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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4159/2023

JTAPI/1453/2023 du 21.12.2023 ( MC ) , ADMIS PARTIELLEMENT

Normes : LEI.74
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4159/2023 MC

JTAPI/1453/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 décembre 2023

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Dina BAZARBACHI, avocate

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1996 et originaire de Nigéria, est arrivé en Suisse durant l'été 2023 et a été condamné le 15 août 2023 par ordonnance pénale du Ministère public genevois pour infraction à l'art 252 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) (faux dans les certificats) et à l'art. 115 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) (entrée illégale, séjour illégal).

2.             Les recherches dans la base de données EURODAC ont permis de constater qu'il avait déposé, de 2015 à 2020, cinq demandes d'asile en Italie, Autriche et France.

3.             Le Ministère public genevois a initié deux autres procédures pénales, le 8 septembre 2023 et le 19 octobre 2023 (procédure P/1______), seule cette dernière concernant une prévention d'infraction à l'art. 19 al. 1 de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) (délit contre la loi sur les stupéfiants – vente le 5 octobre 2023 d'une boulette de cocaïne de 0,5 gramme). Pour le reste, ces procédures concernent des infractions de faux dans les titre (art. 252 CP) et séjour illégal (art. 115 LEI).

4.             Il résulte du rapport de renseignements rédigé par la police le 5 octobre 2023 que les images de vidéosurveillance examinées suite à l'interpellation de M. A______ le jour même mettaient ce dernier hors de cause en montrant qu'il n'y avait eu aucune transaction avec le tiers qui l'avait donc désigné à tort comme étant son vendeur. Il résulte des déclarations faites le même jour par M. A______ qu'il était arrivé à Genève environ un mois et demi auparavant.

5.             Cette affaire est en rapport avec la procédure P/1______ susmentionnée.

6.             Le 7 décembre 2023, l'intéressé a été derechef interpellé dans le quartier des Pâquis, après qu'il avait été observé par la police en train procéder à un échange avec une autre personne. Suspectant une transaction de stupéfiants, la police a arrêté les protagonistes. La personne avec qui M. A______ avait procédé à la transaction a d'emblée remis une boulette de cocaïne d'un poids total de 0,7 grammes tout en expliquant qu'elle venait de l'acheter à un homme de type africain en échange de CHF 40.-.

7.             Les contrôles de sécurité ont permis de déterminer que Monsieur A______ était démuni de document d'identité, et en possession de CHF 70.-, ainsi que d'un téléphone, non-signalé volé.

8.             Entendu dans les locaux de la police, M. A______ a nié vendre de la drogue, mais a reconnu consommer quotidiennement du haschisch et de la cocaïne. C'étaient des amis qui lui donnaient cette drogue et il n'en achetait jamais. S'agissant de sa situation personnelle, il a expliqué être arrivé à Genève en août 2023, en train, en provenance de France, dans l'espoir d'avoir une vie meilleure. Il était démuni de moyens financiers, dormait dans la rue et n'avait pas de liens particuliers avec le canton de Genève.

9.             Prévenu d’infractions à LStup (trafic de stupéfiants) et à la LEI (séjour illégal), M. A______ a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police.

10.         Le 8 décembre 2023, l’intéressé, après avoir été entendu par le procureur, a été condamné, par ordonnance pénale du Ministère public, en référence aux éléments de son arrestation, soit notamment pour infraction à l'art. 19 al. 1 LStup.

11.         Le 8 décembre 2023, en application de l'art. 74 LEI, le commissaire de police a prononcé à l'encontre de M. A______ une mesure d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée (interdiction d'accès au canton de Genève) pour une durée de dix-huit mois.

12.         Le 12 décembre 2023, par l'intermédiaire de son conseil, M. A______ a formé opposition contre cette décision devant le commissaire de police.

13.         M. A______ a été dûment convoqué pour l'audience de ce jour devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

14.         Lors de l'audience de ce jour, la représentante du commissaire de police a indiqué ne pas avoir connaissance de la décision de renvoi du 1er juin 2023 mentionnée en page 4 du rapport de police du 5 octobre 2023. Elle pouvait imaginer qu'il pourrait s'agir d'une décision mentionnée dans le registre SIS, éventuellement prise par une autorité étrangère et qui concernerait l'espace SCHENGEN.

M. A______ a déclaré que cela ne lui disait rien. Il n'était jamais venu en Suisse avant août 2023.

Le conseil de M. A______ a indiqué que la procédure P/1______ faisait l'objet d'une convocation devant le Ministère public le 11 janvier 2024. Elle a ajouté que M. A______ contestait les infractions de faux dans les titres et de trafic de stupéfiants, mais pas celles qui concernaient les entrées et séjour illégaux. Elle avait par ailleurs fait opposition à l'ordonnance pénale du 8 décembre 2023.

L'intéressé, par l'intermédiaire de son conseil, a conclu à la réduction de la durée de l'interdiction de pénétrer, en s'en rapportant à justice sur ce point.

La représentante du commissaire de police a conclu au rejet de l'opposition et à la confirmation de l'interdiction pour une durée de dix-huit mois.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner sur opposition la légalité et l’adéquation de l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée prononcée par le commissaire de police à l'encontre d'un ressortissant étranger (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. a de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             L'opposition ayant été formée dans le délai de dix jours courant dès la notification de la mesure querellée, elle est recevable sous l'angle de l'art. 8 al. 1 LaLEtr.

3.             Statuant ce jour, le tribunal respecte en outre le délai de vingt jours que lui impose l'art. 9 al. 1 let. b LaLEtr.

4.             Selon l'art. 74 al. 1 LEI, qui a repris l'art. 13e de l'ancienne loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers du 26 mars 1931 (aLSEE- RS 142.20 ; cf. message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur les étrangers du 8 mars 2002 in FF 2002 3469, p. 3570), l'autorité cantonale compétente peut enjoindre à un étranger de ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou de ne pas pénétrer dans une région déterminée dans les cas suivants :

a. l'étranger n'est pas titulaire d'une autorisation de courte durée, d'une autorisation de séjour ou d'une autorisation d'établissement et trouble ou menace la sécurité et l'ordre publics ; cette mesure vise notamment à lutter contre le trafic illégal de stupéfiants ;

b. l'étranger est frappé d'une décision de renvoi ou d'expulsion entrée en force et des éléments concrets font redouter qu'il ne quittera pas la Suisse dans le délai prescrit ou il n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour quitter le territoire ;

c. l'exécution du renvoi ou de l'expulsion a été reportée (art. 69 al. 3 LEI).

5.             Conformément à l'art. 74 al. 2 LEI, la compétence d'ordonner ces mesures incombe au canton qui exécute le renvoi ou l'expulsion ; s'agissant de personnes séjournant dans un centre d'enregistrement ou dans un centre spécifique au sens de l'art. 26 al. 1bis de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 (LAsi - RS 142.31), cette compétence ressortit au canton sur le territoire duquel se trouve le centre ; l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée peut aussi être prononcée par le canton dans lequel est située cette région.

De son côté, l'art. 6 al. 3 LaLEtr précise que l'étranger peut être contraint à ne pas quitter le territoire qui lui est assigné ou à ne pas pénétrer dans une région déterminée, aux conditions prévues à l'art. 74 LEI, notamment suite à une condamnation pour vol, brigandage, lésions corporelles intentionnelles, dommage à la propriété ou pour une infraction à la LStup.

Les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée répondent à deux préoccupations. Elles permettent d'intervenir pour protéger la sécurité et l'ordre publics - plus particulièrement dans les domaines qui ne peuvent guère être couverts par le droit pénal - à l'encontre de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage. En outre, elles peuvent être ordonnées à l'égard d'étrangers dont le renvoi est durablement entravé et pour lesquels il est nécessaire de les tenir éloignés d'un endroit déterminé ou de pouvoir les surveiller (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 rendu sous l'égide de l'art. 13 aLSEE, remplacé par l'art. 74 al. 1 LEI - cf. supra).

6.             L'étranger est passible d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire s'il n'observe pas les mesures qui lui sont imposées dans ce cadre (cf. art. 119 LEI).

7.             Les mesures prévues par l'art. 74 al. 1 LEI visent à prévenir les atteintes à la sécurité et à l'ordre publics plutôt qu'à sanctionner un comportement déterminé de ressortissants étrangers dont le départ ne peut pas être exigé en raison d'une demande d'asile pendante ou de l'absence de titre de voyage (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2a).

8.             D'après la jurisprudence, le simple soupçon qu'un étranger puisse commettre des infractions dans le milieu de la drogue justifie même une mesure prise en application de l'art. 74 al. 1 let. a LEI (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 ; 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1 ; 2A.347/2003 du 24 novembre 2003 consid. 2.2). En outre, de tels soupçons peuvent découler du seul fait de la possession de stupéfiants destinés à sa propre consommation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 ; 2A.148/2003 du 30 mai 2003 consid. 3.3). Les étrangers qui sont mêlés au commerce des stupéfiants doivent s'attendre à faire l'objet de mesures d'éloignement, la protection de la collectivité publique face au développement du marché de la drogue présentant incontestablement un intérêt public prépondérant justifiant l'éloignement d'un étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_530/2007 du 21 novembre 2007 consid. 5).

Même si la simple présence en des lieux où se pratique le commerce de la drogue ne suffit pas à fonder un soupçon de menace à l'ordre et à la sécurité publics, tel est le cas lorsque la personne concernée est en contact répété avec le milieu de la drogue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_437/2009 du 27 octobre 2009 consid. 2.1).

Le Tribunal fédéral a du reste confirmé une telle mesure visant un recourant qui avait essentiellement été condamné pour de simples contraventions à la LStup (arrêt du Tribunal fédéral 6B_808/2011 du 24 mai 2012 consid. 1.3 ; cf. aussi ATA/45/2014 du 27 janvier 2014).

A l'instar de l'art. 13e aLSEE, l'art. 74 al. 1 LEI constitue par ailleurs une clause générale permettant de prendre des mesures également à l'encontre d'étrangers qui ont gravement violé les prescriptions de police des étrangers qui tendent à garantir l'ordre public en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3a et la référence citée cum FF 2002 3469, 3570).

9.             Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent respecter le principe de la proportionnalité énoncé à l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101) (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4), lequel se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/3019/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Pour être conforme au principe de la proportionnalité, une restriction d'un droit fondamental, en l'occurrence la liberté de mouvement, doit être apte à atteindre le but visé, ce qui ne peut être obtenu par une mesure moins incisive. Il faut en outre qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 137 I 167 consid. 3.6 ; 136 I 197 consid. 4.4.4 : arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1).

Les mesures d'assignation à un lieu de séjour et l'interdiction de pénétrer dans une région déterminée doivent ainsi être nécessaires et suffisantes pour empêcher que la sécurité et l'ordre publics ne soient troublés ou menacés ; les moyens doivent être proportionnés au but poursuivi, au regard notamment de la délimitation géographique et de la durée de la mesure (arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2002 consid. 2c).

Le périmètre d'interdiction doit être déterminé de manière à ce que les contacts sociaux et l'accomplissement d'affaires urgentes puissent rester possibles ; elles ne peuvent en outre pas être ordonnées pour une durée indéterminée (arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.1 ; 2C_1044/2012 du 5 novembre 2012 consid. 3.3 ; 2A.514/2006 du 23 janvier 2007 consid. 3.3.1 ; 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 3c). Cela étant, le périmètre d'interdiction peut inclure l'ensemble du territoire d'une ville (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 4.2 ; 2A.647/2006 du 12 février 2007 consid. 3.3 pour les villes d'Olten et de Soleure ; 2A.347/2003 du 24 novembre 2003 consid. 4.2 pour la ville de Berne).

Les étrangers dépourvus d'autorisation de séjour n'ont pas le droit à une liberté totale de mouvement. S'agissant d'une atteinte relativement légère à la liberté personnelle, le seuil pour ordonner les mesures d'assignation d'un lieu de séjour et d'interdiction de pénétrer dans une région déterminée n'a pas été placé très haut. Pour définir le trouble ou la menace de la sécurité et de l'ordre publics, il suffit de se fonder sur la notion très générale de la protection des biens par la police. Des indices concrets de délits commis dans le milieu de la drogue suffisent, de même que la violation grossière des règles classiques de la cohabitation sociale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_197/2013 du 31 juillet 2013 consid. 3 et la référence citée ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2A.583/2000 du 6 avril 2001 consid. 2b et les références citées ; ATA/45/2014 du 27 janvier 2014 ; ATA/778/2012 du 14 novembre 2012).

10.         La jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (CJCA) est d'une lecture incertaine sous l'angle de la proportionnalité de la durée d'une mesure d'interdiction territoriale, mais il s'avère en réalité, en comparant les arrêts rendus par cette juridiction en 2023, que c'est également, voire principalement la pratique du Commissaire de police qui semble fluctuante, les durées d'interdiction prononcées pour l'ensemble du territoire cantonal étant tantôt de six, douze, dix-huit ou vingt-quatre mois, sans que l'on puisse clairement rattacher les cas de très peu de gravité uniquement aux durées les moins longues.

11.         La CJCA a ainsi confirmé un jugement du tribunal réduisant de douze à neuf mois la durée d'interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire cantonal prononcée à l'encontre d'une personne condamnée à une reprise pour vol, utilisation frauduleuse d'un ordinateur et infractions contre la LEI (ATA/5/2023 du 10 janvier 2023).

12.         Elle confirmé un jugement du tribunal réduisant de vingt-quatre à douze mois la durée d'interdiction de pénétrer sur l'ensemble du territoire cantonal prononcée à l'encontre d'une personne condamnée à neuf reprises en Suisse entre avril 2020 et janvier 2023, notamment pour vol et recel, vol, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, ainsi que lésions corporelles simples (ATA/105/2023 du 31 janvier 2023).

13.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction cantonale d'une durée de six mois prononcés contre une personne condamnée une première fois pour infractions contre la LEI puis une seconde fois pour délit et contravention contre la LStup (ATA/133/2023 du 8 février 2023).

14.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction cantonale d'une durée de dix-huit mois prononcée contre une personne ayant fait l'objet d'une précédente interdiction cantonale d'une durée de douze mois, puis de deux condamnations pénales pour violation de cette injonction, d'une troisième pour contravention contre la LStup et enfin d'une quatrième pour utilisation frauduleuse ordinateur et délit contre la LStup (ATA/152/2023 du 14 février 2023).

15.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction cantonale d'une durée de douze mois prononcée contre une personne condamnée pénalement une première fois pour délit contre la LStup et ayant fait l'objet suite à cette condamnation d'une interdiction cantonale d'une durée de six mois, puis condamnée une deuxième fois pour la violation de cette interdiction et une troisième fois pour délit contre la LStup (ATA/251/2023 du 14 mars 2023).

16.         Elle a annulé un jugement du tribunal réduisant de douze à six mois une interdiction cantonale prononcée contre une personne condamnée une première fois notamment pour délit contre la LStup, et contre laquelle était en cours une seconde procédure pénale l'impliquant dans un trafic de drogue (ATA/337/2023 du 31 mars 2023).

17.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction cantonale d'une durée de dix-huit mois prononcée contre une personne condamnée à 12 reprises entre 2013 et 2022, essentiellement pour des vols et des infractions contre la LEI (ATA/607/2023 du 8 juin 2023).

18.         Elle a annulé un jugement du tribunal réduisant de vingt-quatre à dix-huit mois une interdiction de périmètre prononcée à l'encontre d'une personne qui avait fait l'objet de 11 condamnations pénales depuis 2019, notamment pour des infractions à la LStup, ainsi que tu ne précédentes décision d'interdiction de pénétrer dans le canton de Genève pour une durée de 12 mois (ATA/609/2023 du 9 juin 2023).

19.         Elle a annulé un jugement du tribunal confirmant une interdiction de périmètre de six mois prononcée à l'encontre d'une ressortissante française qui avait volé différentes marchandises pour une valeur d'environ CHF 1'150.-, prononçant à la place un avertissement, au motif que l'interdiction de périmètre restreignait excessivement ses possibilités de recherche d'emploi dans le canton de Genève (ATA/709/2023 du 29 juin 2023).

20.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction de périmètre prononcée pour une durée de six mois contre une personne condamnée à une reprise notamment pour délits et contraventions contre la LStup (ATA/1003/2023 du 14 septembre 2023).

21.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction de périmètre prononcée pour une durée de douze mois contre une personne condamnée à cinq reprises, notamment pour délit contre la LStup (ATA/1263/2023 du 23 novembre 2023).

22.         Elle a confirmé un jugement du tribunal confirmant lui-même une interdiction de périmètre prononcée pour une durée de douze mois contre une personne extra-européenne titulaire d'un titre de séjour espagnol, condamnée à cinq reprises depuis 2015, notamment pour exercice illicite de la prostitution et délits contre la LStup, sans attache à Genève (ATA/1264/2023 du 23 novembre 2023).

23.         Elle a annulé un jugement du tribunal prononçant un avertissement au lieu de l'interdiction de périmètre prononcée par le Commissaire de police pour une durée de douze mois à l'encontre d'une personne arrêtée et condamnée pour le vol de deux parfums d'une valeur totale de CHF 330.-, Sans attache à Genève (ATA/1319/2023 du 8 décembre 2023).

24.         Il résulte de cette revue de la jurisprudence que certains cas de très peu de gravité, c'est-à-dire n'impliquant qu'une seule condamnation pour un vol d'importance relative ou pour le trafic de quelques grammes de drogues dures, font l'objet, de la part du commissaire de police, d'interdictions territoriales pour une durée de six mois, tandis que le même type de situation peut parfois faire l'objet d'interdictions territoriales pour une durée de douze mois. Des cas plus graves, impliquant deux ou trois, voire plusieurs condamnations pénales, ainsi que des situations dans lesquelles des interdictions territoriales avaient déjà été prononcées une première fois (et dans certains cas violées) ont, quant à eux, fait parfois l'objet d'interdictions territoriales pour des durées de douze à dix-huit mois, et non pas systématiquement pour des durées de vingt-quatre mois.

25.         Dans le cas d'espèce, M. A______ ne conteste pas, sur le principe, la mesure litigieuse, tout en se réservant la possibilité d'en demander la levée en fonction de l'issue de la procédure pénale P/1______ actuellement en cours. Il conteste en revanche cette mesure sous l'angle de la proportionnalité et plus spécifiquement de sa durée, qu'il considère comme excessive.

26.         En ce qui le concerne, il a fait l'objet jusqu'ici d'une seule condamnation pénale en Suisse, pour faux dans les certificats et infractions contre la LEI. Certes, deux autres procédures pénales sont en cours, mais seuls l'une d'entre elles concerne une infraction contre la LStup et il ressort du rapport de police auquel se rattache cette procédure que la police elle-même considère, sur la base d'images de vidéosurveillance, que M. A______ est hors de cause en matière de trafic de stupéfiants. Par conséquent, l'ensemble des circonstances du dossier permet de comparer la situation de M. A______ aux cas de très peu de gravité traités par la jurisprudence rappelée plus haut, qui ont régulièrement fait l'objet d'interdictions territoriales fixées par l'autorité intimée à six mois.

27.         Afin de permettre une plus grande prévisibilité de la pratique administrative et de la jurisprudence, et afin de favoriser une gradation de la sévérité des mesures en fonction de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, par application du principe de la proportionnalité, le tribunal ramènera en l'occurrence la durée de la mesure d'interdiction territoriale à six mois.

28.         L'opposition est ainsi partiellement admise.

29.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

30.         Un éventuel recours déposé contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif (art. 10 al. 1 LaLEtr).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable l'opposition formée le 12 décembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 8 décembre 2023 pour une durée de dix-huit mois ;

2.             l'admet partiellement ;

3.             confirme la décision d’interdiction de pénétrer dans une région déterminée prise par le commissaire de police le 8 décembre 2023 à l'encontre de Monsieur A______, mais la réduit à une durée de six mois ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les dix jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant ;

5.             dit qu’un éventuel recours contre le présent jugement n'aura pas d'effet suspensif.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève,

 

La greffière