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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2392/2023

ATA/1078/2024 du 10.09.2024 sur JTAPI/174/2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR;PERMIS DE CONSTRUIRE;VOISIN
Normes : LPA.60.al1.leta; LPA.60.al1.letb; OJ.103.leta; LTF.89.al1.letc
Résumé : Confirmation d’un jugement du TAPI déclarant irrecevable, pour absence de qualité pour recourir, le recours déposé par une personne dont le domicile est situé à proximité des parcelles concernées par un projet de construction. La propriété du recourant ne peut être considérée comme proche du projet litigieux, au sens de la jurisprudence et il ne peut ainsi être reconnu comme un voisin direct. Bien que sa parcelle soit située à environ 116 m à vol d’oiseau de la parcelle concernée, elle en est séparée par deux autres parcelles sur lesquelles sont construites des bâtiments d’habitation et un chemin d’une largeur de 12 m environ. Sa parcelle n’est pas située en face du projet et visuellement, plusieurs arbres de taille importante dépassant le toit des maisons voisines masquent la vue en direction de l’emplacement prévu pour le projet. En outre, plusieurs griefs invoqués par le recourant ne concernent pas l’autorisation querellée et sont donc exorbitants au litige. Il s’agit notamment de ceux en lien avec l’augmentation du bétonnage et de l’urgence climatique avec un chêne abattu. Les griefs en lien avec le parking sauvage sur le chemin dont il est copropriétaire, qui préexiste aux constructions projetées, excèdent également le cadre du litige et ne sont pas nature à influencer la légalité d’une autorisation de construire. Le voisin n’a pas qualifié pour invoquer la violation des prescriptions du droit cantonal relatives au calcul du nombre de places de stationnement. Finalement le recourant ne peut pas non plus justifier d’un intérêt pratique au recours en lien avec la copropriété du chemin situé plus près du projet.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2392/2023-LCI ATA/1078/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 septembre 2024

3ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

B______
représenté par Bertrand REICH, avocat

et

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 février 2024 (JTAPI/174/2024)


EN FAIT

A. a. L’État de Genève est propriétaire des parcelles adjacentes nos 5'587 et 5'588 de la commune de C______, d’une surface totale de 62'523 m², sises en zone de développement 3 ainsi que, pour certaines de leurs parties, en zone de verdure. Elles sont situées aux adresses 30, 32A, 32B, 32C et 34, chemin D______ et entourées par l’avenue E______ et le chemin F______.

Ces deux parcelles – dont l’affectation complémentaire est, à teneur du système d'information du territoire genevois (ci-après : SITG), « destinée à des équipements publics » – accueillent actuellement divers bâtiments, notamment le collège et école de commerce G______ (ci-après : CEC G______) ; s'y trouvaient également des hébergements collectifs ou communautaires dévolus à l’accueil de réfugiés, depuis lors détruits. Elles ne font l’objet d’aucun plan localisé de quartier (ci-après : PLQ).

b. A______ est copropriétaire de la parcelle no 7 de la commune, d’une surface de 1'190 m2 sur laquelle est construite une habitation à plusieurs logements ainsi qu’un garage privé, à l’adresse 5, chemin H______. Il est également copropriétaire de la parcelle no 1’095, d’une surface de 443 m2, dépendance de plusieurs parcelles qui constitue une partie du chemin H______.

B. a. Le 29 novembre 2017, une demande de renseignements (DR 1______/1) relative à la construction de logements d’utilité publique (LUP), d’un centre d’accueil, de surfaces d’activités et de commerces ainsi que d’un parking souterrain de deux niveaux avec abattage d’arbres sur les parcelles nos 5'587 et 5'588 a été déposée par la fondation pour la promotion du logement bon marché.

Cette requête a été acceptée par le département du territoire (ci-après : le département) le 5 juin 2018.

b. Le 6 janvier 2020, le département a autorisé la démolition des constructions se trouvant sur les parcelles nos 5'587 et 5'588 ainsi que l’abattage d’arbres (M 2______).

Le 4 janvier 2022, le département a prolongé la validité de l’autorisation jusqu’au 6 janvier 2023. Cette décision a été contestée par A______ et l’une de ses voisines auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), qui a rejeté le recours dans la mesure où il était recevable par jugement du 11 mai 2022 (JTAPI/488/2022).

c. Par requête du 22 décembre 2022, enregistrée sous DD 3______/1 par le département, l’B______ (ci-après : B______), pour le compte de l’État de Genève, a sollicité auprès du département la délivrance d’une autorisation de construire en vue de réaliser un centre d’hébergement collectif et de surfaces d’activités composé de six bâtiments, pour une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 10'050 m2.

Un courrier d’accompagnement du mandataire du 22 décembre 2022 précisait que le projet s’inscrivait dans un contexte global en plusieurs étapes, soit la démolition du centre d’hébergement existant (phase no 1), la construction du nouveau centre d’hébergement, composé des bâtiments G, H, I, J, K et L (phase no 2) et la réalisation, en lien avec le futur PLQ, des bâtiments A, B, C, D, E et F et d’un parking souterrain (phase no 3), étant précisé que la demande déposée ne portait que sur la phase no 2. Conformément à une pré-consultation avec l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) du 15 novembre 2022, s’agissant du stationnement des véhicules « centre d’hébergement » (habitants et visiteurs), de tels centres ne devaient pas être considérés comme des logements pour le ratio de stationnements ; ceux-ci n’ayant pas de catégorie propre, l’OCT proposait de les apparenter à des résidences étudiantes et le projet ne proposerait aucun stationnement pour voitures et deux-roues motorisés pour les habitants et visiteurs. La rubrique « catégorie de logement » précisait que l’ensemble du centre d’hébergement répondait aux standards permettant une « réversibilité des logements en cas de diminution de l’afflux des migrants ». Quant au stationnement des véhicules « activités » (employés et visiteurs), le projet ne proposerait pas de stationnement pour voitures et deux-roues motorisés. Enfin, pour le stationnement vélos du « centre d’hébergements » et des « activités », un ratio de trois places pour 100 m2 serait appliqué, soit un total de trois-cent-deux places au minimum. Le centre serait composé de deux catégories de logements, soit les logements surveillés, desservis par les allées H, I, K et L, comportant une entrée unique contrôlée et les logements indépendants desservis par les allées G et J. Les migrants seraient accueillis, dans un premier temps, dans les logements surveillés où ils seraient accompagnés par des assistants sociaux. Dans un second temps, une fois plus autonomes, ils pourraient accéder aux logements indépendants. Le centre d’hébergement comprendrait des locaux d’activités répartis au rez et au 1er étage, notamment des salles polyvalentes, un open space, des salles de cours, un local associatif, une infirmerie et des bureaux pour l’administration ; ces espaces pourraient d’ailleurs être ouverts aux habitants voisins afin d’intégrer le centre dans la vie de quartier. Des locaux commerciaux étaient prévus au rez du bâtiment G, dont l’affectation n’était pas encore connue.

Les formulaires B04, «formulaire bâtiment – construction neuve », relatifs aux bâtiments G, H, I et J, faisaient état de la réalisation de respectivement seize logements pour les deux premiers bâtiments précités, 25 logements pour le bâtiment I et 23 logements pour le bâtiment J, étant précisé que lesdits formulaires indiquaient qu’il ne s’agissait pas d’installations provisoires.

Un projet de mutation parcellaire provisoire n° 47/2022 établi le 17 novembre 2022 prévoyait la division des parcelles nos 5'587 et 5'588 en quatre parcelles, soit les parcelles nos 5'923 (8'925 m2), 5'924 (5'653 m2), 5'925 (8'391 m2) et 5'926 (39'554 m2).

d. Dans le cadre de l’instruction de cette requête, tous les préavis ont été favorables, avec ou sans conditions.

Il en allait ainsi, notamment, de celui du 16 février 2023 de l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) avec dérogation à l’obligation d’établir un PLQ dans les périmètres en zone de développement affectée à de l’équipement public, sous conditions et avec souhait ; de celui du 17 février 2023, confirmé le 6 juin 2023 de l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) ; de celui du 20 février 2023 de l’office cantonal des bâtiments (ci-après : OCBA) sous condition ; de celui du 2 mars 2023 de la Ville de Genève (ci-après : la ville), confirmé le 8 juin 2023 ; de celui du 19 mai 2023 de la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) et de celui du 8 juin 2023 de la commission d’architecture (ci-après : CA) sous conditions.

e. Deux associations ainsi que plusieurs habitants et/ou propriétaires de logements du quartier ont manifesté leur opposition auprès du département, parmi lesquels A______.

f. Par arrêté « autorisant l’application des normes de la 3ème zone au bâtiment à construire selon dossier DD 3______/1, sur les parcelles nos 5’587, 5’588 de la commune de C______» du 14 juin 2023, le département, se référant notamment à la requête DD 3______/1, a renoncé à l’établissement d’un PLQ (art. 1) et autorisé l’application des normes de la 3ème zone au bâtiment à construire selon la DD 3______/1 (art. 2), tout en réservant les conditions particulières de l’autorisation de construire y relative (art. 3).

g. Par décision du 14 juin 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours « au vu de la situation d’urgence », se référant à la version du projet no 2 du 1er mai 2023, à l’arrêté départemental du 14 juin 2023 et au projet de mutation parcellaire provisoire no 47/2022, le département a délivré l’autorisation de construire DD 3______/1, qui a été publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

Les conditions figurant notamment dans les préavis de la ville du 8 juin 2023, de l’OCBA du 20 février 2023, de l’OU du 16 février 2023 et de la CA du 8 juin 2023 devaient être strictement respectées et faisaient partie de l’autorisation, étant précisé que les réserves figurant sur celle-ci primaient sur les plans visés ne varietur.

h. Le 14 juillet 2023, des habitants du quartier ainsi qu’une association qui s’étaient opposés au projet ont déposé un recours au TAPI contre la décision d’autorisation de construire ainsi que contre l’arrêté du 14 juin 2023, concluant à la restitution de l’effet suspensif et à l’annulation des deux actes précités. Leur recours a été enregistré sous le numéro de cause A/2391/2023 par le TAPI et rejeté par jugement du 3 juillet 2024 (JTAPI/675/2024).

i. Par acte du 14 juillet 2023, A______ a recouru auprès du TAPI contre l’autorisation de construire, concluant préalablement à la restitution de l’effet suspensif au recours puis, par le biais d’une centaine de conclusions principales, 35 conclusions subsidiaires et 30 conclusions plus subsidiaires, à la constatation de la nullité de l’autorisation au vu des manquements à plusieurs lois et dispositions constitutionnelles (conclusion 30), et à son annulation (conclusion 17) pour divers motifs. Il a également requis l’audition de plusieurs témoins en lien avec l’abattage d’arbres.

Les conclusions principales 4 à 9 visaient à la constatation que la question de l’asile était du ressort de la Confédération, laquelle n’avait pas pris position sur le projet, et à la constatation que celui-ci concernait l’accueil de réfugiés à moyen et à long terme. Les conclusions 10 à 16 concernaient la qualification de zone d’équipement public qui excluait la construction de logements et la qualification d’équipements publics pour des logements pour migrants. Elles concernaient également la constatation de l’insécurité à laquelle étaient exposés les riverains en raison de l’utilisation faite des bâtiments et du caractère hautement sensible du périmètre « d’un point de vue suisse et international » pour ce qui avait trait à la « radicalisation et au terrorisme ». Les conclusions 14 à 16 portaient sur la constatation de la surcharge actuelle des transports publics, particulièrement en certaines circonstances (mercredi, vendredi, Ramadan) et sur le caractère lacunaire des solutions proposées aux futurs habitants en termes de transports modaux et de parking. Des solutions pérennes devaient être trouvées avant d’autoriser les constructions. Les conclusions 18 et 19 visaient à confirmer l’urgence climatique décrétée et à constater la trop grande minéralité du projet, créatrice d’un îlot de chaleur. La conclusion 20 invitait le TAPI à déclarer illicite l’abattage du chêne centenaire classé et protégé, à ce qu’il soit dit que ses droits n’avaient pas été respectés dans le cadre de cet abattage (21) et à ce qu’il soit constaté qu’il avait été privé d’une voie de recours (22) et que son droit d’être entendu avait été violé (23). Les intimés devaient être condamnés à planter, dans un délai de six mois, un arbre équivalent ou plusieurs arbres propres à le compenser (24). La requête portant sur les constructions à édifier sur l’emplacement de l’arbre abattu devait être annulée (25). La conclusion 26 portait sur la constatation que l’occupation d’une partie de la zone de verdure ne répondait pas à sa définition. Les conclusions 27 et 28 à ce qu’il soit ordonné au département de proposer un projet permettant de corriger ces violations concernant la zone de verdure et une compensation immédiate de ces violations. Le conclusion 29 portait sur le renvoi du dossier au département pour une concertation politique et démocratique de l’entier du périmètre.

Il habitait près du projet litigieux et était copropriétaire du chemin H______. Il pouvait d’ailleurs observer depuis sa propriété, comme démontré par la photographie jointe sur laquelle apparaissaient, au premier plan, la maison voisine de celle du recourant (parcelle no 6), au second plan, des arbres dont la hauteur dépassait la maison voisine et, au loin, à travers le feuillage clairsemé de deux autres arbres, une petite partie d’un bâtiment comportant des éléments de couleur rouge ressemblant à ceux présents sur le bâtiment du CEC G______ (cadastré au registre foncier sous le no 4______) sis sur la parcelle no 5'588. Le projet considéré était susceptible de l’atteindre dans ses intérêts, notamment s’agissant de la sécurité, de l’occupation sans droit de ses places de parking et de la difficulté à circuler dans son chemin, d’une « nette baisse de la qualité de vie du quartier », de l’engorgement des transports publics et de la perte de valeur de sa propriété. L’abattage d’arbres et le bétonnage du quartier amplifieraient également le phénomène d’îlots de chaleur qu’il était impérieux de combattre en raison de l’urgence climatique.

Sur le fond, la décision violait l’interdiction de construire des logements et des commerces en zone d’équipements publics. Elle mettait en danger la sécurité publique en raison de la proximité entre le centre pour requérants envisagé et la mosquée existante. Il invoquait également une violation du principe de compensation des places de parking perdues. L’autorisation de démolition délivrée avait été violée en raison de la non-conformité des plans présentés et de la violation de son droit d’être entendu dans ce cadre. L’occupation de la zone de verdure par deux maisons, un parking et une partie du bâtiment scolaire n’était pas conforme à la définition. Il fallait modifier la destination de cette zone.

j. Le 31 juillet 2023, le département a conclu au rejet de la demande de restitution de l’effet suspensif aux deux recours.

k. Le 7 août 2023, B______ a conclu au rejet de la demande de restitution d’effet suspensif et, sur le fond, au rejet du recours. Le recourant n’avait pas qualité pour recourir.

l. Le 15 août 2023, A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

m. Le 16 août 2023, le TAPI a admis la demande de restitution de l’effet suspensif au recours (DITAI/365/2023). Par décision séparée du même jour, il en a fait de même dans la cause A/2391/2023 (DITAI/364/2023).

n. Le 18 septembre 2023, B______ a conclu à l’irrecevabilité du recours et, subsidiairement, à son rejet.

o. Le 18 septembre 2023, le département s’en est rapporté à justice quant à la recevabilité du recours et, sur le fond, a conclu à son rejet.

p. Le 11 octobre 2023, A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions.

En sa qualité de copropriétaire du chemin H______ situé en face du projet querellé, à moins de 50 m de celui-ci, sa qualité pour recourir devait être reconnue. C’était sous ses fenêtres que l’on souhaitait construire des logements et des commerces, dans son chemin que les voitures venaient se garer du fait de la suppression des places de parking, dans sa propriété que des dealers venaient cacher de la drogue et qu’un arbre centenaire avait été abattu sans autorisation, de sorte qu’il était clairement davantage touché que n’importe quel habitant du canton.

q. Après que les parties eurent encore persisté dans leurs conclusions, le TAPI, par jugement du 29 février 2024, a déclaré irrecevable le recours déposé par A______.

À défaut de pouvoir retirer, par le biais des différents griefs invoqués, un avantage pratique de la présente procédure, il ne disposait pas de la qualité pour contester l’autorisation de construire DD 3______/1.

C. a. Par acte mis à la poste le 16 avril 2024, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI, prenant 26 conclusions, dont une visant à la constatation de sa qualité pour recourir devant le TAPI (conclusion 15).

Certains faits n’avaient pas été retenus à tort dans le jugement du TAPI : la parcelle no 5'588 jouxtait la mosquée du Petit-Saconnex. S'y trouvaient également une zone de verdure occupée par deux maisons, le parking du CEC G______ ainsi qu’un bâtiment scolaire provisoire. Une division de la parcelle avait été opérée pour ne pas faire apparaître les zones de verdure occupées par des équipements publics dans le projet. Avant le projet, de nombreux arbres prospéraient sur ces parcelles dont un chêne centenaire. Il détaillait ensuite la procédure et la décision d’autorisation de démolition du 6 janvier 2020, laquelle était en force.

Sur le fond, il soutenait avoir la qualité pour recourir, et il reprenait les griefs développés devant le TAPI, s’agissant aussi bien de la violation de son droit d’être entendu en lien avec l’autorisation de démolition que de la construction de logements et de commerces dans une zone d’équipement public en violation des règles de la bonne foi. Le règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés du 17 mai 2023 (RPSFP – L 5 05.10) avait été violé par l’octroi d’une dérogation, ce qui n’avait pas été examiné par le TAPI.

b. Le 23 mai 2024, B______ a conclu au rejet du recours.

De nombreux griefs soulevés par le recourant auraient pu l’être par tout habitant du canton et les autres étaient sans lien avec l’autorisation litigieuse.

c. Le 17 mai 2024, le département a conclu au rejet du recours.

Le TAPI avait à juste titre retenu que sa qualité de copropriétaire du chemin n’empêchait pas de devoir constater qu’aucun grief recevable n’avait été soulevé en lien avec cette qualité. La nouvelle argumentation fondée sur la question des places de parking ne pouvait être invoquée par un voisin.

d. Le 22 mai 2024, l’OCBA en a fait de même.

e. Le 24 juin 2024, le recourant a répliqué, persistant dans ses conclusions.

Copropriétaire d’une parcelle et d’un chemin situés à proximité de la parcelle litigieuse, il avait la qualité pour recourir. La suppression (déjà intervenue) du parking existant et le fait que le projet ne prévoyait aucun emplacement de parking de remplacement constituaient d'ores et déjà une source de nuisances sur ses parcelles, sous forme de parking sauvage. Il reprenait et développait pour le surplus les griefs déjà invoqués dans son recours.

f. Le 25 juin 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             L’objet du litige est le jugement du TAPI déclarant irrecevable le recours formé par le recourant contre une autorisation de construire.

2.1 À teneur de l’art. 60 al. 1 let. a et b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/1254/2022 du 13 décembre 2022 consid. 3a et les arrêts cités). La chambre administrative a déjà jugé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/905/2022 du 6 septembre 2022 consid. 3b et l'arrêt cité ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, p. 184 n. 698).

2.2 Cette notion de l’intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l’art. 103 let. a de la loi fédérale d’organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (OJ - RS 173.110) et qui était, jusqu’à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l’art. 98a de la même loi. Elle correspond aux critères exposés à l’art. 89 al. 1 let. c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110) que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d’unité de la procédure qui figure à l’art. 111 al. 1 LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_433/2021 du 5 juillet 2022 consid. 3.1 ; Message du Conseil fédéral concernant la révision totale de l’organisation judiciaire fédérale du 28 février 2001, FF 2001 pp. 4126 ss et 4146 ss).

2.3 Selon l’art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué (let. b) et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c).

2.4 En ce qui concerne les voisins, seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l’intérêt particulier requis (ATF 133 II 409 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_158/2008 du 30 juin 2008 consid. 2). Le recourant doit ainsi se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire d’un terrain directement voisin de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2021 du 20 février 2023 consid. 1.1 ; ATA/1237/2021 du 16 novembre 2021 consid. 2b ; Laurent PFEIFFER, La qualité pour recourir en droit de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2013, p. 92). Outre les propriétaires voisins, les propriétaires par étage, les superficiaires, les locataires et les preneurs à ferme sont susceptibles de remplir cette condition (arrêts du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1 ; 1C_572/2011 du 3 avril 2012 consid. 1.2 ; ATA/1075/2020 du 27 octobre 2020 consid. 2d ; Heinz AEMISEGGER/Stephan HAAG, in : Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : Autorisation de construire, protection juridique et procédure, 2020, p. 357 n. 70 ad art. 33 LAT).

La qualité pour recourir peut être donnée en l’absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_346/2011 du 1er février 2012 publié in DEP 2012 p. 692 consid. 2.3 ; ATA/453/2021 du 27 avril 2021 consid. 2b).

La proximité avec l'objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d'une autorisation de construire. Celui-ci doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de l'arrêt contesté qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 137 II 30 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2021 du 10 janvier 2023 consid. 1.1.1 ; ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11b ; Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit public de la construciton, 2024, p. 625 ; Heinz AEMISEGGER, in : Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : Autorisation de construire, protection juridique et procédure, 2020, p. 545 n. 179 ad art. 34 LAT ; Laurent PFEIFFER, La qualité pour recourir en droit de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2013, p. 93).

2.5 Le critère de la distance n’est pas le seul déterminant car la question de savoir si le voisin est directement atteint nécessite une appréciation de l’ensemble des circonstances pertinentes (arrêt du Tribunal fédéral du 8 avril 1997 publié in RDAF 1997 I p. 242 consid. 3a). Des voisins proches peuvent ne pas être légitimés à recourir au motif que la construction envisagée n’aura pas d’impact sur leur situation. À l’inverse, des voisins situés même à une grande distance disposeront de la qualité pour recourir dès lors qu’ils seront touchés plus que le reste de la population (Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 627). Le Tribunal fédéral a notamment considéré que des voisins situés à environ 100 m de la construction projetée n’étaient pas particulièrement atteints s’ils ne voyaient pas depuis leur propriété la toiture qu’ils critiquent (arrêt du Tribunal fédéral 1C_338/2011 du 30 janvier 2012 consid. 3.1).

S’il est certain ou très vraisemblable que l’installation litigieuse serait à l’origine d’immissions – bruit, poussières, vibrations, lumières ou autres – touchant spécialement les voisins, même situés à quelque distance, ces derniers peuvent avoir qualité pour recourir (ATF 140 II 214 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2021 du 10 janvier 2023 consid. 1.1.1 ; ATA/1237/2021 du 16 novembre 2021 consid. 2d). Il importe peu, alors, que le nombre de personnes touchées soit considérable – dans le cas d’un aéroport ou d’un stand de tir, par exemple (ATF 124 II 293 consid. 3a publié in RDAF 1999 I p. 624). Il en va de même quand l’exploitation de l’installation comporte un certain risque qui, s’il se réalisait, provoquerait des atteintes dans un large rayon géographique, dans le cas d’une centrale nucléaire ou d’une usine chimique, par exemple (ATF 120 Ib 379 consid. 4d/e ; RDAF 2007 I p. 426 = DEP 2006 p. 904 ; ATA/66/2020 du 21 janvier 2020 consid. 2b).

Les émissions ou les risques justifiant l’intervention d’un cercle élargi de personnes doivent présenter un certain degré d’évidence, sous peine d’admettre l’action populaire que la loi a précisément voulu exclure (arrêt du Tribunal fédéral 1C_624/2021 du 10 janvier 2023 consid. 1.1.1). Il en va ainsi des riverains d’un aéroport, situés dans le prolongement de la piste de décollage, des voisins d’un stand de tir (cf. arrêts précités) ou des propriétaires ou locataires de parcelles exposées aux émissions d’une installation de téléphonie mobile, si celles-ci sont situées dans un certain périmètre (arrêt du Tribunal fédéral 1A.62/2001 du 24 octobre 2001 consid. 1b : qualité pour agir reconnue à une personne habitant à 280 m de l’installation, mais pas admise à 800 m ; Laurent PFEIFFER, La qualité pour recourir en droit de l’aménagement du territoire et de l’environnement, 2013, p. 117). Lorsque la charge est déjà importante, la construction projetée doit impliquer une augmentation sensible des nuisances. Ainsi en va-t-il particulièrement en milieu urbain où la définition du cercle des personnes touchées plus que n’importe quel habitant d’une agglomération n’est pas une chose aisée (arrêt du Tribunal fédéral 1A.47/2002 du 16 avril 2002 consid. 3.5 ; ATA/453/2021 du 27 avril 2021 consid. 2c).

2.6  Dans l’examen de l’intérêt pratique au recours, le Tribunal fédéral examine chacun des griefs soulevés et ne prend en considération au stade de la recevabilité du recours que ceux dont l’admission procurerait au recourant un avantage, de fait ou de droit. Si aucun des griefs présentés ne satisfait a cette condition, le recours sera déclaré irrecevable dans son ensemble (Jean-Baptiste ZUFFEREY, op. cit., p. 620 et p. 621).

2.7 En l’espèce, le domicile du recourant est situé à proximité des parcelles concernées. En se fondant sur les plans du SITG, comme l’a fait le TAPI, il appert que la parcelle no 7 est située à environ 116 m à vol d’oiseau de l’extrémité la plus proche du bâtiment litigieux. Cette parcelle est séparée des parcelles concernées par le projet par deux autres parcelles nos 6 et 5, respectivement de 1'098 m2 et 1'075 m2, sur lesquelles sont construites deux maisons d’habitation ainsi que du chemin D______, d’une largeur de 12 m environ. La parcelle n’est en outre pas directement en face du projet et la parcelle no 1'096 et le bâtiment qu’elle contient est également sis entre l’habitation du recourant et le projet. Visuellement, la photographie produite par le recourant montre plusieurs arbres de taille importante dépassant le toit des maisons voisines qui masquent précisément la vue en direction de l’emplacement prévu pour le projet. Seul le feuillage clairsemé, à certains endroits, laisse apparaître, en arrière-plan au loin, le haut du bâtiment du CEC G______.

Au vu de ces éléments, il ne peut être considéré que la propriété du recourant serait proche, au sens de la jurisprudence susmentionnée, de la construction faisant l'objet du litige. Le recourant ne peut en conséquence être reconnu comme un voisin direct.

S’agissant des griefs invoqués par le recourant devant le TAPI, il convient en premier lieu de constater que plusieurs d’entre eux ne concernent pas l’autorisation querellée et sont donc exorbitants au litige. Il en va notamment des griefs relatifs au chêne abattu – en vertu d'une précédente décision aujourd'hui entrée en force – sur la parcelle no 5'588, qui ne peuvent dès lors être pris en compte dans l’analyse à laquelle il faut procéder pour déterminer si le recourant dispose d’un intérêt pratique au recours. Pour ce qui est des griefs en lien avec l’occupation des futurs locaux par des migrants ou des réfugiés, comme de ceux relatifs à la qualification de la structure envisagée d'équipement public, il n’est pas possible de retenir qu’ils touchent le recourant d’une manière différente de tous les habitants. Il en va de même des griefs liés à l’augmentation du bétonnage et de l’urgence climatique ou encore de l’aspect sécuritaire qui serait, aux dires du recourant, en lien avec la proximité des locataires des bâtiments prévus avec la mosquée.

En ce qui concerne les griefs en lien avec le parking sauvage sur le chemin dont il est copropriétaire, dont le recourant démontre qu’il préexiste aux constructions projetées, outre qu’ils excèdent eux aussi le cadre du litige, il a déjà été jugé que cette question n’était pas de nature à influencer la légalité d’une autorisation de construire (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 6).

S’agissant finalement des griefs en lien avec les places de parking du projet, le Tribunal fédéral a déjà jugé qu’un voisin n’avait pas qualité pour invoquer la violation des prescriptions du droit cantonal relatives au calcul du nombre de places de stationnement puisqu’elles poursuivaient exclusivement un but d’intérêt public et n’avaient pas pour vocation de protéger les voisins (arrêt du Tribunal fédéral 1P.290/2003 du 15 août 2003 consid. 3).

Le fait que le recourant soit également copropriétaire d’une partie du chemin H______, situé un peu plus près des constructions prévues, n’est pas susceptible de modifier la conclusion qu’il ne peut pas justifier d’un intérêt pratique au recours, ce dernier n’invoquant aucun grief différent lié à cette situation plus rapprochée. En outre, la proximité d’un chemin ne constitue pas à elle seule un motif permettant de retenir, dans les circonstances du cas d’espèce, que le recourant est un voisin direct, au sens de la jurisprudence, du projet litigieux.

Au vu des considérants qui précèdent ainsi que de l’argumentation fouillée développée par le TAPI dans son jugement au consid. 15, à laquelle il peut être renvoyé comme la jurisprudence l’admet (arrêt du Tribunal fédéral 1C_642/2022 du 7 novembre 2023 consid. 6.4.2) et que la chambre de céans fait sienne, c’est à bon droit que la qualité pour recourir a été déniée au recourant par le TAPI et son recours sera rejeté.

3.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 900.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à B______, qui dispose de son propre service juridique, conformément à la jurisprudence de la chambre de céans (art. 87 al. 2 LPA ; ATA/653/2021 du 22 juin 2021 consid. 13).

 

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 avril 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 février 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 900.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à Me Bertrand REICH, avocat de B______, au département du territoire-OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Patrick CHENAUX, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :