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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/5341/2020

AARP/177/2023 du 25.05.2023 sur JTDP/1189/2022 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 03.07.2023, rendu le 11.04.2024, REJETE
Descripteurs : DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LEI
Normes : LEI.118; CP.66Abis
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5341/2020 AARP/177/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 12 mai 2023

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/1189/2022 rendu le 27 septembre 2022 par le Tribunal de police,

 

et

A______, domicilié c/o B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, le Ministère public (MP) appelle du jugement JTDP/1189/2022 du 27 septembre 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) a reconnu A______ coupable de représentation de la violence (art. 135 al. 1 et 1bis du Code pénal suisse [CP]), de pornographie dure (art. 197 al. 5 CP), d'entrée illégale pour la période du 17 avril 2018 au 20 janvier 2019 (art. 115 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]) et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation pour la période du 28 septembre 2015 au 20 janvier 2019 (art. 115 al. 1 let. c LEI). Le TP a en revanche acquitté A______ des chefs de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'entrée illégale pour la période du 21 janvier 2019 au 29 avril 2020 (art. 115 al. 1 let. a LEI), d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation pour la même période (art. 115 al. 1 let. c LEI) et de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 CP).

Le TP a condamné A______ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 30.-/jour, sous imputation de deux jours-amende correspondant à deux jours de détention avant jugement, avec sursis durant trois ans. Il a renoncé à l'expulser de Suisse et fixé les frais de procédure à CHF 800.-, les a mis à sa charge, tout en lui octroyant une indemnité de CHF 1'453.95 en lien avec ses dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

b. Le MP entreprend partiellement ce jugement, concluant à la condamnation de A______ du chef de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 CP), au prononcé d'une peine privative de liberté de dix mois, sous déduction de deux jours de détention avant jugement, avec sursis pendant trois ans, à son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans et à sa condamnation aux frais de la procédure de première instance et d'appel.

A______ conclut au rejet de l'appel ainsi qu'à l'octroi en sa faveur d'une indemnité de CHF 4'177.10 en lien avec les dépenses entraînées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure en appel.

c. Selon l'acte d'accusation du 16 septembre 2021, il est reproché ce qui suit à A______ :

Le 3 janvier 2019, il a déposé auprès de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM) une demande d'autorisation de séjour dans le cadre de l'opération de régularisation dite "PAPYRUS" en produisant plusieurs documents falsifiés, dans le but d'induire en erreur l'OCPM afin d'obtenir frauduleusement une autorisation de séjour, étant précisé qu'aucune autorisation ne lui a été finalement délivrée.

En première instance, il lui était en outre reproché ce qui suit :

Il avait détenu dans son téléphone portable cinq vidéos représentant des actes de violences entre humains et partagé l'une d'entre elles, tout comme quatre vidéos représentant des rapports sexuels entre des humains et des animaux. Il avait pénétré à réitérées reprises sur le territoire suisse entre le 17 avril 2018 et le 29 avril 2020 alors qu'il faisait l'objet d'une décision d'interdiction d'entrée en Suisse, mesure valable du 22 mars 2018 au 21 mars 2021, laquelle lui avait été valablement notifiée le 17 avril 2018. Il avait, depuis une date indéterminée et jusqu'au 29 avril 2020, séjourné à réitérées reprises sur le territoire suisse et y avait exercé des activités lucratives alors qu'il n'était pas au bénéfice des autorisations nécessaires.

B. Les faits suivants, encore pertinents au stade de l'appel, ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant du Kosovo, est né le ______ 1991 dans son pays d'origine.

b.a. Il a obtenu son permis de conduire kosovar le 16 octobre 2009. Son passeport, valable pour la période allant du 25 mai 2011 au 24 mai 2021, a été établi par le Ministère des affaires intérieures kosovar.

b.b. Sur l'application facebook installée sur le téléphone de A______, dont l'alias est "A______", figurent diverses publications localisées, réalisées par lui-même ou certains de ses contacts, dont au moins dix le situent au Kosovo ou en Albanie au cours des années 2012, 2013 et 2014.

c. A______ a sollicité l'asile à D______, en France, le 10 juillet 2015, précisant être entré dans ce pays le 17 mai 2015. Sa requête a été rejetée le 3 novembre 2015 et une obligation de quitter le territoire français a été prise à son encontre le 14 avril 2016.

d. Du mois de février 2016 au mois d'août 2018, A______ a travaillé pour la société E______ Sàrl, entreprise du bâtiment sise dans le canton de Genève. Son premier revenu soumis à cotisations AVS/AI au service cette société a été réalisé en février 2016. Depuis janvier 2019, il travaille pour l'entreprise de son frère, F______ SA, également située dans le canton de Genève.

e.a. Le 3 janvier 2019, A______ a déposé une demande de permis de séjour avec autorisation de travail dans le cadre du programme de régularisation dit "PAPYRUS" mis en place par l'OCPM et le Secrétariat d'État aux migrations (SEM). Dans cette demande, il a précisé qu'il séjournait en Suisse depuis 2008.

e.b. Afin de prouver sa résidence en Suisse, A______ a produit divers documents en annexe à sa demande, notamment des certificats de salaire au nom de la société G______ Sàrl, sise à Genève, relatifs aux années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, ainsi qu'un contrat de travail daté du 1er février 2010 entre lui-même et cette entreprise. La société a été radiée le ______ 2015. Ses associés étaient H______, décédé le ______ 2019, et I______, décédé le ______ 2020.

Il a également déposé une attestation d'achat d'abonnements des transports publics genevois (TPG) pour les années 2015, 2016 et 2017, soit pour la période du 15 janvier au 14 février 2015, puis de manière ininterrompue du 5 juillet 2015 au 20 mai 2017.

f.a. Le 12 mars 2020, l'OCPM a fait part au MP de ses soupçons au sujet de l'authenticité des certificats de salaire établis par l'entreprise G______ Sàrl.

f.b. A______ a été entendu par la police le 29 juin 2020. Il a déclaré être arrivé à Genève vers la fin de l'année 2008. Au moment de son audition, il habitait avec son frère. Il avait vécu au no. ______, avenue 1______ [à] J______ [GE] pendant cinq ou six mois en 2015. Auparavant, il avait résidé chez des amis et des cousins. Durant la période pour laquelle il travaillait pour cette société, un certain "K______", agissant de facto comme le patron de G______ Sàrl, lui avait remis le contrat de travail daté du 1er février 2010 et les quatre certificats de salaire remis à l'OCPM. Il a confirmé qu'il avait déposé une demande d'asile à D______, en France, bien qu'il eût habité à Genève, afin d'obtenir des papiers pour ne pas rester "au noir".

f.c. Au cours de son audition par le MP le 30 juin 2020 et par-devant le TP, A______ a réitéré avoir vécu à Genève depuis 2008 et dormi initialement chez son frère et des amis dont il refusait de dévoiler l'identité. Les publications localisées sur son compte facebook avait été réalisées par des amis pour rigoler. Il avait reçu son contrat de travail avec G______ Sàrl le 1er février 2010 et ses certificats de salaires relatifs à cette société à chaque fin d'année.

C. a.a. En annexe à sa déclaration d'appel, le MP a déposé un rapport de renseignements de la police du 7 juillet 2022 relatif à une autre procédure pénale conduite par ses soins en lien avec un soupçon de conception et/ou utilisation de 681 faux dans le cadre de 22 demandes de permis de séjour liées au programme "PAPYRUS", pour la plupart en relation avec G______ Sàrl. L'un de ces cas concernait A______, son contrat de travail du 1er février 2010 avec cette société étant compris dans l'inventaire informatique d'une des personnes soupçonnées d'avoir conçu de fausses attestations. Les métadonnées de ce document révélaient qu'il avait été créé ("item date") le 31 décembre 2014 à 5h37 et qu'il était classé sous "Bureau/L______ SARL/RH/Collaborateurs/M______/K______/A______". Dans un rapport de la police du 7 décembre 2020 également joint par le MP, il était en outre mentionné que la signature figurant sur divers contrats de travail de G______ Sàrl, dont celui de A______, ne correspondait clairement pas aux signatures des deux associés de celle-ci.

a.b. Aux débats d'appel, A______ a notamment réaffirmé qu'il était arrivé en Suisse en 2008 et avait bien travaillé pour la société G______ Sàrl pendant environ quatre ans. Il recevait son salaire en espèces. Il n'avait pas quitté la Suisse entre 2009 et 2017. Les publications localisées sur son compte facebook au cours des années 2012 à 2014 avaient été faites par des amis. Avant d'être titulaire d'un abonnement TPG, il se déplaçait en voiture avec des parents ou des amis. Il n'avait d'ailleurs possédé un tel abonnement que durant l'année 2015 car il ne travaillait pas à cette époque.

b.a. Selon le MP, la date de création du contrat de travail de A______, soit le 31 décembre 2014, permettait de retenir que cette pièce, fournie à l'OCPM, était un faux. Cette conclusion était confirmée par l'absence de cotisations sur l'extrait de compte individuel AVS de l'intéressé avant 2016 et par le fait que son abonnement TPG avait débuté en 2015.

b.b. Par la voix de son défenseur, A______ allègue avoir bien travaillé pour G______ Sàrl au cours des années 2010 à 2014 même s'il serait difficile d'en faire la preuve dès lors qu'il n'a pas été déclaré. Le fait que son contrat de travail avec cette société ait été retrouvé dans l'inventaire informatique d'un potentiel faussaire n'était pas suffisant pour considérer qu'il n'aurait pas réellement travaillé en Suisse au cours de cette période, d'autant que, selon les métadonnées, la date de création du document précède de plusieurs années le début du programme "PAPYRUS". Une éventuelle expulsion de Suisse n'était par ailleurs pas justifiée dès lors que ses projets personnels et familiaux se trouvaient dans cet État et que la possibilité d'une expulsion facultative concernerait en principe les récidivistes, et non les personnes qui, comme dans le cas d'espèce, avaient commis des erreurs de jeunesse.

D. A______ est célibataire, mais fiancé et sans enfant. Ses parents, ses quatre sœurs et l'un de ses deux frères résident au Kosovo, tandis que son autre frère vit à Genève. Il travaille en tant que carreleur dans l'entreprise de ce dernier pour un salaire d'environ CHF 4'300.- net par mois. Il habite avec son neveu et n'est pas contraint de payer un loyer. Il paie en revanche ses impôts et ses primes d'assurance-maladie. Il n'a pas d'antécédent judiciaire.

 

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_86/2019 du 8 février 2019 consid. 1.1).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation ; le principe est violé lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1 ; 6B_61/2015 du 14 mars 2016 consid. 3). Lorsque l'accusé refuse sans raison plausible de fournir des explications rendues nécessaires par des preuves à charge, son silence peut, sans violation de ce principe et, par un raisonnement de bon sens, conduire à conclure qu'il n'existe pas d'explication à décharge et que l'accusé est coupable (arrêts du Tribunal fédéral 6B_572/2018 du 1er octobre 2018 consid. 3.4.1 ; 6B_47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1 ; 6B_515/2014 du 26 août 2014 consid. 3).

Le principe de la libre-appréciation des preuves implique qu'il revient au juge de décider ce qui doit être retenu comme résultat de l'administration des preuves en se fondant sur l'aptitude des éléments de preuve à prouver un fait au vu de principes scientifiques, du rapprochement des divers éléments de preuve ou indices disponibles à la procédure, et sa propre expérience (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2) ; lorsque les éléments de preuve sont contradictoires, le tribunal ne se fonde pas automatiquement sur celui qui est le plus favorable au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2 ; 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1 ; 6B_1363/2019 du 19 novembre 2020 consid. 1.2.3). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7 ; 127 I 38 consid. 2a).

3. 3.1.1. Selon l'art. 118 al. 1 LEI, est punissable quiconque induit en erreur les autorités chargées de l'application de la présente loi en leur donnant de fausses indications ou en dissimulant des faits essentiels et obtient, de ce fait, frauduleusement une autorisation.

L'auteur doit avoir un comportement frauduleux qui induit l'autorité en erreur relativement à un fait essentiel, ce qui amène celle-ci à accorder ou à ne pas retirer une autorisation ; il doit ainsi exister un lien de causalité adéquate entre la tromperie et l'octroi de l'autorisation de séjour au sens que si l'autorité avait eu connaissance de la vérité, elle n'aurait pas délivré ladite autorisation (arrêts du Tribunal fédéral 6B_838/2018 du 13 janvier 2022 consid. 5.1 ; 6B_833/2018 du 11 février 2019 consid. 1.5.2 ; 6B_72/2015 du 27 mai 2015 consid. 2.2 ; 6B_497/2010 du 25 octobre 2010 consid. 1.1 ; AARP/327/2021 du 19 octobre 2021 consid. 2.2.1). Le résultat de l'infraction se produit lorsque l'autorisation de séjour est accordée ; à défaut, il s'agit d'une tentative (AARP/309/2022 du 6 octobre 2022 consid. 2.3.2 ; AARP/179/2022 du 15 juin 2022 consid. 2.1.1).

L'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités est une infraction intentionnelle ; le dol éventuel suffit (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2018 du janvier 2022 consid. 5.1 ; voir également : AARP/309/2022 du 6 octobre 2022 consid. 2.3.2 ; AARP/179/2022 du 15 juin 2022 consid. 2.1.2).

3.1.2. L'art. 22 CP prévoit la punissabilité de la tentative. Une infraction est tentée lorsque l'auteur réalise tous les éléments constitutifs subjectifs de celle-ci et manifesté sa décision de la commettre et que les éléments constitutifs objectifs font défaut en tout ou en partie, mais qu'il existe néanmoins une concrétisation objective la volonté délictuelle de l'auteur dans la réalité (ATF 140 IV 150 consid. 3.4 ;
137 IV 113 consid. 1.4.2 ; 128 IV 18 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1424/2020 du 31 janvier 2022 consid. 1.3.2).

3.1.3. L'opération dite "PAPYRUS", lancée en février 2017 et ayant pris fin au 31 décembre 2018, visait à régulariser la situation de personnes non ressortissantes d'un pays de l'UE/AELE, bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir : avoir un emploi, être indépendant financièrement, ne pas avoir de dettes, avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant dix ans minimum (cinq ans pour les familles avec enfants scolarisés), faire preuve d'une intégration réussie, et ne pas avoir de condamnation pénale autre que celle pour séjour illégal (ATA/1255/2022 du 13 décembre 2022 consid. 5 ; ATA/1153/2022 du 15 novembre consid. 7 ; ATA/878/2022 du 30 août 2022 consid. 7).

3.2. En l'espèce, les questions déterminantes sont de savoir si l'intimé a résidé ou non en Suisse entre 2008 et 2014 et, s'il s'avérait que tel n'était pas le cas, s'il a tenté d'induire l'OCPM en erreur sur ce point.

3.2.1. Les pièces complémentaires produites en appel ne concernent l'intimé qu'eu égard au contrat de travail non-signé et daté du 1er février 2010 annexé à sa demande de permis de séjour. Comme soutenu par le MP, les métadonnées de ce document font effectivement douter qu'il ait été créé en 2010. En outre, la signature relative à G______ Sàrl figurant sur ce contrat apparaît ne pas correspondre à celles des associés de cette société, ce qui renforce les interrogations quant à la sincérité de son contenu. Toutefois, le fait que ce document apparaisse peu authentique ne signifie pas encore que l'intimé n'a pas travaillé pour ladite société au cours des années 2010 à 2014. En effet, il est notoire que le secteur de la construction est particulièrement affecté par le travail non-déclaré. En outre, il n'est pas clair à quoi se rapporte l'intitulé "item date", soit si celui-ci fait référence à la date de création du fichier informatique ou à la date de sa dernière modification, ces informations étant de toute façon modifiables avec des connaissances informatiques de base. Enfin, comme souligné par la défense, la date à laquelle font référence les métadonnées en cause, à savoir le 31 décembre 2014, précède d'un peu plus de deux ans l'introduction du programme PAPYRUS, de sorte que l'on ne peut conclure que ce document a été conçu dans l'objectif de justifier d'une activité inexistante en vue du dépôt d'une demande de régularisation dans le cadre dudit programme.

Les certificats de salaire de G______ Sàrl relatifs à l'intimé pour les années 2010 à 2014 ont également une authenticité sujette à caution. En effet, ils font d'une part mention de cotisations sociales qui, au vu de l'extrait de compte individuel de l'intéressé, n'ont jamais été versées. D'autre part, le fait que l'intimé ait été incapable de produire la moindre fiche de salaire malgré ses nombreux mois de travail allégués, tout comme celui qu'il ait divergé, respectivement ait été imprécis s'agissant du moment où il avait reçu ces documents est de nature à affecter notablement leur force probante, alors même que celle-ci est déjà réduite (cf. ATF 146 IV 258 consid. 1.1.1).

Quant à l'extrait de compte individuel AVS de l'intimé sur lequel ne figure aucune cotisation pour les années 2010 à 2015, il ne constitue qu'un élément de preuve parmi d'autres au moment de juger de l'exercice effectif d'une activité lucrative au cours d'une période donnée.

Au vu de ce qui précède, le contrat de travail daté du 1er février 2010, les certificats de salaire de G______ Sàrl relatifs aux années 2010 à 2014 et l'extrait de compte individuel AVS de l'intimé ne permettent ni d'infirmer ni d'affirmer que l'intimé se trouvait en Suisse lors des années 2008 à 2014.

En revanche, l'intimé a été localisé au moins à dix reprises au Kosovo ou en Albanie sur des publications facebook au cours des années 2012, 2013 et 2014. Trois de ces publications, soit celles des 1er avril 2012, 15 mars 2013 et 20 mai 2013, ont été effectuées par l'intéressé lui-même et les autres par six personnes. Interrogé sur ce point tant par le MP que par la Chambre de céans, il n'a pas su donner de réponse convaincante à l'existence de ces localisations alors qu'il alléguait avoir résidé de manière ininterrompue en Suisse au cours des années concernées. Son affirmation selon laquelle il n'était pas réellement sur place, respectivement que les publications l'incluraient à tort, n'est en particulier pas crédible vu leur nombre, la diversité de leurs auteurs et le fait que trois d'entre elles ont été réalisées par l'intimé lui-même.

En outre, l'intimé a obtenu son permis de conduire kosovar le 16 octobre 2009, soit à une période où il affirme avoir été en Suisse. Son passeport, valable pour la période allant du 25 mai 2011 au 24 mai 2021, a d'ailleurs été établi par le Ministère des affaires intérieures kosovar. Par ailleurs, l'attestation d'achat d'abonnements des TPG révèle qu'il en a possédé un uniquement depuis le 15 janvier 2015. Ses déclarations, selon lesquelles il n'aurait possédé un abonnement qu'au cours de l'année 2015 car il ne travaillait ne sont pas convaincantes dès lors qu'il apparaît qu'il a ensuite été titulaire d'un abonnement mensuel de manière pratiquement ininterrompue du 5 juillet 2015 au 20 mai 2017, notamment lorsqu'il travaillait pour E______ Sàrl, travail dont la réalité n'est pas contestée.

De plus, lors du dépôt de sa demande d'asile en France le 10 juillet 2015, il a déclaré être entré en France le 17 mai 2015. Lors de son interrogatoire à la police le 29 juin 2020, il a affirmé : "Sur question, je l'ai fait en France {l'asile ndr.} car c'était proche de Genève. { } J'habitais à Genève car je travaillais à Genève. J'ai fait la demande d'asile uniquement pour avoir des papiers et ne pas rester au noir.". Cette justification conduit à s'interroger sur la temporalité de cette demande, puisque, selon les allégations de l'intimé, il serait arrivé à Genève en 2008 déjà. Si tel était le cas, on peine à comprendre pourquoi il aurait attendu plus de six ans avant de déposer une requête d'asile pour sortir du statut précaire de travailleur sans autorisation. Ses déclarations au cours de la procédure ne permettent en tout cas pas d'expliquer cette discrépance.

Enfin, l'intimé n'a pas été en mesure d'indiquer où il résidait précisément avant 2015, se contentant de déclarer qu'il vivait chez des amis, des cousins ou son frère. Cette affirmation apparaît improbable vu la durée de la période concernée, à savoir plus de six ans, et le fait qu'excepté le frère chez lequel il loge actuellement, l'ensemble des membres les plus proches de sa famille résident au Kosovo. Cela vaut d'autant plus qu'il a au contraire déclaré se souvenir avoir séjourné au no. ______, avenue 1______ [à] J______ en 2015.

Au vu de ce qui précède, il ne subsiste pas de doute insurmontable sur le fait que le centre de vie de l'intimé ne se situait pas en Suisse avant 2015. L'hypothèse la plus crédible est qu'il est arrivé en région genevoise au début de l'année 2015 avant de déposer une demande d'asile infructueuse en France quelques mois plus tard et de trouver un emploi durable chez E______ Sàrl en février 2016. Il ne peut certes pas être exclu que l'intéressé ait séjourné, voire travaillé, brièvement à Genève avant l'année 2015. En revanche, l'hypothèse d'un séjour continu dans ce canton au sens des critères "PAPYRUS" avant cette date ne peut être retenue.

3.2.2. Dans sa demande de permis de séjour à l'OCPM datée du 21 décembre 2018, l'intimé a déclaré qu'il vivait depuis 2008 en Suisse, alors qu'en réalité il y a séjourné durablement au plus tôt depuis janvier 2015. Cette différence de durée de résidence de plus de six ans était de nature à influencer la décision de l'autorité relative à l'octroi d'une autorisation, puisque la condition d'un séjour de dix ans de séjour durable en dépendait. L'intimé ayant par ailleurs un casier judiciaire vierge, un emploi, et aucune poursuite, il ne peut être raisonnablement exclu qu'il se serait vu délivrer un permis de séjour, la condition d'une intégration suffisante, par nature sujette à appréciation, ne pouvant manifestement être rejetée dans le cas d'espèce. Il s'ensuit que son comportement aurait rempli les éléments constitutifs objectifs de l'infraction de l'art. 118 al. 1 LEI si l'OCPM n'avait pas suspendu sa demande en lien avec sa dénonciation au MP.

Lors de son audition à la police, l'intimé a listé les critères devant être remplis pour pouvoir bénéficier d'une autorisation de séjour exceptionnelle dans le cadre du programme "PAPYRUS". Il ne fait donc aucun doute qu'il avait connaissance tant de du caractère essentiel de la condition relative à la durée de son séjour en Suisse pour le succès de sa demande de titre de séjour que de la fausseté de l'information qu'il a transmise à l'OCPM sur ce point et de sa nature propre à tromper cette autorité. Il faut en conclure que sa tentative de tromperie était intentionnelle.

En conclusion, l'intimé sera reconnu coupable de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 CP) et le jugement de première instance réformé sur ce point.

4. 4.1.1. L'infraction de représentation de la violence de l'art. 135 al. 1 CP est punie d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Il en va de même de l'infraction de possession de pornographie dure selon l'art. 197 al. 5 CP et de l'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités de l'art. 118 al. 1 LEI. Les infractions d'entrée illégale selon l'art. 115 al. 1 let. a LEI et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation selon l'art. 115 al. 1 let. c LEI sont quant à elles punies d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

4.1.2.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Celle-ci doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5.5, 5.6 et 5.7), ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. L'absence d'antécédent a un effet neutre sur la fixation de la peine (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2 ; 136 IV 1 consid. 2.6.4). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 ; 135 IV 130 consid. 5.3.1 ; 134 IV 35 consid. 2.1).

Lorsque différents types de peines peuvent être prononcés par le juge pénal, le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention ; la culpabilité de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 ; 144 IV 313 consid. 1.1.1). La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première (ATF 144 IV 217 consid. 3.3.3 ; 135 IV 188 consid. 3.4.3).

4.1.2.2. L'art. 22 al. 1 CP prévoit que le juge peut atténuer la peine dans un cas de tentative. Selon la jurisprudence, si le juge n'a pas l'obligation de sortir du cadre légal, il doit tenir compte de l'absence de résultat dommageable, comme élément à décharge, dans le cadre de l'application de l'art. 47 CP ; la mesure de cette atténuation dépend notamment de la proximité du résultat ainsi que des conséquences effectives des actes commis (arrêts du Tribunal fédéral 6B_249/2021 du 13 septembre 2021 consid. 5.3 ; 6B_687/2020 du 21 janvier 2021 consid. 5.2 ; 6B_123/2020 du 26 novembre 2020 consid. 8.2.2).

4.1.3. Lorsque l'auteur est condamné au titre de plusieurs chefs d'accusation (concours) et que les peines envisagées pour chaque infraction prise concrètement sont de même genre (ATF 147 IV 225 consid. 1.3 ; 144 IV 313 consid. 1.1.1), l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents et, dans un second temps, d'augmenter cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2 ; 144 IV 217 consid. 3.5.1). Selon l'art. 49 al. 1 3ème phr. CP, le juge est cependant lié par le maximum légal de chaque genre de peine. L'auteur ne doit pas être puni plus sévèrement lorsque plusieurs infractions sont sanctionnées ensemble que si elles étaient punies séparément (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.3). En conséquence, il existe plusieurs peines de même genre au sens de l'art. 49 al. 1 CP que lorsqu'un tribunal prononcerait concrètement plusieurs peines de même genre (ATF 147 IV 225 consid. 1.3 ; 144 IV 217 consid. 5.3.2). Les peines privatives de liberté et les peines pécuniaires ne sont pas de même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1).

4.2.1. En l'espèce, le TP a condamné l'intimé à une peine totale de 180 jours-amende pour possession de pornographie dure selon l'art. 197 al. 5 CP, représentation de la violence de l'art. 135 al. 1 CP, entrée illégale selon l'art. 115 al. 1 let. a LEI et exercice d'une activité lucrative sans autorisation selon l'art. 115 al. 1 let. c LEI, sans détailler les peines hypothétiques retenues pour chaque infraction séparée. Il est toutefois certain que s'il avait pris chaque infraction séparément, le premier juge n'aurait prononcé que des peines pécuniaires puisqu'il a fixé une unique peine pécuniaire d'ensemble. Ce choix apparaît cohérent avec l'intensité de la culpabilité de l'intimé et sa situation personnelle. Eu égard en particulier à l'infraction commise concrètement la plus grave, à savoir celle de représentation de la violence, sa culpabilité revêt une certaine importance dès lors qu'il a partagé activement une vidéo représentant un acte de barbarie au cours duquel la victime, maintenue par plusieurs tortionnaires, se fait dévorer ses organes génitaux par un chien. Cependant, bien qu'elle dénote un manque blâmable de considération pour certaines valeurs fondamentales de son pays d'accueil et une absence inquiétante d'empathie pour la souffrance d'autrui, le partage à une seule personne d'une unique vidéo de ce type ne saurait justifier le prononcé d'une peine privative de liberté, en tout cas en l'absence d'antécédent inscrit au casier judiciaire.

4.2.2. S'agissant de l'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités de l'art. 118 al. 1 LEI, la culpabilité de l'intimé n'est pas particulièrement importante, dès lors que son mensonge n'était pas élaboré et visait à compléter une condition de durée de résidence qu'il remplissait partiellement, les autres conditions du programme PAPYRUS étant alors accomplies. Une légère diminution de la peine doit être retenue vu l'absence de résultat dommageable. Son mobile n'est cependant pas particulièrement honorable puisqu'il a recherché avant tout un bénéfice personnel au mépris des règles du droit des étrangers en vigueur.

Sa situation personnelle ne saurait expliquer son comportement dès lors qu'il n'avait pas de lien particulier avec la Suisse, la quasi-totalité de ses parents les plus proches vivant au Kosovo. Son casier judiciaire est vierge. Sa collaboration à la procédure a été mauvaise s'agissant de l'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités ; il s'est ainsi contenté de fournir des informations vagues, modifiant parfois légèrement sa version et ne réagissant pas de manière constructive une fois placé face à ses contradictions. Sa prise de conscience est inexistante.

Au vu de ce qui précède, une peine de 75 jours-amende au titre de l'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités apparaît appropriée. Dès lors que le cadre de la peine de cette infraction est identique à celui des art. 135 al. 1 CP et 197 al. 5 CP, on peut reprendre le calcul du tribunal précédent et considérer cette nouvelle peine comme une peine accessoire aggravant de 50 jours celle de 180 jours prononcée par le TP.

Ce total de 230 jours-amende doit toutefois être réduit à 180 jours en raison de la limite fixée à l'art. 34 al. 1 CP pour ce genre de peine (cf. ATF 144 IV 217). L'intimé sera donc condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende.

Le montant du jour amende sera fixé à CHF 30.-, vu le principe de l'interdiction de la reformatio in pejus (art. 391 al. 2 CPP et ATF 144 IV 198 consid. 4.5.3 a contrario), alors même que le revenu mensuel net réalisé par l'intimé et l'absence de charges familiales aurait commandé la fixation d'un montant plus élevé.

Le sursis non-contesté accordé par le TP est acquis à l'intimé (cf. art. 391 al. 2 CPP et ATF 142 IV 89 consid. 2.1).

En conclusion, l'intimé sera condamné à une peine pécuniaire de 180 jours-amende à CHF 30.-, sous déduction de deux jours-amende correspondant à deux jours de détention avant jugement, avec sursis durant trois ans.

5. 5.1. Conformément à l'art. 66abis CP, le juge peut expulser un étranger du territoire suisse pour une durée de trois à quinze ans si, pour un crime ou un délit non visé à l'art. 66a CP, celui-ci a été condamné à une peine ou a fait l'objet d'une mesure au sens des art. 59 à 61 ou 64 CP. Il s'agit d'une norme potestative ; le juge est donc libre, sans autre justification, de renoncer à l'expulsion facultative (AARP/216/2022 du 22 juillet 2022 consid. 3.1.1 ; AARP/197/2022 du 16 juin 2022 consid. 5.1.2 ; AARP/92/2022 du 24 mars 2022 consid. 3.1).

Comme toute décision étatique, le prononcé d'une expulsion non obligatoire doit respecter le principe de la proportionnalité ancré aux art. 5 al. 2 et 36 al. 2 et 3 Cst. ; il convient ainsi d'examiner si l'intérêt public à l'expulsion l'emporte sur l'intérêt privé de la personne à demeurer en Suisse, en conformité notamment avec les exigences découlant de l'art. 8 par. 2 CEDH ; l'examen de la proportionnalité suppose une prise en compte de la nature et de la gravité de la faute, du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, du comportement de l'auteur durant cette période, de la durée de son séjour en Suisse, de la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination et du préjudice que l'intéressé et sa famille auraient à subir du fait de la mesure (arrêts du Tribunal fédéral 6B_224/2022 du 16 juin 2022 consid. 2.2 ; 6B_1123/2020 du 2 mars 2021 consid. 3.3.1 ; 6B_1005/2020 du 22 décembre 2020 consid. 1.1 ; 6B_528/2020 du 13 août 2020 consid. 3.2 ; 6B_549/2019 du 29 mai 2019 consid. 2.1).

5.2. En l'espèce, aucune des infractions commises par l'intimé n'entraîne une expulsion obligatoire.

Ses liens avec la Suisse, de faible intensité, résident avant tout dans la présence de l'un de ses frères à Genève, ainsi que dans l'exercice du 21 janvier 2019 au 29 avril 2020, soit une période relativement brève, d'une activité lucrative légale en Suisse. De plus, bien qu'il réside à Genève depuis 2015, l'intimé ne parle pas couramment le français, ce qui démontre une intégration plus que relative, d'autant qu'il ne parle apparemment pas plus une autre langue nationale.

Toutefois, les infractions commises, quoique d'une certaine gravité, n'imposent pas, à elles-seules, une expulsion par le juge pénal afin de protéger la sécurité publique, étant rappelé que le casier judiciaire de l'intimé est vierge et que rien ne laisse conclure à l'existence d'un risque crédible de récidive. Dans une telle situation, un renvoi de Suisse ne se justifie pas. Cela vaut d'autant plus que cette décision n'empêche pas l'autorité administrative de prononcer un renvoi de Suisse pour d'autres motifs si elle le jugeait nécessaire (cf. ATF 146 II 321 consid. 4.7 ; 146 II 1 consid. 2.2).

Partant, c'est à juste titre que le TP n'a pas expulsé l'intimé de Suisse. L'appel du MP doit sur ce point être rejeté.

6. 6.1. Selon l'art. 428 al. 1, première phrase, CPP, les frais de la procédure de recours sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé ; pour déterminer si une partie succombe ou obtient gain de cause, il faut examiner dans quelle mesure ses conclusions sont admises en deuxième instance (arrêts du Tribunal fédéral 6B_143/2022 du 29 novembre 2022 consid. 3.1 ; 6B_1397/2021 du 5 octobre 2022 consid. 11.2 ; 6B_275/2022 du 2 septembre 2022 consid. 3.1 ; 6B_44/2020 du 16 septembre 2020 consid. 11.1.1). Seul le résultat de la procédure d'appel ou de recours elle-même est déterminant (ATF 142 IV 163 consid. 3.2.1).

6.2. En l'espèce, l'intimé succombe sur l'essentiel, soit la question de sa culpabilité pour tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 CP), tandis que l'appelant est débouté de ses conclusions accessoires relative au genre de peine et à l'expulsion facultative. Il convient dès lors de laisser la moitié des frais de la procédure d'appel à la charge de l'État, lesquels s'élèvent à CHF 2'185.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'800.-, l'autre moitié étant supportée par l'intimé.

7. 7.1. La question de l'indemnisation doit être tranchée après celle des frais. Dans cette mesure, la question sur les frais préjuge de celle de l'indemnisation (ATF 147 IV 47 consid. 4.1 ; 145 IV 94 consid. 2.3.2 ; 144 IV 207 consid. 1.8.2 ; 137 IV 352 consid. 2.4.2).

L'art. 436 al. 1 CPP prescrit que les règles relatives à la fixation de l'indemnité en relation avec la procédure de première instance, soit les art. 429 à 434 CPP, trouvent application à la procédure d'appel.

L'art. 429 al. 1 let. a CPP prévoit que s'il est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, le prévenu a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

L'État ne prend en charge les frais de défense que si l'assistance d'un avocat était nécessaire compte tenu de la complexité de l'affaire en fait ou en droit et que le volume de travail, et donc les honoraires, étaient ainsi justifiés (ATF 142 IV 45 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.1 ; 6B_706/2021 du 20 décembre 2021 consid. 2.1.1). L'État doit en principe indemniser la totalité des frais de défense, ceux-ci devant toutefois demeurer raisonnables compte tenu de la complexité et de la difficulté de l'affaire (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.2 ; 6B_706/2021 du 20 décembre 2021 consid. 2.1.1).

L'indemnité doit correspondre au tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule ; l'État n'est pas lié par une convention d'honoraires passée entre le prévenu et son avocat (ATF 142 IV 163 consid. 3.1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_380/2021 du 21 juin 2022 consid. 2.2.2). La Cour de justice applique ainsi un tarif horaire maximal de CHF 450.- pour les chefs d'étude (AARP/357/2022 du 16 novembre 2022 consid. 6.1 ; AARP/347/2022 du 16 novembre 2022 consid. 2.1), de CHF 350.- pour les avocats collaborateurs (AARP/52/2023 du 20 février 2023 consid. 6.2.2 ; AARP/44/2023 du 15 février 2023 consid. 3.1.5.4) et de CHF 150.- pour les avocats-stagiaires (AARP/45/2023 du 16 février 2023 consid. 4.1.4 ; AARP/9/2023 du 16 janvier 2023 consid. 4.2).

7.2. En l'espèce, l'intimé conclut à son indemnisation pour les frais rendus nécessaires à sa défense par la procédure d'appel à hauteur de CHF 4'177.10, montant incluant cinq heures et 50 minutes de travail d'avocat collaborateur, trois heures de travail d'avocat chef d'étude et une heure et 30 minutes de travail d'avocat-stagiaire.

De ce total, il convient de retirer 20 minutes de travail d'avocat chef d'étude relatives à la durée de l'audience, plus brève que celle estimée au moment du dépôt des conclusions en indemnisation. Il faut également soustraire une heure de travail d'avocat collaborateur en lien avec la rédaction de la plaidoirie, une durée de quatre heures apparaissant excessive au vu du nombre limité de problématiques à aborder et en tenant compte du fait que cette rédaction ne comprend pas le travail de recherches juridiques de 90 minutes effectué en parallèle par un avocat-stagiaire.

Le montant susceptible d'indemnisation s'élève donc à CHF 3'040.50 ([4.83 x 350] + [2.5 x 450] + [1.5 x 150]). Ce montant doit être réduit de moitié, en proportion des frais imputés à l'intéressé. Partant, il convient d'octroyer à l'intimé un montant de CHF 1'520.25 à titre d'indemnité pour la présente procédure d'appel.

Ce montant sera compensé sur la dette de l'intéressé envers l'État de Genève en lien avec les frais de la présente procédure (cf. art. 442 al. 4 CPP et ATF 139 IV 243 consid. 5.2).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par le Ministère public contre le jugement JTDP/1189/2022 rendu le 27 septembre 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/5341/2020.

L'admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de représentation de la violence (art. 135 al. 1 et 1bis CP), de pornographie (art. 197 al. 5 CP), d'entrée illégale pour la période du 17 avril 2018 au 20 janvier 2019 (art. 115 al. 1 let. a LEI), d'activité lucrative sans autorisation pour la période du 28 septembre 2015 au 20 janvier 2019 (art. 115 al. 1 let. c LEI) et de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 al. 1 LEI cum art. 22 CP).

Acquitte A______ de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d'entrée illégale pour la période du 21 janvier 2019 au 29 avril 2020 (art. 115 al. 1 let. a LEI), d'activité lucrative sans autorisation pour la période du 21 janvier 2019 au 29 avril 2020 (art. 115 al. 1 let. c LEI).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, sous déduction de deux jours-amende, correspondant à deux jours de détention avant jugement.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Ordonne la confiscation et la destruction du téléphone figurant sous chiffre 2 de l'inventaire du 29 juin 2020.

Condamne l'État de Genève à verser à A______ CHF 1'453.95 à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure jusqu'au jugement de première instance.

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance arrêtés à CHF 800.-.

Condamne l'État de Genève à verser à A______ CHF 1'520.25 à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits en procédure d'appel.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'185.-.

Met la moitié de ces frais, soit CHF 1'092.50, à la charge de A______ et laisse le solde à la charge de l'État.

Compense à due concurrence la créance de l'État portant sur les frais de la procédure avec les valeurs patrimoniales séquestrées figurant sous chiffre 1 de l'inventaire du 29 juin 2020 et les indemnités accordées à A______ à titre d'indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations ainsi qu'à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.

 


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'001.00

Arrêtés à CHF 800.-

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

240.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

70.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'800.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'185.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'186.00