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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3672/2022

JTAPI/647/2023 du 13.06.2023 ( OCPM ) , REJETE

REJETE par ATA/99/2024

Descripteurs : EFFET SUSPENSIF;AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;SANTÉ;SOINS MÉDICAUX
Normes : LEI.30; OASA.31; LPA.66.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3672/2022

JTAPI/647/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 13 juin 2023

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Aleksandra PETROVSKA, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1971, est ressortissante de Macédoine du Nord.

2.             Par courrier du 17 août 2020, par l’intermédiaire de son mandataire, elle a déposé une demande d’autorisation de séjour à titre humanitaire auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

À l’appui de sa requête, elle a exposé avoir été victime de violences conjugales de la part de son ex-compagnon, Monsieur B______, contre lequel elle avait déposé une plainte pénale. La procédure était actuellement en cours auprès du Ministère public du canton de Genève. Elle était actuellement suivie par la LAVI et était logée par leurs services à l’C______ à Genève.

Elle a produit une copie de sa plainte pénale du 20 juillet 2020. Elle y expliquait notamment que le 7 juillet 2020, suite à une dispute, M. B______ s’était montré très violent physiquement et verbalement avec elle, l’avait menacée avec une arme à feu et chassée du domicile. Suite à cette agression, elle avait été prise en charge par le Centre LAVI. Elle avait connu M. B______ environ deux ans plus tôt et était venue s’installer chez lui à Genève peu après leur rencontre. Ils avaient vécu ensemble pendant une année et deux mois.

3.             Par courrier du 9 avril 2021, répondant à une demande de renseignements de l’OCPM, Mme A______ a notamment indiqué que M. B______ avait été entendu comme prévenu dans le cadre de la procédure pénale actuellement pendante devant le Ministère public et qu’une audience de confrontation allait prochainement être fixée. Elle était suivie à l’Unité interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence (UIMPV) depuis le 9 juillet 2020 suite aux violences subies. Elle avait subi des violences de type psychologique, physique, financière et privation de liberté, et ce, de manière récurrente deux mois après avoir débuté sa relation avec M. B______. Le médecin qui la suivait lui avait diagnostiqué un trouble anxio-dépressif sévère pour lequel un traitement médicamenteux avait été mis en place. À ce jour, elle présentait toujours des troubles anxio-dépressifs avec une composante psychosomatique en lien avec les violences subies. Elle était arrivée en Suisse pour la première fois le 14 mai 2019 et avait passé le plus clair de son temps au domicile de son ex-compagnon, avec lequel elle n’était pas mariée civilement.

Elle a produit une attestation de suivi ambulatoire des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) datée du 25 mars 2021.

4.             Par courrier du 13 octobre 2021, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser sa demande d’octroi de permis de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai lui était imparti pour faire valoir son droit d’être entendu.

5.             Par courrier du 15 décembre 2021, Mme A______ s’est déterminée.

Suite à la plainte pénale déposée auprès du Ministère public le 20 juillet 2020, la procédure était toujours en cours. Dans ce cadre, elle avait sollicité l’audition de plusieurs témoins et par conséquent, une audience serait prochainement appointée. Dès lors, sa présence était indispensable afin de pouvoir participer à la procédure et être confrontée aux personnes dont elle avait demandé l’audition.

6.             Par ordonnance pénale du 30 juin 2022, M. B______ a été condamné à cent-cinquante jours-amende, avec sursis et délai d’épreuve de trois ans, ainsi qu’à une amende pour menaces, infraction à l’art. 116 al. 1 let. a à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et infraction à la loi fédérale sur les armes. Il a également été condamné à une amende pour voies de fait.

7.             Par courriel du 27 juillet 2022, le Ministère public a confirmé à l’OCPM que la présence de Mme A______ n’était plus nécessaire pour la procédure pénale.

8.             Par décision du 3 octobre 2022, l’OCPM a refusé d’octroyer à Mme A______ une autorisation de séjour et a prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 30 novembre 2022 pour quitter le territoire.

La durée du séjour de l’intéressée sur le territoire suisse ne saurait constituer un élément déterminant susceptible de justifier une suite favorable à sa demande. Celle-ci devait en effet être relativisée en lien avec le nombre d’années qu’elle avait passées dans son pays d’origine, étant relevé qu’elle était arrivée en Suisse il y avait moins de trois ans et qu’elle avait vécu toute sa vie en Macédoine du Nord. Elle ne pouvait par ailleurs se prévaloir d’aucune intégration sociale ou professionnelle, puisque qu’elle avait vécu au domicile de son ex-compagnon dès son arrivée en Suisse. Elle n’avait ainsi pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu’elle ne puisse plus raisonnablement envisager un retour dans son pays d’origine où résidait sa famille et ses proches et où elle disposait de ses attaches culturelles et sociales. Le fait qu’elle ait subi des violences de la part de son ex-compagnon ne saurait être un motif permettant à lui seul de constater l’existence d’un cas de rigueur. Dès lors, il n’avait pas été démontré à satisfaction de droit que la situation de Mme A______ relevait d’une situation représentant un cas d’extrême gravité.

9.             Par acte du 4 novembre 2022, Mme A______ a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, principalement, à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, subsidiairement, à son admission provisoire et à l’octroi d’une autorisation de séjour, le tout sous suite de frais et dépens.

À titre préalable, elle concluait, sur mesures provisionnelles, à la suspension de l’exécution de son renvoi en attentant l’issue de la procédure de recours.

Un renvoi dans son pays d’origine constituerait une double peine, dans la mesure où elle avait été victime de violences conjugales alors qu’elle vivait avec son compagnon. Un renvoi en Macédoine du Nord serait vécu comme un véritable déchirement, dès lors qu’elle vivait en Suisse depuis plus de trois ans et qu’elle s’y était constituée un cercle d’amis. Y résidant de manière paisible, il n’y avait aucune raison de la contraindre à partir. En outre, elle était respectueuse des valeurs et des lois suisses, savait bien s’exprimer en français et montrait un réel attachement pour la Suisse. Elle devait ainsi être autorisée à rester en Suisse le temps de la procédure de recours.

Au fond, elle remplissait toutes les conditions pour la reconnaissance d’un cas de rigueur, soit une situation de grave détresse personnelle et un état de santé précaire. Elle était arrivée en Suisse le 14 mai 2019 pour y rejoindre son compagnon, avait été victime de violences conjugales de sa part, pour lesquelles celui-ci avait été condamné par ordonnance pénale du 30 juin 2022, ordonnance qu’il n’avait pas contestée. Du jour au lendemain, elle s’était retrouvée sans logement et avait été recueillie par l’C______ à Genève. Elle était toujours suivie à l’UIMPV suite aux violences subies et bénéficiait d’un traitement médicamenteux majoré en janvier et février 2022 suite à une recrudescence de son état d’anxiété et à une péjoration de sa thymie en lien avec des facteurs de stress (procédure pénale).

Son renvoi n’était pas exigible dans la mesure où elle devait continuer à rester en Suisse pour poursuivre son traitement médical.

À l’appui de son recours, elle a notamment produit une attestation de suivi ambulatoire des HUG du 3 février 2022, à teneur de laquelle elle était suivi à l’UIMPV à raison d’une fois toutes les trois semaines. Son traitement médicamenteux était composé d’Escitalopram, de Bénocten et de Témesta en réserve.

10.         Le 9 janvier 2023, l’OCPM s’est déterminé sur le recours, concluant à son rejet. Il a produit son dossier.

Les arguments invoqués n’étaient pas de nature à modifier sa position. S’il n’entendait pas minimiser la violence subie par la recourante de la part de son ex-compagnon, celle-ci ne suffisait pas à lui permettre, sans autres considérations, d'être mise au bénéfice d’un titre de séjour. Arrivée en Suisse en mai 2019, la durée de son séjour était courte. Elle n’était pas insérée sur le marché du travail ni ne semblait prendre part à des activités sociales la mettant en contact avec la communauté. Elle émargeait totalement au budget de l’État depuis le 1er novembre 2020 et aucun élément au dossier n’indiquait qu’elle avait tissé des liens étroits avec la Suisse.

En l’absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, le facteur médical et les éventuelles difficultés de réintégration de l’intéressée dans son pays d’origine ne sauraient justifier, à eux seul, la reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité. En l’occurrence, selon l’attestation produite – datée du 3 février 2022 et non actualisée -, la recourante était suivie à l’UIMPV et prenait un traitement médicamenteux majoré en janvier et février 2022 suite à une recrudescence de son état d’anxiété et à une péjoration de sa thymie en lien avec des facteurs de stress liée à la procédure pénale. Or, la procédure pénale était aujourd’hui achevée et M. B______ avait été reconnu coupable des actes qui lui étaient reprochés. Si le traitement devait toutefois se poursuivre, la clinique privée de psychiatrie et l’University Hospital for Psychiatry à Skopje (Macédoine du Nord), offraient des consultations ambulatoires. Des médicaments à base de Lorazepapum (molécule du Temesta) et d’Escitalopram étaient disponibles. Il ne disposait pas d’information précise sur le Bénocten, mais s’agissant d’un médicament visant à traiter les troubles du sommeil, on pouvait partir du principe que d’autres médicaments du même genre existaient en Macédoine.

Sous l’angle des possibilités de réintégration sociale, la recourante avait vécu toute sa vie en Macédoine du Nord et était arrivée en Suisse à l’âge de quarante-huit ans. Outre le fait qu’il était contesté que son renvoi constituerait une « double peine » et qu’elle ne pourrait poursuivre son traitement, l’intéressée ne faisait pas état d’éléments qui empêcherait sa réintégration dans son pays d’origine.

11.         Le 6 mars 2023, la recourante a répliqué, persistant intégralement dans les termes et conclusions de son recours.

L’autorité intimée minimisait ses souffrances et l’impact psychologique suite aux menaces et aux violences qu’elle avait subies de la part de son ex-compagnon. Elle était toujours traumatisée et encore suivie par l’UIMPV.

Il était choquant que l’autorité intimée ait attendu l’issue de la procédure pénale pour rendre sa décision. En l’absence de décision sur l’octroi d’un permis de séjour en sa faveur dans un délai raisonnable, il lui avait été impossible de trouver du travail, ce qui ne lui saurait lui être reproché.

Quant à son renvoi, il était inexigible, dès lors qu’elle devait rester en Suisse pour y poursuivre son suivi psychologique.

12.         Par courrier du 15 mars 2023, l’OCPM a informé le tribunal ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             À titre préliminaire, la recourante demande à ce que l'exécution de son renvoi soit suspendue sur mesures provisionnelles. En d'autres termes, elle invoque l'effet suspensif du recours pour surseoir à l'exécution de la décision litigieuse.

4.             Selon l’art. 66 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours. Le tribunal peut restituer l'effet suspensif à la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose (art. 66 al. 3 LPA).

5.             En l'espèce, la décision litigieuse ne mentionne pas qu'elle aurait été déclarée exécutoire nonobstant recours. Dès lors, en l'absence d'une telle mention, la décision querellée dispose d'un effet suspensif automatique au sens de l'art. 66 al. 1 LPA. Il n'y a dès lors pas lieu d'ordonner de mesures provisionnelles à cet effet.

Le recours doit donc être déclaré sans objet sur ce point.

6.             La recourante conteste ensuite la décision de refus de l’OCPM dont elle demande l’annulation.

7.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

8.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

9.             La recourante fait grief d’une violation des art. 30 LEI et 31 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

10.         La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants de Macédoine du Nord.

11.         Les conditions d’entrée d’un étranger en Suisse sont régies par les art. 5 ss LEI.

Les dérogations aux prescriptions générales d’admission (art. 18 à 29 LEI) sont énoncées de manière exhaustive à l’art. 30 al. 1 LEI ; il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission dans le but de tenir compte des cas individuels d’extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs (let. b). En vertu de l’art. 30 al. 2 LEI, le Conseil fédéral en a fixé les conditions et la procédure dans l’OASA.

12.         L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte, notamment, de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

L'art. 58a al. 1 LEI précise que pour évaluer l'intégration, l'autorité compétente tient compte des critères suivants : le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant aussi entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

13.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; ATA/822/2021 du 10 août 2021 consid. 2b).

14.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/878/2022 du 30 août 2022 consid. 5b).

La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/ 122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).

15.         La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3).

16.         Selon la jurisprudence, le fait de renvoyer une femme seule dans son pays d'origine, où elle n'a pas de famille, n'est généralement pas propre à constituer un cas de rigueur, à moins que ne s'y ajoutent d'autres circonstances qui rendent le retour extrêmement difficile (ATF 128 II 200 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.2 ; 2A.582/2003 du 14 avril 2004 consid. 3.1 ; 2A.394/2003 du 16 janvier 2004 consid. 3.1). Un tel cas peut en revanche se présenter lorsque, aux difficultés de réintégration dues à l'absence de famille dans le pays d'origine, s'ajoute le fait que, contrainte de regagner ce pays, l'intéressée laisserait derrière elle une partie importante de sa proche parenté, tels que ses parents, ses frères et ses sœurs, appelés à demeurer durablement en Suisse, avec qui elle a partagé pendant longtemps les mêmes difficultés liées à son existence (arrêts du Tribunal fédéral 2A.92/2007 du 21 juin 2007 consid. 4.3 ; 2A.245/2004 précité consid. 4.2.2 ; 2A.340/2001 du 13 novembre 2001 consid. 4c), ou dans la situation de la mère d'un enfant mineur n'ayant plus aucun membre de sa famille dans son pays d'origine pour l'avoir, de surcroît, quitté dans des circonstances traumatisantes (arrêts du Tribunal fédéral 2A.245/2004 précité consid. 4.2.2 ; 2A.582/2003 précité consid. 3.1 ; 2A.394/2003 précité consid. 3.1). À l'inverse, une telle séparation pourra d'autant mieux être exigée que les perspectives de réintégration dans le pays d'origine apparaissent plus favorables (arrêts du Tribunal fédéral 2A.183/2002 du 4 juin 2002 consid. 3.2 ; 2A.446/1997 du 24 avril 1998 consid. 3b ; ATA/41/2022 du 18 janvier 2022 consid. 8c).

17.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5.4).

18.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).  La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur.

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée de séjour en Suisse (Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, LEtr, vol. 2, 2017, p. 269 et les références citées). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-7330/2010 du 19 mars 2012 consid. 5.3 ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269).

19.         S’agissant de l’intégration professionnelle, elle doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées).

20.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge de l’intéressé lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Cela étant, il ne faut pas perdre de vue qu’il est parfaitement normal qu'une personne ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Le fait qu'un ressortissant étranger se soit toujours comporté de manière correcte, qu'il ait tissé des liens non négligeables avec son milieu et qu'il dispose de bonnes connaissances de la langue nationale parlée au lieu de son domicile ne suffit ainsi pas pour qualifier son intégration socio-culturelle de remarquable (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-7467/2014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

21.         Selon la jurisprudence, des motifs médicaux peuvent, selon les circonstances, conduire à la reconnaissance d'un cas de rigueur lorsque la personne concernée démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une exception aux mesures de limitation (ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; ATA/915/2022 du 13 septembre 2022 consid. 6h).

En l'absence de liens d'une certaine intensité avec la Suisse, l'aspect médical et les éventuelles difficultés de réintégration de la personne concernée dans le pays d'origine ne sauraient justifier, à eux seuls, l'octroi d'un permis humanitaire pour cas de rigueur. Le cas échéant, ces critères ne peuvent en effet être pris en considération que dans le cadre de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de l'exécution du renvoi (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4125/2016 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1 ; ATA/915/2022 précité consid. 6h), étant relevé qu'un individu ne pouvant se prévaloir que d'arguments d'ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d'origine et souffrant de la même maladie (cf. ATA/895/2019 du 14 mai 2019 consid. 6f ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-7044/2014 du 19 juillet 2016 consid. 5.5.1 ; C-5710/2011 du 13 décembre 2013 consid. 5.1 ; F-4125/206 du 26 juillet 2017 consid. 5.4.1).

22.         Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d’un droit à l’autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l’inverse aurait pour effet de déduire de l’art. 96 LEI un droit à l’obtention ou au renouvellement de l’autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

23.         À Genève, la procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, le juge établissant les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l’on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d’autres moyens de preuve (art. 20 LPA).

Cette maxime n’est pas absolue et sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA) ; elle est ainsi relativisée par son corollaire, le devoir des parties de collaborer à l’établissement des faits (ATF 128 II 139 consid. 2b). Ce devoir comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où on peut raisonnablement l’exiger d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 130 II 425 consid. 6.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_464/2019 du 5 décembre 2019 consid. 4.1 ; ATA/11/2023 du 10 janvier 2023 consid. 4d et les références citées).

Le fardeau de la preuve est supporté par celui qui entend se prévaloir d’un droit (ATF 112 Ib 67 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/429/2010 du 22 juin 2010 consid. 4f). Il incombe à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’il est le mieux à même de connaître, notamment parce qu’ils ont trait spécifiquement à sa situation personnelle. En matière de droit des étrangers, l’art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l’étranger ou des tiers participants (arrêts 2C_787/2016 du 18 janvier 2017 consid. 3.1). Cette obligation a été qualifiée de « devoir de collaboration spécialement élevé » lorsqu’il s’agit d’éléments ayant trait à la situation personnelle de l’intéressé et qu’il connaît donc mieux que quiconque (arrêts du tribunal fédéral 1C_58/2012 du 10 juillet 2012 consid. 3.2 ; ATA/424/ 2016 du 24 mai 2016 consid. 4c et les références citées).

24.         La procédure administrative est aussi régie par le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/1198/2021 du 9 novembre 2021 consid. 3b).

25.         En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal doit constater que l’OCPM n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que la recourante ne satisfaisait pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d’un cas de rigueur.

La recourante affirme être arrivée à Genève en mai 2019. À ce jour, la durée de son séjour en Suisse est donc de quatre ans, durée qui est à l’évidence insuffisante pour justifier, à elle seule, l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Il doit par ailleurs être relevé que la recourante n’a jamais bénéficié d’un quelconque titre de séjour en Suisse et que depuis le dépôt de sa demande de régularisation, le 20 juillet 2020, son séjour se poursuit au bénéfice d’une simple tolérance. Elle ne peut dès lors tirer parti de la seule durée de son séjour en Suisse, qui doit en l'occurrence être fortement relativisée, notamment au regard du nombre d’année qu’elle a passé dans son pays d’origine, pour bénéficier d'une dérogation aux conditions d’admission.

Par ailleurs, son intégration apparaît à ce jour inexistante. En effet, la recourante n’a jamais exercé d’activité lucrative en Suisse et est entièrement aidée financièrement par l’Hospice général depuis le 1er novembre 2020. À cet égard, si la recourante invoque le fait qu’il lui était impossible de s’insérer sur le marché du travail faute de permis, elle ne démontre pas avoir entrepris la moindre démarche pour trouver un emploi et obtenir de l’autorité intimée une autorisation de travail provisoire. De plus, sa maîtrise du français n’est attestée par aucune pièce et il n’apparaît pas qu’elle soit investie d’une quelconque manière dans la vie associative ou culturelle genevoise. Si elle a certainement tissé des liens d’amitié lors de son séjour en Suisse comme elle l’allègue, il ne ressort pas du dossier qu’elle se serait créée des attaches sociales particulièrement étroites durant son séjour, ni que ses liens avec la Suisse dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu de n'importe quel étranger au terme d'un séjour d'une durée similaire.

S’agissant de sa réintégration dans son pays d’origine, la Macédoine du Nord, il faut souligner que la recourante y a vécu jusqu’à ses quarante-huit ans avant de quitter ce pays pour rejoindre son ex-compagnon en Suisse. Elle a ainsi passé toute son enfance, toute son adolescence, période décisive pour la formation de la personnalité, mais aussi une bonne partie de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, dont elle maîtrise la langue et la culture. Elle y a aussi certainement conservé un cercle d’amis et de connaissances, avec lequel elle pourra renouer.

S’agissant de son état de santé, d’après les attestations des HUG versées au dossier, la recourante souffre de troubles anxio-dépressifs en lien avec les violences subies. Au 3 février 2022, elle était encore suivie à l’UIMPV à raison d’une fois toutes les trois semaines et prenait un traitement composé d’Esitalopram, de Bénocten et de Témesta en réserve. Son traitement avait été majoré en janvier et février 2022 suite à une recrudescence de son état d’anxiété et à une péjoration de sa thymie en lien avec des facteurs de stress liés à la procédure pénale. Or, comme le relève l’autorité intimée, cette procédure est désormais terminée. Par ailleurs, il n’est pas démontré qu’un suivi psychologique serait encore nécessaire à ce jour, ni que celui-ci devrait nécessairement être effectué à Genève. En tout état, vu l'absence de liens particulièrement étroit avec la Suisse, l'aspect médical ne peut pas justifier à lui-seul la reconnaissance d'un cas de rigueur.

S'il est probable que la recourante se heurtera à des difficultés pour se réintégrer professionnellement dans son pays d’origine, elle ne démontre pas que celles-ci seraient plus importantes pour elle que pour n’importe lequel de ses concitoyens qui se trouverait dans une situation similaire. En particulier, elle ne démontre que sa prise en charge médicale dans son pays d’origine ne serait pas possible.

Enfin, sans vouloir minimiser les souffrances subies par la recourante, les violences dont elle a été victime de la part de son ex-compagnon ne peuvent constituer à elles seules un motif suffisant de délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, en particulier dans la mesure où elles l'affectent a priori de la même manière en Suisse qu'en cas de retour dans son pays d'origine.

26.         Ainsi, au vu de l'ensemble des circonstances, l'appréciation que l'autorité intimée a faite de la situation de la recourante sous l'angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA apparaît parfaitement admissible. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude d’appréciation conférée à l'OCPM, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

27.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée.

Elles ne disposent à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1 ; ATA/ 122/2023 du 7 février 2023 consid. 8a).

28.         En l’espèce, dès lors que l'autorisation de séjour sollicitée par la recourante lui a été refusée, l’OCPM devait ordonner son renvoi de Suisse en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI.

29.         Reste toutefois à déterminer si l’exécution de cette mesure est possible, licite et peut être raisonnablement exigée, étant précisé que la recourante sollicite, à titre subsidiaire, son admission provisoire en raison de l'inexigibilité de son renvoi.

30.         Le renvoi d'un étranger ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). Il n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Il n'est pas licite lorsqu'il serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Il n'est pas raisonnablement exigible s'il met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

Cette disposition s'applique notamment aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu'elles seraient, selon toute probabilité, condamnées à devoir vivre durablement et irrémédiablement dans un dénuement complet, et ainsi exposées à la famine, à une dégradation grave de leur état de santé, à l'invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emplois, et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6370/2020 du 23 décembre 2022 consid. 9.2 ; ATA/121/2023 du 7 février 2023 consid. 7).

31.         S'agissant spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine ou de provenance, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêts du Tribunal administratif fédéral D-6799/2017 du 8 octobre 2020 ; E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées). L'art. 83 al. 4 LEI ne confère pas un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance de l'étranger concerné, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/1455/2017 du 31 octobre 2017 consid. 10d).

32.         En l’espèce, le tribunal considère que la recourante n’a pas établi l’existence d’obstacles à son renvoi.

En particulier, rien au dossier ne permet de retenir que le suivi et le traitement dont elle aurait encore besoin à ce jour ne seraient pas disponibles dans son pays d’origine, étant relevé que selon les consultings du SEM figurant au dossier, des traitements psychiatriques sont prodigués en ambulatoire par la clinique privée de psychiatrie et l’Hôpital universitaire de psychiatrie à Skopje. De plus, les médicaments à base de Lorazepapum (molécule du Temesta) et d’Escitalopram sont disponibles. S’agissant du Bénocten, médicament utilisé pour traiter les troubles du sommeil, comme le relève l’autorité intimée, on peut partir du principe qu’il existe d’autre médicaments du même genre en Macédoine du Nord, dans la mesure où les troubles visés sont assez courants. Par ailleurs, bien que le tribunal ne minimise pas les problèmes de santé psychiques affectant la recourante, il n’apparaît pas que ceux-ci seraient d’une gravité telle qu’un retour en Macédoine du Nord apparaîtrait, d’un point de vue médical, insoutenable.

Le grief doit donc être écarté et la décision litigieuse confirmée.

33.         En conséquence, le recours sera rejeté.

34.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 500.- versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

35.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 4 novembre 2022 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 3 octobre 2022 ;

2.             le déclare sans objet s’agissant de la demande de mesures provisionnelles ;

3.             le rejette pour le surplus ;

4.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 700.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais de CHF 500.- ;

5.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière