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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1704/2012

ATA/868/2014 du 11.11.2014 sur JTAPI/1287/2012 ( LDTR ) , REJETE

Recours TF déposé le 30.12.2014, rendu le 10.08.2015, ADMIS, 1C_1/2015
Parties : Z GESTION S.A. / DEPARTEMENT DE L'URBANISME
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1704/2012-LDTR ATA/868/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 novembre 2014

 

dans la cause

 

Z GESTION SA
représentée par Régie Zimmermann SA

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L’ÉNERGIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 octobre 2012 (JTAPI/1287/2012)

 


EN FAIT

1) En 1966 a été construit un immeuble de six étages plus un attique, et sis sur la parcelle no 2’683, feuille 73, de la commune de Genève, section Plainpalais, chemin des Crêts-de-Champel 5, 1206 Genève.

2) Le 23 août 1983, un géomètre officiel a dressé le cahier de répartition des locaux de la propriété par étages (ci-après : PPE) de cet immeuble, alors propriété de la société immobilière Champel-Élysée C. Ledit cahier (n° de mutation 127/83) mentionnait que le 6ème étage comportait deux appartements de quatre pièces, chacun de 106,70 m2 et avec un balcon. Ledit cahier de répartition était visé par le registre foncier (ci-après : le RF), le cadastre et la centrale des autorisations de construire.

En annexe, le plan de répartition des locaux correspondant à cet étage indiquait également deux appartements sous les lots nos 9.01 et 9.02, le n° 9.03 correspondant quant à lui à l’escalier et à la partie de l’étage extérieure à l’appartement.

3) Le 12 février 1985 Madame Jacqueline LECOULTRE, agissant au nom et pour le compte de la société immobilière Champel-Élysée C, a visé ne varietur le cahier de répartition des locaux susmentionné, devant notaire.

4) Le 21 février 1985, le notaire mandaté par la société immobilière Champel-Élysée C a déposé au RF une réquisition d’inscription de mise en PPE de l’immeuble concerné. Cette réquisition indiquait notamment que deux appartements de quatre pièces avec balcon se trouvaient au 6ème étage, sous les lots nos 9.01 et 9.02 (feuillets nos 12 et 13).

5) Selon un relevé de loyers établi informatiquement par la régie Rodolphe Burger SA, le 6ème étage de l’immeuble du chemin des Crêts-de-Champel 5 était occupé au 30 décembre 1988 par un appartement de huit pièces, dont le locataire était Monsieur Carlo ZACCHIA.

6) À teneur d’un état locatif au 24 novembre 2003 établi par la régie Rosset & Cie, Monsieur Jean-François FERT (« sous gérance leg. DJPS ») était propriétaire de l’immeuble en question, notamment d’un appartement de huit pièces au
6ème étage, habité par le locataire Firas BADRA.

7) Sur mandat de l’office des poursuites, l’atelier d’architecture Patrick Jeannerat a établi le 5 décembre 2003 une expertise dudit immeuble, dont la valeur de gage a été chiffrée à CHF 4'285'000.-. Les lots nos 9.01 et 9.02, réunis l’un à l’autre, avaient chacun une valeur de gage de CHF 323'517.50.

8) Le 27 juin 2005, dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage contre M. FERT, Floresa SA - ayant pour buts l’achat, la vente, la construction et la gérance d'immeubles ainsi que les conseils en investissements immobiliers, et pour administrateur Monsieur Pierre Alain ZIMMERMANN -, Montrose Properties SA - ayant pour buts le commerce, la construction et l’exploitation de tous immeubles ainsi que toutes prises de participation - et Monsieur Lorenzo VITALI ont acquis aux enchères la parcelle n° 2’683, sise au chemin des Crêts-de-Champel 5, pour le prix de CHF 5’070’000.-.

Le transfert de propriété au RF a été effectué par l’office des poursuites en date du 8 août 2005, selon la lettre adressée le lendemain par celui-ci à la Régie Zimmermann SA, et l’adjudication précitée a été publiée dans la FAO du 19 août 2005.

9) Un nouveau cahier de répartition des locaux relatif à la PPE de l’immeuble érigé sur la parcelle n° 2’683 (dossier de mutation No 25/2005), remplaçant celui déposé au RF en 1985, a été établi le 22 novembre 2005 par un géomètre officiel, signé le 28 novembre 2005 et enregistré au RF le 22 décembre 2005.

Le plan et le tableau de répartition des locaux rectifiés prévoyaient désormais, pour le 6ème étage, un seul appartement de huit pièces d’une surface de 213 m2 avec balcon valant 142 ‰, sous lot n° 9.02, le n° 9.01 correspondant désormais à l’escalier et à la partie de l’étage extérieure à l’appartement.

10) Le 31 janvier 2006, cet appartement de huit pièces a été revendu, par Floresa SA, Montrose Properties SA et M. VITALI à Madame Dina BSEISU pour un montant de CHF 1'425'000.-.

11) Par décision du 4 décembre 2009, le département des constructions et des technologies de l’information, devenu le département de l’urbanisme, puis le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : le département), a donné une suite favorable à une demande définitive d’autorisation de construire portant sur la surélévation de deux étages en attique de l’immeuble précité, inscrite sous no DD 102781-5, déposée le 23 septembre 2009 par la PPE Crêts-de-Champel, représentée par la Régie Zimmermann SA.

12) En date du 17 février 2011, Z Gestion SA (ci-après : Z Gestion), qui est sise à Chêne-Bougeries (GE), dont les buts sont l’achat, la vente, la construction et la gérance d'immeubles ainsi que les conseils en investissements immobiliers, et dont M. ZIMMERMANN est l’actionnaire unique et était à cette époque un des administrateurs, est devenue propriétaire de l’appartement de huit pièces du 6ème étage susmentionné, pour la somme de CHF 2'450'000.-.

13) Le 27 mars 2012, le département a écrit à Z Gestion que, suite au dépôt de la demande d’autorisation de construire précitée et après vérification sur place, il avait constaté que l’appartement propriété de Z Gestion résultait de la réunion de deux appartements, soit les lots nos 9.01 et 9.02. Une telle réunion en un seul logement n’était autorisable que si elle était destinée au propriétaire ayant l’intention de l’occuper au titre d’habitation principale.

Le département n’ayant été saisi d’aucune requête en autorisation concernant la réunion litigieuse, Z Gestion devait lui fournir, dans un délai de quinze jours dès réception dudit courrier, toutes les explications utiles, précisant que « toutes mesures et/ou sanction restaient réservées ».

14) Par courrier du 5 avril 2012 de sa mandataire la Régie Zimmermann SA, Z Gestion a répondu au département qu’elle n’avait pas procédé à la réunification des lots nos 9.01 et 9.02. Cette société avait acquis l’appartement en question en un seul lot, le no 9.02. Depuis plus de vingt-cinq ans, il n’y avait qu’un appartement de huit pièces au 6ème étage de l’immeuble en cause.

15) Par décision du 7 mai 2012, la situation constituant une infraction aux art. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) et 1 à 4 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20), le département a ordonné à Z Gestion de rétablir une situation conforme au droit en procédant à la remise en état des deux appartements de quatre pièces situés au 6ème étage de l’immeuble. Toutefois, compte tenu des circonstances, cette remise en état serait effectuée au plus tard au départ du locataire actuel. Cette mesure ferait l’objet de l’inscription d’une restriction du droit de propriété, par voie de mention, au RF conformément à l’art. 153 LCI.

Lors de la mise en PPE de l’immeuble concerné en février 1985, il y avait deux logements de quatre pièces au 6ème étage, soit les lots nos 9.01 et 9.02, comme mentionné sur le cahier de répartition des locaux enregistré au RF. Or, le département n’avait été saisi d’aucune requête en autorisation pour la réunion de ces deux appartements.

16) Le 1er juin 2012, Z Gestion, représentée par la Régie Zimmermann SA, a interjeté recours contre la décision précitée auprès du TAPI, concluant principalement à son annulation. Préalablement, elle demandait au département de produire le cahier de répartition des locaux de l’immeuble en cause ainsi que l’ouverture des enquêtes, afin notamment d’entendre M. FERT.

Le 6ème étage de l’immeuble concerné n’avait jamais distribué deux appartements de quatre pièces mais uniquement un appartement de huit pièces. Le cahier PPE de février 1985, réalisé dans la hâte et incomplet, était erroné et incomplet, puisqu’il ne mentionnait qu’un appartement de huit pièces, celui du 3ème étage et non celui du 6ème étage. Il n’y avait jamais eu de transformation ou de modification, notamment de l’architecture et/ou du volume de l’appartement en question. Le nouveau cahier de répartition des locaux relatif à la PPE établi le
22 novembre 2005 avait « [rectifié] l’erreur de typologie du 6ème étage ».

En outre, le perturbateur n’était pas Z Gestion qui avait acquis cet appartement de huit pièces de bonne foi, en 2011. L’immeuble du chemin des Crêts-de-Champel 5 avait été construit dans les années 1960 et sa typologie n’avait été connue qu’au début des années 1980, suite à son acquisition par
M. FERT. Le département n’était jamais intervenu et sa demande de remise en état du 7 mai 2012 était prescrite par la prescription trentenaire du droit administratif.

Par ailleurs, le département n’avait pas prouvé la réunification litigieuse, l’ancien cahier PPE de 1985 étant erroné et ayant été remplacé par un nouveau datant de 2005. S’il y avait eu réunification de deux appartements de quatre pièces, celle-ci devait avoir eu lieu au plus tard à la fin des années 1970, soit avant l’entrée en vigueur de la LCI et de la LDTR.

La décision contestée violait le principe de la bonne foi puisque, en 2003, l’office des poursuites avait mandaté l’atelier d’architecture Patrik Jeannerat pour effectuer une expertise de l’immeuble concerné, avant sa mise aux enchères le 27 juin 2005. Or, ladite expertise datée du 5 décembre 2003 mentionnait que le 6ème étage distribuait deux appartements de quatre pièces formant un appartement de huit pièces avec balcon. Le département n’avait alors pas exigé le rétablissement de la situation conforme au droit. Suite à la vente aux enchères précitée, les erreurs du cahier PPE de 1985 avaient été rectifiées et l’appartement de huit pièces en question avait été inscrit au RF à la fin de l’année 2005, sans que son conservateur ne s’y oppose ou dénonce la situation au département. Ce dernier avait ainsi toléré et accepté la situation litigieuse. La recourante réservait, le cas échéant, ses droits à l’encontre de l’État de Genève pour le préjudice subi.

Le principe de la proportionnalité était également violé, car la remise en état de deux appartements de quatre pièces, en lieu et place de celui existant de huit pièces, entraînerait des frais démesurés.

La décision querellée était enfin contraire au principe de la sécurité du droit, Z Gestion s’étant fiée de bonne foi à l’inscription au RF, au moment d’acquérir l’appartement en cause.

17) Le 6 août 2012, le département a conclu au rejet du recours.

À l’origine, deux appartements de quatre pièces, d’une surface de 106,70 m2 chacun, avaient été édifiés au 6ème étage du bâtiment en cause. Les inscriptions au RF ne pouvaient pas être remises en question.

Par ailleurs, l’audition de M. FERT n’était pas pertinente, vu qu’il n’était pas propriétaire de l’appartement concerné au moment de la transformation en PPE de l’immeuble sis au chemin Crêts-de-Champel 5.

La recourante n’établissait pas que les logements réunis étaient destinés à son actionnaire majoritaire ou à son épouse. La réunion des deux lots nos 9.01 et 9.02 ne pouvait ainsi pas être autorisée. La recourante ne démontrait pas non plus que la réunion d’appartements précitée était autorisable au moment où elle était intervenue, ni qu’elle pouvait être mise au bénéfice de la prescription acquisitive de trente ans. En effet, la date de la transformation en cause était inconnue des parties à la procédure.

Même s’il n’était pas possible de déterminer si Z Gestion était à l’origine ou non des travaux de transformation litigieux, elle devait être considérée comme étant le perturbateur par situation, en sa qualité de propriétaire du logement en question. L’ordre de remise en l’état lui avait donc été justement signifié.

La réunion de logements reprochée à la recourante n’avait jamais été connue du département. L’office des poursuites et celui du RF étaient intervenus pour différentes raisons indépendantes de l’objet du litige. La réunion incriminée devait avoir été autorisée moyennant le respect de conditions strictes. L’appartement de huit pièces en cause étant destiné à la location, le département se devait de requérir sa remise en état originelle, soit en deux logements de quatre pièces. Le département avait d’ailleurs fait preuve de compréhension en octroyant à la recourante un délai correspondant au départ du locataire en place pour effectuer les transformations nécessaires au rétablissement de l’état antérieur.

18) Le 9 octobre 2012, le TAPI a procédé à un transport sur place dans l’appartement de huit pièces visé par la présente procédure, qui était alors en travaux.

Il y avait deux portes palières, deux très grandes pièces reliées avec une cuisine dans l’une des deux. Il était possible de faire le tour de l’appartement en question. La barrière du balcon avait été coupée en son milieu « d’une façon identique avec les autres balcons des autres appartements ». Des planches de bois y étaient entreposées sans que l’on puisse en déterminer la provenance. Sur le palier des 3ème et 6ème étages, il n’y avait qu’un seul compteur qui ne paraissait pas avoir été installé récemment. Le tribunal n’avait pas pu visiter un autre appartement de cet immeuble.

Le représentant de Z Gestion, Monsieur Diango SPIRONELLI, architecte, n’avait jamais visité l’appartement concerné lorsqu’il avait été acquis par sa mandante. Il ne savait pas dans quel état, ni dans quelle configuration il se trouvait alors. L’épouse de M. ZIMMERMANN y habitait. Cette dernière était en train de quitter cet appartement, car l’immeuble allait être surélevé. Elle avait prévu d’habiter dans l’appartement nouvellement créé suite à cette surélévation. Le représentant précité ignorait toutefois si elle allait emménager au 6ème, au 7ème ou au 8ème étage à la fin des travaux. Un duplex comprenant les 8ème et 9ème étages et un « simplex » au 8ème devaient être construits. Il ne savait pas non plus ce qui allait advenir de l’appartement du 6ème étage si l’épouse de M. ZIMMERMANN ne revenait pas y habiter.

Les représentants du département se sont référés à un courrier de
M. SPIRONELLI du 27 juillet 2012 et à un courriel de son collaborateur du 3 août 2012, à teneur desquels la famille de l’épouse de M. ZIMMERMANN allait occuper les appartements des 8ème et 9ème étages. Par ailleurs, les propriétaires des deux appartements réunis du 3ème étage avaient déposé une demande d’autorisation de réunification en bonne et due forme. Elle avait été autorisée à l’interne par le département, selon préavis LDTR du 1er octobre 2012, et allait être notifiée prochainement. Les propriétaires habitaient ces deux logements du
3ème étage.

19) Par jugement du 29 octobre 2012, le TAPI a rejeté le recours de Z Gestion.

En tant que propriétaire de l’appartement en question, la recourante était la perturbatrice par situation. Le département ne lui avait donné aucune information ou assurance ayant pu créer chez elle des expectatives empêchant de lui demander la remise en état par application du principe de la bonne foi.

Le palier du 6ème étage de l’immeuble en cause avait compris deux appartements de quatre pièces, comme cela était encore le cas à d’autres étages et comme l’attestaient certains documents produits. La thèse d’une erreur d’enregistrement du cahier de PPE au RF en 1985 était infondée. Cette année-là, deux appartements de quatre pièces existaient encore au 6ème étage, de sorte que le délai de trente ans de la prescription acquisitive n’était pas atteint. En outre, la réunion de deux appartements de quatre pièces en un seul de huit pièces devait avoir été préalablement autorisée, conformément à l’art. 9 LDTR, ce qui n’avait pas été le cas.

Vu la pénurie de logements de une à sept pièces y compris, l’intérêt public au rétablissement de deux appartements de quatre pièces devait l’emporter sur l’intérêt privé de Z Gestion au maintien d’un seul appartement de huit pièces.

Enfin, la remise en état exigée n’engendrerait que des travaux d’élévation de deux cloisons et l’aménagement d’une cuisine dans un des appartements, entraînant peu de frais. Le montant des frais avancé par Z Gestion, de l’ordre de CHF 200'000.-, était trop élevé et étayé par aucune pièce. De même, aucune autre mesure moins incisive que la remise en état ne pouvait être prononcée, si bien que la décision du département respectait le principe de la proportionnalité.

20) Par acte du 7 novembre 2012, Z Gestion, représentée par la Régie Zimmermann SA et reprenant les griefs de son recours devant le TAPI, a recouru contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant principalement à son annulation. Elle sollicitait, préalablement, l’ouverture des enquêtes et notamment l’audition de M. FERT, ainsi qu’un délai raisonnable pour produire une liste de témoins. Elle concluait, principalement, à ce qu’il soit dit que le 6ème étage de l’immeuble sis chemin des Crêts-de-Champel 5 distribuait un appartement de huit pièces, que la remise en état des deux appartements de quatre pièces ne pouvait être ordonnée, ni à ce jour, ni à la sortie du locataire, ni à tout autre moment futur, et que l’inscription de la mention ordonnée au sens de l’art. 153 LCI était sans objet, et à ce qu’il soit confirmé qu’aucune infraction à la LDTR ou à LCI n’avait été commise par Z Gestion. Si, par impossible, la chambre administrative devait considérer que la situation actuelle était le résultat de travaux illicites, la recourante concluait à la condamnation du département à remplacer sa décision de remise en état en deux appartements de quatre pièces et à ordonner à la recourante de déposer une demande d’autorisation de construire relative à la réunification concernée, ainsi qu’à la suppression de l’ordre d’inscription d’une restriction du droit de propriété, par voie de mention du département, au RF, jusqu’à décision rendue dans le cadre de la demande d’autorisation de construire précitée. Subsidiairement, Z Gestion réclamait la condamnation du département « au paiement des frais et dépens de la première et deuxième instance », devant comprendre une équitable indemnité valant participation aux honoraires de la Régie Zimmermann SA. Encore plus subsidiairement, Z Gestion requérait le renvoi de la cause au TAPI ou directement au département, pour nouvelle décision dans le sens des considérants de l’arrêt rendu par la chambre administrative.

Le principe du droit d’être entendu avait été violé, car le TAPI n’avait pas procédé à l’audition de M. FERT, propriétaire de l’immeuble en cause ou de l’appartement concerné au début des années 1980. Celui-ci connaissait le propriétaire antérieur de l’appartement précité et pouvait certainement confirmer si ce logement comprenait déjà huit pièces avant 1980. Il aurait ainsi permis de prouver l’erreur d’enregistrement au RF du cahier PPE commise en 1985.

Le 6ème étage de l’immeuble en cause n’avait pas été modifié ou transformé et n’avait jamais desservi deux appartements de quatre pièces, mais uniquement un de huit pièces. Il n’y avait d’ailleurs qu’un seul compteur sur le palier. Le TAPI n’avait pas non plus constaté que cet appartement avait la configuration de deux logements de quatre pièces. Celui-ci avait une disposition homogène pour un huit pièces. Le fait qu’il y avait deux portes palières ne permettait pas de conclure qu’il y avait, à l’origine, deux appartements. Il n’y avait donc pas eu de réunification.

En outre, le principe de proportionnalité avait été violé. L’appartement en question comportait huit pièces et celui-ci était loué dans cette configuration depuis plus de trente ans. Il ne pouvait donc pas être compris dans les catégories d’appartements pour lesquels il existait une pénurie. Par ailleurs, l’obligation de remise en état causerait à Z Gestion un important préjudice qu’elle estimait à CHF 1'403'661.- (somme de la perte d’environ CHF 1'102'000.- résultant de la soustraction de la valeur du bloc des deux appartements par rapport au prix d’achat, du coût de réfection des parquets et de la peinture de CHF 101'661.- et des frais de remise en état évalués à CHF 200'000.-). Cette estimation du coût des travaux relevait du fait notoire et ne devait pas être démontrée. De plus, la remise en état étant conditionnée à la fin du bail en cours, elle ne pouvait être envisagée qu’à très long terme, puisque l’appartement de huit pièces concerné était offert en location à un proche de l’actionnaire de Z Gestion.

Le principe de la sécurité du droit avait également été enfreint, car le logement en question était répertorié au RF en tant qu’appartement de huit pièces.

Quant au fardeau de la preuve, le département n’avait pas démontré qu’il y avait eu réunification de deux appartements au 6ème étage de l’immeuble en cause, encore moins à quel moment elle avait eu lieu. Si de tels travaux avaient été effectués, ils devaient dater de plus de trente ans et étaient ainsi couverts par la prescription.

Enfin, si la réunion actuelle devait être considérée comme illicite, la conséquence ne pourrait être que l’obligation de la recourante de déposer une requête en autorisation de construire pour la réunification de deux appartements de quatre pièces en un seul appartement de huit pièces. En effet, Z Gestion utilisait l’appartement concerné pour son propre besoin, à savoir celui de la famille de son administrateur et actionnaire unique. Par conséquent, le département devait autoriser une telle réunification.

21) Le 13 décembre 2012, le département a conclu au rejet du recours précité.

M. FERT n’était pas propriétaire de l’immeuble en cause en 1985, de sorte que son témoignage n’apparaissait pas pertinent. La recourante pouvait également produire une déclaration écrite de celui-ci.

L’affirmation de Z Gestion selon laquelle l’appartement litigieux avait toujours compté huit pièces ne reposait sur aucun moyen de preuve. Il ressortait du cahier PPE de février 1985, mais aussi de l’expertise immobilière qu’elle avait produite, que le 6ème étage de l’immeuble comprenait deux appartements de quatre pièces. Cela avait été constaté par les juges du TAPI lors du transport sur place.

Au vu des pièces du dossier, la réunification des deux appartements précités devait avoir eu lieu après 1985, de sorte que le délai de trente ans n’était pas échu. En outre, aucune assurance sur la légalité de la réunification litigieuse n’avait été donnée à la recourante.

Le coût des travaux de remise en état du logement en question, évalué par la recourante à CHF 200'000.-, n’était pas déterminant au regard du principe de la proportionnalité. En effet, celle-ci n’avait pas démontré en quoi cette charge lui serait économiquement insupportable.

22) Le 31 janvier 2013, Z Gestion a persisté dans les conclusions de son recours. Elle ajoutait cependant vouloir entendre, en plus de M. FERT, Messieurs Carlo et Francesco ZACCHIA.

Il était indispensable d’entendre M. Carlo ZACCHIA et son fils Francesco ZACCHIA qui avaient vécu dans l’appartement en cause dès 1976, afin qu’ils confirment que celui-ci comprenait déjà huit pièces et que, par conséquent, le cahier de répartition PPE enregistré au RF en 1985 était erroné. Il ne restait aucun document propre à démontrer cela.

Était néanmoins produit un courrier que Monsieur Francesco ZACCHIA avait adressé le 1er février 2013 à la mandataire de la recourante et indiquant que sa famille avait été locataire de l’appartement en cause de 1976 à 2002 et que ledit appartement était le seul au 6ème étage, avec deux portes d’entrée, et constitué de quatre chambres à coucher, deux salles de bain, deux WC, deux réduits, une cuisine, un salon et une salle à manger.

Même si effectivement M. FERT n’était pas propriétaire de l’appartement concerné au début des années 80, son audition était nécessaire, car il avait été propriétaire de l’immeuble et en connaissait bien l’historique.

23) Il ressort d’un échange de courriers échangés, entre le 21 octobre 2013 et le 19 janvier 2014, entre le juge délégué et M. Francesco ZACCHIA, domicilié à Barcelone (Espagne), que les questions relatives au contrat de bail de l’appartement du 6ème étage au chemin des Crêts-de-Champel 5 avaient été traitées par son père, M. Carlo ZACCHIA, et que ce dernier, désormais domicilié à Rome (Italie), était atteint de démence sénile depuis environ deux ans et n’avait aucun souvenir relatif à ce contrat de bail. M. Francesco ZACCHIA, lorsqu’il s’était rendu à Rome, n’avait pas trouvé le contrat de bail précité.

Il a néanmoins adressé à la chambre administrative la copie d’une lettre du 18 novembre 2002 de l’agence immobilière Gerald Rosset qui informait son père, M. Carlo ZACCHIA, de la date de l’état de lieux de sortie de l’appartement de huit pièces au 6ème étage, immeuble du chemin des Crêts-de-Champel 5, fixée au 13 décembre 2002.

24) Le 5 mai 2014 et à la demande du juge délégué, le RF a transmis à la chambre administrative l’entier de son dossier concernant les lots nos 9.01 et 9.02 de l’immeuble du chemin des Crêts-de-Champel 5.

Selon la « réquisition pour le registre foncier » signée le 21 décembre 2005, notamment par M. ZIMMERMANN, et enregistrée au RF le lendemain, Floresa SA et Montrose Properties SA, toutes deux représentées par M. ZIMMERMANN, ainsi que M. VITALI avaient fait établir un nouveau cahier de la PPE « afin d’adapter [celle-ci] suite aux modifications intervenues dans les appartements sis aux 3ème et 6ème étages » et convenaient de modifier le régime de la PPE inscrit au RF le 21 février 1985, en abrogeant le cahier de PPE n° 127/1983 et en le remplaçant par le nouveau cahier n° 25/2005, portant notamment « l’annulation des Feuillets nos 6, 7, 12 et 13 (NDR : texte en gras), soit la suppression de quatre appartements de quatre pièces pour créer deux appartements de huit pièces, (…) ».

25) Par lettre du 8 mai 2014, le juge délégué a imparti un délai au 11 juin 2014 aux parties pour formuler d'éventuelles observations au sujet de ces documents et notamment s'exprimer sur les faits et les éventuelles conséquences qui pourraient en être tirées relatifs aux questions suivantes : l'application de l'art. 17 du règlement d’application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 29 avril 1996 (RDTR - L 5 20.01) ; la signature de Monsieur Pierre ZIMMERMANN, administrateur président de la recourante Z Gestion SA, à la fin de la réquisition au registre foncier du
21 décembre 2005, qui portait notamment sur la suppression de quatre appartements de quatre pièces et leur remplacement par deux appartements de huit pièces ; le fait que M. ZIMMERMANN était à cette époque administrateur-président de Floresa SA, alors propriétaire de l'immeuble en cause.

26) Dans ses observations du 6 juin 2014, le département a relevé que Z Gestion n’avait pas produit en procédure la réquisition du 21 décembre 2005, mais seulement le cahier de répartition des locaux du 28 novembre 2005. Il était donc indubitable que non seulement l’appartement litigieux résultait d’une réunification qui avait eu lieu il y avait moins de trente ans, mais surtout que la recourante avait prêché, de manière intentionnelle, le faux, ce qui pourrait justifier une application de l’art. 88 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

Par ailleurs, l’art. 17 RDTR n’apparaissait pas avoir été appliqué dans le cas particulier, ce qui n’était toutefois pas de nature à influencer le sort du litige.

27) Dans ses observations du 10 juin 2014, Z Gestion a persisté intégralement dans ses conclusions et son argumentation, maintenant en outre sa requête d’entendre M. FERT et M. Francesco ZACCHIA.

Les faits que M. ZIMMERMANN était, à l’époque de la réquisition du
21 décembre 2005, administrateur de Floresa SA et que Z Gestion ait acquis l’appartement litigieux de huit pièces, après que celui-ci ait appartenu pendant environ cinq ans à Mme BSEISU, ne permettaient aucunement de conclure qu’il ait été de mauvaise foi ou ait eu un comportement contraire au droit.

L’art. 17 RDTR ne trouvait aucunement application in casu, cette disposition règlementaire n’imposant des obligations qu’au RF.

28) Z Gestion s’est déterminée le 20 juin 2014 sur les observations du département en considérant que la position de ce dernier était insoutenable et relevait de la mauvaise foi, tandis que l’intimé a, le 3 juillet 2014, renoncé à émettre des observations complémentaires.

29) Par lettre du 7 juillet 2014, le juge délégué a informé les parties de ce qu’il n’entendait pas procéder à des mesures d’instruction complémentaires et que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2) La recourante sollicite l’audition à titre de témoins de M. Francesco ZACCHIA, dont la famille aurait vécu dans l’appartement litigieux dès 1976, ainsi que de M. FERT, ancien propriétaire de l’immeuble en cause. Il fait de plus valoir que le TAPI a violé son droit d’être entendu en n’auditionnant pas
M. FERT.

a. Tel que garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui n’a pas de portée différente dans ce contexte, le droit d’être entendu comprend, notamment, le droit pour l’intéressé de prendre connaissance du dossier, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 ; 136 I 265 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_123/2013 du 10 juin 2013 consid. 1.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas l’autorité de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_799/2011 du 20 juin 2012 consid. 6.1 ; 4A_108/2012 du 11 juin 2012 consid. 3.2 ; 2D_2/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3 ; ATA/249/2013 du 10 décembre 2013 ; ATA/404/2012 du 26 juin 2012).

b. En l’occurrence, le TAPI n'a pas violé le droit d'être entendu de la recourante en ne procédant pas à l'audition de M. FERT et la chambre de céans renoncera également à entendre M. FERT ainsi que MM. Carlo et Francesco ZACCHIA, dès lors que de tels actes d'instruction ne seraient pas de nature à influer sur l'issue du litige, comme cela ressortira de l’examen ci-après.

3) La LDTR, dont l’application au présent cas n’est pas contestée ni contestable, a pour but de préserver l'habitat et les conditions de vie existants ainsi que le caractère actuel de l'habitat dans les zones visées expressément par la loi (art. 1 al. 1 LDTR). La loi prévoit notamment à cet effet, tout en assurant la protection des locataires et des propriétaires d'appartements, des restrictions à la démolition, à la transformation et au changement d'affectation des maisons d'habitation (art. 1 al. 2 let. a LDTR). Plus spécifiquement, la LDTR vise à éviter la disparition à long terme de logements à usage locatif (arrêt du Tribunal fédéral 1P.406/2005 du 9 janvier 2006 consid. 3).

4) a. Conformément à l’art. 1 LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment modifier même partiellement le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (al. 1 let. b) ; dès que les conditions légales sont réunies, le département - auquel les demandes d’autorisation sont adressées (art. 2 al. 1 LCI) - est tenu de délivrer l'autorisation de construire (al. 5) ; aucun travail ne doit être entrepris avant que l’autorisation ait été délivrée ; si les travaux portent sur une démolition, ils ne peuvent commencer avant l’entrée en force de l’autorisation s’y rapportant (al. 6).

b. Aux termes de l'art. 9 al. 1 LDTR, une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation au sens de l’art. 3 al. 1, soit notamment pour tous travaux ayant pour objet de modifier l’architecture, le volume, l’implantation, la destination, la distribution intérieure de tout ou partie d’une maison d’habitation (art. 3 al. 1 let. a LDTR) ; l’autorisation est accordée lorsque l’état du bâtiment comporte un danger pour la sécurité et la santé de ses habitants ou des tiers
(let. a) ; lorsque la réalisation d’opérations d’aménagement ou d’assainissement d’intérêt public le commande (let. b) ; lorsque les travaux permettent la réalisation de logements supplémentaires (let. c) ; lorsque les travaux répondent à une nécessité ou qu’ils contribuent au maintien ou au développement du commerce et de l’artisanat, si celui-ci est souhaitable et compatible avec les conditions de vie du quartier (let. d) ; pour les travaux de rénovation (let. e).

À teneur de l'art. 9 al. 2 LDTR, le département accorde l’autorisation si les logements transformés répondent, quant à leur genre, leur loyer ou leur prix, aux besoins prépondérants de la population.

c. Dans sa jurisprudence rendue au sujet de l'art. 9 LDTR, la chambre de céans a considéré à de nombreuses reprises qu'il convenait de refuser une autorisation de réunion d'appartements du fait que celle-ci soustrayait du marché locatif un ou plusieurs appartements de une à sept pièces (ATA/437/2014 du 17 juin 2014 consid. 6a ; ATA/695/2012 du 16 octobre 2012 ; ATA/270/2012 du 8 mai 2012 ; ATA/362/2005 du 24 mai 2005, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1P.406/2005 précité ; ATA/72/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/789/2003 du 28 octobre 2003 ; ATA/700/2000 du 14 novembre 2000). Le TAPI a jugé que le fait que la réunion se faisait dans l'intérêt exclusif du locataire ne changeait pas la situation (JTAPI/1166/2013 du 29 octobre 2013).

Dans d'autres cas anciens, la réunion d'appartements a en revanche été admise (ATA/966/2004 du 14 décembre 2004, recours admis dans la mesure où il n'y avait pas de soustraction aux besoins prépondérants de la population, et où une remise en état, malgré une violation caractérisée de la législation en matière de constructions et de logement, n'avait plus de sens ; ATA/750/2002 du 3 décembre 2002, dans lequel l'addition de deux pièces provenant d'un local commercial à un appartement de deux pièces revenait à mettre sur le marché locatif, à terme, davantage de surface locative).

5) En l'espèce, la réunion des deux appartements en cause, constitués initialement de quatre pièces chacun, a soustrait pour une durée indéterminée un appartement au marché locatif et, le cas échéant, deux appartements aux besoins prépondérants de la population. Ces appartements, comprenant entre une et sept pièces, souffraient de surcroît, à tout le moins depuis 2003, de la pénurie (art. 1
al. 1 de l'arrêté déterminant les catégories d’appartements où sévit la pénurie en vue de l’application des art. 25 à 39 LDTR - ArAppart - L 5 20.03, par renvoi de l’art. 11 RDTR).

Cette réunion est - et était - soumise à autorisation du département dans le cadre de l’application de la LDTR, laquelle est entrée en vigueur le 23 mars 1996. Or la recourante n’a pas daigné déposer une demande d’autorisation de réunion des deux appartements, même après l’ordre de remise en état.

Au demeurant, en l'absence d'un motif énoncé à l’art. 9 al. 1 LDTR permettant l'octroi d'une autorisation, la transformation effectuée aurait été probablement refusée.

6) a. À teneur de l’art. 44 al. 1 LDTR, celui qui contrevient aux dispositions de cette loi est passible des mesures et des sanctions administratives prévues par les art. 129 à 139 LCI, et des peines plus élevées prévues par le code pénal.

L’art. 129 let. e LCI prévoit que, dans les limites des dispositions de
l’art. 130 LCI, le département peut notamment ordonner, à l’égard des constructions, des installations ou d’autres choses, la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition.

Selon l’art. 130 LCI, les mesures précitées peuvent être ordonnées par le département lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux prescriptions de la présente loi, des règlements qu’elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires.

b. De jurisprudence constante (ATF 111 Ib 221 consid 6 ; ATA/700/2014 du
2 septembre 2014 consid. 3b ; ATA/558/2013 du 27 août 2013 consid. 14b ; ATA/488/2011 du 27 juillet 2011 ; ATA/625/2009 du 1er décembre 2009), pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter les conditions suivantes :

-                 l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur (ATF 114 Ib 44 ; ATF 107 Ia 23) ;

-                 les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation (ATF 104 Ib 304 ; ATA/83/2009 du 17 février 2009) ;

-                 un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux (ATF 107 Ia 121 = JdT 1983 I 299) ;

-                 l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, par des promesses, des informations, des assurances ou un comportement, des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi (ATF 117 Ia 287
consid. 2b ; ATA/83/2009 précité ; Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., 1991, n. 509 p. 108) ;

-                 l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/152/2010 du 9 mars 2010 ; ATA/887/2004 du 16 novembre 2004).

7) a. Les mesures nécessaires à éliminer une situation contraire au droit doivent être dirigées contre le perturbateur. Selon la jurisprudence, le perturbateur est celui qui a occasionné un dommage ou un danger par lui-même ou par le comportement d’un tiers relevant de sa responsabilité (perturbateur par comportement), mais aussi celui qui exerce sur l’objet qui a provoqué une telle situation un pouvoir de fait ou de droit (perturbateur par situation ; ATF 139 II 185 consid. 14.3.2 ; 136 I 1 consid. 4.4.3 ; 122 II 65 consid. 6a ; ATA/83/2014 du 12 février 2014 consid. 9 ; ATA/179/2006 du 28 mars 2006). À cet égard, en matière de police des constructions, l'acquéreur d'un fonds entre en possession de celui-ci avec les droits et obligations qui lui sont rattachés (arrêt du Tribunal fédéral 1C_24/2012 du 19 avril 2012 ; cf. aussi ATF 99 Ib 392 consid. 2b).

b. En l’occurrence, la recourante est propriétaire de l’appartement en question depuis le 17 février 2011 et doit être considérée comme la perturbatrice par situation, la situation non conforme au droit étant due à une cause préexistante à son acquisition.

8) a. S’agissant du droit applicable au moment de la réalisation des travaux litigieux, la chambre de céans est dans l'impossibilité de déterminer la date exacte de la réunion des deux appartements de quatre pièces en un seul de huit pièces.

b. La loi genevoise sur les constructions et installations diverses du 25 mars 1961 disposait, à son art. 1er, que sur tout le territoire du canton nul ne peut notamment modifier même partiellement la distribution ou la destination d'une construction sans y avoir été autorisé.

La loi genevoise du 17 octobre 1962 restreignant les démolitions et transformations de maisons d'habitation en raison de la pénurie de logements prévoyait également une autorisation pour démolir ou transformer une maison d'habitation. D'après son art. 1, aussi longtemps que sévissait la pénurie de logements, nul ne pouvait démolir ou faire démolir, en tout ou en partie, ni modifier ou faire modifier sensiblement la destination d'une maison d'habitation occupée ou inoccupée. À teneur de l’art. 3, le département, autorité compétente pour l’application de ladite loi (art. 2), pouvait cependant accorder des dérogations lorsqu'elles s'imposaient pour des motifs de sécurité ou de salubrité ou étaient justifiées par des motifs d'intérêt public ou d'intérêt général. Ces motifs étaient précisés aux art. 3 ss du règlement d’application de cette loi, adopté le 25 juin 1963.

Le 26 juin 1983, le corps électoral genevois a accepté en votation populaire la loi cantonale sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation. En son art. 5, cette loi disposait que, afin de préserver l'habitat existant et le caractère des zones urbaines, nul ne pouvait, sous réserve de l'art. 6, démolir ou transformer en tout ou en partie une maison d'habitation au sens de l'art. 2, occupée ou inoccupée, ni en changer l'affectation. L’art. 6 reprenait le texte même de l’art. 3 de la loi du 17 octobre 1962.

Ces dispositions légales ont été reprises aux art. 5 et 6 de la loi cantonale sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 22 juin 1989, qui est restée en vigueur jusqu’au 23 mars 1996, date de l’entrée en vigueur de la LDTR.

c. L’immeuble en cause a été construit en 1966. Le propriétaire des appartements concernés était donc soumis à des règles restreignant les démolitions et transformations de maisons d'habitation en raison de la pénurie de logements et, plus particulièrement, à l’obligation de demander une autorisation pour toute transformation de ceux-ci.

La réunion litigieuse des deux appartements en un seul n’a pas fait l’objet d’une demande d’autorisation et n’a, partant, pas été autorisée. Elle n’était pas non plus autorisable, étant donné qu’elle ne reposait pas sur des motifs de sécurité ou de salubrité ou des motifs d'intérêt public ou d'intérêt général, tels que définis aux art. 3 ss du règlement d’application de la loi du 17 octobre 1962, à l’art. 6 al. 2 à 4 de la loi du 26 juin 1983, à l’art. 6 al. 1 à 5 de la loi du 22 juin 1989, puis à l’art. 9 al. 1 LDTR.

9) Il faut ensuite vérifier si le recourant peut se prévaloir de la garantie de la situation acquise pour s'opposer à l'ordre de remise en état des deux appartements de quatre pièces situés 6ème étage de l’immeuble précité, prononcé le 7 mai 2012.

a. Selon la jurisprudence, la compétence d'exiger la démolition d'une installation pour rétablir une situation conforme au droit est soumise en principe à un délai de péremption de trente ans, depuis la fin de l'exécution de la construction ou partie de construction non règlementaire (ATF 136 II 359 consid. 8 ; 132 II 21 consid. 6.3 ; 107 Ia 121 = JdT 1983 I 299). Exceptionnellement, cette compétence peut être exercée au-delà du délai en question si des motifs de police au sens strict imposent une telle mesure et, inversement, l'autorité peut en être déchue avant l'écoulement des trente ans lorsque le principe de la bonne foi le commande (ATF 132 II 21 consid. 6.3 ; arrêts du tribunal fédéral 1C_318/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1.2 et 1A.78/2005 du 19 janvier 2006 consid. 5.1).

Un ordre de démolition, respectivement d'évacuation, n'est de façon générale valable qu'en l'absence de tolérance de la part de l'autorité. Sont ainsi réservés les cas où l'autorité intervient avant l'expiration du délai de trente ans, mais où elle a toléré pendant des années les constructions ou parties de constructions non conformes, alors qu'elle les connaissait ou aurait pu les connaître en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances ; dans un tel cas, la protection de la bonne foi devrait au besoin être assurée (ATF 136 II 359 consid. 8.2 ; ATA/955/2004 du 7 décembre 2004 consid. 7 ; ATA/529/1999 du 7 septembre 1999).

La passivité de l'autorité qui n'intervient pas immédiatement à l'encontre d'une construction non autorisée n'est en règle générale pas constitutive d'une autorisation tacite ou d'une renonciation à faire respecter les dispositions transgressées. La tolérance des autorités n’est retenue que dans des circonstances exceptionnelles. Seul le fait que l'autorité aurait sciemment laissé le propriétaire construire de bonne foi l'ouvrage non réglementaire pourrait obliger cette autorité à tolérer ensuite l'ouvrage en question (ATA/700/2014 précité consid. 4c ; ATA/529/1999 du 7 septembre 1999 consid. 5a).

b. En l'espèce, le cahier de répartition des locaux de la PPE de l’immeuble, dressé par un géomètre officiel le 23 août 1983 et visé par le RF, le cadastre ainsi que la centrale des autorisations de construire - c’est-à-dire le département -, indique que le 6ème étage comportait deux appartements de quatre pièces. La réquisition d’inscription au RF de mise en PPE de l’immeuble concerné du
21 février 1985 reprend les indications contenues dans le cahier de répartition précité.

Aucun élément n’est propre à prouver la survenance d’une erreur lors de l’élaboration du cahier de répartition des locaux, ni lors de la réquisition au RF. Dans l’hypothèse où les informations de M. Francesco ZACCHIA selon lesquelles sa famille avait habité depuis 1976 au 6ème étage dans un appartement de huit pièces et non de quatre étaient exactes, il n’y aurait pas lieu d’en conclure que le cahier de répartition et le plan annexé de 1983 ainsi que la requête d’inscription de 1985 au RF seraient erronés sur ce point. En effet, vu son importance et le fait qu’il portait sur l’un des six étages ajoutés à l’attique de l’immeuble, ce point ne pouvait manifestement pas échapper à l’attention du géomètre officiel et de la propriétaire. Par surabondance, la « réquisition pour le registre foncier » du 21 décembre 2005 ne peut être comprise que comme faisant état de modifications intervenues dans les appartements de quatre pièces du
6ème étage après les inscriptions au RF du mois d’août 1983 et du 21 février 1985, et non d’une erreur à corriger.

Quoi qu’il en soit, à la connaissance du département, il existait deux appartements de quatre pièces, et non un seul de huit pièces. C’est cette seule connaissance, qui résulte des renseignements officiels fournis par la propriétaire de l’époque, qui doit être retenue, le département n’ayant aucunement la possibilité de se rendre compte que l’information dont il disposait aurait pu ne pas correspondre à la réalité.

c. Dès lors, l’intimé n’a pas toléré la réunion litigieuse d’appartements (cf. à ce sujet arrêt du Tribunal fédéral 1C_318/2013 précité consid. 4.3), mais il s’est fié aux propres renseignements et documents officiels de la propriétaire en 1983, dont la modification ne lui a pas été communiquée, sans qu’aucun élément de fait n’ait pu l’amener à remettre en doute ces informations, ce jusqu’au mois de mars 2012.

La recourante, qui doit se voir opposer les actes des précédents propriétaires, ne peut de bonne foi pas se prévaloir de faits - en l’occurrence la réunion litigieuse - en contradiction avec les informations fournies par ceux-ci à l’autorité compétente (ATF 132 II 21 consid. 6.3, à tout le moins par analogie).

Le délai de trente ans de la prescription acquisitive n’est donc pas échu actuellement, ni au jour du prononcé de la décision du département du 7 mai 2012.

10) La recourante fait ensuite valoir que l’expertise établie le 5 décembre 2003 par l’atelier d’architecture mentionnait que le 6ème étage comprenait deux appartements de quatre pièces formant un seul appartement de huit pièces. L’office des poursuites, respectivement l’État de Genève, auraient donc dû interpeller le département à ce sujet pour rétablir une situation conforme au droit avant la vente aux enchères du 27 juin 2005. En laissant perdurer cette situation, l’office précité, le RF et l’État de Genève l’auraient acceptée et validée. Le cahier PPE du 23 août 1983 avait d’ailleurs été modifié par la suite, à fin 2005, la « réquisition pour le registre foncier » rédigée le 21 décembre 2005 et enregistrée au RF le lendemain indiquant la suppression de deux appartements (feuillets
nos 12 et 13) au 6ème étage et leur remplacement par un appartement de huit pièces. La recourante aurait ainsi acquis de bonne foi cet appartement de huit pièces.

a. Aux termes de l'art. 5 al. 3 Cst., les organes de l'État et les particuliers doivent agir conformément aux règles de la bonne foi. Cela implique notamment qu'ils s'abstiennent d'adopter un comportement contradictoire ou abusif (ATF 136 I 254 consid. 5.2 ; 134 V 306 consid. 4.2) et leur impose un comportement loyal et digne de confiance dans les actes avec autrui. Ne peut toutefois prétendre à être traité conformément aux règles de la bonne foi que celui qui n’a pas lui-même violé ce principe de manière significative. On ne saurait ainsi admettre, dans le cas d’espèce, qu’il soit fait appel à un propre comportement déloyal et contradictoire (arrêt du Tribunal fédéral 2A.52/2003 du 23 janvier 2004 consid. 5.2, traduit in RDAF 2005 II 109 ss, spéc. 120 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 580).

b. Dans le cas présent, aucun renseignement ou engagement n’a été donné, respectivement pris par le département avant le prononcé de sa décision du 7 mai 2012 ordonnant à la recourante de rétablir une situation conforme au droit en procédant à la remise en état de deux appartements de quatre pièces au 6ème étage de l’immeuble en cause.

c. L’office des poursuites n’avait pas à requérir l’autorisation du département et respecter les règles de la LDTR. En effet, la réalisation répond à une exigence principale, à savoir l'obtention des conditions les plus avantageuses (art. 134 LP). L'office dispose certes, dans ce cadre, d'une certaine marge d'appréciation, mais celle-ci a uniquement pour but la recherche de la solution économiquement la plus avantageuse, permettant de retirer de la vente un prix le plus élevé possible, dans l'intérêt des créanciers et débiteurs. En dehors des exceptions - de droit fédéral -, l'office ne peut pas renoncer à la vente pour des motifs étrangers au droit de poursuite. En cela, la condition d'une autorisation préalable accordée par le département viole le droit fédéral. Une telle procédure pourrait retarder de manière inadmissible la réalisation forcée. Par ailleurs, l'éventuel refus de l'autorisation mettrait en échec la procédure de réalisation voire, dans le cas de la faillite, paralyserait indéfiniment la clôture de la procédure (ATF 128 I 206).

Ainsi, les conditions de la vente aux enchères du 27 juin 2005 ne sauraient avoir engagé le département intimé, celui-ci n'y ayant pas été partie et l'office ne disposant d'aucune compétence en la matière, cette dernière appartenant au seul département conformément à l’art. 4 LDTR (ATA/34/2014 du 21 janvier 2014 consid. 7b).

Au demeurant, l’expertise de l’atelier d’architecture ne se prononçait pas sur les aspects relevant de la LDTR et mentionnait d’ailleurs l’existence de deux lots - bien que réunis - au 6ème étage (nos 9.01 et 9.02).

d. En vertu de l’art. 17 RDTR, non modifié pour l’essentiel depuis fin 2005, toute réquisition à l'office du registre foncier et de la mensuration officielle de constitution d’une copropriété par étages ou de mutation d’une part de copropriété par étages déjà existante portant sur un appartement jusque-là offert en location doit être communiquée sans délai par l'office du registre foncier et de la mensuration officielle au département (al. 1) ; le conservateur du registre foncier écarte toute réquisition d’inscription d’une aliénation d’une part de copropriété par étages portant sur un appartement qui n’est pas assortie d’une autorisation du département au sens de l’art. 39 de la loi, ou d’une attestation du notaire établie conformément à l’art. 11 al. 2 du présent règlement (al. 2).

Pour des motifs que la chambre de céans ignore, le conservateur du RF n’a en l’occurrence pas fait application de l’art. 17 al. 1 RDTR.

Cela étant, le fait que la réunion litigieuse des deux appartements de quatre pièces en un seul ait été inscrite le 22 décembre 2005 au RF sans que le conservateur ne s’y oppose ou en informe l’intimé ne signifie nullement, dans les circonstances particulières du présent cas, que ce dernier a toléré ladite réunification. La réquisition en inscription de cette modification au RF n’exonérait en effet d’aucune manière les propriétaires à l’époque d’en demander préalablement l’autorisation à la seule autorité compétente, le département. Aucun renseignement officiel ni aucune circonstance particulière ne permettaient aux propriétaires de s’en croire dispensés. Par surabondance, lesdits propriétaires étaient actifs dans le domaine immobilier et pouvaient d’autant moins penser qu’une telle demande d’autorisation ne serait pas requise.

e. Selon la tendance récente, l'imputation à la personne morale de la connaissance de faits par l’un de ses organes doit intervenir seulement pour ce qui est connu de l'organe qui est au moins saisi de l'affaire, ou alors lorsque les informations acquises par un organe n'ont pas été transmises à un autre organe, en raison du défaut d'organisation de la société. Doivent également être pris en compte les contacts préalables qui avaient été noués par la société avec des tiers (arrêt du Tribunal fédéral 4C.335/1999 du 25 août 2000 consid. 5 ; Julia XOUDIS, in Pascal PICHONNAZ/Bénédict FOËX [éd.], Commentaire romand, Code civil I, 2010, n. 59 s. ad art. 54/55 CC). En outre, une personne morale dispose d’une connaissance d’un état de fait qui lui est opposable juridiquement si cette connaissance est accessible au sein de son organisation (arrêts du Tribunal fédéral 4A_112/2013 du 20 août 2013 consid. 2.4 et 5C.104/2001 du 21 août 2001 consid. 4c/bb ; ATF 109 I 338 = JdT 1984 I 301 ; Julia XOUDIS, op. cit., n. 59 s. ad art. 54/55 CC).

En l’espèce, l’actionnaire unique et administrateur-président de la recourante était, à la date de la requête du 21 décembre 2005 en réunion des deux appartements en un seul appartement, administrateur de l’une des sociétés propriétaires et requérantes, et a signé ladite requête.

La recourante ne saurait dès lors se prévaloir d’une quelconque manière d’une ignorance, au moment de son achat de la parcelle en cause le 17 février 2011, de ce qu’avant le 22 décembre 2005, le 6ème étage de l’immeuble était, selon les informations fournies par les propriétaires au RF et au département, composé de deux appartements de quatre pièces et de ce que leur réunion un seul appartement n’avait pas été autorisée par le département alors qu’elle aurait dû l’être.

f. Au vu de ce qui précède, la recourante n’est pas fondée à se prévaloir du principe de la bonne foi pour faire obstacle à la remise en état.

11) a. Selon la jurisprudence, l'ordre de démolir une construction édifiée sans droit et pour laquelle une autorisation ne peut être accordée n'est en soi pas contraire au principe de la proportionnalité. L'autorité renonce à une telle mesure si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage, si celui-ci pouvait de bonne foi se croire autorisé à construire ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit
(ATF 132 II 21 consid. 6 ; 123 II 248 consid. 3a/bb ; 111 Ib 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_114/2011 du 8 juin 2011 consid. 4.1 ; ATA/558/2013 précité consid. 14c). Même un constructeur qui n'est pas de bonne foi peut invoquer le principe de la proportionnalité. Toutefois, celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe plus de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ib 213 consid. 6b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_114/2011 précité consid. 4.1 ; ATA/558/2013 précité
consid. 14c ).

b. En l'espèce, l'intérêt public à prendre en compte est principalement celui lié au respect de la loi, qui a pour but la défense d'un intérêt public important, particulièrement au vu de la pénurie aiguë de logements (ATA/437/2014 du
17 juin 2014 consid. 8b), reconnu comme compatible avec la Cst. (ATF 116 Ia 401 consid. 4c).

Même dans les hypothèses où, comme avancé, par la recourante, les coûts de remise en état se monteraient à CHF 200'000.- (ce qui apparaît très élevé) et où la valeur des deux appartements serait inférieure de CHF 1'102'000.- à celle de l’appartement de huit pièces - ce qui peut demeurer indécis -, l’intérêt privé de celle-ci au maintien de ce seul appartement n’apparaît pas suffisant, au regard de la jurisprudence rappelée ci-dessus, et doit céder le pas à l’intérêt public à la préservation du parc locatif.

Il n’est notamment pas établi que le montant total des travaux de remise en état des lieux, même s’il devait s’élever à CHF 200'000.-, serait financièrement insupportable pour la recourante (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1P.595/2006 du
7 novembre 2006 consid. 3.2).

Il n’existe pas de mesure moins incisive que la remise en état, le département ayant de surcroît laissé au locataire actuel la faculté de rester dans l’appartement de huit pièces puisque l’ordre de remise prendrait effet au plus tard à son départ. Une invitation faite à la recourante de déposer une demande d’autorisation de réunion des deux appartements en question ne saurait, contrairement à ce qu’elle prétend, constituer une mesure, étant au demeurant relevé que rien ne l’empêchait de former une telle demande, même après la réception de la décision du 7 mai 2012.

Enfin, contrairement à ce qu’elle allègue, il n’est nullement démontré que la recourante utiliserait l’appartement actuel de huit pièces pour son propre besoin, à savoir pour celui de la famille de son administrateur et actionnaire unique. Il ressort au contraire des pièces et du procès-verbal de transport sur place de première instance que l’épouse de M. ZIMMERMANN et sa famille occuperont les deux futurs étages surélevés, également propriété de la recourante, rien ne permettant de penser que celles-ci auraient aussi besoin du 6ème étage. Aucune conséquence ne saurait dès lors et en tout état de cause résulter des allégations formulées sur ce point par la recourante.

c. La décision querellée respecte en conséquence le principe de la proportionnalité.

12) Au vu de ce qui précède, la décision de l’intimé du 7 mai 2012 ordonnant la remise en état étant en tous points conforme au droit, le recours, infondé, sera rejeté.

13) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2’000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 novembre 2012 par Z Gestion SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 octobre 2012 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2’000.- à la charge de Z Gestion SA ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Z Gestion SA représentée par Régie Zimmermann SA, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au département de l'aménagement, du logement et de l’énergie.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :