au moins 24 heures sur le territoire suisse (NGUYEN / AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, Vol. II, Berne 2017, N 14 ad art. 115 LEtr).

2.1.9. Selon l'art. 115 al. 1 let. a et al. 3 LEI, celui qui contrevient aux dispositions sur l'entrée en Suisse (art. 5), par négligence, sera puni d'une amende.

2.1.10. Aux termes de l'art. 21 CP, relatif à l'erreur sur l'illicéité, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

L'erreur sur l'illicéité vise le cas où l'auteur agit en ayant connaissance de tous les éléments constitutifs de l'infraction, et donc avec intention, mais en croyant par erreur agir de façon licite. La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 141 IV 336 consid. 2.4.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_77/2019 du 11 février 2019 consid. 2.1 non publié in ATF 145 IV 17).

2.2.1. En l'espèce, les événements se sont déroulés pratiquement à huis clos de sorte que, pour forger son intime conviction quant au déroulement des faits, le Tribunal ne dispose que des déclarations des parties, qu'il doit apprécier à la lumière de leur constance et cohérence internes, ainsi qu'à l'aune des éléments matériels figurant au dossier.

Le prévenu et la partie plaignante s'accordent sur le fait que, le soir des faits, le prévenu est monté dans l'appartement de la plaignante pour y bénéficier d'une prestation tarifée d'une durée de deux heures de la part de cette dernière, laquelle exerce le métier de travailleuse du sexe. A ce stade et ce peu importe le tarif convenu, il est admis que le prévenu n'avait pas les moyens financiers pour payer la prestation, ce que la plaignante ignorait dans un premier temps et ce qui est confirmé par le fait que le porte-monnaie du prévenu, retrouvé dans ses effets personnels, était vide. Les parties s'accordent également sur le fait que le prévenu a eu des contacts avec un ami qui devait lui amener la somme convenue et sur le fait que la plaignante lui a prodigué une fellation protégée dans la chambre, qu'ils ont dansé ensemble et qu'il s'est masturbé. Ils divergent en partie sur ce qui s'est passé au surplus durant les deux heures passées ensemble, et particulièrement s'agissant des épisodes de violence relatés par la plaignante.

2.2.2. Les déclarations de la plaignante ont pour partie varié. De telles fluctuations s'expliquent néanmoins notamment par la brièveté de sa première audition à la police, par la mauvaise qualité de la traduction effectuée à la police, par une personne lusophone alors que la partie plaignante parle espagnol, ainsi que par l'écoulement du temps. En tout état, la partie plaignante a été constante sur l'essentiel du déroulement des faits et a, au gré des questions complémentaires, donné des détails qui ne remettent pas en cause sa crédibilité. Il est en effet usuel que le premier récit d'une victime d'agression sexuelle soit limité à certains actes, en particulier lors d'un dépôt de plainte concis à la police, et qu'il soit détaillé par la suite, au fil de l'instruction.

S'agissant plus spécifiquement des faits qui se sont déroulés dans la salle de bain, la plaignante a indiqué, durant l'instruction, que le prévenu était de côté quand il l'avait assise sur les toilettes et non pas en face d'elle, ce qui lui avait permis de se lever et de le contourner afin d'appuyer sur l'interrupteur, ce qu'elle a également expliqué lors de l'audience de jugement. La plaignante a aussi été en mesure de décrire, voire même de mimer précisément les gestes du prévenu qui, dans un premier temps, l'avait assise de force sur les toilettes pour qu'elle lui prodigue une fellation, puis, dans un second temps, l'avait étranglée d'une main, tout en la maintenant par le cou et le bras de l'autre.

La victime a encore fait part de certains détails périphériques dans son récit, comme le fait d'avoir demandé au prévenu d'"attendre un moment", d'avoir tapé contre la paroi de la douche pour attirer l'attention de sa colocataire ou encore le fait que cette dernière portait des écouteurs, ce qui l'avait empêchée de l'entendre. La plaignante n'a pas cherché à en rajouter, notamment lorsqu'elle a affirmé que le prévenu avait tenté d'obtenir de sa part une fellation non protégée à une seule reprise et qu'il n'avait pas cherché à la contraindre sexuellement une nouvelle fois lorsqu'il l'avait étranglée. A cela s'ajoute que la plaignante n'a aucune raison d'inventer les faits à l'encontre du prévenu et qu'elle ne retire aucun bénéfice secondaire de ses accusations, au contraire. De plus, elle a subi d'importantes conséquences sur sa santé physique et mentale et elle a été en mesure de donner des détails sur les conséquences des faits sur l'exercice de sa profession, à savoir notamment qu'elle avait désormais peur de rencontrer de nouveaux clients et qu'elle avait changé de lieu de travail afin de bénéficier d'une protection plus importante, ce qui accroit la crédibilité de son récit. Les déclarations de la partie plaignante sont enfin corroborées par celles du témoin E______, laquelle a notamment affirmé avoir vu la plaignante alors que le prévenu la maintenait par le cou, qu'elle était paniquée et que le prévenu l'avait ensuite lâchée avant qu'elle ne tombe au sol. Elles sont aussi confirmées par les constatations médicales versées au dossier, lesquels font état des différents hématomes subis par la plaignante, des stigmates de strangulation, des conséquences au niveau de la déglutition et de la voix, ainsi que des conséquences sur sa santé psychique.

Sur deux points cependant, le Tribunal relève que les déclarations de la plaignante ont varié ou qu'elles ne sont, à tout le moins, pas corroborées par des éléments matériels.

D'une part, la plaignante a affirmé à la police, aux HUG et au Ministère public, avoir perdu connaissance, ce qu'elle n'a pas confirmé ensuite, indiquant être en réalité simplement tombée sur les genoux, alors que ses forces l'abandonnaient. D'ailleurs, si elle avait aperçu sa colocataire dans le couloir de l'appartement et le prévenu prendre la fuite, c'est qu'elle n'avait effectivement pas perdu connaissance, étant relevé que cet évanouissement était formellement démenti par le témoin. La plaignante a d'ailleurs précisé à l'audience de jugement qu'elle ne s'était pas évanouie. On peut néanmoins comprendre de ses diverses déclarations qu'elle s'était sentie privée de ses forces, qu'elle avait manqué d'air, qu'elle était proche de l'évanouissement et qu'elle était tombée sur les genoux. Cette légère variation n'entache ainsi pas la crédibilité de son récit.

D'autre part, la plaignante n'a jamais décrit précisément, jusqu'à l'audience de jugement, de quelle manière le prévenu avait tenté de la forcer à lui faire une fellation après la manifestation expresse de son refus. Elle a été constante sur le fait qu'il avait éteint la lumière et verrouillé la porte, qu'il l'avait assise de force sur les toilettes en lui tenant les mains et qu'il lui avait demandé, avec des mots, une fellation. Elle avait alors refusé en lui disant d'attendre pour prendre un préservatif et elle s'était immédiatement levée pour rallumer la lumière et déverrouiller la porte. Sur question, à l'audience de jugement, la plaignante n'a pas non plus décrit de quelle manière le prévenu avait tenté de la contraindre après son refus exprès et a confirmé qu'il lui avait demandé avec des mots une fellation et qu'elle avait pu se lever en le contournant par la droite. Toutefois, sur question précise, elle a confirmé la version retenue par l'acte d'accusation, à savoir notamment que le prévenu, en plus de l'asseoir de force sur les toilettes, avait rapproché son pénis de sa bouche, alors qu'il lui tenait toujours les bras. Cette variation n'est toutefois pas non plus de nature à amoindrir la crédibilité de la plaignante, laquelle n'a, au contraire, pas cherché à charger inutilement le prévenu, en essayant d'aggraver ses actes.

La plaignante a enfin évalué la durée des faits dans la salle de bain à 10 à 15 minutes, tout en mentionnant de longues minutes lors de son examen aux HUG. S'il est impossible de déterminer cette durée avec précision, il ne fait aucun doute que, dans les circonstances du cas d'espèce, le temps avait dû lui sembler très long et que le volumineux hématome qu'elle a sur le bras témoignait d'une certaine durée durant laquelle, conformément à ses dires, elle avait dû se débattre afin d'échapper à l'emprise du prévenu.

2.2.3. S'agissant des déclarations du prévenu, elles sont constantes sur l'absence de toute violence et de toute contrainte mais elles sont très variables pour le surplus et peu crédibles. Il a tout d'abord varié sur ce qu'il avait consommé, avant et pendant les faits, admettant parfois qu'il avait consommé de l'alcool auparavant, tout en indiquant ensuite qu'il n'était en réalité "pas question de boisson", ce qui apparaît contradictoire. En outre, alors que le prévenu avait fait mention de la prise de cocaïne dès le début de la procédure, il a pris prétexte de cette consommation lors de l'audience de jugement pour expliquer, pour la première fois, qu'il avait eu une "paranoïa" en constatant qu'il ne pouvait pas payer la prestation, ce qui justifiait son départ précipité et nu. Durant l'instruction, le prévenu a aussi affirmé ne jamais avoir enlevé son caleçon, notamment parce qu'il n'aimait pas qu'on le voit nu, ce qui est manifestement contredit par le fait qu'il s'était enfui de l'appartement de la plaignante totalement nu. Une telle fuite, complétement dénudé, ne s'accorde d'ailleurs pas avec les déclarations du prévenu selon lesquelles il aurait prétexté se rendre aux toilettes pour fuir l'appartement car il n'avait pas les moyens de payer la prestation. Dans un tel cas, il ne fait aucun doute que le prévenu aurait à tout le moins remis son caleçon avant de se rendre aux toilettes et de prendre la fuite. Le prévenu a encore varié sur le type de prestation convenu avec la plaignante, évoquant tantôt une simple discussion pour justifier le tarif de CHF 200.-, puis de la masturbation en la regardant nue ou encore une fellation. Sur ce dernier point, le prévenu a d'ailleurs aussi été inconstant, indiquant par devant le Ministère public qu'il n'y avait jamais eu de fellation protégée, avant de finalement l'admettre lors de l'audience de jugement et alors qu'il l'avait dit à la police.

A cela s'ajoute que les déclarations du prévenu apparaissent incompatibles avec celles du témoin, laquelle était manifestement la personne présente le jour des faits, ce malgré la tentative tardive du prévenu de faire accroire le contraire lors de l'audience de jugement, alors qu'il avait déjà été confronté au témoin lors de l'instruction sans remettre en cause son identité. Les déclarations du témoin corroborent les dires de la victime et le témoin n'avait aucune raison de mentir sur les faits.

Le constat de lésions traumatiques et les photographies représentant la victime corroborent aussi la description des faits de la plaignante. En revanche, les déclarations du prévenu qui est allé jusqu'à prétendre qu'une travailleuse du sexe se serait automutilée au risque de ne plus pouvoir recevoir de clients apparaissent incongrues. Si le seul tort du prévenu avait réellement été de ne pas payer CHF 200.- ce soir-là, il n'aurait fait aucun sens de s'enfuir précipitamment des lieux, entièrement nu, en traversant Genève, puis de quitter la Suisse le lendemain, pays dans lequel il se trouvait depuis plus de six mois. Il sera enfin ajouté qu'en plus de varier grandement sur le déroulement des faits, le prévenu a été incapable d'établir sa situation personnelle de façon cohérente et constante, ce qui amoindrit encore davantage la crédibilité qu'il faut accorder à ses propos.

Pour l'ensemble des raisons qui précèdent, les déclarations de la plaignante apparaissent bien plus crédibles que celles du prévenu, dont les dénégations n'emportent pas conviction. Le Tribunal retient donc que les faits se sont déroulés tels que décrits par la plaignante.

2.2.4. Il est ainsi établi qu'après avoir passé deux heures à regarder la plaignante danser, à danser avec elle, à se masturber et à obtenir une fellation protégée et consentie, le prévenu, qui s'était rendu une nouvelle fois dans la salle de bain, a demandé à la plaignante de l'y rejoindre pour lui donner des lingettes humides. Dès l'arrivée de la plaignante, il a verrouillé la porte de la salle de bain et éteint la lumière, a saisi la plaignante par un ou deux bras, l'a assise de force sur les toilettes et lui a demandé une fellation par la parole, en approchant son pénis de sa bouche, ce qu'elle a refusé en lui disant d'"attendre un peu" et en se relevant, avant qu'il ne l'étrangle en l'empêchant de quitter la pièce.

En agissant ainsi, le prévenu a usé de violence à l'encontre de la partie plaignante, notamment en l'asseyant de force sur les toilettes, tout en lui tenant les mains. Il ne peut toutefois pas être retenu qu'il aurait usé de force pour tenter de mettre son pénis dans la bouche de la plaignante, la plaignante ne l'ayant jamais dit et s'étant contentée d'acquiescer à la version de l'acte d'accusation lors de l'audience de jugement. Cela étant, en éteignant la lumière et en verrouillant la porte de la salle de bain, tout en asseyant de force la plaignante sur les toilettes en lui tenant les mains, le prévenu a fait en sorte de placer, par surprise, son sexe nu à hauteur de la bouche de la plaignante tout en exerçant une emprise physique sur elle, notamment au regard de l'exiguïté des lieux, de sa corpulence et de sa position debout, nu devant la plaignante. Il a de la sorte mis brièvement cette dernière hors d'état de résister et ce n'est que grâce à la vivacité de sa réaction que la plaignante a pu se dégager momentanément de l'emprise physique du prévenu. Le prévenu savait en outre que la plaignante ne souhaitait pas lui faire de fellation sans préservatif, car, d'une part, elle lui avait déjà prodigué un tel acte dans la chambre avec un préservatif et que, d'autre part, ayant fréquenté de nombreuses travailleuses du sexe, il ne pouvait pas ignorer que ces dernières ne pratiquaient en principe pas de fellation non protégée. D'ailleurs, s'il pensait que la plaignante avait été consentante pour un tel acte, il n'aurait vraisemblablement pas essayé de le lui imposer par surprise, lumière éteinte et porte fermée à clef.

Il existe ainsi un faisceau d'indices suffisants permettant de retenir que le prévenu savait que la plaignante était opposée à lui faire une fellation dans ces conditions.

Le Tribunal retient par conséquent qu'en attirant la plaignante dans la salle de bain, puis en verrouillant la porte et en éteignant la lumière, le prévenu voulait obtenir une autre prestation que ce qu'il avait déjà obtenue auparavant et à laquelle il savait que la plaignante était opposée. En mettant ensuite cette dernière de force et par surprise sur les toilettes face à son pénis nu, tout en lui tenant les mains, il a tenté de la contraindre à lui prodiguer une fellation non protégée, à savoir un acte d'ordre sexuel.

La tentative a pris fin uniquement lorsque la plaignante a dit au prévenu d'attendre et qu'elle est parvenue à se lever, puisque le prévenu l'a alors nécessairement lâchée et l'a, dans un premier temps, laissée passer à côté de lui. Le prévenu ne s'est toutefois pas contenté de relâcher son emprise et de laisser partir la plaignante puisqu'il l'a ensuite saisie par le cou immédiatement après son refus exprès. Ce geste – bien qu'effectué après coup – corrobore le fait que le prévenu était furieux que la plaignante ait réussi à lui échapper, et que sa tentative de contrainte échoue.

Dans ces circonstances, le prévenu sera reconnu coupable de tentative de contrainte sexuelle.

2.2.5. Dans un deuxième temps, alors que la plaignante s'était levée pour ouvrir la porte et allumer la lumière, il est établi que le prévenu l'a saisie par le cou et l'a étranglée avec la main droite toute en serrant cet étranglement en passant son bras gauche par-dessus sa main droite, comme une clef de bras. La plaignante se débattait fortement pour échapper à son étreinte tout en tapant contre une paroi pour attirer l'attention de sa collègue.

En agissant ainsi, le prévenu a causé de multiples lésions corporelles simples à la plaignante mais ces faits doivent être classés en raison de l'application du principe de spécialité applicable en matière d'extradition (cf. supra section 1.2.1.). En tout état, les lésions corporelles graves ne seraient pas retenues. Si les douleurs et les troubles chroniques causés à l'épaule de la plaignante sont établis, ils ne sont pas en soi constitutifs de lésions corporelles graves et, outre l'élément temporel, aucun élément médical objectif, telle une expertise médicale, ne permet de retenir un lien de causalité avec les faits. Si le Tribunal ne doute pas que cette agression a eu des conséquences néfastes sur la santé et l'exercice de la profession de la plaignante, la perte financière alléguée n'est pas documentée et ces faits ne constituent, pour cette raison également, pas non plus des lésions corporelles graves.

En serrant le cou de la plaignante durant plusieurs minutes, avec une force suffisante pour lui causer des stigmates de strangulation selon les constatations objectives des HUG, ainsi que des douleurs au cou et au niveau des cervicales, une difficulté passagère à déglutir, une modification de la voix durant une semaine, une sensation d'étouffement et de faiblesse proche de l'évanouissement, même en l'absence d'évanouissement à proprement parler et en l'absence de pétéchies et de perte d'urine, il est établi que la plaignante était, au sens de la jurisprudence, en état de danger de mort imminente. Cette appréciation est corroborée par la description subjective de la plaignante qui a eu peur de mourir, comme elle l'a déclaré aux HUG. Le prévenu a agi avec un manque total de scrupule, en connaissant le danger qu'il lui faisait courir, et mu par la colère en raison du refus de la plaignante de lui prodiguer une fellation non protégée.

L'infraction de mise en danger de la vie d'autrui est donc réalisée.

2.2.6. S'agissant de l'infraction de séquestration, il est relevé que si, dans un premier temps, le prévenu a fermé le verrou de la salle de bain, la plaignante a pu le rouvrir rapidement sans être entravée à ce moment-là par le prévenu pour atteindre la porte, de sorte qu'il n'y a objectivement pas de séquestration. Le prévenu sera acquitté de cette accusation.

La plaignante a, dans un second temps, objectivement été empêchée de quitter la salle de bain à partir du moment où le prévenu la tenait par le cou. Cependant, la séquestration est dans ce cas absorbée par la mise en danger de la vie, car c'est par l'étranglement que le prévenu l'a empêchée de sortir de la salle de bain.

2.2.7. Les faits d'entrée illégale et de séjour illégal sont établis et il n'y a pas d'erreur sur l'illicéité ni de négligence, dans la mesure où le prévenu pouvait facilement se renseigner sur les conditions de son entrée et séjour en Suisse et qu'il apparaît notoire qu'une autorisation et/ou un visa est nécessaire dans ce cadre.

 

 

Peine

3.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.1.2. A teneur de l'art. 40 CP, la durée de la peine privative de liberté va de trois jours à 20 ans.

3.1.3. Aux termes de l'art. 43 al. 1 CP, le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur.

3.1.4. Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).

3.1.5. Si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (art. 49 al. 1 CP).

3.1.6. En cas de tentative, le juge peut atténuer la peine (art. 22 al. 1 CP).

3.2. En l'espèce, la faute du prévenu est grave. Il s'en est pris à la vie et à l'intégrité sexuelle de la plaignante, une travailleuse du sexe, soit une personne vulnérable de ce fait, dans le cadre de prestations sexuelles tarifées.

Son mobile est égoïste. Il a agi mu par une colère mal maitrisée et s'en est pris à la vie de la plaignante pour un motif futile, à savoir qu'il n'avait pas pu assouvir ses pulsions sexuelles, après avoir tenté de l'y contraindre. La plaignante a été très effrayée et elle a craint pour sa vie.

La période pénale est très brève puisque les faits ont eu lieu en quelques minutes. Néanmoins, seule l'intervention de la colocataire de la plaignante a permis de mettre un terme aux agissements du prévenu.

Les moyens utilisés pour la tentative de contrainte sexuelle n'apparaissent pas particulièrement graves. Les conséquences sur la santé psychique de la plaignante de la mise en danger de sa vie sont néanmoins quant à elles importantes.

La situation personnelle du prévenu, pas même la date anniversaire du décès de son père, n'expliquent ses agissements. Désargenté, il devait renoncer à convenir d'une prestation sexuelle tarifée avec une travailleuse du sexe et, à tout le moins, s'en aller sans la violenter.

La collaboration du prévenu a été exécrable. Il a persisté à contester l'intégralité des faits, même en étant confronté aux éléments matériels du dossier. Il a également accusé la plaignante et le témoin de mentir, voire de faire un faux témoignage et est même allé jusqu'à accabler la plaignante en prétendant qu'elle s'était automutilée ou encore qu'elle avait déposé plainte pénale dans le seul but d'obtenir une compensation financière.

La prise de conscience du prévenu est inexistante. Même en clamant son innocence, il aurait pu compatir aux blessures de la plaignante, ce qu'il n'a pas fait, préférant se poser en victime et se lamentant en permanence sur son sort.

Sa responsabilité est pleine et entière.

Il n'a pas d'antécédents connu.

Il y a concours d'infractions.

Au vu de ce qui précède, seule une peine privative de liberté entre en considération. Elle sera fixée à deux ans pour l'infraction la plus grave, soit celle à l'art. 129 CP, et sera augmentée de 6 mois pour tenir compte de l'infraction de tentative de contrainte sexuelle, ainsi que celles commises à l'encontre de la LEI, en concours.

Les conditions du sursis partiel étant réalisées, la partie ferme de la peine sera arrêtée à 15 mois et le délai d'épreuve sera fixé à trois ans.

Expulsion

4.1.1. A teneur de l'art. 66a al. 1 let. b et h CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné pour mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP) ou contrainte sexuelle (art. 189 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans.

4.1.2. Le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse (art. 66a al. 2 CP).

La clause de rigueur permet de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.); elle doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1; arrêt 6B_755/2023 du 19 octobre 2023 consid. 4.2).

4.1.3. L'inscription de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) est régie par le chapitre IV du règlement SIS II (règlement CE n° 1987/2006) relatif aux signalements de ressortissants de pays tiers aux fins de non-admission ou d'interdiction de séjour. L'art. 21 de ce règlement prescrit qu'avant d'introduire un signalement, l'État membre signalant vérifie si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l'introduction du signalement dans le SIS II. Le signalement dans le SIS suppose que la présence de la personne concernée, ressortissante d'un pays tiers, sur le territoire d'un État membre constitue une menace pour l'ordre public ou la sécurité publique ou pour la sécurité nationale. L'art. 24 précise que tel peut être notamment le cas lorsque l'intéressé a été condamné dans un État membre pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'au moins un an (let. a) ou lorsqu'il existe des raisons sérieuses de croire qu'il a commis un fait punissable grave, ou à l'égard duquel il existe des indices réels qu'il envisage de commettre un tel fait sur le territoire d'un État membre (let. b).

4.2. En l'espèce, les infractions commises entraînent l'expulsion obligatoire du prévenu. Au regard de la gravité des actes qui lui sont reprochés, il se justifie d'ordonner son expulsion de Suisse avec inscription de la mesure dans le système d'information SCHENGEN pour une durée de 5 ans, étant relevé que le prévenu étant sans aucune attache avec la Suisse, et n'alléguant pas que son expulsion le mettrait dans une situation personnelle grave, la clause de rigueur ne trouve pas application.

Conclusions civiles

5.1.1. En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP).

En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

Selon l'art. 124 al. 3 CPP, si le prévenu acquiesce aux conclusions civiles, sa déclaration doit être consignée au procès-verbal et constatée dans la décision finale.

5.1.2. L'art. 49 al. 1 CO prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement. L'ampleur de la réparation morale dépend avant tout de la gravité des souffrances physiques ou psychiques consécutives à l'atteinte subie par la victime et de la possibilité d'adoucir sensiblement, par le versement d'une somme d'argent, la douleur morale qui en résulte. En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage qui ne peut que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L'indemnité allouée doit toutefois être équitable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_123/2020 du 26 novembre 2020 consid. 10.1 et 10.2).

5.1.3. A teneur de l'art. 41 al. 1 CO, chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence. La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

5.2. En l'espèce, la partie plaignante a conclu à ce que le prévenu soit condamné à lui verser le montant de CHF 17'000.- avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre d'indemnité pour tort moral ainsi que le montant de CHF 500.- avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre de dommages-intérêts.

Il ne fait aucun doute que la plaignante a été très impactée par l'agression subie, laquelle lui a fait craindre pour sa vie ainsi que pour son intégrité sexuelle. Les conséquences psychiques importantes et durables sur la santé de la plaignante sont attestées par certificat médical. En raison de l'étranglement contre lequel elle se défendait, la plaignante a par ailleurs subi de multiples lésions, également documentées. Il apparaît encore indéniable que cette agression a certainement impacté la vie, notamment professionnelle de la plaignante, l'aggravation de sa situation économique n'étant néanmoins pas documentée.

Dans ces conditions, un tort moral de CHF 12'000.-, avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022, apparaît proportionné à la gravité de l'atteinte subie et conforme à la jurisprudence applicable en la matière.

Le prévenu sera également condamné à verser à la plaignante le montant CHF 500.-, avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre de réparation du dommage matériel, conclusion à laquelle il a acquiescé.

Frais et indemnités

6.1. L'art. 426 al. 1 CPP prévoit que le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné. Dans le cas contraire, les frais de la procédure sont supportés par l'Etat (423 CPP).

6.2. En l'espèce, compte tenu du classement et de l'acquittement du prévenu pour deux infractions et du verdict de culpabilité retenu à son encontre pour les infractions restantes, le prévenu sera condamné à deux tiers des frais de la procédure et le solde laissé à la charge de l'Etat.

7. Les indemnités de procédure du défenseur d'office et du conseil de la partie plaignante seront fixées dans le dispositif et motivées ci-dessous (art. 135 et 138 CPP).

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

statuant contradictoirement :

Classe la procédure s'agissant des faits de lésions corporelles simples (art. 123 CP) visés au point 1.1.2 de l'acte d'accusation (art. 329 al. 1 let. c et al. 5 CPP - principe de spécialité).

Acquitte A______ de séquestration (art. 183 ch. 1 CP).

Déclare A______ coupable de tentative de contrainte sexuelle (art. 22 cum art. 189 al. 1 aCP), de mise en danger de la vie d'autrui (art. 129 CP), d'entrée illégale (art. 115 al. 1 let. a LEI) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 30 mois, sous déduction de 226 jours de détention avant jugement (dont 35 jours de détention extraditionnelle) (art. 40 et 51 CP).

Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de 15 mois.

Met pour le surplus A______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 43 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 CP let. b et h CP).

Dit que l'exécution de la partie ferme de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de A______ (art. 231 al. 1 CPP).

Constate que A______ acquiesce aux conclusions civiles s'agissant du dommage matériel (art. 124 al. 3 CPP).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 12'000.- avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO) et CHF 500.-, avec intérêts à 5% dès le 28 novembre 2022 à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO).

Ordonne la restitution à A______ des objets figurant sous chiffres 1 à 9 de l'inventaire n° 39260420230120 et sous chiffre 1 de l'inventaire n° 49025920240813 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne A______ aux deux tiers des frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 3'879.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.-, soit CHF 2'586.- (art. 426 al. 1 CPP).

Laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 5'478.55 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

Fixe à CHF 8'890.35 l'indemnité de procédure due à Me D______, conseil juridique gratuit de C______ (art. 138 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Secrétariat d'Etat aux migrations, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

La Greffière

Soraya COLONNA

La Présidente

Sabina MASCOTTO

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit peut également contester son indemnisation en usant du moyen de droit permettant d'attaquer la décision finale, la présente décision étant motivée à cet égard (art. 135 al. 3 et 138 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

2'226.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

75.00

Frais postaux (convocation)

CHF

28.00

Emolument de jugement

CHF

1'500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

3'879.00 dont 1'293.00 à la charge de l'Etat

==========

 


 

Indemnisation du défenseur d'office

Vu les art. 135 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

A______

Avocat :  

B______

Etat de frais reçu le :  

11 février 2025

 

Indemnité :

CHF

3'685.00

Forfait 10 % :

CHF

368.50

Déplacements :

CHF

330.00

Sous-total :

CHF

4'383.50

TVA :

CHF

355.05

Débours :

CHF

740.00

Total :

CHF

5'478.55

Observations :

- Frais interprète CHF 740.–

- 33h30 à CHF 110.00/h = CHF 3'685.–.

- Total : CHF 3'685.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art. 16 al. 2 RAJ) = CHF 4'053.50

- 6 déplacements A/R à CHF 55.– = CHF 330.–

- TVA 8.1 % CHF 355.05

Ajout de :
- 5h30 (stag.) pour l'audience de jugement

 

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

C______

Avocat :  

D______

Etat de frais reçu le :  

7 février 2025

 

Indemnité :

CHF

6'733.35

Forfait 10 % :

CHF

673.35

Déplacements :

CHF

825.00

Sous-total :

CHF

8'231.70

TVA :

CHF

658.65

Total :

CHF

8'890.35

 

Observations :

- 21h admises* à CHF 200.00/h = CHF 4'200.–.
- 1h40 admises* à CHF 150.00/h = CHF 250.–.
- 1h40 admises* à CHF 150.00/h = CHF 250.–.
- 6h40 admises* à CHF 110.00/h = CHF 733.35.
- 6h30 admises* à CHF 200.00/h = CHF 1'300.–.

- Total : CHF 6'733.35 + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art. 16 al. 2 RAJ) = CHF 7'406.70

- 5 déplacements A/R à CHF 100.– = CHF 500.–
- 3 déplacements A/R à CHF 75.– = CHF 225.–
- 1 déplacement A/R à CHF 100.– = CHF 100.–

- TVA 7.7 % CHF 156.30

- TVA 8.1 % CHF 502.35

Réduction de :
- 1h15 (coll.) pour divers courriers inclus dans le forfait
- 5h00 (stag.) pour audience de jugement, temps effectif 5h30
- 5h00 (stag.) pour travail sur dossier, en dehors de toute acte de procédure, ni participation à l'audience de jugement sur un total de 08h15

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

Notification à A______
par voie postale

Notification à C______
par voie postale

Notification au Ministère public
par voie postale

Notification à Me B______, défenseur d'office
par voie postale

Notification à Me D______, conseil juridique gratuit
par voie postale