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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/18190/2019

AARP/182/2022 du 09.06.2022 sur JTDP/522/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 29.08.2022, rendu le 25.03.2024, ADMIS
Descripteurs : OPPOSITION À UN ACTE DE L'AUTORITÉ;TABAGISME PASSIF;ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE;FIXATION DE LA PEINE;PEINE PÉCUNIAIRE;SURSIS À L'EXÉCUTION DE LA PEINE;FRAIS JUDICIAIRES
Normes : CP.286; CP.47; CP.34; CP.42; CPP.428; CPP.433; CPP.135
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/18190/2019 AARP/182/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 9 juin 2022

 

Entre

A______ (anciennement [prénommé] B______), sans domicile connu, comparant par Me C______, avocate, ______ [GE],

appelant,

 

contre le jugement JTDP/522/2021 rendu le 29 avril 2021 par le Tribunal de police,

 

et

D______, partie plaignante, comparant par Me E______, avocat, [Étude] F______ & Associés, ______ [GE],

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 29 avril 2021, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 ch. 1 al. 1 du Code pénal suisse [CP]) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (sous déduction d'un jour-amende) à CHF 30.- l'unité, avec sursis durant trois ans. Les frais de la procédure ont été mis à sa charge et ses conclusions en indemnisation rejetées (art. 429 du Code de procédure pénale suisse [CPP]).

A______ entreprend intégralement ce jugement, concluant, au fond, à son acquittement et à une indemnité pour ses frais de défense. À titre de réquisitions de preuve, il sollicitait l'audition de la gardienne responsable d'étage, G______, du gardien chef adjoint, H______, ainsi que l'apport à la procédure de la correspondance qu'il avait adressée "au personnel" de la prison de I______ durant sa détention.

b. Selon l'ordonnance pénale du Ministère public (MP) du 19 juin 2020, les faits suivants sont reprochés à A______ :

Le 28 juillet 2019, aux environs de 08h50, alors qu'il était détenu à la prison de I______ à Genève, il a refusé de réintégrer sa cellule à la suite de la promenade, puis a utilisé la force contre les gardiens pour s'opposer à son transfert en cellule. De ce fait, il a compliqué la mission de ces derniers et griffé le gardien D______ au poignet gauche.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______ (anciennement [prénommé] B______) a été incarcéré à la prison de I______ du 21 au 29 juillet 2019, à la suite de la conversion d'une amende impayée. Selon ses allégués (réplique du 18 novembre 2021, p. 6), non contredits par le dossier, il s'agissait d'une amende d'un montant de CHF 1'400.- de sorte qu'il aurait dû demeurer incarcéré jusqu'au 4 août 2019 si un proche ne s'était acquitté d'une part de la somme en souffrance.

b.a. Le 28 juillet 2019, la gardienne principale adjointe, G______, a rédigé un rapport destiné à la direction de la prison de I______, signalant que, le matin-même, lors de la remontée de la promenade, A______ avait refusé de réintégrer sa cellule malgré les demandes des agents de détention.

Le gardien principal adjoint, J______, et le gardien D______ avaient ainsi dû prendre A______ en clef de transport pour le raccompagner en cellule. Ce dernier avait alors résisté, contraignant les deux gardiens à le descendre au sol en clef de coude. Tandis que A______ était maintenu au sol en clef d'épaule, l'appointé K______ lui avait fait une clef de jambe. A______ se plaignant d'avoir mal au cœur, J______ avait pris la décision de le menotter afin de soulager la pression sur son thorax. Le détenu, menotté, avait finalement été placé en cellule forte. D______ avait été griffé au poignet gauche et s'était adressé au service médical, mais avait pu poursuivre sa journée de travail.

b.b. D______ a été examiné aux urgences de la Clinique L______ à 09h58 le même jour. Il présentait une dermabrasion sur la face latérale du poignet gauche de 3 cm de diamètre, sans saignement actif ni effraction de la barrière cutanée.

b.c. La direction de la prison de I______ a dénoncé les faits au MP le 8 août 2019, précisant que le gardien D______ déposait plainte. A______ avait été puni de trois jours de détention en cellule forte, pour refus d'obtempérer et trouble à l'ordre de l'établissement.

b.d. A______ a déposé plainte pénale le 21 octobre 2019 (P/1______/2019), alléguant avoir subi des violences de la part des gardiens le 28 juillet 2019. Selon le constat de lésions traumatiques des hôpitaux universitaires de Genève (HUG) du 29 juillet 2019, il avait souffert de douleurs à la palpation au côté gauche du menton, au muscle trapèze droit, au grand muscle pectoral droit, au coude et genou gauches, ainsi que d'une tuméfaction au menton et d'une dermabrasion sans saignement au coude.

b.e. Les deux procédures n'ont pas été jointes, celle consécutive à la plainte de A______ étant toujours pendante devant le MP.

c. La scène des événements, telle que filmée par le système de vidéosurveillance, peut être ainsi résumée :

A______ se tient près d'une cellule, dont la porte est fermée. On comprend de sa gestuelle qu'il marque fermement son refus d'intégrer sa cellule en s'adressant à l'agent K______ (identifié sur la base du rapport d’analyse des images du 26 octobre 2019 et de son audition du 1er juin 2021 par la police). G______ s'approche du prévenu qui se tient désormais au milieu du couloir. Ils sont rejoints par D______. A______ continue de s'expliquer, en se déplaçant de quelques pas, passant tout près de la gardienne, à laquelle il tourne le dos. Cette dernière et D______ se tiennent chacun d'un côté du prévenu, qui échange avec la gardienne en secouant négativement la tête. J______ s'approche. Alors que A______ continue de s'éloigner légèrement de sa cellule, G______ se place tranquillement dans son axe. J______ le saisit au bras droit. D______ suit le mouvement et prend son bras gauche, à hauteur de l'avant-bras et du poignet. Les deux hommes poussent le détenu jusqu’au mur, à côté de la cellule initiale, dont le gardien K______ ouvre la porte. Durant le déplacement, A______ résiste, en s'arc-boutant sur ses jambes, avant d'être plaqué au mur, puis amené au sol. D______ a un genou au sol et l'autre sur les jambes du prévenu, alors que J______ a placé un genou sur ses omoplates. K______ referme la porte de la cellule. Il fait le tour du prévenu tandis que D______ s'avance à genoux à hauteur de son torse pour le saisir par le bras. D______ et J______ ont alors chacun un genou sur le haut du dos de A______ et tiennent chacun l'un de ses bras presque à la verticale, tandis que K______ se saisit de sa jambe droite puis de la gauche, et les fléchit toutes deux, les genoux étant maintenus au sol. Le prévenu, qui cesse alors d'avoir des mouvements de résistance, est contraint de la sorte quelques secondes, tandis que d'autres gardiens accourent. Après environ trois minutes, il est menotté, bras dans le dos, et conduit en cellule forte en marchant sur ses deux pieds, escorté par deux gardiens.

d. A______ a tout d'abord été entendu à la police le 1er novembre 2019 en qualité de personne appelée à donner des renseignements dans le cadre de la procédure consécutive à sa plainte (P/1______/2019). Il a ensuite été entendu en qualité de prévenu le 18 juin 2020, puis par-devant le MP le 27 août 2020 dans la présente procédure.

d.a. Lors de ses deux auditions à la police, il a indiqué, en résumé, qu'à son retour de promenade, il avait fait part aux gardiens le raccompagnant de ce qu'il refusait d'entrer dans sa cellule, dès lors qu'elle était pour fumeurs et qu'il ne supportait pas la fumée. Ce n'était pas la première fois qu'il se plaignait du fait que cela lui provoquait des problèmes de santé.

Après lui avoir demandé une nouvelle fois d'intégrer sa cellule, en vain, les agents de détention en avaient refermé la porte, puis l'avaient saisi par les bras et jeté immédiatement et violemment au sol. Alors qu'il se trouvait face contre terre, un gardien avait replié ses jambes en direction de sa tête et ses bras avaient été ramenés en arrière vers son dos, de sorte que seuls son ventre et sa tête touchaient le sol. Malgré ses hurlements, un gardien le maintenait avec son genou placé sur son dos. Il avait été porté jusqu'à l'ascenseur, ses pieds ne touchant pas le sol, pour être conduit "au cachot".

d.b. Devant le MP et le TP, A______ a confirmé avoir refusé de réintégrer sa cellule, mais a contesté avoir effectué des gestes violents envers les gardiens. Il n'avait pas griffé D______. Il n'avait pas eu l'intention de s'opposer par la force à leurs ordres. Dans l'enceinte d'une prison et entouré d'une dizaine d'agents, il était inutile de résister. Au contraire, les gardiens avaient adopté un comportement agressif à son encontre. S'ils lui avaient demandé de se tourner contre le mur pour lui passer des menottes, il l'aurait fait, voulant aller au "mitard" pour ne plus avoir à respirer la fumée dans sa cellule. Au TP, il a déclaré qu'il n'avait pas résisté, n'ayant aucun intérêt à le faire.

Avant cette altercation, il avait supplié les gardiens, plusieurs fois par jour, de le changer de cellule. Il avait même rédigé un courrier à l'attention de la direction. Il avait subi un traumatisme moral et, depuis les faits, il avait mal "dans sa tête".

e. Lors de leur première audition à la police, J______, D______ et K______ ont chacun déclaré n'avoir qu'un vague souvenir des évènements, voire aucun, même après lecture du rapport d'incident. Ce n'est qu'après le visionnage des images de vidéosurveillance que les deux premiers se sont exprimés davantage.

e.a. Selon ses déclarations à la police, J______ avait entendu A______ dire à ses collègues qu'il ne voulait pas réintégrer sa cellule, se plaignant de ce que c'était "l'Holocauste" car ses codétenus n'arrêtaient pas de fumer. A______ s'était à un moment donné approché de sa collègue G______. Il l'avait pris au moyen d'une prise d'escorte pour le conduire dans sa cellule. A______ avait tenté de sortir de la prise en levant son bras et n'avait pas obtempéré à ses injonctions. Un collègue avait saisi le second bras du détenu. Leur intention restait de l'accompagner dans sa cellule. Comme il était récalcitrant, ils l'avaient dans un premier temps placé face au mur puis au sol. Ils l'avaient menotté pour le soulager, car il se plaignait d'avoir mal au cœur.

e.b. À la police, au MP puis à l'audience de jugement, D______ a expliqué que A______ refusait de retourner dans sa cellule. Au TP, il a déclaré que les agents avaient essayé sans succès de raisonner à plusieurs reprises le prévenu, qui était colérique et très agité. Il avait, avec son collègue J______, procédé à une prise d'escorte pour l'accompagner dans la cellule. Au MP, il a précisé que c'était à ce moment-là qu'il avait senti que le détenu avait griffé son avant-bras gauche. Dès lors que A______ ne voulait toujours pas obtempérer à leurs injonctions, ils avaient dû le placer face au mur. L'idée était que les choses se calment, le but des gardiens n'étant pas de mettre les détenus en cellule forte. Comme il ne coopérait toujours pas, voire se débattait selon ses explications au MP, ils avaient décidé de l'amener au sol afin de le maîtriser à l'aide d'une clef de coude. Avant l'incident, il n'avait jamais vu A______ et ignorait de ce fait ses doléances au sujet de la fumée.

e.c. K______ a expliqué à la police que la marche à suivre lorsqu'un détenu refusait de réintégrer sa cellule était d'instaurer dans un premier temps un dialogue puis, s'il n'obtempérait pas, de lui signifier oralement qu'il serait conduit en cellule forte. Il n'y avait pas de procédure pour séparer les détenus fumeurs des non-fumeurs. Cela se faisait, dans la mesure du possible, mais en cas de manque de place, ils étaient mélangés.

f. M______ a exercé la fonction de procureur jusqu'au 31 décembre 2021 et a notamment diligenté la présente procédure. Dès janvier 2022, il a repris l'exercice de la profession d'avocat en tant qu'associé en l'étude F______, structure dans laquelle exerce également Me E______, conseil de la partie plaignante.

C. a. Les réquisitions de preuve rejetées, la présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties. Alors que la cause avait été gardée à juger une première fois, la CPAR a suspendu sa délibération et invité les parties à se déterminer sur la qualification alternative d'empêchement d'accomplir un acte officiel au sens de l'art. 286 CP.

b.a. Par acte du 11 février 2022, A______ requiert qu'une interdiction de postuler soit prononcée à l'égard de Me E______ et que tous les actes rédigés par la partie plaignante et le MP après le 19 octobre 2021 soient retirés de la procédure.

Un conflit d'intérêts avait surgi, dès lors que, tel qu'annoncé par la presse le ______ 2021, M______ avait désormais intégré l'Etude de ME______. Or, jusqu'à fin décembre 2021, le premier avait été le procureur ayant conduit la présente procédure au sein du MP. À ce titre, il se devait ainsi d'instruire à charge et à décharge. Dès lors, les intérêts de la justice entraient en conflit direct avec ceux de la partie plaignante, tendant à un verdict de culpabilité. Les principes de la bonne foi, du procès équitable, de l'indépendance, de même que les règles professionnelles de l'avocat avaient été bafoués. Une demande de récusation de M______ n'aurait rien changé, dès lors que c'était les connaissances acquises dans l'exercice de la direction de la procédure au stade de l'instruction qui posaient problème. Bien que l'ancien procureur demeurât lié par le secret de fonction, le simple risque que le plaignant pût aujourd'hui disposer d'informations auxquelles le prévenu n'avait pas accès faisait naître une apparence de conflit d'intérêts concret.

b.b. D______ conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet de cette requête, en sollicitant une indemnité de CHF 915.- TTC pour les deux heures d'activité nécessitées de ce fait (art. 433 CPP).

La demande en interdiction de postuler était tardive, dès lors qu'elle se fondait sur des faits appris plusieurs mois auparavant, qui auraient dû faire l'objet d'une requête en récusation. Subsidiairement, elle était sans objet, ayant été formulée après que la cause eut été gardée à juger. Quoi qu'il en soit, elle était infondée, Me E______ s'étant constitué lors de la procédure d'appel, soit à un stade où le MP n'avait plus que le rôle d'une partie, n'était plus tenu à impartialité et devait soutenir l'accusation. Les intérêts de la partie plaignante et du MP étaient depuis alignés. Au demeurant, l'ancien procureur ne travaillait pas sur son dossier.

b.c. Le MP appuie la demande de A______.

Quand bien même Me M______ restait lié par le secret de fonction, il était aujourd'hui l'associé du conseil de la partie plaignante et une prudence particulière devait s'imposer à l'avocat en raison de l'apparence ainsi créée. Le prévenu pouvait légitimement être amené à penser que ME______ disposait d'informations dont il n'aurait pas bénéficié si un ancien procureur n'avait pas rejoint son Étude.

c. Selon ses écritures, A______ persiste dans ses conclusions principales, sollicitant également son acquittement du chef d'infraction à l'art. 286 CP, la constatation que sa privation de liberté avait été injustifiée, une indemnité de CHF 2'000.- pour le tort moral subis, de CHF 3'500.- pour le dommage économique, et de CHF 11'287.50 pour ses frais de défense avant l'octroi de l'assistance juridique. Subsidiairement, il conclut à la constatation de la violation de la maxime d'accusation et au renvoi de la cause au TP. Plus subsidiairement encore, il plaide l'exemption de peine.

La blessure de D______ ne présentait pas d'effraction de la barrière cutanée et il ne ressortait pas du rapport du 28 juillet 2019 qu'il avait été blessé durant l'intervention. L'agent J______ avait indiqué qu'aucun coup n'avait été échangé et l'agent K______ n'avait aucun souvenir particulier. Les images de vidéosurveillance démontraient l'absence d'actes de violence et d'usage de la force de sa part. L'absence de séparation entre les détenus fumeurs et ceux non-fumeurs constituait une grave lacune dans la gestion de l'établissement. Il ressortait de différents éléments au dossier qu'il s'était plaint à de nombreuses reprises de son placement dans une cellule avec des fumeurs, la nocivité de la fumée passive pour la santé étant notoire, même durant une brève exposition. Les gardiens l'avaient réintégré dans sa cellule de force, au lieu de lui signifier une sanction, qu'il était prêt à accepter, celle-ci lui permettant de ne plus subir la fumée passive. La procédure interne décrite par les gardiens dans le cas où un prévenu refusait de réintégrer sa cellule n'avait ainsi pas été respectée. Il avait lui-même subi des lésions suite à l'intervention des agents.

Sur le plan du droit, le principe d'accusation avait été violé, l'acte d'accusation ne permettant pas de comprendre le comportement exact qui lui était reproché. Il n'était pas établi qu'un acte officiel ait eu lieu, si tant est que l'ordre d'intégrer sa cellule en était un, et il n'avait fait preuve que de désobéissance, non d'un empêchement. On ne pouvait lui faire grief d'avoir empêché le maintien de l'ordre, cela ne figurant pas dans ledit acte. Un lien de causalité entre un acte de violence de sa part et le comportement des agents n'était pas non plus établi. Enfin, l'élément intentionnel n'était pas décrit, étant relevé qu'il n'était pas établi qu'une quelconque injonction lui eût été donnée.

Seule la première variante de l'infraction à l'art. 285 CP avait été examinée par le TP, qui avait ainsi exclu celle relative aux voies de fait. Or, les images de vidéosurveillance écartaient tout acte de violence de sa part, y compris envers G______, avant l'intervention des agents. Il avait expliqué pacifiquement qu'il s'opposait à réintégrer sa cellule et n'avait effectué aucun mouvement de recul. En tout état de cause, la griffure n'atteignait pas le degré suffisant pour être considéré comme un acte de violence. Son intention de blesser un gardien, voire de s'en accommoder, n'était pas établie. Aucun élément ne permettait de retenir l'existence de menaces.

Les éléments constitutifs de l'infraction à l'art. 286 CP n'étaient pas non plus donnés, tant sur le plan objectif que subjectif. Il n'avait adopté aucun comportement atteignant le seuil nécessaire pour commettre cette infraction. Rien ne permettait d'établir qu'il avait entendu des injonctions et s'y était activement opposé.

Quand bien même un comportement typique de sa part serait retenu, il conviendrait de reconnaître que son opposition active à réintégrer sa cellule était licite au sens de l'art. 14 CP. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH), il était en droit d'exiger d'être placé dans une cellule non-fumeurs et de s'adresser pour cela aux agents de détention. L'intervention de ces derniers avait été disproportionnée, sinon constitutive d'un abus d'autorité. Subsidiairement, il devait être considéré qu'il se trouvait dans un état de nécessité licite, voire excusable. Il existait à tout le moins un doute quant au fait qu'il ait formulé des doléances auparavant. Le 28 juillet 2019, cela faisait six jours qu'il était placé en détention dans une cellule fumeurs, alors que cela aggravait, chaque jour de plus, son état de santé. Le danger était ainsi actuel et menaçant.

En cas de condamnation, il devait être exempté de peine (art. 54 CP). Il avait refusé de réintégrer sa cellule pour protéger son intégrité physique, en dépit de l'inaction des agents. S'il avait blessé l'agent D______, ce n'était que par négligence. Il avait subi lui-même d'importantes lésions à la suite des évènements.

d. D______ conclut à ce que A______ soit débouté de toutes ses conclusions et à sa condamnation au paiement des frais de la procédure, ainsi que de ses frais de défense en appel de CHF 3'388.50, sans produire de décompte de prestations.

Il ressortait des images de vidéosurveillance et des déclarations concordantes, claires et cohérentes des agents de détention qu'après avoir refusé de réintégrer sa cellule, en se montrant agité et colérique, A______ s'était approché de G______ de façon menaçante. Il n'avait ainsi pas uniquement tenté de discuter, comme il le prétendait, ses déclarations étant exagérées, contradictoires et non crédibles. L'agent J______ et lui-même avaient dû procéder à une prise d'escorte pour le conduire en cellule. Le prévenu s'étant débattu pour sortir de cette prise, moment auquel l'intimé avait senti qu'il avait été griffé. Son collègue et lui l'avaient plaqué contre un mur, puis amené au sol. Les gardiens avaient suivi le protocole à la lettre. Leur acte officiel consistait à s'assurer que les détenus regagnent leur cellule en temps voulu, corollaire nécessaire au maintien de l'ordre au sein de l'établissement. La blessure subie atteignait le seuil de gravité requis au regard de l'infraction à l'art. 285 CP, outre que l'existence d'une lésion n'était pas déterminante. Subsidiairement, les conditions de l'art. 286 CP étaient également données.

Le fait pour un détenu de devoir partager sa cellule avec des fumeurs n'était pas systématiquement constitutif d'une violation des dispositions de la CEDH, en l'absence d'une communauté de vues entre les Etats membres concernant le tabagisme dans les centres pénitentiaires. L'agent D______ n'avait quoi qu'il en soit pas commis d'abus d'autorité, n'ayant pas exercé ses pouvoirs coercitifs dans un but étranger à ses fonctions ou d'une manière manifestement disproportionnée. Les agents s'étaient limités à une prise d'escorte, justifiée par le comportement de l'appelant. Il ne ressortait pas du dossier que celui-ci s'était plaint auparavant de la fumée auprès des gardiens, d'ailleurs non compétents pour la répartition des détenus dans les cellules. Les effets néfastes de la fumée passive ne justifiaient en tout état pas le comportement de l'appelant. Il était en mesure d'adresser une demande formelle de changement de cellule à la direction de la prison et aucun danger imminent n'existait, l'appelant n'ayant du reste produit aucun document médical en ce sens.

e. Le MP conclut au rejet de l'appel.

Le comportement de l'appelant avait été, dans son ensemble, constitutif de violence, et l'infraction à l'art. 286 CP était subsidiaire à celle à l'art. 285 CP. Le simple fait de commettre des voies de fait sur un fonctionnaire remplissait les éléments constitutifs de l'infraction. Or, la griffure subie par l'agent de détention était confirmée par certificat médical. Il suffisait que la violence soit motivée par l'acte officiel et qu'elle se produise immédiatement, sans qu'il n'y ait lieu d'examiner à quel moment ledit acte devait être tenu pour accompli.

f. Le Tribunal de police se réfère intégralement au jugement entrepris.

D. a. A______, né le ______ 1964 à N______, en Russie, est un ressortissant français. Il est célibataire et sans enfant. Il travaille en tant que ______ indépendant. En sus du revenu variable qu'il dégage de cette activité, il perçoit le revenu de solidarité active (RSA) à raison de EUR 450.-.

b. Selon l'extrait du casier judiciaire suisse, A______ a été condamné le 10 janvier 2013 par le MP de l'arrondissement de O______ [VD] à une peine pécuniaire de 43 jours-amende à CHF 30.-, avec sursis durant trois ans, ainsi qu'à une amende de
CHF 450.-, pour conduite d'un véhicule automobile en état d'ébriété avec un taux d'alcool qualifié.

E. Me C______, désignée défenseure d'office de A______ aux seules fins de la procédure d'appel écrite dès le 20 septembre 2021, dépose deux états de frais. Le premier fait notamment état de 16h45 d'activité au tarif horaire de cheffe d'étude, dont 15h00 dédiées à la rédaction du mémoire d'appel, pour un montant total de CHF 4'020.-, non soumis à la TVA. Le second décompte 15h15 d'activité, dont 4h40 au tarif horaire de cheffe d'étude non soumis à TVA (CHF 934.-) , 7h50 au tarif horaire de cheffe d'étude soumis à TVA (CHF 1'566.- + TVA en CHF 144.70), ainsi que 2h45 au tarif du stagiaire (CHF 302.50, non soumis à TVA). Cela comprend, en particulier, 3h00 d'activité de cheffe d'étude relative à la rédaction de la réplique et 4h50 pour les "déterminations sur la requalification", ainsi que 2h45 d'activité du stagiaire consacrées également à la rédaction de la réplique.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP). La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1.1. Au sens de l'art. 62 al. 1 CPP, le magistrat exerçant la direction de la procédure ordonne les mesures nécessaires au bon déroulement et à la légalité de la procédure. Il est en particulier compétent pour interdire à un avocat d'exercer son mandat (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, 2ème éd., Bâle 2019, n. 5a ad art. 62).

2.1.2. L'art. 12 let. c de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (LLCA) prévoit que l'avocat doit éviter tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé.

Celui qui accepte ou poursuit la défense d'intérêts contradictoires doit se voir dénier la capacité de postuler (ATF 147 III 351 du 25 mars 2021 consid. 6.1.3.). L'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts est une règle cardinale de la profession d'avocat. Cette interdiction relève de la clause générale de l'art. 12 let. a LLCA, selon laquelle l'avocat exerce sa profession avec soin et diligence, de même que de l'obligation d'indépendance rappelée à l'art. 12 let. b LLCA (ATF 145 IV 218 consid. 2.1 p. 222).

Il y a conflit d'intérêts lorsque l'avocat est restreint dans sa capacité de défendre l'un de ses clients ou qu'il peut utiliser, consciemment ou non, les connaissances d'une partie adverse acquises lors d'un mandat antérieur au détriment de celle-ci (ATF
145 IV 218 consid. 2.1 p. 222 ; ATF 141 IV 257 consid. 2.1). Un risque de conflit d'intérêts purement abstrait ou théorique ne suffit pas ; le conflit doit être concret, sans qu'il soit nécessaire qu'il se soit réalisé en ce sens que l'avocat a déjà exécuté son mandat de façon critiquable (ATF 135 II 145 consid. 9.1). L'interdiction des conflits d'intérêts ne se limite pas à la personne même de l'avocat, mais s'étend à l'ensemble de l'étude ou du groupement auquel il appartient (ATF 145 IV 218 consid. 2.2).

2.1.3. Le ministère public est responsable de l'exercice uniforme de l'action publique (art. 16 al. 1 CPP). Il lui incombe de conduire la procédure préliminaire, de poursuivre les infractions dans le cadre de l'instruction et, le cas échéant de dresser l'acte d'accusation et de soutenir l'accusation (art. 16 al. 2 CPP).

Après la rédaction de l'acte d'accusation, le ministère public devient une partie aux débats, au même titre que le prévenu ou la partie plaignante (art. 104 al. 1 let. c CPP). Par définition, il n'est plus tenu à l'impartialité et il lui appartient en principe de soutenir l'accusation. Dans ce cadre, ni les art. 29 et 30 Cst., ni l'art. 6 par. 1 CEDH ne confèrent au prévenu une protection particulière lui permettant de se plaindre de l'attitude du ministère public et des opinions exprimées par celui-ci durant les débats (ATF 138 IV 142 consid. 2.2.2).

2.1.4. Le droit à un procès équitable est garanti par les art. 3 al. 2 let. c CPP, 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 6 par. 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH). Le principe d'égalité des armes, découlant de ce droit, exige un "juste équilibre entre les parties" : chacune doit se voir offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires (arrêts de la CourEDH Avotins c. Lettonie du 23 mai 2016, § 119 ; Yvon c. France du 24 avril 2003, § 31). Au pénal, ce principe suppose un équilibre non seulement entre le prévenu et le Ministère public soutenant l'accusation, mais également entre le prévenu et la partie civile. Cette égalité doit permettre d'assurer un débat contradictoire (arrêts du Tribunal fédéral 6B_259/2016, 6B_266/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.3.1 ; 6B_194/2009 du 13 juillet 2009 consid. 2.1).

Ce principe suppose que les parties aient un accès identique aux pièces versées au dossier (ATF 122 V 157 consid. 2b p. 163/164 ; arrêt du Tribunal fédéral 6P.125/2005 du 23 janvier 2006 consid. 4.2 ; A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 1 ad art. 3 CPP). Toutes les pièces d'une affaire, à savoir celles réunies par les autorités, celles versées par les parties ainsi que les procès-verbaux de procédure et des auditions, doivent être réunies au dossier (art. 100 al. 1 CPP), qui doit être complet et unique. Ainsi, les pièces de moindre importance, notamment celles relatives à des investigations infructueuses, doivent également y être incluses. L'autorité n'a pas le droit de choisir certains documents à communiquer et d'en soustraire d'autres à la consultation. De plus, il ne doit pas exister de dossier officiel parallèle, par hypothèse épuré d'un certain nombre de pièces gênantes pour les autorités (A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 11 ad art. 107).

2.2. En l'occurrence, contrairement à ce que soutient l'appelant, aucun conflit d'intérêts n'est survenu dans la procédure du fait que Me E______, conseil de la partie plaignante, s'est associé à Me M______, ancien procureur ayant conduit l'instruction de la présente procédure et renvoyé l'accusation devant le TP, à compter du 1er janvier 2022, voire dès la date d'annonce de cette association dans la presse le ______ 2021.

D'une part, suite à la reddition de son ordonnance pénale du 19 juin 2020 condamnant l'appelant et à la saisine du TP, ensuite de l'opposition de l'appelant du 29 juin suivant, soit bien avant l'annonce de l'association litigieuse, le MP était devenue une partie au procès. Dans ces circonstances, à compter de cette phase, il requérait la condamnation de l'appelant, sans réserve à son égard, à l'instar de la partie plaignante. Le jugement de première instance, retenant un verdict de culpabilité à l'encontre de l'appelant, a été rendu le 29 avril 2021. En appel, tant le MP que la partie plaignante, représentée par Me E______, concluent à la confirmation de ce jugement. Dans ces conditions, les intérêts de ces parties, manifestement convergents, ne sont pas entrés en conflit lors de l'association des conseils précités.

D'autre part, le dossier est contradictoire, présumé complet et exhaustif, de sorte que les parties ont accès à toutes les informations. Dès lors, il n'existe aucun risque concret que Me M______ soit en possession de renseignements incriminants supplémentaires au sujet de l'appelant, qui seraient absents du dossier, et qu'il pourrait désormais transmettre à la partie plaignante, en violation de son secret de fonction. L'appelant ne le prétend du reste pas, ni ne soutient que l'intimé aurait, depuis ladite association, allégué un élément ne ressortant pas du dossier contradictoire.

Partant, la Présidente de la CPAR, exerçant la direction de la procédure, parvient à la conclusion que la demande d'interdiction de postuler formulée par l'appelant à l'encontre de Me E______, de même que sa requête visant au retrait des pièces produites par ce conseil et le MP dès le 19 octobre 2021, doivent être rejetées.

3. 3.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ;
138 V 74 consid. 7 p. 82).

3.1.2. L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation, laquelle découle également des art. 29 al. 2 Cst., 32 al. 2 Cst. et 6 par. 3 let. a CEDH. Selon ce principe, l'acte d'accusation définit l'objet du procès. Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits et préparer efficacement sa défense (art. 325 CPP ; ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65).

3.2.1. L'art. 285 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, en usant de violence ou de menace, aura notamment empêché un fonctionnaire de faire un acte entrant dans ses fonctions, l'aura contraint à faire un tel acte ou se sera livré à des voies de fait sur lui pendant qu'il y procédait.

Par violence, on entend ordinairement une action physique de l'auteur sur la personne du fonctionnaire. L'usage de la violence doit revêtir une certaine gravité. La menace correspond à celle de l'art. 181 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_257/2010 du 5 octobre 2010 consid. 5.1 ; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, 3e éd., Berne 2010, n. 4-5 ad art. 285 et n. 3 ad art. 181 CP).

Les voies de fait au sens de l'art. 285 CP doivent revêtir une certaine intensité. L'intensité de la violence doit être analysée selon les circonstances concrètes. Il suffit que la violence soit motivée par l'acte officiel et qu'elle se produise immédiatement sans qu'il y ait à examiner à quel moment l'acte officiel doit être tenu pour accompli (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1339/2018 du 21 février 2019 consid. 2.2 ; 6B_863/2015 du 15 mars 2016 consid. 1.1 = SJ 2017 I 85).

Il s'agit d'une infraction de résultat (sauf dans la dernière variante) : le moyen de contrainte illicite doit amener l'autorité ou le fonctionnaire à adopter un comportement qu'il n'aurait pas eu s'il avait eu toute sa liberté de décision ; le comportement peut consister à faire, ne pas faire ou laisser faire (B. CORBOZ, op. cit., n. 11 ad art. 285 CP).

L'infraction requiert l'intention, le dol éventuel étant suffisant (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 22 ad art. 285).

3.2.2. L'art. 286 CP réprime le comportement de celui qui aura notamment empêché un fonctionnaire d'accomplir un acte entrant dans ses fonctions.

L'opposition aux actes de l'autorité se distingue de l'art. 285 CP par le fait qu'il n'est pas exigé que l'auteur ait recours à la violence ou à la menace (M. DUPUIS et al., op. cit., n. 3 ad art. 286).

L'acte de l'autorité correspond à toute activité entrant dans le cadre des compétences officielles du fonctionnaire concerné (M. DUPUIS et al., op. cit., n. 7 ad art. 286).

Pour réaliser l'infraction, il suffit que l'auteur rende l'accomplissement de l'acte officiel plus difficile, l'entrave ou le diffère, sans qu'il ne soit nécessaire qu'il parvienne effectivement à l'éviter. Le comportement incriminé à l'art. 286 CP suppose une résistance qui implique une certaine activité qui est réalisée, par exemple, par le fait de prendre la fuite (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 p. 100, ATF
127 IV 115 consid. 2 p. 117-118 ; ATF 120 IV 136 consid. 2a p. 140). Il peut s'agir d'une obstruction physique : l'auteur, par sa personne ou un objet qu'il dispose à cette fin, empêche ou gêne le passage du fonctionnaire pour lui rendre plus difficile l'accès à une chose. On peut aussi penser à celui qui, en restant fermement à sa place, ne se laisse pas ou difficilement emmener (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd., 2010, n. 13 ad art. 286 CP).

L'infraction n'est pas réalisée si l'auteur se borne à ne pas obtempérer à un ordre qui lui est donné, par exemple de souffler dans l'éthylomètre, de parler moins fort ou de ne pas conduire (ATF 127 IV 115 consid. 2 p. 117, ATF 120 IV 136 consid. 2a p. 139) ou qu'il se contente d'exprimer son désaccord à l'endroit d'un acte entrepris par un fonctionnaire, mais sans l'entraver (ATF 105 IV 48 consid. 3 p. 49).

L'infraction réprimée à l'art. 286 CP requiert l'intention, le dol éventuel étant suffisant (M. DUPUIS et al., op. cit., n. 14 ad art. 286).

3.2.3. L'opposition aux actes de l'autorité, pour autant que ceux-là soient manifestement illégaux et que les voies de droit existantes ne donnent pas de protection suffisante, n'est pas punissable si elle tend au maintien ou au rétablissement de l'ordre légal. Il ne suffit donc pas que les conditions légales de l'acte ne soient pas remplies ; encore faut-il que l'autorité ou le fonctionnaire commette un abus d'autorité, c'est-à-dire qu'il exerce ses pouvoirs coercitifs dans un but étranger à ses fonctions ou d'une manière manifestement disproportionnée (ATF 142 IV 129 consid. 2.1 p. 132 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_206/2010 du 2 septembre 2010 consid. 4.2).

3.2.4. Selon le règlement genevois sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées (RRIP), les détenus doivent notamment observer les ordres du personnel pénitentiaire (art. 40). Il leur est interdit, d'une façon générale, de troubler l'ordre et la tranquillité de l'établissement (art. 45 let. h).

3.2.5. La direction donne au personnel les ordres relatifs au classement des détenus. Demeurent réservées les instructions spéciales émanant de la direction générale de l'office cantonal de la détention ou de l'autorité judiciaire (art. 14 al. 1 RRIP). En règle générale et indépendamment des dispositions de l'art. 13 (séparation des détenus en raison de leur sexe et de leur statut de prévenu/condamné/adolescent), le classement s'effectue d'après l'âge des détenus, la gravité et la nature des actes qui leur sont imputés (art. 14 al. 2 RRIP).

3.3.1. En l'espèce, il est établi et non contesté que, dans la matinée du 28 juillet 2019, alors qu'il était détenu à la prison de I______ à Genève, l'appelant a refusé de réintégrer sa cellule à la suite de la promenade, au motif que l'espace était occupé par des fumeurs et que la fumée passive lui occasionnait des problèmes de santé.

Contrairement à ce que soutient l'appelant, il ressort des images de vidéosurveillance recueillies, de même que des déclarations des gardiens entendus, qu'il ne s'est pas contenté d'exprimer son désaccord face à leur injonction de réintégrer sa cellule, mais qu'il leur a opposé une résistance physique active. En effet, après avoir cherché à s'éloigner de la porte d'entrée de sa cellule, contraignant les agents à tenter de l'y reconduire au moyen d'une prise d'escorte, l'appelant ne s'est pas laissé emmener, s'arc-boutant notamment sur ses jambes, ce qui a conduit à sa mise au sol. L'appelant ne saurait ainsi être suivi lorsqu'il prétend qu'il n'aurait pas résisté aux actes des gardiens, dès lors qu'il n'aurait pas eu d'intérêt à le faire, souhaitant être conduit en cellule forte. Il a opposé aux agents une résistance physique active tout au long de la séquence des faits litigieuse. L'appelant n'est pas non plus crédible lorsqu'il soutient que les gardiens seraient intervenus sans injonction préalable. Il a lui-même indiqué dans ses premières déclarations que les agents l'avaient sommé de réintégrer sa cellule, en vain, avant d'effectuer leur clef de transport. La gestuelle de l'appelant, qui notamment secoue négativement la tête face aux gardiens sur les premières images récoltées, de même que sa résistance physique, confirme que des sommations lui avaient été faites et qu'il s'y est sciemment constamment opposé avant d'être neutralisé. Cela ressort également des témoignages des gardiens et du rapport du 28 juillet 2019.

Il n'apparaît pas d'emblée établi que les agents de détention aient, dans ces circonstances, exercé des pouvoirs coercitifs étrangers à leurs fonctions ou fait preuve d'agissements disproportionnés qui seraient constitutifs d'un abus d'autorité. Il importe peu de savoir si l'appelant s'était déjà plaint plus tôt de la fumée passive subie auprès des gardiens. En effet, ceux-ci n'étaient pas compétents pour décider de la cellule où il devait être détenu, cela étant géré par la direction de l'établissement ou le personnel instruit pour ce faire. Le placement de l'appelant en cellule forte a, du reste, été ordonné à la suite des faits par le gardien chef adjoint H______, non par les agents de détention. L'appelant, qui était alors détenu depuis une semaine, ne devait pas ignorer le fonctionnement de l'établissement et le fait qu'il ne pouvait solliciter un changement de cellule en agissant de la sorte. Le fait que, tel qu'il l'explique, il a adressé un premier courrier à la direction à ce sujet en témoigne.

En revanche, on ne saurait déduire des images de vidéosurveillance recueillies que l'appelant a adopté un comportement particulièrement violent ou menaçant à l'égard des gardiens, notamment envers G______, quand bien même il pouvait être énervé par sa situation. Si une griffure, constitutive de voie de fait, a été causée à l'intimé durant l'incident, celle-ci ne peut être reliée à un geste, encore moins délibéré, de l'appelant. Il existe, à tout le moins, un doute sérieux sur ce point.

3.3.2. Compte tenu de ce qui précède, à défaut d'un comportement violent ou menaçant de l'appelant envers les gardiens, et d'un rapport de causalité entre un geste délibéré de ce dernier et la griffure occasionnée à l'intimé, les faits retenus ne sauraient être qualifiés de violence ou menace commises à l'égard d'un fonctionnaire au sens de l'art. 285 CP.

En revanche, le comportement de l'appelant remplit tous les éléments constitutifs de l'infraction d'empêchement d'accomplir un acte officiel selon l'art. 286 CP. Les injonctions de réintégrer la cellule formulées par les agents de détention auprès de l'appelant, de même que leurs gestes visant à l'y conduire, étaient des actes justifiés entrant typiquement dans leurs fonctions. En refusant activement et sciemment d'obtempérer à ceux-ci, l'appelant a entravé la tâche des gardiens de le replacer dans la cellule qu'il n'avait été autorisé à quitter que le temps de la promenade. Ce comportement est correctement décrit dans l'ordonnance pénale du 19 juin 2020 et la motivation des écritures de l'appelant démontre au demeurant qu'il l'a bien compris, de sorte que le principe d'accusation est respecté.

Partant, l'appelant sera reconnu coupable d'empêchement d'accomplir un acte officiel au sens de l'art. 286 CP.

4. 4.1.1. Au sens de l'art. 14 CP, quiconque agit comme la loi l'ordonne ou l'autorise se comporte de manière licite, même si l'acte est punissable en vertu du présent code ou d’une autre loi.

La jurisprudence admet l'existence de certains faits justificatifs extralégaux, à savoir qui ne sont pas réglés par le CP. Il s'agit notamment de la sauvegarde d'intérêts légitimes. Un éventuel fait justificatif extralégal doit être interprété restrictivement et soumis à des exigences particulièrement sévères dans l'appréciation de la subsidiarité et de la proportionnalité. Les conditions en sont réunies lorsque l'acte illicite ne constitue pas seulement un moyen nécessaire et approprié pour la défense d'intérêts légitimes d'une importance nettement supérieure à celle de biens protégés par la disposition violée, mais que cet acte constitue encore le seul moyen possible pour cette défense. Ces conditions sont cumulatives. Le fait justificatif de la sauvegarde d'intérêts légitimes présuppose ainsi, en principe, que les moyens de droit aient été utilisés et les voies de droit épuisées préalablement (ATF 134 IV 216 consid. 6.1 p. 226 ; 129 IV 6 consid. 3.3 p. 14 s. ; 127 IV 166 consid. 2b p. 168 s.).

4.1.2. Aux termes de l'art. 17 CP, quiconque commet un acte punissable pour préserver d’un danger imminent et impossible à détourner autrement un bien juridique lui appartenant ou appartenant à un tiers agit de manière licite s'il sauvegarde ainsi des intérêts prépondérants. D'après l'art. 18 CP, si l'auteur commet un acte punissable pour se préserver ou préserver autrui d'un danger imminent et impossible à détourner autrement menaçant la vie, l'intégrité corporelle, la liberté, l'honneur, le patrimoine ou d’autres biens essentiels, le juge atténue la peine si le sacrifice du bien menacé pouvait être raisonnablement exigé de lui.

Le danger est imminent lorsqu'il n'est ni passé ni futur, mais actuel et concret, soit lorsque le péril se concrétise à brève échéance, à savoir à tout le moins dans les heures suivant l'acte punissable commis par l'auteur (ATF 147 IV 297 consid. 2.3 ; 129 IV 6 consid. 3.2 p. 14 ; 122 IV 1 consid. 3a p. 5).

L'impossibilité que le danger puisse être détourné autrement implique une subsidiarité absolue (ATF 147 IV 297 consid. 2.1). Ainsi, celui qui est en mesure de s'adresser aux autorités pour parer au danger ne saurait se prévaloir de l'état de nécessité (ATF 125 IV 49 consid. 2c p. 55 s.; 6B_622/2008 du 13 janvier 2009 consid. 3.1). En d'autres termes, l'acte incriminé doit correspondre à un moyen nécessaire et proportionné, à même d'atteindre le but visé, et peser manifestement moins lourd que les intérêts que l'auteur cherche à sauvegarder (ATF 129 IV 6 consid. 3.3 p. 15).

4.1.3. Selon l'art. 7 al. 1 let. a de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le tabagisme passif (OPTP), l'exploitant ou la personne responsable du règlement de maison peut prévoir qu'il soit permis de fumer dans des chambres d'établissements d'exécution des peines et des mesures ou d'établissements du même ordre. Les personnes se trouvant dans un établissement au sens de l'al. 1 let. a peuvent exiger à être placées dans une chambre non-fumeurs (art. 7 al. 2 OPTP).

4.1.4. D'après la loi genevoise sur l'interdiction de fumer dans les lieux publics (LIF), l'interdiction de fumer dans les lieux intérieurs ou fermés concerne notamment les établissements d'exécution des peines et mesures (art. 3 al. 1 let. g LIF). Des exceptions à l'interdiction de fumer peuvent notamment être prévues pour les cellules de détention (art. 4 al. 1 let. b LIF).

4.1.5. Aux termes de l'art. 58 RRIP, lorsqu'un détenu a une requête ou une remarque à formuler, il s'adresse au personnel. Si un différend subsiste, la direction en est saisie. Au sens de l'art. 59 al. 1 RRIP, en tout temps, la personne détenue peut adresser, sous pli fermé, une dénonciation ou une pétition au directeur de la prison, à l'autorité de placement, au directeur général de l'office cantonal de la détention, ou encore au chef du département. L'autorité saisie est compétente pour connaître de la dénonciation ou de la plainte. Est réservée la possibilité de s'adresser à la commission des visiteurs officiels du Grand Conseil, aux instances de surveillance médicales, aux autorités judiciaires ou à toute autre autorité (al. 2). L'autorité compétente peut refuser d'ouvrir une enquête si la dénonciation ou la pétition est manifestement mal fondée, notamment si elle se borne à critiquer des mesures d'organisation internes dictées par des impératifs organisationnels ou sécuritaires, ou si elle est abusive. L’autorité compétente informe le dénonciateur ou les pétitionnaires de son refus (al. 6). Le dénonciateur et les pétitionnaires n'ont pas la qualité de partie à la procédure. Néanmoins, ils sont informés par écrit des suites données à la dénonciation ou à la pétition (al. 7).

4.2. L'appelant ne peut se prévaloir d'aucun motif justificatif.

Quand bien même l'art. 7 al. 2 OPTP prévoit que les détenus peuvent exiger d'être placés dans une chambre non-fumeurs, une telle disposition n'autorisait pas l'appelant à s'opposer activement et subitement aux ordres des agents de détention de réintégrer sa cellule comme il l'a fait. Tel que relevé précédemment, il ne pouvait ignorer que ceux-ci n'étaient pas compétents pour décider d'un autre espace de détention. Il pouvait et devait s'adresser aux autorités compétentes par les moyens de communication, voire de droit, utiles, plutôt que de commettre l'infraction pénale constatée, quitte à multiplier ses requêtes écrites pour obtenir une réponse à court terme. Au surplus, même si la fumée passive est mauvaise pour la santé, il n'était alors pas exposé à danger imminent, actuel et concret justifiant son comportement.

5. 5.1. L'empêchement d'accomplir un acte officiel est réprimé par une peine pécuniaire de 30 jours-amende au plus (art. 286 CP).

5.2.1. D'après l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir. La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures.

5.2.2. Sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l’auteur (art. 34 al. 1 CP).

En règle générale, le jour-amende est de CHF 30.- au moins et de CHF 3'000.- au plus. Le juge en fixe le montant selon la situation personnelle et économique de l’auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d’assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (art. 34 al. 2 CP).

5.2.3. Au sens de l'art. 54 CP, si l'auteur a été directement atteint par les conséquences de son acte au point qu’une peine serait inappropriée, l’autorité compétente renonce à le poursuivre, à le renvoyer devant le juge ou à lui infliger une peine.

5.3. La faute de l'appelant n'est pas négligeable. Il a activement empêché les agents de détention de le réintégrer dans la cellule où il était détenu à la prison, alors qu'il n'avait été autorisé à en sortir que pour la promenade. Il les a, de ce fait, contraint à recourir à des actes coercitifs et a troublé passablement l'ordre de l'établissement pénitentiaire. Il a certes agi afin d'éviter d'être exposé à la fumée passive et de préserver sa santé, mais, tel que développé précédemment, cela ne saurait justifier son comportement, dès lors qu'il pouvait et devait agir autrement. Il a ainsi fait preuve de mépris envers l'autorité pour des considérations personnelles.

La collaboration de l'appelant à la procédure ne peut être jugée bonne. S'il a d'emblée concédé avoir refusé de réintégrer sa cellule, il n'a pas reconnu la résistance physique active dont il a fait preuve envers les gardiens. Au vu de son sentiment persistant d'avoir agi à bon droit, sa prise de conscience est nulle et doit être encore amorcée.

Rien dans la situation personnelle de l’appelant ne saurait justifier son comportement. Il a un antécédent, toutefois ancien et non spécifique.

Au vu de ces éléments, une exonération de peine fondée sur l'art. 54 CP ne se justifie pas, les conséquences des actes de l'appelant n'ayant pas été si importantes pour lui qu'elles mériteraient un tel traitement au regard de sa faute et le prononcé d'une sanction apparaissant nécessaire pour des motifs de prévention spéciale.

Seul le prononcé d'une peine pécuniaire entre en ligne de compte. Au vu de la déqualification retenue et des éléments précités, une quotité de 20 jours-amende apparaît adéquate pour sanctionner la faute de l'appelant. Le montant de CHF 30.- l’unité est par ailleurs approprié à sa situation personnelle. Le bénéfice du sursis lui est acquis (art. 42 al. 1 CP et art. 391 al. 2 CPP), la durée du délai d’épreuve arrêtée à trois ans étant justifiée (art. 44 al. 1 CP).

Le jugement entrepris sera ainsi réformé dans cette mesure, ce qui emporte une admission très partielle de l'appel interjeté.

6. Au vu de ce qui précède, l'appelant supportera deux tiers des frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 2'000.-, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (art. 428 CPP et art. 14 al. 1 let. e du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale).

Compte tenu du verdict de culpabilité retenu, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais fixée en première instance (art. 428 al. 3 CPP), ni de revenir sur le rejet par le premier juge des conclusions en indemnisation pour les frais de défense du prévenu (art. 429 CPP).

7. 7.1.1. L'art. 433 al. 1 CPP permet à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause (let. a) ou lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b).

7.1.2. À teneur de l'art. 118 al. 1 CPP, seul peut se constituer partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil. Selon l'art. 115 al. 1 CPP, il faut entendre par lésé toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction.

Il convient d'interpréter le texte de l'infraction pour déterminer le titulaire du bien juridique ou du droit protégé par la loi et ainsi savoir qui a qualité de lésé (ATF
119 Ia 342 consid. 2 p. 345 ; 119 IV 339 consid. 1d/aa p. 343 ; A. KUHN / Y. JEANNERET [éds], Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2011, n. 8 ad art. 115). Les droits lésés directement par l'infraction doivent être des biens juridiquement individuels, tels que la vie, l'intégrité corporelle, la propriété, l'honneur ou la liberté personnelle (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale [CPP] du 21 décembre 2005, FF 2006 1148). Celui dont les intérêts privés ne sont atteints qu'indirectement par une infraction qui ne lèse que des intérêts publics, n'est pas lésé au sens du droit de procédure pénale (arrêt du Tribunal fédéral 6B_243/2015 du 12 juin 2015 consid. 2 et les références = SJ 2016 I p. 125).

7.1.3. Les art. 285 et 286 CP visent à garantir le bon fonctionnement des autorités publiques suisses. Ils ont pour but de protéger l'autorité publique contre toute atteinte aux actes entrant dans ses fonctions (A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ [éds], Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 2 ad art. 285 et n. 1 ad art. 286).

Quand bien même la personne physique, en sa qualité de fonctionnaire ou de membre d'une autorité, ne constitue pas le bien juridique protégé par l'art. 285 CP, son intégrité corporelle ainsi que sa liberté personnelle bénéficient indirectement de cette protection, dans la mesure où l'atteinte portée au titulaire de l'autorité publique met en danger le bon fonctionnement des autorités publiques (A. MACALUSO et al., op. cit., n. 3 ad art. 285).

7.2. Compte tenu de ce qui précède, force est de constater qu'au vu de la déqualification opérée et du verdict de culpabilité retenu à l'encontre de l'appelant du chef d'infraction à l'art. 286 CP, D______ ne peut plus prétendre à la qualité de lésé, ni de partie plaignante, seuls les intérêts de l'autorité publique étant directement atteints par cette dernière disposition.

Pour ce motif, ses conclusions en indemnisation fondées sur la base de l'art. 433 CPP sont irrecevables.

8. 8.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. L'art. 16 du règlement genevois sur l'assistance juridique (RAJ) prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

8.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3).

8.2. Les états de frais produits par la défenseure d'office de l'appelant apparaissent globalement excessifs. Les faits reprochés à l'appelant ne relevaient pas d'une complexité telle qu'il fallait consacrer plus de 8h00 à la rédaction du mémoire d'appel, 1h30 à celle de la réplique et 1h00 aux déterminations relatives à la requalification des faits, tous intervenants confondus. Dès lors, le premier état de frais sera admis à raison de 9h45 d'activité de cheffe d'étude (CHF 1'950.-), non soumises à TVA selon les indications données, et forfait pour l'activité diverse dû en sus (CHF 390.-). La seconde note d'honoraire sera, quant à elle, avalisée à hauteur de 6h10 d'activité de cheffe d'étude (CHF 1'233.35), forfait pour l'activité diverse (CHF 246.70) et TVA dus en sus (CHF 113.95).

La rémunération de Me C______ sera donc arrêtée à CHF 3'934.- (CHF 1'950.- + CHF 390.- + CHF 1'233.35 + CHF 246.70 et CHF 113.95), indemnité qui apparaît globalement adéquate pour défendre le dossier en appel.

* * * * *


PAR CES MOTIFS :


La Cour reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/522/2021 rendu le 29 avril 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/18190/2019.

La Présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision rejette la demande d'interdiction de postuler à l'endroit de Me E______.

La Cour admet très partiellement l'appel de A______ et annule le jugement entrepris.

Cela fait, la Cour, statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 20 jours-amende, sous déduction
d'un jour-amende, correspondant à un jour de détention avant jugement (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met le condamné au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ de ce que, s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Rejette les conclusions en indemnisation de A______ (art. 429 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 1'421.-.

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 2'255.-, qui comprennent un émolument de décision de CHF 2'000.-.

Met deux tiers de ces frais, soit CHF 1'503.35 à la charge de A______, et en laisse le solde à la charge de l'Etat.

Déclare irrecevables les conclusions en indemnisation de D______ (art. 433 al. 1 CPP).

Arrête à CHF 3'934.-, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseure d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Andreia GRAÇA BOUÇA

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'421.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

180.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

00.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

2'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'255.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'676.00