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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1297/1998

ATA/445/2010 du 29.06.2010 sur DCCR/700/2009 ( ICC ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 14.09.2010, rendu le 15.09.2010, IRRECEVABLE, 2C_701/2010
Descripteurs : ; PRESCRIPTION ; DÉLAI ABSOLU ; DÉLAI RELATIF ; CRÉANCE ; IMPÔT ; DROIT FISCAL ; AMENDE ; ENTRÉE EN VIGUEUR
Normes : aLPC.369 ; LPFisc.86
Résumé : Créance fiscale : la prescription relative régie par l'art. 369 aLPC, loi fiscale applicable à l'époque des faits, n'est pas atteinte. En effet, la notification de l'arrêt du Tribunal administratif d'un autre canton dont la procédure avait motivé la suspension de la procédure devant le Tribunal administatif genevois, doit être considérée comme un acte marquant la reprise de l'instance genevoise, interrompant la prescription. La question de l'application d'un délai de prescription absolue instauré par la LPFisc, entrée en vigueur ultérieurement à l'aLPC (qui ne prévoit pas de prescription absolue de la créance fiscale), peut demeurer ouverte, ladite prescription n'étant quoi qu'il en soit pas acquise. En revanche, la prescription absolue de l'action pénale concernant l'amende, basée sur le nouveau droit en raison du principe de la lex mitior, et commençant à courir dès la commission de l'infraction, est atteinte en raison de l'impossibilité de la suspendre ou de l'interrompre.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1297/1998-ICC ATA/445/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 29 juin 2010

en section

dans la cause

 

Monsieur C______
représenté par Me Antoine Kohler, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 6 juillet 2009 (DCCR/700/2009)


EN FAIT

1. Le litige porte sur l’impôt cantonal et communal (ICC) 1990.

2. Monsieur C______, né en 1937 (ci-après : le contribuable ou le recourant), s’est établi à Genève le 23 novembre 1983. Le 10 décembre 1990, il a quitté Genève pour s’installer à Commugny, dans le canton de Vaud.

3. A l’époque des faits, la société D______ (Suisse) S.A., société spécialisée dans le nettoyage professionnel et industriel dont le siège se trouvait à Genève (ci-après : D______ Suisse), était détenue à 100 % par D______ S.A. (ci-après : D______). Cette dernière, qui avait également son siège à Genève, avait un capital-actions de CHF 500'000.- divisé en 50 actions au porteur. Le capital était détenu à 75 %, soit l’équivalent de 38 actions, par le contribuable et à 25 % par D______ International Anstalt (ci-après : D______ International), établissement sis à Vaduz.

Le père du contribuable, feu C______, était le fondateur de D______ France S.A. Dans les années 1970, il avait vendu les actions de cette société à D______ International, laquelle en avait fait l’apport à D______ Holding lors de sa création en 1982. Feu C______ avait cédé la gestion des affaires à son fils depuis qu’il n’était plus en mesure de les mener, soit depuis 1979.

4. Dans sa déclaration fiscale 1990, le contribuable a mentionné un revenu net total de CHF 359'918.- et une fortune nette totale de CHF 443'910.-.

5. Le 17 novembre 1990, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC) a notifié au contribuable un bordereau ICC 1990 s’élevant à CHF 113'329,55. L’impôt était calculé sur un revenu imposable de CHF 361'902.- au taux de CHF 371'287.- et sur une fortune nette imposable de CHF 106'204.- au taux de CHF 443'910.-. Ce bordereau n’a pas fait l’objet d’une réclamation.

6. Par pli recommandé du 1er décembre 1995, l’AFC a informé le contribuable que consécutivement à l’ouverture, le 28 novembre 1995, d’une procédure en soustraction d’impôt portant sur l’impôt fédéral direct (IFD) pour la période 1989-1990, elle ouvrait une procédure de vérification de sa déclaration ICC 1990.

Les éléments mentionnés par le contribuable dans le canton de Vaud pour la période de taxation 1991-1992 indiquaient une fortune imposable de CHF 7'260'000.- alors que, d’après sa déclaration fiscale genevoise, sa fortune au 31 décembre 1989 ne se montait qu’à CHF 337'706.-.

La déclaration vaudoise du contribuable pour la période de taxation IFD 1991-1992 faisait état des éléments suivants :

- créance de CHF 3'000'000.- contre D______ Holding ayant généré pour 1989 et 1990 un rendement annuel de CHF 210'000.- ;

- créance de CHF 3'000'000.- contre D______ International ayant généré pour 1989 et 1990 un rendement annuel de CHF 150'000.- ;

L’AFC a invité le contribuable à fournir les pièces suivantes :

- relevé de ses comptes courants auprès de D______ Holding et de D______ International pour les exercices 1987 et 1988 ;

- mode d’encaissement des intérêts (avis de crédit) ;

- avis de débit et de crédit concernant les mouvements de fonds entre lui-même et les deux société (D______ Holding et D______ International) ;

- relevé des comptes bancaires sur lesquels ces versements ou prélèvements avaient été opérés durant les années 1988 et 1989.

7. Par courrier du 17 décembre 1995, le contribuable a expliqué que l’augmentation de fortune intervenue entre le 31 décembre 1989 et le 1er janvier 1991 résultait de ce qu’il avait touché dans le cadre de la succession de son père décédé en 1986. C______ avait remis, de son vivant, un patrimoine en fidéicommis à Monsieur M______ - son ami et homme de confiance - avec instruction de transmettre, quatre ans après son décès, les biens suivants à son fils :

- CHF 4'000'000.- en espèces ;

- 38 actions de D______ Holding ;

- CHF 3'000'000.- sous forme de créance contre D______ Holding.

Ces éléments de fortune avaient été mentionnés dans la déclaration fiscale du contribuable pour la période 1991-1992. Les rendements de créances mentionnés dans la déclaration fiscale étaient une estimation pour l’année civile 1991 et non un rendement échu en 1989 et 1990.

8. Le 22 décembre 1995, l’AFC a clôturé la procédure de vérification. Elle a informé le contribuable qu’elle portait pour l’ICC 1990 son revenu imposable de CHF 361'902.- à CHF 721'902.- et sa fortune imposable de CHF 106'204.- à CHF 6'106'204.-.

L’AFC a joint un bordereau rectificatif indiquant un supplément d’impôt de CHF 185'912,30 ainsi qu’un bordereau d’amende de CHF 46'478.-.

La procédure en soustraction d’impôts au titre de l’IFD 1989-1990 a pour sa part été clôturée le 12 décembre 1996. L’AFC a notifié au contribuable un rappel d’impôt d’un montant de CHF 72'863,70 ainsi qu’un bordereau d’amende pour soustraction d’impôt consommée d’un montant de CHF 18'216.-.

9. Le contribuable a formé une réclamation contre le bordereau rectificatif et le bordereau d’amende ICC 1990 le 18 janvier 1996. Les créances contre D______ Holding et D______ International mentionnées dans le procès-verbal de taxation avaient été acquises dans le cadre de l’exécution d’un fidéicommis. Cette fortune et le rendement y relatif ne pouvaient être retenus dans le calcul de l’impôt sur le revenu et la fortune en 1990 en raison du système de taxation praenumerando.

10. Dans le cadre de l’instruction de la réclamation, l’AFC a demandé, le 25 janvier 1996, au contribuable les renseignements suivants :

- copie du testament de feu C______, le dossier de succession ainsi que tout autre document relatif à la création et à l’exécution d’un fidéicommis ;

- rendement du patrimoine durant l’année civile 1989, c’est-à-dire pour les actions (dividende), pour le prêt chirographaire auprès de D______ Holding (intérêts), ainsi que pour les CHF 4’000'000.- de liquidités (intérêts), avec production de tous les justificatifs.

11. En l’absence de réponse, l’AFC a réitéré sa demande le 22 février 1996 en impartissant au contribuable un délai au 6 mars 1996.

12. Le 14 mars 1996, le contribuable a indiqué que son père, domicilié à Cannes (France), était décédé le 6 mai 1986. Il avait fondé l’entreprise D______ France, société dont les actions avaient été vendues à la société D______ International, à Vaduz, durant les années 1970. D______ International était contrôlée par M. M______.

En 1982, D______ International avait constitué D______ Holding à Genève, à laquelle elle avait fait apport des titres de D______ France. D______ Holding avait constitué en 1986 D______ Suisse, société développant une activité de nettoyage professionnel en Suisse. Le contribuable en présidait le conseil d’administration depuis 1992.

Feu C______ était un homme très discret tant vis-à-vis de ses enfants que de son épouse, aussi bien au sujet de sa situation patrimoniale que de ses relations avec M. M______. Ce n’était qu’au début de l’année 1990 que ce dernier avait informé le contribuable qu’il détenait un patrimoine pour le compte de feu son père et qu’une partie de celui-ci devait lui revenir.

Le contribuable avait préféré liquider à l’amiable ses relations avec M. M______ plutôt que de s’engager dans des procédures dont il était difficile de connaître le résultat final. Il ne disposait d’aucun papier ou document quelconque susceptible de justifier des droits sur les actifs confiés à M. M______. Le seul document dont il disposait était une déclaration de M. M______ datée du 2 septembre 1990 relative à la liquidation des avoirs de son père. Son déménagement dans le canton de Vaud en 1990 n’avait aucunement pour but de dissimuler ou d’organiser une évasion fiscale.

13. L’AFC a rejeté la réclamation le 9 juillet 1998 et maintenu la taxation du 22 décembre 1995. Le contribuable était titulaire d’une part théorique dans la succession de son père. Le rendement de cette part constituait un élément de revenu imposable.

Par décision du même jour, l’AFC a également rejeté, pour les mêmes motifs, la réclamation formée par le contribuable contre le bordereau rectificatif relatif à l’IFD 1989-1990.

14. Le 10 août 1998, le contribuable a saisi la commission cantonale de recours en matière d’impôts et conclu à l’annulation de la décision du 9 juillet 1998 relative à l’ICC 1990. Il a parallèlement formé recours auprès de la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct.

La prémisse selon laquelle il était titulaire d’une part théorique dans la succession de son père était erronée. Il était vrai que les éléments de fortune qu’il avait reçus en 1990 provenaient d’un patrimoine constitué par son père. D’après la déclaration de M. M______, les biens en question avaient été remis à ce dernier par M. C______ de son vivant avec pour charge de les transférer au recourant à l’issue de son décès.

A la suite de leur remise à M. M______, à une époque antérieure au décès de M. C______, les biens en question étaient devenus propriété de M. M______. Cette question ne donnait lieu à aucune contestation dans la jurisprudence et la doctrine françaises concernant la substitution fidéicommissaire. Le recourant ne pouvait en conséquence être soumis à l’impôt s’agissant de biens dont il n’avait, avant leur transfert en sa faveur en 1990, ni la propriété ni la jouissance, pas plus que la connaissance concrète.

15. L’AFC a répondu le 21 mai 1999 et conclu au rejet du recours. Les reprises opérées sur le plan du revenu et de la fortune n’étaient pas contestées par le contribuable. Le litige portait sur le bien-fondé de la taxation ICC 1990 en raison de l’existence d’un fidéicommis. Le contribuable n’ayant pas démontré l’existence d’un fidéicommis ou d’un contrat de fiducie alors que le fardeau de la preuve lui incombait, les reprises fiscales devaient être confirmées.

16. Le recourant a répliqué le 15 septembre 1999. Il a sollicité la suspension de la procédure jusqu’à droit jugé sur le recours alors pendant devant le Tribunal administratif du canton de Vaud au sujet de l’impôt cantonal et communal et de l’IFD couvrant les années 1991 à 1996. Dans sa réponse du 21 mai 1999, l’AFC admettait en effet s’être appuyée entièrement sur l’enquête diligentée par l’administration fiscale vaudoise.

L’administration fiscale vaudoise avait commis de nombreuses erreurs, celles-ci ayant servi de base au rejet de la réclamation formée devant l’AFC. Elle avait en particulier appliqué à tort le droit suisse au lieu du droit français concernant une substitution fidéicommissaire décidée par un ressortissant français résidant à Monaco en faveur d’un ressortissant suisse, s’agissant en tout cas de la partie devant revenir au recourant.

17. L’AFC a dupliqué le 29 octobre 1999 et indiqué s’opposer à la demande de suspension. Le recourant n’avait jamais contesté le montant des reprises fiscales pour l’ICC 1990. Les conditions pour l’admission d’un contrat de fiducie sur le plan du droit fiscal suisse ne dépendaient pas du droit étranger.

18. Par décision du 14 mars 2001, la commission cantonale genevoise de recours de l’impôt fédéral direct, devenue depuis le 1er janvier 2009 la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission) a rejeté le recours et confirmé le rappel d’impôt et l’amende infligés au contribuable au titre de l’IFD 1989-1990. Celui-ci n’avait pas apporté la preuve de l’existence d’un contrat de fiducie ou d’un fidéicommis entre son père et M. M______. Il n’avait pas non plus contesté le calcul des reprises effectuées par l’AFC.

Le 23 avril 2001, le contribuable a recouru auprès du Tribunal administratif contre cette décision.

Par décision du 26 avril 2001, le Tribunal administratif a prononcé la suspension de la procédure jusqu’à droit jugé sur la procédure pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud en matière d’impôts cantonaux ainsi que jusqu’à droit jugé sur la réclamation du contribuable en matière d’IFD par l’administration fiscale vaudoise.

19. Le recourant a sollicité, le 31 juillet 2001, la suspension de la procédure portant sur l’ICC 1990 pendante devant la commission, compte tenu de la suspension décidée le 26 avril 2001 par le Tribunal administratif dans la cause concernant l’IFD 1989-1990.

20. Le 25 octobre 2001, la commission a suspendu l’instruction de la procédure portant sur l’ICC 1990 jusqu’à droit jugé sur la procédure en cours devant le Tribunal administratif du canton de Vaud ainsi que jusqu’à droit jugé sur la réclamation du contribuable contre la décision en matière d’IFD par l’administration fiscale vaudoise.

21. La commission a informé le contribuable le 19 juin 2003 que l’instruction de la cause le concernant était toujours suspendue, conformément à sa décision du 25 octobre 2001.

22. Par pli du 11 juillet 2003, le contribuable a demandé à la commission de maintenir la suspension de la procédure jusqu’à droit jugé sur la procédure pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud.

23. Le 2 avril 2004, suite à une demande formulée par la commission le 26 mars précédent, le recourant a informé cette dernière que la procédure de rappel d’impôt concernant la période fiscale IFD 1991-1996 était toujours pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud. Il sollicitait le maintien de la suspension jusqu’à droit jugé par cette instance.

La commission a maintenu la suspension le 6 avril 2004.

24. La commission a informé le recourant le 27 janvier 2006 que, pour des raisons informatiques, la procédure le concernant était enregistrée sous un nouveau numéro.

25. Le 30 juillet 2007, le recourant a indiqué au Tribunal administratif que le Tribunal administratif du canton de Vaud avait rendu son arrêt le 14 juin 2007. Il envisageait de recourir contre cet arrêt. Le 15 octobre 2007, il a toutefois informé le Tribunal administratif qu’il avait renoncé à recourir.

26. Le 17 juin 2008, le Tribunal administratif, après avoir prononcé la reprise de la procédure concernant l’IFD 1989-1990 suspendue le 26 avril 2001, a admis le recours dirigé contre la décision de la commission cantonale de l’impôt fédéral direct du 14 mars 2001 (ATA/330/2007).

Le Tribunal administratif a jugé qu’il devait se saisir d’office de la question de la prescription des créances fiscales litigieuses. Le dernier acte interruptif de prescription remontant au 26 avril 2001, les créances fiscales étaient prescrites depuis le mois d’avril 2006.

27. Saisi d’un recours exercé par l’AFC, le Tribunal fédéral a annulé l’arrêt du Tribunal administratif le 5 novembre 2008 (Arrêt 2C_555/2008).

La prescription n’était pas acquise lorsque le Tribunal administratif avait statué, chacune des lettres que le juge délégué à l’instruction avait envoyées au contribuable entre 2002 et 2007 pour s’enquérir du sort de la procédure pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud ayant eu pour effet d’interrompre la prescription à l’égard des créances litigieuses. La cause a été renvoyée au Tribunal administratif pour qu’il tranche le recours sur le fond.

28. Par arrêt du 5 mai 2009, le Tribunal administratif a rejeté le recours formé par le contribuable à propos de l’IFD 1989-1990 (ATA/224/2009).

La décision de la commission reposait sur une correcte répartition du fardeau de la preuve en mettant celle-ci à la charge de l’AFC. Cette dernière avait, au vu des indices recueillis, prouvé les faits qu’elle avançait, leur infirmation incombant au contribuable. Les pièces produites par celui-ci n’apportaient pas d’autres éléments susceptibles d’amener l’AFC à se détacher de la solution retenue par la commission. Les conditions objective et subjective de la soustraction d’impôt étaient réalisées. La commission n’avait pas violé le droit fédéral en confirmant le montant de l’amende infligée au contribuable. L’arrêt n’a pas fait l’objet d’un recours.

29. Par décision du 6 juillet 2009, notifiée le 15 suivant et reçue le 16 juillet 2009, la commission a rejeté le recours exercé par le contribuable à propos de l’ICC 1990.

Compte tenu de l’ancienneté du litige, la question de la prescription devait être examinée d’office. La prescription de la créance fiscale n’était pas atteinte, un délai inférieur à cinq ans, non compris l’année courante, s’étant écoulé entre la remise du bordereau ICC 1990 et l’ouverture de la procédure de vérification par l’AFC. La prescription avait été interrompue à plusieurs reprises par la suite, chaque fois en temps utile. Dans l’arrêt qu’il avait rendu le 5 novembre 2008 à propos de la procédure concernant, parallèlement à l’ICC 1990, l’IFD 1989-1990 à la charge du contribuable, le Tribunal fédéral avait jugé que les lettres adressées par le juge délégué à l’instruction au conseil du recourant représentaient des démarches destinées à mettre un terme à la suspension de la procédure. Ces lettres constituant des actes tendant au recouvrement des créances fiscales litigieuses, la prescription n’était pas encore acquise le 14 juin 2007, lorsque le Tribunal administratif du canton de Vaud avait rendu son arrêt. Comme le recourant avait requis la suspension de la cause auprès de la commission jusqu’à droit jugé sur la procédure pendante devant le Tribunal administratif vaudois, un nouveau délai de cinq ans avait commencé à courir depuis le prononcé de l’arrêt rendu par cette instance.

L’ouverture d’une procédure de rappel d’impôt n’était soumise à aucune condition. Constatant, au vu des éléments déclarés par le contribuable dans le canton de Vaud peu après son départ de Genève, que sa fortune imposable avait passé de CHF 443'910.- à CHF 7'260'000.-, l’AFC était légitimée à ouvrir une procédure de vérification limitée à l’année fiscale 1990.

Des revenus à hauteur de CHF 360'000.- et une fortune de CHF 6'000'000.- n’ayant pas été déclarés, c’était à bon droit que l’AFC avait procédé à un rattrapage d’impôt. De même, l’amende infligée au contribuable correspondant au quart de l’impôt éludé avait été infligée d’une manière conforme à la loi, qui prévoyait que le contribuable pouvait être frappé, en cas de négligence, d’une amende ne dépassant pas le double de l’impôt éludé. Cette solution était par ailleurs la plus favorable pour le recourant. La clause applicable à l’époque des faits ne mentionnait pas de sanction minimum, alors que la norme qui l’avait remplacée par la suite prévoyait qu’en règle générale, l’amende était fixée au montant de l’impôt soustrait en cas de taxation incomplète, intentionnelle ou par négligence.

30. Le 14 août 2009, M. C______ a recouru auprès du Tribunal administratif. Il conclut à l’annulation de la décision de la commission du 6 juillet 2009 sous suite de frais et dépens.

La prescription des créances fiscales commençait à courir à partir de la naissance de la créance. En l’espèce, le dernier acte interruptif de prescription était la lettre que le conseil du recourant avait adressée à la commission le 26 mars 2004. C’était à tort que la commission avait retenu que le prononcé de l’arrêt du Tribunal administratif vaudois avait interrompu la prescription. L’arrêt avait été rendu par une autre autorité, dans une autre procédure, dans un autre canton, dans une cause portant sur un autre impôt et sur des périodes fiscales différentes. La prescription était donc acquise depuis le 26 mars 2009. La prescription absolue de dix ans était également acquise. S’il était vrai que l’ancien droit ne prévoyait pas de prescription absolue de la créance fiscale, tel n’était pas le cas d’après la norme applicable actuellement.

La prescription de l’action pénale était aussi acquise. L’infraction reprochée au recourant se prescrivait par cinq ans, non compris l’année courante. La prescription relative était acquise dès lors qu’il n’y avait pas eu d’acte tendant à la poursuite du contribuable depuis le 26 avril 2001. La prescription absolue était également atteinte, aucune amende exécutoire n’ayant été prononcée dans le délai de dix ans.

La commission avait violé les règles relatives au fardeau de la preuve, faute d’avoir examiné l’argumentation du recourant concernant la validité de la substitution fidéicommissaire et les raisons pour lesquelles il fallait mettre en doute la validité de l’attestation de M. M______. La commission s’était bornée à indiquer que la procédure de rappel d’impôt genevoise s’était entièrement appuyée sur les investigations vaudoises et qu’il n’y avait aucune raison de s’écarter de ces conclusions. Il s’agissait pourtant de deux procédures distinctes, portant sur des impôts distincts et des périodes différentes.

31. L’AFC a répondu le 15 octobre 2009 et conclu au rejet du recours. Le litige concernant l’IFD 1989-1990 à la charge du contribuable avait conduit le Tribunal fédéral à juger que la créance fiscale n’était pas prescrite, nonobstant la suspension de la procédure décidée le 26 avril 2001 par le Tribunal administratif.

Dans le cas d’espèce, la procédure avait également été suspendue par décision de la commission du 25 octobre 2001. La commission avait jugé sur cette base qu’au moment où l’arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud avait été rendu, la créance fiscale n’était pas prescrite. Le prononcé de l’arrêt vaudois avait interrompu la prescription, le recourant ayant sollicité la suspension jusqu’à droit jugé sur la procédure en cours dans ce canton. Un nouveau délai de cinq ans avait commencé à courir à compter de cette date.

Le contribuable ne pouvait se prévaloir de la prescription avant même que la procédure dont il attendait l’issue en matière d’IFD n’ait été tranchée. Pareil comportement était contradictoire et contrevenait au principe de la bonne foi sur lequel l’institution de la prescription reposait. En l’occurrence, le contribuable avait sollicité la suspension de sa cause devant la commission en se prévalant tout à la fois de l’existence de la procédure pendante devant le Tribunal administratif genevois et devant le Tribunal administratif vaudois. La créance fiscale n’était par conséquent pas prescrite lorsque la commission avait, le 6 juillet 2009, rendu la décision querellée.

L’ancien droit ne prévoyait pas de prescription absolue de la créance fiscale. Dans ces cas, les délais instaurés par la nouvelle loi commençaient à courir dès l’entrée en vigueur de celle-ci. Par application analogique avec les principes dégagés par le Tribunal fédéral en matière d’IFD, le délai de prescription absolue de quinze ans prévu par l’art. 53 al. 3 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes, du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) devait se calculer à compter de l’application obligatoire de cette loi, soit dès le 1er janvier 2001. Partant, la créance en rappel d’impôt n’était pas prescrite en 2009. L’amende infligée au contribuable n’était pas prescrite non plus.

Enfin, les conditions entourant l’ouverture d’une procédure de rappel d’impôt étaient réalisées. C’était à bon droit que des reprises en revenu et en fortune avaient été opérées par l’AFC.

32. La commission a déposé son dossier le 16 octobre 2009 et indiqué persister dans les considérants et le dispositif de sa décision.

33. Le recourant a répliqué le 30 novembre 2009. L’AFC soutenait à tort que l’arrêt rendu par le Tribunal administratif vaudois le 14 juin 2007 avait interrompu la prescription. Seules les requêtes des instances genevoises interpellant le contribuable sur l’issue de la procédure vaudoise valaient interruption de prescription. Or, aucune communication de ce genre ni aucun autre acte interruptif de prescription n’était intervenu entre le 26 mars 2004 et le 6 juillet 2009. La question de la prescription de la créance fiscale s’appréciant d’office, la question de la bonne foi du contribuable était dépourvue de pertinence.

La prescription de l’infraction était de cinq ans, non compris l’année courante. Ce délai commençait à courir dès la commission de l’infraction, soit en cas d’absence de déclaration dès la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n’avait pas été effectuée. Il était interrompu par tout acte pendant la poursuite de l’infraction. En l’espèce, l’AFC n’avait pas invoqué le moindre acte interruptif de prescription.

34. Le 12 février 2010, l’AFC a dupliqué. Contrairement aux allégations du recourant, il existait des actes interruptifs de prescription entre le 26 mars 2004 et le 6 juillet 2009. La décision par laquelle la commission avait suspendu la procédure, avait interrompu la prescription, à l’instar des autres communications postérieures par lesquelles le recourant avait été invité à indiquer l’état de la procédure pendante devant les instances vaudoises. Il en allait de même de la lettre par laquelle la commission avait, le 27 janvier 2006, informé le recourant de la modification du numéro de la cause et de son enregistrement sous une autre appellation.

L’arrêt du Tribunal administratif vaudois avait mis un terme à la suspension de la procédure. Il s’ensuivait la reprise de la procédure pendante devant la commission, ce qui faisait courir un nouveau délai de prescription. La décision rendue par la commission le 6 juillet 2009 avait ainsi été rendue dans le délai de cinq ans prévu par la loi. En se prévalant de la prescription, le recourant agissait d’une manière contraire au principe de la bonne foi puisque c’était à son initiative que le sort des causes ICC 1990 et IFD 1989-1990 avait été lié. Pour avoir sollicité et obtenu la suspension de la cause concernant l’ICC 1990 dans l’attente de la décision concernant l’IFD 1989-1990, il ne saurait prétendre de bonne foi que la créance en rappel d’impôt cantonal était prescrite depuis le 26 mars 2009, soit avant même que la procédure concernant l’IFD 1989-1990 n’ait été tranchée. Ce n’était en effet que le 5 mai 2009 que le Tribunal administratif genevois avait statué de manière définitive sur ce sujet.

S’agissant de la prescription absolue et de la prescription de l’amende, l’AFC a persisté dans ses explications antérieures.

35. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Le litige porte sur l’ICC 1990, soit sur un exercice fiscal régi par la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (LCP - D 3 05) dans son ancienne teneur. De nouvelles normes fiscales sont en effet entrées en vigueur le 1er janvier 2001 en application de la LHID. Elles ont abrogé, à partir de cette date, la plupart des dispositions de la LCP.

b. En vertu du principe de la non-rétroactivité, le nouveau droit ne s’applique pas aux faits antérieurs à sa mise en vigueur (P. MOOR, Droit administratif, vol. I, Berne 1994, p. 170 ; B. KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., Bâle 1991, p. 116). L’adaptation de la législation fiscale genevoise aux exigences de la LHID est dépourvue d’effet rétroactif (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 1.2 ; ATA/164/2010 du 9 mars 2010 consid. 2 ; ATA/956/2004 du 7 décembre 2004 consid. 2 ; ATA/29/2004 du 13 janvier 2004 consid. 2). Comme l’a relevé la commission et comme l’admettent les parties, le litige doit par conséquent être traité selon la loi fiscale applicable à l’époque des faits, soit l’ancienne loi (aLCP).

c. Le même raisonnement s’applique à la loi sur l’imposition des personnes physiques adoptée le 12 juin 2009 par le Grand Conseil et acceptée en votation populaire le 27 septembre suivant (LIPP - D 3 08), ultérieurement à la décision de la commission. Cette loi unifie les cinq lois issues de l’adaptation de la législation fiscale genevoise sur l’imposition des personnes physiques aux exigences de la LHID.

A teneur de son art. 71, la LIPP déploie ses effets depuis le 1er janvier 2010. D’après son art. 72 al. 1, elle s’applique pour la première fois aux impôts de la période fiscale 2010. Les impôts relatifs aux périodes fiscales antérieures demeurent régis par les dispositions de l’ancien droit, même après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi (ATA/38/2010 du 26 janvier 2010 consid. 2).

3. a. Dans un premier moyen, le recourant invoque la prescription de la créance fiscale. Selon lui, le dernier acte interruptif de prescription devant la commission est intervenu le 26 mars 2004. La prescription quinquennale de l’art. 369 al. 1 aLCP aurait été acquise le 26 mars 2009, aucun acte interruptif n’ayant été accompli dans l’intervalle. La commission aurait retenu à tort que le prononcé de l’arrêt du Tribunal administratif vaudois, le 14 juin 2007, aurait fait partir un nouveau délai de prescription.

b. Les concepts de prescription et de péremption sont des institutions qui concernent directement l’existence de la créance fiscale et relèvent du droit de fond (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_555/2008 du 5 novembre 2008 consid. 3.1 ; 2P.227/2002 du 19 juin 2003, publié in RDAF 2002 II 89 p. 94 et les autres références citées).

La prescription s’examine d’office lorsqu’un particulier est débiteur de l’Etat (ATF 106 Ib 357 consid. 3a p. 364 ; ATA/267/2008 du 27 mai 2008 consid. 8 ; ATA/96/2008 du 4 mars 2008 consid. 12 ; ATA/21/2005 du 18 janvier 2005 consid. 7). En matière d’impôt sur le revenu et la fortune, il convient de distinguer la prescription du droit de taxer, d’une part, et la prescription du droit de percevoir l’impôt, d’autre part. En effet pour ces impôts, la créance fiscale doit d’abord être établie par l’administration à l’intérieur d’une certaine période. La prescription de la créance fiscale, qui implique le recouvrement de l’impôt intervient ensuite (X. OBERSON, Droit fiscal suisse 3ème éd., Bâle 2007, p. 496, n° 28).

c. A l’époque des faits, la limitation dans le temps du droit de taxer était régie par l’art. 368 aLCP. Aux termes de cette disposition, lorsqu’un contribuable n’a pas payé l’impôt pour une année déterminée, soit qu’il n’ait pas fait de déclaration, soit que celle-ci ait été incomplète, soit qu’il n’ait pas été taxé d’office, l’impôt non payé peut lui être réclamé dans un délai de cinq ans, non compris l’année courante.

Le délai prévu par l’art. 368 aLCP est en réalité un délai de péremption dont le dies a quo est fixé au 1er janvier de l’année suivant l’objet de la taxation. La procédure de taxation est valablement introduite par le premier acte de l’AFC déployant ses effets sur le plan externe et portant sur la taxation du contribuable, à l’exemple d’un bordereau rectificatif. Si un tel acte est intervenu avant l’échéance du délai de cinq ans prévu par la loi, le droit de procéder à la taxation n’est plus limité. L’aLCP n’institue en effet pas de prescription absolue du droit de taxer (ATA/267/2008 du 27 mai 2008 consid. 8b ; ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 6b ; ATA R. du 25 août 1992, publié in SJ 1993, p. 569).

d. En l’espèce, le délai institué par l’art. 368 aLCP n’était pas encore échu au moment de l’ouverture, le 1er décembre 1995, de la procédure de vérification visant le recourant. C’est dès lors à bon droit que la commission a retenu que la prescription du droit de taxer n’était pas atteinte.

4. a. La prescription de la créance fiscale de la période ICC 1990 est régie par l’art. 369 aLCP. Selon cette disposition, les créances de l’Etat et des communes pour la perception de l’impôt se prescrivent dans un délai de cinq ans dès le jour où le bordereau de perception a été adressé au contribuable. Ce délai peut être interrompu par toute mesure de l’autorité tendant à la taxation, chaque mesure en question faisant repartir un nouveau délai de même durée. L’interruption de la prescription s’apprécie au regard des art. 129 et suivants du Code des obligations du 20 mars 1911 (CO - RS 220 ; ATA/267/2008 du 27 mai 2008 consid. 8c ; ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 3c et 7).

b. Depuis la remise au recourant de son bordereau rectificatif ICC 1990, le 22 décembre 1995, la prescription a été interrompue à plusieurs reprises, chaque fois en temps utile. Elle l’a été en premier lieu par la réclamation formée le 18 janvier 1996, par la décision sur réclamation du 9 juillet 1998 puis par le recours exercé devant la commission le 10 août suivant. La suspension de la procédure décidée le 25 octobre 2001 par la commission dans l’attente du sort réservé à la cause portant, en parallèle, sur le sort de l’IFD 1989-1990 a de même interrompu la prescription, tout comme l’information portée à la connaissance du recourant par la commission le 19 juin 2003. Le maintien de la suspension évoqué le 6 avril 2004 par la commission jusqu’à droit jugé dans la procédure pendante devant le Tribunal administratif du canton de Vaud constitue également un acte interruptif de prescription. De l’avis de la commission le prononcé, le 14 juin 2007, de l’arrêt du Tribunal administratif vaudois a eu pour effet d’interrompre une nouvelle fois la prescription.

Le recourant conteste ce point de vue, l’arrêt rendu par l’instance vaudoise concernant selon lui une autre procédure, un autre impôt et un autre canton. L’AFC considère que par application du principe de la bonne foi, le recourant ne saurait invoquer la prescription alors qu’il a lui-même sollicité et obtenu la suspension de la cause concernant l’ICC 1990 dans l’attente précisément de l’arrêt du Tribunal administratif vaudois. L’AFC relève aussi que des actes interruptifs de prescription sont survenus entre le 26 mars 2004 et le 6 juillet 2009. La lettre par laquelle la commission a, le 27 janvier 2006, informé le recourant du nouvel enregistrement de la cause le concernant a constitué un acte de procédure s’inscrivant dans le processus tendant à déterminer la créance fiscale et valant selon l’AFC, à ce titre, interruption de la prescription.

c. La notion d’acte interruptif de la prescription fiscale s’interprète largement. Conformément à la jurisprudence, tous les actes de l’autorité qui sont portés à la connaissance du contribuable dans le processus tendant à déterminer la créance ont pour effet d’interrompre la prescription même s’ils ne continuent pas concrètement la procédure de taxation. Il en va ainsi non seulement des actes de perception de l’impôt proprement dit mais aussi de l’ensemble des autres actes officiels, à l’image de simples lettres ou d’injonctions s’inscrivant dans le suivi de la taxation.

La communication de l’autorité de taxation indiquant à un contribuable que sa réclamation était transmise à l’autorité compétente a par exemple été considérée par le Tribunal fédéral comme un acte interruptif de prescription. Prenant place dans le processus de recouvrement de la créance fiscale, ce type de mesure porte à la connaissance du contribuable la volonté des autorités de poursuivre les démarches visant à recouvrer la créance fiscale (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_555/2008 du 5 novembre 2008 consid. 3.2 ; 2P.1/2007 du 24 mai 2007 consid. 4.4 et les autres références citées).

d. La communication de la commission à l’adresse du recourant survenue le 27 janvier 2006 s’inscrit dans ce contexte. Faisant état de la procédure en cours au sujet de l’ICC 1990, cette communication a précisé le cadre organique et le statut à l’intérieur desquels le recours exercé par le contribuable allait continuer à être traité. Il s’agit par conséquent d’un acte qui, intégré dans le processus plus général de recouvrement de la créance fiscale au sens de la jurisprudence du Tribunal fédéral, vaut interruption de la prescription.

e. Dans l’arrêt qu’il a rendu à propos de l’IFD 1989-1990 à la charge du recourant, le Tribunal fédéral a souligné que la suspension de la procédure de recours requise devant le Tribunal administratif genevois dans l’attente du sort réservé à la procédure de soustraction conduite par les autorités vaudoises avait été décidée en raison de l’influence que cette dernière exercerait. Il n’était par conséquent pas admissible de prétendre que la procédure vaudoise ne jouait aucun rôle sur la procédure genevoise (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_555/2008 du 5 novembre 2008 consid. 3.3).

La notification, le 14 juin 2007, de l’arrêt du Tribunal administratif vaudois a constitué une étape déterminante sous l’angle de la procédure alors en cours devant la commission. La suspension décidée le 25 octobre 2001 a fait suite à une demande du recourant sollicitant précisément, dans un souci d’économie de procédure, d’attendre l’issue du contentieux le concernant à propos des mêmes faits dans le canton de Vaud. Cette demande a été réitérée par le recourant le 2 avril 2004. Dans l’arrêt qu’il a rendu au sujet de la procédure en soustraction d’impôt concernant le recourant au regard de l’IFD 1989-1990, le Tribunal fédéral a souligné que la suspension de la procédure devant le Tribunal administratif du canton de Genève avait été requise à la demande du contribuable. Ce dernier soutenait que le sort de la procédure de soustraction conduite par les autorités vaudoises exercerait une influence sur la procédure en soustraction similaire ouverte dans le canton de Genève. Dans ces conditions, il pouvait et devait comprendre que les requêtes tendant à savoir si la procédure devant le Tribunal administratif du canton de Vaud était toujours en cours constituaient des démarches destinées à mettre un terme à la suspension de la procédure de recours dont l’objet était précisément d’établir le bien-fondé des créances fiscales litigieuses et finalement de décider de leur éventuel recouvrement (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_555/2008 du 5 novembre 2008 consid. 3.3).

f. Développé dans le cadre du litige portant sur l’IFD 1989-1990, le raisonnement du Tribunal fédéral vaut, mutatis mutandis, pour ce qui concerne l’ICC 1990, dès lors que le contentieux en cause a, à la demande du contribuable, été suspendu dans l’attente du sort réservé à la procédure concernant l’IFD 1989-1990. En tant qu’il a conditionné la suspension de la cause portant sur l’ICC 1990 à la charge du recourant, l’arrêt du Tribunal administratif vaudois doit être considéré comme un acte de procédure qui a marqué la reprise de l’instance devant la commission.

Au vu de ces éléments, c’est à bon droit que la commission a retenu que la prescription relative n’était pas acquise lors du prononcé de l’arrêt du Tribunal administratif du canton de Vaud et qu’un nouveau délai de prescription a commencé à courir à compter de cette date.

5. a. Le recourant fait valoir que la prescription absolue de dix ans est atteinte. S’il est vrai que l’ancien droit ne prévoyait pas de prescription absolue de la créance fiscale, tel n’est plus selon lui le cas d’après l’art. 86 LPFisc. L’AFC conteste ce point de vue et considère, par application analogique des principes dégagés par le Tribunal fédéral en matière d’IFD, que le délai de prescription absolue de quinze ans prévu par l’art. 53 al. 3 LHID se calcule à compter de l’application de cette loi, soit dès le 1er janvier 2001. La prescription absolue n’est selon l’AFC pas atteinte.

b. L’ancien droit ne prévoyait pas de prescription absolue de la créance fiscale. La prescription se présentant, ainsi qu’il a été indiqué précédemment (consid. 3b), comme une institution de droit matériel et non comme une règle de procédure, son statut est régi en fonction du droit en vigueur lors des périodes fiscales litigieuses (ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 3a). Il est possible dans ces conditions de s’interroger sur l’application d’un délai de prescription absolue instauré par une loi adoptée ultérieurement à l’aLCP.

La question souffre de demeurer indécise. En tout état, les délais instaurés par la nouvelle loi commencent à courir à compter de l’entrée en vigueur de celle-ci, soit le 1er janvier 2002 en l’occurrence (ATF 126 II 1 consid. 3 p. 6 ; ATA/297/2009 du 16 juin 2009 consid. 15.2 ; ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 7c). Le délai instauré par la LPFisc est de dix ans à compter de la fin de l’année au cours de laquelle la taxation est entrée en force (ATA/267/2008 du 27 mai 2008 consid. 8).

Ce délai n’est pas échu en l’espèce. Le moyen tiré de la prescription absolue doit par conséquent être rejeté, sans qu’il s’avère nécessaire d’examiner si le délai de quinze ans auquel se réfère l’AFC au sens de l’art. 53 al. 3 LHID trouve application.

6. a. Invoquant la prescription de l’action pénale, le recourant conclut à l’annulation de l’amende mise à sa charge. La prescription relative est acquise en l’espèce, aucun acte tendant à la poursuite n’étant survenu depuis le 26 avril 2001. La prescription absolue l’est également, aucune amende exécutoire n’ayant selon le recourant été prononcée dans le délai de dix ans.

L’AFC conteste cette argumentation. S’agissant du droit harmonisé applicable en matière d’amende pour soustraction fiscale, un nouveau délai commence à courir à chaque interruption, la prescription ne pouvant être prolongée de plus de la moitié de sa durée initiale. La durée initiale étant de dix ans, la prescription absolue est de quinze ans à partir de l’entrée en vigueur du nouveau droit, soit le 1er janvier 2001. S’agissant de la prescription relative, l’affirmation de recourant selon laquelle celle-ci n’aurait pas été interrompue depuis le 26 avril 2001 est inexacte. L’instruction de la procédure portant sur l’ICC 1990 a en effet été interrompue le 25 octobre 2001 et à plusieurs reprises par la suite. L’AFC se réfère également au principe de la bonne foi dans des termes identiques à ceux qu’elle a développés au sujet de la prescription de la créance fiscale.

b. L’amende réprimant la soustraction fiscale constitue une sanction de caractère pénal qui est, à ce titre, soumise aux délais de prescription applicables en la matière. Selon le droit en vigueur à l’époque des faits (art. 341A aLCP), la prescription de l’infraction est de cinq ans, non compris l’année courante, la prescription absolue se calculant, à teneur de la jurisprudence, par dix ans dès la commission de l’infraction (ATA/346/2006 consid. 4a ; ATA/440/2005 du 21 juin 2005 consid. 3e ; ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 8c ; ATA R. du 25 août 1992, in SJ 1993, p. 569). Cette question n’a pas été examinée par la commission, dont l’analyse s’est limitée à la prescription du droit de taxer et à la prescription de la créance fiscale.

c. Conformément au principe de la lex mitior, si la loi pénale en vigueur au moment de la commission de l’infraction et les lois pénales postérieures adoptées avant le prononcé d’un jugement définitif sont différentes, le juge doit appliquer celle dont les dispositions sont les plus favorables au prévenu (Arrêt du Tribunal fédéral 4A_620/2009 du 7 mai 2010 consid. 4.3.2). En l’occurrence, le nouveau droit n’est pas plus favorable au recourant, les art. 59 et suivants LPFisc prévoyant un délai de prescription absolue de quinze ans (ATA/265/2007 du 22 mai 2007 consid. 3 ; ATA/440/2005 du 21 juin 2005 consid. 3 ; ATA/547/2001 du 28 août 2001 consid. 8 et les références citées).

Le nouveau droit n’étant pas plus favorable, il sera fait application d’une prescription relative de cinq ans et absolue de dix ans. Ces délais commencent à courir dès la commission de l’infraction (ATA/267/2008 du 27 mai 2008 consid. 9 et les références citées). A cet égard, l’AFC erre en se référant à un obiter dictum issu d’un précédent isolé (ATA/21/2005 du 18 janvier 2005) pour tenter de porter à quinze ans la prescription absolue de l’infraction reprochée au recourant. Non seulement l’arrêt en question ne marque nullement une rupture dans l’approche traditionnelle du tribunal de céans en matière de prescription absolue concernant l’amende fiscale au sens de l’aLCP, mais de surcroît cette approche a été constamment suivie dans d’autres arrêts rendus ultérieurement (ATA/440/2005 du 21 juin 2005 consid. 3e ; ATA/265/2007 du 22 mai 2007 consid. 3 et les autres références citées).

d. Le délai quinquennal prévu par l’art. 341A aLCP commence à courir dès la commission de l’infraction. Il est interrompu par tout acte pendant la poursuite de cette dernière. En l’espèce, il n’est pas contesté que l’amende litigieuse a été infligée au recourant à l’intérieur de ce délai. Il est par ailleurs établi que la procédure de soustraction d’impôt, y compris dans son volet pénal, a été valablement interrompue à réitérées reprises depuis, comme indiqué précédemment (consid. 4b à e). La prescription relative de l’amende n’est dans ces conditions pas atteinte.

e. Il en va différemment en ce qui concerne la prescription absolue. Le délai décennal au sens de la jurisprudence précitée est en effet arrivé à son terme depuis la commission de l’infraction, celle-ci se rapportant à l’exercice fiscal 1990.

L’AFC invoque à tort à la jurisprudence du Tribunal administratif pour tenter de démontrer que la prescription absolue n’est pas atteinte. Le précédent auquel elle se réfère ne concerne en effet nullement cette problématique, mais a trait au barème fiscal applicable à la suite de la séparation de personnes mariées (ATA/321/2006 du 13 juin 2006).

f. Dans sa duplique, l’AFC fait valoir que le principe de la bonne foi fait obstacle à l’invocation de la prescription absolue par le recourant. L’argument ne saurait être retenu. A l’inverse de la prescription relative, la prescription absolue se caractérise en effet par son déroulement stable et continu de même que par l’impossibilité de la suspendre ou de l’interrompre, notamment par des demandes émanant du justiciable ou de l’autorité. En tant que la mise en œuvre de la prescription absolue n’est pas tributaire de l’action des parties à la procédure, la bonne foi de ces dernières est dépourvue de pertinence.

La question de la bonne foi liée à l’attitude du contribuable pourrait se poser différemment à l’égard de la prescription relative. Dès lors toutefois que celle-ci n’est acquise ni pour l’amende ni pour la créance fiscale, les moyens développés par l’AFC sur ce plan n’ont pas besoin d’être analysés.

g. En conséquence, l’infraction reprochée au recourant au titre de l’ICC 1990 ne peut plus être sanctionnée et l’amende concernant cette année devra être annulée.

7. a. Dans un ultime moyen, le recourant invoque une violation des règles relatives au fardeau de la preuve. Selon lui, la commission s’est bornée à indiquer que la procédure de rappel d’impôt genevoise s’était entièrement appuyée sur les investigations vaudoises alors qu’il s’agissait de deux procédures distinctes, portant sur des impôts distincts et des périodes différentes. Reprenant longuement l’état de fait depuis la fondation de la société D______ France S.A., il indique n’avoir appris oralement qu’au début de l’année 1990 par M. M______ qu’une partie du patrimoine de feu C______ devait lui revenir. La commission n’a pas examiné la validité de la substitution fidéicommissaire en faveur de M. M______. Il ne pouvait en conséquence être tenu responsable de l’impôt s’agissant de biens dont il n’avait, avant leur transfert en sa faveur en 1990 ni la propriété ni la jouissance, ni même la connaissance concrète.

L’AFC conteste cette version. Les faits sur lesquels la procédure genevoise et la procédure vaudoise reposent ont porté sur la question de savoir si le recourant était l’ayant droit économique de D______ S.A. La réponse apportée à cette question s’est révélée positive.

b. En matière fiscale, les règles relatives au fardeau de la preuve impliquent que l’autorité établisse les faits qui justifient l’assujettissement et qui augmentent la taxation, tandis que le contribuable doit prouver les faits qui diminuent la dette ou la suppriment (ATF 92 I 253 consid. 2 p. 256/257 ; X. OBERSON, op. cit., p. 442, n° 9 ; E. BLUMENTSTEIN/P. LOCHER, System des schweizerischen Steuerrechts, 6ème éd., Zurich 2002, p. 416 et les références citées). Il incombe ainsi à l’autorité fiscale d’apporter la preuve de l’existence d’éléments imposables qui n’ont pas été annoncés (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_199/2009 du 14 septembre 2009 consid. 3.1 et les références citées, publié in RDAF 2009 II p. 560). Si les preuves recueillies par l’autorité fiscale fournissent suffisamment d’indices révélant l’existence d’éléments imposables, il appartient au contribuable d’établir l’exactitude de ses allégations et de supporter le fardeau de la preuve du fait qui justifie son exonération (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_514/2009 du 25 mars 2010 consid. 5.2 ; 2C_47/2009 du 26 mai 2009 consid. 5.4, publié in RDAF 2009 II p. 489 ; ATF 121 II 257 consid. 4c/aa p. 266).

c. Dans l’arrêt qu’il a rendu le 5 mai 2009 à propos de l’IFD 1989-1990, le tribunal de céans s’est prononcé de manière détaillée sur l’origine du patrimoine qui a été remis au recourant en exécution d’une substitution fidéicommissaire. L’arrêt relève que la commission avait admis les faits établis par l’AFC, laquelle s’était elle-même fondée sur le résultat des enquêtes diligentées par l’autorité fiscale vaudoise. A cet égard, de nombreux indices permettant de considérer que le contribuable disposait de D______ International avaient été réunis. Il incombait alors au contribuable d’infirmer ces éléments par la preuve du contraire du moment que les faits établis sur la base d’indices précis étaient hautement vraisemblables.

Le Tribunal administratif a poursuivi en soulignant que le recourant n’avait été en mesure de fournir ni à l’AFC ni à la commission des preuves renversant ces éléments ou permettant une autre interprétation comme, par exemple, les documents relatifs à la succession de feu son père et au partage entre les héritiers, l’imposition du patrimoine et des revenus y afférant en France ou à Monaco, voire la correspondance échangée entre lui-même et M. M______ au sujet du contenu de l’attestation du 2 septembre 1990 ayant nécessité – aux dires du contribuable – de longues tractations. La seule preuve que le recourant ait apportée est l’attestation précitée. Or, ce document a été jugé insuffisant pour démontrer l’existence d’une substitution fidéicommissaire.

Le Tribunal administratif est ainsi arrivé à la conclusion que la décision de la commission chargée de statuer sur l’IFD 1989-1990 était fondée sur une répartition correcte du fardeau de la preuve puisque ce fardeau n’avait aucunement été mis à la charge du contribuable mais bien à celle de l’AFC, qui devait apporter la preuve de la soustraction. L’AFC ayant, au vu des indices recueillis, prouvé les faits qu’elle avançait, il appartenait au contribuable d’infirmer les faits déterminants. Or, celui-ci s’est contenté de les contester, sans apporter de preuve concluante ni d’éléments propres à amener le tribunal de céans à se détacher de la solution retenue par la commission. De même, le Tribunal administratif a considéré qu’il était établi que le recourant était bien l’ayant droit économique de D______ International, sans qu’il ait déclaré les éléments de revenu et de fortune y relatifs (ATA/224/2009 du 5 mai 2009, consid. 7 à 9).

d. Reprenant en détail l’ensemble des éléments qui précèdent, la commission a considéré qu’elle ne saurait tenir, à propos du même problème concernant le même contribuable pour la même période fiscale un raisonnement différent selon qu’elle est amenée à appliquer des dispositions de même teneur relevant du droit fédéral ou cantonal.

La décision querellée est fondée sur une répartition correcte du fardeau de la preuve puisque la commission n’a aucunement mis ce fardeau à la charge du contribuable mais bien à celle de l’AFC, qui devait apporter la preuve de la soustraction. L’AFC a, au vu des indices recueillis, prouvé les faits qu’elle avançait. C’était alors au contribuable d’infirmer les faits déterminants. Sans que l’on puisse parler de renversement du fardeau de la preuve, il revenait ainsi au recourant de démontrer l’inexactitude de la taxation opérée par l’AFC. Se contentant de reprendre, dans des termes rigoureusement identiques, l’argumentation qu’il a fait valoir successivement devant les instances genevoises, devant les instances vaudoises et devant le Tribunal fédéral sans apporter le moindre élément probant, il n’y est pas parvenu. La reprise opérée par l’AFC telle que confirmée par la commission a par conséquent été établie dans le respect des règles relatives au fardeau de la preuve.

8. a. Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, l’amende mise à la charge du recourant étant annulée en raison de la prescription absolue. Le recours sera rejeté pour le surplus.

b. Vu l’issue du litige, un émolument réduit de CHF 1’500.- sera mis à la charge du recourant dont l’essentiel des moyens et des conclusions est rejeté (art. 87 LPA). Une indemnité réduite de CHF 1'000.- lui sera allouée à la charge de l’Etat de Genève.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 août 2009 par Monsieur C______ contre la décision du 6 juillet 2009 de la commission cantonale de recours en matière administrative ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule l’amende infligée à Monsieur C______ ;

rejette le recours pour le surplus ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de Monsieur C______ ;

alloue une indemnité de CHF 1’000.- à Monsieur C______ à la charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Antoine Kohler, avocat du recourant, à la commission cantonale de recours en matière administrative ainsi qu'à l’administration fiscale cantonale.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, juge, M. Hottelier, juge suppléant.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

F. Glauser

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :