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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2734/2009

ATA/277/2010 du 27.04.2010 ( LDTR ) , REJETE

Parties : ARSENIO Fiore et autres, ASHLYN Nils Paul, BACHLI PONCET Christine, BRANDT Didier Gabriel, BRIGGS Louise, DJAZIRI Christiane, DJAZIRI Moncef, DRAGONETTI Pierre, DROZ-DIT-BUSSET Pierre, FAVRE Frédéric, FAVRE Marie louise, FEUERLEIN Jeanine, FEUERLEIN Walter, FEURER-VERDAN Gabrielle, FREI Serge Jacques, FREZZA-BENZ Regina, GERMAIN BRANDT Sylvie, HILBER Marta, HOCHULI Sylvia, HOCHULI Peter, JAMPEN Ernst, JUTTNER Marianne, LAMBELET Eric, LAMBELET Claudine, MAEDER Pierre, MALLET Béatrice, MERMOD Sylvie, MISSOTTEN Jean Denis, MULLER Marlyse, PALACIO Francisco, PALACIO Patricia-Anne, RAMEAU Adler, RECH Claire Marie Louise, REGISTRE RAMEAU Marie Yvette, RETCHISKY Anne Lise, RETCHISKY Claude, REY Emmanuel, RICCHINI Françoise, ROSAT Marie-Claude, SELHOFER Guillaume, SELHOFER Caroline, SIMON Jacqueline, SCHNEIDER Gisèle, VANDEPLAS Herman, WEBER Armin Alois, WOLFER Nery, WOLFER Werner, ZUFFEREY Martine / COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, MONSIEUR DOMINIQUE ARDIN
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2734/2009-LDTR ATA/277/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 27 avril 2010

 

dans la cause

 

Monsieur Fiore ARSENIO

Monsieur Nils ASHLYN

Madame Christine BÄCHLI PONCET

Monsieur Didier Gabriel BRANDT

Madame Louise BRIGGS

Madame Christiane Mariane et Monsieur Moncef DJAZIRI

Monsieur Pierre Guy Roger DRAGONETTI

Monsieur Pierre DROZ

Madame Marie Louise et Monsieur Frédéric Norbert FAVRE

Madame Jeanine Pierrette et Monsieur Walter Paul FEUERLEIN

Madame Gabrielle Andrée FEURER

Monsieur Serge Jacques FREI

Madame Régina FREZZA-BENZ

Madame Sylvie Florence GERMAIN BRANDT

Madame Marta Angela HILBER

Madame Carmen Silvia et Monsieur Peter HOCHULI

Monsieur Ernest JAMPEN

Madame Marianne Ingrid JÜTTNER

Madame Claudine Marianne LAMBELET

Monsieur Eric LAMBELET

Monsieur Pierre François MAEDER

Madame Yvonne Béatrice MALLET
Madame Sylvie Marguerite MERMOD

Monsieur Jean-Denis MISSOTTEN

Madame Marlyse Geneviève MULLER

Madame Patricia-Anne et Monsieur Francisco PALACIO

Monsieur Adler RAMEAU

Madame Claire Marie Louise RECH

Madame Marie Yvette REGISTE RAMEAU

Madame Anne-Lise Georgette et Monsieur Claude RETCHISKY

Monsieur Emmanuel Camille REY

Madame Françoise RICCHINI

Madame Marie-Claude ROSAT

Madame Caroline et Monsieur Guillaume Othmar SELHOFER

Madame Jacqueline Cécile SIMON

Madame Gisèle SCHNEIDER

Monsieur Herman Renaat Karel VANDEPLAS

Monsieur Armin Aloïs WEBER

Madame Nery Eloisa et Monsieur Werner WOLFER

Madame Martine ZUFFEREY
représentés par Me Pierre Banna, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE

et

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

et

Monsieur Dominique ARDIN, représenté par BORY & CIE S.A.

et Me Jean-Marc Siegrist, avocat



EN FAIT

1. Solvador Fund Management S.A., de siège à Lausanne, était la propriétaire de la parcelle n° 1654 feuille 8 de la commune de Chêne-Bougeries, à l’adresse 4, chemin de la Bride. Cette société a toutefois vendu ce bien le 10 mars 2009 à Monsieur Dominique Ardin, selon parution dans la Feuille d’Avis Officielle (ci-après : FAO) du 3 avril 2009.

M. Ardin était déjà propriétaire de l’immeuble 6, chemin de la Bride à Chêne-Bougeries, contigu au précédent, et construit sur la parcelle n° 1749 feuille 8 de la même commune. Ces deux immeubles de logements, surmontés de locaux techniques ont été érigés selon le plan d’aménagement n° 25269 adopté par le Conseil d’Etat le 1er août 1963 pour la réalisation du quartier de la Gradelle. Ils étaient situés en zone 5 de développement 3.

Ni à l’occasion de l’entrée en vigueur le 1er janvier 1980, de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS - 700), ni depuis, ledit plan n’a été approuvé par le Conseil d’Etat.

2. Les propriétaires, représentés par Bory & Cie, ont déposé le 18 avril 2006 une demande de renseignements, enregistrée sous n° DR 17’917-2, auprès du département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : DCTI) en vue de surélever les deux immeubles précités par la construction d’un attique qui deviendrait le septième étage, aux fins d’aménager quatre nouveaux appartements comportant dix-sept pièces.

Selon le photomontage produit, cet attique s’inscrivait dans le prolongement de celui existant dès l’origine sur le toit de l’immeuble n° 2 ch. de la Bride, contigu aux nos 4 et 6 précités.

3. Le DCTI a procédé à l’instruction de cette demande et recueilli les préavis suivants :

- 10 mai 2006, service sécurité salubrité : favorable sous condition que les prescriptions de protection en cas d’incendie soient respectées ;

- le 10 mai 2006, la direction du génie civil : sans observation ;

- le 16 mai 2006, le préavis du service juridique LDTR (loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi du 25 janvier 1996 - LDTR - L 5 20) : "pas d’observation selon l’art. 9 LDTR pour autant que les conditions LDTR soient réservées pour les logements existants et les logements aménagés en attique" ;

- le 22 mai 2006, le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) : "l’ensemble de la Gradelle ne bénéficie aujourd’hui d’aucune mesure de protection au sens de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05). Toutefois, cette réalisation du début des années 60 des architectes Jean Hentsch et Jacques Zbinden est digne d’intérêt et à ce titre a été publiée dans l’ouvrage : L’architecture à Genève 1919-1975. Dès lors, eu égard à l’art. 15 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), le SMS s’en remet à l’avis de la commission d’architecture pour l’analyse de cette requête" ;

- le 24 mai 2006, le service de la planification de l’eau : favorable pour autant que certaines conditions techniques soient respectées ;

- le 7 juin 2006, la police des constructions : "pour ce genre de demande de renseignements qui peut mener à une modification du plan localisé de quartier (ci-après : PLQ), voire un nouveau PLQ, les préavis commune et DPS sont absolument nécessaires" ;

- le 29 juin 2006, l’inspection de la construction : favorable sous réserve d’une dérogation au sens de l’art. 11 LCI ;

- les 4 et 7 juillet 2006, la commune de Chêne-Bougeries (ci-après : la commune) : favorable ;

- le 11 juillet 2006, la commission d’architecture (ci-après : CA), après avoir pris connaissance du préavis du SMS du 22 mai 2006 précité n’a pas émis d’objection quant à l’intervention prévue. Elle a cependant ajouté : "Toutefois, au vu de l’importance des bâtiments qui composent le quartier de la Gradelle et qui pourraient faire l’objet d’une intervention similaire, la commission s’en remet à la commission d’urbanisme pour évaluer une opération sur l’ensemble. Au surplus, elle attire l’attention des mandataires sur la dimension des portes, notamment les sanitaires, dont la largeur doit avoir 80 cm au minimum" ;

- le 16 août 2006, l’office cantonal de la mobilité (ci-après : OCM) : favorable pour autant que cinq places de parking au minimum soient réservées à l’attention des futurs habitants ;

- le 5 octobre 2006, la commission d’urbanisme (ci-après : CU) : favorable. Elle a relevé en préambule que "l’ensemble de la Gradelle, édifié entre 1963 et 1967 et conçu par les architectes Hentsch, Zbinden et Gaulis, représente une unité de voisinage illustrant l’architecture moderne et offrant une composition urbaine unique à Genève : trame hexagonale croissant dans un mouvement hélicoïdal".

Elle a rappelé pour le surplus que "si cet ensemble ne bénéficie pas au sens légal du terme de statut d’objet patrimonial à protéger, en revanche, il apparaît évident qu’il appartient à juste titre à la liste des ensembles genevois représentatifs de l’architecture moderne. La commission attire l’attention sur les grandes qualités de ce tissu bâti, qui, entre autres, allie un indice d’utilisation du sol typique de la troisième zone de développement de 1,4 (densité moyenne, p. 26, Indicateurs morphologiques pour l’aménagement, vol. 2, DTP, 1986) tout en ouvrant des espaces généreux, précisément conçus et dessinés, largement arborés et engazonnés.

Dans son principe morphologique, cette unité de voisinage se réfère à une image organique, dynamique et évolutive. Elle se réalisera en deux étapes et intégrera dès sa conception des attiques. La commission estime que la surélévation mesurée proposée - ajouts d’appartements en attique - peut s’intégrer à l’ensemble sans compromettre sa lisibilité, ni la hiérarchie instaurée entre les gabarits moyens des immeubles ordinaires (R+7+A) et le gabarit élevé de la tour (R+15).

Pour les vérifications des plans types des futurs appartements et de l’intégration en façade, elle s’en remet à l’avis de la CA.

- le 18 octobre 2006, la direction de l’aménagement du territoire (ci-après : DAT) : favorable, soulignant que l’immeuble se trouve en zone 5 développement 3. Après avoir pris connaissance du préavis précité de la CU auquel elle souscrivait, elle s’en remettait à la CA pour la mise au point du dossier. La DAT poursuivait en ces termes : "Dans la mesure où ce projet intervient dans un contexte déjà fortement urbanisé, la DAT préconise de renoncer à l’élaboration d’un plan localisé de quartier, en application de l’art. 2 al. 2 de la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35). La consultation du conseil administratif est nécessaire à ce propos et ce n’est qu’à l’issue de celle-ci que le mandataire pourrait être invité à déposer une demande définitive".

4. Le 16 novembre 2006, le conseiller administratif délégué de la commune a écrit au président du département du territoire en prenant bonne note que le Conseil d’Etat pourrait renoncer à l’établissement d’un PLQ du fait qu’il s’agissait d’un projet à portée limitée dans un périmètre déjà fortement urbanisé.

La commune réitérait le préavis favorable délivré le 4 juillet 2006 concernant ledit projet.

5. Le 7 décembre 2006, le directeur de l’aménagement du territoire a écrit aux requérants : "vu l’avis de consultation paru dans la FAO du 22 mai 2006, vu le projet déposé le 29 juin 2006, vu le courrier du conseil administratif de Chêne-Bougeries du 16 novembre 2006, vu l’instruction de la demande de renseignements le projet ayant été examiné au titre de son implantation, de sa destination, de son gabarit, de son volume et de sa dévestiture conformément à l’art. 5 LCI, le département répondait positivement à celle-ci et renonçait à l’établissement d’un PLQ en vertu de l’art. 2 al. 2 LGZD". Les intéressés étaient dès lors invités à déposer une demande définitive en autorisation de construire. Les préavis précités des 10, 16 et 24 mai, 7 et 11 juillet, 16 août et 18 octobre 2006 étaient annexés. Par ailleurs, il était spécifié que "dans la mesure où la réalisation du projet implique une démolition, la délivrance de l’autorisation définitive de construire est subordonnée à celle de l’autorisation de démolir, dont les demandes doivent être déposées simultanément". Cette réponse était sans portée juridique et n’était pas susceptible de recours (art. 5 al. 4 LCI).

6. Le 20 juin 2006, la Société d’art public, devenue Patrimoine suisse section de Genève (ci-après : Patrimoine suisse), a écrit au DCTI après avoir pris connaissance de l’avis de consultation paru dans la FAO le 22 mai 2006 relatif à la demande de renseignements. Elle a relevé les qualités architecturales de l’ensemble résidentiel de la Gradelle en soulignant que "le plan d’aménagement adopté en 1963 définit très clairement le nombre d’étages ainsi que la position des attiques limités à certains emplacements, avec la volonté de dégager les têtes d’immeubles. Il est l’image de la densité acceptée par l’urbanisation de ce périmètre. Il paraît donc inconcevable de surélever deux immeubles, sous forme d’attiques alors que l’ensemble est parfaitement cohérent avec les gabarits différenciés".

Le 26 juin 2006, la division juridique du DCTI a répondu qu’elle versait ces observations au dossier mais ne se déterminerait pas sur le fond des remarques faites lesquelles pourraient "être renouvelées dans le cadre de la procédure d’adoption du plan d’affectation du sol (plan de zone/plan localisé de quartier) qui suivra éventuellement la réponse du DCTI à la demande de renseignements susvisée".

7. Le 3 juillet 2006, Patrimoine suisse a adressé au DCTI une demande d’inscription à l’inventaire et le 18 mai 2009, le président du DCTI lui a répondu qu’il n’entendait pas prendre de mesures visant à la conservation de la Gradelle, les efforts de son département ayant porté sur la protection de plusieurs autres ensembles emblématiques de la même période. Par ailleurs, les objectifs de mise sous protection devaient être envisagés en cohérence avec ceux de développement urbain visant notamment la création de nouveaux logements.

8. Le 12 juin 2007, le DCTI a enregistré le dépôt d’une demande définitive d’autorisation de construire sous n° A 101’376/2, en tous points identique à la demande de renseignements précitée. Cette demande n’a pas été soumise à toutes les autorités de préavis qui s’étaient déjà prononcées dans le cadre de la demande de renseignements s’agissant de l’implantation et de l’esthétique. Seuls les préavis techniques ont été requis. L’attention du DCTI s’est concentrée sur les questions énergétiques d’une part, et sur le coût total des travaux ainsi que sur leur répercussion sur les loyers des logements à créer, d’autre part. Les coûts des travaux ont été revus à la baisse.

L’instruction de la demande d’autorisation de construire définitive a été suspendue le 10 avril 2008. Le coût total des travaux ayant été ramené de CHF 3’200’000.- à CHF 2’500’000.-, plus les honoraires d’architecte, un préavis juridique LDTR favorable a finalement été émis le 10 septembre 2008 entérinant pour chacun des logements créés des loyers correspondant au prix de CHF 9’857.- la pièce l’an, applicable pour une durée de cinq ans à dater de la première mise en location.

9. Par arrêté du 19 novembre 2008, le Conseil d’Etat a autorisé l’application des normes de la troisième zone aux bâtiments nos 4 et 6 du chemin de la Bride à surélever selon DD 101’1376 en se référant aux art. 2 al. 2 LGZD, 32 de la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), à la LGZD, ainsi qu’aux art. 26 à 29 et 35 à 57 LCI.

10. Le 3 décembre 2008, le DCTI a délivré l’autorisation de construire requise fixant les loyers comme indiqué ci-dessus et visant expressément l’arrêté du Conseil d’Etat précité du 19 novembre 2008 de même que les art. 11 LCI et 9 LDTR.

11. Le 7 janvier 2009, Monsieur Fiore Arsenio, Monsieur Nils Ashlyn, Madame Christine Bächli Poncet, Monsieur Didier Gabriel Brandt, Madame Louise Briggs, Madame Christiane Mariane et Monsieur Moncef Djaziri, Monsieur Pierre Guy Roger Dragonetti, Monsieur Pierre Droz, Madame Marie Louise et Monsieur Frédéric Norbert Favre, Madame Jeanine Pierrette et Monsieur Walter Paul Feuerlein, Madame Gabrielle Andrée Feurer, Monsieur Serge Jacques Frei, Madame Régina Frezza-Benz, Madame Sylvie Florence Germain Brandt, Madame Marta Angela Hilber, Madame Carmen Silvia et Monsieur Peter Hochuli, Monsieur Ernest Jampen, Madame Marianne Ingrid Jüttner, Madame Claudine Marianne Lambelet, Monsieur Eric Lambelet, Monsieur Pierre François Maeder, Madame Yvonne Béatrice Mallet, Madame Sylvie Marguerite Mermod, Monsieur Jean-Denis Missotten, Madame Marlyse Geneviève Muller, Madame Patricia-Anne et Monsieur Francisco Palacio, Monsieur Adler Rameau, Madame Claire Marie Louise Rech, Madame Marie Yvette Registe Rameau, Madame Anne-Lise Georgette et Monsieur Claude Retchisky, Monsieur Emmanuel Camille Rey, Madame Françoise Ricchini, Madame Marie-Claude Rosat, Madame Caroline et Monsieur Guillaume Othmar Selhofer, Madame Jacqueline Cécile Simon, Madame Gisèle Schneider, Monsieur Herman Renaat Karel Vandeplas, Monsieur Armin Aloïs Weber, Madame Nery Eloisa et Monsieur Werner Wolfer et Madame Martine Zufferey (ci-après : M. Arsenio et consorts ou les recourants) ont recouru contre cette autorisation de construire auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions devenue depuis la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission ou la CCRA), en concluant à l’annulation de ladite autorisation. Le plan d’aménagement de 1963 devait être considéré comme caduc puisque le Conseil d’Etat ne l’avait pas approuvé à l’occasion de l’entrée en vigueur de la LAT. Aucun autre plan n’avait été adopté ultérieurement.

L’autorisation de construire délivrée n’était pas conforme au plan d’aménagement du 1er août 1963, ce dernier mentionnant expressément le nombre d’étages de chacun des bâtiments hauts devant être implantés dans le périmètre de ce plan dont les recourants admettaient qu’il avait perdu toute validité.

L’art. 21 LAT imposait à l’autorité de réexaminer le plan dans le cadre de l’élaboration d’un nouveau PLQ, obligatoire en zone de développement, avant de pouvoir délivrer de nouvelles autorisations de construire. L’autorité ne l’avait pas fait, si bien que les principes de la confiance et de la stabilité des plans d’affectation devaient l’emporter sur celui de la légalité. Cette stabilité s’imposait d’autant plus que les qualités patrimoniales et architecturales de l’ensemble de la Gradelle n’étaient contestées par personne. Or, les gabarits prévus par le plan de 1963 contribuaient encore aujourd’hui à la qualité du cadre de vie des habitants du quartier.

Le DCTI aurait dû procéder à une enquête publique conformément aux principes régissant l’aménagement du territoire, et qui impliquaient une large participation de la population, notamment de celle habitant la Gradelle, par référence aux articles 4 al. 2, 33 LAT et 6 LGZD.

L’arrêté du Conseil d’Etat du 19 novembre 2008 faisait partie intégrante de l’autorisation de construire et le recours interjeté contre cette dernière emportait recours contre ledit arrêté, en application de l’art. 3A al. 3 LCI.

L’art. 2 al. 2 LGZD, entré en vigueur le 29 mai 2004, était contraire à l’art. 26 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) de même qu’à la LAT. Faute d’existence d’un PLQ valable en force, dans l’hypothèse où la validité du plan d’aménagement n° 25’269 de 1963 était déniée, les requérants ne pouvaient bénéficier des normes de la zone de développement.

Du fait qu’une demande d’inscription à l’inventaire de l’ensemble résidentiel de la Gradelle avait été adressée le 3 juillet 2006 par Patrimoine suisse, au DCTI, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : la CMNS) aurait dû être consultée dans le cadre de la requête en autorisation de construire alors que tel n’avait pas été le cas.

En application de l’art. 7 LPMNS, le DCTI avait l’obligation de statuer sur la demande de mise à l’inventaire par une décision motivée, ce qu’il n’avait toujours pas fait à ce jour.

Enfin, l’autorisation de construire devait être annulée car elle avait été délivrée à la suite d’une procédure irrégulière, en admettant un projet ayant des conséquences désastreuses sur l’ensemble de la Gradelle, au mépris de la qualité architecturale de celui-ci, en créant un précédent car d’autres propriétaires d’immeubles locatifs de ce périmètre pourraient envisager une surélévation de ceux-ci au détriment de l’intérêt public tendant au maintien de ce patrimoine.

La surélévation autorisée ne se justifiait pas par son aspect esthétique et n’était pas compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement de l’ensemble de la Gradelle tel qu’il avait été appréhendé dans le plan d’aménagement du Conseil d’Etat de 1963.

Le DCTI avait abusé de son pouvoir d’appréciation et n’avait pas pris la peine de consulter la direction du patrimoine et des sites ni la CMNS tout en renonçant à l’établissement d’un nouveau plan d’aménagement, privant la population de son droit d’information et de participation.

Enfin, le DCTI avait accordé à tort une dérogation selon l’art. 9 LDTR, car les quatre nouveaux logements prévus ne répondaient pas aux besoins prépondérants de la population.

Les recourants considéraient qu’ils auraient dû être consultés avant le dépôt de celle-ci par les bénéficiaires de l’autorisation de construire car ils étaient tous liés par un réseau de servitudes, ainsi que par un règlement de copropriété les obligeant à utiliser exclusivement la centrale de chauffage installée sur cette parcelle. Or, l’augmentation des surfaces habitables des deux immeubles 4 et 6 ch. de la Bride remettait en cause les coefficients et la répartition des charges de chauffage ainsi que les frais d’entretien pour tout l’ensemble de la Gradelle.

Enfin, l’autorisation délivrée avait des implications au niveau du parking des actuels habitants "dans la mesure où l’autorisation de construire querellée ne prévoit pas de nouvelles places de parking", imposant au propriétaire de réserver sept places aux futurs habitants, au détriment des autres habitants alors même que le parcage dans l’ensemble de la Gradelle était d’ores et déjà problématique.

12. Sous la plume de Bory & Cie, les propriétaires ont répondu le 12 février 2009 en concluant au rejet du recours et à la confirmation de l’autorisation DD 101’376 délivrée.

13. A l’occasion d’une audience de comparution personnelle tenue le 6 mars 2009 par la commission, siégeant dans sa composition LDTR, les recourants ont déclaré qu’ils étaient tous copropriétaires d’appartements se trouvant dans les immeubles situés en face du chemin de la Bride. La commission a requis des renseignements complémentaires au sujet de la mise à l’inventaire de ce périmètre.

Par décision du 2 juin 2009, ladite commission a rejeté le recours en condamnant les recourants, conjointement et solidairement à verser un émolument de CHF 1’500.- et une indemnité de procédure de CHF 2’000.- à Bory & Cie (sic).

14. Par acte posté le 29 juillet 2009, M. Arsenio et consorts ont recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif en concluant préalablement à la restitution de l’effet suspensif et principalement à l’annulation de la décision de la commission ainsi qu’à celle de l’autorisation de construire DD 101’376 en reprenant l’argumentation développée devant l’autorité de première instance.

15. Le 24 août 2009, la commission a produit son dossier.

16. Le 30 septembre 2009, M. Ardin a conclu au rejet du recours en contestant tous les allégués de sa partie adverse, la demande d’effet suspensif étant infondée car le recours avait effet suspensif de par la loi.

Selon la pratique du DCTI, une requête formelle en autorisation de démolir n’était pas nécessaire dans un tel cas.

La procédure avait été conduite par le DCTI dans le respect de la loi. Tous les préavis nécessaires avaient été requis. Celui de la CMNS n’avait pas été sollicité puisque, même si une demande de mise à l’inventaire avait été déposée, aucune mesure de protection n’avait été ordonnée. L’art. 4A LGZD n’était pas applicable car il ne l’était que pour les demandes déposées dans les dix ans à compter de son entrée en vigueur. Or, celle-ci avait eu lieu le 31 juillet 2007 et la demande d’autorisation de construire DD 101736 - 2 avait été déposée le 12 juin 2007.

L’argumentation des recourants était contradictoire : tout en admettant la caducité du plan d’aménagement du 1er août 1963, ils plaidaient la non-conformité à celui-ci de l’autorisation de construire délivrée.

Le droit cantonal pouvait sans violer la LAT, prévoir que pour éviter une procédure lourde et coûteuse, telle que l’adoption préalable d’un PLQ, le Conseil d’Etat pouvait y renoncer dans des quartiers de développement déjà fortement urbanisés, comme c’était le cas en l’espèce. Tous les préavis - y compris celui de la commune - avaient été favorables. De plus, les transformations autorisées s’inscrivaient dans le prolongement des attiques existants dès l’origine sur les bâtiments voisins.

Quant à la demande de mise à l’inventaire de Patrimoine suisse, elle était exorbitante au litige.

La procédure relative à la fixation des loyers au regard de l’art. 9 LDTR avait été respectée par le DCTI et elle n’était en rien contraire au droit fédéral du bail à loyer. L’art. 9 al. 1 let. c LDTR prévoyait que l’autorisation était accordée lorsque les travaux permettaient la réalisation de logements supplémentaires. Tel était le cas en l’espèce et le projet entraînait une densification des zones déjà urbanisées, ce qui s’inscrivait dans le cadre d’une occupation rationnelle du territoire voulue par l’art. 22 quater al. 1 Cst.

Il s’en rapportait à justice quant à la recevabilité du recours qui devait être rejeté sur le fond. Elle produisait notamment un photomontage du projet et une nouvelle pièce, soit un extrait de l’information du DCTI relative à la demande d’autorisation de construire DD 101376 - 2.

17. Le 16 octobre 2009, le DCTI a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision du 3 décembre 2008.

En délivrant l’autorisation querellée, il n’avait nullement violé l’art. 4A al. 1 let. a LGZD puisqu’en application de l’alinéa 5 in fine de cette disposition, il pouvait, dans les cas de peu d’importance, déroger exceptionnellement aux proportions énoncées dans l’article en question en son alinéa 1 tout en renonçant à une compensation équivalente. Or, la surélévation de deux immeubles par la création d’un attique constituait précisément un cas de peu d’importance, raison pour laquelle cette autorisation avait été délivrée.

Contrairement aux allégués des recourants, le Conseil d’Etat avait, dans le cadre de la demande de renseignements, consulté le Conseil administratif de la commune de Chêne-Bougeries en application de l’art. 2 al. 2 LGZD et la commune avait, le 16 novembre 2006, réitéré le préavis favorable déjà délivré le 4 juillet 2006 en prenant note que le Conseil d’Etat pourrait renoncer à l’établissement d’un PLQ du fait qu’il s’agissait d’un projet à portée limitée dans un périmètre déjà fortement urbanisé.

Les recourants alléguaient à tort la non-conformité de l’art. 2 al. 2 LGZD avec le droit fédéral, et en particulier avec les art. 4, 14 et 33 LAT. Or, seul le droit cantonal genevois imposait l’établissement d’un PLQ dans des zones de développement. Il pouvait tout aussi bien prévoir une dérogation à cette règle en vertu du principe "qui peut le plus peut le moins". L’établissement d’un PLQ en zone de développement n’était pas imposé par le droit fédéral. De plus, l’art. 2 al. 2 LGZD répondait à l’intérêt public de simplification des procédures et respectait le principe de proportionnalité en se limitant aux cas où la densification restait modeste. Exiger en l’espèce l’établissement d’un PLQ aurait pour conséquence la mise en œuvre excessive d’outils d’aménagement pour des cas bagatelles, comme en l’espèce.

L’art. 7 LPMNS n’avait pas davantage été violé car le périmètre de la Gradelle ne faisait l’objet d’aucune mesure de protection au sens de cette loi. Ces bâtiments ne faisaient pas l’objet d’un classement et n’étaient pas inscrits à l’inventaire, pas plus qu’ils n’étaient intégrés à un plan de site. La consultation de la CMNS n’était ainsi pas obligatoire (art. 5 du règlement d’exécution de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 29 novembre 1976 - (RPMNS - L 4 05.01) ce qu’avait d’ailleurs constaté le SMS dans son préavis du 22 mai 2006 rendu dans le cadre de l’instruction de la demande de renseignements. C’était la raison pour laquelle ce service s’en était remis à l’avis de la CA, laquelle avait d’ailleurs préavisé favorablement aussi bien la demande de renseignements que la demande définitive.

Les recourants se plaignaient de ce que le DCTI avait accordé une dérogation injustifiée à l’art. 9 LDTR. Or, de par leur genre, les appartements à créer dans ces attiques correspondaient aux besoins prépondérants de la population puisqu’il s’agissait d’appartements de 3, 5 et 5 ½ pièces. Les loyers avaient été fixés conformément à l’art. 11 LDTR.

Enfin, selon une pratique constante, le DCTI n’exigeait pas le dépôt d’une autorisation de démolir lorsque, comme en l’espèce, le projet de construction n’impliquait que le démontage de quelques éléments bagatelles, soit des locaux techniques en toiture dans le projet contesté. La mention de cette autorisation de démolir dans le courrier de la DAT du 7 décembre 2006 avait été rappelée à toutes fins utiles. Il serait disproportionné d’exiger une requête en autorisation de démolir ou d’annuler, pour ce motif, l’autorisation de construire délivrée.

18. Le 17 décembre 2009, le conseil des recourants a écrit spontanément au juge délégué pour l’informer que la commune de Chêne-Bougeries avait fait paraître dans la FAO du 25 novembre 2009 une demande d’autorisation de construire définitive en vue de la réalisation de la Maison de la Gradelle, ce qui illustrait "le risque de contagion lié à la multiplication des aménagements réalisés en absence de l’adoption d’un PLQ" déjà dénoncé dans le recours.

19. Le 4 janvier 2010, le conseil M. Ardin a relevé que le projet précité était sans rapport avec celui de sa mandante. Il a dénoncé l’amalgame fait à tort entre le projet de celle-ci et les intentions de la commune.

20. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile auprès de la juridiction compétente, (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le tribunal de céans examine d'office la recevabilité d'un recours.

a. A teneur de l’art. 60 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/77/2009 du 17 février 2009 et références citées). Le Tribunal administratif a déjà jugé que les lettres a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/5/2009 du 13 janvier 2009 et les références citées).

Cette notion de l’intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l’art. 103 let. a de la loi fédérale d’organisation judiciaire du 16 décembre 1943 et qui était, jusqu’à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l’art. 98a de la même loi (ATA/399/2009 du 25 août 2009 consid. 2a ; ATA/207/2009 du 28 avril 2009 consid. 3a et les arrêts cités). Elle correspond aux critères exposés à l’art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110) que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d’unité de la procédure qui figure à l’art. 111 al. 1 LTF (Arrêts du Tribunal fédéral 1C.76/2007 du 20 juin 2007 consid. 3 et 1C.69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.2 ; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de l’organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 pp. 4126 ss et 4146 ss).

b. Selon la jurisprudence, seuls les voisins dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l’intérêt particulier requis (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 409 consid. 1 p. 411 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire ou du locataire d’un terrain directement voisin de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C.125/2009 du 24 juillet 2009 consid. 1 ; 1C.7/2009 du 20 août 2009 consid. 1 ; 1A.222/2006 et 1P.774/2006 du 8 mai 2007, consid. 5 ; ATA/321/2009 du 30 juin 2009 consid. 2 ; ATA/331/2007 du 26 juin 2007 consid. 3d ; sur le cas d'une personne qui va devenir voisine de la construction litigieuse : ATA/450/2008 du 2 septembre 2008 consid. 3). La qualité pour recourir peut être donnée en l’absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 et la jurisprudence citée ; ATA/331/2007 précité). La proximité avec l'objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 134 II 120 consid. 2 p. 122 ; ATA/100/2010 du 16 février 2010) de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la commune (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 181 consid. 3.2.3 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C.503/2008 du 10 février 2009 et 1C.158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2).

c. Dans leur recours auprès de la commission, les recourants se prévalent de leur qualité de copropriétaires de lots de propriété par étage, situés dans l’ensemble de la Gradelle, dans des immeubles proches des nos 4 et 6 ch. de la Bride. Bien que leur qualité pour recourir n’ait jamais été mise en doute, force est d’admettre qu'aucun d'eux n'a rapporté la preuve qu’il serait propriétaire dans ce périmètre ni qu'il était domicilié à moins de deux cents mètres, voire à moins de trois cents à cinq cents mètres des deux immeubles à transformer, ces distances étant celles maximales déterminée par la jurisprudence pour se voir reconnaître la qualité de voisin (ATA/653/2002 du 5 novembre 2002 ; ATA/35/2002 du 15 janvier 2002).

Néanmoins, la distance à laquelle habitent les recourants et la preuve de leur qualité de propriétaires peuvent souffrir de demeurer ouvertes vu l’issue du litige.

d. Par ailleurs, et pour les raisons susindiquées, aucun des intéressés n’a la qualité pour recourir au motif que l'autorisation délivrée violerait les art. 9 et 11 LDTR  : à supposer que les loyers fixés par le département pendant cinq ans ne correspondent pas aux besoins prépondérants de la population, les recourants ne sont aucunement touchés par cet aspect de la décision et n’ont aucun intérêt direct et actuel dont ils peuvent se prévaloir à cet égard. Toutes les conclusions ayant trait à l’application de la LDTR seront ainsi déclarées irrecevables, faute de qualité pour recourir sur ce point, étant rappelé que l’action populaire est proscrite (ATA/399/2009 du 25 août 2009 ; ATA/31/2009 du 20 janvier 2009 confirmé par Arrêt du Tribunal fédéral 2C_179/2009 du 14 septembre 2009 ; ATA/13/2009 du 13 janvier 2009 confirmé par Arrêt du Tribunal fédéral 2C_127/2009 du 25 mai 2009).

e. Il en sera de même des conclusions relatives au fait que la création de ces quatre logements entraînerait pour les recourants un accroissement des charges en application du règlement de copropriété ou encore qu’elle serait contraire à des servitudes existantes, cette problématique ressortissant au droit privé et échappant de ce fait au pouvoir de cognition du tribunal de céans (ATA/450/2009 du 15 septembre 2009).

f. Partant, le recours sera déclaré partiellement recevable.

3. Les recourants allèguent que la commission cantonale de recours en matière de constructions, siégeant dans sa composition LDTR, n'était plus compétente au moment où elle a rendu sa décision le 2 juin 2009.

Même si la CCRA a été instituée dès le 1er janvier 2009, elle n'a pu connaître des litiges relevant de la LDTR avant que sa composition spécifique, telle qu'elle est prévue par l'art. 45 al. 3 LDTR, ne soit complétée par l'élection d'assesseurs compétents dans ce domaine, ce qui ne s'est réalisé que le 23 juin 2009, soit postérieurement à la décision attaquée.

Avant cette date, seule la commission cantonale de recours en matière de constructions, dans sa composition LDTR, était compétente pour connaître de ce type de litige, de sorte que le grief des recourants concernant cette autorité sera rejeté.

4. La commission a considéré à tort que Bory & Cie était partie à la procédure. Or, le propriétaire est Monsieur Dominique Ardin et c’est lui qui est représenté par Bory & Cie et par son conseil. Les qualités de l’intimé seront rectifiées en ce sens.

5. Le 1er août 1963, le Conseil d’Etat a adopté un plan d'aménagement no 25’269 de la zone d'expansion urbaine du secteur de la Gradelle. Il est établi et non contesté que celui-ci n'a pas été approuvé par l'autorité compétente avant le 31 décembre 1987, comme il aurait dû l'être au plus tard en application de l'art. 35 al. l let. b et 3 LAT pour conserver sa validité selon le droit cantonal (ATA/247/2004 du 23 mars 2004), raison pour laquelle ledit plan est devenu caduc.

Dès lors, tous les griefs des recourants tendant à démontrer que l’autorisation délivrée serait contraire à ce plan-ci sont dénués de pertinence.

6. a. Par arrêté du 19 novembre 2008, le Conseil d’Etat a autorisé le DCTI à appliquer, en lieu et place des normes régissant la zone 5, celles de la zone 3 au (recte : aux) bâtiment (bâtiments) à surélever, selon le dossier DD 101'376. Cet arrêté fait partie intégrante de l'autorisation définitive de construire et le recours est également dirigé contre celui-ci, en application de l'art. 3A al. 3 LCI.

Dit arrêté a été pris au vu des préavis favorables de la CA du 26 juin 2007, de la commune le 3 juillet 2007 et du DAT du 23 avril 2008, celui-ci se disant de plus favorable à l'application des dispositions fixées à l'art. 2 al. 2 LGZD sans conditions foncières particulières, sous réserve des dispositions de la LCI.

b. A teneur de l'art. 2 al. l LGZD :

"La délivrance d'autorisations de construire selon les normes d'une zone de développement est subordonnée, sous réserve des demandes portant sur des objets de peu d'importance ou provisoires, à l'approbation préalable par le Conseil d’Etat :

a. d'un PLQ au sens de l'art. 3, assorti d'un règlement ;

b. des conditions particulières applicables au projet, conformément aux art. 4 et 5".

Selon l'art. 2 al. 2 de cette loi :

"En dérogation à l'alinéa 1 let. a, le Conseil d’Etat peut, après consultation du Conseil administratif ou du maire de la commune, renoncer à l'établissement d'un PLQ, notamment :

a. dans les périmètres de développement de la 5ème zone résidentielle ;

c. dans les quartiers de développement déjà fortement urbanisés".

C'est en application de cette dernière disposition que l'autorisation de construire a été délivrée, le Conseil d’Etat ayant renoncé à l'établissement d'un PLQ au vu de l'avis de la commune : compte tenu du projet, l'autorité n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que la surélévation projetée constituait un objet de peu d'importance et que celle-ci devait être effectuée dans un quartier de développement déjà fortement urbanisé, ce qui n'est pas contestable.

c. Les recourants allèguent que ce mode de procéder se heurterait au fait que l'art. 2 al. 2 LGZD ne serait pas conforme au droit fédéral, car le droit de participation de la population à l'aménagement du territoire, prévu en particulier par les art. 4, 14 et 33 LAT, serait violé.

Tel n’est cependant pas le cas. Le droit fédéral n’impose pas l’établissement d’un PLQ en zone de développement. Cette exigence a cependant été introduite en droit cantonal par l’art. 2 al. 2 LGZD. Une dérogation à cette obligation peut de la même manière être introduite par le législateur cantonal également, sans pour autant violer le droit fédéral ou le droit d’information et de consultation de la population qui peut s’exercer dans le cadre de l’adoption des plans de zones.

7. L’instruction de la demande définitive d’autorisation de construire (DD 101’376) a été précédée par celle d’une demande de renseignements (DR 17’917-2) dans le cadre de laquelle tous les préavis nécessaires ont été recueillis. Les deux procédures ne peuvent être dissociées et le DCTI a d’ailleurs produit les dossiers correspondant à l’une et à l’autre, de sorte que les recourants ont pu en prendre connaissance.

8. Malgré la demande déposée le 3 juillet 2006 par Patrimoine suisse tendant à l’inscription à l’inventaire des immeubles du quartier de la Gradelle, aucune mesure de protection n’a été prise. Au contraire, par courrier du 18 mai 2009 le président du DCTI a répondu à la requérante qu’il n’entendait pas prendre de mesure visant à la conservation de la Gradelle. Cet ensemble ne s’inscrit pas non plus dans un plan de site (ATA/263/2007 du 22 mai 2007). Il en résulte que la consultation de la CMNS n’était pas obligatoire (art. 5 RPMNS ; ATA/263/2007 précité), raison pour laquelle le SMS, dans son préavis du 22 mai 2006, s’en était remis à l’avis de la CA, laquelle avait indiqué le 11 juillet 2006 ne pas avoir d’objection quant à l’intervention prévue, la CU ayant pour sa part émis le 5 octobre 2006 un préavis favorable, non sans s’en remettre à l’avis de la CA (sic). Enfin, les recourants n’allèguent pas que cet ensemble de la Gradelle, construit dans les années 60, formerait un ensemble digne d’être protégé, au sens des art. 89 LCI, visant les ensembles du 19ème siècle et du début du 20ème siècle, cette protection s’étendant pour certains jusqu’aux immeubles des années 30, mais certainement pas 60. Le Tribunal fédéral a jugé récemment (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_514/2009 du 10 mars 2010 consid. 4.2 in fine), que le préavis de la CMNS n’était nécessaire que dans les cas où l’immeuble concerné faisait l’objet d’une telle protection. Contrairement aux allégués des recourants, le préavis de la CMNS n’avait donc pas à être requis et ceux émis par la CA et la CU sont parfaitement étayés et motivés.

9. a. Selon une jurisprudence bien établie, le tribunal de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de celles-ci (ATA/105/2006 du 17 mars 2006 et les références citées). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/190/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997 et les références citées).

b. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/100/2010 du 16 février 2010 ; ATA/902/2004 du 16 novembre 2004 ; ATA/560/2004 du 22 juin 2004 ; ATA/253/1997 du 22 avril 1997).

En l’espèce, tous les préavis recueillis ont été favorables.

L’OCM a toutefois posé comme condition que cinq places de stationnement au minimum devaient être prévues pour les habitants des quatre nouveaux logements.

10. a. En vertu de l'art. 15 al. 1 LCI, le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou d'un point de vue accessible au public.

b. Comme indiqué ci-dessus, tous les préavis recueillis ont été favorables au projet de sorte que le département, pas plus que le tribunal de céans, n’avaient à s’imposer une certaine restriction de son propre pouvoir d’examen ou encore à procéder à un transport sur place.

c. L’avis des recourants quant au caractère prétendument inesthétique du prolongement de ces attiques ne reflète que leur propre appréciation et ne suffit pas à remettre en question la décision pour ce motif.

11. Selon les recourants, la création de quatre nouveaux appartements induirait pour eux des inconvénients graves au sens de l’art. 14 LCI, car elle accentuerait les difficultés de stationnement existantes dans le quartier de la Gradelle.

a. A teneur de l’art. 14 LCI, le département peut refuser une autorisation lorsqu’une construction ou une installation serait cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (art. 14 let. a LCI). La réglementation cantonale concernant la limitation quantitative des nuisances n’a cependant plus de portée propre dans les domaines réglés par le droit fédéral (ATF 117 Ib 157; 113 Ib 220). Tel est notamment le cas en matière de protection contre le bruit (art. 13 et 65 al. 2 LPE).

b. L’art. 14 LCI conserve toutefois sa pertinence, en matière d’inconvénients afférents à la circulation, notamment en ce qui concerne le stationnement des véhicules ou la mise en danger des piétons, voire du public (ATF 118 Ia 112). Selon la jurisprudence constante du Tribunal administratif, l’art. 14 LCI appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée (ATA/92/2003 du 25 février 2003 et les références citées).

c. L’accroissement du trafic routier, s’il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable au sens de la disposition légale précitée (ATA/438/2006 du 31 août 2006 ; ATA/232/2006 du 2 mai 2006 et les références citées). Le tribunal de céans a, en outre, plusieurs fois jugé que l’accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone, ne constitue pas un inconvénient grave au sens de l’art. 14 LCI (ATA/309/2007 du 12 juin 2007).

En l’espèce, non seulement la création de ces quatre logements est conforme à la destination de la zone, mais l’accroissement - nécessairement modeste - des difficultés de stationnement qui en résulteraient, sera pallié par la création de cinq places de stationnement supplémentaires comme requis par l’OCM, étant précisé que le quartier comporte déjà de nombreuses places de stationnement en surface ainsi qu’en sous-sol.

La création de quatre appartements effectuée dans les conditions précitées ne saurait ainsi être source d’inconvénients graves pour les raisons susexposées.

12. Enfin, le DCTI a indiqué de manière convaincante que sa pratique consistait à ne pas exiger le dépôt d’une demande d’autorisation de démolir, lorsque les démolitions nécessaires portaient, comme en l’espèce, sur des objets bagatelles.

Cette pratique respecte le principe d’économie de procédure et ne contrevient pas au principe de coordination énoncé à l’art. 12A LPA, les recourants n’alléguant pas que la démolition concernerait des éléments importants du bâtiment.

13. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté dans la mesure où il est recevable.

Un émolument de CHF 2'500.- sera mis à la charge des recourants pris conjointement et solidairement. Une indemnité de procédure de CHF 2'500.- sera allouée à M. Ardin, à charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

préalablement :

rectifie les qualités de l’intimé, Bory & Cie S.A. n’étant pas partie à la procédure mais représentant Monsieur Dominique Ardin, propriétaire ;

au fond :

rejette dans la mesure où il est recevable le recours interjeté le 29 juillet 2009 par Monsieur Fiore Arsenio, Monsieur Nils Ashlyn, Madame Christine Bächli Poncet, Monsieur Didier Gabriel Brandt, Madame Louise Briggs, Madame Christiane Mariane et Monsieur Moncef Djaziri, Monsieur Pierre Guy Roger Dragonetti, Monsieur Pierre Droz, Madame Marie Louise et Monsieur Frédéric Norbert Favre, Madame Jeanine Pierrette et Monsieur Walter Paul Feuerlein, Madame Gabrielle Andrée Feurer, Monsieur Serge Jacques Frei, Madame Régina Frezza-Benz, Madame Sylvie Florence Germain Brandt, Madame Marta Angela Hilber, Madame Carmen Silvia et Monsieur Peter Hochuli, Monsieur Ernest Jampen, Madame Marianne Ingrid Jüttner, Madame Claudine Marianne Lambelet, Monsieur Eric Lambelet, Monsieur Pierre François Maeder, Madame Yvonne Béatrice Mallet, Madame Sylvie Marguerite Mermod, Monsieur Jean-Denis Missotten, Madame Marlyse Geneviève Muller, Madame Patricia-Anne et Monsieur Francisco Palacio, Monsieur Adler Rameau, Madame Claire Marie Louise Rech, Madame Marie Yvette Registe Rameau, Madame Anne-Lise Georgette et Monsieur Claude Retchisky, Monsieur Emmanuel Camille Rey, Madame Françoise Ricchini, Madame Marie-Claude Rosat, Madame Caroline et Monsieur Guillaume Othmar Selhofer, Madame Jacqueline Cécile Simon, Madame Gisèle Schneider, Monsieur Herman Renaat Karel Vandeplas, Monsieur Armin Aloïs Weber, Madame Nery Eloisa et Monsieur Werner Wolfer et Madame Martine Zufferey contre la décision de la commission cantonale de recours en matière de constructions du 2 juin 2009 ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2’500.- ;

alloue une indemnité de procédure à Monsieur Dominique Ardin de CHF 2’500.- à la charge des recourants pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pierre Banna, avocat des recourants, à la commission cantonale de recours en matière de constructions, soit pour elle la commission cantonale de recours en matière administrative, à Monsieur Dominique Ardin, représenté par Bory & Cie S.A. et Me Jean-Marc Siegrist, avocat, ainsi qu’au département des constructions et des technologies de l'information.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :