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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1146/2013

ATA/956/2014 du 02.12.2014 sur JTAPI/1354/2013 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; PLAN D'AFFECTATION SPÉCIAL ; 4E ZONE ; ZONE DE CENTRE ; INSPECTION LOCALE ; FENÊTRE ; SURFACE ; CHANGEMENT DE PRATIQUE ; BUT D'INTÉRÊT GÉNÉRAL ; COMBLE ; PRÉCÉDENT
Normes : Cst.8 ; LCI.1.al1.leta ; LCI.3.al3 ; LCI.106.al1
Parties : STIMOLI Giuseppe, STIMOLI Alexandra et Giuseppe / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE
Résumé : Les propriétaires d'une villa située dans un village protégé souhaitent construire deux nouveaux Velux en toiture. La parcelle sur laquelle se trouve la villa fait l'objet d'un PLQ et se situe à proximité immédiate d'une église, inscrite à l'inventaire. Le département a refusé l'autorisation de construire en suivant le préavis négatif de la CMNS, émis après une analyse sérieuse et minutieuse de la situation, menée depuis plusieurs années, maintenant sa ligne de conduite adoptée lors de ses premiers préavis relatifs à la villa des recourants. La délivrance de l'autorisation litigieuse créerait un précédent et contreviendrait aux principes habituellement appliqués dans la zone. Le département était donc légitimé à refuser une telle autorisation.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1146/2013-LCI ATA/956/2014

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 décembre 2014

2ème section

 

dans la cause

 

Madame Alexandra et Monsieur Giuseppe STIMOLI
représentés par Me Mark Muller, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 décembre 2013 (JTAPI/1354/2013)


EN FAIT

1. Madame Alexandra et Monsieur Giuseppe STIMOLI (ci-après : les époux) sont actuellement propriétaires de la parcelle n° 3'761, feuille 23, de la commune genevoise d'Avusy, issue de la division de la parcelle n° 3'302 en cinq parcelles, soit, outre la précitée, les parcelles nos 3'759, 3'760, 3'762 et 3'763.

2. Cette parcelle est sise en zone de village 4B protégée et comprise dans le plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) n° 27'448-504, adopté par le Conseil d'État le 28 octobre 1981.

3. En 2007, une demande d'autorisation de construire cinq habitations contiguës et un garage souterrain, notamment sur ladite parcelle, a été déposée par Monsieur Ernest-Paul ISELI, propriétaire de la parcelle n° 3'302 (DD 100'668).

4. Dans le cadre de cette procédure, la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : la CMNS) et le service des monuments et des sites (ci-après : le SMS) ont demandé à plusieurs reprises des modifications du projet, compte tenu de l'importance du site situé en zone 4B protégée. Il ressort notamment de ces préavis que le projet initial n'était pas conforme au PLQ n° 27'448-504, plus précisément aux exigences de gabarit, d'implantation et de volume, et que le principe d'une ouverture dans les toits ne serait jamais toléré.

En particulier, selon le dernier préavis du SMS au département des constructions et des technologies de l'information (devenu entre-temps le département de l'urbanisme et, depuis lors, le département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, ci-après : le département) portant sur l'autorisation initiale (DD 100'668), daté du 13 août 2007, ce dernier s'opposerait à toute demande ultérieure de percements dans les toits.

Dans tous ses préavis, la CMNS a formulé des exigences très précises sur l'esthétique du bâtiment et sa toiture.

5. Le 8 novembre 2007, le département a délivré l'autorisation de construire les habitations (DD 100'668). Le projet autorisé ne comportait aucune ouverture en toiture.

6. Le 12 mai 2010, une demande complémentaire des propriétaires des parcelles nos 3'759, 3'760, 3'761, 3'762 et 3'763 a été enregistrée (DD 100'668/2), concernant notamment la mise en place de châssis de toiture, soit de deux petits velux, sur le pan sud-est de celle-ci, soit du côté champs.

7. Le 31 mai 2010, le SMS a rendu un préavis favorable sous réserve, pour l'ajout de petits châssis uniquement côté sud-est.

Il a précisé que la toiture orientée côté village devait dans tous les cas rester préservée et confirmé les réserves d'exécution liées à la demande d'autorisation initiale (DD 100'668).

8. Le 29 juin 2010, l'autorisation complémentaire a été délivrée par le département aux propriétaires des parcelles précitées (DD 100'668/2).

9. Le 5 novembre 2012, une demande d'autorisation de construire en procédure accélérée a été déposée par les époux, devenus entre-temps propriétaires de la parcelle n° 3'761 (APA 37'412).

Le projet consistait en la création de deux nouveaux jours en toiture, l'un de 140 cm sur 140 cm côté champs, l'autre de 140 cm sur 98 cm, côté rue.

10. Le 11 décembre 2012, dans son préavis, la CMNS s'est prononcée défavorablement.

La demande contrevenait aux directives exprimées dans le cadre de la procédure d'autorisation du bâtiment lui-même. Les ouvertures autorisées par la suite apparaissaient comme un maximum, et les nouvelles ouvertures sollicitées risqueraient de constituer un fâcheux précédent dans ce site sensible, surtout si elles devaient par la suite être admises également sur les autres villas de ce lotissement. Le projet contrevenait également aux principes habituellement appliqués dans la zone (notamment position en double registre côté jardin et grandes dimensions pour des espaces non habitables).

11. Le 20 décembre 2012, dans son préavis, la commune genevoise d'Avusy s'est prononcée favorablement.

12. Par décision du 20 février 2013, le département a refusé l'autorisation de créer des jours en toiture.

Le projet envisagé se situait dans un lotissement dont les toitures traditionnelles à deux pans en tuile donnaient au site son caractère villageois, aspect esthétique essentiel en zone 4B protégée qu'il convenait de préserver. Lors de l'autorisation de construire du bâtiment lui-même, la CMNS avait rendu un préavis favorable sous réserve, en précisant qu'aucune demande subséquente relative à des percements en toiture ne serait acceptée. Il faisait siens les termes du préavis défavorable du 11 décembre 2012 de la CMNS.

13. Le 8 avril 2013, les époux ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre cette décision de refus d'autorisation de construire. Ils ont conclu préalablement, à l'exécution d'un transport sur place, et principalement, à son annulation et à la délivrance de l'autorisation de construire.

Le préavis de la CMNS était insuffisamment motivé. Elle s'était bornée à se référer au préavis favorable sous réserve rendu par le SMS le 13 août 2007 lors de la construction de la villa, alors que, par la suite, le SMS avait accepté la demande complémentaire d'autorisation de pratiquer des ouvertures en toiture, côté sud-est. Il en résultait la disparition de toute pertinence de la soi-disant interdiction initiale.

De plus, le préavis de la CMNS ne présentait pas les qualités de sérieux et de solidité auxquels l'on pouvait s'attendre et ne l'emportait pas sur le préavis favorable de la commune. Le département ne pouvait donc se fonder sans autre sur ce préavis et le TAPI retrouvait ainsi toute sa liberté d'appréciation quant à la compatibilité du projet avec la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Le département avait abusé de son pouvoir d'appréciation en violant le principe de l'égalité de traitement. De nombreuses autorisations de pratiquer des ouvertures en toiture dans le village, et plus largement dans la commune, avaient été délivrées ces dernières années.

Enfin, le refus ne reposait sur aucun intérêt public, puisque la majorité des maisons d'Avusy étaient ornées d'ouvertures sur un ou deux pans de leur toiture. La crainte du « précédent » formulée par la CMNS était ainsi infondée.

De toute évidence, la villa possédait déjà des lucarnes sur le pan du toit côté jardin, si bien qu'une ouverture de plus ne modifierait pas fondamentalement la situation, d'autant plus que le pan du toit côté jardin donnait sur les champs, que la villa était située en bordure de village et que le projet ne portait pas atteinte à la qualité esthétique du village.

Dans un arrêt du Tribunal administratif, devenu la chambre administrative de la Cour de justice, (ci-après : la chambre administrative), portant sur la réalisation d'une véranda, la juridiction administrative avait estimé que le caractère hétéroclite du quartier considéré ne permettait pas au département d'interdire de pratiquer les travaux, dans la mesure où ces derniers ne pouvaient ainsi pas constituer un précédent (ATA/37/2005 du 25 janvier 2005).

14. Le 11 juin 2013, le département a conclu au rejet du recours ainsi qu'à la confirmation de sa décision de refus de l'autorisation de construire.

Les préavis de la CMNS avaient toujours été constants. Le périmètre où se situait la villa des époux constituait une des importantes « échappées visuelles » du village. Le SMS avait exceptionnellement admis la création de petites ouvertures sur la façade sud-est, au motif que la toiture orientée côté village demeurait préservée. Tel n'était pas le cas avec le projet des époux, puisqu'une des ouvertures était justement prévue côté village.

La construction s'élevant dans une zone 4B protégée, la CMNS avait bien évidemment porté une attention toute particulière au projet. L'intégralité du dossier avait été examinée par la CMNS puisqu'elle s'était référée à ses anciens préavis et avait expliqué ses motifs de façon détaillée.

S’agissant de la prétendue violation du principe de l'égalité de traitement, la villa des époux était dégagée du côté rue de toute autre maison, si bien que sa toiture était d'autant plus visible depuis le village. La plupart des autorisations citées par les époux concernaient des bâtiments situés dans d'autres villages protégés, n'ayant, par conséquent, pas forcément le même caractère architectural. La parcelle était située à l'entrée du village et constituait ainsi le premier élément visible. La majorité des autres bâtiments se trouvant dans une situation similaire, en contrebas du centre du village, ne possédait pas d'ouvertures en toiture, ou étaient difficilement identifiables, en raison de leur positionnement ou de leur intégration.

Il était de surcroît particulièrement malvenu de la part des époux de faire valoir une inégalité de traitement, dans la mesure où le département avait autorisé sur leur villa la création de plusieurs petits châssis côté champs et que ceux-ci étaient plus nombreux que les quelques ouvertures bien intégrées dans les bâtiments voisins.

La protection des monuments et des sites naturels ou bâtis, en particulier contre des modifications ou des adjonctions inesthétiques, répondait en principe à un intérêt public. La parcelle des époux se situait à proximité immédiate d'une église, bâtiment inscrit à l'inventaire. L'intérêt privé des époux était très limité, puisqu'ils disposaient déjà d'ouvertures en toiture côté champs.

15. Le 14 novembre 2013, le juge délégué a procédé à un transport sur place devant le bâtiment des époux, puis le long de la route d'Avusy, pour se rendre compte des velux existants sur les toits des autres bâtiments donnant sur la route.

Le TAPI s'était arrêté devant divers bâtiments ornés de tabatières ou de velux, pour lesquels ni la représentante du département ni le représentant de la CMNS n'avaient pu confirmer que ces travaux de toiture avaient été dûment préavisés/autorisés. Une fois du côté Salève du bâtiment, le TAPI avait constaté sur le toit la présence de deux petits velux par maison, à l'exception de la dernière qui n'en avait pas. Le Tribunal s'était ensuite rendu dans les combles de l'habitation des époux et avait effectivement constaté la présence de deux tabatières. La pièce, habitée, était la chambre des époux.

Lors de ce transport sur place, le TAPI a entendu un collaborateur de la CMNS (sous-commission architecture) en qualité de témoin assermenté.

Selon ce dernier, lors de l'autorisation de construire de l'ensemble des villas, la CMNS avait demandé qu'il n'y ait aucune ouverture en toiture. Une demande complémentaire portant sur la création de jours côté Salève avait ensuite été autorisée. De longue tradition, la CMNS essayait d'éviter le principe des ouvertures sur les toitures.

Concernant les velux installés dans le toit de deux anciennes maisons de l'autre côté de la route, il s'agissait de situations anciennes. Il y avait une situation de fait préalable et la CMNS avait préavisé favorablement en tout cas en ce qui concernait l'un des deux bâtiments. En ce qui concernait les immeubles situés en face de l'église, ils se situaient dans le PLQ n° 27'923 et les ouvertures en toiture permettaient la création de surfaces habitables dans les combles.

La pièce des combles de la villa des époux n'étant pas habitable, il n'y avait aucune raison d'y installer une arrivée de jour. En arrivant depuis l'église, la villa des époux était le premier bâtiment du village. La CMNS avait estimé qu'il y avait de gros enjeux au niveau de l'impact visuel au moment où elle avait donné son préavis favorable à la construction du bâtiment.

Ce n'était pas la taille de l'ouverture demandée qui posait problème, mais le principe même de celle-ci.

Le conseil des époux estimait que leur villa n'était pas très visible depuis le village. Il estimait qu'il ne revenait pas à la CMNS de prendre en considération l'affectation de la pièce qui serait éclairée, devant uniquement apprécier l'impact visuel que pourrait engendrer l'implantation des velux.

16. Le 25 novembre 2013, pour faire suite au transport sur place, le département a indiqué que les velux et lucarnes constatés sur les bâtiments voisins des époux avaient tous été autorisés.

Notamment, en ce qui concernait le bâtiment situé au 12, route d'Avusy, il s'agissait d'une situation ancienne avec état de fait préexistant. La transformation des combles avait été autorisée en 2011, suite au préavis favorable de la CMNS, consentant à la suppression de petits châssis parasites existants pour l'alignement des futurs éléments.

Ainsi, le principe de l'égalité de traitement avait été respecté, puisque les situations voisines se différenciaient de la demande d'autorisation litigieuse et que les principes appliqués dans la zone depuis de nombreuses années concernant les ouvertures en toiture avaient été respectés.

17. Le 5 décembre 2013, les époux ont formulé leurs dernières observations.

En ce qui concernait le 12, route d'Avusy, le département avait autorisé plusieurs ouvertures, de taille supérieure à celles litigieuses. Dans la mesure où les ouvertures sur les autres bâtiments avaient été autorisées, la pratique du département était donc souple. La soudaine rigidité dont faisait preuve le département violait le principe de l'égalité de traitement.

Concernant les immeubles situés à l'entrée du village, construits dans le cadre d'un PLQ, les ouvertures étaient importantes et nombreuses. Partant, lors de l'adoption dudit PLQ, il avait été considéré que la protection du village était parfaitement compatible avec ce type d'ouvertures. Ainsi, le département avait violé le principe de l'égalité de traitement et son refus était dépourvu de tout intérêt, puisque les ouvertures litigieuses n'auraient aucun effet sur la préservation du caractère du village.

18. Le 17 décembre 2013, le TAPI a rejeté le recours.

Dans le cas d'espèce, en application de la LCI, le préavis de la CMNS était obligatoire. Son poids était certain et l'autorité l'avait suivi.

Dans la mesure où les époux avaient déjà été autorisés à créer deux jours en toiture, alors que la villa devait initialement ne pas en avoir, ceux-ci étaient malvenus de prétendre que la position de la CMNS était inconséquente et qu'elle ne pouvait ainsi plus se fonder sur ses précédents préavis pour fonder son dernier préavis, le point de vue de la CMNS concernant le percement de la toiture côté rue n'ayant pas changé depuis 2007.

Le département n'avait pas violé le principe de l'égalité de traitement, car tous les bâtiments voisins pourvus de velux en toiture constituaient des situations différentes.

19. Le 31 janvier 2014, les époux ont recouru auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI. Ils ont conclu, préalablement, à l'exécution d'un nouveau transport sur place, et principalement à l'annulation du jugement du TAPI et au renvoi du dossier au département en l'invitant à délivrer l'autorisation de créer des jours en toiture sur l'immeuble sis sur la parcelle n° 3'761 de la commune d'Avusy.

Les recourants ont repris pour l'essentiel les arguments déjà soulevés devant le TAPI.

20. Le 18 mars 2014, le département a conclu au rejet du recours.

Le préavis de la CMNS du 11 décembre 2012 était l'aboutissement d'un travail d'analyse qui s'était déroulé sur plusieurs étapes. Ce préavis reflétait tant le contexte général dans le cadre duquel s'inscrivait la demande litigieuse (zone 4B protégée d'Avusy, périmètre protégé du PLQ n° 27'448-504, constituant une des importantes « échappées visuelles » du village), que l'historique et l'évolution du projet. Partant, la CMNS s'était toujours référée à ses préavis antérieurs et avait motivé sa position de manière détaillée, en insistant sur l'impact visuel de la toiture sur le site en question.

Aucune violation du principe de l'égalité de traitement n'avait été commise.

L'intérêt privé des recourants devait céder le pas devant l'intérêt public à la conservation du caractère du village situé en zone protégée.

21. Le 10 juin 2014, dans le cadre du transport sur place, le juge délégué s'est rendu au 17b, route d'Avusy.

Selon les recourants, l'un des arguments de vente lors de l'achat de la maison avait été la possibilité d'aménager les combles. Ayant cinq enfants, ils n'auraient jamais acheté la villa, sans possibilité d'utiliser le toit pour y aménager des locaux.

Selon le conseil des recourants, si des ouvertures avaient déjà été autorisées dans le toit, c'était bien dans l'idée que les combles puissent être habités.

Selon la représentante du département, l'objectif recherché, en village protégé, était de sauvegarder la vue d'ensemble du village, notamment lorsque l'on se trouvait sur la route d'Avusy ou lorsque l'on y arrivait depuis la route du Creux-du-Loup. Il s'agissait ainsi de limiter les ouvertures faites dans les toits à celles déjà autorisées, en refusant d'en autoriser d'autres plus grandes sur le pan sud ou d'en autoriser sur le pan nord du toit.

Selon les recourants, une ouverture du toit côté nord permettrait de mieux aérer les combles et d'améliorer la luminosité, sans modifier l'esthétique générale.

Concernant les immeubles situés à proximité de l'église, la représentante du département a déclaré que les ouvertures étaient de taille modeste et qu'il n'y avait qu'une rangée d'ouvertures par pan de toit.

Le conseil des recourants a relevé que ces immeubles étaient également situés en zone 4B protégée et que la plupart des maisons d'Avusy avaient des ouvertures dans les toits.

22. Le 29 juillet 2014, le département a sollicité un complément du procès-verbal du transport sur place effectué le 10 juin 2014. Il souhaitait que le procès-verbal fasse mention du fait que la maison des recourants était vide, et que ces derniers avaient expliqué qu'ils avaient déménagé et que la villa était en vente. Pour cette raison, la représentante du département doutait de l'existence d'un intérêt actuel des recourants dans la procédure en cours.

23. Le 8 octobre 2014, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et art. 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l'art. 60 al. 1 LPA, ont qualité pour recourir non seulement les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée (let. a), mais aussi toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (let. b). La jurisprudence a précisé que les let. a et b de la disposition précitée doivent se lire en parallèle : ainsi, le particulier qui ne peut faire valoir un intérêt digne de protection ne saurait être admis comme partie recourante, même s’il était partie à la procédure de première instance (ATA/581/2014 du 29 juillet 2014 ; ATA/4/2014 du 7 janvier 2014 et les références citées).

Selon le Tribunal fédéral, un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 128 II 34 consid. 1b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_834/2013 du 4 juin 2014 consid. 3.1 ; ATA/253/2013 du 23 avril 2013 et les références citées ; Bernard CORBOZ/Alain WURZBURGER/Pierre FERRARI/Jean-Maurice FRESARD/Florence AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la LTF, 2ème éd., 2014, art. 89 n. 23). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s’il s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle. Il est irrecevable si l'intérêt actuel faisait déjà défaut au moment du dépôt du recours (ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; ATF 118 Ib 1 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_834/2013 du 4 juin 2014 consid. 3.1 ; ATA/253/2013 précité).

En l'espèce, même s'il ressort du transport sur place du 10 juin 2014 que les recourants ont déménagé et ont l'intention de vendre leur villa, ils conservent néanmoins un intérêt actuel, dans la mesure où ils sont les destinataires de la décision et toujours propriétaires. Ils sont donc directement touchés dans leurs droits.

3. Selon l’art. 1 al. 1 let. a LCI, sur tout le territoire du canton, nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail. Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l’autorisation de construire (art. 1 al. 5 LCI).

4. La parcelle concernée par le projet est située dans un village protégé (zone 4B protégée), de sorte que les dispositions spécifiques des art. 105 ss LCI lui sont applicables, en plus des dispositions applicables à la 4ème zone (art. 30 ss LCI).

5.  Dans les villages protégés, le département, sur préavis de la commune et de la CMNS, fixe dans chaque cas particulier l’implantation, le gabarit, le volume et le style des constructions à édifier, de manière à sauvegarder le caractère architectural et l’échelle de ces agglomérations ainsi que le site environnant. Le département peut en conséquence, à titre exceptionnel, déroger aux dispositions régissant les distances entre bâtiments, les distances aux limites de propriétés et les vues droites. Lors de travaux de réfection de façades ou de toitures, la commune et la CMNS sont également consultées (art. 106 al. 1 LCI).

6. Les préavis ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Selon le système prévu par la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsque la consultation d'une instance de préavis est imposée par la loi, son préavis a un poids certain dans l'appréciation qu'est amenée à effectuer l'autorité de recours et il convient de ne pas le minimiser (ATA/902/2004 du 16 novembre 2004 ; ATA/560/2004 du 22 juin 2004 ; ATA/253/1997 du 22 avril 1997).

La LCI ne prévoit pas de hiérarchie entre les différents préavis requis. Selon une jurisprudence constante, en cas de préavis divergents, une prééminence est reconnue à celui de la CMNS lorsque son préavis est requis par la loi, dans la mesure où cette dernière est composée de spécialistes en matière d’architecture, d’urbanisme et de conservation du patrimoine (art. 46 al. 2 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 - LPMNS – L 4 05). C'est pour cela que son préavis est essentiel (ATA/719/2011 du 22 novembre 2011 ; ATA/39/2011 du 15 janvier 2011 ; ATA/539/2009 du 27 octobre 2009 ; ATA/263/2007 du 22 mai 2007 ; ATA/676/2006 du 19 décembre 2006 ; ATA/648/2006 du 5 décembre 2006 et les références citées).

La juridiction de recours fait preuve d'une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des entités ayant formulé un préavis dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour autant que l'autorité inférieure ait suivi l'avis de celles-ci (ATA/417/2009 du 25 août 2009 et les références citées). L'autorité de recours se limite alors à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/117/2011 du 15 février 2011 ; ATA/417/2009 précité ; ATA/495/2009 du 6 octobre 2009 ; ATA/190/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997).

En l'espèce, le préavis de la CMNS était obligatoire, au regard de l'art. 106 LCI. Selon la jurisprudence, la prééminence devait donc être reconnue à la portée que celle-ci avait exposée dans son préavis du 11 décembre 2012, bien que contraire à celui, favorable, de la commune. Le département était donc légitimé à suivre son préavis défavorable en refusant de délivrer l'autorisation de construire les jours en toiture.

Sur cette base, le TAPI était également légitimé à rejeter le recours des propriétaires de l'immeuble concerné.

7. Les recourants estiment que le préavis de la CMNS du 11 décembre 2012 manque de motivation, si bien que le département tout comme le TAPI n'étaient pas en mesure de s'en prévaloir.

Ce grief est totalement infondé au vu de l'ampleur de l'analyse effectuée par la CMNS et le SMS depuis le début du projet. Les recourants reprochent à la CMNS de s'être fondée uniquement sur le préavis favorable sous réserve rendu par le SMS le 13 août 2007 lors de la construction des villas.

Dans la mesure où tous les préavis rendus par la CMNS et le SMS depuis le début du projet sont concordants, du moins en ce qui concerne l'interdiction des ouvertures en toiture côté rue, le grief des recourants manque de substance. Au demeurant, les recourants n'expliquent pas en quoi il y aurait un manque de motivation.

8. En lien avec le grief précédent, les recourants estiment que le préavis de la CMNS du 11 décembre 2012 manque de cohérence par rapport aux précédents préavis, si bien que le département tout comme le TAPI n'étaient pas en mesure de s'en prévaloir.

Avant-même la délivrance de l'autorisation de construire initiale (DD 100'668) en novembre 2007, la CMNS et le SMS avaient déjà indiqué être opposés à toute demande ultérieure de percement dans les toitures.

La demande complémentaire déposée en 2010 (DD 100'668/2), portant notamment sur l'installation de châssis de toiture sur le pan sud-est a été préavisée favorablement par le SMS, précisant qu'un tel préavis était donné uniquement car la toiture orientée côté village restait préservée. De plus, le SMS a précisé qu'il confirmait les réserves d'exécution liées à la demande d'autorisation initiale, si bien que les principes énoncés dans l'autorisation initiale restaient pleinement applicables.

Cette légère évolution de la position du SMS a de toute évidence profité aux recourants, qui se sont ainsi vu octroyer l'autorisation de créer deux jours en toiture pour éclairer leurs combles.

Partant, les recourants sont malvenus de se plaindre en considérant que la position de la CMNS est inconséquente et que cette dernière ne pouvait plus se fonder sur ses précédents préavis pour fonder son dernier préavis. En effet, la position de la CMNS relative au percement de la toiture de la villa des recourants n'a pas changé depuis 2007, contrairement à celle du SMS ayant très légèrement divergé.

C'est donc après une analyse sérieuse et minutieuse de la situation, menée depuis plusieurs années, que la CMNS a rendu un préavis défavorable, en maintenant par ailleurs sa ligne de conduite adoptée lors de ses premiers préavis relatifs à la villa des recourants.

9. Comme le relève à juste titre la CMNS, la délivrance de l'autorisation litigieuse créerait un précédent, notamment si le même type d'autorisation devait être par la suite délivré sur les bâtiments voisins, et contreviendrait également aux principes habituellement appliqués dans la zone (position en double registre côté jardin, grandes dimensions pour des espaces non habitables).

10. Les recourants estiment que le principe de l'égalité de traitement a été violé.

Une décision ou un arrêté viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art. 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 136 I 1 consid. 4.1).

Les recourants se réfèrent principalement à deux cas, soit à l'APA 34'709 et aux immeubles construits dans le périmètre du PLQ n° 27'923.

Concernant l'APA 34'709, il s'agit d'une situation ancienne, avec un état de fait préexistant. Lors de son premier préavis y afférent, la CMNS a indiqué que, selon les principes habituellement appliqués dans la zone pour ce genre de maisons anciennes, elle demandait de limiter la taille des ouvertures dans la toiture. De plus, la multiplication des ouvertures et les positions non alignées étaient également à proscrire.

C'est donc uniquement suite à la seconde demande d'autorisation de construire que la CMNS a préavisé favorablement le projet. Elle a indiqué être favorable aux percements en toiture car elle appréciait la suppression des petits châssis parasites existants et considérait comme bienvenu l'alignement des futurs éléments. Elle souhaitait toutefois encore la réduction de la taille des ouvertures.

En ce qui concerne les immeubles érigés dans le périmètre du PLQ n° 27'923, la création des ouvertures en toiture permettait la création de logements supplémentaires.

En l'espèce, les ouvertures litigieuses seraient grandes et, en ce qui concerne le côté Salève, non alignées. Dans la mesure où les combles des recourants ne sont pas habitables, il n'y a aucune raison d'y créer des ouvertures supplémentaires. De plus, la parcelle des recourants est située à proximité de l'église, bâtiment classé, et constitue une des importantes « échappées visuelles » du village. La parcelle est totalement dégagée du côté rue de toute bâtisse, si bien que le toit de la maison des recourants y est particulièrement visible. Enfin, comme le relève à juste titre le département, la majorité des autres bâtiments en contrebas du centre du village, le long de la route d'Avusy, ne possèdent pas d'ouvertures en toiture, ou sont difficilement discernables, en raison de leur positionnement ou de leur intégration.

S'agissant de situations manifestement différentes, aucune violation du principe de l'égalité de traitement ne peut être retenue.

Les recourants sont toujours malvenus de faire état d'une violation de ce principe, ayant eux-mêmes déjà bénéficié de la création de plusieurs petits châssis.

11. Enfin, les recourants se prévalent de l'absence d'intérêt public prépondérant au refus de l'autorisation de construire.

La protection des monuments et des sites naturels ou bâtis, en particulier contre des modifications ou des adjonctions inesthétiques, répond en principe à un intérêt public. Chaque cas doit être examiné sur la base de critères objectifs et scientifiques, tenant compte de la valeur esthétique des constructions et du paysage concernés (ATA/646/1997 précité et les références citées).

En l'espèce, la parcelle des recourants se situe en zone 4B protégée. Elle a fait l'objet d'un PLQ n° 27'448-504 et se situe à proximité immédiate de l'église, inscrite à l'inventaire.

En ce qui concerne l'intérêt privé des recourants, il est très limité puisqu'ils disposent déjà d'ouvertures en toiture du côté champs, si bien que la pièce située dans les combles peut déjà être aérée. Comme le relève à juste titre le département, il importe peu que la construction des recourants soit récente. En effet, il s'agit de préserver l'intérêt architectural historique du village, situé en zone 4B protégée, et non d'examiner le seul bâtiment de ceux-ci.

Le fait que les recourants aient acheté la maison en ayant pour idée d'aménager les combles n'y change rien.

Les recourants estiment encore que le cas d'espèce est similaire au cas traité par la chambre administrative dans lequel cette dernière a considéré que le caractère hétéroclite du quartier empêchait le département d'interdire la construction d'une véranda (ATA/37/2005 précité).

Tel ne saurait être le cas puisque le caractère du quartier est préservé et la CMNS accorde une importance particulière à l'aspect extérieur des bâtiments, comme cela ressort d'ailleurs des différents préavis émis par celle-ci.

Il en résulte que l'intérêt privé des recourants doit de toute évidence céder le pas devant l'intérêt public aux restrictions à la construction visant à la conservation du caractère du village situé en zone protégée.

12. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, (art. 87 al. 1 LPA) et aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 janvier 2014 par Madame Alexandra et Monsieur Giuseppe STIMOLI contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 décembre 2013 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Madame Alexandra et Monsieur Giuseppe STIMOLI, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il ne leur est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mark Muller, avocat des recourants, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :