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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3439/2009

ATA/719/2011 du 22.11.2011 sur DCCR/1720/2010 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : ; CONSTRUCTION ET INSTALLATION ; COMBLE ; FENÊTRE ; IMMEUBLE ; CLASSEMENT(ZONE) ; ESTHÉTIQUE ; ARCHITECTURE ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : LCI.3.al3 ; LCI.90.al1 ; LCI.93.al
Parties : ASSETIMMO FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS / DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
Résumé : La construction d'un attique entièrement vitré en lieu et place des combles ne peut être autorisé dans un immeuble classé au Répertoire des ensembles du XIXème et XXème siècles, en application de la clause d'esthétique (préavis négatif de la CMNS).
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3439/2009-LCI ATA/719/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 novembre 2011

2ème section

 

dans la cause

 

ASSETIMMO FONDATION DE PLACEMENTS IMMOBILIERS
représentée par Me Christian D'Orlando, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 23 novembre 2010 (DCCR/1720/2010)


EN FAIT

1. Assetimmo Fondation de Placements Immobiliers (ci-après : Assetimmo) est une fondation de droit privé dont le siège est à Zürich. Elle est propriétaire de deux immeubles sis aux nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade, parcelles nos 139 et 1902, feuille 4, 1207 Genève-Eaux-Vives, comptant chacun cinq étages avec combles en toiture.

2. Ces immeubles construits de 1875 à 1877 figurent au « Répertoire des ensembles du XIXème siècle et du début du XXème siècle » (ci-après : le Répertoire des ensembles) publié par le Service des monuments et des sites en août 1991, pp. 55 et 56.

3. Le 25 avril 2008, le bureau d’architectes Jacques Schär et Christine Sjöstedt (ci-après : le bureau d'architectes) a déposé auprès du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI) pour le compte d’Assetimmo une demande d’autorisation de supprimer les combles pour créer un attique comportant trois appartements avec terrasses, soit :

un appartement d'angle de 5,5 pièces (85,45 m2) avec une terrasse de 57,56 m2 au 6, avenue de la Grenade ;

un appartement traversant de 6 pièces (99,30 m2) avec deux terrasses de 45,51 m2 au 6, avenue de la Grenade ;

un appartement traversant de 6,5 pièces (111,70 m2) avec terrasse de 62,80 m2 au 8, avenue de la Grenade (DD 102098-2).

4. Il ressort du descriptif des travaux et des plans annexés à la demande d'autorisation de construire que les façades des attiques seraient en grande partie vitrées et que les verrières existantes feraient l'objet d'une réfection complète.

5. Dans le cadre de l’instruction de la requête, le DCTI a soumis le projet pour préavis.

a. Le 30 mai 2008, le service cantonal de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants (ci-après : SPBR) a préavisé favorablement le projet, sous réserve du respect de certaines valeurs acoustiques.

b. Le 10 juin 2008, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS), sous-commission d’architecture, a rendu un préavis défavorable.

Elle n’entrait pas en matière sur le principe de surélévation car ces bâtiments figuraient dans le Répertoire des ensembles. Leurs éléments particulièrement dignes de protection, tels que la toiture et la charpente, devaient être maintenus en vertu de l’art. 90 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI – L 5 05).

c. Les préavis techniques, émis respectivement les 20 juin 2008, 26 juin 2008 et 18 juillet 2008 par le service de la planification de l'eau, la police du feu et le service cantonal de l'énergie (ci-après : SCANE) étaient favorables.

d. Le 14 juillet 2008, le conseil administratif de la Ville de Genève (ci-après : la ville) a rendu un préavis favorable, sous réserve de l’avis de la CMNS.

e. Le 8 juillet 2009, le service juridique LDTR (loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 25 janvier 1996 - LDTR - L 5 20), a préavisé favorablement le projet aux conditions suivantes :

- les dispositions de la LDTR devaient être respectées ;

- les loyers des trois appartements totalisant 18 pièces ne devaient pas excéder, après travaux, CHF 151'091.- au total l'an, soit CHF 8'394.- la pièce l'an, ces loyers étant applicables pour une durée de cinq ans à dater de la première mise en location des logements ;

- tous travaux supplémentaires devaient, cas échéant, faire l'objet d'une demande complémentaire.

6. Par décision du 18 août 2009, le DCTI a refusé l'autorisation sollicitée, faisant sien le préavis précité de la CMNS.

7. Le 18 septembre 2009, Assetimmo a recouru contre cette décision auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), devenue le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation et à la délivrance de l'autorisation de construire sollicitée.

La CMNS considérait à tort l'autorisation sollicitée comme impliquant la surélévation des immeubles. Il s'agissait de transformer les combles par l'aménagement d'un attique permettant de créer trois appartements sur la dernière dalle existante. Cet aménagement s'inscrivait par ailleurs dans le gabarit des immeubles prévu par la LCI et l'art. 21 de son règlement d'application du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01). De plus, la CMNS se référait au Répertoire des ensembles tout en écartant certains éléments, notamment le fait que ces immeubles avaient déjà fait l'objet d'une surélévation de trois étages et d'une transformation lourde en 1923, si bien que la toiture ne pouvait être d'origine, leurs caractéristiques ayant déjà été modifiées (adjonction de bow-windows en façade et transformation des entrées). Ces éléments auraient dû conduire la CMNS à constater qu'aucun élément digne de protection n'était touché par les travaux envisagés, que les façades côté cour et les cages d'escaliers, derniers éléments témoignant du passé architectural des immeubles et donc dignes d'intérêt, seraient conservées, et qu'enfin, en toute hypothèse, la toiture actuelle n’était pas visible de la rue, de sorte que l'attique à toit plat projeté ne porterait ainsi aucune atteinte à l'aspect des façades ou des immeubles.

L'immeuble voisin, situé au 42, quai Gustave-Ador et anciennement 2, avenue de la Grenade, avait pu bénéficier le 23 septembre 1999 d'une autorisation de transformer les combles par la suppression de la toiture à quatre pans et l'aménagement d'un attique à toit plat alors même qu'il se situait dans le périmètre de protection de la rade, ce qui n'était pas le cas des nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade en cause.

En outre, ces derniers ne présentaient aucun intérêt digne de protection dès lors qu'ils n'étaient pas inscrits à l’Inventaire suisse de l’Architecture (ci-après : INSA).

Le préavis défavorable de la CMNS consacrait une appréciation arbitraire des faits. Or, la décision du DCTI reposait exclusivement sur celui-ci, dont l’autorité aurait dû s'écarter en faisant usage du pouvoir d'appréciation que lui réservait l'art. 90 LCI.

8. Le DCTI a déposé ses observations le 19 novembre 2009, en concluant au rejet du recours.

Le fait que les immeubles situés aux nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade figuraient dans le Répertoire des ensembles démontrait qu’ils présentaient un intérêt digne de protection, en dépit du fait que les transformations subies en 1923 aient affecté leur état de conservation. Ces transformations faisaient depuis partie intégrante de l'histoire des bâtiments qui formaient un ensemble harmonieux et homogène avec ceux environnants dont ils partageaient l'histoire. Les travaux projetés contrevenaient à l'art. 90 LCI dès lors qu'ils impliquaient la suppression de la charpente qui constituait un élément porteur des bâtiments. L’immeuble situé au 42, quai Gustave-Ador figurait dans le plan de site de la rade car il comportait des éléments intéressants. Il n'était pas inscrit comme devant être maintenu dans son intégralité, raison pour laquelle la toiture n'était pas un élément intéressant et avait pu être remplacée par un attique. La situation de cet immeuble n'était donc pas comparable à celle des immeubles nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade, raison pour laquelle Assetimmo ne pouvait se prévaloir d’une inégalité de traitement. Enfin, l’INSA était un inventaire non exhaustif, n’ayant aucune valeur au sens de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05). L'absence d'inscription des immeubles précités dans cet inventaire n'était ainsi pas relevante. Plusieurs autres bâtiments protégés n’y étaient d'ailleurs pas répertoriés.

9. Le 29 janvier 2010, la commission a procédé à l'audition des parties.

a. M. Schär, architecte, représentant Assetimmo, a rappelé qu’en 1923, les immeubles en cause avaient été surélevés de trois étages. La verrière en forme d’ellipse, qui existait avant ces transformations, avait été intégrée dans la toiture en suivant la même pente. Cette verrière serait conservée dans le projet. Les immeubles voisins, situés du côté opposé de la rue aux nos 3, 5 et 7 de l'avenue de la Grenade, n'avaient été surélevés que d'un étage. Ceux-ci n'avaient pas subi d'autres transformations, tandis que du côté pair, des bow-windows et des ouvertures nouvelles avaient été ajoutées et les allées intérieures avaient été transformées.

L'immeuble situé à l'adresse 42, quai Gustave-Ador avait été complètement remanié en 1950. Seul son socle avait été conservé. Il avait ensuite fait l'objet d’une autorisation de surélévation en 1999.

Le Répertoire des ensembles regroupait essentiellement des immeubles des quartiers fazystes et ceux relevant du Heimatstyl. Dès lors que les immeubles sis aux nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade et ceux des numéros impairs dataient de 1875 environ, leur place dans ce répertoire ne se justifiait probablement que parce qu'ils étaient, à l'origine, d'un style antérieur. De manière générale, la mention de certains immeubles dans ce répertoire pouvait prêter à discussion.

b. Le représentant du DCTI a indiqué que la CMNS avait pris en considération les transformations effectuées en 1923, lesquelles avaient été intégrées à la valeur actuelle des immeubles et qui faisaient partie de l'histoire de ceux-ci. Selon la CMNS, le toit faisait partie des structures porteuses, en particulier la charpente. Elle se prononçait toujours au sujet de ces éléments-ci lorsqu'il s'agissait d'ensembles protégés des XVIIIème et XIXème siècles.

10. Par courrier du 10 février 2010, la commission a invité le DCTI à requérir de la CMNS un complément à son préavis du 10 juin 2008. Au regard de l'art. 90 al. 1 LCI, les structures porteuses devaient - en règle générale - être sauvegardées. Dès lors que cette règle n'était pas absolue et qu'une appréciation au cas par cas demeurait nécessaire, il convenait que la CMNS se détermine de manière plus détaillée, d'une part, sur l'intérêt que représentaient selon elle les immeubles, isolément ou dans le cadre de l'ensemble dont ils faisaient partie et ce, malgré les transformations qu'ils avaient subies en 1923 et, d'autre part, sur l'intérêt de conserver l'actuelle toiture et l'impact qu'aurait la surélévation vitrée telle que projetée.

11. La CMNS a complété le 13 avril 2010 son préavis initial et elle a produit un rapport émanant de Monsieur Armand Brülhart, historien, du même jour, accompagné des minutes de Peyrot & Bourrit, le bureau d’architectes ayant procédé aux transformations en 1923.

Il résulte de ces documents que ces transformations avaient préservé l’intérêt patrimonial des immeubles en cause. Elles faisaient partie intégrante de leur histoire et avaient été prises en considération lors de l’inscription des immeubles dans le Répertoire des ensembles. S'agissant de l'intérêt que représentaient ces derniers, la CMNS renvoyait au rapport élaboré par M. Brülhart.

Selon ce dernier, la surélévation de 1923 avait très vraisemblablement été effectuée en déposant soigneusement et en réutilisant les éléments de la charpente d’origine, comme en témoignait le cahier des charges des travaux de charpente, élaboré par Messieurs Adrien Peyrot et Albert Bourrit. Le volume géométrique de la toiture avait été maintenu et la forme générale du toit était identique à celle des bâtiments situés en face, aux nos 3, 5 et 7 de l'avenue de la Grenade, appartenant à la même opération remontant aux environs de 1870. Dès lors, la toiture ainsi que sa charpente constituaient bien des éléments structurels particulièrement dignes de protection, à maintenir selon l’art. 90 LCI. La toiture à pans, et sa couverture en tuiles, était traditionnelle et constituait un élément caractéristique de cette architecture, offrant un volume parfaitement adapté au contexte environnant. Lors de l’intervention sur la toiture, le garde-corps de l'escalier conservé et prolongé au 8, avenue de la Grenade, avait été complété en récupérant les balustres et la main-courante démontées aux nos 4 et 6 dont la cage d’escaliers avait été remplacée en 1923 par une cage commune située au n° 6.

Enfin, le projet contesté ne permettait pas un apport de logements supérieur à celui qu’aurait offert un aménagement dans le volume actuel des combles, avec la création de lucarnes, sur lequel la CMNS aurait pu entrer en matière.

Les immeubles nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade avaient comme particularité de figurer dans un quadrilatère très intéressant dans l’histoire de l’ancienne commune des Eaux-Vives, compris entre la rue des Eaux-Vives, le quai Gustave-Ador, l’avenue de la Grenade et la rue Merle-d’Aubigné, à l’exception des immeubles du quai déjà protégés par le plan de site de la rade. La rue de la Grenade était une création de la Société Immobilière Genevoise (ci-après : SIG) en 1868. Elle était remarquable par sa typologie, souvent rattachée à une influence anglaise, même si elle n’avait été réalisée que d'un seul côté de la rue. Le premier exemple de ce système de rue, avec trottoir, grilles et jardins précédant les façades d’immeubles, remontait à 1854. L’architecte Francis Gindroz (1822-1878), à l’origine de l’opération de la SIG, avait marqué de son empreinte la ville et la campagne genevoise dans le troisième quart du XIXème siècle. Cet architecte avait notamment réalisé l’actuel square du Mont-Blanc, le percement de la rue du Commerce, le château de Pregny, la villa Barton, la villa Fleur d’Eau à Versoix et le chalet Barbey à Bellevue.

L’intervention effectuée en 1923 sur les nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade était l’œuvre de MM. Peyrot et Bourrit. Tous deux avaient été marqués par le « neu Klazissismus », soit le renouveau des canons classiques dans l’architecture de l’avant-guerre de 1914-1918. Dès 1917, ils avaient prouvé leur maîtrise en devenant associés dans la reconstruction délicate de l’Orangerie à la Perle du Lac. En 1920, ils avaient été choisis pour la rénovation et l’agrandissement du Conservatoire de musique de la place Neuve, dont les adjonctions latérales étaient particulièrement habiles et qui étaient aujourd’hui encore considérées comme exemplaires. Ils avaient également construit en 1927 un ensemble d’immeubles dominant la Jonction et les falaises de Saint-Jean, rue d’Ermenonville. Ces quelques exemples situaient leur capacité à intervenir aussi bien sur de nouvelles réalisations que sur des opérations d’agrandissement et de surélévation, comme cela avait été le cas à l’avenue de la Grenade.

L’ingéniosité de leur intervention sur les nos 6 et 8 avait été prise en compte pour l’inscription de ces immeubles dans le Répertoire des ensembles. Ces architectes avaient pensé à toute une série de questions auxquelles ils avaient apporté des réponses variées et intelligentes. En rénovant les deux côtés de la rue entre 1922 et 1924, ils avaient préservé en très large partie le côté nord, tandis que sur le côté sud, ils avaient surélevé les immeubles en leur donnant un caractère néo-classique. Afin de conserver de part et d’autre de la rue la symétrie d’origine, en miroir, ils avaient dessiné deux entrées jumelées en plein cintre, l’une qui permettait d’accéder au palier ovale de l’entresol, l’autre pour y nicher l’ascenseur dont la porte s’ouvrait précisément sur le pallier ovale intérieur. Toute la montée d’escaliers de cet immeuble reprenait la forme ovale à chaque étage. Au n° 8, les architectes avaient réutilisé les balustrades d’escaliers de l’immeuble d’à côté pour compléter celles des niveaux supérieurs et lui donner ainsi une unité. Cette manière de faire se poursuivait jusqu’au niveau de la toiture qui reprenait elle aussi les formes simples de l’intervention néo-classique.

12. Le 30 avril 2010, le DCTI a communiqué ces documents à la commission.

13. Le 28 mai 2010, Assetimmo s'est déterminée à leur sujet et a persisté dans ses conclusions.

Les transformations envisagées dans les combles n'altéreraient pas les caractéristiques de la rue et conserveraient tels quels les éléments de typologie que M. Brülhart avait relevés comme étant dignes d'intérêts dans son rapport. Ce dernier ne donnait aucune indication sur l'éventuel intérêt historique de la toiture ou de la charpente desdits immeubles. Le Répertoire des ensembles était d'ailleurs également muet sur ce point.

Les travaux projetés n'auraient ainsi aucune incidence sur les éléments dignes de protection et n'altéreraient pas les éléments caractéristiques des immeubles formant un ensemble au sens du Répertoire des ensembles. Toujours d'après ce répertoire, d'autres immeubles, comme celui sis 5, rue Merle-d’Aubigné avaient pu être surmontés d’un attique dans les combles. Les deux immeubles situés aux deux extrémités de l’avenue de la Grenade, soit ceux situés au n° 42, quai Gustave-Ador et au n° 69 rue des Eaux-Vives, avaient également pour le premier bénéficié d’un attique et pour le second de l’aménagement des combles, en dépit de leur inscription dans le périmètre de protection de la rade ou dans le Répertoire des ensembles.

En l'espèce, la toiture n’était pas porteuse mais faisait office de couverture. Cette structure n’avait aucune particularité et ne figurait pas dans le Répertoire des ensembles comme étant un élément caractéristique des immeubles. La question de sa conservation ne devait ainsi pas être appréciée au regard de l’art. 90 al. 1 LCI. La toiture n’était pas visible depuis la rue de sorte que son impact visuel était très limité et que l'attique envisagé n'aurait aucun impact sur la typologie de la rue.

La charpente n'était pas particulièrement digne de protection au sens de l'art. 90 LCI. Il ressortait du descriptif des travaux de 1923 que les architectes souhaitaient réutiliser les pièces de la charpente dans la mesure du possible par mesure d'économie, ce qui démontrait que celle-ci ne constituait pas un élément à protéger à leurs yeux.

14. Le 20 août 2010, le DCTI a également persisté dans ses conclusions.

M. Brülhart avait établi que les immeubles sis aux nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade présentaient un intérêt patrimonial dû à leur date de construction et aux transformations intervenues en 1923, ce qui justifiait qu'ils soient mentionnés dans le Répertoire des ensembles. La charpente constituait bien une structure porteuse au sens de l'art. 90 LCI dont la sauvegarde découlait expressément de la loi. De plus, les interventions proposées entièrement vitrées auraient un impact négatif sur l'harmonie et l'homogénéité des immeubles. Le mélange des styles proposés dévaloriserait sensiblement les éléments dignes de protection sus décrits. La construction moderne ne s'inscrirait pas dans l'environnement architectural du quadrilatère formé par l'avenue de la Grenade, la rue Merle-d'Aubigné, le quai Gustave-Ador et la rue des Eaux-Vives. Une mise en évidence de la verrière ellipsoïdale existante ferait apparaître un appendice disgracieux s'apparentant à une cheminée industrielle. Aucune comparaison ne pouvait être faite entre ce projet et les interventions effectuées respectivement sur les immeubles sis 42, quai Gustave-Ador, 69, rue des Eaux-Vives et 5, rue Merle-d'Aubigné : dans le premier cas, il ne s'agissait pas d'un ensemble protégé, dans le second, les interventions étaient beaucoup plus légères, et dans le troisième, l'intervention était plus en harmonie avec l'immeuble.

15. Le 23 novembre 2010, la commission a rejeté le recours.

Les immeubles concernés constituaient un ensemble des XIXème et XXème siècles portant le témoignage d'une époque et de ses conceptions architecturales que les art. 89 et suivants LCI visaient précisément à préserver. La modification radicale de la toiture altérait de façon substantielle l’aspect général des bâtiments. Peu importait à cet égard que la toiture n’était pas visible depuis la rue, dès lors que l'architecture s’appréciait depuis longtemps sous de nombreux autres angles, y compris depuis le ciel. Les immeubles voisins auxquels se référait Assetimmo n’étaient pas comparables.

16. Le 28 décembre 2010, cette dernière a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif, devenu le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), concluant préalablement à ce qu’un transport sur place soit ordonné. La décision attaquée devait être annulée et le dossier renvoyé au DCTI pour la délivrance de l’autorisation sollicitée.

La commission et le DCTI avait fait une mauvaise application de l’art. 90 al. 1 LCI. Ils avaient fondé leurs décisions sur le préavis négatif de la CMNS qui, par principe, avait refusé toute atteinte sur le toit des bâtiments situés aux nos 6 et 8 de l’avenue de la Grenade dès lors que ceux-ci étaient inscrits dans le Répertoire des ensembles. La CMNS avait violé l’art. 93 al. 2 LCI. Cette disposition lui prescrivait de formuler son préavis après s’être renseignée sur les servitudes et les dispositions ayant régi l’aménagement initial du quartier, de la rue, et des constructions des XIXème et début du XXème siècles. Or, le préavis du 10 juillet (recte : juin) 2008 ne comportait aucune motivation. La commission aurait dû examiner librement l’ensemble du dossier et constater le caractère disproportionné des conclusions du DCTI quant à l’impact de la transformation projetée sur l’ensemble protégé.

Aucun intérêt prépondérant ne justifiait de maintenir la toiture à quatre pans.

La commission avait procédé à une appréciation esthétique et subjective de la construction future pour en conclure que les travaux envisagés porteraient atteinte à l’image originelle des immeubles.

Elle avait violé le principe de proportionnalité. Elle aurait dû procéder à une pesée des intérêts qui l’aurait conduite à admettre que la lutte contre la pénurie de logements dans le canton revêtait une importance primordiale à l’heure où nombre de projets immobiliers étaient bloqués par les recours d’associations ou de voisins. Sous cet angle, l'intérêt à conserver une image originelle éventuelle des deux bâtiments vus du ciel était moins important que celui de la population à trouver un logement. 

17. Le 22 février 2011, le DCTI a conclu au rejet du recours en reprenant son argumentation.

18. Le 6 mai 2011, le juge délégué a procédé à un transport sur place en présence des parties, lequel a commencé par les combles du n° 8 de l’avenue de la Grenade. M. Brülhart, qui représentait la CMNS, a relevé qu’il préférerait un aménagement des combles permettant le maintien de la charpente, quitte à agrandir les lucarnes existantes. La recourante a exposé que si la charpente existante était conservée, il en résulterait une perte de 30 à 35 % du volume aménageable par rapport au projet proposé.

Les parties ont poursuivi le transport sur place en se rendant au n° 6 de l'avenue de la Grenade. Côté ville, la vue donnait sur la cathédrale et le jet d’eau. Une cour intérieure séparait les immeubles des nos 6 et 8 de l’avenue de la Grenade de ceux en face, bordant la rue Du-Roveray. Les galandages séparant les greniers devraient être abattus mais la charpente, cachée, maintenue selon M. Brülhart. Le sol du cinquième étage était recouvert d’une mosaïque typiquement genevoise, selon M. Brülhart. Cet immeuble n’était pas surmonté d’une verrière contrairement au n° 8.

Les parties se sont ensuite rendues dans la cour intérieure. M. Brülhart a indiqué que dans le socle de l’immeuble n° 6 se trouvaient trois petites fenêtres correspondant aux entresols, ce qui dénotait que l’immeuble avait été construit de manière particulièrement solide. Il en allait de même dans la cour intérieure, où les fenêtres étaient plus conséquentes. Le socle était en pierre de Meillerie, entourée de pierre blanche du Jura, et les balcons avaient conservé leur ferronnerie d’origine. La cour intérieure était séparée de l’immeuble voisin par un mur et elle faisait office de parking pour 25 voitures environ, qui étaient abritées par un couvert en tôle ondulée.

Les immeubles situés en face, aux nos 7 et 9 de l’avenue de la Grenade, comportaient selon M. Brülhart, trois étages sur rez, dont le dernier étage n’avait pas été ajouté. Le toit a été refait. M. Brülhart a expliqué que l’immeuble sis 42, quai Gustave-Ador avait été construit par M. Bordigoni et datait de 1952. L’attique dont il avait été rehaussé n’était pas visible de la rue.

Le juge a constaté que la toiture et les combles des deux immeubles situés aux nos 6 et 8 de l’avenue de la Grenade n'étaient pas visibles depuis la rue ni depuis la cour.

19. Le 10 mai 2011, la chambre administrative a remis aux parties le procès-verbal de transport sur place, qu'elles ont renvoyé signé le 19 mai 2011.

20. Le 14 juin 2011, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction alors compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 -aLOJ ; 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10, dans sa teneur au 31 décembre 2010).

3. Les immeubles situés aux nos 6 et 8 de l’avenue de la Grenade font partie d'un ensemble protégé des XIXème et début du XXème siècles. Les art. 89 ss LCI sont donc applicables en l'espèce.

4. Le recours à la chambre administrative peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents. Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 1 et 2 LPA).

5. La recourante reproche à la commission et au DCTI une mauvaise application des art. 89 ss LCI, le refus d'autorisation reposant uniquement sur le préavis négatif de la CMNS qui, par principe, s'oppose aux surélévations des immeubles protégés figurant au Répertoire des ensembles.

La protection de l'unité architecturale et urbanistique prévue aux art. 89 et ss LCI n'est pas absolue. Selon l'art. 90 al. 1 LCI, en cas de rénovation ou de transformation, les structures porteuses, de même que les autres éléments particulièrement dignes de protection doivent, en règle générale être sauvegardés.

Le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) a dressé une liste indicative des éléments caractéristiques dignes de protection au sens de l'art. 90 al. 1 LCI (disponible sur http://www.ge.ch/patrimoine/sms/inc/pub/img-pub/conseils/listeindicativeXIXe-XXe.pdf [consulté le 11 novembre 2011]. S'agissant des façades et toitures, les éléments suivants sont mentionnés :

 

« - la qualité du matériau de couverture (tuiles, ardoises naturelles, les ferblanteries des toits en ardoises seront exécutées en cuivre étamé ou en zonc-titane) ;

- les ornements en ferblanterie tels que poinçons, épis, etc. ;

- la verrière en toiture ;

- la composition et la texture de l'enduit ainsi que les façades d'exécutions particulières (par exemple marque d'une modénature en fer, faux-joints et décors peints) ;

- les pierres de taille ;

- les ferronneries ;

- les lambrequins découpés et le modèle de store (store à lamelles larges, de type empilable). Lors de la pose de nouveaux stores, la lame finale devra être prévue de la même teinte que le tablier ;

- les huisseries des arcades et leur soubassement, et les marquises en fer forgé ».

b. Les demandes d’autorisation, ainsi que les travaux de réfection de façades et de toitures concernant des immeubles visés à l’art. 89 sont obligatoirement soumis, pour préavis, à la CMNS (art. 93 al. 1 LCI). Celle-ci formule son préavis après s’être renseignée sur les servitudes et les dispositions qui ont régi l’aménagement initial du quartier, de la rue et des constructions au XIXème siècle et au début du XXème siècle (art. 93 al. 2 LCI). En outre, selon l'art. 3 al. 3 LCI, les demandes d'autorisation sont soumises au préavis des communes, des départements et des organismes intéressés.

Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu’un caractère consultatif ; l’autorité reste libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur (ATA/739/2011 du 25 janvier 2011 ; ATA/1352/2005 du 2 mai 2006 ; RDAF 1983, p. 344).

La LCI ne prévoit aucune hiérarchie entre les différents préavis requis. La chambre de céans a toujours jugé qu’en cas de préavis divergents, une prééminence était reconnue à celui de la CMNS lorsque son préavis est requis par la loi comme en l’espèce (art. 93 LCI), puisqu’elle était composée de spécialistes en matière d’architecture, d’urbanisme et de conservation du patrimoine (ATA/39/2011 du 15 janvier 2011 ; ATA/539/2009 du 27 octobre 2009 ; ATA/263/2007 du 22 mai 2007 ; ATA/676/2006 du 19 décembre 2006 ; ATA/648/2006 du 5 décembre 2006 et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l’autorité administrative suit les préavis des commissions consultatives, l’autorité de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci (ATA/539/2009 du 27 octobre 2009 ; ATA/529/2007 du 16 octobre 2007 et les références citées ; ATA/100/2005 du 1er mars 2005 et les références citées ; T. TANQUEREL, La pesée des intérêts vue par le juge administratif in C. A. MORAND, La pesée globale des intérêts, Droit de l’environnement et aménagement du territoire, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1996, p. 201). De même, s'agissant des décisions rendues par la commission, il exerce son pouvoir d'examen avec retenue car celle-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/539/2009 du 27 octobre 2009 ; ATA/190/2009 du 21 avril 2009).

6. En l'espèce, les différents préavis émis dans le cade de l'instruction de la requête en autorisation de construire menée par le DCTI divergent. Tous les préavis techniques ainsi que celui du service juridique LDTR sont favorables. Le préavis de la CMNS du 10 juin 2008 complété le 13 avril 2010 est quant à lui défavorable. C'est également le cas du préavis émis le 14 juillet 2008 par le conseil administratif de la ville, dès lors que celui-là n'était favorable que sous réserve de l'avis de la CMNS. Le préavis négatif de la CMNS a été suivi tant par le DCTI que par la commission. Il en résulte que la chambre de céans s’imposera une certaine retenue, pour les raisons sus-indiquées, les constatations effectuées lors du transport sur place n’ayant pas apporté d’éléments nouveaux.

La demande d'autorisation de construire sollicitée par la recourante n'a pas pour objet une surélévation d'immeuble, mais bien la suppression des combles existants pour permettre la création d'un attique entièrement vitré comportant trois appartements compris dans le gabarit autorisé par la LCI et le RCI.

Contrairement aux affirmations du DCTI lors de l’audience de comparution personnelle devant la commission le 29 janvier 2010 et dans ses écritures responsive du 20 août 2010, à aucun moment la CMNS ou M. Brülhart n’a affirmé que la charpente était une structure porteuse de ces immeubles.

7. Quant aux bâtiments cités à titre de comparaison, soit l'immeuble sis 42, quai Gustave-Quai, ce dernier a fait l'objet en 1999 d'une autorisation de transformer les combles par la suppression de la toiture à quatre pans et l'aménagement d'un attique à toit plat, alors que cet immeuble se situe dans le périmètre de protection de la rade. L'immeuble sis 5, rue Merle-d'Aubigné et celui sis 45, quai Gustave-Quai ont également fait l'objet d'une autorisation de créer un attique dans les combles. Enfin, l'immeuble situé au 69, rue des Eaux-Vives a bénéficié d'une autorisation d'aménager les combles.

Ces transformations ne peuvent pas être comparées à celle projetée. En effet, dans les deux premiers cas, il ne s'agissait pas d'ensembles protégés. Dans le troisième, les interventions étaient plus légères et enfin, dans le quatrième, l'intervention était plus en harmonie avec le quartier.

La CMNS a motivé sa position dans son préavis complémentaire du 13 avril 2010 accompagné du rapport détaillé de M. Brülhart soulignant les particularités architecturales et l'intérêt historique des immeubles nos 6 et 8 de l'avenue de la Grenade. Elle a également établi l'intérêt de l'intervention effectuée en 1923 et expliqué de manière circonstanciée les raisons pour lesquelles celle-ci a été prise en compte au moment de la décision d'insérer ces immeubles dans le Répertoire des ensembles.

Dès lors, la CMNS, le DCTI, ainsi que la commission ont étudié le projet de manière détaillée. Le DCTI et la commission pouvaient - sans faire preuve d’arbitraire - faire fond sur le préavis négatif de la CMNS, déterminant dans le cas d’espèce, quand bien même les immeubles en cause ne font pas partie du périmètre de protection de la rade.

8. a. La recourante allègue que la commission a procédé à une appréciation esthétique et subjective de la construction projetée d’une part, et que sa décision viderait le principe de proportionnalité, d’autre part, car elle ne tiendrait pas compte de l’intérêt prépondérant à la construction de nouveaux logements.

b. La protection des monuments et des sites naturels ou bâtis, en particulier contre des modifications ou des adjonctions inesthétique, répond en principe à un intérêt public (ATF 116 Ia 49 ; 115 370, consid. 3a p.373 ; ATA/573/2007 du 13 novembre 2007).

La question de l’enlaidissement éventuel d’un site par une construction projetée ne doit pas être résolue en fonction du sentiment subjectif de l’autorité : chaque cas doit être examiné sur la base de critères objectifs et scientifiques, tenant compte de la valeur esthétique des constructions et du paysage concernés (ATF 100 Ia 82, consid. 5 p. 87).

Lorsque le droit cantonal prévoit une clause d’esthétique, toute construction et installation y est soumise, même si elle correspond, par ses dimensions, aux prescriptions de la zone où elle se trouve (P. ZEN-RUFFINEN/C. GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, constructions, expropriations, Berne 2011, p. 388 n. 890).

Les exigences relatives à l’esthétique des constructions sont rédigées sous la forme d’une clause d’esthétique négative lorsqu’elle prohibe l’enlaidissement d’une localité ou d’un quartier et tel est le cas de l’art. 15 al. 1 LCI (P. ZEN-RUFFINEN/C. GUY-ECABERT, op. cit., p. 388 n. 891). En effet, aux termes de cette disposition, applicable par le renvoi de l'art. 91 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur, nuirait au caractère ou à l’intérêt du quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d’architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

Cette clause d'esthétique constitue une notion juridique indéterminée, laissant un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (ATA/59/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel, 1984, p. 332-333 ; B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1991, p. 34-36, n. 160-169).

La chambre administrative apprécie librement le caractère esthétique d’une construction lorsque, d’une part, elle a elle-même procédé à un transport sur place et que, d’autre part, elle est confrontée à des préavis divergents, ou lorsque les préavis sont empreints d’éléments subjectifs sortant du cadre de la seule appréciation de l’impact d’une construction sur le site, auquel cas ceux-ci doivent être écartés (ATA /475/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/125/2008 du 18 mars 2008).

9. En l’espèce, le transport sur place effectué par le juge délégué et les pièces produites ont permis de constater que les combles existants n’étaient pas visibles depuis la rue. En revanche, depuis les étages élevés des immeubles voisins, ceux-ci se voient. Par conséquent, la commission n'a pas excédé son pouvoir d'appréciation en estimant que la construction projetée se verrait sous d'autres angles que la rue, sans même songer à une vue aérienne.

De plus, il ressort des plans figurant au dossier que l'attique projeté serait en grande partie vitré, ce en totale rupture avec le style actuel du bâtiment. La construction projetée modifierait ainsi de façon substantielle l’aspect général des bâtiments et altérerait l'image de leur conception originelle.

La violation du principe de proportionnalité alléguée sera écartée également : le besoin certain en logements est manifeste mais il ne doit pas justifier n’importe quelles transformations, ce d’autant qu’en l’espèce, celles-ci ne conduiraient qu’à la création de trois appartements.

De plus, M. Brülhart a répété lors du transport sur place qu’une transformation des combles pour y créer de nouveaux logements assurant le maintien de la charpente pourrait être envisagée, ce qui permet de considérer que le principe de proportionnalité n’est pas violé, même si le volume de nouveaux logements était dans cette hypothèse réduit de 30 à 35 %, comme la recourante l’a allégué sans être contredite sur ce point par le DCTI.

10. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

Vu la nature du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 décembre 2010 par Assetimmo Fondation de Placements Immobiliers contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 23 novembre 2010 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge d'Assetimmo Fondation de Placements Immobiliers ;

dit qu’aucune indemnité de procédure ne lui est allouée ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian D'Orlando, avocat de la recourante, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au département des constructions et des technologies de l'information.

Siégeants : Mme Hurni, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Derpich

 

la présidente siégeant :

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :