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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3131/2009

ATA/558/2014 du 17.07.2014 sur JTAPI/1266/2011 ( ICCIFD ) , REJETE

Recours TF déposé le 24.09.2014, rendu le 31.03.2015, IRRECEVABLE, 2C_863/14, 2C_864/2014
Descripteurs : FORMALISME EXCESSIF; TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE; PROCÉDURE DE TAXATION; TAXATION D'OFFICE; PROCÉDURE PÉNALE; REVENU D'UNE ACTIVITÉ LUCRATIVE DÉPENDANTE; ESTIMATION DU REVENU; ACTION PÉNALE; PRESCRIPTION
Normes : LIFD.131.al2 ; LIFD.153 ; LIFD.184 ; CP.333.al6.letb ; LHID.184.al2 ; aLCP.341A ; Cst.29.al1 ; Cst.127.al2
Résumé : Procédure en rappel d'impôt suite à une procédure pénale à l'encontre de l'intéressée ayant permis de révéler que celle-ci avait exercé de 2001 à 2006 une activité lucrative indépendante non déclarée. Dans le cadre de la procédure en rappel d'impôt objet du litige, l'AFC-GE était habilitée à procéder à une estimation des revenus de la contribuable, quand bien même cette taxation a été établie en procédure ordinaire et non en procédure de taxation d'office. En effet, la recourante n'a jamais fourni dans les délais impartis des informations claires et précises sur les revenus réalisés durant les périodes concernées. L'AFC a procédé à une estimation consciencieuse et non arbitraire des revenus de la recourante, dans la mesure des informations qu'elle détenait, et cela, sans violer le droit d'être entendu de la recourante et sans faire preuve de formalisme excessif à son égard.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3131/2009-ICCIFD ATA/558/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 17 juillet 2014

2ème section

dans la cause

 

 

Madame A______
représentée par Optima Management SA, mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 novembre 2011 (JTAPI/1266/2011)


EN FAIT

1) Le litige porte sur l’impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) pour les années fiscales 2001 à 2006.

2) Madame A______, anciennement B______ (ci-après : la contribuable), est contribuable à Genève. Elle a été mariée à Monsieur C______, dont elle a divorcé le 8 avril 2008.

Selon le registre cantonal du contrôle de l’habitant, son domicile officiel a été du 29 janvier 1996 au 1er mai 1998 à la rue D______ ______, puis jusqu’au 11 juillet 2013 à la rue de E______ ______. Depuis, elle est officiellement domiciliée à la rue du F______ ______, à Genève.

3) Dans ses déclarations fiscales 2001 et 2002, la contribuable a déclaré comme seule source de revenu des indemnités de chômage, et a fait état de comptes auprès des banques G______ et H______ (ci-après : H______). De 2003 à 2006, elle a déclaré n’avoir aucun revenu ni fortune.

4) Par décisions des 22 novembre 2002, 22 août 2003, 5 août 2004, 15 juillet 2005, 3 août 2006 et 3 juillet 2007, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC-GE), a notifié aux époux C______ les bordereaux de taxation ICC et IFD pour les années fiscales 2001 à 2006, lesquels sont entrés en force.

5) En 2006, la contribuable a fait l’objet d’une poursuite pénale notamment pour encouragement à la prostitution.

6) Le 10 avril 2008, l’AFC-GE a informé la contribuable de l’ouverture d’une procédure en rappel d’impôt et d’une procédure pénale pour soustraction d’impôt concernant l’ICC et l’IFD 2001 à 2006. Il ressortait du dossier de procédure pénale que la contribuable avait perçu de nombreuses commissions qu’elle n’avait pas déclarées. Afin de vérifier son imposition et lui donner la possibilité de formuler d’éventuelles observations, un rendez-vous lui a été fixé au 22 avril 2008 dans les bureaux de l’AFC-GE.

7) Par courrier du 22 avril 2008, et se référant à l’entretien du même jour, l’AFC-GE a fixé à la contribuable un délai au 30 juin 2008 pour lui remettre toute sa comptabilité et les pièces probantes relatives à son activité indépendante non déclarée durant les années 2001 à 2006.

8) Par lettre du 26 juin 2008, la contribuable a demandé à l’AFC-GE une prolongation du délai au 31 août 2008, étant dans l’attente que son avocat lui remette diverses pièces justificatives. Elle joignait à son courrier les copies de deux lettres que ce dernier avait adressées le 20 mai 2008 au Procureur général et au Tribunal de police, demandant la délivrance d’un n’empêche pour tous les documents saisis dans le cadre de l’instruction de la procédure pénale.

9) L’AFC-GE a accordé à la contribuable la prolongation du délai au 31 août 2008, au terme duquel elle n’a pas remis les pièces sollicitées.

10) a. Le 21 novembre 2008, l’AFC-GE a notifié à la contribuable 12 bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt ICC et IFD pour les périodes fiscales 2001 à 2006, ainsi que les avis de taxation y relatifs.

Le détail des rappels d’impôts et des intérêts de retard, qui était récapitulés dans une lettre d’accompagnement, se présente comme suit :

Période fiscale

Impôt

Supplément (CHF)

Intérêts de retard (CHF)

2001

ICC

4’450,35

787,45

IFD

1’155,00

248,95

2002

ICC

514,10

70,40

IFD

00,00

00,00

2003

ICC

6’048,10

707,30

IFD

727,00

102,20

2004

ICC

10’940,75

951,25

IFD

1’536,00

162,15

2005

ICC

10’859,40

629,25

IFD

1’480,00

104,40

2006

ICC

30’713,05

873,60

IFD

8’266,00

293,90

b. Il ressort d’une note explicative figurant au bas des avis de taxation que les reprises suivantes ont été effectuées au titre de bénéfice net de l’activité lucrative indépendante non déclarée de la contribuable :

 

Période fiscale

Reprise (CHF)

2001

16'009.-

2002

2'182.-

2003

28'292.-

2004

47'115.-

2005

49'339.-

2006

129'961.-

11) L’AFC-GE a adressé ces décisions à la rue D______ ______, soit à l’ancienne adresse de la contribuable. La Poste les ayant retournés à l’AFC-GE avec la mention « destinataire introuvable à l’adresse indiquée », cette dernière les a réexpédiées le 12 janvier 2009 par pli recommandé, à la nouvelle adresse de la contribuable.

12) Par décisions datées du 9 janvier 2009, l’AFC-GE a notifié à la contribuable deux amendes pour soustraction d’impôt, de CHF 47’644.- pour l’ICC, et de CHF 9’873.- pour l’IFD.

En ne déclarant pas les revenus tirés de son activité lucrative indépendante, la contribuable avait fait en sorte de ne pas être taxée selon sa réelle capacité contributive, commettant de la sorte une soustraction d’impôt. Elle ne pouvait ignorer le caractère imposable des prestations reçues, la faute étant considérée comme intentionnelle, au minimum par dol éventuel. Compte tenu de sa situation actuelle, l’amende était réduite à 0,75 fois le montant de l’impôt soustrait.

13) Par courriers datés du 30 janvier 2009 mais postés le 12 février 2009, la contribuable a formé réclamation contre les bordereaux et les amendes précitées.

Les taxations étaient nulles car elles ne lui avaient pas été notifiées valablement et n’étaient pas motivées.

Les décisions devaient être annulées car l’obligation faite à l’AFC-GE de procéder à une sommation avant de la taxer d’office n’avait pas été respectée.

Dès lors que l’AFC-GE ne l’avait pas sommée de remettre les pièces justificatives utiles et que les décisions ne lui avaient pas été valablement notifiées, son droit d’être entendu avait été violé.

Le principe de taxation selon la capacité contributive n’avait pas été respecté. L’AFC-GE devait la taxer en fonction des éléments réels dont elle disposait, et non de manière arbitraire. Selon les bilans et comptes de pertes et profits qu’elle joignait à ses réclamations, il s’avérait qu’elle n’avait pas de revenus, ce qu’elle avait déclaré lors de l’entretien du 22 avril 2008. C’était donc avec un grand étonnement qu’elle avait constaté, à réception des taxations le 13 janvier 2009, que l’AFC-GE avait retenu des revenus importants, alors qu’elle lui avait fourni oralement toutes les informations plausibles lui permettant d’apprécier de manière précise et consciencieuse les éléments imposables. En s’en écartant, l’AFC-GE avait violé le principe de l’interdiction de l’arbitraire et de l’équité, avait abusé de son pouvoir d’appréciation et avait fait preuve de formalisme excessif.

14) Par décisions sur réclamation du 23 juillet 2009, l’AFC-GE a maintenu les reprises litigieuses et confirmé les amendes pour soustraction d’impôt, qu’elle notifiait à nouveau, à la contribuable uniquement.

Lors de l’entretien du 22 avril 2008, il avait été exposé que la contribuable avait exercé une activité lucrative indépendante non déclarée. L’AFC-GE détenait des extraits de comptes bancaires sur lesquels figuraient des entrées d’argent liées à cette activité. Au cours de l’entretien, un délai au 30 juin 2008 avait été accordé à la contribuable pour reconstituer une comptabilité, ce délai ayant par la suite été prolongé à sa demande au 31 août 2008. N’ayant pas reçu de réponse, l’AFC-GE avait établi le 21 novembre 2008 les bordereaux de rappel d’impôt pour les périodes fiscales 2001 à 2006.

Le revenu de l’activité indépendante de la contribuable était constitué de commissions diverses encaissées sur les comptes bancaires G______ nos 1______, 2______ et 3______. Afin de tenir compte d’éventuelles charges liées à cette activité indépendante, l’AFC-GE avait procédé à un abattement, fixé à bien plaire à 40 %.

Les bordereaux de rappel d’impôt n’avaient pas été établis en procédure de taxation d’office, dès lors que l’AFC-GE avait été en possession des extraits de comptes bancaires révélant des produits de l’activité indépendante de la contribuable.

Quant aux amendes pour soustraction d’impôt, elles avaient été notifiées au nom des deux époux. Dans la mesure où elles ne portaient que sur des éléments imposables propres à la contribuable, seule cette dernière en répondait. Par conséquent, l’AFC-GE lui notifiait à nouveau les amendes, à son seul nom.

15) Par acte daté du 21 août 2009, mais expédié par courrier recommandé le 26 août 2009, la contribuable a recouru contre ces décisions auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), dont les compétences ont depuis le 1er janvier 2011 été reprises par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

Elle a préalablement conclu à la constatation de la nullité des taxations 2001 à 2006 pour défaut de notification valable et, principalement, à l’annulation des décisions de taxation 2001 à 2006, notamment des amendes, à la révision des taxations 2001 à 2006, et à être taxée sur un bénéfice de CHF 0.- et d’une fortune de CHF 0.-. Subsidiairement, elle a conclu à une exemption, une remise ou un sursis des impôts dus, à être taxée sur un bénéfice de CHF 0.- et une fortune de CHF 0.-, et au renvoi du dossier à l’AFC-GE pour nouvelle décision dans le sens des considérants, le tout sous suite de frais et dépens.

Sur le fond, la contribuable a développé la même argumentation qu’en procédure de réclamation, précisant toutefois que, dans le cadre de la procédure pénale, elle avait été mise en détention préventive pendant un certain temps et que des documents avaient été saisis par le juge d’instruction. Suite à ces saisies, elle avait cessé son activité à Genève et n’avait de ce fait pas atteint de résultat bénéficiaire. Néanmoins, l’AFC-GE l’avait taxée d’office, sans tenir compte de ces éléments.

16) Dans sa réponse du 28 juin 2010, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

a. Celui-ci était tardif, la décision sur réclamation ayant été notifiée à la contribuable le 23 juillet 2009.

Aucune irrégularité susceptible de causer un préjudice à la contribuable n’avait eu lieu dans la notification des bordereaux rectificatifs et des amendes litigieuses. La contribuable avait du reste pu former réclamation à leur encontre.

L’AFC-GE avait procédé à une taxation ordinaire, et non à une taxation d’office. Par conséquent, le grief relatif à l’absence de sommation n’était pas pertinent. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, l’AFC-GE pouvait la taxer par estimation, sans procéder nécessairement par voie de taxation d’office, notamment dans un cas comme celui-ci, où la contribuable ne remettait pas de comptabilité probante.

Le droit d’être entendu de la contribuable avait été respecté. Elle avait pu consulter son dossier en présence de son mandataire lors de la procédure de contrôle, elle avait été entendue par l’AFC-GE et avait pu faire valoir ses droits, tant dans la procédure de réclamation que devant la CCRA.

b. Lors de la procédure de contrôle, l’AFC-GE avait pris connaissance de trois comptes bancaires saisis dans le cadre de la procédure pénale, que la contribuable avait ouverts auprès de la banque G______ sans les déclarer. De l’analyse de ces trois comptes, l’AFC-GE avait constaté que les montants suivants (en CHF) avaient été crédités :

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

1______

26'682.-

3'636.-

47'154.-

53'665.-

5'700.-

34'000.-

2______

 

 

 

 

5'000.-

 

3______

 

 

 

24'860.-

71'531.-

182'602.-

TOTAL

26'682.-

3'636.-

47'154.-

78'525.-

82'231.-

216'602.-

Lors de l’entretien du 22 avril 2008, les extraits de ces comptes bancaires avaient été soumis à la contribuable. Elle avait reconnu avoir exercé une activité d’escort girl et de tenancière de salon et avoir perçu de ces activités des revenus non déclarés. Elle avait proposé d’établir une comptabilité depuis 2001 sur la base des éléments figurant sur ces comptes. N’y ayant pas donné suite au terme du délai qui lui avait été accordé au 31 août 2008, l’AFC-GE avait procédé aux rappels d’impôts.

Les reprises avaient été effectuées sur la base des montants crédités susmentionnés, que l’AFC-GE a considérés comme du chiffre d’affaires. Celui-ci avait été réduit de 40 % pour tenir compte d’un abattement. Sur cette base, les montants suivants avaient été repris :

2001

2002

2003

2004

2005

2006

16'009.-

2’182.-

28’292.-

47’115.-

49’339.-

129’961.-

La comptabilité reconstituée et produite par la contribuable était dénuée de toute valeur probante et était même fantaisiste. Les comptes 2001 et 2002 faisaient apparaître des indemnités-chômage au titre de produits des ventes de l’activité lucrative indépendante. De plus, sur un total crédité de CHF 30’321.- sur le compte 1______, seule une somme de CHF 14’276,10 avait été comptabilisée. Enfin, il manquait les bilans et les comptes de pertes et profits des exercices 2005 et 2006.

Le Tribunal fédéral avait jugé qu’il appartenait au contribuable qui avait présenté une comptabilité non-conforme aux exigences légales et qui était dans l’incapacité d’établir que l’estimation faite par l’administration ne correspondait manifestement pas à la réalité, de supporter les désavantages d’une situation qu’il avait lui-même créée. Pour procéder aux taxations litigieuses, l’AFC-GE avait procédé à une analyse consciencieuse des comptes de la contribuable. Partant, l’AFC-GE n’avait pas violé le principe de l’égalité, ni fait preuve de formalisme excessif, ni encore abusé de son pouvoir d’appréciation.

c. Les soustractions d’impôt étaient intentionnelles au vu des montants importants non déclarés entre 2001 et 2006. Compte tenu de ce caractère intentionnel, l’AFC-GE avait fait preuve de mansuétude en ne fixant les amendes infligées qu’à 0,75 % du montant total de l’impôt soustrait.

17) Par jugement du 14 novembre 2011, expédié par pli recommandé à la contribuable le 18 novembre 2011, le TAPI a rejeté le recours. La contribuable ne l’ayant pas retiré auprès de l’office postal à l’issue du délai de garde, le TAPI le lui a réexpédié par pli simple le 29 novembre 2011.

L’AFC-GE avait notifié les décisions sur réclamation du 23 juillet 2009 par pli simple. Dans la mesure où rien n’indiquait que leur notification était intervenue plus de trente jours avant le 26 août 2009, le recours de la contribuable devait être considéré comme ayant été formé en temps utile.

Les bordereaux rectificatifs avaient été réexpédiés le 12 janvier 2009 à la nouvelle adresse de la contribuable, qui avait reconnu les avoir reçus le 13 janvier 2009. Ils avaient dès lors été valablement notifiés à cette date.

Une éventuelle violation du droit d’être entendu de la contribuable avait été réparée devant le TAPI, celle-ci ayant notamment pris connaissance, lors de la procédure devant lui, des extraits de comptes bancaires ayant fondé les reprises querellées et, partant, des sommes retenues au titre des bénéfices nets imposables. Dans ces circonstances, la contribuable avait été en mesure de faire valoir ses droits et avait eu loisir de produire tous les documents jugés utiles à sa prise de position.

L’AFC-GE n’avait pas à procéder à une sommation avant la notification des bordereaux rectificatifs, ceux-ci ayant été établis en procédure ordinaire. Elle était légitimée à procéder par voie d’estimation des revenus de la contribuable, faute pour celle-ci d’avoir produit les pièces comptables utiles dans le délai imparti.

L’établissement des éléments imposables par appréciation était non seulement fondé dans son principe, mais également dans ses modalités et dans son résultat. Par conséquent, l’AFC-GE n’avait pas abusé de son pouvoir d’appréciation ni violé le principe de l’égalité de traitement.

Elle n’avait pas non plus fait preuve de formalisme excessif en taxant la contribuable environ trois mois après avoir constaté qu’elle ne lui avait pas remis les documents relatifs à sa comptabilité.

La procédure de rappel d’impôt était fondée dans son principe et les montants des reprises justifiés.

Quant à la remise d’impôt sollicitée par la contribuable, elle était de la compétence de l’AFC-GE, à qui le TAPI la transmettait.

18) Par acte daté du 20 décembre 2011 mais expédié le 22 décembre 2011, la contribuable a recouru contre le jugement précité auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant :

- préalablement : à la constatation de la nullité des taxations 2001 à 2006, à ce qu’un délai de trois mois lui soit accordé en vue de présenter des justificatifs éventuels déposés dans le cadre de la procédure pénale, à la suspension de la procédure jusqu’à droit connu dans le cadre de la procédure pénale, à ce qu’il soit sursis à statuer aussi longtemps qu’elle n’aurait pas pris possession des pièces manquantes saisies dans le cadre de la procédure pénale et qu’elle n’aurait été en mesure de les verser à la procédure ;

- principalement : à l’annulation des décisions, à leur révision, à ce que les taxations soient basées sur un revenu de CHF 0.- et une fortune de CHF 0.- ;

- éventuellement : à bénéficier d’une exemption d’impôt et au renvoi du dossier à l’AFC-GE pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Les taxations étaient prescrites.

Dans le cadre de la procédure pénale, des inventaires avaient été établis le 28 novembre 2006 et 8 janvier 2007, dont il ressortait que divers documents administratifs, dont des factures, avaient été saisis. Les 25 et 28 juin 2010, son avocat avait demandé la restitution des pièces nécessaires à l’établissement de sa déclaration fiscale. Or, le 14 septembre 2010, celui-là lui avait confirmé que le service des pièces à conviction (ci-après : le SPEC) n’était pas en possession des pièces de l’inventaire du 28 novembre 2006. C’était donc sans sa faute qu’elle n’avait pas été en mesure de remettre toutes les pièces justifiant ses dépenses réelles, et sur lesquelles la chambre de céans devait se fonder.

L’AFC-GE n’avait pas tenu compte d’éléments prouvés, notamment d’un prêt de CHF 20’000.- accordé à Madame I______ et d’un autre de CHF 1’600.- effectué en faveur de Madame J______.

Pour le surplus, la recourante se prévaut des mêmes griefs que ceux exposés dans le cadre de la procédure de réclamation et de recours devant le TAPI.

19) Le 24 janvier 2012, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d’observations.

20) Dans sa réponse du 14 août 2013, l’AFC-GE a conclu principalement à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet.

Le recours déposé devant la chambre de céans semblait tardif. La procédure en rappel d’impôt et en soustraction fiscale pour les années 2001 à 2006 avait été ouverte par lettre recommandée du 10 avril 2008. Par conséquent, le délai de prescription relative et absolue de dix et quinze ans.

Pour le surplus, elle persistait entièrement dans ses précédentes écritures.

21) Le 2 septembre 2013, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17).

2) L’AFC-GE conclut à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté.

a. En matière d’IFD, le délai pour recourir à la chambre administrative contre le jugement du TAPI est de trente jours (art. 140 al. 1 et 145 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11). Il en va de même du recours à l’encontre de l’ICC (art. 62 al. 1 let. a LPA).

Le délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si la réclamation a été remise à l’autorité de taxation, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l’étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard. Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié officiel, le délai expire le premier jour ouvrable qui suit (art. 133 al. 1 LIFD via l’art. 145 al. 2 et 140 al. 4 LIFD ; art. 41 al. 1 LPFisc via l’art. 49 al. 4 LPFisc).

S’agissant de la suspension des délais, la jurisprudence du Tribunal fédéral a toujours indiqué que l’art. 133 LIFD était exhaustif et ne laissait aucune place à l’application des dispositions cantonales de procédure prévoyant des féries en matière d’impôt cantonal et communal (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_628/2010 du 28 juin 2011 et la jurisprudence citée). En procédure cantonale en revanche, la LPA dispose que les délais en jours ou en mois fixés par la loi ou par l’autorité ne courent pas du 18 décembre au 2 janvier inclusivement (art. 17A al. 1 let. c LPA).

Concernant les courriers recommandés adressés en Suisse et selon une jurisprudence constante établie sur la base de l’art. 169 al. 1 let. d de l’ancienne ordonnance sur les postes (aOSP), un tel envoi qui n’a pas pu être distribué est réputé notifié le dernier jour du délai de garde de sept jours suivant la remise de l’avis d’arrivée dans la boîte aux lettres de son destinataire (ATF 134 V 49 consid. 4 p. 51 ; 130 III 396 consid. 1.2.3 p. 399 ; 127 I 31 consid. 2a/aa p. 34 ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C_245/2009 du 5 mai 2009 ; 2C_119/2008 du 25 février 2008 ; ATA/255/2009 du 19 mai 2009 consid. 2).

b. En l’espèce, le jugement du TAPI, expédié par pli recommandé du 18 novembre 2011, n’a pas été réclamé et a été retourné à l’expéditeur. Il est ainsi réputé avoir été notifié le dernier jour du délai de garde. La recourante a été invitée, par avis de la poste du samedi 19 novembre 2011, à retirer ce courrier jusqu’au samedi 26 novembre 2011.

En application de l’art. 133 LIFD et de la jurisprudence y relative, le délai pour recourir contre les bordereaux de rappel d’impôt IFD a commencé à courir le dimanche 27 novembre 2011 et est venu à échéance le lundi 26 décembre 2011 à minuit.

En revanche, s’agissant des rappels d’impôts ICC, et compte tenu de la suspension du délai entre le 18 décembre 2011 et le 2 janvier 2012, le délai de trente jours a couru du 27 novembre au 17 décembre 2011 inclus, puis du 3 janvier au 11 janvier 2012 à minuit.

Expédié le 22 décembre 2011, le recours a été interjeté en temps utile dans les deux cas. Partant, le grief d’irrecevabilité soulevé par l’AFC-GE est rejeté.

3) La recourante se prévaut de la prescription.

a. En droit public, la prescription doit être constatée d’office lorsqu’un particulier est débiteur de l’État (ATF 133 II 366 = JdT 2007 II 54 p. 56 ; 106 Ib 357 consid. 3a ; ATA/267/2008 du 27 mai 2008 ; ATA/398/2006 du 26 juillet 2006). Elle est soumise au droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses.

b. En l’espèce, il y a lieu d’examiner d’une part, la prescription des procédures en rappel d’impôt ICC et IFD 2001 à 2006 et, d’autre part, la prescription de l’action pénale pour soustraction aux impôts ICC et IFD 2001 à 2006.

4) a. En matière d’IFD, le droit d’introduire une procédure de rappel d’impôt s’éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’a pas été effectuée, alors qu’elle aurait dû l’être, ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète (art. 152 al. 1 LIFD). Le droit de procéder au rappel de l’impôt s’éteint quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte (art. 152 al. 3 LIFD).

b. Sur le plan de l’ICC, la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) prévoit également à son art. 53 al. 2 que le droit d’introduire une procédure de rappel d’impôt s’éteint dix ans après la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’a pas été effectuée alors qu’elle aurait dû l’être ou pour laquelle la taxation entrée en force était incomplète. Selon l’al. 3 de cette disposition, le droit de procéder au rappel de l’impôt s’éteint quinze ans après la fin de la période fiscale à laquelle il se rapporte.

Dans le canton de Genève, les dispositions consacrées aux rappels d’impôts et pénalités étaient ancrées jusqu’au 31 décembre 2001, dans la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP - D 3 05). Elles ont été abrogées le 1er janvier 2002 par l’entrée en vigueur de la LPFisc.

Selon l’art. 341A aLCP, la prescription du droit d’introduire la procédure de rappel d’impôt est soumise à un délai de cinq ans dès l’entrée en force de la décision de taxation initiale (ATA/687/2013 du 15 octobre 2013 ; ATA/197/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/374/2010 du 1er juin 2010 consid. 6b), l’aLCP ne contenant en outre pas de délai de prescription absolue (ATA/346/2006 du 20 juin 2006 et les références citées).

Depuis le 1er janvier 2002, la législation cantonale prévoit une disposition en tous points similaire à l’art. 53 LHID, ancrée à l’art. 61 LPFisc.

c. Il ressort de ce qui précède que pour l’année fiscale 2001, l’art. 341A aLCP était contraire à la LHID. Or, l’art. 72 al. 2 LHID dispose que cette loi est directement applicable à partir du 1er janvier 2001 si les dispositions de droit cantonal s’en écartent. Par conséquent, c’est à l’aune de l’art. 53 LHID que la prescription de la procédure en rappel d’impôt ICC 2001 doit être régie, et non l’art. 341A aLCP.

En ce qui concerne les périodes fiscales 2002 à 2006, la prescription de la procédure en rappel d’impôt ICC est régie par l’art. 61 al. 1 et 3 LPFisc, dont la teneur est conforme à la LHID.

5) En application des dispositions qui précèdent, les délais de prescription relative et absolue pour introduire la procédure et procéder aux rappels d’impôts ICC et IFD 2001 à 2006 s’établissent comme suit :

Période fiscale

Fin de la période fiscale

Prescription pour introduire la procédure

Prescription pour procéder au rappel d’impôt

2001

31.12.2001

31.12.2011

31.12.2016

2002

31.12.2002

31.12.2012

31.12.2017

2003

31.12.2003

31.12.2013

31.12.2018

2004

31.12.2004

31.12.2014

31.12.2019

2005

31.12.2005

31.12.2015

31.12.2020

2006

31.12.2006

31.12.2016

31.12.2021

Dès lors que l’AFC-GE a ouvert la procédure en rappel d’impôt le 10 avril 2008, il y a lieu de constater que celle-ci a été introduite dans le respect du délai de prescription de dix ans. En outre, au jour du prononcé du présent arrêt, le délai de prescription absolue de quinze ans pour procéder auxdits rappels n’est pas échu.

6) a. Selon l’art. 184 al. 1 let. b LIFD, la poursuite pénale se prescrit, en cas de soustraction d’impôt consommée, par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’a pas été effectuée ou l’a été de façon incomplète, ou pour laquelle l’impôt à la source n’a pas été perçu conformément à la loi, ou par dix ans à compter de la fin de l’année civile au cours de laquelle une restitution d’impôt illégale ou une remise d’impôt injustifiée a été obtenue, ou des biens ont été dissimulés ou distraits dans la procédure d’inventaire.

b. Le 1er octobre 2002 a été abrogé l’art. 72 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), qui prévoyait la possibilité d’interrompre le délai de prescription de l’action pénale (RO 2002 2993). Afin de compenser le raccourcissement de l’ensemble des délais de prescription fixés par le droit pénal accessoire, la loi fédérale du 22 mars 2002 relative à la prescription de l’action pénale (RO 2002 2986 ; FF 2002 2512) a introduit une réglementation transitoire à l’art. 333 al. 5 CP (aujourd’hui al. 6).

Selon l’art. 333 al. 6 let. b CP, jusqu’à l’adaptation des autres lois fédérales, les délais de prescription de l’action pénale pour les contraventions qui dépassent un an sont augmentés d’une fois la durée ordinaire. En ce qui concerne la soustraction d’impôt consommée, le délai passe ainsi de dix à vingt ans (voir également le Message du Conseil fédéral du 2 mars 2012 relatif à la loi fédérale sur l’adaptation de la LIFD et de la LHID aux dispositions générales du code pénal, FF 2012 2654). L’art. 333 al. 6 let. d CP dispose quant à lui que la prescription de l’action pénale ne court plus jusqu’à l’adaptation des autres lois fédérales si, avant son échéance, un jugement de première instance a été rendu.

c. Malgré l’abrogation de l’art. 72 CP, la LIFD n’a toujours pas adapté son texte au nouveau droit et prévoit la possibilité d’interrompre la prescription de l’action pénale. Ainsi, selon l’art. 184 al. 2 LIFD, la prescription est interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite du contribuable ou de l’une des personnes visées à l’art. 177. L’interruption est opposable tant au contribuable qu’à ces autres personnes. Un nouveau délai commence à courir à chaque interruption ; la prescription ne peut toutefois être prolongée de plus de la moitié de sa durée initiale (art. 184 al. 2 LIFD). Il s’ensuit que par le jeu de l’art. 184 al. 1 let. b et al. 2 LIFD, la poursuite pour soustraction fiscale consommée se prescrit après quinze ans, ce délai ne pouvant pas être prolongé (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_180/2013 du 5 novembre 2013 consid. 5.2.2 ; 2C_651/2012 du 28 septembre 2012 consid. 3.1 ; ATA/37/2014 du 21 janvier 2014).

Il résulte de ce qui précède que l’art. 184 al. 2 LIFD est plus favorable à la recourante que le nouveau droit. Par conséquent, en application du principe de lex mitior qui commande que les dispositions du nouveau droit ne s’appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur que si elles lui sont plus favorables (art. 2 CP), il convient d’appliquer la LIFD au cas d’espèce pour déterminer les délais de prescription relative et absolue de dix et quinze ans à la poursuite de l’action pénale pour soustraction d’IFD consommée.

d. En matière d’ICC, la LHID prévoit les mêmes délais que l’art. 184 al. 2 LIFD (art. 58 al. 2 et 3 LHID).

e. La législation cantonale disposait, jusqu’au 31 décembre 2001, que la prescription de l’action pénale était de cinq ans, non comprise l’année courante (art. 341A aLCP). Ce délai commençait à courir, conformément à la jurisprudence y relative (ATA/18/2013 du 8 janvier 2013 ; ATA/359/2011 du 7 juin 2011 ; ATA/267/2008 précité), dès la commission de l’infraction. Bien que l’aLCP ne comportait pas de prescription absolue, l’amende pour soustraction d’impôt était, en raison de son caractère pénal, soumise à un délai de prescription absolue de dix ans, conformément à la jurisprudence et au droit pénal spécifique applicable à ce type de sanction à l’époque (ATA/444/2013 du 30 juillet 2013 ; ATA/18/2013 précité ; ATA/445/2010 du 29 juin 2010 ; ATA/346/2006 précité et les références citées).

Depuis le 1er janvier 2002, la législation cantonale prévoit à l’art. 77 al. 1 let. b et al. 2 LPFisc une disposition en tous points similaire à l’art. 58 al. 2 et 3 LHID précité.

f. Au vu de ce qui précède, l’art. 341A aLCP était contraire à la LHID pour l’année fiscale 2001. Par conséquent, en application de l’art. 72 LHID, la prescription de l’action pénale pour soustraction à l’ICC 2001 doit être régie exclusivement par la LHID. La prescription relative de l’action pénale pour l’année fiscale 2001 est donc de dix ans (art. 58 al. 1 LHID), et la prescription absolue de quinze ans (art. 58 al. 3 LHID).

Pour les périodes fiscales 2002 à 2006, la prescription pénale est régie par l’art. 77 al. 1 let. b et al. 2 LPFisc, dont la teneur est conforme à la LHID. Enfin, en application du principe de lex mitior, et comme cela a été vu en matière d’IFD, il n’y a pas lieu de tenir compte de l’art. 333 al. 6 let. a CP, dans la mesure où il est défavorable à la recourante.

En conclusion, les délais de prescription relative et absolue de l’action pénale pour les périodes fiscales 2001 à 2006 sont de dix, respectivement quinze ans.

7) Ces échéances se récapitulent comme suit et valent tant pour l’ICC que pour l’IFD :


Période fiscale

Fin de la période fiscale

Prescription relative de la poursuite pénale

Prescription absolue de la poursuite pénale

2001

31.12.2001

31.12.2011

31.12.2016

2002

31.12.2002

31.12.2012

31.12.2017

2003

31.12.2003

31.12.2013

31.12.2018

2004

31.12.2004

31.12.2014

31.12.2019

2005

31.12.2005

31.12.2015

31.12.2020

2006

31.12.2006

31.12.2016

31.12.2021

Dès lors que l’AFC-GE a ouvert la procédure pénale à l’encontre de la recourante le 10 avril 2008, il y a lieu de constater que celle-ci a été introduite dans le respect du délai de prescription relative de dix ans. En outre, au jour du prononcé du présent arrêt, le délai de prescription absolue de quinze ans n’est pas échu.

8) Selon la recourante, les bordereaux de rappels d’impôts seraient nuls, pour défaut de notification valable.

a. La LIFD prévoit que les décisions et les prononcés sont notifiés au contribuable par écrit et doivent indiquer les voies de droit (art. 116 al. 1 LIFD). Elle ne contient aucune disposition qui traiterait de manière spécifique des vices de notification.

b. Comme la LIFD, la LHID dispose que les décisions de taxation sont notifiées au contribuable par écrit et doivent indiquer les voies de droit ; les autres décisions et prononcés doivent en outre être motivés (art. 41 al. 3 LHID). Elle ne mentionne pas non plus les droits de procédure des contribuables en cas de notification irrégulière. Se pose ainsi la question de savoir si l’art. 41 LHID doit être complété par les normes ad hoc du droit cantonal, étant précisé que la LHID a restreint les compétences des cantons pour la mise en œuvre du droit cantonal de procédure, la procédure faisant partie des domaines harmonisés (art. 39 ss LHID). Au demeurant, les garanties de procédure minimales des art. 29 et 30 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) complètent de manière subsidiaire une législation cantonale fragmentaire (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_318/2009 du 10 décembre 2009 consid. 4.1 et la doctrine citée).

Selon l’art. 19 LPFisc, les décisions de taxation sont notifiées au contribuable par écrit et indiquent les voies de droit. Les autres décisions et prononcés doivent, en outre, être motivés (al. 1). Toutes les communications à faire au contribuable lui sont adressées sous pli fermé. Elles sont recommandées lorsque la loi l’exige (al. 2).

Les art. 46 et 47 LPA règlent les questions de contenu et de notification des décisions. En particulier, l’art. 46 al. 2 phr. 1 LPA prévoit que les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit. Enfin, l’art. 47 LPA énonce le principe voulant qu’une notification irrégulière ne puisse entraîner aucun préjudice pour les parties. Ce principe complète ainsi la règle générale de l’art. 41 al. 3 LHID, dans la mesure où cet article est sommaire et ne parle pas de notification irrégulière (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_318/2009 précité 2009 consid. 4.2). Le principe général du droit rappelé à l’art. 47 LPA découle des règles de la bonne foi, qui imposent des devoirs à l’autorité dans la conduite d’une procédure (ATF 123 II 231 consid. 8b p. 238). Ainsi, le destinataire d’une décision déficiente n’a pas à subir les conséquences d’un acte imputable aux seules autorités. En particulier, il n’a pas à être restreint dans l’une des multiples modalités de son droit d’être entendu à la suite d’un tel vice de notification.

c. En l’espèce, l’AFC-GE a notifié à la recourante les 12 bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt en date du 21 novembre 2008. Cette notification s’est toutefois avérée être irrégulière, l’AFC-GE les ayant expédiés à l’ancienne adresse de la recourante. Suite au retour du pli, l’AFC-GE les a notifiés à la nouvelle adresse, par courrier recommandé du 12 janvier 2009. La recourante affirme pour sa part dans plusieurs de ses écritures les avoir réceptionnés le 13 janvier 2009. Il est donc établi que les décisions querellées ont été régulièrement notifiées à la recourante et que cette dernière en a pris connaissance à cette date.

Partant, le grief sera rejeté.

9) La recourante se plaint d’une violation de l’obligation de motivation des décisions contestées, au motif qu’elles ne contiendraient aucune indication au sujet des éléments imposables et des montants dont l’AFC-GE aurait tenu compte.

a. Selon l’art. 131 al. 2 LIFD, applicable aux procédures de rappel d’impôt par le renvoi de l’art. 153 al. 3 LIFD, l’autorité de taxation communique au contribuable les modifications apportées à sa déclaration au plus tard lors de la notification de la décision de taxation. Cette dernière n’a pas à contenir de motivation, mais doit simplement indiquer les modifications que l’autorité fiscale a apportées à la déclaration (Danielle YERSIN/Yves NOËL, Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, 2008, p. 1275 n. 18 ad art. 132 et les références citées ; ATA/411/2014 du 3 juin 2014). La décision sur réclamation doit en revanche être motivée (art. 135 al. 2 LIFD).

b. En matière d’ICC, les art. 46 al. 2 LHID et 36 al. 3 LPFisc (applicables aux procédures de rappel d’impôt par le renvoi de l’art. 60 al. 4 LPFisc), ont une teneur similaire à l’art. 131 al. 2 LIFD, imposant uniquement à l’AFC-GE l’obligation d’indiquer au contribuable les modifications apportées à la déclaration au plus tard au moment de la notification de la décision de taxation. Cependant, la décision sur réclamation doit être motivée (art. 43 al. 2 LPFisc).

c. Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 Cst. implique l’obligation pour l’autorité de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, la motivation d’une décision est suffisante lorsque l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause. L’autorité n’est toutefois pas tenue de se prononcer sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives pour l’issue du litige (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 et les arrêts cités).

d. Il ressort de ce qui précède qu’en l’espèce, l’AFC-GE n’avait pas - au stade des décisions de taxation - à exposer en détail à la recourante le calcul sur lequel se fondait le rappel d’impôt. Elle pouvait se contenter de lui communiquer les éléments ayant fait l’objet d’une modification par rapport aux éléments déclarés. Or, l’AFC-GE a satisfait à cette obligation. D’une part, les avis de taxation joints aux bordereaux contenaient une note apposée en bas de page faisant référence à l’activité lucrative indépendante de la recourante, expliquant ainsi la raison et l’origine des montants repris. D’autre part, les bordereaux de rappels d’impôts contestés étaient accompagnés d’une lettre récapitulant, sous forme de tableaux, les suppléments d’impôts calculés pour chaque période fiscale et les intérêts de retard y relatifs. L’AFC-GE a ainsi suffisamment exposé, comme cela le lui incombait au stade de la décision de taxation, les éléments ayant fait l’objet d’une modification.

Par ailleurs, dans le cadre des réclamations, l’AFC-GE a motivé ses décisions en précisant que les rappels d’impôts avaient été calculés sur la base des extraits de comptes bancaires et que, sur la base des revenus obtenus, un abattement de 40 % avait été appliqué afin de tenir compte d’éventuelles charges.

En conséquence, l’AFC-GE n’a pas violé l’obligation de motivation qui lui incombait, et le grief de la recourante doit être écarté.

10) La recourante demande ensuite l’annulation des décisions querellées, faute d’avoir été précédées d’une sommation.

a. En matière d’IFD, la procédure en rappel d’impôt est régie par l’art. 153 LIFD et les dispositions concernant les principes généraux de procédure, les procédures de taxation et de recours, qui s’appliquent par analogie (art. 153 al. 3 LIFD).

La procédure de taxation d’office est soumise à des exigences de procédure strictes. En particulier, l’autorité doit procéder à la sommation du contribuable avant d’établir une pareille taxation (art. 130 al. 2 LIFD). Elle fixe alors le montant de l’impôt dû sur la base d’une appréciation consciencieuse. Elle doit tenir compte des informations en sa possession mais on ne peut exiger d’elle qu’elle effectue des enquêtes et établisse les faits par des recherches trop détaillées, en particulier lorsqu’elle ne dispose pas des éléments probants (Danielle YERSIN/Yves NOËL, op. cit., p. 1261 n. 23 ad art. 130 ; ATA/167/2013 du 12 mars 2013).

Quant au contribuable taxé d’office, il doit motiver sa réclamation sous peine d’irrecevabilité (art. 132 al. 3 LIFD ; ATF 123 II 552 consid. 4c).

Le choix de la procédure ordinaire en lieu et place de la procédure de taxation d’office ne porte pas préjudice au contribuable. En effet, en l’absence de sommation, l’obligation de motiver la réclamation (art. 132 al. 3 LIFD) ne s’applique pas (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.561/2005 du 22 février 2006 consid. 3).

b. L’art. 37 LPFisc - qui reprend la teneur de l’art. 46 al. 3 de la LHID - prévoit une règle similaire en matière d’ICC.

c. En l’espèce, l’AFC-GE a constaté au terme du délai imparti que la recourante ne lui avait pas fourni la comptabilité demandée relative aux années fiscales 2001 à 2006. Elle était par conséquent autorisée à procéder à une taxation d’office au sens des art. 130 al. 2 LIFD et 37 LPFisc. Il ressort cependant des bordereaux attaqués que l’AFC-GE y a renoncé, au profit d’une procédure de taxation ordinaire. En effet, ni la correspondance jointe aux bordereaux ni les bordereaux eux-mêmes ne portent le libellé de « taxation d’office », généralement apposé en en-tête par l’AFC-GE.

Dès lors que l’intimée a fait le choix de procéder à des taxations ordinaires, qui du reste ne portaient pas préjudice à la recourante, elle n’était pas tenue de la sommer préalablement.

Infondé, ce grief sera rejeté.

11) La recourante fait valoir une violation de son droit d’être entendu, dans la mesure où elle n’aurait pas été formellement sommée de remettre les pièces justificatives.

a. Tant le TAPI que la chambre administrative peuvent à nouveau déterminer tous les éléments imposables ; après avoir entendu le contribuable, ils peuvent également modifier la taxation au désavantage de ce dernier (art. 51 al. 2 et 54 LPFisc).

b. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d’avoir accès au dossier, de participer à l’administration des preuves, d’en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 138 II 252 consid. 2.2 p. 255 ; Arrêts du Tribunal fédéral 8C_866/2010 du 12 mars 2012 consid. 4.1.1 ; 8C_643/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.3 et les références citées ; 1C_161/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 5A_150/2010 du 20 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/276/2012 précité consid. 2 et les arrêts cités). Le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (Arrêt du Tribunal fédéral 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 138 V 125 consid. 2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2 ; 137 I 195 consid. 2.3.1 ; 136 I 265 consid. 3.2 ; 135 II 286 consid. 5.1 p. 293) ; Arrêts du Tribunal fédéral 5A_12/2013 du 8 mars 2013 consid. 4.1 ; 2C_552/2011 du 15 mars 2012 consid. 3.1).

La violation du droit d’être entendu entraîne, lorsque sa réparation par l’autorité de recours n’est pas possible, l’annulation de la décision attaquée, sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 133 III 235 consid. 5.3 ; ATA/149/2013 du 5 mars 2013 consid. 5a). Pour autant qu’elle ne soit pas d’une gravité particulière, elle est réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s’exprimer devant une autorité de recours jouissant du même pouvoir d’examen que l’autorité de décision (ATF 129 I 129 consid. 2.2.3 ; 126 I 68 consid. 2 ; 124 II 132 consid. 2d ; Arrêt du Tribunal fédéral 8C_449/2012 du 6 juin 2012 consid. 2.4.1). Toutefois, la réparation d’un vice éventuel ne doit avoir lieu qu’exceptionnellement (ATF 127 V 431 consid. 3d.aa ; 126 V 130 consid. 2b et les références citées ; Arrêt du Tribunal fédéral 8C_449/2012 précité consid. 2.4.1).

c. Comme cela a été vu, l’AFC-GE a établi les bordereaux de rappels d’impôts en procédure de taxation ordinaire. Elle n’était donc pas tenue de sommer la recourante avec d’émettre ses décisions. Elle a néanmoins permis à la recourante de s’exprimer en lui accordant un entretien le 22 avril 2008 au cours duquel celle-ci a pu faire valoir ses arguments. L’AFC-GE l’a ensuite invitée à remettre sa comptabilité relative aux exercices 2001 à 2006 jusqu’au 31 août 2008. Cependant, la recourante n’y a pas donné suite et c’est face à ce silence que l’AFC-GE a procédé aux taxations le 21 novembre 2008.

Par conséquent, aucune violation du droit d’être entendu ne peut être retenue à l’encontre de l’intimée. Cela étant, quand bien même l’on admettrait que l’AFC-GE a violé le droit d’être entendu de la recourante, cette violation devrait être considérée comme guérie par-devant la chambre de céans, celle-ci jouissant du même pouvoir de cognition que l’AFC-GE et le TAPI.

Le grief sera dès lors écarté.

12) Il convient ensuite d’examiner si, en établissant des taxations ordinaires, l’AFC-GE était autorisée sur le principe à fixer les éléments imposables par voie d’estimation.

a. Le fait que l’autorité fiscale soit autorisée à faire le choix de procéder par voie de taxation ordinaire alors que les conditions de taxer d’office sont réalisées ne l’empêche pas d’établir les éléments imposables par appréciation, dans le respect des règles relatives au fardeau de la preuve. Partant, l’art. 130 al. 2 LIFD précité est applicable à une procédure de taxation ordinaire. En outre, sa lettre n’impose pas à l’autorité fiscale le choix d’une méthode particulière comme le calcul de l’évolution de fortune, l’examen du train de vie ou encore l’usage de coefficient expérimentaux, si la méthode choisie, échappe à la critique (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.561/2005 précité consid. 3).

Selon un principe consacré, il incombe à l’autorité fiscale de démontrer l’existence d’éléments créant ou augmentant la charge fiscale, alors que le contribuable supporte le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation fiscale. S’agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d’en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l’échec de cette preuve (ATF 133 II 153 consid. 4.3 ; ATF 121 II 257 consid. 4 c.aa ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_477/2009 du 8 janvier 2010 consid. 3.5 ; 2C_199/2009 du 14 septembre 2009 consid. 3.1 et 2A.561/2005 précité consid. 2.3 ; ATA/232/2014 du 8 avril 2014 ; ATA/532/2013 du 27 août 2013 et les références citées).

b. Pour établir le montant des revenus de l’activité lucrative indépendante qui n’ont pas été comptabilisés, il incombait à l’AFC-GE d’établir les faits qui l’autorisaient à augmenter la charge fiscale de la recourante. En l’espèce, l’AFC-GE a été informée de l’ouverture d’une procédure pénale à l’encontre de la recourante, notamment pour encouragement à la prostitution. Il ressort du dossier pénal que, durant les années litigieuses 2001 à 2006, les prostituées travaillant pour la recourante lui reversaient des commissions. Lors de l’entretien du 22 avril 2008, l’AFC-GE a exposé à la recourante que la procédure en rappel d’impôt et pour soustraction fiscale était liée à cette activité lucrative indépendante non déclarée. À cette même occasion, l’AFC-GE a soumis à la recourante les extraits de comptes bancaires sur lesquels elle percevait lesdites commissions non déclarées, ce que la recourante ne conteste pas. L’AFC-GE lui a, par courrier du même jour, fixé un délai au 30 juin 2008 pour remettre la comptabilité probante relative à cette activité, délai qui a été prolongé à la demande de la recourante au 31 août 2008, mais au terme duquel elle ne s’est pas manifestée. Ce n’est qu’un mois et demi après l’issue de ce délai que l’AFC-GE a alors établi les décisions querellées, en comptabilisant, pour chaque année fiscale, les montants crédités sur les trois comptes précités, puis, en procédant à une déduction forfaitaire de 40 % sur les totaux obtenus afin de tenir compte d’éventuelles charges.

La recourante soutient quant à elle avoir déclaré lors de l’entretien n’avoir eu aucun revenu ni fortune durant les années concernées. Elle aurait expressément demandé à cette occasion à pouvoir remettre les pièces utiles perquisitionnées dans le cadre de la procédure pénale, auxquelles elle n’avait pas accès. Cette requête aurait été acceptée par l’AFC-GE, mais la recourante n’y a pas donné suite dans le délai imparti. Ce n’est que le 12 février 2009 qu’elle a remis pour la première fois à l’AFC-GE des bilans intermédiaires et des comptes de pertes et profits provisoires pour les années concernées.

c. Il ressort de ce qui précède que l’AFC-GE a fait ce qui était en son pouvoir pour déterminer au mieux les éléments imposables de la recourante. Elle a pris connaissance du dossier de procédure pénale, s’est entretenue avec la recourante et lui a accordé deux délais pour lui faire parvenir une comptabilité probante sur laquelle les bordereaux de rappel d’impôt auraient pu se fonder.

De son côté, il n’apparaît pas dans le dossier que la recourante se serait manifestée auprès de l’AFC-GE pour solliciter une prolongation du délai au-delà du 31 août 2008, comme elle aurait pu tenter de le faire. Ce n’est que près d’une année après l’ouverture de la procédure en rappel d’impôt, qu’elle a fait parvenir à l’intimée des documents de comptabilité, lesquels sont cependant dépourvus de toute force probante.

Dans ces circonstances, force est de constater qu’à défaut d’éléments probants, l’AFC-GE était autorisée à fixer le montant de l’impôt dû sur la base d’une estimation, qu’elle a du reste appréciée consciencieusement dans la mesure des informations qu’elle détenait.

13) La recourante estime que l’AFC-GE a abusé de son pouvoir d’appréciation et violé le principe d’égalité de traitement entre les contribuables en établissant des taxations qui ne tiendraient pas compte de sa situation réelle, ni des charges inhérentes à toute activité.

a. En procédure de taxation, la maxime inquisitoire prévaut : l’autorité n’est pas liée par les éléments imposables reconnus ou déclarés par le contribuable. Si des indices paraissent mettre en doute l’exactitude de la déclaration, l’administration, après investigation, pourra s’en écarter et modifier les éléments du revenu en faveur ou en défaveur de ce dernier (art. 51 al. 2 et 54 LPFisc ; Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 442s ; Danielle YERSIN/Yves NOËL, op. cit., page 1254 n. 2 ad art. 130 et la jurisprudence citée).

En droit fiscal, le principe de la libre appréciation de la preuve s’applique. L’autorité forme librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées, en choisissant entre les preuves contradictoires ou les indices contraires qu’elle a recueillis. Cette liberté d’appréciation, qui doit s’exercer dans le cadre de la loi, n’est limitée que par l’interdiction de l’arbitraire (Ernst BLUMENSTEIN/Peter LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, 6ème éd., Zurich 2002, p. 403/404 ; Jean-Marc RIVIER, Droit fiscal suisse, L’imposition du revenu et de la fortune, 2ème éd., Lausanne 1998, p. 139). Il n’est pas indispensable que la conviction de l’autorité de taxation confine à une certitude absolue qui exclurait toute autre possibilité ; il suffit qu’elle découle de l’expérience de la vie et du bon sens et qu’elle soit basée sur des motifs objectifs (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_574/2009 du 21 avril 2010 ; 2C_47/2009 du 26 mai 2009 ; 2A_374/2006 du 30 octobre 2006 consid. 4.2 ; ATA/226/2012 du 17 avril 2012 ; ATA/95/2012 du 21 février 2012 ; Martin ZWEIFEL, Die Sachverhaltsermittlung im Steuerveranlagungsverfahren, Zurich 1989, p. 109).

b. En vertu de l’art. 127 al. 2 Cst., dans la mesure où la nature de l’impôt le permet, les principes de l’universalité, de l’égalité de traitement et de la capacité économique doivent, en particulier, être respectés. En application des principes de l’égalité d’imposition et de l’imposition selon la capacité contributive, les contribuables qui sont dans la même situation économique doivent supporter une charge fiscale semblable ; lorsqu’ils sont dans des situations de faits différentes qui ont des effets sur leur capacité économique, leur charge fiscale doit en tenir compte et y être adaptée. Ainsi, d’après le principe de la proportionnalité de la charge fiscale à la capacité contributive, tel qu’il est aussi nommé par la jurisprudence, chaque citoyen doit contribuer à la couverture des dépenses publiques compte tenu de sa situation personnelle et en proportion de ses moyens (ATF 140 II 157 consid. 7.1 et la jurisprudence citée).

c. En l’espèce, l’AFC-GE a apprécié les éléments imposables sur la base des extraits de comptes bancaires 2001 à 2006 non déclarés de la recourante. Cette dernière ne conteste pas que ces comptes aient servi à encaisser les nombreuses commissions versées par les prostituées ayant travaillé pour elle à l’époque des faits. Sur le total des montants crédités pris en considération, l’AFC-GE a procédé à un abattement de 40 % afin de tenir compte d’éventuelles charges de la recourante. Quant à cette dernière, elle n’a fourni aucune comptabilité probante et persiste dans ses dernières écritures à soutenir que les taxations doivent se fonder sur les bilans et comptes de pertes et profits provisoires remis. En l’absence de documents probants sur la réelle situation financière de la recourante, l’AFC-GE se devait de procéder à une estimation des revenus. En outre, il n’apparaît pas qu’en procédant au calcul, elle ait abusé de son pouvoir d’appréciation. En effet, l’AFC-GE s’est contentée d’additionner les montants crédités, sans les extrapoler, et a même tenu compte de déductions non alléguées par la recourante, à hauteur de 40 %. Cette méthode échappe à la critique.

Enfin, on voit mal comment la recourante peut se prévaloir d’une violation de sa capacité contributive, dès lors qu’en l’absence de comptabilité probante il n’est pas possible de déterminer cette capacité avec précision.

Les griefs tirés de l’abus du pouvoir d’appréciation et de la violation du principe d’égalité de traitement sont donc infondés et rejetés.

14) La recourante allègue une violation du principe d’interdiction de l’arbitraire au motif que l’AFC-GE se serait écartée des données fournies par elle, sans indiquer précisément quels sont les motifs qui l’auraient poussé à s’en écarter.

a. Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. À cet égard, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain (ATF 132 III 209 consid. 2.1 p. 211 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2D_30/2008 du 21 mai 2008 consid. 5.1). L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 131 I 57 consid. 2 p. 61 et la jurisprudence citée ; 128 I 177 consid. 2.1 p. 182 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_171/2008 du 20 juin 2008 consid. 3.1 et les arrêts cités ; ATA/381/2008 du 29 juillet 2008 consid. 4a). Appelée à examiner le caractère arbitraire d’une décision, la chambre de céans suit le raisonnement du Tribunal fédéral en la matière (ATA/344/2008 du 24 juin 2008 consid. 6a).

b. En l’espèce, les données fournies par la recourante sont des déclarations orales non étayées ainsi que des bilans intermédiaires et des comptes de pertes et profits, produits pour la première fois au stade de la réclamation et sur lesquels il n’est manifestement pas possible de se fonder. Ceux-ci sont effet, selon leurs propres libellés, des documents provisoires. De plus, la plupart des récapitulatifs remis portent sur des périodes de vingt-quatre mois. La recourante produit également devant la chambre de céans des courriers de son mandataire demandant au Ministère public ainsi qu’au SPEC la restitution de pièces perquisitionnées dans le cadre de la procédure pénale et figurant à l’inventaire du 28 novembre 2006. Le plus récent de ces courriers date du 14 septembre 2010, duquel il ressort que le SPEC n’a, à cette date, toujours pas restitué les pièces.

Au vu de ce qui précède, l’on ne peut que constater que l’AFC-GE n’a pas fait preuve d’arbitraire en écartant les quelques éléments de taxation fournis par la recourante, tant ceux-ci sont peu clairs, incomplets et dénués de toute valeur probante.

Ce grief sera par conséquent rejeté.

15) Selon la recourante, l’AFC-GE a fait preuve de formalisme excessif et violé le principe de proportionnalité en écartant les éléments qu’elle avait remis tardivement.

a. À teneur de l’art. 125 al. 2 LIFD, les personnes physiques dont le revenu provient d’une activité lucrative indépendante et les personnes morales doivent joindre à leur déclaration les extraits de comptes signés (bilan, compte de résultats) de la période fiscale ou, à défaut d’une comptabilité tenue conformément à l’usage commercial, un état des actifs et des passifs, un relevé des recettes et des dépenses ainsi que des prélèvements et apports privés (art. 125 al. 2 LIFD ; art. 29 al. 2 LPFisc).

Les délais impartis par l’autorité peuvent être prolongés s’il existe des motifs sérieux et que la demande de prolongation est présentée avant l’expiration de ces délais (art. 119 al. 2 LIFD ; art. 21 al. 2 LPFisc et 16 al. 2 LPA).

b. Selon la jurisprudence, il y a formalisme excessif, constitutif d’un déni de justice contraire à l’art. 29 al. 1 Cst. lorsque des règles de procédure sont appliquées avec une rigueur que ne justifie aucun intérêt digne de protection, au point que la procédure devient une fin en soi et empêche ou complique de manière insoutenable l’application du droit (ATF 130 V 177 consid. 5.4.1 p. 183 ; ATF 128 II 139 consid. 2a p. 142). L’excès de formalisme peut résider dans la règle de comportement qui est imposée au plaideur ou dans la sanction qui est attachée à cette règle (ATF 125 I 166 p. 170 consid. 3a ; ATF 121 I 177 p. 179 consid. 2b/aa).

En tant qu’il sanctionne un comportement répréhensible de l’autorité dans ses relations avec le justiciable, l’interdiction du formalisme excessif poursuit le même but que le principe de la bonne foi, déduit de l’art. 9 Cst. À cet égard, il commande à l’autorité d’éviter de sanctionner par l’irrecevabilité les vices de procédure aisément reconnaissables, qui auraient pu être redressés à temps, lorsqu’elle pouvait s’en rendre compte assez tôt et les signaler utilement au plaideur (ATF 125 I 166 consid. 3a ; ATF 124 II 265 consid. 4a p. 270 ; ATF 120 V 413 consid. 5a p. 417/418 et la jurisprudence citée). Ainsi en va-t-il s’agissant de la violation d’une règle de forme de peu d’importance (ATA/596/2012 du 4 septembre 2012 ; ATA/356/2009 du 28 juillet 2009 ; ATA/473/2004 du 25 mai 2004 consid. 3 ; ATA/561/2003 du 23 juillet 2003 consid. 6 ; Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 264 n. 2.2.4.6).

L’interdiction du formalisme excessif postule une sorte d’appréciation du principe de la proportionnalité, sous l’angle de l’exigence d’un rapport raisonnable entre le but poursuivi et les moyens employés à cette fin (ATA/570/2013 du 28 août 2013 et la doctrine citée).

c. En l’espèce, la recourante se devait de fournir à l’AFC-GE tous les documents permettant à celle-ci d’établir les revenus réalisés durant les années 2001 à 2006 issus de l’activité lucrative indépendante non déclarée. Elle a imparti à cette fin à la recourante un délai au 30 juin, puis au 31 août 2008. À l’issue de ce délai, la recourante ne s’est pas manifestée. Elle n’a notamment pas demandé, avant son expiration, une nouvelle prolongation du délai à l’AFC-GE. En procédant à la taxation des rappels d’impôts près de deux mois après, l’AFC-GE n’a pas fait preuve de formalisme excessif à l’égard de la recourante, laquelle ne prêtait pas concours, comme il le lui appartenait, à l’établissement des éléments imposables.

Mal fondé, ce grief est rejeté.

16) Enfin, la recourante conclu à la remise des impôts dus.

La remise d’impôt étant de la compétence de l’AFC-GE (art. 167 al. 2 LIFD et 37 al. 2 de la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales du 26 juin 2008 - LPGIP - D 3 18), la chambre administrative la lui transmettra d’office pour raison de compétence (art. 11 al. 3 LPA).

17) S’agissant des amendes ICC et IFD, la recourante ne prend aucune conclusion à leur sujet devant la chambre de céans, de sorte qu’elles seront confirmées.

18) Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

19) Vu l’issue du recours, un émolument de CHF 2’500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 décembre 2011 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 14 novembre 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2’500.- à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il ne lui est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, représentée par Optima Management SA, mandataire, à l’administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Sudre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :