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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/10670/2021

AARP/58/2023 du 13.02.2023 sur JTDP/542/2022 ( PENAL ) , RETRAIT PARTIE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/10670/2021 AARP/58/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 13 février 2023

 

Entre

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

 

appelant,

 

contre le jugement JTDP/542/2022 rendu le 13 mai 2022 par le Tribunal de police,

 

et

A______, domicilié ______ [GE],

B______, domiciliée ______ [GE],

assistés de Me C______, avocate,

D______, domicilié ______ [GE], assisté de Me E______, avocat,

F______, domicilié ______ [GE], assisté de Me G______, avocate,

H______, domicilié ______ [GE],

I______, domiciliée ______ [GE],

J______, domicilié ______ [GE],

K______, domiciliée ______ [GE],

L______, domicilié ______, Iran,

M______, domiciliée ______ [GE],

N______, domicilié ______ [GE],

O______, domiciliée ______ [GE],

P______, domicilié ______ [GE],

Q______, domiciliée ______ [GE],

R______, domiciliée ______ [GE],

S______, domicilié ______ [GE],

assistés de Me T______, avocat,

SERVICE DES CONTRAVENTIONS, domicilié chemin de la Gravière 5, case postale 104, 1211 Genève 8

intimés.


Vu, EN FAIT, le jugement du 13 mai 2022 du Tribunal de police (TP) prononçant l'acquittement des prévenus du chef de contravention à l'art. 10 de la loi sur les manifestations sur le domaine public (LMDPu) ;

Attendu que le Ministère public (MP) a annoncé puis déclaré appel de ce jugement ;

Que la plupart des prévenus était dépourvue de conseil alors que, l'appel émanant du MP, ceux-ci se trouvaient dans un cas de défense obligatoire (art. 130 let. d cum 405 al. 3 let. b du code de procédure pénale [CPP] ;

Que la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) les a partant interpellés, les invitant à mandater un défenseur privé ou requérir la désignation d'un défenseur d'office en indiquant, dans cette hypothèse, s'ils avaient des souhaits quant à l'identité du mandataire d'office, avec la précision qu'à défaut, il leur en serait désigné un, figurant sur la liste idoine ;

Que 12 prévenus ont fait savoir, directement ou par son truchement, avoir constitué le même défenseur privé ;

Que deux autres ont requis la désignation d'un avocat d'office, ce qui a été fait, par ordonnances du 1er novembre 2022 ;

Qu'en prévision des débats :

-          B______ et A______ ont déposé des conclusions tendant à la couverture des honoraires de leur avocate pour la procédure de deuxième instance par CHF 1'229.10 pour la première, CHF 1'083.70 pour le second, pour une activité principalement déployée par l'avocate-stagiaire et étant précisé que le taux horaire facturé par cette cheffe d'Etude est de CHF 300.- ;

-          les 12 prévenus ayant fait le choix du même conseil ont chacun déposé des conclusions en indemnisation pour des honoraires allant de CHF 974.15 à CHF 1'424.85. Sous réserve d'une demi-heure d'"ouverture et examen du dossier" intégralement facturée à 11 clients, les notes d'honoraires produites tiennent compte de ce que le mandat était commun, notamment en ce que le travail de préparation des débats, d'un total de quatre heures, est réparti entre eux, à raison de 1/12ème chacun (12 x 0.33). Il en va de même pour l'audience d'appel, dont la durée a été estimée à cinq heures (12 x 0.42) alors qu'elle a en définitive été de 30 minutes (y compris le retard pris à placer les multiples intimés). Le tarif horaire pratiqué paraît être de CHF 450.-. Interpellé, l'avocat constitué a confirmé que l'intégralité du travail avait été déployé par son collaborateur ;

-          la défenseure d'office de F______ a produit un état de frais facturant deux entretiens avec le client de 20 minutes chacun ainsi que six heures d'étude du dossier et préparation de sa plaidoirie ;

-          le défenseur d'office de D______ n'a pas déposé d'état de frais et a déclaré lors des débats qu'il s'en remettait à l'appréciation de la Cour ;

Qu'à l'ouverture desdits débats, le MP a annoncé qu'il retirait son appel, vu les considérants d'un récent arrêt du Tribunal fédéral (arrêt 6B_246/2022 du 12 décembre 2022) ;

Considérant, EN DROIT, que conformément à l'art. 129 al. 4 de la loi d'organisation judiciaire (LOJ), la juridiction d'appel statue à Genève, en matière contraventionnelle, dans une composition comprenant une ou un juge unique ;

Que dans ce domaine, le pouvoir de cognition de la CPAR est limité à la constatation arbitraire des faits ou l'application erronée du droit (art. 398 al. 2 CPP) ;

Que l'appel peut être retiré jusqu'à la clôture des débats (art. 386 al. 2 let. a CPP ;

Que le retrait est partant intervenu en temps utile et entraîne que le verdict d'acquittement prononcé en première instance devient définitif ;

Que les prévenus dont l'acquittement est confirmé, assistés d'une ou d'un conseil privé, peuvent prétendre à la couverture des dépenses nécessaires exposées dans le cadre de la procédure d'appel (art. 429 let. a CPP) ;

Que les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif local, à condition qu'ils restent proportionnés, en vertu de sa responsabilité causale dans la conduite des procédures pénales (N. SCHMID, Schweizerische Strafprozessordnung : Praxiskommentar, Zurich 2009, n. 7 ad art. 429). Le juge dispose d'une marge d'appréciation à cet égard, mais ne devrait pas se montrer trop exigeant dans l'appréciation rétrospective qu'il porte sur les actes nécessaires à la défense du prévenu (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, Schweizerische Strafprozessordnung / Schweizerische Jugendstrafprozessordnung, Basler Kommentar StPO/JStPO,, n. 19 ad art. 429). S'il s'écarte notablement de la note d'honoraires présentée, il doit en motiver les raisons (M. NIGGLI / M. HEER / H. WIPRÄCHTIGER, op. cit., n. 18 ad art. 429) ;

Qu'à la lumière de ces principes, il y a lieu de retenir que l'autorité pénale amenée à fixer une indemnité sur le fondement de l'art. 429 al. 1 let. a CPP n'a pas à avaliser purement et simplement les notes d'honoraires d'avocats qui lui sont soumises : elle doit, au contraire, examiner, tout d'abord, si l'assistance d'un conseil était nécessaire, puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées, par rapport à la complexité juridique et factuelle de l'affaire, et, enfin, dire si le montant des honoraires réclamés, même conformes au tarif pratiqué à Genève, est proportionné à la difficulté et à l'importance de la cause, c'est-à-dire raisonnable au sens de la loi (ACPR/140/2013 du 12 avril 2013) ;

Que le Tribunal fédéral retient en principe qu'un tarif horaire de CHF 400.- pour un chef d'étude (ATF 135 III 259 consid. 2 p. 261 ss. ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 consid. 2.3 et 2C_25/2008 du 18 juin 2008 consid. 4.2.5) n'est pas arbitrairement bas pour le canton de Genève (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1078/2014 du 9 février 2016 consid. 4.3 et les références = SJ 2017 I 72) ;

Que la Cour de justice applique au chef d'étude un tarif horaire de CHF 450.- (arrêt du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 = SJ 2012 I 172 ; ACPR/279/2014 du 27 mai 2014) ou de CHF 400.- (ACPR/282/2014 du 30 mai 2014), notamment si l'avocat concerné avait lui-même calculé sa prétention à ce taux-là (ACPR/377/2013 du 13 août 2013). Elle retient un taux horaire de CHF 350.- pour les collaborateurs (AARP/65/2017 du 23 février 2017) et de CHF 150.- pour les avocats-stagiaires (ACPR/187/2017 du 22 mars 2017 consid 3.2 ; AARP/65/2017 du 23 février 2017) ;

Qu'en l'occurrence, l'affaire était particulièrement simple : le dossier était très peu volumineux, l'état de fait, identique, à quelques nuances près, pour tous les prévenus, était clairement circonscrit par le jugement entrepris et ne pouvait être rediscuté, sauf arbitraire ; le raisonnement juridique de la première juge était clair, complet et étayé ; il paraissait déjà difficilement critiquable lors du prononcé et est devenu indiscutable suite au prononcé de l'arrêt du Tribunal fédéral précité, ce qui a du reste motivé le retrait de l'appel ;

Que tout avocat, breveté ou stagiaire, est censé avoir pris connaissance de cette jurisprudence, au titre de son obligation de formation continue, sans préjudice de ce que celle ou celui qui se savait en charge d'un dossier similaire a dû ou aurait dû y être particulièrement attentif ;

Que de surcroît, la tâche de l'avocate de B______ et A______ était rendue encore plus aisée du fait qu'elle était constituée en première instance et avait partant déjà étudié tous les aspects de l'affaire ;

Que, contrairement à son confrère, elle n'indique pas avoir réparti son temps de travail entre ses deux clients, ce qui ne se déduit pas non plus du temps facturé à chacun d'eux (sous réserve de ce qu'une vacation à l'audience n'est comptabilisée que dans l'une des deux notes), celui-ci paraissant en tout état excessif au regard des éléments qui précèdent ;

Qu'il sera retenu que deux heures étaient suffisantes pour la lecture du dossier, son analyse juridique et la préparation de l'audience, plaidoirie comprise, à répartir par moitié entre ses clients ;

Qu'après réduction et répartition à raison d'une heure par client du temps facturé à ce titre (au lieu de quatre heures selon les deux notes d'honoraires), à 15 minutes (= 30/2) de celui de la présence à l'audience (au lieu de 90 minutes facturées à chacun des clients) et suppression du poste "vacation", les courts déplacements étant supposés compris dans le tarif horaire hors assistance juridique, le montant des honoraires à couvrir en application de l'art. 429 al. 1 let. a CPP s'élève à  :

-          CHF 531.70 (débours par CHF 6.20 et TVA compris) pour B______ (taux horaire retenu : CHF 300.-, tel que pratiqué par elle, pour la cheffe d'Etude et CHF 150.- pour sa stagiaire) ;

-          CHF 396.60 (débours par CHF 6.20 et TVA compris) pour A______ (même taux horaire) ;

Que ces considérations s'appliquent aux honoraires facturés aux 12 prévenus assistés d'un même avocat, de sorte que le travail d'analyse du dossier (lecture du jugement et de la déclaration d'appel compris) et préparation des débats doit être réduit à deux heures, à répartir entre eux (0.2 chacun), de même que les 30 minutes de présence aux débats (0.04) et que 10 minutes de frais d'ouverture de dossier (0.17) seront admises pour chacun d'eux (y compris pour le client S______ auquel ils n'avaient pas été facturés mais qui est le seul auquel est facturé le temps consacré à la lecture du jugement et à la déclaration d'appel), une forme d'économie d'échelle devant être consentie par l'avocat pour des débours forfaitaires ;

Qu'après ces abattements, et calculée au taux horaire de CHF 350.- admis pour les collaborateurs, l'indemnité due aux intéressés s'élève, TVA comprise à :

- K______, P______, R______ et N______, CHF 312.90 chacune ou chacun ;

- I______, Q______, O______, H______, J______ ET M______, CHF 471.20 chacune ou chacun ;

- L______, CHF 475.- ;

- S______, 761.40 ;

Qu'en ce qui concerne les défenseurs d'office, il sera rappelé que seules les activités indispensables sont retenues, mesurées à l'aune de ce que ferait un avocat non seulement efficace mais aussi expéditif (art. 16 al. 2 du règlement sur l'assistance juridique du 28 juillet 2010 [RAJ ; M. VALTICOS / C. reiser / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats, 2ème édition, Bâle 2022, n. 257 ad art. 12) et que le tarif horaire est de CHF 200.- ;

Qu'au vu de la simplicité du dossier, il sera retenu qu'une seule conférence de 20 minutes avec le mandant de Me G______ était justifiée, à laquelle seront ajoutées deux heures de préparation de l'audience d'appel, la durée des débats par 30 minutes, le forfait de 20% couvrant les activités diverses et la TVA, d'où une rémunération de CHF 731.50.- ;

Qu'il paraît équitable d'allouer le même montant à Me E______, défenseur d'office de D______, qui s'en est remis à justice.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Prend acte du retrait de l'appel formé par le Ministère public contre le jugement rendu le 13 mai 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/10670/2021.

Alloue, à la charge de l'Etat, les indemnités suivantes en couverture des dépenses nécessaires déployées durant la procédure d'appel (art. 429 al. 1 let. a CPP), à :

-       B______, CHF 531.70  ;

-       A______, CHF 396.60  ;

-       K______, P______, R______ et N______, CHF 312.90 chacune ou chacun ;

-       I______, Q______, O______, H______, J______ et M______, CHF 471.20 chacune ou chacun ;

-       L______, CHF 475.- ;

-       S______, 761.40 ;

Arrête à CHF 731.50.- (TVA comprise) chacun, la rémunération Me G______, défenseure d'office de F______, et celle de Me E______, défenseur d'office de D______, pour leurs diligences dans la procédure d'appel.

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'Etat.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Andreia GRAÇA BOUÇA

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).