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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/875/2023

ATA/380/2023 du 18.04.2023 ( MARPU ) , REFUSE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/875/2023-MARPU ATA/380/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 18 avril 2023

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

A______
représentée par Mes Benoît Merkt et Miguel Oural, avocats

contre

B______
représentée par Me Bertrand Reich, avocat



Vu, en fait, le courrier de la B______, ainsi que d'autres employeurs affiliés conventionnellement (ci-après : B______) du 24 février 2023 informant A______ (ci-après : A______) de sa « décision ferme et irrévocable » de ne pas conclure de contrat avec elle en raison de son incapacité à mettre en œuvre son offre dans le respect des conditions de l’appel d’offres et de ses ressources ne répondant pas aux exigences clairement énoncées dans l’appel d’offres portant sur le marché public relatif à une solution de gestion des effectifs des assurés, actifs et pensionnés ; que dans la décision d’adjudication du 17 juin 2022, des réserves avaient été émises quant à la capacité d’A______ à pouvoir respecter les délais de réalisation du projet, compte tenu du peu d’importance de son effectif, de sorte qu’elle devait fournir des garanties en lien avec son organisation et la disponibilité de ressources ; que des rencontres postérieures à cette décision avaient démontré le départ de collaborateurs annoncés comme personnes clés dans l’offre et l’absence de ressources à l’interne pour les remplacer ; que la solution proposée le 17 février 2023, d’un partenariat stratégique avec C______ (ci-après : C______), contrevenait à l’interdiction de sous-traitance, modifiait l’offre d’A______ et ne levait en rien la réserve émise dans la décision du 17 juin 2022 ; que les conditions pour la conclusion d’un contrat sur la base de l’adjudication n’étaient donc pas remplies ;

vu le recours avec requête d’effet suspensif et de mesures superprovisionnelles déposé le 10 mars 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) par A______ ; qu’au fond, il devait être constaté la nullité de la décision du 24 février 2023, subsidiairement son annulation, prononcé et ordonné à B______ de « négocier de bonne foi avec A______ en vue d’une conclusion du contrat faisant l’objet du marché en cause », « en tout état » un délai devait lui être octroyé pour quantifier et motiver la prétention en réparation du dommage que B______ devait être condamnée à lui verser ; que le marché en question lui avait été attribué avec une note très nettement supérieure au deuxième soumissionnaire ; que ses ressources en personnel n’avaient pas été considérées comme rédhibitoires par B______ ; que la relation avec la B______ postérieurement à l’adjudication avait été constructive et productive ; que le dossier d’appel d’offres publié pour le 1er tour de la procédure prévoyait explicitement la possibilité d’une sous-traitance, pour autant que « cela ne nuise pas à la saine et efficace concurrence et que cela ne crée pas une position cartellaire [ ] ne d[evait] pas dépasser 45% de l’ensemble du marché » ; que tout candidat devait d’ailleurs remplir une annexe d’annonce des sous-traitants ; que pour le 2ème tour, le dossier d’appel d’offres renvoyait aux conditions du 1er tour, avec réitération de la limite de 45% pour la sous-traitance ; qu’alors que le cahier des charges pour le 1er tour était muet sur la question de la sous-traitance, celui du 2ème tour excluait la sous-traitance en tout ou en partie des prestations dans une clause probablement standard pré-rédigée et non pertinente ; que dans le cadre des questions-réponses du 2ème tour, B______ avait indiqué que le recours à la location de services était admis aux conditions énoncées ; qu’au moment du dépôt de son dossier pour le 2ème tour puis de l’adjudication, elle-même ne prévoyait pas de recourir à des ressources externes ; qu’en novembre 2022 toutefois, deux de ses employés avaient donné leur congé ; qu’elle avait alors pris toutes les mesures nécessaires pour renforcer son équipe, par cinq personnes expérimentées, y compris les collaborateurs dont les services étaient loués à C______, dans le cadre d’un contrat au sens de la loi fédérale sur le service de l’emploi et la location de services du 6 octobre 1989 (LSE - RS 823.11), de sorte que les personnes concernées étaient parfaitement intégrées à A______ ; que cela représenterait 260/600 jours, soit 43.33% du marché ; qu’elle en respectait donc les exigences ;

que ce qu’elle considérait être une décision de révocation de l’adjudication pouvait faire l’objet d’un recours, conformément aux art. 15 al. 1bis let. e de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et 55 let. f du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01) ;

que l’urgence justifiant le prononcé de mesures superprovisionnelles et provisionnelles tenait « par exemple » dans le fait que le marché pourrait lui échapper, ce qui lui causerait un préjudice important et irréparable, sous la forme d’un gain manqué, de lourds frais en lien avec la procédure qu’elle devait présentement engager, de même qu’au niveau réputationnel ; qu’aucun intérêt public ou privé ne s’opposait au prononcé de l’effet suspensif vu l’adjudication le 17 juin 2022 et les échanges s’en étant suivis avec la B______ jusqu’à la décision du 24 février 2023, de sorte que la procédure n’était pas particulièrement rapide ;

que la décision entreprise était entachée de vices, à savoir l’absence de désignation comme décision, une motivation quasi inexistante, une non-indication des voies de recours et un contenu pour le moins équivoque ; qu’elle ne pouvait dès lors pas recourir en toute connaissance de cause ; que B______ ne l’avait pas prévenue qu’elle encourait un risque de révocation de l’adjudication, de sorte que son droit d’être entendue avait été violé ; que la gravité de ces vices avait pour conséquence que la décision était nulle et non seulement annulable ;

qu’il n’existait aucun des motifs de révocation de la liste exhaustive prévue à l’art. 42 RMP, soit des motifs rendant la conclusion du contrat avec l’adjudicataire impossible, inexigible ou au contraire au droit des marchés publics (ATA/232/2016) ; que comme détaillé ci-dessus, le recours à des employés d’C______, complètement intégrés à son organisation, disposant des autorisations nécessaires pour exercer une activité de location de services, était parfaitement autorisé et il était inexact d’affirmer que la mise en œuvre de ce personnel devrait encore être finalisée ; que le recours à de la location de services, qui n'était nullement de la sous-traitance, constituait une différence minime par rapport à l’offre initialement soumise et tendait de plus à répondre aux inquiétudes de B______ quant à ses ressources ; que durant la procédure de sélection, B______ lui avait clairement répondu que la location de services était admissible ; que quand bien même il devait être considéré qu’il s’agirait de sous-traitance, celle-ci était clairement envisagée dans le dossier d’appel d’offres comme, détaillé ci-dessus, de sorte qu’elle en remplirait les conditions ;

qu’il n’y avait aucun motif s’opposant à la levée de la « réserve », dont la portée était discutable ;

vu la décision sur mesures superprovisionnelles du 10 mars 2023 faisant interdiction à la B______, jusqu’à droit jugé sur la requête en restitution de l'effet suspensif, de rendre une nouvelle décision d'adjudication, de conclure tout contrat, de rendre une décision d'interruption et de lancer une nouvelle procédure ayant un objet identique ou similaire au marché public en cause ;

vu la détermination de B______ du 16 mars 2023, laquelle a conclu à ce qu’il soit constaté que la demande d’octroi d’effet suspensif était sans objet, dit que le recours était irrecevable, subsidiairement devait être rejeté ;

qu’elle a exposé qu’à l’issue du 1er tour du marché public en question, trois soumissionnaires avaient été sélectionnés pour le 2ème tour, à savoir A______, C______ (qui avait renoncé à y participer) et D______ ; que les documents du 2ème tour mentionnaient le fait que la décision d’adjudication n’engageait pas l’adjudicateur à conclure le contrat avec l’adjudicataire ; que la décision d’adjudication, qui comportait « des réserves », à la suite de craintes quant à la pérennité de la recourante et donc de son produit, n’avait pas été contestée et était entrée en force ; qu’entre le 17 juin 2022 et le 24 février 2023, de nombreux échanges avaient eu lieu entre les deux parties en vue de la conclusion d’un contrat, notamment au sujet de changements au sein du personnel de la recourante, soit le départ de personnes clés dans le projet en cause, de sorte que la nouvelle équipe serait constituée pour près de la moitié de personnes mises à disposition par C______ ; qu’au cours de la procédure, elle avait effectivement confirmé que la location de personnel au sens de la LSE était possible selon les modalités précisées ;

que la chambre administrative avait retenu que l’éventuelle obligation de conclure le contrat après une adjudication, respectivement la possibilité de renoncer, relevait en principe du droit privé des contrats (ATA/437/2019 du 16 avril 2019 cons. 6a), ce qui était également l’avis de la doctrine ; que son choix, ou en langage commun sa décision, ne découlait ainsi en rien du droit public, mais bien du droit privé qui s’appliquait à la relation contractuelle qui aurait pu être nouée entre les parties et donc par extension aux aspects précontractuels de cette relation ; que le courrier du 24 février 2023 ne comportait pas le terme de révocation puisqu’il n’en était pas une, l’adjudication du marché n’étant aucunement en cause ; que ce courrier exprimait uniquement sa renonciation à conclure un contrat ; qu’en l’absence de décision attaquable, de même que de compétence de la chambre administrative en matière de droit privé, le recours était irrecevable ;

que dès lors que le droit des marchés publics ne s’appliquait pas au litige, c’était le principe ordinaire de l’effet suspensif qui s’appliquait selon l’art. 66 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ; que les mesures provisionnelles sollicitées ne pourraient être ordonnées puisqu’elles étaient dénuées de tout sens et que rien ne les justifiait concrètement ; qu’il n’existait aucune menace d’un danger difficile à réparer en l’absence de circonstances donnant à penser qu’une nouvelle décision d’adjudication puisse intervenir incessamment ou qu’une nouvelle procédure de mise en concurrence portant sur l’objet soit sur le point d’être lancée ; que s’il lui venait la fantaisie de prendre une nouvelle décision d’adjudication, d’interrompre le marché, ou de procéder à une mise en concurrence portant sur le même marché, les voies de droit alors ouvertes permettraient à la recourante d’obtenir aisément la mise à néant d’une telle décision ;

que sur le fond, elle ne conclurait pas de contrat avec la recourante, compte tenu de son incapacité à remplir les conditions clairement posées ;

vu le « recours complété » d’A______ du 16 mars 2023 ;

vu sa réplique sur effet suspensif du 3 avril 2023 aux termes de laquelle elle a réaffirmé qu’il n’y avait aucun doute sur la qualification de décision de révocation au sens de l’art. 48 RMP, entraînant l’application du droit des marchés publics après l’adjudication ; que si le Tribunal fédéral retenait que l’adjudication n’emportait pas obligation de conclure, un adjudicateur devait négocier de bonne foi avec l’adjudicataire en vue de la conclusion du contrat, respectivement ne pouvait pas refuser de le conclure sans autre formalité ni motifs fondés, soit notamment sans rendre de décision valable ; que dans la mesure où B______ avait clairement exprimé sa décision de ne plus conclure avec elle, mais n’avait nullement fait part de son intention de ne conclure aucun contrat relatif au marché, ni a fortiori de renoncer audit marché, une décision de révocation était nécessaire ;

qu’il semblait que l’intimée ne s’opposait pas à l’octroi de l’effet suspensif ; que sa volonté à elle était bien d’arriver à un accord et à la conclusion d’un contrat avec B______, de sorte que ses conclusions visant à ce qu’il lui soit interdit de conclure tout contrat relatif au marché ne saurait être interprétée de bonne foi comme une interdiction de conclusion de contrat avec elle-même ; qu’une interdiction d’interrompre le marché n’était pas impossible et donc sans objet, dès lors que la décision de révocation avait pour conséquence de replacer les parties dans la situation qui était la leur avant l’adjudication ; qu’il n’existait aucun intérêt privé ou public, vu l’argumentation de l’intimée, s’opposant au prononcé de mesures provisionnelles confirmant les mesures superprovisionnelles prononcées le 10 mars 2023 ;

que les parties ont été informées, le 5 avril 2023, que la cause était gardée à juger sur effet suspensif ;

Considérant, en droit :

que la recevabilité du recours demeure réservée ;

que les mesures provisionnelles sont prises par la présidente ou le vice-président de la chambre administrative ou, en cas d'empêchement de ceux-ci, par un autre juge (art. 21 al. 2 LPA ; art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative du 26 mai 2020) ;

que l'AIMP a pour objectif l'ouverture des marchés publics (art. 1 al. 1 AIMP) ; il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l'égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l'impartialité de l'adjudication (art. 1 al. 3 let. b AIMP) et assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3 let. c AIMP) ;

que selon l’art. 48 RMP, l’adjudication peut être révoquée, sans indemnisation, pour l'un des motifs énoncés à l'art. 42 RMP ; qu’il peut notamment s’agir de motifs propres à l’adjudicataire, telles les exigences générales de participation à un marché public, relatives au respect des conditions sociales de travail, de paiement des impôts et des cotisations sociales (ATA/232/2016 du 15 mars 2016 consid. 5 ; Étienne POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, p. 230 n. 364 ; Martin BEYELER, Der Geltungsanspruch des Vergaberechts, 2012, p. 1501 n. 2738) ; qu’il doit s’agir de motifs qui rendent la conclusion d’un contrat avec l’adjudicataire impossible, inexigible ou contraire au droit des marchés publics (ATA/232/2016 précité consid. 5 ; Martin BEYELER, ibid.) ; que l'autorité adjudicatrice rend alors une décision de révocation motivée, notifiée par courrier à l'intéressé, avec mention des voies de recours ;

que l’art. 48 RMP utilisant une formule potestative concernant l’exercice du droit de révocation, une liberté d’appréciation est reconnue au pouvoir adjudicateur dans la prise d’une telle décision, que celui-ci l’exerce à la suite d’une pesée des intérêts pour respecter le principe de la proportionnalité (ATA/490/2017 du 2 mai 2017 consid. 5 ; ATA/232/2016 précité consid. 5 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, n. 2.4.3.1 p. 383) ;

que le RMP ne prévoit pas de procédure particulière en matière de révocation d’une adjudication (ATA/1190/2021) ;

que les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délais de recours (art. 46 al. 1 LPA) ; qu’une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA) ;

que le droit des marchés publics est formaliste, ce que la chambre administrative a rappelé à plusieurs reprises (ATA/243/2020 du 3 mars 2020 consid. 4d ; ATA/970/2019 du 4 juin 2019 et les références citées), notamment lorsqu'elle a confirmé des décisions d'exclusion d'offres fondées sur la non-production des attestations requises dans l'appel d'offres au titre de condition de participation à la procédure de soumission (ATA/188/2021 du 23 février 2021 consid. 5 : ATA/1208/2020 du 1er décembre 2020 consid. 5) ;

qu'en matière de marchés publics, aux termes des art. 17 al. 1 AIMP et 58 al. 1 RMP, le recours n'a pas d'effet suspensif ; toutefois, en vertu des art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP, l'autorité de recours peut, d'office ou sur demande, octroyer cet effet pour autant que le recours paraisse suffisamment fondé et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose ;

que la restitution de l'effet suspensif constitue une exception en matière de marchés publics, et représente une mesure dont les conditions ne peuvent être admises qu'avec restriction (ATA/1349/2019 précité ; ATA/446/2017 précité consid. 2 ; ATA/62/2017 du 23 janvier 2017 consid. 2 ; ATA/793/2015 du 5 août 2015 consid. 2) ;

qu’aux termes de l’art. 66 LPA, sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l’autorité qui a pris la décision attaquée n’ait ordonné l’exécution nonobstant recours (al. 1) ; toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3) ;

que lorsque l'effet suspensif a été retiré ou n'est pas prévu par la loi, l'autorité de recours doit examiner si les raisons pour exécuter immédiatement la décision entreprise sont plus importantes que celles justifiant le report de son exécution ;

qu’elle dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire ;

que la restitution de l'effet suspensif est subordonnée à l'existence de justes motifs, qui résident dans un intérêt public ou privé prépondérant à l’absence d’exécution immédiate de la décision ou de la norme (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

que pour effectuer la pesée des intérêts en présence qu’un tel examen implique, l'autorité de recours n'est pas tenue de procéder à des investigations supplémentaires, mais peut statuer sur la base des pièces en sa possession (ATF 117 V 185 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_435/2008 du 6 février 2009 consid. 2.3 et les arrêts cités) ;

que l'examen de la requête suppose une appréciation prima facie du bien-fondé du recours ; l'effet suspensif doit être refusé au recours manifestement dépourvu de chances de succès et dont le résultat ne fait aucun doute ; inversement, un diagnostic positif prépondérant ne suffit pas d'emblée à justifier l'octroi d'une mesure provisoire, mais suppose de constater et de pondérer le risque de préjudice (ATA/987/2021 du 24 septembre 2021 ; ATA/217/2021 du 1er mars 2021 consid. 2 ; ATA/1349/2019 du 9 septembre 2019 ; Benoît BOVAY, Recours, effet suspensif et conclusion du contrat, in Jean-Baptiste ZUFFEREY/Hubert STÖCKLI, Marchés publics 2010, Zurich 2010, p. 317) ;

que les décisions sur effet suspensif sont par nature provisoires et que jusqu’à droit jugé au fond, la restitution de l’effet suspensif peut être demandée en tout temps ;

que le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit d’obtenir une décision motivée. Il suffit que l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_404/2019 du 5 décembre 2019 consid. 4.2.1).

qu’en l’espèce, la recourante se plaint d’une violation de son droit d’être entendue, sous la forme d’une motivation insuffisante de la décision querellée ;

que ce grief ne paraît, a priori, pas manifestement fondé, dans la mesure où le courrier litigieux du 24 février 2023 expose que la conclusion du contrat apparaît impossible après des pourparlers infructueux. Or, la recourante connaissait bien les pourparlers auxquels se réfère la motivation, puisqu’elle y a pris part, respectivement la « réserve » émise au terme de l’adjudication du marché en ce qu’elle rencontrait des difficultés d’effectifs pour honorer la prestation en cause ;

que la qualification de ce courrier fera l’objet de l’arrêt au fond, étant relevé qu’il ne saurait a priori être d’emblée exclu qu’il s’agisse, comme plaidé par la recourante, d’une révocation au sens de l’art. 48 RMP ;

que quand bien même ce qui serait alors une décision au sens de l’art. 4 LPA ne remplirait pas les conditions de forme prévues à l’art. 47 LPA, faute en l’occurrence d’être désignée comme telle et d’indiquer les voies et délais de recours, ces irrégularités n’entraîneraient prima facie aucun préjudice en particulier pour la recourante qui a pu interjeter recours à son encontre en toute connaissance de cause et faire valoir tous les arguments utiles ;

qu’en tout état, que le courrier attaqué du 24 février 2023 doive être considéré, comme soutenu par la recourante, comme une révocation au sens de l’art. 48 RMP ou non, elle n’a pas démontré l’urgence qu’il y aurait d’assortir son recours de l’effet suspensif ou de mesures provisionnelles ;

que l’intimée a réaffirmé dans son écriture qu’après de nombreux échanges, elle avait constaté qu’il ne serait pas possible de conclure avec la recourante un contrat conforme à l’offre soumise ;

qu’au vu du dossier, ce grief n’apparaît pas d’emblée dépourvu de fondement ;

que la recourante soutient qu’aucun motif de révocation n’est réalisé, qu’elle serait en mesure d’exécuter le marché public litigieux aux conditions de son offre, en faisant pour partie appel à de la location de services ;

que l’intimée considère qu’elle n’a pas obtenu les garanties suffisantes que la recourante disposait de ressources nécessaires pour exécuter le marché ;

que les chances de succès du recours apparaissent à première vue insuffisantes pour octroyer l'effet suspensif, étant rappelé que l'absence d'un tel effet au recours constitue la règle en matière de marchés publics et que la recourante se prévaut de l’application des dispositions ad hoc sur le fond ;

que l’intimée ne se prévaut pas d’un intérêt public prépondérant à l'exécution immédiate du marché, affirmant au contraire qu’elle n’entend pas rendre une nouvelle décision d’adjudication « incessamment » ou être « sur le point » de lancer une nouvelle procédure de mise en concurrence portant sur l’objet ;

que la durée et la teneur des pourparlers laissent plutôt penser que l’intimée entend s’assurer avant tout d’une bonne exécution du marché en cause, d’une certaine complexité ;

que dans ces conditions, la recourante ne rend pas vraisemblable qu’elle subirait un dommage irréparable si l’effet suspensif n’était pas restitué à son recours, ou des meures provisionnelles ordonnées sur la base de l’art. 66 LPA ;

qu’il y a en l’espèce aucun motif de déroger au principe d’absence d’effet suspensif aux recours en marchés publics ;

que la demande d’octroi de l’effet suspensif sera refusée ;

qu’il sera statué avec la décision au fond sur les frais de la présente décision.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse d'octroyer l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

si elle soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l’envoi ;

 

communique la présente décision à Mes Benoît Merkt et Miguel Oural, avocats de la recourante, ainsi qu'à Me Bertrand Reich, avocat de B______.

 

Le vice-président :

 

 

C. Mascotto

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :