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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/200/2019

ATA/1484/2019 du 08.10.2019 ( PRISON ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/200/2019-PRISON ATA/1484/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 octobre 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE FERMÉ CURABILIS

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, né en 1985, est arrivé à Genève le 2 octobre 2017. En sortant du train, il a giflé une inconnue dans le hall de gare « afin d'être écouté par la justice suisse et que ses droits soient enfin reconnus ». Il est resté sur place jusqu'à l'arrivée de la police et n'a opposé aucune résistance à son arrestation.

2) L'expert psychiatre mis en oeuvre par le Ministère public a conclu, dans son expertise du 13 novembre 2017, qu'au moment des faits, M. A______ présentait une « schizophrénie hédoïdophrénique non stabilisée dont la sévérité est élevée ». Sa responsabilité était fortement réduite et l'acte commis était en rapport avec son état mental. Il présentait un délire de persécution et de préjudice. Ses raisonnements, lorsqu'il décidait ou faisait quelque chose, ne correspondaient pas à un fondement rationnel. Depuis le début de sa détention, il avait déjà séjourné deux fois à l'unité hospitalière de psychiatrie pénitentiaire (ci-après : UHPP) en raison d'une décompensation psychotique avec trouble du comportement.

3) Par jugement du Tribunal correctionnel du 25 janvier 2018, M. A______ a été condamné à une peine privative de liberté de nonante jours et une mesure de traitement institutionnel a été prononcée à son encontre eu égard à sa schizophrénie, assimilable à un grave trouble mental de sévérité élevée.

4) M. A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon le 3 octobre 2017. Sa détention provisoire a pris fin le 25 janvier 2018. Depuis lors, il exécute la mesure thérapeutique institutionnelle.

5) Le 24 septembre 2018, M. A______ a été transféré à l'établissement pénitentiaire Curabilis (ci-après : Curabilis).

6) a. Par décision du 7 janvier 2019, M. A______ s'est vu notifier une sanction de six jours d'arrêt disciplinaire sans sursis ainsi que trois jours avec sursis pour avoir refusé d'obtempérer et craché au visage d'un agent.

Il ressort du rapport de l'agent de détention à l'attention du directeur de l'établissement, qu'à 11h40, le 7 janvier 2019, celui-là avait expliqué au détenu que les chaises du fumoir ne devaient pas rester au milieu du corridor. L'intéressé avait nié en être responsable. Il avait haussé le ton, raison pour laquelle les agents de détention avaient décidé de le remonter en cellule. Arrivé à l'étage, le détenu avait tenu des propos menaçants envers l'agent. Il avait ensuite fait demi-tour. L'agent l'avait empêché en se mettant devant lui. Le détenu lui avait alors craché en plein visage. L'alarme agression ayant été déclenchée et le détenu avait pu être remis en cellule. Les gardiens avaient alors constaté que la télévision avait été cassée.

L'incident s'était déroulé à 11h40. À 14h30, un médecin attestait par certificat médical que M. A______ n'était pas en décompensation aigüe.

b. Selon le procès-verbal d'audition du détenu du même jour, M. A______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés.

c. Par acte daté du 15 janvier 2019, posté le 18 janvier 2019, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la sanction précitée. Il contestait les faits. Une nouvelle fois, sa mise en cellule forte l'avait empêché de rencontrer respectivement un médecin le 8 janvier, l'aumônier le lendemain et à nouveau un médecin le 10 janvier 2019. Les gardiens s'acharnaient à son encontre. Il avait été poussé à la faute dans l'optique qu'il ne puisse pas se rendre aux rendez-vous. Il y avait eu une discussion à propos des chaises. Le gardien lui avait posé six fois la même question. Le gardien lui avait fait « monter les tours ». Il avait « juste haussé le ton ». Alors qu'il venait de dire à un gardien qu'il n'avait pas peur de lui, l'autre surveillant lui avait parlé « comme à un chien » et l'avait menacé verbalement. Il lui avait « juste craché dessus ».

d. Curabilis a conclu au rejet du recours. Il mentionnait que le détenu avait de nombreux antécédents, à savoir :

- une sanction du 21 février 2018 de la prison de Champ-Dollon pour possession d'un objet prohibé et dégradation de mobilier (trois jours de cellule forte) ; sanction suspendue en raison d'un transfert du recourant à l'UHPP ; la sanction avait été exécutée du 6 au 8 mars 2018 ;

- une sanction du 22 mars 2018 de Curabilis sous la forme d'une amende de CHF 50.- pour avoir insulté un infirmier ;

- une sanction du 15 avril 2018 de la prison Champ-Dollon de deux jours de cellule forte pour avoir troublé l'ordre de l'établissement ;

- une sanction du 21 juin 2018 de la prison de Champ-Dollon de dix jours de cellule forte (sanction suspendue à trois reprises en raison de transferts à Belle-Idée) pour avoir mis le feu dans sa cellule ; sanction déclarée illicite par la chambre administrative en raison de l'absence d'investigation quant à la responsabilité disciplinaire de M. A______ et la violation de son droit d'être entendu ;

- une sanction du 26 septembre 2018 de Curabilis sous la forme de deux amendes de CHF 50.-, la deuxième étant assortie d'un sursis de deux mois pour avoir détruit le matériel de sa cellule et adopté un comportement inapproprié en retour de conduite ;

- une sanction du 10 octobre 2018 sous la forme de la révocation du sursis de l'amende de CHF 50.- d'une part et d'une nouvelle amende de CHF 50.- avec sursis de deux mois d'autre part pour avoir insulté le personnel ;

-                 le 6 novembre 2018 de quinze jours de suppression des multimédias, avec sursis, pour avoir troublé la tranquillité de l'établissement ;

-                 le 11 novembre 2018 pour comportement inadéquat et trouble de la tranquillité, par la révocation du sursis à l'amende de CHF 50.- du 10 octobre 2018 et par la révocation du sursis des quinze jours de suppression des multimédias du 6 novembre 2018.

Tous les sursis accordés avaient dû être révoqués au vu de l'attitude du détenu. Toute volonté de l'empêcher de voir d'autres intervenants était contestée.

e. Dans sa réplique du 13 mars 2019, M. A______ s'est plaint d'avoir été interdit de téléphone pendant trois semaines ce qui l'avait empêché de contacter un avocat. Il demandait l'aide d'un avocat.

Dans une écriture spontanée du 29 mars 2019, le recourant s'est plaint d'un abus de pouvoir d'un gardien pour lui avoir soustrait ses documents après qu'il ait obtenu gain de cause auprès de la chambre de céans. Un gardien avait commis un abus de pouvoir en lui disant « vous voulez que je me remette sur votre dos ». Les diverses réparations de matériel lui avaient coûté CHF 1'000.- « depuis septembre ». Il sollicitait l'aide d'un avocat pour obtenir des dédommagements et des indemnités.

7) Par décision du 10 avril 2019, le service de l'assistance juridique a admis M. A______ au bénéfice de l'assistance juridique avec effet au 15 mars 2019 et a limité l'octroi aux frais judiciaires, à l'exclusion des honoraires d'avocat.

8) Par écriture spontanée du 17 avril 2019, le détenu a contesté le montant des frais de réparation du téléviseur notamment et des frais de nettoyage de sa cellule, mis à sa charge. Il a renouvelé le grief selon lequel il était empêché de se rendre à différents entretiens.

9) Par arrêt de ce jour, la chambre de céans a confirmé trois sanctions prises à l'encontre de M. A______, respectivement de trois, cinq et trois jours d'arrêts disciplinaires pour des faits qui se sont produits les 16 et 21 octobre et 12 novembre 2018. Il lui était reproché d'avoir insulté le personnel, mis en danger autrui ou l'institution pour avoir enflammé une feuille de papier devant sa cellule ainsi que des incivilités et de l'insubordination (cause A/3929/2018).

EN DROIT

1) Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA à- E 5 10 ; art. 74 al. 1 du règlement de l'établissement de Curabilis du 26 mars 2014 - RCurabilis - F 1 50.15).

2) a. Selon l'art. 65 LPA, l'acte de recours contient, sous peine d'irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (al. 1). Il contient également l'exposé des motifs ainsi que l'indication des moyens de preuve (al. 2).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, la jurisprudence fait preuve d'une certaine souplesse s'agissant de la manière par laquelle sont formulées les conclusions du recourant. Le fait qu'elles ne ressortent pas expressément de l'acte de recours n'est, en soi, pas un motif d'irrecevabilité, pour autant que l'autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/821/2018 du 14 août 2018 consid. 2 ; ATA/1243/2017 du 29 août 2017 consid. 2a).

b. En l'espèce, le recourant n'a pas pris de conclusions formelles en annulation de la décision de sanction du 7 janvier 2019. L'on comprend toutefois de ses écrits qu'il en conteste le bien-fondé. Le recours est ainsi recevable.

3) a. La sanction ayant déjà été exécutée, il convient d'examiner s'il subsiste un intérêt digne de protection à l'admission du recours (art. 60 let. b LPA).

Un tel intérêt suppose un intérêt actuel à obtenir l'annulation de la décision attaquée. Il est toutefois renoncé à l'exigence d'un tel intérêt, notamment, lorsque cette condition fait obstacle au contrôle de la légalité d'un acte qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi à la censure de l'autorité de recours (ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; 138 II 42 consid. 1).

b. En l'occurrence, le recourant dispose d'un intérêt digne de protection à recourir contre la sanction prononcée contre lui, quand bien même elle a déjà été exécutée. Sa légalité doit, en effet, pouvoir faire l'objet d'un contrôle. Dans la mesure où rien dans le dossier ne laisse à penser que le détenu ait quitté l'établissement à ce jour, il pourrait être tenu compte de la sanction contestée en cas de nouveau problème disciplinaire. Le recours conserve ainsi un intérêt actuel (ATA/731/2018 du 10 juillet 2018 consid. 2 ; ATA/1135/2017 du 2 août 2017).

4) Il convient donc d'examiner le bien-fondé de la sanction infligée.

a. Le droit disciplinaire est un ensemble de sanctions dont l'autorité dispose à l'égard d'une collectivité déterminée de personnes, soumises à un statut spécial ou qui, tenues par un régime particulier d'obligations, font l'objet d'une surveillance spéciale. Il permet de sanctionner des comportements fautifs qui lèsent les devoirs caractéristiques de la personne assujettie à cette relation spécifique, lesquels en protègent le fonctionnement normal. Il s'applique aux divers régimes de rapports de puissance publique, notamment aux détenus. L'administration dispose d'un éventail de sanctions dont le choix doit respecter le principe de la proportionnalité (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 142 à 145 et la jurisprudence citée).

b. Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu'elles ne sauraient être prononcées en l'absence d'une faute. La notion de faute est admise de manière très large en droit disciplinaire et celle-ci peut être commise consciemment, par négligence ou par inconscience, la négligence n'ayant pas à être prévue dans une disposition expresse pour entraîner la punissabilité de l'auteur (ATA/310/2017 du 21 mars 2017 consid. 5a ; ATA/245/2017 du 28 février 2017 consid. 5b et les références citées).

Sur un plan strictement médical, on admettra l'existence d'une irresponsabilité au sens de l'art. 19 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) en cas de psychose particulière, schizophrénie ou attente psychologique affective grave. Quant aux effets de l'irresponsabilité, on doit admettre que le délinquant déclaré irresponsable est inapte à toute faute. L'irresponsabilité déploie ainsi intégralement ses effets sur la culpabilité et sur la sanction (Laurent MOREILLON, in Robert ROTH/Laurent MOREILLON, Commentaire romand du code pénal I, 2009, p. 204).

c. La personne détenue a l'obligation de respecter les dispositions du RCurabilis, les directives du directeur général de l'office cantonal de la détention, du directeur de Curabilis, du personnel pénitentiaire, ainsi que les instructions du personnel médico-soignant (art. 67 RCurabilis). La personne détenue doit observer une attitude correcte à l'égard des différents personnels, des autres personnes détenues et des tiers (art. 68 RCurabilis). Sont en particulier interdits l'insubordination, les incivilités, les menaces dirigées contre les différents personnels de Curabilis et les atteintes portées à leur honneur, et, d'une façon générale, le fait d'adopter un comportement contraire au but de Curabilis (art. 69 al. 1 let. b, c et n RCurabilis).

d. Si une personne détenue enfreint le RCurabilis, une sanction proportionnée à sa faute, ainsi qu'à la nature et à la gravité de l'infraction, lui est infligée (art. 70 al. 1 RCurabilis). Il est tenu compte de l'état de santé de la personne détenue au moment de l'infraction disciplinaire (art. 70 al. 2 RCurabilis). Avant le prononcé de la sanction, la personne détenue doit être informée des faits qui lui sont reprochés et être entendue. Elle peut s'exprimer oralement ou par écrit (art. 70 al. 3 RCurabilis). La violation du droit d'être entendu ne peut être réparée devant l'instance de recours que si celle-ci dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité dont la décision est contestée (ATF 138 I 97 consid. 4.16.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2).

e. Aux termes de l'art. 70 RCurabilis, les sanctions sont l'avertissement écrit (let. a), la suppression, complète ou partielle, pour une durée maximale de trois mois, des autorisations de sortie, des loisirs, des visites et de la possibilité de disposer des ressources financières (let. b.), l'amende jusqu'à CHF 1'000.- (let. c) et les arrêts pour une durée maximale de dix jours (let. d ; al. 4). Ces sanctions peuvent être cumulées (al. 5) ; l'exécution de la sanction peut être prononcée avec un sursis ou un sursis partiel de six mois au maximum (al. 6), qui peut être révoqué lorsque la personne détenue fait l'objet d'une nouvelle sanction durant le délai d'épreuve (al. 7) ; après son prononcé, la sanction peut être suspendue ou la personne détenue en être dispensée pour justes motifs ou en opportunité (al. 8).

f. Le directeur de Curabilis et son suppléant en son absence sont compétents pour prononcer les sanctions (art. 71 al. 1 RCurabilis). Le directeur de Curabilis peut déléguer la compétence de prononcer les sanctions prévues à l'art. 70 al.  4  RCurabilis à d'autres membres du personnel gradé de l'établissement, tel un agent pénitentiaire ayant le grade de sous-chef (ATA/266/2018 du 20 mars 2018 consid. 7).

Le placement d'une personne détenue en cellule forte pour une durée supérieure à cinq jours est impérativement prononcé par le directeur de Curabilis ou, en son absence, par son suppléant ou un membre du conseil de direction chargé de la permanence (art. 71 al. 2 in fine RCurabilis).

g. De jurisprudence constante, la chambre administrative accorde généralement valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés (ATA/731/2018 précité consid. 5d ; ATA/73/2017 du 31 janvier 2017 consid. 7), sauf si des éléments permettent de s'en écarter. Les agents de détention étant également des fonctionnaires assermentés (art. 19 de la loi sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaires du 3 novembre 2016 - LOPP - F 1 50), le même raisonnement peut être appliqué aux rapports établis par ces derniers (ATA/731/2018 précité consid. 5d ; ATA/266/2018 précité consid. 6).

h. En matière de sanctions disciplinaires, l'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation ; le pouvoir d'examen de la chambre administrative se limite à l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/888/2015 du 19 septembre 2014 consid. 7b ; ATA/946/2014 du 2 décembre 2014 consid. 16).

i. Dix jours de cellule forte ont été confirmés par arrêt de la chambre de céans (ATA/418/2019 du 24 septembre 2019) à l'encontre d'un détenu de la Brenaz dont l'attitude, en particulier son refus d'obéir et de se soumettre, avait entraîné un grand désordre manifeste dans l'établissement, un surveillant ayant même été blessé.

Sept jours de cellule forte ont été confirmés par la chambre de céans pour trouble à l'ordre de l'établissement, refus d'obtempérer (remonter à l'étage), insultes à l'encontre du personnel pendant plusieurs minutes notamment (« Fils de pute, nique ta mère ! »), le détenu ayant précédemment fait l'objet de huit sanctions disciplinaires (ATA/1189/2018 du 6 novembre 2018).

La chambre de céans avait rejeté un recours contre une sanction disciplinaire de sept jours de cellule forte pour violence physique envers le personnel de la prison. La décision était proportionnée et cohérente par rapport aux précédentes sanctions de, respectivement deux, trois et cinq jours de cellule forte ainsi qu'en raison du refus persistant du détenu de se conformer aux instructions du personnel de la prison (ATA/1282/2015 du 1er décembre 2015).

5) En l'espèce, il ressort de l'acte de recours que le recourant admet avoir craché au visage du gardien. Il admet de même avoir « monté les tours », haussé le ton et déclaré au gardien qu'il n'avait pas peur de lui. Enfin, une photo atteste des dégâts sur le téléviseur.

Le recourant a pu s'exprimer avant le prononcé de cette sanction ; son audition est attestée par un procès-verbal établi à cet effet que le recourant a refusé de signer. L'avis médical quant à son état de santé a été obtenu avant le prononcé de la sanction. Par ailleurs, s'agissant d'une sanction supérieure à cinq jours de cellule forte, la décision du 7 janvier 2019 a été signée par ordre du gardien-chef, membre de droit du conseil de direction de Curabilis conformément à l'art. 3 LOPP. L'autorité intimée a ainsi respecté les exigences relatives à la procédure disciplinaire.

Les atteintes à l'intégrité physique et à l'honneur du personnel de l'établissement sont interdites par l'art. 69 al. 1 let. b, c et n RCurabilis, à l'instar de la dégradation du matériel. Elles peuvent donc faire l'objet de sanctions.

6) Reste à examiner si la sanction prononcée respecte le principe de la proportionnalité.

a. En l'espèce, la sanction querellée a fait l'objet de jours en cellule forte. Le crachat au visage est inacceptable et d'une gravité extrême. Il touche à l'intégrité physique de l'agent de détention et à son honneur. De surcroît, le détenu minimise les faits en admettant avoir « juste craché » sur l'agent. À cet acte s'ajoutent les dégâts matériels sur le téléviseur.

Six jours de cellule forte auxquels s'ajoutent trois jours avec sursis apparaissent en conséquence proportionnés, au vu du large pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité intimée dont la chambre de céans ne revoit que l'abus ou l'excès. Cette mesure est nécessaire afin que le détenu prenne conscience de la gravité de ses actes. Elle est apte à atteindre le but d'intérêt public poursuivi du maintien de l'ordre au sein de l'établissement et proportionnée au sens étroit au vu de la casuistique précitée.

b. Par ailleurs, les sanctions s'inscrivent dans un contexte de nombreux antécédents. La description faite par l'autorité intimée des autres sanctions indique par ailleurs que l'établissement nuance son choix de sanctions en fonction de la gravité, optant parfois pour le sursis, et modulant la peine allant de l'amende, à la suppression de multimédias, voire dans les cas graves des arrêts disciplinaires.

c. Le recourant reproche à un agent de détention d'avoir voulu le priver, à deux reprises, de ses rendez-vous avec l'assistante sociale. S'il est exact que la date de la sanction a correspondu avec les dates des rendez-vous avec ladite assistante, une volonté de l'agent de détention de nuire au détenu est contestée par l'autorité intimée et aucun élément du dossier ne permet de retenir que le gardien ait eu une telle intention. Les rendez-vous ont par ailleurs pu être reportés et se tenir.

En conclusion, la sanction prononcée le 7 janvier 2019 est fondée et proportionnée. Elle sera confirmée.

7) Il ne sera pas perçu d'émolument, le recourant ayant obtenu l'assistance juridique pour les frais (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 18 janvier 2019 par Monsieur A______ contre la décision de l'établissement pénitentiaire fermé Curabilis du 7 janvier 2019 ;

 

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ ainsi qu'à l'établissement pénitentiaire fermé Curabilis.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :