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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2093/2022

JTAPI/180/2023 du 13.02.2023 ( OCIRT ) , REJETE

Descripteurs : ACTIVITÉ LUCRATIVE;AUTORISATION DE SÉJOUR;INTÉRÊT ÉCONOMIQUE;PRIORITÉ(CIRCULATION)
Normes : LEI.18; LEI.30.al1.letg; OASA.41
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2093/2022

JTAPI/180/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 13 février 2023

 

dans la cause

 

A______ et Monsieur B______, représentés par Me Bénédicte AMSELLEM-OSSIPOW, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'INSPECTION ET DES RELATIONS DU TRAVAIL

 


EN FAIT

1.             Les faits qui suivent résultent de la présente procédure, ainsi que de la procédure A/1______ menée en parallèle par le tribunal de céans, qui oppose Monsieur B______ et l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après: OCPM), et dont il sera question plus bas.

2.             A______ est une association qui ne figure pas au registre du commerce genevois. Selon ses explications, membre de la D ______, elle soutient des projets dans des pays du Sud et sensibilise le public genevois sur des thématiques inhérentes au développement. Elle collabore étroitement avec la fondation suisse C______, tout en gardant son indépendance.

À teneur des informations disponibles sur son site internet (https://www.______) consulté le 2 février 2023, au Nord comme au Sud, elle se concentre notamment sur l’exploitation responsable de ressources extractives, allant d’une chaîne de production équitable et durable à la transparence financière des revenus. Au Sud, elle soutient financièrement des projets d’agroécologie et de renforcement des capacités des populations rurales en Tanzanie, au Niger et en Guinée-Bissau, fait leur suivi et remonte certaines problématiques pertinentes sur la place genevoise, en collaboration étroite avec la D______, gage de qualité à Genève. Au Nord, elle s’efforce d’informer, sensibiliser et lutter pour ses convictions au travers de conférences, de partenariats et de travail média sur des enjeux internationaux de développement (cycle de conférences sur l’huile de palme, les industries extractives et l’alimentation). Elle réalise également des études pour appuyer ses travaux. Elle relaie et soutient des initiatives publiques qui impactent Genève, la Suisse et le monde.

3.             M. B______, né le ______ 1976 est ressortissant du Tchad.

Arrivé en Suisse le 6 septembre 2008 et mis au bénéfice d’un permis de séjour pour études régulièrement renouvelé jusqu’au 31 décembre 2020, il a obtenu une maîtrise universitaire en études du développement à l’Université de Genève en septembre 2010, ainsi qu’une maîtrise universitaire en lettres et sciences humaines en septembre 2013 et un doctorat en sciences humaines-sociologie le 12 novembre 2020 auprès de l’Université de Neuchâtel.

Parallèlement à ses études, il a exercé divers emplois, au titre d’activité accessoire, au bénéfice d’autorisations provisoires limitées à un certain nombre d’heures hebdomadaires.

Ainsi, C______, dont le siège se trouve à Berne, a notamment sollicité une autorisation en vue de l’employer, à titre accessoire, pour la réalisation d’une étude dans le domaine de la coopération au développement du 1er au 31 décembre 2015 à hauteur de quinze heures par semaine, moyennant un salaire brut de CHF 3'000.-.

4.             Par courrier du 20 septembre 2018, M. B______, se prévalant notamment du fait qu’il bénéficiait d’un permis de séjour depuis désormais dix ans, a sollicité auprès de l'OCPM, la délivrance d’une autorisation d’établissement.

5.             Suite à la réponse de l’OCPM - négative compte tenu du fait qu’il était titulaire d’une autorisation de séjour strictement temporaire -, il a requis, par courriel du 10 janvier 2019, l’octroi d’une autorisation à caractère durable. Venant d’un pays fragile et imprévisible, il pensait bénéficier de circonstances atténuantes.

6.             Par courrier du 19 février 2019, M. B______ a réitéré sa demande de délivrance de permis de séjour à caractère durable auprès de l’OCPM.

7.             Par courriel du 15 juillet 2019, l’OCPM a informé M. B______ que sa requête de titre de séjour durable n’était pas recevable. Il lui appartenait d’abord d’obtenir le diplôme visé, qui constituait le but de son séjour en Suisse, puis de déposer, cas échéant, une demande de permis de séjour pour recherches d’emploi valable six mois, suite à quoi un éventuel employeur pourrait requérir auprès de l’office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après: OCIRT) l’octroi d’un permis avec activité lucrative en sa faveur.

8.             Par pli du 15 décembre 2020, il a sollicité auprès de l’OCPM son admission durant six mois en vue de trouver un emploi au sens de l’art. 21 al. 3 LEI.

9.             M. B______ a bénéficié d’une autorisation de séjour L en vue de la recherche d’un emploi, valable du 12 novembre 2020 au 11 mai 2021.

10.         Il a demandé, par requête du 29 avril 2021 reçue le 4 mai 2021 par l’OCPM, le renouvellement de ce permis, étant précisé qu’il s’était vu proposer un emploi de coursier à vélo, comme le confirmait le contrat de travail joint, à compter du 30 novembre 2020.

11.         Par courrier du 13 juillet 2021, l’OCPM a informé M. B______ de son intention de refuser l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur et de prononcer son renvoi de Suisse, tout en lui impartissant un délai de trente jours pour faire usage de son droit d’être entendu.

La requête déposée en vue de l’employer en qualité de coursier avait été retirée le 6 juillet 2021, ce qui l’avait rendue sans objet. Par ailleurs, dès lors qu’il avait terminé ses études, le but de son séjour était atteint.

12.         Par formulaire du 29 juillet 2021, A______ a sollicité auprès de l’OCPM la délivrance d’une autorisation de séjour avec activité lucrative en vue d’employer M. B______ en qualité de collaborateur scientifique/chercheur du 1er août 2021 au 31 janvier 2022 à un taux d’occupation de 60 %, moyennant un salaire mensuel brut de CHF 3'323.-.

Le contrat de travail y relatif précisait que l’engagement du précité avait pour but l’appui, d’une part, à la réalisation d’une étude sur le commerce de l’or illégal en Afrique et, d’autre part, au projet d’extraction minière de l’or de A______.

13.         Faisant suite à une demande de l’OCIRT du 12 août 2021 tendant à déterminer si C______ bénéficiait de son soutien, Monsieur E______, pour le compte du F______ (ci-après : F______), a précisé, par courriel du 12 août 2021, que C______, dont le secrétariat se trouvait à Lausanne, était une fondation suisse importante dans le domaine de la coopération internationale. Elle disposait également à Genève d’une petite structure de soutien, constituée sous la forme de l’association A______, qui était un acteur local de la coopération internationale, membre de la D ______. A______ était néanmoins peu active au sein de la Genève internationale et ne disposait pas de profil auprès du F______, de sorte qu’elle ne bénéficiait pas de son soutien.

14.         Par pli du 16 août 2021, A______ a indiqué à l'OCIRT, auquel sa requête avait été transmise pour raison de compétence, qu’au vu des avantages que présentait pour elle la candidature de M. B______, les démarches en vue de trouver un autre candidat ne lui avaient pas parues utiles. De plus, dès lors qu’il était urgent de remplacer une collaboratrice partie fin juin, elle avait privilégié une personne connue et qualifiée.

Dans le cadre de l’étude actuellement réalisée en collaboration avec la fondation C______ à Berne sur le trafic d’or illégal en Afrique, le précité était la personne la plus à même de remplir l’ensemble des critères demandés. Membre du pool d’experts bénévoles en gestion des ressources extractives de cette dernière depuis de nombreuses années, il disposait d’un doctorat dans le domaine des industries extractives. Il connaissait la thématique de l’or illégal en Afrique et les régions étudiées, notamment le Sahel et le Tchad, son pays d’origine. De plus, bénévole au sein de A______ depuis près de cinq ans, il faisait partie du comité de gestion des projets et participait régulièrement aux séances de comité directeur, aux assemblées générales, aux conférences et événements et avait réalisé une conférence en ligne sur les industries extractives en 2020. Elle avait déjà collaboré avec M. B______ en 2015 dans le cadre d’une étude et ce dernier avait accompli un travail remarquable. Ses compétences précises et uniques parfaitement adaptées, sa proximité géographique, sa connaissance approfondie de l’institution et ses qualités humaines en faisaient le parfait candidat.

Étaient joints divers documents, notamment un avenant au contrat de travail précédemment produit, à teneur duquel le taux de travail de M. B______ serait de 100 % du 16 août 2021 au 31 janvier 2022 pour un salaire mensuel brut de CHF 3'680.- payable treize fois l’an.

15.         Par décision du 1er septembre 2021, l’OCIRT a refusé de délivrer une autorisation de séjour avec activité lucrative en faveur de M. B______. L’admission du précité en vue de l’exercice d’une activité lucrative ne servait pas les intérêts de la Suisse et l’ordre de priorité n’avait pas été respecté, dès lors qu’il n’avait pas été démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d’un pays de l’Union européenne (ci-après : UE) et de l’Association européenne de libre échange (ci-après : AELE) n’avait pu être trouvé. En outre, l’intéressé ne bénéficiait pas des conditions de rémunération usuelles dans la branche à Genève.

16.         Par courriers des 15 septembre et 2 octobre 2021, A______ a demandé à l’OCIRT de revoir sa position suite à la décision du 1er septembre 2021.

Le poste de collaborateur scientifique concerné servait les intérêts de la Suisse dans la mesure où ce pays faisait face à un risque de réputation. Plusieurs entreprises de négoces et de traitement de l’or basées en Suisse faisaient l’objet d’une attention particulière de la part de différents investigateurs, mettant à mal l’image du pays. La réputation de la Suisse était donc fortement impactée par la gouvernance dont ces entreprises faisaient preuves sur le sol helvétique et dans les pays d’exportation et l’étude concernée permettrait plus de transparence en proposant des mesures correctives, cas échéant. Elle avait publié une offre d’emploi sur le site www.travail.swiss pour ce poste de collaborateur scientifique. Toutefois, aucun candidat de l’UE/AELE correspondant au profil adéquat et à ses besoins n’avait été trouvé. Elle s’engageait à se conformer aux conditions de rémunération usuelles.

17.         Par décision du 5 octobre 2021, l’OCPM, se référant à la décision de l’OCIRT du 1er septembre 2021 précitée, a refusé la prolongation de l’autorisation de séjour en vue de l’exercice d’une activité lucrative en faveur de M. B______, a prononcé son renvoi et lui a imparti un délai au 7 novembre 2021 pour quitter la Suisse.

Le précité a interjeté recours contre cette décision le 5 novembre 2021 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). La procédure y relative - enregistrée sous le n° de cause A/1______ - a été suspendue par décision du 5 août 2022 (DITAI/2______) jusqu’à ce que la présente procédure soit en état d’être jugée.

Par jugement du 13 février 2023, le tribunal a rejeté le recours interjeté dans la cause A/1______ (JTAPI/3______).

18.         Par requête du 23 mars 2022, A______ et M. B______ ont sollicité auprès de l’OCIRT, sous la plume de leur conseil commun, la reconsidération de la décision du 1er septembre 2021.

Prenant en compte la motivation de cette décision négative, A______ avait procédé à des recherches de candidats alternatifs avait adapté les conditions salariales y relatives et réitérait son souhait d’engager M. B______ durant six mois à temps plein pour un salaire de CHF 5'538.-.

L’engagement de l’intéressé servait les intérêts économiques de la Suisse. Au bénéfice d’un doctorat portant sur l’économie extractive en Afrique, plus précisément au Tchad, il avait également travaillé sur le rôle de l’or dans le financement du terrorisme au Sahel. L’étude pour laquelle son engagement était sollicité, qui portait notamment sur l’impact de l’extraction de l’or sur le continent africain et visait à établir des recommandations à cet égard, permettrait d’évaluer le risque réputationnel de la Suisse et, cas échéant, de proposer des mesures correctives en lien avec les sociétés d’importances internationales liées à l’économie extractive sur le continent africain dont le siège se trouvait en Suisse. A______ était reconnue pour la défense de ces thématiques de coopération au développement dans le cadre de la Genève internationale et ne ménagerait aucun effort pour la promotion de ces causes pour la Suisse. Dans cette perspective, le processus d’obtention du statut consultatif auprès des K______, enclenché quelques mois auparavant, démontrait l’engagement de A______ en vue d’atteindre ces objectifs.

Plusieurs pièces étaient jointes, notamment :

-          un accusé de réception du 14 septembre 2021 émanant de la messagerie électronique d’G______ informant A______ que l’annonce du poste vacant de collaborateur scientifique concerné avait été validée par l’office régional de placement (ORP) et activée dans Job-Room et dans le système de placement du service public de l’emploi (PLASTA). Ce poste étant soumis à obligation d’annonce, seuls les demandeurs d’emploi inscrits auprès du service public de l’emploi y auraient accès durant cinq jours ouvrables et il ne pourrait être mis au concours par d’autres canaux qu’après le 21 septembre 2021 ;

-          copie d’une candidature - émanant du titulaire d’un doctorat en sciences politiques - reçue par A______ ainsi que le courrier adressé le 19 octobre 2021 à ce candidat l’informant que, suite à l’entretien qui s’était déroulé par vidéoconférence, sa candidature n’avait pas été retenue ;

-          une lettre de recommandation élogieuse établie en anglais le 1er mars 2022 par Madame H______, Associate Economics Affairs Officer de la I______, en faveur de M. B______, qui avait œuvré sous sa supervision comme expert international dans le cadre du projet « Integrated National Financing Framework » en lien avec les « Illicit Financial Flows and their impact on domestic resources ». À ce titre, il avait notamment dirigé une recherche sur le rôle de l’or dans le financement du terrorisme au Sahel.

19.         Faisant suite à une demande de renseignements complémentaires de l’OCIRT, A______ et M. B______ ont produit, sous la plume de leur conseil, par pli du 11 avril 2022, les bilans et comptes de résultats 2020 et 2021 ainsi que le budget 2022 de A______, dont il ressortait que le salaire de M. B______, porté à CHF 5'833.- par mois afin de correspondre aux usages locaux, pouvait être assuré par A______. Cette dernière avait considéré que l’annonce postée était suffisante et, si ceci devait poser problème, une autorisation de séjour de six mois était requise sur la base des art. 30 al. 1 let. g de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et 41 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), de sorte que, le cas échéant, leur demande devrait être transmise à l’OCPM. À l’issue de son contrat avec A______, M. B______ comptait rentrer au Tchad afin de faire bénéficier ce pays de son expertise.

20.         Par décision du 12 avril 2022 adressée à A______ et non à son conseil nonobstant l’élection de domicile valablement communiquée à l’OCIRT, cet office, après nouvel examen du dossier, a refusé de délivrer l’autorisation de séjour de courte durée de type permis L avec activité lucrative requise. L’admission sollicitée ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse. L’ordre de priorité n’avait pas été respecté et il n’avait pas été démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant UE/AELE n’avait pu être trouvé.

21.         Par courriel du 14 avril 2022, l’OCIRT, se référant à sa décision négative du 12 avril 2022, a informé A______ et M. B______ que l’examen de l’art. 41 OASA, dont l’application avait été requise à titre subsidiaire, relevait de sa compétence et non de celle de l’OCPM. Partant, un délai de quinze jours leur était imparti pour compléter le dossier et fournir tout élément susceptible de démontrer que les conditions d’application de cette disposition étaient remplies, sachant que l’OCIRT s’était déjà prononcé sur l’intérêt économique de leur requête.

22.         Par décision du 26 avril 2022 adressée cette fois-ci au conseil de A______ et de M. B______, l’OCIRT a refusé de délivrer l’autorisation de séjour de courte durée de type permis L avec activité lucrative, pour les motifs invoqués dans sa décision du 12 avril 2022.

23.         Par décision du 28 avril 2022 - annulant et remplaçant les décisions des 12 et 26 avril 2022 -, l’OCIRT a, après nouvel examen, maintenu sa décision de refus, motifs pris, à nouveau, du fait que l’admission de M. B______ ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse, que l’ordre de priorité n’avait pas été respecté et qu’il n’avait pas été démontré qu’aucun travailleur en Suisse ou ressortissant UE/AELE n’avait pu être trouvé.

24.         Le conseil de A______ et M. B______ a soutenu, par correspondance du 29 avril 2022 adressée à l’OCIRT, que les conditions d’octroi d’une autorisation de travail sur la base des art. 30 al. 1 let. g LEI et 41 OASA étaient réalisées.

Le contrat de travail conclu entre les précités entrait dans le cadre d’un échange scientifique entre la Suisse et l’Afrique portant sur la problématique de l’extraction d’or, secteur stratégique pour le territoire helvétique. La condition du logement approprié était remplie. Il ressortait de l’article de presse publié sur Swissinfo – joint – qu’environ deux tiers de l’or mondial était affiné en Suisse, pays qui possédait à lui seul quatre des plus grandes raffineries du monde. La Suisse était toutefois en retard et faisait souvent face à des critiques de la part d’institutions et d’organisations non gouvernementales (ci-après : ONG) de défense de l’environnement et des droits humains. Selon Monsieur J______, professeur honoraire de droit pénal de l’université de Bâle interrogé dans le cadre de cet article, cette position de grande puissance mondiale impliquait une grande responsabilité, car l’exploitation de l’or s’accompagnait de son lot de risques et de problèmes.

Étaient notamment joints :

-          Un nouveau formulaire M de demande de titre de séjour avec activité lucrative établi le 28 avril 2022 par M. B______ en vue d’œuvrer en faveur de A______ en qualité de collaborateur scientifique à temps plein moyennant un salaire mensuel brut de CHF 6'740.-, pour une durée de six mois dès obtention du permis requis ;

-          Le contrat de travail conclu entre A______ et M. B______ le 10 mars 2022 précédemment produit, sur lequel figurait la mention manuscrite d’un salaire mensuel brut désormais porté à CHF 6'740.- ;

-          Un document de deux pages rédigé en anglais intitulé « K______ contract for the services of a consultant or individual contractor » conclu entre les K______ et M. B______. Ce contrat devait prendre effet le 7 février 2022 et expirer dès que les services de consultant international prévus auraient été fournis mais, au plus tard le 31 mai 2022, moyennant un salaire total de CHF 9'521.-.

25.         Interpellé par l’OCIRT le 6 mai 2022 quant à la question de savoir si le contenu du courriel du 12 août 2021 demeurait pertinent à ce jour au regard de la nouvelle demande déposée par A______, M. E______, pour le compte du F______, a répondu par l’affirmative le 10 mai 2022.

26.         Par décision du 25 mai 2022, l’OCIRT a refusé de délivrer le permis de séjour de courte durée de type permis L avec activité lucrative requis en faveur de M. B______ et a retourné le dossier de ce dernier à l’OCPM. La demande y relative ne s’inscrivait pas dans un programme d’échange. Elle ne servait pas les intérêts économiques de la Suisse et l’ordre de priorité n’avait pas été respecté.

27.         Par acte du 27 juin 2022 accompagné de pièces, A______ et M. B______, sous la plume de leur conseil, ont interjeté recours, sous la plume de leur conseil, auprès du tribunal, à l’encontre de la décision rendue par l’OCIRT le 25 mai 2022. Ils ont conclu, préalablement, à la comparution personnelle des parties et, principalement, à l’admission du recours et au renvoi du dossier à l’OCIRT pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens.

La demande d’autorisation déposée le 29 avril 2022 remplissait les conditions posées par les art. 30 LEI et 41 OASA, dès lors qu’elle visait à permettre la réalisation d’une étude sur les conditions de l’extraction de l’or en Afrique, par une personne issue de ce continent et titulaire d’un doctorat de l’université de Neuchâtel. De plus, la demande concernée émanait d’une ONG qui se consacrait précisément à développer les échanges entre l’Afrique et la Suisse, notamment dans les domaines économiques et scientifiques.

Il était surprenant que l’intérêt économique de la Suisse à la recherche concernée soit nié, compte tenu de l’importance stratégique de l’or dans le cadre des échanges économiques internationaux, en particulier pour la Suisse. Comme cela ressortait de l’article de Swissinfo précédemment produit, la Suisse était en retard dans ce domaine et les raffineurs helvétiques faisaient souvent face à des critiques de la part d’institutions et d’ONG. Par conséquent, l’intérêt économique de la Suisse consistait à se prémunir d’un risque réputationnel qui pourrait lui coûter très cher et à développer des bonnes pratiques. Enfin, l’art. 41 OASA n’exigeait pas le respect de l’ordre de priorité.

28.         Dans ses observations du 29 août 2022, l’OCIRT a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée, sous suite de frais.

29.         Par réplique du 23 septembre 2022, les recourants ont sollicité l’audition du Prof. J______ et de M. E______, tout en persistant dans leurs conclusions.

L’intérêt économique de la Suisse était rempli. La crise géopolitique actuelle et ses répercussions sur le plan national et international, s’agissant notamment des matières premières, démontrait que le secteur de l’extraction et de l’approvisionnement en ressources relevait d’une importance stratégique pour la Suisse, notamment concernant l’or, pour lequel ce pays constituait une plateforme de négoce de premier ordre. Le risque réputationnel engagé par la Suisse, qui ne pouvait être nié, était d’une importance capitale, surtout pour un petit pays dont l’économie était constituée, pour une part importante, du négoce des matières premières. Ne pas l’envisager équivalait à accepter le risque d’une réputation ternie et celui de devoir subir des pressions, voire des sanctions, sur le plan international, ce que l’audition du Prof. J______ permettrait de le démontrer.

Les conditions de l’art. 41 OASA étaient remplies. S’agissant notamment du critère de la réciprocité, le F______ décrivait A______ comme un acteur local de la coopération internationale. Selon le dictionnaire en ligne Le Robert, les définitions de la coopération étaient : 1) action de participer à une œuvre commune, 2) politique d’entente et d’échanges culturels, économiques ou scientifiques entre États ; spécialement aide au développement de nations moins développées. Ainsi, en tant qu’acteur de la coopération internationale, A______ avait précisément pour cadre les échanges scientifiques et culturels. L’importance de la réciprocité et des échanges dans les projets menés par A______ ressortait également des missions et des projets menés par cette dernière. Le fait qu’il s’agissait d’une petite structure n’était d’aucune pertinence. Le poste visé s’inscrivait dans le cadre du travail de coopération mené par A______. L’organisation à Genève d’une conférence sur l’or africain était également prévue à des fins d’information et de sensibilisation. Par conséquent, le mandat destiné à M. B______ relevait bien d’un échange scientifique et, si nécessaire, l’audition de M. E______ était requise à ce propos.

30.         Par duplique du 18 octobre 2022, l’OCIRT a persisté dans ses conclusions.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCIRT en matière de marché du travail (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives ainsi que le contenu des pièces versées aux dossiers seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités).

6.             À titre préalable, les recourants sollicitent la comparution personnelle des parties ainsi que l’audition du Prof. J______ et de M. E______ en qualité de témoins.

7.             Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

Le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières ou de mettre un terme à l’instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1).

Toutefois, ce droit ne confère pas le droit d’être entendu oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2021 du 17 décembre 2021 consid. 3.2 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA).

8.             En l’espèce, le dossier contient les éléments utiles permettant au tribunal de statuer en connaissance de cause sur le recours, de sorte qu'il ne se justifie pas de donner suite aux offres de preuve formulées par les recourants. En effet, tant ces derniers que l’autorité intimée ont eu la possibilité de faire valoir leurs conclusions, arguments et moyens de preuve dans le cadre de leurs recours et réplique, respectivement dans leurs observations et duplique. Les recourants n'expliquent pas quels éléments la procédure écrite ne leur aurait pas permis de porter à la connaissance du tribunal ou d'exprimer de manière complète. Pour le surplus, il n’apparaît pas que l’audition, en qualité de témoin, du Prof. J______, dont une déclaration est reprise dans un article de presse cité et produit par les recourants, soit nécessaire pour permettre au tribunal d'apprécier la portée de son point de vue dans le cadre de la présente procédure. Il en va de même de l’audition de M. E______, étant rappelé que ce dernier a déjà fait état de la position du F______ s’agissant de A______ dans un courriel du 12 août 2021 puis confirmé celle-ci, sur requête de l’OCIRT, dans un nouveau courriel du 10 mai 2022.

Partant, les requêtes d’actes d’instruction, en soi non obligatoires, seront rejetées.

9.             Selon l'art. 11 al. 1 LEI, tout étranger qui entend exercer en Suisse une activité lucrative doit être titulaire d'une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour ; il doit la solliciter auprès de l'autorité compétente du lieu de travail envisagé.

Les conditions d'octroi d'une autorisation de travail sont régies par la LEI et ses ordonnances d'application, ainsi que, conformément à l'art. 89 OASA, par les directives émises par le SEM (Directives et circulaires, Séjour avec activité lucrative, état au 1er février 2023 ; ci-après : directives LEI), qui ne lient pas le juge, mais dont celui-ci peut tenir compte pour assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré, pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/1660/2019 du 12 novembre 2019 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 ; ATA/866/2018 du 28 août 2018 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015).

10.         À teneur de l'art. 18 LEI, un étranger peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative salariée aux conditions suivantes : son admission sert les intérêts économiques du pays (let. a), son employeur a déposé une demande (let. b) et les conditions fixées aux art. 20 à 25 LEI sont remplies (let. c), notamment les exigences relatives à l'ordre de priorité (art. 21 LEI), les conditions de rémunération et de travail (art. 22 LEI), ainsi que les exigences portant sur les qualifications personnelles requises (art. 23 LEI).

Ces conditions sont cumulatives (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b et les arrêts cités).

11.         Selon l'art. 30 al. 1 let. g LEI, il est notamment possible de déroger aux conditions d’admission (art. 18 à 29 LEI) dans le but de simplifier les échanges internationaux dans les domaines économique, scientifique et culturel ainsi que la formation professionnelle et la formation professionnelle continue.

12.         L’art. 41 OASA précise que des autorisations de séjour ou de courte durée peuvent être accordées en vue de faciliter les échanges internationaux de nature économique, scientifique et culturelle si : a. l'échange sert les intérêts économiques du pays (art. 18 let. a LEI) ; b. il existe une demande d'un employeur (art. 18 let. b LEI) ; les nombres maximums sont respectés (art. 20 LEI) ; les conditions de rémunération et de travail sont remplies (art. 22 LEI) ; les qualifications personnelles sont prises en considération (art. 23 LEI) et le logement est approprié (art. 24 LEI).

13.         Les directives LEI (par. 4.4.7, p. 40) précisent, s’agissant des échanges internationaux visés par l’art. 41 OASA, que « Les étrangers doivent pouvoir venir temporairement en Suisse pour y suivre des formations et des formations continues, ou pour participer à des programmes d'échanges, organisés de façon bilatérale et multilatérale (par ex. programmes d'échange pour enseignants organisés par les cantons). Ces programmes sont mis en place par des organisations chargées de soutenir les échanges entre jeunes et les échanges de nature économique, scientifique et culturelle au niveau international. Les projets de particuliers ne sont admis que dans des cas d’exception dûment fondés et s’il est garanti que les principes de l’échange figurant à l’art. 41 OASA seront respectés. Une personne ne peut être autorisée à exercer une activité lucrative en vertu de l’art. 41 OASA que si l’échange constitue le but principal du séjour. Le principe de réciprocité et le caractère temporaire du séjour suivi du départ jouent ici un rôle essentiel. Les étrangers qui souhaitent avant tout travailler ne peuvent venir en Suisse à ce titre. En règle générale, des autorisations de séjour de courte durée (art. 19 al. 1 OASA) sont alors octroyées. Des autorisations de séjour (art. 20 al. 1 OASA) ne peuvent être délivrées que dans des cas dûment motivés pour lesquels un séjour de plusieurs années se justifie d'emblée. ».

14.         En l’espèce, A______, association basée à Genève, souhaite engager M. B______ - titulaire de plusieurs titres universitaires, dont un doctorat, délivrés par des universités suisses et actuellement domicilié dans le canton et sans emploi - en qualité de collaborateur scientifique pour effectuer, durant six mois, une étude sur le commerce de l’or illégal en Afrique, laquelle aurait notamment pour but d’établir des recommandations y relatives. Or, comme précisé par la directive LEI précitée, les art. 30 al. 1 let. g LEI et 41 OASA ont pour but de permettre à des étrangers de venir temporairement en Suisse pour y participer à des programmes d’échanges organisés de façon bilatérales ou multilatérales. Sont notamment cités à titre d’exemple des programmes d’échange pour enseignants organisés par les cantons. In casu, il ne s’agit nullement d’un échange bilatéral ou multilatéral international, comme cela aurait pu être le cas si l’intéressé avait œuvré, à l’étranger, pour une société, un centre de formation ou une entité ayant un accord avec une société ou une institution suisse visant à permettre des échanges réciproques entre eux. Il s’agit ici uniquement d’un employeur qui souhaite engager un collaborateur étranger durant six mois, comme tend d'ailleurs à le confirmer la première demande faite en faveur du recourant par la recourante le 29 juillet 2021. Le fait que la recherche destinée à être accomplie par M. B______ se rapporte, sur le fond, à une thématique relative à un pays étranger et pourrait éventuellement avoir des conséquences pour d’autres pays, ne permet nullement de retenir que l’engagement du précité se déroulerait, quant à la forme, dans le cadre d’un échange international de connaissances. En outre, le principe de réciprocité, qui, selon les directives précitées, joue un rôle essentiel dans la qualification de programme d’échanges, n’est pas davantage rempli ici, dès lors qu’il n’a pas été démontré, ni même allégué, que la réalisation de l’étude concernée pour le compte de A______ donnerait lieu à une quelconque réciprocité de la part de qui que ce soit.

En conclusion, il sera retenu que la requête refusée ne s’inscrit pas dans un programme d’échange organisé de manière bilatérale ou multilatérale par une organisation chargée de soutenir les échanges de nature scientifique au niveau international et que la demande ne prévoit aucune réciprocité. Partant, les conditions prévues par les art. 30 al. 1 let. g LEI et 41 OASA n’étant pas remplies, c’est à bon droit que l’autorité intimée a refusé de délivrer un permis de séjour avec activité lucrative à M. B______ à ce titre.

15.         Reste à déterminer si l’intéressé remplit les conditions ordinaires de délivrance d’un titre de séjour avec activité lucrative.

16.         En raison de sa formulation potestative, l'art. 18 LEI – cité supra - ne confère aucun droit au requérant (arrêts du Tribunal fédéral 2C_819/2C_798/2018 du 17 septembre 2018 consid. 4.1 ; 2D_4/2015 du 23 janvier 2015 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b) et les autorités compétentes bénéficient d'un large pouvoir d'appréciation dans le cadre de son application (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.2 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_860/2011 du 25 octobre 2011 consid. 2). De même, en tant qu'employeur, la requérante ne dispose d'aucun droit à engager ce dernier en vue de l'exercice d'une activité lucrative en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2D_57/2015 du 21 septembre 2015 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 3 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5b).

17.         La notion d'« intérêt économique du pays », formulée de façon ouverte, concerne au premier chef le domaine du marché du travail. Il s'agit, d'une part, des intérêts de l'économie et de ceux des entreprises. D'autre part, la politique d'admission doit favoriser une immigration qui n'entraîne pas de problèmes de politique sociale, qui améliore la structure du marché du travail et qui vise à plus long terme l'équilibre de ce dernier (Message du Conseil fédéral du 8 mars 2002 concernant la loi sur les étrangers, in FF 2002 3469 ss, p. 3485 s. et 3536). En particulier, les intérêts économiques de la Suisse seront servis lorsque, dans un certain domaine d'activité, il existe une demande durable à laquelle la main d'oeuvre étrangère en cause est susceptible de répondre sur le long terme (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-5912/2011 du 26 août 2015 consid. 7.1 ; C-5420/2012 du 15 janvier 2014 consid. 6.1 et les références citées ; C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 5 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5d ; ATA/187/2018 du 27 février 2018 consid. 4a ; ATA/1018/2017 du 27 juin 2017 consid. 4c). L'art. 3 al. 1 LEI concrétise le terme en ce sens que les chances d'une intégration durable sur le marché du travail suisse et dans l'environnement social sont déterminantes. L'activité économique est dans l'intérêt économique du pays si l'étranger offre par là une prestation pour laquelle il existe une demande non négligeable et qui n'est pas déjà fournie en surabondance (cf. ATA/896/2018 du 4 septembre 2018 consid. 6b ; Peter UEBERSAX in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. 2 : LEtr, 2017, p. 145 s. et les références citées).

Il convient de tenir compte en particulier de la situation sur le marché du travail, de l'évolution économique durable et de la capacité de l'étranger concerné à s'intégrer. Il ne s'agit pas de maintenir une infrastructure avec une main-d'œuvre peu qualifiée disposée à travailler pour de bas salaires, ni de soutenir des intérêts particuliers. Par ailleurs, les étrangers nouvellement entrés dans le pays ne doivent pas faire concurrence aux travailleurs en Suisse en provoquant, par leur disposition à accepter de moins bonnes conditions de rémunération et de travail, un dumping salarial et social (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5074/2018 du 25 juin 2020 consid. 5.3 ; F-4226/207 du 8 octobre 2019 consid. 4.5.1 ; C-857/2013 du 19 mai 2014 consid. 8.3 ; C-3518/2011 du 16 mai 2013 consid. 5.1 ; C-2485/2011 du 11 avril 2013 consid. 6 ; C-6135/2008 du 11 août 2008 consid. 8.2 ; ATA/1280/2015 du 1er décembre 2015 consid. 12 ; ATA/940/2015 du 15 septembre 2015 consid. 7c ; directives LEI, ch. 4.3.1).

18.         Un étranger ne peut être admis en vue de l'exercice d'une activité lucrative que s'il est démontré qu'aucun travailleur en Suisse ni aucun ressortissant d'un État avec lequel a été conclu un accord sur la libre circulation des personnes correspondant au profil requis n'a pu être trouvé (art. 21 al. 1 LEI).

En d'autres termes, l'admission de ressortissants d'États tiers n'est possible que si, à qualifications égales, aucun travailleur en Suisse ou ressortissant d'un État membre de l'UE ou de l'AELE ne peut être recruté. Le principe de la priorité des travailleurs résidants doit être appliqué à tous les cas, quelle que soit la situation de l'économie et du marché du travail (arrêt du Tribunal fédéral 2C_434/2014 du 8 août 2014 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c).

Les conditions d'admission ont matériellement pour but de gérer de manière « restrictive » l'immigration ne provenant pas de la zone UE/AELE, de servir conséquemment les intérêts économiques à long terme et de tenir compte de manière accrue des objectifs généraux relatifs aux aspects politiques et sociaux du pays et en matière d'intégration (cf. notamment ATAF 2011/1 consid. 6.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-5184/2014 du 31 mars 2016 consid. 5.3.1 ; C-6198/2014 du 18 mai 2015 consid. 6.1 ; C-857/2013 consid. 5).

19.         Les employeurs sont tenus d'annoncer le plus rapidement possible aux offices régionaux de placement les emplois vacants qu'ils présument ne pouvoir repourvoir qu'en faisant appel à du personnel venant de l'étranger. Les offices de placement jouent un rôle clé dans l'exploitation optimale des ressources offertes par le marché du travail sur l'ensemble du territoire suisse. L'employeur doit, de son côté, entreprendre toutes les démarches nécessaires - annonces dans les quotidiens et la presse spécialisée, recours aux médias électroniques et aux agences privées de placement - pour trouver un travailleur disponible. On attend des employeurs qu'ils déploient des efforts en vue d'offrir une formation continue spécifique aux travailleurs disponibles sur le marché suisse du travail (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c et les arrêts cités ; directives LEI, ch. 4.3.2.1).

Il revient à l'employeur de démontrer avoir entrepris des recherches à une grande échelle afin de repourvoir le poste en question par un travailleur indigène ou ressortissant d'un État membre de l'UE/AELE et qu'il s'est trouvé dans une impossibilité absolue de trouver une personne capable d'exercer cette activité (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6074/2010 du 19 avril 2011 consid. 5.3).

20.         L'employeur doit être en mesure de rendre crédibles les efforts qu'il a déployés, en temps opportun et de manière appropriée, en vue d'attribuer le poste en question à des candidats indigènes ou à des candidats ressortissants de l'UE/AELE. Des ressortissants d'États tiers ne seront contactés que dans le cas où les efforts entrepris n'ont pas abouti. Il convient dès lors de veiller à ce que ces démarches ne soient pas entreprises à la seule fin de s'acquitter d'une exigence. Elles doivent être engagées suffisamment tôt, dans un délai convenable avant l'échéance prévue pour la signature du contrat de travail. En outre, il faut éviter que les personnes ayant la priorité ne soient exclues sur la base de critères professionnels non pertinents tels que des séjours à l'étranger, des aptitudes linguistiques ou techniques qui ne sont pas indispensables pour exercer l'activité en question, etc. (ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3286/2017 du 18 décembre 2017 consid. 6.2 ; F-1992/2015 du 10 mars 2017 consid. 5.5C-106/2013 du 23 juillet 2014 consid. 7.1 ; C-1123/2013 du 13 mars 2014 consid. 6.7 ; C-4873/2011 du 13 août 2013 consid. 5.3).

Même si la recherche d'un employé possédant les aptitudes attendues de la part de l'employeur peut s'avérer ardue et nécessiter de nombreuses démarches auprès des candidats potentiels, de telles difficultés ne sauraient à elles seules, conformément à une pratique constante des autorités en ce domaine, justifier une exception au principe de la priorité de recrutement énoncée à l'art. 21 LEI (cf. ATA/1156/2020 du 17 novembre 2020 consid. 6c ; ATA/1094/2019 du 25 juin 2019 consid. 5c ; ATA/1368/2018 du 18 décembre 2018 consid. 3c ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C_8717/2010 du 8 juillet 2011 consid. 8.1).

La seule publication d'une annonce auprès de l'OCE, bien que diffusée également dans le système EURES, ne peut être considérée comme une démarche suffisante. (cf. ATA/1147/2018 du 30 octobre 2018 consid. 11). Par ailleurs, des démarches intervenues après un refus d'octroi d'autorisation de séjour avec activité lucrative doivent être considérées comme entreprises dans le seul but de s'acquitter des exigences légales (cf. ATA/2/2015 du 6 janvier 2015 consid. 2c).

21.         En l’espèce, sous l’angle du respect du principe de la priorité, force est de constater que l’association précitée n'a pas déployé tous les efforts que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elle pour trouver un travailleur suisse ou ressortissant de l'UE/AELE afin de pourvoir le poste concerné. En effet, l’intéressée a publié une seule annonce, ce qui est largement insuffisant, conformément à la jurisprudence, pour assurer le respect du principe de priorité. Pour le surplus, l’accusé de réception relatif à ladite annonce date du 14 septembre 2021, soit près d’un mois et demi après le dépôt de la demande de titre de séjour avec activité lucrative en faveur de M. B______. Ce n’est ainsi qu’après avoir pris connaissance de la décision négative de l’OCIRT du 1er septembre 2021 que A______ a effectué une recherche, limitée à une annonce, de candidats pour le poste visé. Cette façon de procéder démontre que cette démarche, en soi déjà insuffisante, été effectuée avant tout afin de s’acquitter d’une obligation légale et de se conformer aux exigences de l’OCIRT, comme l’admettent d’ailleurs expressément les recourants dans leur requête du 23 mars 2022, alors même que A______ souhaitait quant à elle, dès le départ, engager spécifiquement M. B______, comme elle l’explique dans son courrier à l’OCIRT du 16 août 2021.

S’agissant de l’argument selon lequel ledit poste était particulièrement spécifique, dès lors qu’il nécessitait des connaissances pointues dans le domaine visé que personne ne pouvait maîtriser mieux que le requérant, le tribunal relève que lesdites spécificités auraient, cas échéant, d’autant plus dû conduire A______ à effectuer des démarches poussées pour tenter de trouver un candidat dans le respect de la législation applicable. Il lui était ainsi loisible de diffuser sa recherche à plus large échelle, en particulier sur des sites et dans une presse plus spécialisées, tant en Suisse que dans l'UE, de recourir aux réseaux sociaux ou encore de s’adresser à des organismes spécialisés, ce qu'elle ne démontre, ni même ne prétend, avoir fait. Au demeurant, il paraît a priori peu vraisemblable qu'il n'existe personne, à l'échelle de toute l'Union européenne, qui pût remplir aussi bien que le recourant les attentes de la recourante.Partant, force est de retenir que le principe de priorité n’a pas été respecté in casu.

Les conditions posées par l’art. 18 LEI étant cumulatives, il n’est pas nécessaire d’examiner si les autres conditions prévues par cette disposition légale sont remplies.

Toutefois, à titre superfétatoire, le tribunal constate que l’intérêt économique de la Suisse en lien avec l’engagement de M. B______ n’a pas été démontré. En effet, d’après les explications des recourants, l’étude relative au commerce de l’or illégal permettrait principalement à la Suisse, selon le résultat auquel elle aboutirait, d’éviter une atteinte à sa réputation. Toutefois, cela ne correspond pas à l'acception étroite de l'intérêt économique de la Suisse au sens de l'art. 18 let. a LEI, qui vise uniquement les activités produisant des revenus, et non pas des études poursuivant un but d'information et d'infléchissement de la politique économique et ayant pour objectif ou effet indirect de préserver à long terme l'attractivité du pays. Au demeurant, le risque que représente pour la réputation de la Suisse son implication dans le marché de l'or est déjà connu, comme en attestent non seulement les documents produits par les recourants, mais également un rapport du Conseil fédéral du 14 novembre 2019 intitulé "Commerce de l’or produit en violation des droits humains Rapport du Conseil fédéral donnant suite au postulat 15.3877, Recordon, 21.09.201" (https://www.newsd.admin.ch/newsd/message/ attachments/54475.pdf ; consulté le 13 février 2023) et d'autres documents émanant soit de l'administration fédérale, soit des ONG (https://www.parlament.ch/fr/ratsbetrieb/suche-curia-vista/geschaeft? AffairId=20153877 ; https://www.publiceye.ch/fr/thematiques/negoce-de-matieres-premieres/la-suisse-et-la-malediction-des-ressources/plaque-tournante-des-matieres-premieres ; https://voir-et-agir.ch/content/uploads/ 2017/04/BROT_Dossier_0116_FR_web.pdf ; consulté le 13 février 2023).

22.         En conclusion, eu égard aux développements qui précèdent, le tribunal considère que la décision querellée ne viole pas le droit fédéral. C’est donc à bon droit que l’autorité intimée a refusé de délivrer l’autorisation sollicitée.

Le recours, mal fondé, doit être rejeté.

23.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, qui succombent, sont condamnés, pris solidairement, au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais de même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

24.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 27 juin 2022 par A______ et M. B______ contre la décision de l'office cantonal de l’inspection et des relations du travail du 25 mai 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève,

 

La greffière