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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2714/2011

ATA/126/2013 du 26.02.2013 sur JTAPI/1497/2011 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; PERMIS DE CONSTRUIRE ; PROPRIÉTÉ ; TERRAIN DEVANT LA MAISON ; QUALITÉ POUR RECOURIR ; VOISIN ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; PRISE DE POSITION DE L'AUTORITÉ ; DANGER(EN GÉNÉRAL) ; ESTHÉTIQUE ; PROTECTION DES MONUMENTS
Normes : Cst.29.al2 ; LCI.3.al3 ; LCI.14 ; LCI.15 ; LPMNS.4 ; LPMNS.15.al3
Parties : RECORDON Pierre-Alain, RECORDON Dorothée et Pierre-Alain / SLATER Brian, SLATER Gabrielle, CHILLIER HAURI Sabine, DEPARTEMENT DE L'URBANISME
Résumé : L'aménagement de la cour des intimés avec la construction d'une marche progressive d'une hauteur maximale de 17 cm le long de ladite cour desservant le bâtiment classé et longeant le chemin communal ne constitue pas un inconvénient grave, dans la mesure où il ne représente ni un obstacle ni un danger particulier pour les personnes empruntant ledit chemin. L'esthétique du projet litigieux a fait l'objet d'un examen minutieux de la part de la CMNS, dont le préavis a été suivi tant par le département que par le TAPI.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2714/2011-LCI ATA/126/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 février 2013

2ème section

 

dans la cause

Madame Dorothée et Monsieur Pierre-Alain RECORDON
représentés par Me Guillaume Etier, avocat

contre

Madame Gabrielle et Monsieur Brian SLATER
représentés par Me Pierre-Olivier Allaz, avocat

Madame Sabine CHILLIER HAURI
représentée par Me Pascal Pétroz, avocat

DÉPARTEMENT DE L'URBANISME

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 décembre 2011 (JTAPI/1497/2011)


EN FAIT

1) La parcelle n° 1198 d'une surface totale de 460 m2, feuille 30 de la commune de Meinier, à Corsinge, est occupée par un bâtiment, connu sous le nom de « maison d'Adda », classé MS-C 126 en 1956.

Selon le registre foncier (ci-après : RF) et le plan de répartition des locaux modifié le 28 janvier 2003, cette parcelle est composée de trois parties, dévolues à l'habitation et aux activités, notamment le bâtiment n° 1'067, d'une surface de 108 m2, correspondant au lot 2.07 sis à la route de Corsinge n° 17, propriété de Madame Gabrielle Slater, et le bâtiment n° 92, d'une surface de 133 m2, correspondant au lot 2.08 sis à la route de Corsinge n° 15, propriété de Madame Dorothée et de Monsieur Pierre-Alain Recordon. Une cour attenante d'environ 30 m2 longeant un chemin communal d'une largeur variant entre 1 mètre et 1,30 mètre environ dessert les entrées nos 15 et 17 de la route de Corsinge.

Il ressort du règlement de copropriété du 26 septembre 1984 qu'il « est interdit de clôturer ou de fermer d'une façon quelconque la limite séparative » entre les deux lots précités.

2) Le 15 juin 2011, le père de Mme Slater, Monsieur Brian Slater, domicilié avec son épouse à la route de Corsinge n° 17, a déposé auprès du département des constructions et des technologies de l'information, devenu depuis le département de l'urbanisme (ci-après : le département), une demande définitive en autorisation de construire (DD 104'357-2), en vue de l'aménagement de la cour située devant l'entrée du n° 17 devant l'entrée de leur propriété, délimitée par les points cadastraux nos 203, 204, 228 et 229. Il a joint à sa requête un devis détaillé des travaux projetés, établi le 30 juillet 2010 par la société Butty Jardins S.à r.l. pour un montant total de CHF 10'343,05, prévoyant notamment la pose de pierres naturelles, à savoir des galets refendus de couleur grise sur un lit de mortier. Le devis prévoyait également un « travail précautionneux pour la sauvegarde de deux vieilles vignes vierges contre la façade et protection et coupe propre des racines (sic) ». Il a joint également un dossier photographique illustrant les lieux sous différents angles, et, en surimpression, les modifications projetées, ainsi que des photographies de galets refendus. En l'état, la cour était « en chantier » à la suite de travaux antérieurs dus à un problème de canalisations et représentait un risque d'accident. Il souhaitait aplanir l'espace concerné, ce qui entraînait, le long du chemin communal et de la propriété voisine, l'apparition de décrochements de hauteurs variables, n'excédant pas 17 cm à leur point le plus haut, à la jonction entre le chemin communal et la limite de leur lot avec celui des époux Recordon.

3) Les 22, 23 et 24 juin 2011, la direction générale de l'eau, l'office du génie civil, la police du feu, ainsi que la direction générale de la nature et du paysage ont déclaré ne pas être non concernés par le projet.

4) Les préavis suivants ont été recueillis :

- favorable, émis le 6 juillet 2011 par la sous-commission monuments et antiquités (ci-après : SCMA) de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) : les aménagements proposés étaient d'ordre mineur et ne portaient pas atteinte à la qualité patrimoniale de la maison d'Adda, ainsi qu'à sa cour attenante, sous réserve que les travaux fassent l'objet d'un suivi de la part de la conservatrice des monuments ;

- favorable, émis le 20 juillet 2011 par la commune de Meinier.

5) Par décision du 5 août 2011, publiée le 10 août 2011 dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO), le département a accordé à M. Slater l'autorisation sollicitée.

Les conditions figurant dans le préavis précité de la CMNS faisaient partie intégrante de l'autorisation.

Cette dernière pouvait faire l'objet d'un recours dans les trente jours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI).

6) Par acte posté le 7 septembre 2011, les époux Recordon ont recouru contre l'autorisation précitée auprès du TAPI, en concluant à son annulation (cause A/2714/2011).

Ils étaient propriétaires du lot 2.08 de la parcelle n° 1'198, celui-ci étant séparé du lot 2.07 par les points cadastraux nos 229 et 204, lesquels formaient entre eux, sur la cour sur laquelle portait le projet litigieux, une ligne perpendiculaire au chemin communal. Jusqu'en 2003, le lot 2.07 était occupé par un restaurant et eux-mêmes pouvaient librement utiliser la cour de ce lot lorsqu'ils entraient ou sortaient de leur domicile. Depuis l'acquisition du lot 2.07 par Mme Slater, ils devaient emprunter le chemin communal et longer le lot 2.07 jusqu'à la marche leur permettant d'accéder au lot 2.08 et à leur porte d'entrée.

L'autorisation n'était pas claire et ne permettait pas de savoir si le projet litigieux portait aussi sur la partie de la cour qui leur appartenait. Le projet les contraignait à aménager une marche devant leur porte d'entrée, deux marches au bout de la partie de la cour leur appartenant et risquait d'endommager les racines de leur vigne grimpante. L'aménagement des lots 2.07 et 2.08 était indivisible. Le projet était dangereux, la création de la marche le long du chemin communal induisant un risque de chute, et ne respectait pas le caractère de la maison d'Adda : les galets refendus proposés par M. Slater n'étaient pas neutres.

Jusqu'en juin 2011, ils avaient échangé des courriers M. Slater s'agissant de l'aménagement de la cour, sans aboutir à un accord. M. Slater avait déposé la demande d'autorisation de construire sans les en informer.

7) Par acte posté le 15 septembre 2011, Madame Sabine Chillier Hauri, propriétaire de la parcelle n° 1'200 de la commune de Meinier, sise à la route de Corsinge n° 13A, en face du lot de Mme Slater, a également recouru auprès du TAPI contre l'autorisation précitée, concluant à son annulation (cause A/2818/2011).

Le projet litigieux occasionnerait des inconvénients graves pour elle car, à la suite de travaux antérieurs, le chemin communal n'était plus doté d'un canal d'écoulement des eaux, ce qui avait déjà causé des problèmes d'écoulement en provenance de la parcelle n° 1'198.

8) Les 13 octobre et 4 novembre 2011, M. et Mme Slater ont conclu au rejet des deux recours.

La partie de la cour visée par l'autorisation litigieuse ne concernait que le n° 17 de la route de Corsinge, dépendant de leur lot 2.07. L'office du patrimoine et des sites n'avait pas soulevé d'objection s'agissant du projet et des galets refendus. Aucune des propositions faites antérieurement aux époux Recordon pour l'aménagement de la cour n'avait abouti à une solution amiable. Le projet autorisé n'était ni dangereux ni inesthétique.

9) Le 2 décembre 2011, le TAPI a entendu les parties en audience de comparution personnelle. Celles-ci ont persisté dans leurs conclusions. Le département a confirmé sa décision et précisé que, s'agissant des problèmes d'écoulement d'eau, le service compétent avait « examiné cet aspect des choses en considérant que le projet n'apporterait pas de modifications négatives ».

10) Par courrier du 2 décembre 2011, les époux Recordon ont sollicité un transport sur place, ainsi qu'un délai pour se déterminer sur le recours de Mme Chillier Hauri.

11) Le 7 décembre 2011, M. et Mme Slater se sont opposés à ces demandes.

12) Par jugement du 2 décembre 2011, adressé aux parties le 23 décembre 2011, le TAPI a ordonné la jonction des procédures A/2714/2011 et A/2818/2011 sous le numéro de cause A/2714/2011 et a rejeté les deux recours.

L'autorisation litigieuse était claire : elle concernait uniquement le lot 2.07 sur la parcelle n° 1'198 et non le lot 2.08 propriété des époux Recordon. Les arguments de ces derniers relevant du droit privé n'étaient pas de la compétence des juridictions administratives.

Une marche d'une hauteur de 17 cm à son point maximal entre le chemin communal et la propriété privée n'était pas une source de danger susceptible d'interdiction, ce type d'aménagement faisant partie de la vie courante. Les inconvénients subjectifs pour les voisins ne constituaient pas un motif pour refuser l'autorisation sollicitée.

La CMNS, composée de spécialistes, avait préavisé favorablement le projet, s'assurant au préalable de la compatibilité du projet avec le bâtiment classé. Les planches photographiques jointes au dossier permettaient de se faire une idée claire des résultats pouvant être obtenus au moyen de galets refendus. Un transport sur place n'était pas nécessaire.

Un canal d'écoulement des eaux était prévu en travers du chemin communal. La direction générale de l'eau avait considéré que le projet ne la concernait pas.

Le jugement pouvait faire l'objet d'un recours dans les trente jours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

13) Par acte posté le 1er février 2012, les époux Recordon ont recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant à l'annulation de ce dernier et de l'autorisation de construire, ainsi qu'à l'allocation d'une indemnité de procédure. Subsidiairement, ils sollicitaient un transport sur place.

Le TAPI avait mal apprécié la configuration des lieux et violé leur droit d'être entendu en ne procédant pas à un transport sur place.

La marche progressive prévue par le projet litigieux le long du chemin communal était dangereuse tant pour les riverains que pour les visiteurs empruntant ledit chemin, la différence de niveaux entraînant un risque de chute. M. Slater n'avait jamais remédié aux dangers causés par le trou creusé à l'occasion d'une fuite d'eau survenue à l'emplacement où il projetait de construire la terrasse. Les propositions d'aménagement commun qu'il avait formulées antérieurement étaient inacceptables.

L'aménagement litigieux était inesthétique et préjudiciable à l'aspect de la maison d'Adda. L'accès asphalté au lot 2.08 présentait l'avantage d'être neutre. L'autorisation de construire sur le lot 2.07 une terrasse rompant la continuité de la cour tant dans sa configuration que dans ses matériaux créait une disparité choquante. L'aménagement des lots 2.07 et 2.08 était indivisible.

14) Le 10 février 2012, le TAPI a transmis ses deux dossiers sans formuler d'observations.

15) Par courrier du 6 mars 2012, Mme Chillier Hauri a informé la chambre de céans qu'elle s'en rapportait à justice s'agissant du recours précité.

16) Le 9 mars 2012, le département a conclu au rejet du recours. La procédure relevait davantage du droit privé que du droit public, les époux Recordon reprochant à M. Slater de leur avoir interdit d'accéder par la terrasse à leur domicile. En accordant l'autorisation sollicitée, le département avait suivi les préavis favorables de la commune et de la CMNS, de sorte que l'autorité de recours devait s'imposer une certaine retenue.

17) Le 9 mars 2012, M. et Mme Slater ont conclu au rejet du recours, « avec suite de dépens ».

L'autorisation querellée portait uniquement sur le lot 2.07. L'aménagement proposé ne clôturait pas la cour. Le chemin communal se terminait en cul-de-sac et n'était que peu utilisé par les riverains. Par le passé, les époux Recordon avaient refusé les différentes propositions tendant à aménager l'ensemble de la cour.

Le fait que le projet ne paraisse pas esthétique aux époux Recordon n'était pas pertinent pour l'issue du litige. Ceux-ci pouvaient traverser la cour en diagonale pour accéder à leur porte d'entrée. La cour était éclairée la nuit par une lampe s'allumant automatiquement au passage d'une personne. Le projet prévoyait une terrasse pavée sur le lot 2.07, alors que la cour du lot 2.08 était asphaltée, de sorte que l'attention des passants serait attirée par la différence de niveaux, écartant ainsi tout danger. Les risques évoqués par les époux Recordon n'étaient pas constitutifs d'inconvénients graves.

18) Le 23 mars 2012, le juge délégué a imparti aux recourants un délai au 20 avril 2012 pour lui répliquer.

19) Le 20 avril 2012, les époux Recordon ont persisté dans leurs conclusions. Le différend lié à l'aménagement de la cour durait depuis plusieurs années, la famille Slater et eux-mêmes n'ayant pas réussi à trouver un accord. Le recours ne reposait pas sur des motifs relevant des droits réels.

20) Par courrier du 30 avril 2012, Mme Chillier Hauri a informé la chambre administrative qu'elle ne souhaitait plus participer à la suite de la procédure et qu'elle s'en rapportait à justice.

21) Le 21 mai 2012, Mme Chillier Hauri a indiqué à la chambre de céans qu'elle n'assisterait pas à l'audience du 23 mai 2012 et ne participerait à aucun acte de procédure à l'avenir. Elle a répété qu'elle s'en rapportait à justice.

22) Le 23 mai 2012, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties, à laquelle Mme Chillier Hauri n'a pas assisté.

a. M. Recordon a persisté dans son recours. Le projet litigieux posait des problèmes de sécurité et d'esthétique. Les différentes propositions de M. Slater étaient insatisfaisantes. L'unité de la terrasse devait être préservée. L'aménagement projeté n'était pas dans son intérêt, de sorte que son avis devait être pris en compte. Il souhaitait obtenir un échantillon du matériau prévu pour couvrir la terrasse. Il sollicitait un transport sur place.

b. M. Slater a persisté dans sa position. Il avait fait plusieurs propositions à M. Recordon, qui n'en avait accepté aucune, sans proposer d'alternative.

c. Le représentant du département a indiqué que le litige relevait davantage du conflit de voisinage que du droit de la construction. D'après les photographies figurant au dossier, la situation actuelle était moins satisfaisante pour toutes les parties que celle qui prévaudrait après la réalisation des travaux. Lors de l'instruction de la demande d'autorisation, le département avait estimé que l'aménagement de la marche ne posait pas de problème de dangerosité.

23) Le 26 juillet 2012, le juge délégué a effectué un transport sur place à la route de Corsinge nos 15-17 à Meinier.

a. Il a constaté que, depuis la route de Corsinge, les nos 15 et 17 n'étaient pas visibles. La maison d'Adda était constituée d'un seul corps de bâtiment avec une toiture de différents niveaux et comportant différentes couvertures, de type velux. Il a invité le département à prendre des photographies. L'accès aux nos 15 et 17 se faisait depuis une place utilisée comme parking. Face à l'accès se trouvait la propriété de Mme Chillier Hauri, séparée par un chemin communal plus ou moins asphalté. L'entrée principale du n° 17 était située sur la droite. Le chemin communal était en pente douce, mais il avait été comblé devant la propriété de Mme Chillier Hauri pour faciliter l'accès à celle-là. La partie de la cour, propriété de la famille Slater, faisait l'objet de travaux liés à l'adduction d'eau dans la propriété de Mme Chillier Hauri. La marche projetée était perpendiculaire au chemin communal, en bordure de la cour du lot 2.07. Devant la chaufferie des époux Recordon, le chemin communal se réduisait à 1 mètre. Ladite chaufferie était accessible en descendant par deux marches. Le chemin communal continuait ensuite jusqu'à l'accès de la route de Corsinge n° 13et s'arrêtait sur une haie. Le sol n'était pas plat et était aménagé en pierres et mortier devant le n° 19 de la route de Corsinge.

b. M. Slater souhaitait aménager une surface plane en conservant la pente du chemin communal. En l'état, la famille Slater ne pouvait accéder à l'intérieur de son logement que par la route de Corsinge, par des escaliers extérieurs, alors que les époux Recordon disposaient d'un accès à leur domicile par la route de Corsinge, par le chemin communal, ainsi que par leur jardin, par un chemin longeant l'arrière du bâtiment. M. Slater prévoyait un aménagement avec des galets refendus, correspondant au souhait de la CMNS.

c. Selon M. Recordon, l'existence de marches sur le bord de la cour compliquerait l'accès au n° 13 pour la mère du voisin domicilié audit numéro, l'intéressée se déplaçant en fauteuil roulant. Lors de l'acquisition du bâtiment par les deux parties, la terrasse était recouverte de béton. Les racines de la vigne se trouvaient sous la terrasse et pouvaient être menacées par des travaux d'aménagement, de sorte que des précautions devaient être prises. Il souhaitait un aménagement commun et être consulté sur les choix ; à défaut, si l'aménagement se faisait uniquement du côté de M. Slater, il souhaitait être indemnisé pour les dégâts causés.

d. Le département a indiqué qu'il se renseignerait pour savoir s'il existait à Genève une terrasse avec des galets refendus. A la demande du juge délégué, il examinerait également comment l'aménagement de la terrasse des époux Recordon, faite de dalles en terre cuite et se situant dans la propriété de ces derniers sur une autre parcelle, avait été géré une trentaine d'années auparavant.

e. Le juge délégué a prié M. Slater d'examiner s'il était prêt à envisager un alignement de la terrasse par rapport à la première pierre plutôt que par rapport au bâtiment. M. Recordon devait déterminer si, avec ce retrait d'alignement, il pouvait accepter la marche.

24) Le 14 septembre 2012, les époux Recordon ont renvoyé à la chambre administrative le procès-verbal de transport sur place signé. Pour accéder aux principales pièces d'habitation, la famille Slater devait dans tous les cas monter des escaliers, que ceux-ci soient à l'intérieur ou à l'extérieur de l'habitation. Eux-mêmes avaient un accès à leur domicile par le chemin communal du côté de la route de Corsinge, ainsi que par le jardin par un chemin longeant l'arrière du bâtiment de l'autre côté. Même si les marches permettant d'accéder à la chaufferie présentaient un certain danger, cela ne justifiait pas l'octroi de l'autorisation litigieuse qui créait de nouveaux risques. L'aménagement de leur terrasse côté jardin datait de 1979 et ne concernait pas la présente procédure.

25) Le 14 septembre 2012, M. et Mme Slater ont adressé à la chambre administrative le procès-verbal de transport sur place signé. Le comblement du chemin communal depuis le parking jusqu'à la propriété de Mme Chillier Hauri posait des problèmes de niveaux pour l'aménagement de leur terrasse. Ils souhaitaient aménager leur cour au moyen de galets refendus, dont une photographie figurait au dossier.

26) Par courrier du 26 octobre 2012, le juge délégué a prié le département de l'informer des résultats de ses recherches au sujet des diverses demandes formulées lors du transport sur place du 26 juillet 2012.

27) Le même jour, le département a remis au juge délégué le reportage photographique effectué le 16 octobre 2012, duquel il ressortait que la cour située devant la propriété de Mme Slater était « en chantier », que le sol était irrégulier et qu'un panneau avec l'inscription « danger travaux » était planté devant ladite cour.

28) Le 29 octobre 2012, le juge délégué a fixé un délai au 30 novembre 2012 à toutes les parties pour déposer leurs observations après enquêtes.

29) Le 5 novembre 2012, M. Slater a informé le juge délégué qu'il ne pouvait pas entrer en matière sur un alignement diagonal de sa terrasse, ni sur un recul parallèle de l'entier de celle-ci. Ces propositions impliquaient de poser deux bordures de séparation en granit au lieu d'une seule, ce qui serait inesthétique, compliquerait les accès, réduirait la surface utilisable de la terrasse projetée et engendrerait un surcoût important. Il a joint diverses photographies des lieux et des montages en trois dimensions du projet litigieux notamment, ainsi que des photographies de galets.

30) Le 9 novembre 2012, le juge délégué a informé les parties que, sous réserve de l'existence éventuelle de terrasses aménagées avec des galets refendus dans le canton - ce qui devait être précisé par le département à la suite du transport sur place du 26 juillet 2012 -, la cause pouvait être gardée à juger.

31) Dans leurs observations après enquêtes du 30 novembre 2012, Mme et M. Slater ont persisté dans leurs conclusions.

Les époux Recordon avaient refusé toutes leurs propositions d'aménagement commun. Le projet litigieux améliorait l'esthétique des abords de la maison d'Adda. La surface de la cour dépendant du lot 2.07 susceptible d'être pavée mesurait 19,5 m2. La marche progressive en granit ne constituait pas un danger particulier pour les personnes empruntant le chemin communal, d'autant plus que la cour était automatiquement éclairée lorsqu'une personne s'en approchait. Le remblai posé par la famille Chillier sur le chemin communal était dangereux. Le projet querellé respectait « la limite de séparation juridique entre le chemin communal et la terrasse 2.07 ». L'existence d'une seule bordure en granit serait esthétique et attirerait l'attention des passants, écartant ainsi tout danger. La largeur du chemin communal en bordure de la terrasse projetée variait entre 1,32 m et 1,25 m et était suffisante pour y cheminer sans danger. Ils ne pouvaient pas produire un échantillon de galets refendus, dans la mesure où la société Butty Jardins S.à r.l. exigeait en contrepartie le paiement des frais exposés en vain pour l'établissement de devis, l'examen de la vigne vierge des époux Recordon et la production d'échantillons de pierres.

L'avis des époux Recordon selon lequel le projet d'aménagement litigieux était inesthétique relevait de l'appréciation subjective et échappait à l'examen de l'autorité de recours. La CMNS avait émis un préavis favorable. Une marche progressive en granit clair ne constituait pas un danger particulier susceptible d'être interdit. L'attention des passants serait attirée par le contraste entre la terrasse composée de galets refendus et le chemin communal goudronné. Le projet litigieux ne posait donc aucun problème de sécurité.

32) Le 30 novembre 2012, le département a conclu à la confirmation de sa décision, les enquêtes ayant démontré que celle-ci était fondée.

33) Dans leurs observations après enquêtes du 30 novembre 2012, les époux Recordon ont persisté dans leur recours et dans leurs conclusions.

Ils ne pouvaient pas se prononcer sur le matériau que M. Slater prévoyait d'utiliser pour le projet litigieux, puisque l'intéressé n'avait pas produit d'échantillon. Seule une unique bordure de granit était envisageable pour la marche projetée. Eux-mêmes avaient dû prendre des mesures sécuritaires, en demandant à la famille Chillier de combler la tranchée traversant le chemin communal et en plantant un panneau avec l'inscription « danger travaux » dans la fosse ouverte.

Ils étaient prêts à retirer leur recours dans l'hypothèse où M. et Mme Slater se rallieraient à une seconde version de l'alignement alternatif de la terrasse suggéré lors du transport sur place, ménageant un passage plus large sur le chemin communal et réduisant l'emprise de la marche progressive entre la nouvelle terrasse et le chemin, sous réserve des matériaux employés.

34) Le 5 décembre 2012, le juge délégué a transmis aux parties une copie des écritures précitées et les a informées que la cause était gardée à juger.

35) M. et Mme Slater n'ont pas réagi à la proposition des époux Recordon de retirer leur recours aux conditions précitées.

36) Le département n'a pas donné suite à la demande du juge délégué de l'informer de l'existence ou non de terrasses aménagées avec des galets refendus dans le canton de Genève.

37) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable à cet égard (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17A al. 1 let. c et 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Selon la jurisprudence, seuls les voisins dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis pour recourir (ATF 133 II 249 consid. 1.3.1 p. 252 ; 133 II 409 consid. 1 p. 411 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire ou du locataire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1C_152/2012 du 21 mai 2012  consid. 2.1 ; 1C_125/2009 du 24 juillet 2009 consid. 1 ; 1C_7/2009 du 20 août 2009 consid. 1 ; ATA/649/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/321/2009 du 30 juin 2009 ; ATA/331/2007 du 26 juin 2007).

b. En l'espèce, le lot des époux Recordon est adjacent à celui de Mme Slater et se situe sur la même parcelle. Les intéressés sont touchés directement par l'aménagement de la cour sur le lot voisin et ont un intérêt personnel digne de protection à l'annulation de la décision litigieuse. La qualité pour recourir doit donc leur être reconnue et le recours est recevable.

3) Pour contester l'autorisation délivrée à M. et Mme Slater, les recourants se prévalent notamment des problèmes de sécurité et d'accès le long du chemin communal pour la mère du voisin domicilié à la route de Corsinge 13, dans la mesure où l'intéressée se déplace en fauteuil roulant. Celle-ci n'étant pas partie à la présente procédure, les griefs des recourants à ce sujet sont irrecevables.

4) Par courriers des 6 mars, 30 avril et 21 mai 2012, Mme Chillier Hauri a informé la chambre de céans qu'elle s'en rapportait à justice s'agissant du recours interjeté par les époux Recordon, qu'elle ne souhaitait plus participer à la procédure ni à aucun acte de procédure. Dans ces circonstances, Mme Chillier Hauri doit être mise hors de cause.

5) Le recours porte sur l'autorisation accordée par le département à Mme et M. Slater en vue de l'aménagement de leur cour en terrasse. Les époux Recordon estiment que le projet litigieux est dangereux et inesthétique.

Ils font grief au TAPI d'avoir violé leur droit d'être entendu, dans la mesure où celui-ci n'a pas effectué de transport sur place.

a. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend le droit pour l'intéressé de s'exprimer avant qu'une décision ne soit prise au sujet de sa situation juridique, de prendre connaissance des pièces du dossier, de faire administrer des preuves sur des faits importants pour la décision envisagée, de participer à l'administration des preuves essentielles, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (Arrêt du Tribunal fédéral 2A_520/2002 du 17 juin 2003 consid. 2.2 ; ATA/301/2012 du 15 mai 2012 ; ATA/525/2011 du 30 août 2011).

b. Une décision entreprise pour violation du droit d'être entendu n'est pas nulle, mais annulable (Arrêt du Tribunal fédéral 2P_207/2001 du 12 novembre 2001 consid. 5a et les arrêts cités ; ATA/525/2011 précité ; ATA/452/2008 du 2 septembre 2008).

c. La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, est possible lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 ; ATA/430/2008 du 27 août 2008 ; P. MOOR, Droit administratif, Les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2ème éd., Berne 2002, ch. 2.2.7.4 p. 283). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/301/2012 précité ; ATA/525/2011 précité ; ATA/452/2008 précité).

d. En l'espèce, la question de la violation du droit d'être entendu des recourants peut demeurer ouverte, puisque la chambre administrative, qui est compétente en cas de violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA ; ATA/846/2012 du 18 décembre 2012), a procédé aux actes d'instruction nécessaires, notamment un transport sur place, et a pris connaissance de l'ensemble du dossier, ainsi que de l'argumentation des recourants, de sorte que l'éventuelle violation du droit d'être entendu qu'aurait commise le TAPI a été réparée devant la chambre de céans, qui dispose en l'espèce du même pouvoir d'examen.

6) Le projet litigieux poserait des problèmes de sécurité, la marche progressive induisant un risque de chute. Ils soulèvent également un grief lié à l'esthétique de l'aménagement projeté, qui ne respecterait pas le caractère du bâtiment classé et la nature du revêtement.

a. A teneur de l'art. 1 al. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a), ni modifier même partiellement le volume, l'architecture, la couleur, l'implantation, la distribution ou la destination d'une construction ou d'une installation (let. b), ni modifier la configuration du terrain (let. d).

b. Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation de construire (art. 1 al. 5 LCI).

c. Selon l'art. 14 LCI, le département peut refuser les autorisations prévues à l'art. 1 LCI notamment lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu'exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas les conditions de sécurité ou de salubrité suffisantes à l'égard des voisins ou du public (let. c).

Les normes de protection, tel l'art. 14 LCI, sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée ; elles ne visent pas au premier chef à protéger l'intérêt des voisins. La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y a pas d'abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/726/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/330/2009 du 30 juin 2009 ; ATA/649/2002 du 5 novembre 2002 et les arrêts cités).

La notion d'inconvénients graves de l'art. 14 al. 1 LCI est une notion juridique indéterminée qui laisse à l'autorité une liberté d'appréciation et n'est limitée que par l'excès ou l'abus de pouvoir (ATA/723/2010 du 19 octobre 2010 ; ATA/441/2006 du 31 août 2006 ; ATA B. du 24 juin 1992). La chambre de céans peut revoir librement l'interprétation des notions juridiques indéterminées, mais contrôle sous le seul angle des limites précitées, l'exercice de la liberté d'appréciation de l'administration, en mettant l'accent sur le principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable, et sur le respect de l'intérêt public en cas d'octroi d'une autorisation. Il évite de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l'autorité décisionnelle ait suivi ces préavis (ATA/723/2010 du 19 octobre 2010 ; ATA/619/2007 du 4 décembre 2007 ; ATA/105/2006 du 17 mars 2006).

7) Aux termes de l'art. 15 LCI, le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur, nuirait au caractère ou à l'intérêt du quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d'architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

Cette disposition légale renferme une clause d'esthétique, qui constitue une notion juridique indéterminée, laissant un certain pouvoir d'appréciation à l'administration, celle-ci n'étant limitée que par l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (ATA/453/2011 du 26 juillet 2011 et les références citées).

La législation genevoise en matière de police des constructions a pour seul but d'assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. Elle réserve expressément le droit des tiers. Selon les principes généraux du droit, il n'appartient pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s'élever entre un requérant et un opposant. Elle n'a pas pour objet de veiller au respect des droits réels, comme les servitudes par exemple (art. 3 al. 6 LCI ; ATA/500/2011 du 27 juillet 2011 ; ATA/320/2008 du 17 juin 2008 et les références citées).

8) a. La loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05) a pour but notamment de conserver les monuments de l'histoire, de l'art ou de l'architecture et les antiquités immobilières ou mobilières situés ou trouvés dans le canton (art. 1 let. a LPMNS), de préserver l'aspect caractéristique du paysage et des localités, les immeubles et les sites dignes d'intérêt, ainsi que les beautés naturelles (art. 1 let. b LPMNS).

b. Sont protégés, conformément à la LPMNS : a) les monuments de l'histoire, de l'art ou de l'architecture et les antiquités immobilières situés ou découverts dans le canton, qui présentent un intérêt archéologique, historique, artistique, scientifique ou éducatif, ainsi que les terrains contenant ces objets et leurs abords ; b) les immeubles et les sites dignes d'intérêt, ainsi que les beautés naturelles (art. 4 LPMNS).

c. S'agissant des immeubles classés, les simples travaux ordinaires d'entretien et les transformations de peu d'importance peuvent être autorisés par l'autorité compétente, pour autant qu'ils aient fait l'objet d'un préavis favorable de la part de la CMNS et d'une demande d'autorisation ordinaire (art. 15 al. 3 LPMNS).

9) a. Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif ; l'autorité reste libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/51/2013 du 21 janvier 2013 ; ATA/719/2011 du 22 novembre 2011 et les références citées).

b. Chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des commissions consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/726/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/549/2011 du 30 août 2011 ; ATA/330/2009 du 30 juin 2009 ; ATA/129/2003 du 11 mars 2003 ; S. GRODECKI, La jurisprudence en matière d'aménagement du territoire et de droit public des constructions rendue par le Tribunal administratif genevois en 2009, in RDAF 2010 I p. 159 ss, p. 171-172 et p. 177 ; T. TANQUEREL, La pesée des intérêts vue par le juge administratif, in C.-A. MORAND, La pesée globale des intérêts, Droit de l'environnement et aménagement du territoire, 1996, p. 201). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/549/2011 du 30 août 2011 ; ATA/330/2009 du 30 juin 2009).

c. Lorsque la consultation de la CMNS est imposée par la loi, le préavis de cette commission a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours (ATA/417/2009 du 25 août 2009). En outre, la CMNS se compose pour une large part de spécialistes, dont notamment des membres d'associations d'importance cantonale, poursuivant par pur idéal des buts de protection du patrimoine (art. 46 al. 2 LPMNS). A ce titre, son préavis est important (ATA/417/2009 précité).

10) En l'espèce, la maison d'Adda est un bâtiment classé. Le préavis de la CMNS revêt donc un caractère obligatoire (art. 15 al. 3 LPMNS).

a. Cette dernière a émis un préavis favorable, notant que les aménagements proposés étaient d'ordre mineur et ne portaient pas atteinte à la qualité patrimoniale de la maison d'Adda, ainsi qu'à sa cour attenante, sous réserve que les travaux fassent l'objet d'un suivi de la part de la conservatrice des monuments. La commune de Meinier a également émis un préavis favorable.

b. A l'audience de comparution personnelle du 23 mai 2012, le département a indiqué que, lors l'instruction de la demande d'autorisation, il avait estimé que l'aménagement de la marche ne posait pas de problème de dangerosité.

La construction d'une marche progressive en bordure du chemin communal ne constitue pas un inconvénient grave. La marche projetée ne se situe pas en travers du chemin communal, mais est perpendiculaire à ce dernier, en bordure de la cour du lot 2.07, de sorte qu'elle ne constitue ni un obstacle ni un danger particulier pour les personnes empruntant le chemin communal. Il ressort du dossier qu'à la hauteur de la cour des intimés, la largeur du chemin communal varie entre 1,32 m et 1,25 m - ce qui est amplement suffisant pour y cheminer sans danger - et qu'elle se réduit à 1 mètre à la hauteur de la chaufferie des recourants, accessible par deux marches. L'attention dont doivent faire preuve les passants n'est pas plus élevée que celle requise de toute personne marchant à proximité d'un trottoir ou d'une marche en bordure de route ou de chemin pédestre.

c. Concernant la vigne grimpante dont les recourants craignent l'endommagement par les travaux projetés, le devis annexé à la demande d'autorisation de construire prévoit un « travail précautionneux pour la sauvegarde de deux vieilles vignes vierges contre la façade et protection et coupe propre des racines (sic) », de sorte que ce grief sera écarté.

d. Les recourants estiment également que l'aménagement litigieux ne correspond pas au caractère de la maison d'Adda. La LCI n'ayant pas pour but de protéger les intérêts des voisins, les arguments des recourants relatifs à l'esthétique du projet ne permettent pas de s'écarter des divers préavis favorables émis par les autorités consultées.

L'esthétique de l'aménagement projeté, qui a fait l'objet d'un examen minutieux par la CMNS, s'inscrit dans une même conception que le bâtiment actuel et ne saurait être remise en cause par la chambre de céans, qui dispose d'un pouvoir d'examen limité en la matière (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/760/2012 du 6 novembre 2012 ; ATA/719/2011 du 22 novembre 2011 et les références citées).

Bien que le département n'ait pas répondu au juge délégué quant à l'existence de terrasses aménagées en galets refendus dans le canton de Genève et que les intimés n'aient pas fourni d'échantillon de ce matériau, les planches photographiques jointes au dossier permettent de constater le résultat de ce type d'aménagement.

Aucun élément ne permettant à la chambre administrative de s'écarter des préavis favorables figurant au dossier, suivis tant par le département que par le TAPI, les griefs des recourants seront écartés. En accordant l'autorisation de construire, le département n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation.

11) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision litigieuse confirmée.

12) Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de CHF 1'000.- sera allouée à Mme et M. Slater, pris conjointement et solidairement, à charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

préalablement :

met hors de cause Madame Sabine Chillier Hauri ;

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er février 2012 par Madame Dorothée et Monsieur Pierre-Alain Recordon contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 décembre 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à charge de Madame Dorothée et
Monsieur Pierre-Alain Recordon, pris conjointement et solidairement ;

alloue une indemnité de CHF 1'000.- à Madame Gabrielle et Monsieur Brian Slater, pris conjointement et solidairement, à charge de Madame Dorothée et
Monsieur Pierre-Alain Recordon, pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guillaume Etier, avocat de Madame Dorothée et Monsieur Pierre-Alain Recordon, à Me Pierre-Olivier Allaz, avocat de Madame Gabrielle et Monsieur Brian Slater, à Me Pascal Pétroz, avocat de Madame Sabine Chillier Hauri, au département de l'urbanisme, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :