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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/420/2015

ATA/1183/2015 du 03.11.2015 sur JTAPI/515/2015 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/420/2015-PE ATA/1183/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 novembre 2015

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 avril 2015 (JTAPI/515/2015)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1969, ressortissant turc, a épousé le 18 octobre 2010, à Genève, Madame B______, ressortissante suisse.

2) Par courrier du 6 décembre 2010, Mme B______ a informé l’office cantonal de la population, devenu depuis lors l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) de son mariage. Les époux partageaient, depuis leur union, le domicile de Mme B______ sis ______.

3) Le 6 avril 2011, M. A______ a déposé une demande de regroupement familial.

Un permis B lui a été délivré le 20 octobre 2011 au titre de regroupement familial avec activité lucrative. L’autorisation a été renouvelée jusqu’au 17 octobre 2013.

4) Le 9 janvier 2013, Mme B______ a déposé une requête en mesures protectrices de l’union conjugale devant le Tribunal de première instance. Les relations du couple étaient tendues. Son époux avait quitté le domicile conjugal. Il travaillait en qualité de plongeur à C______ pour un revenu net de CHF 2'935.20 par mois.

5) Le 1er février 2013, M. A______ a été promu en qualité d’aide-cuisinier au sein de C______.

6) Par courrier du 16 mai 2013, Mme B______ A______ a informé l’OCPM de sa séparation.

7) Par correspondance du 7 août 2013, le frère de M. A______ a confirmé à l’OCPM qu’il hébergeait son proche.

8) Le 30 novembre 2013, Mme B______ a précisé, à la demande de l’OCPM, qu’elle souhaitait divorcer. Elle devait toutefois attendre le début de l’année 2015 pour pouvoir entamer les démarches.

9) À compter du 1er décembre 2013, M. A______ a bénéficié d’un appartement de deux pièces à Chêne-Bourg.

10) Le 28 avril 2014, l’OCPM a informé l’intéressé qu’il envisageait de ne pas renouveler l’autorisation de séjour.

11) Usant de son droit d’être entendu, M. A______ a précisé, par correspondance du 23 mai 2014 à l’attention de l’OCPM, qu’il était parfaitement intégré à la vie sociale et professionnelle à Genève. Employé auprès de C______ depuis le 30 novembre 2011, il y travaillait à l’entière satisfaction de son employeur. Ses revenus financiers lui permettaient de subvenir à ses besoins et d’être parfaitement autonome. Il se plaisait beaucoup dans « cette agréable ville calviniste » et s’était construit une nouvelle vie sociale dans laquelle il avait trouvé un parfait équilibre.

12) Par décision du 6 janvier 2015, l’OCPM a refusé d’autoriser la poursuite du séjour de M. A______. Son union en Suisse avait duré moins de trois ans et il n’avait pas fait valoir de raisons personnelles majeures justifiant la poursuite de son séjour en Suisse. Il ne pouvait se prévaloir d’attaches étroites avec la Suisse au point de justifier, à elles seules, la poursuite de son séjour dans le pays. Il avait passé de nombreuses années dans son pays d’origine où il avait notamment grandi et passé son adolescence. Il en parlait la langue. La réintégration en Turquie ne devait pas poser de problèmes majeurs pouvant justifier la poursuite de son séjour en Suisse. Un délai au 4 avril 2015 lui était imparti pour quitter la Suisse.

13) Le 15 janvier 2015, un cousin de M. A______ a sollicité de l’OCPM le renouvellement du permis B de l’intéressé. Il se portait entièrement garant de son proche, lequel ne comprenait pas la décision. M. A______ était employé depuis plus de trois ans chez le même employeur. Il ne bénéficiait d’aucune prestation sociale, payait ses impôts et ne posait aucune difficulté. Il était honnête, sympathique et travailleur, et ne méritait pas d’être renvoyé d’une telle façon hors de Suisse.

14) Par courrier du 27 janvier 2015, C______ est intervenue auprès de l’OCPM en faveur de son employé. L’intéressé était employé sous contrat à durée indéterminée en qualité d’aide-cuisinier. C______ était très satisfaite de la qualité de son travail. Il œuvrait de manière consciencieuse, soignée, était responsable et sans histoires. Sa collaboration était précieuse. La brigade de cuisine, dans sa composition actuelle, s’entendait bien et collaborait efficacement. Il était important que M. A______ puisse continuer à travailler avec eux. Elle se portait garante de M. A______.

15) Le 5 février 2015, M. A______ a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision de l’OCPM du 6 janvier 2015. Il a conclu à son annulation et au renouvellement de l’autorisation, sous suite d’indemnité au titre de participation aux honoraires.

Le ménage commun avait duré plus de trois ans, les époux ayant fait ménage commun depuis février 2009, soit plus d’un an et demi avant la date du mariage effectif. Ils avaient vécu conjointement et sous le même toit pendant trois ans et dix mois. Par ailleurs, l’intéressé était parfaitement intégré. Il parlait couramment le français, participait à la vie économique du canton et y était extrêmement apprécié par les personnes qui le côtoyaient. Son casier judiciaire était vierge et il n’avait fait l’objet d’aucune poursuite. Il respectait l’ordre juridique suisse et les valeurs de la Constitution fédérale. Il disposait d’un réseau d’amis qu’il fréquentait régulièrement. Rien n’indiquait que son intégration n’était pas réussie.

16) Par observations du 31 mars 2015, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

17) Par jugement du 29 avril 2015, le TAPI a rejeté le recours de M. A______.

L’union conjugale avait débuté le 18 octobre 2010 et avait pris fin en décembre 2012. Les années de concubinage qui avaient précédé la célébration du mariage n’étaient pas prises en compte. L’union conjugale ayant duré moins de trois ans, il n’était pas nécessaire d’examiner si l’intégration à Genève était ou non réussie. Par ailleurs, il n’existait pas de raisons personnelles majeures justifiant le renouvellement de l’autorisation concernée. Aucun élément du dossier ne permettait de conclure que la réintégration du recourant en Turquie serait compromise. Son intégration professionnelle en Suisse ne revêtait en soi aucun caractère exceptionnel et ne saurait à elle seule légitimer la poursuite du séjour. Par ailleurs, de manière générale, le fait d’exercer une activité lucrative auprès d’un même employeur depuis quelques années, de payer ses impôts, de ne pas bénéficier de l’aide sociale, d’avoir une vie sociale et de ne pas avoir fait l’objet de plaintes ne constitue pas des raisons personnelles majeures.

18) Par acte du 27 mai 2015, M. A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité. Il a conclu à son annulation et au renouvellement de l’autorisation concernée.

Il était en Suisse depuis le 13 février 2006. Il avait fait ménage commun avec son épouse de février 2009 à décembre 2012, soit pendant trois ans et dix mois. Son départ du domicile conjugal était lié à son beau-fils, âgé de 31 ans et sans travail. Le recourant avait un logement et un emploi lui permettant de gagner CHF 4'442.- bruts par mois, 13ème salaire inclus. Aucune procédure de divorce n’était en cours.

Pour le surplus, il a repris les arguments développés devant le TAPI.

19) Par observations du 25 juin 2015, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

M. A______ contestait uniquement l’appréciation selon laquelle l’union conjugale entre son épouse et lui-même avait duré moins de trois ans. Toutefois, contrairement à ce qu’alléguait le recourant, la durée nécessaire n’était pas remplie, la cohabitation des intéressés avant leur mariage ne pouvant pas être prise en compte dans la durée de l’union conjugale.

20) Par réplique du 23 juillet 2015, le recourant a fait part de sa difficulté à accepter la situation. Il avait vécu en couple avec son épouse pendant toute la durée du mariage. La relation avec son beau-fils de 34 ans, qui n’était pas indépendant, était instable émotionnellement et sollicitait en permanence de l’argent, était devenue difficile à gérer au quotidien. Il aimait sa femme, avec qui il avait partagé des moments merveilleux. Il avait su s’adapter, ce qui lui avait permis de s’introduire dans le monde du travail. Il était financièrement indépendant, grâce à celui-ci. Il n’avait jamais eu recours à l’État. Il avait ainsi pu aider ses trois enfants qui se trouvaient en Turquie, afin de financer leurs études. Il remerciait la Suisse qui lui avait beaucoup apporté. Sa vie avait basculé « à cause de ces événements difficiles à accepter. Puis, d’un point psychologique, je me sens confus, triste, abattu et déstabilisé par votre décision, car je vais devoir continuer à lutter chaque jour pour continuer à vivre. Je ne sais où aller et que devrais-je faire demain et ma vie est devenue incertaine. Je souhaite que mon cas soit bien regardé et qu’une décision me soit accordée d’un point de vue humain. »

21) Par courrier du 27 juillet 2015, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre administrative n’a toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

3) La loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA – RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEtr).

4) Le conjoint d’un ressortissant suisse a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui (art. 42 al. 1 LEtr). La disposition précitée requiert non seulement le mariage des époux, mais aussi leur ménage commun (ATF 136 II 113 consid. 3.2 p. 116 ss).

5) a. Après la dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu de l’art. 43 LEtr subsiste si l'union conjugale a duré au moins trois ans et que l'intégration est réussie (art. 50 al. 1 let. a LEtr).

Selon la jurisprudence, il s'agit de deux conditions cumulatives (ATF 136 II 113 consid. 3.3.3 p. 119). L'art. 50 LEtr ne trouve application qu'en cas d'échec définitif de la communauté conjugale (ATF 140 II 129 consid. 3.5 p. 133).

b. L’union conjugale suppose le mariage en tant que condition formelle ainsi que la vie commune des époux, sous réserve des exceptions de l’art. 49 LEtr (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 ; 2C_416/2009 du 8 septembre 2009 consid. 2.1.2 ; ATA/813/2015 du 11 août 2015 consid. 8a ; ATA/674/2014 du 26 août 2014). Les notions d’union conjugale et de mariage ne sont pas identiques. L’union conjugale au sens de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr suppose l’existence d’une communauté conjugale effectivement vécue, soit une vie commune (arrêt du Tribunal fédéral 2C_416/2009 précité consid. 2.1.2 ; ATA/813/2015 précité ; ATA/674/2014 précité ; ATA/444/2014 du 17 juin 2014 ; ATA/563/2013 du 28 août 2013 ; Directives et circulaires du SEM, domaine des étrangers, état au 1er juillet 2015, ch. 6.2.1).

S'agissant de la première condition de l'art. 50 al. 1 let. a LEtr, la période minimale de trois ans de l'union conjugale commence à courir dès le début de la cohabitation effective des époux en Suisse et s'achève au moment où ceux-ci cessent de faire ménage commun (ATF 138 II 229 consid. 2 p. 231 ; ATF 136 II 113 consid. 3.3.3 p. 119). Seules les années de mariage et non de concubinage sont pertinentes (ATF 140 II 345 consid. 4.1 ; ATF 136 II 113 consid. 3.3.1 p. 118 ; arrêt du Tribunal fédéral du 20 mars 2014 2C_178/2014 consid. 5.2). Il n'est pas nécessaire que la vie commune des époux en Suisse ait eu lieu d'une seule traite. Des séjours à l'étranger du couple ne font ainsi pas obstacle à l'application de cette disposition si l'addition des périodes de vie commune en Suisse aboutit à une durée supérieure à trois ans (arrêt du Tribunal fédéral 2C_430/2011 du 11 octobre 2010 consid. 4.1.2). Pour satisfaire à la durée légale minimum requise, il n'est pas possible de cumuler les (courtes) périodes afférentes à des mariages distincts, que le ressortissant étranger aurait célébrés successivement (ATF 140 II 345, p. 347 ; ATF 140 II 289 consid. 3 p. 291). La limite légale de trois ans présente un caractère absolu et s’applique même s’il ne reste que quelques jours pour atteindre la durée de trente-six mois exigée par l’art. 50 al. 1 let. a LEtr (ATF 137 II 345 consid. 3.1.3 p. 347 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_735/2010 du 1er février 2011 consid. 4.1 et 2C_711/2009 du 30 avril 2010 consid. 2.3.1 ; ATA/813/2015 précité ; ATA/463/2013 du 30 juillet 2013).

Il n’est pas nécessaire d’examiner la condition de la réussite de l’intégration lorsque l’union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (arrêts du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4 ; 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 2.2 ; 2C_429/2013 du 12 juillet 2013 consid. 4.3 ; 2C_789/2010 du 31 janvier 2011 consid. 4.1 ; 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 ; 2C_488/2010 du 2 novembre 2010 consid. 3.2 ; ATA/813/2015 précité ; ATA/444/2014 précité).

6) En l’espèce, compte tenu des exigences légales et de la jurisprudence susmentionnée, c’est à juste titre que tant l’OCPM que le TAPI ont retenu que l’union conjugale formée par le recourant et son épouse avait débuté le 18 octobre 2010 et pris fin en décembre 2012, et qu’elle avait, en conséquence, duré moins de trois ans.

Le recourant cite un arrêt du Tribunal fédéral 2C_556/2010 du 2 décembre 2010, consid. 4.1 selon lequel la période de cohabitation devrait être comptée. Le recourant se trompe sur le sens de la phrase « cette période commence à courir à partir du début de la cohabitation des époux en Suisse et se termine au moment où les époux cessent d'habiter ensemble sous le même toit (ATF 136 II 113 consid. 3.2 in fine et 3.3 p. 117 ss) ». La problématique traitée en l’espèce portait sur la question de savoir si le ménage commun des époux à l’étranger comptait dans les trois années concernées et non sur le problème de la cohabitation avant mariage. Le terme « époux » retenu dans la phrase litigieuse exclut d’ailleurs la cohabitation avant mariage.

De surcroît, la jurisprudence récente, postérieure à l’arrêt du Tribunal fédéral cité par le recourant, confirme que la cohabitation avant mariage n’est pas prise en compte dans l’art. 50 al. 1 let. a LEtr (ATF 140 II 345 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_178/2014 du 20 mars 2014 consid. 5.2 et 2C_72/2015 du 13 août 2015 consid. 2.2).

Le grief du recourant relatif à la durée de l’union conjugale est infondé.

La position de l’intimé sur le calcul des trois années de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr est juste, tout comme le fait de considérer que dès lors que la première condition n’est pas remplie, il n’est pas nécessaire d’examiner la seconde, à savoir l’intégration réussie du recourant.

7) a. Le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour de l’étranger en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEtr). De telles raisons sont données, notamment, lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEtr). Cette disposition a pour vocation d’éviter les cas de rigueur ou d’extrême gravité (ATF 137 II 1 consid. 3.1 p. 3 ss ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_500/2014 du 18 juillet 2014 consid. 7.1 ; 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 3.1 ; 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 2.3 ; 2C_1035/2012 du 21 décembre 2012 consid. 4 ; ATA/514/2014 du 1er juillet 2014 consid. 5a ; ATA/64/2013 du 6 février 2013 consid. 5b).

b. L’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l’art. 50 al. 1 let. a LEtr, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n’a pas duré trois ans ou parce que l’intégration n’est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que - eu égard à l’ensemble des circonstances - l’étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 395 ; 137 II 1 consid. 4.1 p. 7 ss in RDAF 2012 I 515 p. 516 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 p. 348 in RDAF 2012 I 519 p. 520 ; ATA/601/2015 du 9 juin 2015). À cet égard, c’est la situation personnelle de l’intéressé qui est décisive et non l’intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s’agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée « raisons personnelles majeures » et de l’appliquer au cas d’espèce, en gardant à l’esprit que l’art. 50 al. 1 let. b LEtr confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l’art. 30 al. 1 let. b LEtr (ATF 138 II 393 consid. 3.1 p. 395 ; 137 II 1 consid. 3 p. 3 in RDAF 2012 I 515 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 p. 348 in RDAF 2012 I 519, p. 520 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 2.3).

c. D’après le message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la LEtr, l’art. 50 al. 1 let. b LEtr exige que des motifs personnels graves imposent la poursuite du séjour en Suisse. Il en va ainsi lorsque le conjoint de l’étranger demeurant en Suisse est décédé ou lorsque la réinsertion familiale et sociale dans le pays d’origine s’avérerait particulièrement difficile en raison de l’échec du mariage (FF 2002 II 3469 p. 3510 ss). L’admission d’un cas de rigueur personnelle survenant après la dissolution de la communauté conjugale suppose donc que, sur la base des circonstances d’espèce, les conséquences pour la vie privée et familiale de la personne étrangère liées à ses conditions de vie après la perte du droit de séjour découlant de la communauté conjugale soient d’une intensité considérable (ATF 137 I 1 consid. 4.1 p. 7 ss in RDAF 2012 I 515 p. 516 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 à 3.2.3 p. 348 ss in RDAF 2012 I 519 p. 520 ; ATA/514/2014 du 1er juillet 2014 consid. 5b ; ATA/843/2012 du 18 décembre 2012 consid. 2b).

d. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'énumération des cas de rigueur personnelle n'est pas exhaustive et laisse aux autorités une certaine liberté d'appréciation, fondée sur des motifs humanitaires (ATF 136 II 1 consid. 5.3 p. 4). S’agissant de la réintégration dans le pays d’origine, l’art. 50 al. 2 LEtr exige qu’elle semble fortement compromise (« stark gefährdet »). La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans son pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_789/2010 du 31 janvier 2011 consid. 4.2 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1 ; 2C_376/2010 du 18 août 2010 consid. 6.3.1 ; ATA/64/2013 du 6 février 2013 consid. 5b).

8) En l’espèce, le recourant est âgé de 46 ans. Les efforts faits pour s’intégrer en Suisse sont certes louables, et la reconnaissance professionnelle dont le recourant bénéficie auprès de son employeur et de ses collègues est méritoire. Le fait de ne pas dépendre de l’aide sociale, d’avoir appris le français ou d’avoir un casier judiciaire vierge ne suffisent cependant pas à remplir les conditions jurisprudentielles des raisons personnelles d’une extrême gravité. L’absence de procédure de divorce n’est pas relevante, seule étant déterminante la durée de l’union conjugale au sens précité. Par ailleurs, le recourant a fait mention, dans sa réplique, de sa famille restée en Turquie, singulièrement de ses trois enfants qu’il avait pu aider, grâce à son travail en Suisse, à continuer des études. Si cette motivation peut être compréhensible, elle n’est toutefois pas retenue par la jurisprudence comme remplissant les conditions exigées par l’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEtr. Le recourant est arrivé en Suisse à l’âge de 37 ans et est en bonne santé. Il est apte à travailler et pourra mettre en valeur les connaissances acquises en Suisse dans son pays d’origine, dont il parle la langue et où il a passé la très grande majorité de son existence. Pour le surplus, il n’est pas nécessaire d’instruire la question de la présence en Suisse de l’intéressé dès 2006, tel qu’il l’allègue dans son recours devant le TAPI, puis devant la chambre administrative, celle-ci n’étant étayée par aucune pièce et lui étant plutôt défavorable dès lors qu’il aurait séjourné en Suisse sans autorisation.

Dans ces conditions, le recours est rejeté.

9) Un émolument de CHF 400.- est mis à la charge du recourant qui succombe. Aucune indemnité de procédure n’est allouée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 mai 2015 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 avril 2015 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

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Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.