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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2868/2020

ATA/1176/2022 du 22.11.2022 sur JTAPI/501/2022 ( LCI ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;CONSTRUCTION ET INSTALLATION;TRAVAUX DE CONSTRUCTION;PLAN DIRECTEUR;PLAN D'AFFECTATION CANTONAL;TRAVAUX SOUMIS À AUTORISATION;PERMIS DE CONSTRUIRE;CONFORMITÉ À LA ZONE;PESÉE DES INTÉRÊTS;INTÉRÊT PUBLIC;PRINCIPE DE LA COUVERTURE DES FRAIS;PRINCIPE DE L'ÉQUIVALENCE(CONTRIBUTION CAUSALE);LÉGALITÉ;ÉMOLUMENT;EXCEPTION(DÉROGATION)
Normes : LaLAT.13B; LCI.154; RCI.254; RCI.257
Résumé : Admission partielle du recours du propriétaire de parcelles ayant sollicité une autorisation de construire et s'étant vu opposé un refus conservatoire par le département. Le projet de modification de zones en cause n'ayant pas été adopté dans le délai légal de deux ans suivant le refus de délivrer l'autorisation litigieuse, celui-ci n'est plus fondé.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2868/2020-LCI ATA/1176/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 novembre 2022

3ème section

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Erin Wood Bergeretto, avocate

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 

et

COMMUNE B______
représentée par Me Aurèle Muller, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 mai 2022 (JTAPI/501/2022)


EN FAIT

1) Le A______ (ci-après : A______) est propriétaire de la parcelle n° 34 de la commune B______ (ci-après: la commune), sise en zone 4B, située au croisement de la route C______, du chemin D______ et du chemin E______. Un immeuble de logements, constitué de 4 entrées et comportant 36 appartements, y est érigé.

2) Au début de l'année 2018, A______ a pris contact avec la commune afin de lui présenter son projet de démolition de l'immeuble précité pour construire un bâtiment plus important et comportant plus de logements.

3) Après divers échanges et la tenue de plusieurs séances, la commune a, le 23 mai 2019, formulé des remarques au sujet du projet, relevant notamment que l'aspect massif du bâtiment projeté ne s'intégrait pas au bâti existant et que la forme de « U » était trop différente des barres existantes.

4) En réponse au courriel d'une représentante de F______, pilotant le projet, la commune a indiqué le 26 septembre 2019 que, malgré les modifications apportées, le projet restait trop massif par rapport au gabarit que permettait la zone 4B. Le Conseil administratif de la commune n'était pas opposé à une densification de la parcelle, mais souhaitait que le projet soit conforme à son plan directeur communal (ci-après: PDCom), et plus particulièrement à la fiche de mesures 6-1-1 intitulée « un centre pour B______ » (ci-après : la fiche 6-1-1). Il recommandait de procéder à un déclassement en zone de développement 3 ou éventuellement en zone de développement 4A.

5) Le 17 décembre 2019, A______ a déposé auprès du département du territoire (ci-après: le département) une demande d'autorisation de démolir l'immeuble en question, laquelle a été enregistrée sous la référence M 1______.

6) À la même date, il a déposé une requête en autorisation de construire portant sur la construction d'un immeuble de 68 logements constitué de 2 barres parallèles de quatre allées chacune reliées au nord par deux autres allées, avec parking souterrain, aménagements extérieurs et abattage d'arbres. La requête a été enregistrée sous la référence DD 2______.

7) Dans le cadre de l'instruction de la DD 2______, divers préavis ont été recueillis.

Le 29 janvier 2020, l'office de l'urbanisme (ci-après: le SPI) s'est prononcé défavorablement. Un courrier de la commune lui était parvenu le 2 décembre 2019 l'informant de sa volonté de renouveler et d'intensifier le secteur situé entre la route C______, la route G______ et la rue H______, conformément à la fiche 6-1-1 de son PDCom adopté en 2014 et approuvé par le Conseil d'État le 11 mars 2015. Il préconisait donc l'application du principe de refus conservatoire, conformément à l'art. 13B al. 1 à 4 de la loi d'application de la loi fédérale de l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT – L 1 30) pendant deux ans, sous conditions que la ville B______ réalise une enquête publique portant sur la modification des limites de zones avant la fin de l'année 2020 et que ladite modification soit adoptée avant la fin de l'année 2021.

Le 4 février 2020, la commune a préavisé négativement le projet qui n'était pas conforme au PDCom et risquait de péjorer la qualité de ce quartier appelé à muter. Une procédure de modification des limites de zones avait été initiée et A______ était invité à y participer.

Parmi les autres préavis récoltés, plusieurs instances ont demandé des modifications ou des compléments, notamment la commission des monuments, de la nature et des sites (CMNS), la police du feu, l'office cantonal de l'eau (OCEau), la direction des autorisations de construire (DAC) et l'office des transports (OT).

8) Le 10 mars 2020, le conseil municipal de la commune a adopté la délibération n° 3______ ouvrant un crédit de CHF 82'000.- afin de procéder à l'étude d'une modification de zones dans le périmètre « B______-centre » en application de la fiche 6.1.1.

9) Le 20 juillet 2020, le département a refusé de délivrer l'autorisation de construire sollicitée, se fondant sur l'art. 13B LaLAT. Le projet se situait dans le secteur identifié par la fiche A02 du Plan directeur cantonal 2030 (ci-après: PDCn 2030) qui prévoyait une densification de secteurs déjà bâtis, contribuant à une densification ponctuelle des noyaux suburbains et à une utilisation optimale des zones à bâtir et du sol. À titre de mesures de mise en œuvre, en cas de besoin, les secteurs situés en zones ordinaires 4A, 4B ou 4BP ou de développement 4A, 4B ou 4BP, pouvaient être déclassés en zone de développement 2 ou 3. Vu son importance, le projet risquait de compromettre les objectifs d'urbanisme qui résulteraient de la modification des limites de zones. Suivant les préavis de la commune et du SPI, une planification préalable à l'aide d'une modification des limites de zones était en l'espèce nécessaire.

Un bordereau d'émolument d'immeuble d'un montant de CHF 33'550.-, dont CHF 250.- correspondant aux frais d'enregistrement de la DD 2______, était joint à cette décision.

10) Le 14 septembre 2020, A______ et Madame I______, personne de contact auprès de celui-ci, ont formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: TAPI), concluant principalement à son annulation et à la réduction de l'émolument prévu par bordereau du 20 juillet 2020. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé au département pour complément d'instruction. Préalablement, ils sollicitaient l'audition de Madame J______ de F______, ainsi que de Monsieur K______, architecte du projet.

Le projet était conforme à la destination de la zone 4B, tant par sa hauteur que par sa densité de logements et son gabarit. Il était également conforme au PDCn 2030, situant le périmètre dans une zone à densité modérée. Le PDCom ne prévoyait pas de zone de développement dans ce périmètre. Aucun plan directeur de quartier ou autre plan localisé de quartier n'était en vigueur.

L'application de l'art. 13B LaLAT était réservée à des situations exceptionnelles. Hormis les échanges préalables avec la commune et le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 10 mars 2020, la commune n'avait jamais évoqué la nécessité de densifier le périmètre, mais avait indiqué qu'une zone de développement n'était pas envisagée et que le plan directeur de quartier préalable, mentionné dans le PDCom, n'était pas d'actualité. La première condition d'application de l'art. 13B LaLAT relative à la nécessité du blocage n'était donc pas remplie. De plus, la commune n'envisageait pas une densité de construction importante dans le périmètre où se situait la parcelle litigieuse. Au contraire, elle avait insisté pour que le volume et la configuration du bâtiment restent modérés afin de limiter l'impact dans le bâti existant. Les immeubles avoisinants étaient typiques d'une zone 4B et le projet modifié s'intégrait sans difficulté dans son environnement. Lors de la séance du Conseil municipal du 10 mars 2020, la commune avait indiqué ne pas être sûre d'avoir besoin du gabarit de la zone de développement 3 mais éventuellement de celle de la zone de développement 4A. Le projet ne contrecarrait pas cet objectif d'urbanisme. La seconde condition de l'art. 13B LaLAT n'était donc pas non plus remplie.

Le refus conservatoire violait le principe de proportionnalité et la garantie de la propriété. L’intérêt public lié à la construction de soixante-huit logements neufs supplémentaires, dans un contexte de pénurie, devait prévaloir. La commune demeurait floue sur ses intentions de planification : ni le périmètre concerné, ni le type de zone envisagé, ni même l'objectif d'urbanisme sous-jacent n'étaient précisés, ni connus. Aucune enquête ni consultation publiques n'avaient encore eu lieu. Il était figé dans ses droits dans l'attente de l'issue d'une planification dont l'aboutissement final était incertain, en plus d'être notoirement longue.

La modification de zones évoquée par la commune supposait qu'elle soit nécessaire en raison d'une modification sensible des circonstances, ce qui n'était pas le cas. De plus, selon la jurisprudence, un refus conservatoire ne pouvait pas être invoqué uniquement à l'appui d'une planification communale.

Le cas d'espèce était similaire à celui tranché par la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) le 8 mars 2016 (ATA/208/2016). L'application de l'art. 13B LaLAT étant abusive si l'objectif d'urbanisme invoqué n'était pas avancé avant le dépôt de la requête et si l'autorité était au courant du projet de construction depuis de nombreux mois. Or, la commune n'avait annoncé son intention de planification au département qu'en décembre 2019, en réaction au dépôt de sa demande d’autorisation de construire.

Une perception de l'entier de l'émolument contrevenait aux principes de proportionnalité et d'égalité de traitement par rapport à un dossier dont l'instruction était menée à terme, ce qui n’avait pas été le cas en l’espèce.

11) Le 12 octobre 2020, la commune a sollicité son intervention dans la procédure.

12) À la demande de l'ensemble des parties, le TAPI a prononcé la suspension de la procédure le 13 janvier 2021.

13) Le 9 mars 2021, le Conseil municipal de la commune a adopté la résolution n° 238 approuvant l'engagement de la procédure en vue de la modification des limites de zones sur son territoire (création d'une zone de développement 4A) à B______-centre.

Le 20 avril 2021, il a adopté la délibération n° 4______ ouvrant un crédit complémentaire de CHF 88'000.- destiné à compléter l'étude d'une modification des limites de zones dans le périmètre « B______-centre » défini par la fiche 6.1.1 du PDCom.

14) Le 5 juillet 2021, le plan n° 5______, relatif à la création d'une zone de développement 4A au lieudit « B______-centre », a été mis à l'enquête publique jusqu'au 19 août 2021.

15) Le 2 septembre 2021, A______ et Mme I______ ont indiqué à la commune avoir étudié le projet de loi relatif à la modification des limites de zones. Ils estimaient leur projet compatible avec les objectifs mis en avant.

16) Le 29 septembre 2021, A______ et Mme I______ ont sollicité la reprise de la procédure.

17) Le 12 octobre 2021, le Conseil municipal de la commune a adopté la délibération n° 6______ préavisant favorablement le projet de loi 30'208 (ci-après : PL 30'208) modifiant les limites de zones avec la création d'une zone 4A de développement dans le périmètre « B______-centre ».

18) Le 27 octobre 2021, la commune a transmis ses observations au TAPI. S'en rapportant à justice quant à la recevabilité du recours formé par A______, elle contestait celle du recours formé par Mme I______, faute d'intérêt personnel dans la cause. Au fond, elle concluait au rejet du recours.

L'audition de témoins n'était pas nécessaire. À titre subsidiaire, elle sollicitait l'audition de ses propres représentants.

Le projet ne respectait pas les objectifs de densification prévus par le PDCn 2030, le PDCom et le PL 30'208. Le bâtiment projeté était massif et sa forme en « U » occupait une part importante de la parcelle, dont le centre était imperméabilisé par le parking souterrain, réduisant les surfaces de pleine terre. L'édification d'un bâtiment conforme au gabarit de la zone 4A de développement permettrait un supplément de hauteur, dégageant ainsi des espaces au sol. La forme en « U » conduisant à un effet de cloisonnement contraire à l'objectif de la modification de zones et le phasage du projet prévu auraient pour conséquence de prolonger le chantier pendant cinq ans, entraînant notamment des problèmes de stationnement. Le passage à la zone de développement aurait pour conséquence l'adoption de plans localisés de quartier (ci-après: PLQ) permettant de travailler sur les formes, les volumétries et l'implantation des bâtiments de manière cohérente à l'échelle du quartier, tout en diversifiant les catégories de logements, en créant un centre urbain ainsi qu'en contrôlant les prix et les loyers sur l'ensemble des futurs logements.

L'édification d'un bâtiment selon les normes de la zone 4A de développement répondait mieux à l'intérêt public visant la construction de logements.

Le caractère communal de la planification n'avait pas d'incidence sur l'application de l'art. 13B LaLAT. Les jurisprudences évoquées par A______ et Mme I______ ne pouvaient s'appliquer, dès lors qu'elles ne concernaient pas des modifications des limites de zones, mais l'adoption d'un plan de site, respectivement d'un plan d'utilisation du sol localisé, visant à protéger une zone donnée. Ces plans n'étaient pas directement prévus par le PDCom, lequel avait force obligatoire pour les autorités.

L'application de l'art. 13B LaLAT n'avait de sens qu'avant que le plan d'aménagement discuté ne soit adopté et ne supposait pas que le projet législatif soit déjà engagé. Or, la modification de zones en question était prévue dans le PDCom, adopté en 2014 et les circonstances nécessitant cette modification y étaient en outre clairement exposées. La commune n'avait pas non plus donné de garanties quant à la conformité du projet litigieux. Elle avait remis un exemplaire de son PDCom lors de la première séance et avait été constante dans son appréciation du projet tout au long du processus. À lire son PDCom, ses objectifs de densification n'étaient pas flous. Elle n'avait jamais laissé entendre qu'elle ne souhaitait pas le mettre en œuvre. Il prévoyait que l'évolution devait se faire à moyen terme, soit cinq à sept ans après son adoption, la modification de zones ayant été initiée en 2019 et son adoption étant prévue pour le premier semestre 2022. Cette modification n'étant qu'une mise en œuvre du PDCom et prévue par celui-ci, il n'était pas nécessaire que les circonstances se soient notablement modifiées.

Le processus de modification des limites de zones était déjà bien engagé. À l'issue du délai référendaire et de la procédure d'opposition, le PL 30'208 serait déposé par le Conseil d'État au Grand Conseil en vue de son adoption.

19) Le 12 novembre 2021, le département a conclu au rejet du recours.

La parcelle concernée se situait dans un périmètre dans lequel le PDCn 2030 prévoyait la poursuite de la densification de la couronne urbaine (fiche A02). Selon la carte illustrant les principes de densification, la parcelle était comprise dans un périmètre de densification modérée, avec un indice de densité minimal de 0,8 à 1.

Elle se situait par ailleurs dans un périmètre ayant fait l'objet du PL 30'208 précité. Quand bien même le projet correspondait aux possibilités offertes par la zone d'affectation actuelle, sa réalisation allait à l'encontre des intentions urbanistiques visant à garantir un aménagement concerté du périmètre concerné lorsque l'affectation du sol serait modifiée et régie par les principes de la zone de développement. Le projet de planification était non seulement conforme à la planification cantonale mais aussi partagé par le canton.

La densité envisagée par la commune n'était pas déterminante et l'objectif de la planification était avant tout de coordonner l'aménagement du secteur par le biais d'une zone de développement et des PLQ qui en découlaient. Il était donc manifeste que le projet refusé était de nature à contrecarrer des objectifs d'urbanisme clairement définis.

Le principe de proportionnalité n'était pas violé, dès lors que la mesure prévoyait une durée limitée et visant à préserver d’une atteinte la planification envisagée.

L'instruction du projet avait été menée de manière complète, puisque toutes les instances de préavis concernées l’avaient examiné. Les demandes de complément, quand bien même elles ne leur avaient pas été adressées, démontraient un examen circonstancié et que la mesure conservatoire avait été prise avant tout dans l'intérêt de limiter les frais. L’émolument était donc justifié.

20) Le 31 janvier 2020, A______ et Mme I______ ont répliqué, s'en rapportant à justice quant à la recevabilité du recours de cette dernière et à l'intervention de la commune.

Les auditions sollicitées étaient nécessaires dans la mesure où la commune contestait la teneur des séances tenues avec les représentants du syndicat.

La commune n'avait pas respecté les délais figurant dans le préavis du SPI, l'enquête publique s'étant déroulée plus de dix-huit mois après son courrier du 2 décembre 2019.

Un refus conservatoire ne pouvait être prononcé alors que la planification impliquait une longue procédure d'adoption non aboutie au moment de statuer sur la demande d'autorisation de construire, comme en l'espèce.

Le projet ne contrecarrait en rien la densité de construction modérée voulue par la commune dans ce périmètre. Des espaces communs étaient prévus au rez-de-chaussée ainsi qu'un jardin communautaire avec divers aménagements extérieurs, dont une place de jeux. Aucune image directrice n'avait été envisagée par la commune.

21) Le 17 février 2022, le département a dupliqué.

L'intention de la commune avait été clairement exprimée le 9 décembre 2020, soit avant le dépôt de la requête en autorisation de construire.

22) Le 23 février 2022, la commune a dupliqué.

Aucun référendum n'avait été déposé contre le projet de modification des limites de zones en cours, lequel avait été approuvé par le Conseil d'État le 12 janvier 2022. Le projet était désormais en main de la commission du Grand Conseil. La loi pourrait être vraisemblablement votée d'ici juillet 2022. Les délais fixés à l'art. 13B al. 2 LaLAT ne commençaient à courir que dès le prononcé du refus conservatoire. Enfin, le travail de création de l'image directrice était très avancé.

23) Par jugement du 12 mai 2022, le TAPI a déclaré irrecevable le recours de Mme I______ et rejeté celui du syndicat.

Il n'y avait pas lieu d'ordonner les mesures d'instructions sollicitées, en particulier l'audition de différents témoins.

Les conditions de l'art. 13B LaLAT étaient remplies et le département en avait fait une application correcte, sans abuser de son pouvoir d'appréciation.

La parcelle concernée se situait en zone 4B ordinaire dans un secteur voué à une densification ponctuelle des noyaux suburbains. Elle entrait dans le périmètre du projet de modification de limites de zones initié par le département en vue d'un déclassement en zone 4A. L'essentiel des logements, équipements et espaces publics du quartier avaient été réalisés entre les années 50 et 70. Le tissu bâti avait peu évolué depuis lors et de nombreux bâtiments ne correspondaient plus aux standards d'habitabilité, de protection contre le bruit et d'efficience énergétique. Dès lors que le contexte avait toutefois évolué depuis l'adoption du plan d'affectation actuellement en vigueur, l'art. 21 al. 2 LAT ne s'opposait pas à la modification de la planification projetée.

Il ressortait du PDCom que la volonté de densification du périmètre actuellement en zone 4B existait déjà au moment de l'élaboration dudit plan en 2014, lequel indiquait que les projets permettant le développement d'une centralité urbaine étaient encore au stade de l'intention, mais qu'une modification des conditions cadres était nécessaire pour dégager du potentiel à bâtir afin de renouveler et d'intensifier le cœur de la ville B______. Ce PDCom avait été validé par le Conseil d'État en 2015. De plus, la commune avait toujours manifesté son opposition au projet du syndicat. Bien qu'elle s'était déclarée favorable au principe de densification de la parcelle, elle avait aussi clairement manifesté sa volonté de procéder à un déclassement de la zone vers une zone de développement 3 ou une zone de développement 4A. Le fait que la commune n'avait concrètement entamé la procédure de modification de limites de zones qu'après la décision de refus conservatoire n'était pas pertinent. Le projet litigieux contrevenait aux objectifs d'urbanisme poursuivis par la commune et partagés par le canton. Même à considérer que le projet serait conforme aux normes de la zone 4B actuelle, un bâtiment conforme aux normes de la zone 4A de développement permettrait une densification accrue de la parcelle, répondant mieux à l'intérêt public lié à la construction de logements touchés par la pénurie, le tout dans une perspective plus globale.

Il ne ressortait pas du dossier que le département avait abandonné le projet de modification de zone et la parcelle concernée apparaissait toujours comme faisant partie dudit projet. La mise à l'enquête publique avait eu lieu moins de douze mois après le prononcé du refus conservatoire. La procédure était désormais à bout touchant, le projet de loi étant à l'étude auprès de la commission de l'aménagement du Grand Conseil. L'aspect temporel relatif à l'art. 13B LaLAT était respecté. Peu importait que le processus de modification des limites de zones ne suive pas l'échéancier indiqué dans le préavis du SPI, dès lors que seules les contraintes temporelles légales étaient juridiquement contraignantes pour le département.

Le montant de l'émolument d'immeuble avait été calculé conformément aux bases légales applicables par le département, qui avait procédé à une analyse de la demande d'autorisation de construire sous tous ses aspects et de manière circonstanciée. Son montant ne violait pas les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité.

24) Le 15 juin 2022, A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement précité, concluant à son annulation de même qu’à celle de la décision du département du 20 juillet 2020, subsidiairement la réduction du montant du bordereau du 20 juillet 2020 et au renvoi des dossiers au département pour qu'il délivre, en application des normes de la zone 4B, les autorisations de démolir et de construire requises, afin qu'il complète l'instruction et délivre lesdites autorisations. Préalablement, il sollicitait l'audition de la pilote et de l'architecte du projet.

Le TAPI avait abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que les conditions justifiant le refus conservatoire du 20 juillet 2020 étaient réalisées, ce sans entendre les témoins requis. Il avait également violé le principe de la proportionnalité et de la garantie de la propriété en confirmant le refus conservatoire opposé à la demande en autorisation de construire DD 2______. Le montant de l'émolument d'immeuble violait les principes de couverture des coûts, de l'équivalence et de la proportionnalité et devait être annulé, à tout le moins réduit.

Les auditions requises permettraient de démontrer qu’il n’était pas au courant des intentions de planification de la commune, ainsi que les raisons pour lesquelles son projet correspondait aux objectifs d'urbanisme souhaités par la commune et le canton. Le projet de modification de zones visait un déclassement en zone 4A et non en zone 3, tel que prévu par le PDCom, ce qui ne changeait pas les possibilités de logements supplémentaires. Les personnes en charge du projet pouvaient en attester, tout comme du fait que le maître d'ouvrage était disposé à examiner certaines modifications, diverses adaptations ponctuelles n'étant pas exclues. Ces éléments étaient essentiels pour l'examen du litige.

Les conditions d'application de l'art. 13B LaLAT n'étaient pas remplies. La commune n'avait pas marqué son opposition au projet de manière constante, puisqu'elle en avait au contraire relevé les mérites dans son courrier du 23 mai 2019 notamment ; des modifications avaient d'ailleurs été apportées pour tenir compte de ses remarques. Les objectifs d'urbanisme mis en avant par la commune n'existaient pas au moment de la décision de refus conservatoire. Ce dernier l’empêchait d'user de son droit de propriété. La commune n'avait commencé à concrétiser son projet de modification de zones que bien après le prononcé du refus conservatoire du 20 juillet 2020.

Le bordereau était contesté puisqu’au vu du refus conservatoire, l'instruction du dossier n'avait pas été menée à terme.

Mme I______ n'a pas recouru contre ce jugement du TAPI prononçant l'irrecevabilité de son recours.

25) Le 31 août 2022, le département a conclu au rejet du recours.

La condition de l'intérêt actuel au recours pourrait faire défaut puisque non seulement le délai de l'art. 13B al. 2 LaLAT semblait être échu, mais aussi car A______ avait déposé une nouvelle requête en autorisation de construire sur la parcelle concernée.

Au fond, l'analyse du TAPI ne prêtait pas le flanc à la critique, de sorte que les griefs du recourant ne pouvaient qu'être rejetés.

26) Le 2 septembre 2022, la commune a conclu au rejet du recours.

A______ avait déposé, le 27 juillet 2022, une nouvelle demande d'autorisation de construire un immeuble de logements, un parking souterrain, et un jardin, avec abattages d’arbres, enregistrée sous le numéro DD 7______.

Le PL 13'058 avait été approuvé le 8 juin 2022 par la commission du Grand Conseil, qui avait déposé son rapport le 16 août 2022. Le conseiller d'État en charge du département avait notamment indiqué que le projet litigieux n'était pas autorisable et ce indépendamment de la modification de zones, faute de respecter la législation actuelle. Renvoyé en séance plénière, ce projet de loi devait être traité dans les plus brefs délais.

Ses prises de position avaient été claires et constantes. Le projet de modification des zones avait été annoncé au moins deux mois avant que le recourant choisisse malgré tout de déposer sa demande d'autorisation. Si A______ était privé, dans l'immédiat, de mener son projet de démolition et reconstruction, il restait propriétaire de l'immeuble et allait voir, une fois la modification de zones adoptée, ses droits à bâtir augmenter, ce qui lui permettrait de réaliser une opération de meilleure qualité. L'intérêt public à la création d'un quartier dynamique et animé, cohérent et harmonieux à l'échelle du secteur primait son intérêt privé.

27) Les 3 et 28 octobre 2022, le recourant a persisté dans les termes de sa contestation du refus conservatoire.

Les conditions de l'art. 13B al. 2 La LAT n'était pas remplies, dès lors que la modification des limites de zones n'avait pas été adoptée dans un délai de deux ans.

Il disposait d'un intérêt actuel au recours, déposé avant l'échéance du délai précité, en particulier à faire constater qu'il avait repris ses droits et que le refus conservatoire du 20 juillet 2020, dont les conditions n'avaient pas été remplies, devait être annulé. À défaut, l'instruction de la DD 2______ risquait de ne pas être reprise et l'autorisation de ne pas être délivrée, alors que les conditions étaient remplies. Le grief concernant l'émolument restait d'actualité.

28) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur le bien-fondé du refus du département du 20 juillet 2020 de délivrer l'autorisation de construire sollicitée, en se fondant sur l'art. 13B LaLAT.

3) Dès le 21 juillet 2022, plus de deux ans se sont écoulés depuis la décision de refus conservatoire du département. Le plan de modification de zones (PL 13'058) n'a, à ce jour, pas encore été adopté par le Grand Conseil. Par ailleurs, le recourant a, le 27 juillet 2022, déposé une nouvelle requête en autorisation de construire. Se pose ainsi la question de savoir si celui-ci conserve un intérêt au recours.

a. Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir les parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée (let. a), ainsi que toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b). Les let. a et b de cette disposition doivent se lire en parallèle. Ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s'il était partie à la procédure de première instance (ATA/868/2022 du 30 août 2022 consid. 2a ; ATA/1392/2021 du 21 décembre 2021 consid. 2a).

b. Pour disposer d'un intérêt digne de protection, le recourant doit avoir un intérêt actuel et pratique à l'admission du recours (ATF 135 I 79 consid. 1 ; 134 II 120 consid. 2; arrêt TF 2F_21/2016 du 6 juillet 2018 consid. 3.1). L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ; 136 II 101 consid. 1.1) ; s'il s'éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 ; 118 Ib 1 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3). Ainsi, dans un souci d'économie de procédure, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non pas de prendre des décisions à caractère théorique (ATF 136 I 274 ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 483).

L'intérêt digne de protection consiste dans l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au recourant, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait. Il implique que le recourant soit touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grande que la généralité des administrés et se trouve, avec l'objet de la contestation, dans un rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF 138 II 162 consid. 2.1.2 ; 137 II 40 consid. 2.3 ; 133 II 468 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_837/2013 du 11 avril 2014 consid. 1.1). Le recourant doit démontrer que sa situation factuelle et/ou juridique peut être avantageusement influencée par l'issue du recours (ATA/14/2022 du 11 février 2022 consid. 5c). Un intérêt seulement indirect à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée n'est pas suffisant (ATF 138 V 292 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 1C_665/2013 du 24 mars 2014 consid. 3.1).

c. L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/467/2017 du 25 avril 2017 consid. 3b). La contestation ne peut excéder l'objet de la décision attaquée, c'est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée ou aurait dû se prononcer. L'objet d'une procédure administrative ne peut donc pas s'étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/1060/2018 du 9 octobre 2018 consid. 3a et les références citées).

d. En l'espèce, bien que le délai de deux ans prévu par l'art. 13B al. 2 LaLAT est échu et que le recourant a déposé une nouvelle demande d'autorisation de construire sur sa parcelle concernée, il appert que celui-ci conserve un intérêt pratique évident à voir tranchée la question de la conformité au droit du refus conservatoire prononcé par le département le 20 juillet 2020 à l'encontre de son projet de construction. En effet, l'issue de la présente procédure est susceptible d'avoir des conséquences concrètes sur sa situation, notamment s'agissant de l'avancée de son projet immobilier ainsi que d'un éventuel préjudice qu'il aurait subi dans l'hypothèse où la mesure conservatoire prononcée devait être considérée comme infondée.

4) Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu et sollicite l'audition de témoins.

a. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_539/2019 du 19 mars 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 5.1.1). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l’issue du litige (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_41/2020 du 9 décembre 2020 consid. 3.1).

b. En l’espèce, à l’instar du TAPI, la chambre de céans considère que le dossier est complet et en état d’être jugé. La procédure contient toutes les pièces utiles permettant notamment de comprendre, d'une part, le contexte dans lequel se sont déroulés les contacts préalables entre la commune et les requérants de l'autorisation de construire querellée et, d'autre part, d'apprécier la conformité ou non du projet de construction aux objectifs d'urbanisme des autorités.

Par appréciation anticipée de preuve, il apparaît que les auditions sollicitées ne sont ni utiles, ni nécessaires à la solution du litige, comme cela ressort des considérants qui suivent.

Il ne sera ainsi pas donné suite à la demande d’acte d’instruction du recourant.

Pour les mêmes motifs, le grief d’une prétendue violation du droit d’être entendu par le TAPI sera écarté.

5) En vertu de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

6) Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 13B LaLAT.

a. Sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (art. 1 al. 1 let. a LCI).

Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation de construire (art. 1 al. 6 LCI).

b. Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Selon le système prévu par la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsque la consultation d'une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 8c ; ATA/537/2017 du 9 mai 2017 consid. 4c ; ATA/956/2014 du 2 décembre 2014 et les références citées).

7) a. Selon l'art. 13B LaLAT, lorsque l'adoption, la modification ou l'abrogation d'un plan d'affectation du sol paraît nécessaire, à l'effet de prévenir une construction qui serait de nature à compromettre des objectifs d'urbanisme ou la réalisation d'équipements publics, le département peut refuser une autorisation de construire sollicitée en vertu de l'art. 1 LCI (al. 1 1ère phr.). Il ne peut s'écouler plus de deux années entre la décision de refus et l'adoption, la modification ou l'abrogation d'un plan d'affectation du sol, la mise à l'enquête du projet devant intervenir dans les douze mois à compter de la décision de refus. À défaut, le propriétaire reprend la libre disposition de son terrain, dans les limites des lois ou plans d'affectation du sol en vigueur, soit, dans les zones de développement, selon les normes de la zone ordinaire ou selon le plan d'affectation spécial en force (al. 2). Le délai cité à l'al. 2 est suspendu en cas de recours contre une décision prise dans le cadre de la procédure d'adoption du plan d'affectation ; il en est de même en cas de référendum municipal ou cantonal (al. 4).

b. Selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, l'art. 13B LaLAT – en substance équivalent à l'art. 17 de l'ancienne LaLAT – est une mesure provisionnelle individuelle tendant à protéger un processus de révision des plans d'affectation en paralysant l'application du plan en vigueur par l'effet anticipé du plan en gestation. La mesure assure le travail de révision contre les risques représentés par les projets de construction soumis à autorisation qui pourraient le menacer. Le refus vise à maintenir la liberté d'action de l'autorité chargée de l'établissement du plan d'affectation (ATA/146/2021 du 9 février 2021 consid. 7b ; ATA/1087/2020 du 3 novembre 2020 consid. 4d ; ATA/231/2014 du 8 avril 2014 consid. 3b et 3c et les arrêts cités).

L'art. 13B LaLAT ne suppose pas que le processus législatif soit déjà engagé. Il suffit, d'après le texte légal, qu'une modification du régime des zones paraisse nécessaire. Dès lors que cette nécessité est constatée, et sans qu'il soit indispensable que les intentions se soient déjà concrétisées dans un texte, une intervention est possible sur la base du refus conservatoire (ATA/45/2008 du 5 février 2008 consid. 4c). L'application de cette disposition ne nécessite pas l'existence d'un plan d'affectation, mais uniquement son projet lié à des objectifs d'urbanisme (ATA/45/2008 précité consid. 5a). Il suffit que la construction envisagée paraisse de nature à contrecarrer les objectifs visés (ATA/1087/2020 précité consid. 4d ; ATA/146/2021 précité consid. 7b).

L'ancien Tribunal administratif a confirmé le refus d'une autorisation de construire fondé sur l'art. 13B LaLAT, notamment au motif que la possibilité de mettre en œuvre la densification et la mixité prévue par l'étude d'aménagement dans le secteur incluant la parcelle litigieuse était susceptible d'être compromise par le projet de construire de nouvelles halles d'exposition, celles-ci limitant le choix laissé aux concepteurs du futur plan d'affectation (ATA/45/2008 précité consid. 6b). Dans une autre affaire concernant la construction d'un bâtiment comportant deux logements, la chambre administrative a donné raison au département qui n'avait pas fait usage de l'art. 13B LaLAT. Au vu des pièces du dossier, il n'existait aucun projet lié à des objectifs d'urbanisme. Le périmètre concerné était destiné à des logements et le projet initial avait été modifié en tenant compte du plan de site en cours d'élaboration (ATA/156/2011 du 8 mars 2011 consid. 7). En outre, examinant les conditions de restriction à la garantie de la propriété, le Tribunal fédéral a jugé, dans une affaire vaudoise concernant une disposition similaire à l'art. 13B LaLAT, que le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) exigeait, d'une part, qu'une mesure fondée sur une telle disposition ne s'étende pas dans le temps au-delà de ce qui était nécessaire. D'autre part, il impliquait qu'une interdiction de bâtir ne devait pas paralyser un projet qui ne compromettait pas la planification envisagée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_528/2011 du 27 avril 2012 consid. 2.2).

c. Plus récemment, la chambre de céans a, concernant une parcelle d'une surface de plus de 29'000 m2, située en zone 5 sur la commune de Chêne-Bougeries, confirmé le refus conservatoire de délivrance d'une autorisation préalable de construire portant sur la construction d'habitats groupés de très haute performance énergétique (ci-après : THPE), comportant 94 logements, et d'un garage commun. Le SPI avait émis un préavis défavorable car le secteur concerné faisait l'objet d'une modification des limites de zones (MZ n° 29'851-511) visant un déclassement en zone de développement 4A et d'un plan localisé de quartier (ci-après : PLQ n° 29'845-511). Cette MZ et ce PLQ étaient conformes aux objectifs et aux principes d'aménagement du territoire définis dans la fiche A03 du plan directeur cantonal, qui prévoyait pour ce secteur, une densification par une MZ. Le projet n'était donc pas conforme à la planification en cours sur ce secteur qui prévoyait la réalisation d'environ 280 logements, avec une attention particulière apportée à la perméabilité du secteur, avec des servitudes de passage public, le traitement des espaces libres, des zones de plantage et d'importants espaces libres laissés entre les bâtiments.

La chambre administrative a retenu qu'il n'était pas contesté que la parcelle concernée par le projet litigieux se trouvait au moment de la décision attaquée dans un périmètre inscrit dans le PDCn 2030, dont le schéma directeur cantonal renvoyait pour ce périmètre à la fiche A03 qui prévoyait une densification de la zone villa par modification des limites de zones (MZ n° 29'851-511) visant un déclassement en zone de développement 4A et d'un plan localisé de quartier (ci-après : PLQ n° 29'845-511). La parcelle litigieuse y figurait encore à la suite de la mise à jour le 14 juillet 2020 du programme de densification des quartiers en zone 5 selon la fiche A03 du plan directeur cantonal. Il était constant que la MZ n° 29'851 et le PLQ n° 29'845 avaient été refusés en votations référendaires le 4 mars 2018. La recourante considérait toutefois que le département n'avait pas manifesté son intention de poursuivre lesdits projets. Or et contrairement à ce qu'elle soutenait, le fait que sa parcelle figure en rouge sur le programme de densification des quartiers en zone 5 selon la fiche A03 précitée, mise à jour encore récemment, illustrait bien que la problématique d'une MZ de sa parcelle était toujours d'actualité. En outre, le résultat d'une votation n'avait pas d'effet contraignant pour les autorités cantonales (arrêt du Tribunal fédéral 1P.515/2000 du 14 mai 2001 consid. 1a) et n'était pas remis en cause par la recourante.

Il ressortait par ailleurs d'un document intitulé « Projet, Plan directeur communal, Plan directeur des chemins pour piétons » émis par la commune le 28 septembre 2020 que depuis les votations référendaires en 2018, le département avait, à deux reprises, rencontré la commune et les propriétaires. Le département n'était ainsi pas resté inactif dans ce dossier. Enfin, le fait que le conseil communal de la commune ait, en date du 24 septembre 2020, demandé par voie de résolution l'ouverture de modifications des limites de zones en application de l'art. 15A al. 3 LaLAT ne remettait pas en cause le maintien de la parcelle concernée sur ledit programme de densification en juillet 2020.

Par ailleurs, un nombre de logements nettement plus élevé était prévu que celui avancé par la recourante.

L'atteinte à la garantie de la propriété de la recourante se fondait sur une base légale (art. 13B LaLAT). En outre, la condition de l'intérêt public était réalisée lorsque la décision attaquée se fondait sur l’objectif de densification de la cinquième zone par MZ selon la fiche A03 du PDCn 2030. La nécessité de construire un nombre plus important de logements en cas de pénurie dans ce domaine satisfaisait à l'exigence d'un intérêt public.

La condition de la proportionnalité était également réalisée.

Enfin, il existait une limite temporelle fixée à l'horizon 2030, eu égard à la mise en œuvre du PDCn 2030. En outre, la recourante serait en droit de reprendre la disposition de son terrain après l'écoulement du délai de deux ans prévu par l'art. 13B al. 2 LaLAT, étant précisé que dans la mesure où une enquête publique avait déjà été réalisée antérieurement au dépôt de la demande d'autorisation préalable de construire, le délai de douze mois indiqué dans cette disposition ne s'appliquait pas en l'espèce (ATA/146/2021 précité et le références citées).

Le Tribunal fédéral, dans un arrêt 1C_142/2021 du 22 décembre 2021, a rejeté le recours formé contre cet ATA/146/2021. La garantie de la propriété n'était pas violée. On pouvait se référer au projet déjà élaboré et mis à l'enquête publique, suffisamment abouti pour que les exigences de révision de planification puissent être considérées comme respectées. Peu nombreuses étaient les démarches restant à entreprendre. En dépit du refus de ce projet en votation populaire cantonale, celle-ci ne valant « que » préavis, on pouvait laisser au département le bénéfice du doute lorsqu'il affirmait avoir la volonté de poursuivre cette planification. Ceci était d'autant plus vrai que cette tâche lui incombait en vertu de la planification directrice cantonale en vigueur. Au jour de l'arrêt attaqué, le 9 février 2021, s'il ne restait certes que peu de temps jusqu'à l'échéance du délai de l'art. 13B LaLAT (en novembre 2021), une éventuelle adoption du nouveau plan restait encore envisageable. Il n'apparaissait pas que certaines étapes indispensables à l'adoption de la planification fussent d'ores et déjà, au jour où la chambre administrative avait rendu son arrêt, rendues impossibles faute du temps nécessaire à leur réalisation. Dans ces circonstances, il n'était pas arbitraire d'avoir considéré que l'adoption d'une nouvelle planification justifiait le refus de l'octroi de l'autorisation préalable de construire.

En revanche, la seule mention de l'objectif de modification de zone au plan directeur cantonal ne saurait ensuite justifier un refus au-delà du délai de deux ans prévu par l'art. 13B al. 2 LaLAT, car une base légale ferait alors manifestement défaut et il serait en outre douteux que le principe de la proportionnalité demeure respecté.

d. Enfin, la chambre administrative a retenu dans une autre cause que quand bien même la parcelle concernée figurait en rouge sur le programme de densification des quartiers en zone 5 selon la fiche A03 du PDCn, mis à jour encore récemment, illustrant certes que la problématique d'une MZ était toujours d'actualité, le département n’avait en l’état nullement démontré d'expression concrète des objectifs d'urbanisme du législateur pour le périmètre concerné, ni la poursuite avec diligence et l'expression dans le temps de la volonté de réviser la planification, ni encore les chances de réalisation des objectifs de planification en cause. Le projet de MZ n'était ainsi pas suffisamment abouti pour que les exigences précitées puissent être considérées comme étant respectées. Au contraire, de nombreuses démarches restaient à entreprendre. S'il ne pouvait être dit que le législateur avait abandonné le projet de MZ, celui-ci étant toujours en suspens devant la commission d'aménagement, il ne l'avait en revanche pas mené activement, compte tenu des apparentes divergences entre le passage en zone 3 ou zone de développement 3 du périmètre dans lequel se trouvait la parcelle. Dans ce contexte, le préavis du SPI, seul défavorable au projet de construction, quand bien même selon la jurisprudence cantonale, la chambre de céans observait une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, ne suffisait pas à renverser ce constat et à retenir que les conditions des al. 1 et 2 de l'art. 13B LaLAT d'un refus conservatoire étaient réunies. Le département avait ainsi abusé de son pouvoir d'appréciation en retenant le contraire (ATA/456/2022 du 3 mai 2022 et les références citées).

e. Dans sa jurisprudence constante et comme déjà évoqué, la chambre de céans a considéré qu'au terme de la période de conservation, le propriétaire « reprend la libre disposition de son terrain » selon les normes en vigueur, sans que l'autorisation qui a été refusée ne soit délivrée automatiquement (ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 6c et les arrêts cités ; RDAF 2011 I p. 14-15), la délivrance d'autorisations de construire demeurant de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/278/2022 du 15 mars 2022 consid. 4 b).

f. L'art. 13B LaLAT accorde au département une grande marge d'appréciation que le juge ne peut revoir qu'en cas d'excès ou d'abus (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/1273/2017 précité consid. 6d).

8) Le PDCn 2030 adopté le 20 septembre 2013 par le Grand Conseil genevois et approuvé par le Conseil fédéral le 29 avril 2015, prévoit la densification par modification des limites de zones de certains secteurs de la zone 5. Sa première mise à jour a été adoptée par le Grand Conseil le 10 avril 2019 et approuvée par le Conseil fédéral le 18 janvier 2021.

Le plan directeur cantonal a force obligatoire pour les communes et le Conseil d'État, mais ne produit en revanche aucun effet direct à l'égard des particuliers (art. 9 al. 1 LAT ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_423/2016 du 3 avril 2017).

9) En l'espèce, c'est à juste titre que le département puis le TAPI ont considéré que la première des deux conditions cumulatives permettant de justifier un refus conservatoire (art. 13B al. 1 LaLAT) était réalisée. En effet, le recourant affirme que son projet de construction ne serait pas de nature à contrecarrer les objectifs poursuivis par le projet de modification de zones de la commune et que celle-ci n'aurait pas marqué de manière constante son opposition au projet de construction. Or, il ressort du dossier que dès les premiers échanges intervenus entre les parties, la commune a manifesté sa volonté de procéder à un déclassement de la zone 4B sur laquelle se situe la parcelle concernée en zone de développement 3 ou 4A et demandé un certain nombre de modifications au projet de construction présenté. Par ailleurs, cette modification de zones était mentionnée dans le PDCom. Dans ces circonstances, le recourant ne pouvait pas ignorer les objectifs d'urbanisme des autorités – soit dégager du potentiel à bâtir afin de renouveler et d'intensifier le cœur de la ville B______ et une densification accrue de la parcelle, répondant mieux à l'intérêt public lié à la construction de logements touchés par la pénurie, ce dans une perspective plus globale – ni se prévaloir de ce que le projet de déclassement aurait été abandonné.

Toutefois, si, conformément à l'art. 13B al. 2 LaLAT, la mise à l'enquête publique du projet de modification de zones a eu lieu moins de douze mois après le prononcé du refus conservatoire et la procédure a suivi son cours jusqu'au renvoi du PL 13'058 en séance plénière du Grand Conseil, force est de constater que ce projet n'a pas été adopté dans le délai de deux ans suivant le refus du département de délivrer l'autorisation de construire querellée. Il appert en conséquence que la deuxième condition cumulative du refus conservatoire n'est, à ce jour, plus réalisée. Comme l'a jugé à plusieurs reprises la chambre administrative, au terme de la période de conservation, le propriétaire « reprend la libre disposition de son terrain » selon les normes en vigueur, sans pour autant que l'autorisation qui a été refusée ne soit délivrée automatiquement.

Partant, le refus conservatoire prononcé le 20 juillet 2020 n'est plus fondé, de sorte que le dossier doit être retourné au département pour instruction complémentaire de la DD 2______ et nouvelle décision.

Le grief sera ainsi admis, par substitution de motifs.

10) Le recourant conclut à l'annulation, le cas échéant à la réduction du montant de l'émolument d'immeuble facturé par le département.

a. Selon l'art. 154 LCI, le département perçoit un émolument pour toutes les autorisations et permis d'habiter ou d'occuper qu'il délivre, ainsi que pour les recherches d'archives ayant trait aux autorisations de construire (al. 1). Ces émoluments sont fixés par le Conseil d'État (al. 2).

La chambre constitutionnelle a retenu que cet article était également applicable en cas de refus d'autorisation décidés en vertu de la LCI et de ses règlements d'application (ACST/12/2017 du 6 juillet 2017 consid. 7d ; ATA/1306/2018 du 5 décembre 2018 consid. 7a).

b. À teneur de l'art. 254 RCI, le département perçoit, lors de la constitution des dossiers et notamment pour toute autorisation ou refus d'autorisation qu'il délivre en application de la loi et de ses règlements d'application, les émoluments calculés selon les dispositions du présent chapitre. Exceptionnellement, l'émolument peut être réduit lorsqu'il paraît manifestement trop important par rapport à l'objet de la demande d'autorisation de construire. L'autorité statue librement. L'émolument relatif aux remises de copies et aux recherches de documents est calculé conformément aux art. 10 et 10A du règlement sur les émoluments de l'administration cantonale du 15 septembre 1975 (REmAC - B 4 10.03) (al. 1). Exceptionnellement, l'émolument peut être réduit jusqu'à 50 % pour des projets d'intérêt général, en particulier lorsque ceux-ci sont présentés par la Confédération, le canton ou les communes, ou par des établissements publics qui en dépendent, ainsi que pour les projets de constructions de logements subventionnés par les pouvoirs publics (al. 2). Sont notamment considérés d'intérêt général, les écoles, les garderies d'enfants, les églises, les cliniques, les hôpitaux, les centres sportifs et les installations techniques des services publics (al. 3).

Conformément à l'art. 257 RCI, pour l'enregistrement des demandes d'autorisation de construire, lesquelles comprennent également les demandes de renseignements, l'émolument s'élève à CHF 250.- par demande. Aucune demande d'autorisation n'est enregistrée tant que l'émolument y relatif n'a pas été acquitté (al. 1). Les émoluments des al. 3 à 11 sont perçus sans préjudice de l'émolument d'enregistrement prévu à l'al. 1 (al. 2 1ère phr.). Pour les décisions sur demandes d'autorisation de construire, l'émolument est, sous réserve des al. 4 à 12, proportionnel à la surface de plancher utile dont l'édification, le cas échéant la démolition, est projetée ; l'émolument de base s'élève à CHF 50.- par unité de surface de 10 m2 ; il est indivisible (al. 3). Pour les réponses relatives à une demande de renseignement, l'émolument consiste en un forfait de CHF 1'250.- ; il est indivisible (al. 10). Lorsque l'autorisation de construire est délivrée à la suite d'une demande de démolition ou d'une demande préalable, l'émolument d'autorisation par unité s'élève à CHF 25.- (al. 11). Lorsque le requérant renonce, en cours d'instruction, à sa demande d'autorisation de construire, l'émolument perçu est calculé selon les principes fixés aux al. 3 à 11. Selon les circonstances, il peut être réduit. L'autorité statue librement (al. 13).

c. Pour financer les activités que la constitution ou la loi le chargent d'exercer, l'État perçoit des contributions publiques, venant s'ajouter à d'autres ressources que sont notamment les revenus générés par ses propres biens, le produit des sanctions pécuniaires et l'emprunt. Les contributions publiques sont des prestations en argent prélevées par des collectivités publiques et acquittées par les administrés sur la base du droit public. Elles sont subdivisées traditionnellement en impôts, en contributions causales et en taxes d'orientation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_768/2015 du 17 mars 2017 consid. 4.1 ; 2C_483/2015 du 22 mars 2016 consid. 4.1).

Les contributions publiques de nature causale sont des contre-prestations en argent que des justiciables doivent verser à des collectivités publiques pour des prestations particulières que celles-ci leur fournissent ou pour des avantages déterminés qu'elles leur octroient. Elles comportent les émoluments, les charges de préférence et les taxes de remplacement. Les émoluments eux-mêmes se subdivisent en plusieurs catégories, dont les émoluments de chancellerie, les émoluments administratifs, les taxes de contrôle, les émoluments d'utilisation d'un établissement public, les émoluments d'utilisation du domaine public. Les émoluments de chancellerie sont des contributions modiques exigées en contrepartie d'un travail administratif ne nécessitant pas un examen approfondi, essentiellement de secrétariat (ATF 138 II 70 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_439/2014 du 22 décembre 2014 consid. 6.1 ; ACST/12/2017 précité consid. 3a et les références citées).

La perception de contributions publiques est soumise aux principes constitutionnels régissant toute activité étatique, en particulier aux principes de la légalité, de l'intérêt public et de la proportionnalité (art. Cst.), de l'égalité de traitement (art. 8 Cst.), de la bonne foi et de l'interdiction de l'arbitraire (art. 9 Cst.), ainsi que de la non-rétroactivité.

d. Le principe de la légalité en droit fiscal, érigé en droit constitutionnel indépendant à l'art. 127 al. 1 Cst. et qui s'applique à toutes les contributions publiques, tant fédérales que cantonales ou communales, y compris aux contributions de nature causale, prévoit que les principes généraux régissant le régime fiscal, notamment la qualité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de calcul, doivent être définis par la loi au sens formel. Si cette dernière délègue à l'organe exécutif la compétence d'établir une contribution, la norme de délégation ne peut constituer un blanc-seing en faveur de cette autorité ; elle doit indiquer, au moins dans les grandes lignes, le cercle des contribuables, l'objet et la base de calcul de cette contribution. Sur ces points, la norme de délégation doit être suffisamment précise (exigence de la densité normative). Il importe en effet que l'autorité exécutive ne dispose pas d'une marge de manœuvre excessive et que les citoyens puissent cerner les contours de la contribution qui pourra être prélevée sur cette base (ATF 144 II 454 consid. 3.4 ; 143 I 227 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2020 du 15 octobre 2020 consid. 6.1 ; ACST/12/2017 du précité consid. 3b et les références citées).

e. Ces exigences valent en principe pour les impôts comme pour les contributions causales. Si la qualité de contribuable et l'objet de l'impôt doivent toujours être définis dans une loi formelle, la jurisprudence a cependant assoupli cette exigence en ce qui concerne le mode de calcul de certaines de ces contributions. La compétence d'en fixer le montant peut ainsi être déléguée à l'exécutif lorsqu'il s'agit d'une contribution dont la quotité est limitée par des principes constitutionnels contrôlables, tels que ceux de la couverture des frais et de l'équivalence. Le principe de la légalité ne doit toutefois pas être vidé de sa substance ni, inversement, être appliqué avec une exagération telle qu'il entrerait en contradiction avec la réalité juridique et les exigences de la pratique. Tel est le cas pour les redevances causales dépendantes des coûts, dont les émoluments administratifs, auxquels s'appliquent les principes de la couverture des frais et de l'équivalence, qui sont tous deux l'expression du principe de la proportionnalité dans le domaine desdites contributions (ATF 143 I 227 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2020 du 15 octobre 2020 consid. 6.2 et les références citées ; ACST/12/2017 précité consid. 3c).

L'assouplissement du principe de la légalité en matière fiscale ne se justifie à travers l'application des principes constitutionnels susmentionnés (couverture des frais et équivalence) que dans la mesure où la réglementation en cause vise à, respectivement a pour effet de mettre la totalité des coûts d'une prestation de l'État à la charge de ses bénéficiaires. Tel n'est pas le cas lorsqu'une contribution ne permet de couvrir, conformément à la réglementation applicable, qu'une partie des dépenses effectives. Les principes de l'équivalence et de la couverture des frais ne permettent alors pas d'encadrer de manière suffisante la contribution en cause (ATF 143 I 227 consid. 4.2.2).

Lorsque les émoluments qui sont prélevés ne représentent qu'une contribution au coût de fonctionnement global de l'administration en cause, il appartient en principe au législateur de déterminer le montant desdits émoluments dans une loi formelle ou, au moins, d'imposer des limites à leur détermination par le pouvoir délégataire. A minima, ces limites prendront la forme d'un cadre ou d'un plafond, voire préciseront les bases de calcul des émoluments en cause (ATF 143 I 227 consid. 4.3.2).

f. Selon le principe de la couverture des frais, le produit global des contributions causales ne doit pas dépasser, ou seulement de très peu, l'ensemble des coûts engendrés par la subdivision concernée de l'administration (ATF 135 I 130 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_80/2020 du 15 octobre 2020 consid. 6.3 ; ACST/12/2017 précité consid. 3d et les références citées). Les dépenses à prendre en compte ne se limitent pas aux frais directs ou immédiats générés par l'activité administrative considérée ; elles englobent les frais généraux, en particulier ceux de port, de téléphone, les salaires du personnel, le loyer, ainsi que les intérêts et l'amortissement des capitaux investis et des équipements. La subdivision administrative concernée se définit par référence à toutes les tâches administratives matériellement liées les unes aux autres, formant un ensemble cohérent. Les émoluments perçus pour des prestations fournies dans une subdivision administrative ne doivent pas nécessairement correspondre exactement aux coûts de chacune de ces prestations. Certaines prestations, qui coûtent relativement peu cher à l'administration, peuvent être taxées plus lourdement que leur prix de revient, et inversement. La collectivité peut compenser par un émolument perçu sur des affaires importantes l'insuffisance des émoluments prélevés pour d'autres opérations qui, en raison du peu d'intérêt qu'elles présentent, ne permettent pas de réclamer des émoluments couvrant tous les frais qu'elles occasionnent. Un certain schématisme est par ailleurs inévitable, le calcul des coûts considérés ne relevant pas des sciences exactes mais comportant une part d'appréciation. Les excès que cela pourrait impliquer sont, le cas échéant, corrigés par l'application du principe de l'équivalence (ACST/12/2017 précité consid. 3d et les références citées).

g. Le principe de l'équivalence veut que le montant de la contribution causale exigée d'une personne déterminée se trouve en adéquation avec la valeur objective de la prestation fournie qu'elle rétribue. Il doit y avoir un rapport raisonnable entre le montant concrètement demandé et la valeur objective de la prestation administrative (rapport d'équivalence individuelle ; ATF 143 I 227 consid. 4.2.2). Cette valeur se mesure à l'utilité (pas nécessairement économique) qu'elle apporte à l'intéressé, ou d'après les dépenses occasionnées à l'administration par la prestation concrète en rapport avec le volume total des dépenses de la branche administrative en cause. Autrement dit, il faut que les contributions causales soient répercutées sur les contribuables proportionnellement à la valeur des prestations qui leur sont fournies ou des avantages économiques qu'ils en retirent. Le principe d'équivalence n'exclut pas une certaine schématisation ou l'usage de moyennes d'expérience, voire des tarifs forfaitaires (ACST/12/2017 précité consid. 3e et les références citées).

h. Dans sa jurisprudence, la chambre de céans a fait siennes les considérations du TAPI sur l'absence de tout arbitraire quant à la fixation du montant de l'émolument arrêté par le département, relevant également que pour ce motif, sauf à statuer en opportunité ce que ne lui permettait pas l'art. 254 al. 1 RCI cum art. 61 al. 1 et 2 LPA, elle ne pouvait pas revoir le montant réclamé (ATA/1306/2018 du 5 décembre 2018 consid. 7d).

Dans une jurisprudence récente (ATA/146/2021 précité), la chambre administrative a retenu que l'art. 257 al. 3 RCI contrevenait au principe de la légalité. Le département n'a pas recouru contre cet arrêt au contraire de la recourante qui a été déboutée par le Tribunal fédéral sur une autre question (arrêt du Tribunal fédéral 1C_142/2021 du 22 décembre 2021).

i. En l'espèce, le recourant estime qu'une réduction drastique du montant de l'émolument d'immeuble en CHF 33'300.- (après déduction de CHF 250.- de frais d'enregistrement) facturé par le département s'impose au seul motif que, dans la mesure où un refus conservatoire a été prononcé, l'instruction du dossier n'aurait pas été menée à terme.

Il appert toutefois, comme l'a retenu à bon droit le TAPI, que le département a procédé à une instruction de la demande d'autorisation de construire sous tous ses aspects et de manière circonstanciée, notamment en sollicitant et recueillant les préavis des instances concernées. Le fait qu'il s'agisse au final d'une décision de refus ne suffit pas à lui seul à justifier une réduction de l'émolument, lequel a été calculé conformément aux bases légales par le département sans abuser de son pouvoir d'appréciation, ni violer les principes d'égalité de traitement et de proportionnalité.

Il n'apparaît en revanche pas, à l'examen du dossier et à la lecture de la jurisprudence précitée, que le département aurait violé les principes de la couverture des coûts et d'équivalence dont se prévaut le recourant sans toutefois expliquer en quoi ceux-ci n'aurait pas été respectés.

Ce grief sera rejeté.

Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis.

11) Aucun émolument ne sera mis à la charge de la commune et du département du territoire, quand bien même ils succombent sur la question principale du recours (art. 87 al. 1 2ème phrase). Le recourant supportera un émolument de CHF 500.- dans la mesure où il succombe sur la question de l’émolument d’immeuble (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF1'500.- lui sera allouée, à laquelle il a conclu, à la charge de l’État (art. 87 al. 2 LPA). Il ne sera pas alloué d’indemnité à la commune qui ne s’est à juste titre pas prononcée au stade du recours sur la question de l’émolument d’immeuble et qui au demeurant compte plus de 10'000 habitants (notamment ATA/1223/2021 du 16 novembre 2021 ; art. 87 al. 2 LPA)

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 juin 2022 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 mai 2022 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

renvoie le dossier au département du territoire pour instruction complémentaire ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'500 .- à A______, à la charge de l’État (département du territoire) ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Erin Wood Bergeretto, avocate du recourant, à Me Aurèle Muller, avocat de la commune B______, au département du territoire-OAC, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf et Lauber, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :