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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2320/2022

ATA/838/2023 du 09.08.2023 sur JTAPI/335/2023 ( LCI ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.09.2023, 1C_308/2023, D 316206/1
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2320/2022-LCI ATA/838/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 août 2023

3ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Stephan KRONBICHLER, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

B______ intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 mars 2023 (JTAPI/335/2023)


EN FAIT

A. a. B______ est propriétaire de la parcelle n° 2'052 de la commune C______, sise en zone 2, à l'adresse 3, avenue D______.

Un immeuble d'habitation est érigé sur cette parcelle.

b. Le 24 février 2021, A______ a déposé auprès du département du territoire (ci-après : le département) une requête en autorisation de construire portant sur la mise en place d'une nouvelle installation de téléphonie mobile sur la toiture du bâtiment situé sur la parcelle n° 2'056 de cette même commune, enregistrée sous la référence DD 1______.

c. Plusieurs instances ont émis des préavis dans le cadre de l'instruction de cette requête, dont la commission d’architecture (ci-après : CA), défavorables, les 8 décembre 2021, 10 mai 2022 et 3 juin 2022. Elle a relevé que le bâtiment en question s’érigeait en tête avec un gabarit conséquent, qui faisait partie intégrante d’un ensemble intéressant s’inscrivant en demi-cercle, sur un axe à forte fréquentation offrant de larges dégagements. Il venait forger l’articulation avec la E______, formant ainsi, de par son implantation et son architecture, une configuration urbaine intéressante. La pose de l’antenne sur la toiture nuirait à la qualité architecturale de cet ensemble, ainsi qu’à l’harmonie du lieu, produisant un impact visuel péjorant le site, même en tenant compte de la présence d’un arbre majestueux.

Le service des monuments et des sites (ci-après : SMS) s’est dit non concerné. Le service de l’air, du bruit et des rayons non ionisants (ci-après : SABRA) a émis un préavis favorable avec conditions. La ville de Genève a émis un préavis défavorable compte tenu du moratoire appliqué à toute demande de modification d’installations existantes ou de pose de nouvelles installations de téléphonie mobile. La direction des autorisations de construire (DAC) a émis un préavis favorable.

d. Par décision du 21 juin 2022, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée.

Vu le préavis défavorable de la CA du 17 mai 2022 et la hauteur de l'installation prévue (8 m), le projet nuirait au caractère et à l’intérêt du quartier. De plus, à aucun moment il n’avait été démontré que l’emplacement choisi pour cette installation était imposé par des contraintes techniques, liées notamment à l’obligation de couverture telle qu’imposée aux opérateurs de téléphonie mobile.

B. a. Par acte du 12 juillet 2022, A______ (ci-après : A______) a formé recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: TAPI).

L’immeuble concerné ne faisait l'objet d'aucune mesure de protection, que ce soit au niveau du quartier ou individuelle, de sorte que seule la clause générale d'esthétique de l'art 15 loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) trouvait application. Le faîte de ce bâtiment s'élevait à plus de 28 m. L'antenne serait fixée en retrait de 7.5 m du front de l'immeuble (au nord-est, côté rue D______), sur le pan de toit donnant sur l'arrière du bâtiment (nord-ouest, à l'opposé de la route F______). Elle dépasserait le faîte de seulement 4 m, de sorte qu'elle serait à peine visible depuis la route F______ ou la E______. La CA avait elle-même relevé la présence d’un arbre majestueux dont la hauteur atteignait pratiquement celle de l'immeuble. Se situant devant l'angle Est de ce dernier, il masquait ainsi la vue sur la toiture de l'immeuble depuis la plus grande partie de l'esplanade de la E______. Depuis l'avenue G______, il serait même impossible d'apercevoir la nouvelle antenne. Son impact visuel sur l'ensemble en demi-cercle au bout duquel se trouvait le bâtiment en question serait donc quasiment nul.

La hauteur des installations était réduite à ce qui était techniquement nécessaire, à savoir qu’elles devaient dépasser le toit de quelques mètres.

Dans son préavis sommaire, la CA n'affirmait pas que l'ensemble concerné présenterait une quelconque qualité architecturale dépassant l'ordinaire, le département ayant utilisé le terme « intéressant » tant pour l'immeuble que la « configuration urbaine » du lieu, soit un qualificatif particulièrement faible. Les immeubles entourant la E______ étaient extrêmement hétéroclites et pour la plupart d'un aspect très banal, de sorte qu'on ne saurait parler d'une unité architecturale de grande qualité.

Exiger, en vertu de l'art. 15 LCI, une absence totale d'un impact visuel négatif, même sur des bâtiments sans valeur architecturale particulière, reviendrait à interdire purement et simplement la construction d'antennes de téléphonie mobile, ce qui était diamétralement opposé à l'intérêt public de disposer de services de téléphonie mobile de qualité. Il était notoire que les besoins de couverture et de capacité étaient en forte augmentation, vu le doublement chaque année de la quantité de données échangées sur le réseau mobile, en particulier dans les zones urbaines denses de la Ville de Genève. Des dizaines de milliers de pendulaires passaient tous les jours à proximité immédiate de la E______. Afin d'offrir une qualité de service de téléphonie mobile optimale pour répondre à ces besoins en termes de couverture, de capacité et de débit, elle devait utiliser des bandes de fréquences basses (de 700 MHz à 900 MHz) aussi bien que des bandes de fréquence hautes (de 1800 MHz à 3600 MHz) sur ses installations. Lorsque des lieux à utilisation sensible (ci- après : LUS) étaient proches d'un site, les valeurs limites étaient rapidement atteintes, de sorte que seules les bandes hautes étaient utilisées afin de permettre une puissance supérieure. L'installation litigieuse se situait dans une zone qui connaissait actuellement un déficit de couverture, en particulier à l'intérieur des bâtiments, et de capacité. L’antenne projetée avait pour vocation de compenser la perte de couverture induite par le démontage d’une autre antenne à proximité et apporterait une nette amélioration de la couverture, en particulier dans les bâtiments environnants. Le département n'avait donc pas procédé à une pesée correcte des intérêts en présence.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

Il convenait de trouver un bâtiment plus adéquat à ce type d'installation. La lecture des différents plans, en particulier la vue nord-est et la vue sud-est, permettait de constater que l'antenne projetée, de 8 m, dépasserait de plus de 4 m la toiture de l'immeuble censé l’accueillir. La CA avait complété son premier préavis et tenu compte de la hauteur du bâtiment concerné ainsi que de son articulation dans le quartier. Elle avait également relevé que malgré la présence d’un arbre majestueux, l’antenne nuirait à la qualité architecturale de cet ensemble.

A______ n’alléguait pas ni ne démontrait que le refus de son projet rendrait impossible ou compliquerait à l'excès la réalisation de l'obligation de couverture qui lui incombait. Au contraire, il était notoire que de nombreuses antennes de téléphonie mobile existaient d'ores et déjà sur le territoire de la Ville de Genève. Si une antenne de téléphonie devait s'avérer nécessaire dans le périmètre de l’autorisation litigieuse, il n'était pas exclu qu'elle puisse être installée à un emplacement qui ne nuirait pas au patrimoine bâti protégé, ainsi qu'au caractère et à l'intérêt du quartier. L'intérêt public lié à la mise en place d'un réseau de télécommunication ne saurait justifier, à lui seul, sans examiner les particularités de chaque projet ainsi que les autres intérêts publics concernés, la délivrance automatique de permis de construire.

c. B______ a conclu à l’admission du recours.

La nouvelle gare du CEVA et les immeubles du complexe étaient d'un gabarit extrêmement important et situés à proximité immédiate du sien. Dès lors que ces immeubles étaient construits, l'antenne projetée ne nuirait certainement plus à la qualité architecturale et à l'harmonie de son immeuble et des immeubles voisins.

d. Dans sa réplique, A______ a ajouté que le seul endroit avec une vue dégagée sur l'antenne se situait en face du bâtiment, sur la route F______, à la hauteur de la nouvelle E______. Or, le caractère de cette place avait complètement changé lors de la construction du CEVA. Elle était désormais dominée par la structure imposante de l'entrée de la gare à laquelle les grandes verrières donnaient un aspect très technique ainsi que par d'autres bâtiments modernes. La modernité de cette gare rompait avec l'architecture de l'ensemble plus ancien.

Ce n’était pas le nombre d’antennes qui était déterminant mais leur emplacement et la couverture que chacune d'entre elles pouvait offrir. La nécessité de l'antenne était dûment établie par les cartes de couverture produites. En plus d'une amélioration générale de la couverture et de la capacité dans le secteur, la nouvelle antenne permettrait le déploiement de la 5G, inexistante jusqu'à présent.

S’y ajoutait la future démolition du « site GECB », vu l’instruction en cours de la demande d'autorisation de démolir. Face aux délais importants pour la prospection et la réalisation d'un site de remplacement, elle devait en tenir compte dans le cadre de la planification de son réseau afin de ne pas risquer d’avoir des zones dépourvues de couverture en plein centre-ville.

e. Dans une duplique, le département a ajouté que la CA, constituée de spécialistes, lorsqu’elle avait préavisé, avait tenu compte de la E______ et des immeubles autour dont la construction était terminée.

A______ ne démontrait pas concrètement que les limites posées par les LUS rendraient impossible l'emplacement de l'antenne à un endroit différent. Son argumentation ne portait pas sur les conséquences du déplacement de l'antenne, mais uniquement sur son absence.

f. Le TAPI a rejeté le recours par jugement du 23 mars 2023.

La nouvelle installation de téléphonie mobile, d'une hauteur de 8 m, avec systèmes techniques, support d'antennes et nouvelles antennes, devait prendre place sur la toiture d’un bâtiment sis en zone 2.

Il n'apparaissait pas que le département ait fait un usage abusif ou excessif de son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer l'autorisation de construire litigieuse sur la base des préavis défavorables de la CA.

L’antenne consistait, vu les plans versés au dossier, dans la pose d'une structure de 8 m de haut. Quand bien même A______ expliquait qu’elle serait fixée en retrait de 7.5 m du front de l’immeuble au nord-est, côté rue D______, elle dépasserait néanmoins de plus de 4 m la toiture de l’immeuble. Son impact sur le bâtiment ne serait donc ni minime ni imperceptible depuis l'espace public, ce qu'admettait par ailleurs la recourante lorsqu’elle parlait de la vue depuis la nouvelle place de la E______.

A______ n’avait pas démontré concrètement les limites posées par les LUS qui rendraient impossible de placer l’antenne à un endroit différent avec un impact moindre. Toute son argumentation s’articulait en effet uniquement sur l’absence d’installation à l’endroit litigieux. Le caractère réversible de l'installation n'était pas propre à diminuer son impact sur l'aspect du bâtiment.

C. a. A______ a formé recours contre ce jugement par acte expédié le 27 avril 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu à l’annulation dudit jugement, de même qu’à celle de la décision du 21 juin 2022 et à la délivrance de l’autorisation sollicitée, subsidiairement au renvoi du dossier au département pour lui délivrer une telle autorisation.

Le TAPI avait violé le droit et constaté les faits pertinents de manière inexacte, incomplète et arbitraire.

Elle avait démontré le besoin de couverture dans le secteur où était prévue la nouvelle antenne, en particulier l’absence de couverture 5G, par les cartes qu’elle avait produites devant le TAPI. Une antenne de téléphonie mobile équipée de nouvelles technologies telles que la 5G utilisait principalement les bandes hautes, à portée limitée, et couvrait un secteur d’un diamètre souvent inférieur à 100 m. Cela était particulièrement valable dans un environnement urbain densément construit et habité où en présence de nombreux LUS, ainsi que le besoin de tenir compte d’autres antennes déjà existantes tant pour les interférences que pour les valeurs limites à respecter, contraignant les opérateurs à réduire fortement la puissance de leurs installations. Il était donc notoire que le déploiement de la 5G nécessitait la construction d’un grand nombre d’antennes supplémentaires. En raison de la présence d’autres antennes déjà existantes qu’elle exploitait (GVIV à une distance de 200 m et GECB), ainsi que H______, la zone de recherche pour l’emplacement de la nouvelle antenne était très restreinte.

À l’intérieur de ce secteur, plusieurs bâtiments n’entraient pas en considération en raison de contraintes liées aux valeurs limites à respecter. Ainsi, les variantes étudiées sur les immeubles longs de l’avenue de la E______ n’étaient pas réalisables. Par exemple, il y avait des velux sur le bâtiment sis au n° 2 de ladite avenue, ce qui excluait la pose d’une antenne, faute de pouvoir ajouter un blindage. Elle avait dans un premier temps pris contact avec les propriétaires des immeubles situés aux 3 à 11,19 et 21 de cette même avenue et 5 et 7, avenue D______, mais avait essuyé des refus de la part de leurs propriétaires. Faute d’alternative, elle avait retenu l’immeuble sis 3, avenue D______, en limitant la hauteur de l’antenne prévue au strictement nécessaire d’un point de vue technique et en la plaçant à l’arrière du faîte pour minimiser l’impact visuel.

Il était souvent pratiquement impossible de faire en sorte qu’une antenne de téléphonie mobile soit imperceptible depuis l’espace public, en raison de la contrainte technique de devoir dépasser le toit et ses superstructures. L’impact visuel de l’installation projetée était en réalité tout à fait négligeable pour les raisons déjà évoquées devant le TAPI tenant à la hauteur du bâtiment, le retrait de l’antenne du front de l’immeuble, le gabarit des autres bâtiments et la présence d’un grand arbre. L’antenne ne serait visible avec une vue dégagée que depuis un court bout du trottoir le long de la route F______, à hauteur de la nouvelle E______ et en substance ne trancherait pas avec la modernité de cette nouvelle construction.

Le TAPI n’avait à tort pas pris en considération l’intérêt public à une desserte de qualité en service de téléphonie mobile et n’avait donc pas procédé à la pesée des intérêts qui s’imposait. Avant d’envisager un déplacement du projet, il fallait déjà établir que l’impact esthétique à l’endroit choisi était tellement important qu’il l’emporterait dans la pesée des intérêts face aux besoins de couverture. Une antenne n’était pas un élément décoratif et avait donc toujours un certain impact visuel négatif. Le jugement du TAPI revenait à dire que pour chacune d’elles qui n’était pas pratiquement invisible, le requérant devait évaluer des sites alternatifs en termes radiotechniques et financiers et démontrer que le site choisi était le seul réalisable. Une telle approche aurait pour effet de compliquer à l’excès, voire de rendre impossible la réalisation de l’obligation de couverture incombant à l’opérateur, ce qui était contraire au droit fédéral.

En l’absence d’une quelconque mesure de protection des bâtiments concernés, la question de la réversibilité de l’installation ne jouait aucun rôle. Le fait que le premier juge l’ait néanmoins abordée démontrait qu’il ne s’était pas suffisamment penché sur les spécificités du cas à juger et avait repris une motivation pré-rédigée d’un autre jugement. Le jugement attaqué souffrait donc d’un défaut de motivation, ce qui violait son droit d’être entendu.

En réalité, le TAPI aurait dû admettre l’existence d’un besoin de couverture et la nécessité de construire des antennes dans le secteur concerné. Il aurait ensuite dû constater que l’installation projetée aurait un impact visuel minime sur l’ensemble concerné et qu’il n’en affectait aucunement l’unité architecturale et urbanistique. Dans la pesée des intérêts, il serait arrivé à la conclusion que l’intérêt public d’éviter une atteinte à la qualité architecturale de l’ensemble était entièrement dominé par l’entrée de la nouvelle gare et plusieurs grands bâtiments modernes de moindre importance. L’intérêt public à une desserte de qualité en service de téléphonie mobile d’une zone très fréquentée du centre-ville l’emportait.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

La recourante se bornait à tenter de substituer sa propre appréciation à celle de la CA quant à l’impact esthétique de l’antenne. Il ne ressortait pas clairement de son recours qu’un autre emplacement soit impossible. En première instance, la nécessité de l’installation projetée avait été invoquée en raison de la destruction à venir du bâtiment comportant le site GECB. Or, il n’était pas exclu qu’une antenne puisse y prendre place à nouveau. Elle n’exposait pas pourquoi la nouvelle antenne ne pourrait pas être installée sur le site existant aux 33, avenue G______, comportant notamment une antenne de H______. Les CFF avaient de leur côté répondu qu’ils n’étaient pas intéressés par l’installation d’une nouvelle antenne sur le toit de leur bâtiment, dans la mesure où la prestation y était suffisante et qu’il n’y aurait pas de plus-value. Ainsi, la couverture à cet emplacement apparaissait suffisante.

c. Dans sa réplique du 5 juillet 2023, A______ a relevé que le département ne pouvait pas se borner à lui reprocher de ne pas avoir démontré l’absence d’alternative sans proposer lui-même des emplacements concrets, ce qu’il n’avait pas fait pour la simple et bonne raison qu’il n’y en avait pas. Elle avait bien expliqué en première instance qu’il existait une lacune de couverture qu’il s’agissait de combler, à savoir l’absence de 5G à la E______, où passaient tous les jours des milliers de voyageurs) et qu’il fallait également un site supplémentaire dans ce secteur pour éviter une saturation du réseau. Il était certes vrai qu’il n’était pas exclu qu’une antenne puisse prendre à nouveau place sur le site existant GECB. Toutefois, eu égard aux délais nécessaires pour l’exécution des travaux puis l’obtention de l’autorisation d’une nouvelle antenne, il fallait s’attendre à ce que ce site soit indisponible pendant au moins cinq à dix ans. Elle n’avait de plus aucune certitude que le nouveau propriétaire donnerait son accord pour une telle installation. Au 33, avenue G______, les valeurs limite étaient totalement épuisées par l’antenne existante, de sorte qu’une utilisation conjointe par plusieurs opérateurs était impossible. Cet état de fait, qui relevait d’un constat valable pour pratiquement tous les sites en ville de Genève avec ses nombreux lieux à utilisation sensible, pourrait être confirmé par le SABRA. La réponse négative des CFF correspondait à un texte standard utilisé pour refuser systématiquement toute installation d’antenne sur ces bâtiments locatifs. Ils en acceptaient uniquement sur leurs bâtiments techniques. A______ avait effectué cette démarche par acquit de conscience mais savait d’emblée qu’elle se heurterait à un refus.

d. Les parties ont été informées le 6 juillet 2023 que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Le litige porte sur la conformité au droit du refus de l'autorité intimée de délivrer à la recourante l'autorisation d’installer une antenne sur un immeuble du centre-ville de Genève.

Dans un premier grief d’ordre formel, la recourante se plaint d’une violation de son droit d’être entendue par le TAPI en raison d’un défaut de motivation de son jugement.

2.1 Le droit d'être entendu, tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), impose notamment à l'autorité judiciaire de motiver ses décisions, afin que le justiciable puisse les comprendre et exercer son droit de recours à bon escient. Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que le juge discute les griefs qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 142 II 154 consid. 4.2 ; ATA/715/2021 du 6 juillet 2021 consid. 3a).

Il suffit, selon la jurisprudence, que l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que la personne concernée puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; ATF 138 I 232 consid. 5.1). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (arrêts du Tribunal fédéral 2C_126/2015 du 20 février 2015 consid. 4.1 ; 1B_295/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2.2). En revanche, une autorité se rend coupable d'une violation du droit d'être entendu si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (arrêt du Tribunal fédéral 2C_879/2015 du 29 février 2016 consid. 4.1).

2.2 En l’espèce, la recourante critique la motivation des premiers juges en lien avec la question de la réversibilité de l’installation qui ne jouerait en l’espèce aucun rôle, pour en déduire que ces derniers ne se seraient pas suffisamment penchés sur les spécificités du cas à juger. Ce faisant, elle ne critique pas spécifiquement une absence de motivation du jugement entrepris. Le fait qu’elle ne soit pas d’accord avec le raisonnement et la solution retenus par le TAPI ne signifie pas encore que cette instance n’aurait pas discuté tous les griefs pertinents pour l’issue du litige. Au demeurant, la recourante a pu faire valoir au stade du recours ses griefs en toute connaissance de cause, étant rappelé que le recours à la chambre administrative ayant un effet dévolutif complet, celle-ci dispose d'un libre pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 61 LPA).

Partant, le grief d’une violation du droit d’être entendu doit être rejeté.

3.             Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700 ; art. 1 al. 1 LCI). L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT).

En droit genevois, sont réputées constructions ou installations toutes choses immobilières ou mobilières édifiées au-dessus ou au-dessous du sol ainsi que toutes leurs parties intégrantes et accessoires, soit notamment les antennes électromagnétiques (art. 1 let. d du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RCI - L 5 05.01).

En tant qu'installations techniques d'infrastructure, les antennes nécessitent l'octroi d'une autorisation de construire (Denis ESSEIVA, ORNI et téléphonie mobile : la jurisprudence s'est multipliée, in Journées suisses du droit de la construction 2007, p. 117).

4.             Les autorités, services, instituts et établissements fédéraux ainsi que les cantons doivent, dans l’accomplissement des tâches de la Confédération, prendre soin de ménager l’aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé, les curiosités naturelles et les monuments historiques et, lorsque l’intérêt général prévaut, d’en préserver l’intégrité (art. 3 al. 1 de la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage du 1er juillet 1966 - LPN - RS 451). L'octroi d'une autorisation de construire pour une installation de téléphonie mobile, même à l'intérieur de la zone à bâtir, constitue une tâche fédérale au sens de l'art. 2 LPN, raison pour laquelle les autorités compétentes sont tenues de ménager les objets protégés mentionnés à l'art. 3 al. 1 LPN (ATF 131 II 545 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_703/2020 du 13 octobre 2022 consid. 7.2 et l’arrêt cité).

4.1 Selon l'art. 5 al. 1 LPN, le Conseil fédéral établit, après avoir pris l’avis des cantons, des inventaires d’objets d’importance nationale ; il peut se fonder à cet effet sur des inventaires dressés par des institutions d’État ou par des organisations œuvrant en faveur de la protection de la nature, de la protection du paysage ou de la conservation des monuments historiques. Les critères qui ont déterminé le choix des objets seront indiqués dans les inventaires.

4.2 La nécessité d'assurer une couverture adéquate du réseau de téléphonie mobile sur tout le territoire suisse, qu'il soit bâti ou non (ATF 138 III 570 consid. 4.2) constitue un intérêt public qui découle de l'art. 92 al. 2 Cst. et de l'art. 1 al. 1 et 2 LTC (arrêt du Tribunal fédéral 1C_18/2008 du 15 avril 2008 consid. 3.3). L'intérêt à disposer d'une bonne couverture de téléphonie mobile en termes de qualité et de quantité est donc susceptible de l'emporter sur l'atteinte minime portée à l'aspect protégé d'un site ainsi qu'aux monuments historiques mentionnés à l'art. 3 LPN (ATF 133 II 321 consid. 4.3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_703/2020 du 13 octobre 2022 consid. 7.6 et les arrêts cités). Cela étant, la construction d'une antenne de téléphonie mobile ne présente le plus souvent pas des intérêts équivalents ou même supérieurs à la protection d'un objet classé d'importance nationale (Denis ESSEIVA, ORNI et téléphonie mobile : la jurisprudence s'est multipliée, in Journées suisses du droit de la construction 2007, p. 124 et les références citées).

5.             5.1 Les plans d’affectation règlent le mode d’utilisation du sol (art. 14 al. 1 LAT). Ils délimitent notamment les zones à protéger (art. 14 al. 2 LAT), qui comprennent les localités typiques, les lieux historiques, les monuments naturels ou culturels (art. 17 al. 1 let. c LAT).

À Genève, les zones protégées constituent des périmètres délimités à l’intérieur d’une zone à bâtir ordinaire ou de développement et qui ont pour but la protection de l’aménagement et du caractère architectural des quartiers et localités considérés (art. 12 al. 5 LaLAT).

5.2 Les zones de la Vieille-Ville et du secteur sud des anciennes fortifications sont des zones à protéger au sens de l'art. 17 LAT. Elles font l'objet de dispositions particulières incluses dans la LCI, à savoir ses art. 83 à 88 (art. 28 et 29 al. 1 let. c aLAT).

5.3 À teneur de l’art. 89 LCI, l’unité architecturale et urbanistique des ensembles du XIXe siècle et du début du XXe siècle situés en dehors des périmètres de protection : a) de la Vieille-Ville et du secteur sud des anciennes fortifications ; b) du vieux Carouge, doit être préservée (al. 1). Sont considérés comme ensemble les groupes de deux immeubles ou plus en ordre contigu, d’architecture identique ou analogue, ainsi que les immeubles séparés dont l’emplacement, le gabarit et le style ont été conçus dans le cadre d’une composition d’ensemble dans le quartier ou dans la rue (al. 2).

5.4 Les ensembles dont l’unité architecturale et urbanistique est complète sont maintenus. En cas de rénovation ou de transformation, les structures porteuses, de même que les autres éléments particulièrement dignes de protection doivent, en règle générale, être sauvegardés. L’art. 12 est en outre applicable (al. 1). Le département peut ouvrir la procédure d’adoption d’un plan de site des ensembles considérés comme dignes de protection en application de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites (al. 3). Le département établit et publie sans tarder une liste indicative des ensembles visés à l’al. 1 (al. 4 art. 90 LCI).

Il appartient en conséquence au DT de déterminer quels immeubles répondent à la définition d’un ensemble au sens des art. 89 ss LCI (ATA/1247/2019 du 13 août 2019 consid. 6).

Sous réserve des dispositions spéciales de la présente section (section 2 Ensembles du XIXe siècle et du début du XXe siècle), les dispositions générales de la LCI sont applicables aux immeubles visés à l’art. 89 LCI.

5.5 Selon le Tribunal fédéral, une antenne de téléphonie mobile composée de trois mâts n'a pas la qualité de construction indépendante. En conséquence, elle ne doit pas respecter les normes de construction comme la hauteur du gabarit d'un immeuble (arrêt du Tribunal fédéral 1A.18/2004 du 15 mars 2005 consid. 6.1 ; ATA/180/2008 du 15 avril 2008 consid. 16). Ce raisonnement s'applique à fortiori pour une antenne composée d'un seul mât (ATA/595/2007 du 20 novembre 2007 consid. 10d).

5.6 L’art. 3 al. 3 LCI prévoit notamment que les demandes d’autorisation sont soumises, à titre consultatif, au préavis des communes, des départements et des organismes intéressés. L’autorité de décision n’est pas liée par ces préavis.

Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités et n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/486/2023 du 9 mai 2023 consid. 6.1.1 et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/422/2023 du 25 avril 2023 consid. 5.3 et les références citées).

5.7 À teneur de l'art. 15 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la CA ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

Cette disposition renferme une clause d’esthétique, qui constitue une notion juridique indéterminée, laissant ainsi un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation. L’autorité de recours s’impose une retenue particulière lorsqu’elle estime que l’autorité inférieure est manifestement mieux en mesure qu’elle d’attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, soit quand elle fait appel à des connaissance spécialisée ou particulières. Ainsi, dans l’application de cette disposition, une prééminence est reconnue au préavis de la CMNS lorsqu’il est requis par la loi (ATA/435/2023 du 25 avril 2023 consid. 5g et les références citées).

5.8 Constitue un abus du pouvoir d'appréciation le cas où l'autorité reste dans le cadre fixé par la loi, mais se fonde toutefois sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; ATA/555/2022 précité consid. 6b ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 179).

5.9 Les installations de téléphonie mobile peuvent être soumises aux dispositions cantonales ou communales d'esthétique ou d'intégration (arrêt du Tribunal fédéral 1C_371/2020 du 9 février 2021 consid. 3.2 et les références citées ; ACST/11/2021 du 15 avril 2021 consid. 8a). Dans l'application d'une clause générale d'esthétique, l'autorité ne doit cependant pas se laisser guider par son sentiment subjectif ; il lui appartient de motiver soigneusement son appréciation (ATF 141 II 245, consid. 4.1 non publié ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_49/2015 du 9 décembre 2015 consid. 3.3).

Les normes précitées doivent toutefois être appliquées dans les limites du droit supérieur, en particulier du droit fédéral de l'environnement d'une part et des télécommunications d'autre part : elles ne peuvent notamment pas violer les intérêts publics que consacre la législation sur les télécommunications, laquelle tend à garantir à tous les cercles de la population, dans toutes les parties du pays, un service universel de télécommunication fiable et à prix accessible (ATF 142 I 26 consid. 4.2 = JDT 2017 I 226 233) et doivent tenir compte de l'intérêt à disposer d'un réseau de téléphonie mobile de bonne qualité et d'une concurrence efficace entre les fournisseurs de téléphonie mobile. En particulier, l'application des normes communales ou cantonales d'esthétique ou de protection des sites ne peut rendre impossible ou compliquer à l'excès la réalisation de l'obligation de couverture qui incombe à l'opérateur en vertu du droit fédéral (ATF 141 II 245 consid. 7.1 et 7.8 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_371/2020 précité consid. 3.2 et les références citées ; ACST/11/2021 du 15 avril 2021 consid. 8a). De plus, les règles relatives aux installations de téléphonie mobile doivent en principe être élaborées sur la base d’une évaluation globale des problèmes pertinents. Des mesures de protection isolées en faveur de certains objets à protéger sont réservées (ATF 142 I 26 consid. 4.2 = JDT 2017 I 226 233 ; ATF 138 II 173 consid. 6.3 = RDAF 2013 I 569, p. 570 ; ATF 133 II 321 consid. 4.3.4).

Une disposition communale d’esthétique générale sur la hauteur des toits n’est pas compatible avec la législation sur les télécommunications si elle revient à interdire largement la construction d’antennes téléphoniques en territoire bâti (ATF 133 II 353 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_265/2014 du 22 avril 2015 consid. 7.8 = JdT 2016 I p. 300).

5.10 Selon le Tribunal fédéral, si l'on ne peut nier qu'une antenne de téléphonie mobile présente nécessairement un aspect visuel déplaisant, encore faut-il, pour exclure son implantation, qu'elle péjore de manière incontestable les qualités esthétiques d'un endroit donné (arrêt du Tribunal fédéral 1C_465/2010 du 31 mai 2011 consid. 3.3).

6.             Dans la zone à bâtir, l'opérateur n'a aucune obligation fondée sur le droit fédéral d'établir un besoin et une pesée des intérêts ; c'est à lui seul qu'il incombe de choisir l'emplacement adéquat de l'installation de téléphonie mobile (arrêt du Tribunal fédéral 1A.140/2003 du 18 mars 2004 consid. 3.1 et 3.2). Il appartient ainsi à chaque opérateur de décider du déploiement de son réseau et de choisir les sites appropriés en zone à bâtir. Le devoir de la Confédération et des cantons se limite donc à garantir la coordination et l'optimisation nécessaire des sites de téléphonie mobile et à veiller à ce que les intérêts de l'aménagement du territoire, de l'environnement, de la nature et du paysage soient dûment pris en compte dans les procédures de concession et d'autorisation (arrêt du Tribunal fédéral 1A.162/2004 du 3 mai 2005 consid. 4 ; ATA/786/2014 du 7 octobre 2014 consid. 6 et les références citées). Les fournisseurs de services de télécommunication ne peuvent toutefois prétendre réaliser des équipements de téléphonie mobile sur n'importe quelle partie du territoire d'une commune sous prétexte qu'ils seraient propres à répondre aux objectifs poursuivis par la loi fédérale sur les télécommunications ou la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (arrêts du Tribunal fédéral 1A.22/2004 et 1P.66/2004 du 1er juillet 2004 consid. 4.3 et les références citées).

Selon le Tribunal fédéral, une autorité cantonale ou communale délivrant une autorisation de construire ne peut se contenter d’apposer son veto en raison du défaut d’intégration de l’installation, sur la base d'une règlementation cantonale ou communale. Il lui appartient de collaborer à la recherche de solutions alternatives praticables en zone constructible (arrêt du Tribunal fédéral 1C_643/2018 du 30 septembre 2019 consid. 4.3 et la référence citée). L’examen d'emplacements alternatifs ne s'impose que pour autant que l'implantation en zone à bâtir se heurte à un empêchement juridique, tel qu'une clause d'esthétique ou de protection du patrimoine (arrêt du Tribunal fédéral 1C_231/2016 du 21 novembre 2016 consid. 4.4.2). Ce n'est que dans l'hypothèse où il existe des solutions alternatives concrètes dans la zone constructible qu’un éventuel refus d’implantation, valablement fondé sur des motifs d’esthétique, pourrait se justifier ; de son côté, le requérant doit démontrer que la hauteur de l'installation se justifie pour des raisons techniques (arrêt du Tribunal fédéral 1C_49/2015 du 9 décembre 2015 consid. 4.3).

7.             En l'espèce, l'antenne litigieuse est prévue sur un bâtiment qui ne se trouve pas dans la liste indicative des ensembles (art. 90 al. 4 LCI). Il n’est au bénéfice d’aucune mesure de protection, que ce soit fédérale (inventaire ISOS) ou cantonale, ce qu’aucune des parties ne remet en cause. Seule donc la clause d’esthétique prévue à l’art. 15 LCI entre en considération.

La recourante reproche au TAPI et à l’autorité intimée de ne pas avoir concrètement analysé l'impact visuel du projet, qui serait minime.

Elle estime en outre que la juridiction précédente aurait effectué une pesée des intérêts arbitraire, le besoin en couverture devant l’emporter sur l’intérêt à la préservation du site concerné.

Eu égard à la jurisprudence précitée, la pesée des intérêts à effectuer dans le cadre d'un projet visant l'installation d'une antenne de téléphonie mobile dépend du degré de protection du site ainsi que du degré d'atteinte qu'il subira en raison de l'installation de téléphonie mobile projetée.

Le faîte du bâtiment en cause s'élève à plus de 28 m et il est prévu que l’antenne soit fixée en retrait de 7.5 m du front de l'immeuble (au nord-est, côté rue D______), sur le pan de toit donnant sur l'arrière du bâtiment (nord-ouest, à l'opposé de la route F______), ce qui ressort d’un plan produit à l’appui de la demande d’autorisation. D’une hauteur totale de 8 m, elle dépasserait le faîte de 4 m. La recourante ne remet pas en cause le fait qu'elle serait visible depuis la route F______, l’avenue G______ et la E______, en particulier l’esplanade I______. La CA a tenu compte de la présence d’un arbre qualifié de majestueux dont il ressort des photos produites par la recourante qu’il atteint pratiquement la hauteur de l'immeuble. Se situant devant l'angle Est de ce dernier, il masque effectivement partiellement la vue sur la toiture de l'immeuble, sans toutefois que cela soit complètement pour grande partie, en particulier depuis l'esplanade précitée. Contrairement à ce qu’elle soutient, son impact visuel sur l'ensemble en demi-cercle au bout duquel se trouve le bâtiment en question n’est donc pas « quasiment nul ».

Quand bien même la hauteur de l’antenne serait réduite à ce qui est techniquement nécessaire, elle dépasserait le toit de quelques mètres.

Dans son troisième préavis, défavorable, qui ne saurait être qualifié de « sommaire », la CA a relevé que le bâtiment en question s’érigeait en tête avec un gabarit conséquent, qui faisait partie intégrante d’un ensemble intéressant  s’inscrivant en demi-cercle, sur un axe à forte fréquentation offrant de larges dégagements. Il venait forger l’articulation avec la E______, formant ainsi, de par son implantation et son architecture, une configuration urbaine intéressante. La pose de l’antenne sur la toiture nuirait à la qualité architecturale de cet ensemble, ainsi qu’à l’harmonie du lieu, produisant un impact visuel péjorant le site, même en tenant compte de la présence d’un arbre majestueux. Face à cette analyse, d’une instance spécialisée en la matière, l’avis de la recourante selon laquelle les immeubles entourant la E______ seraient extrêmement hétéroclites et pour la plupart d'un aspect très banal, de sorte qu'on ne saurait parler d'une unité architecturale de grande qualité, ou encore que la modernité de la construction de la nouvelle E______ et des immeubles alentour permettrait sans autre qu’il soit fait fi de l’apparence d’une antenne téléphonique, est de peu de poids.

Contrairement à ce qu’elle soutient encore, le préavis de la CA que le département a suivi pour refuser l’autorisation n’a pas pour conséquence qu’il serait exigé, en vertu de l'art. 15 LCI, une absence totale d'un impact visuel négatif, même sur des bâtiments sans valeur architecturale particulière, ce qui reviendrait à interdire purement et simplement la construction d'antennes de téléphonie mobile.

Dès lors, au vu de la structure imposante et de la hauteur de 8 m de l’antenne projetée, son impact visuel sur le site sera important, quand bien même elle ne dépasserait que de 4 m le toit et ne serait entièrement visible qu’à partir de certains points du domaine public. Elle péjorera tant les qualités esthétiques de l’ensemble d’immeubles à la tête duquel elle est censée prendre place que la vue offerte en particulier depuis la route F______, le début de l’avenue G______ et l’esplanade précitée. Il convient de tenir compte de l’impact – qui sera important – de l’installation projetée sur l’ensemble du quartier, et non uniquement sur le bâtiment.

Enfin, il semble que d’autres toits du voisinage puissent accueillir l’antenne en cause, étant relevé qu’il n’appartient pas à l’autorité judiciaire de déterminer lesquels, mais que le département a identifié quelques possibilités.

Au vu de ce qui précède, l'installation litigieuse portera au site une atteinte grave au sens de la jurisprudence. Ce constat est par ailleurs renforcé par le préavis de la CA, qui est important.

Dans la pesée des intérêts à effectuer, il y a lieu de tenir compte de la nécessité ou non d'augmenter la couverture du réseau dans la zone litigeuse. Même si elle n'a certes aucune obligation fondée sur le droit fédéral d'établir un besoin de couverture, la recourante ne prouve toutefois pas à satisfaction de droit que la couverture dans la zone serait si déficitaire qu'elle nécessiterait absolument l'installation d'une antenne à l'emplacement litigieux. Si elle prétend avoir démontré le besoin de couverture, elle perd toutefois de vue que les cartes qu'elle a produites ne sont pas munies d'une empreinte officielle, de sorte que leur force probante doit être relativisée. Même si tel avait été le cas, ces cartes ne montrent pas que la couverture actuelle serait insuffisante dans la zone concernée, quand bien même des milliers de personnes transitent quotidiennement dans ce quartier, notamment des pendulaires, tant en voiture, qu’à pied, pour sortir et rejoindre la E______.

Au vu de ce qui précède, la clause esthétique l'emporte sur l’intérêt de la recourante à installer l'antenne litigieuse.

Il sera encore noté qu’il existe, comme déjà relevé, aux alentours directs plusieurs bâtiments, en particulier à l’avenue D______, qui a priori ne devraient pas se voir reconnaître une protection patrimoniale, susceptibles de recevoir une antenne de téléphonie mobile. En ce sens, il apparait que l'autorité a évoqué des solutions alternatives praticables.

Certes, le refus opposé à l'opérateur complique l'exécution de son obligation de couverture. Il ne le complique toutefois pas à l’excès dans la mesure où existent a priori des solutions alternatives, pour autant encore que les installations existantes soient insuffisantes, ce qui est allégué mais pas démontré.

C’est en conséquence conformément à la loi et sans abuser de son pouvoir d’appréciation que le département a refusé la délivrance de l’autorisation de construire sollicitée.

Au vu de tout ce qui précède, le recours sera rejeté.

8.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 avril 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 23 mars 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Stephan KRONBICHLER, avocat de la recourante, au département du territoire-OAC, à B______ ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Valérie LAUBER, juges.

 

 

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :