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Décisions | Chambre de surveillance

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C/8972/2022

DAS/5/2024 du 12.01.2024 sur DTAE/5883/2023 ( PAE ) , REJETE

Normes : CC.273; CC.274
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/8972/2022-CS DAS/5/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU VENDREDI 12 JANVIER 2024

 

Recours (C/8972/2022-CS) formé en date du 1er septembre 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), représenté par Me Diane BROTO, avocate.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 16 janvier 2024 à :

- Madame A______
c/o Me Diane BROTO, avocate
Rue du Rhône 100, 1204 Genève.

- Monsieur B______
c/o Me Ana KRISAFI REXHA
Boulevard des Tranchées 36, 1206 Genève.

- Madame C______
Monsieur D
______
SERVICE DE PROTECTION DES MINEURS
Route des Jeunes 1E, case postale 75,1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A.           a. Par jugement du 19 avril 2021, le Tribunal de première instance, statuant d’accord entre les parties, a dissous par le divorce le mariage contracté le ______ 1998 par B______, né le ______ 1974 et A______, née le ______ 1976, tous deux de nationalité française. Le Tribunal de première instance a par ailleurs et notamment maintenu l’autorité parentale conjointe sur les enfants E______ et F______, tous deux nés le ______ 2005 (désormais majeurs), G______, née le ______ 2009 et H______, né le ______ 2014 et attribué la garde à la mère, le père se voyant réserver un droit de visite devant s’exercer d’entente avec la mère et les enfants; il a par ailleurs été donné acte aux parties de ce que B______ avait d’ores et déjà avancé les contributions d’entretien des enfants jusqu’à leur majorité et de ce qu’il assumerait tous les frais d’entretien des enfants dès leur majorité en leur versant directement les sommes nécessaires; il a en outre été donné acte à B______ de ce qu’il s’engageait à verser à A______, d’ici au 30 novembre 2020, la somme de EUR 28'500'000, sous imputation, au taux de EUR/CHF de 1.07, des montants actuellement en main de Me I______, notaire, qui devaient être intégralement reversés à A______.

Ce jugement mentionne le fait que B______ était alors domicilié No. ______ 1______ Road à Singapour.

b. Le 5 mai 2022, A______ a saisi le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant d’une requête en mesures de protection, concluant, principalement, à ce qu’un suivi thérapeutique soit ordonné en faveur de la mineure E______, l’autorité parentale des deux parents devant être limitée dans la mesure nécessaire, à ce qu’une thérapie mère-fille entre elle-même et la mineure E______ soit ordonnée, à ce que son devoir de ne pas perturber les relations mère-fille et son devoir de respecter l’autorité parentale conjointe soient rappelés à B______, sous la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP; A______ a également conclu à ce que les missions suivantes soient confiées au curateur : mettre en place le suivi de la mineure E______, choisir le thérapeute, mettre en place et surveiller l’avancement de la thérapie mère-fille, ainsi que le suivi de E______, « droit de regard et d’information sur l’ingérence de Monsieur B______ dans les relations mère-fille », l’autorité parentale des deux parents devant être limitée dans la mesure nécessaire, les frais et dépens devant être mis à la charge de B______.

A l’appui de sa requête, A______ a allégué, en substance, que la procédure de divorce avait été longue et compliquée. B______ avait impliqué les enfants dans le conflit conjugal et était parti s’installer à Singapour sans l’en informer et alors que la procédure était pendante. E______ avait été fragilisée par la séparation de ses parents et avait exprimé sa souffrance par des comportements qui la mettaient en danger. A la fin du mois d’avril 2020, A______ avait appris que E______ avait été victime d’abus sexuels de la part de son grand-père maternel, lequel s’était dénoncé au autorités françaises. J______, fils majeur du compagnon de A______ avait également eu un comportement déplacé à l’égard de E______. A______ avait informé B______ de ces faits, lequel avait entrepris de « saper » son autorité parentale. Dès novembre 2021, après quatre jours de vacances que E______ et F______ avaient passés avec leur père, A______ avait eu de plus en plus de peine à leur faire respecter les règles à la maison. Au début de l’année 2022, E______ et F______ avaient manifesté le souhait de ne plus vivre avec leur mère; ils voulaient trouver un appartement [au quartier des] K______, ce que A______ avait refusé compte tenu de leur minorité. Leur père en revanche les avait encouragés à partir et cherchait un appartement pour eux. Il s’était déjà comporté de la sorte avec leur fille aînée, L______, qui vivait seule depuis sa majorité, dans un appartement payé par le père. Les relations de A______ avec sa fille E______ avaient continué de se dégrader et la mineure avait refusé de suivre une thérapie individuelle et d’en entreprendre une avec sa mère; la mineure s’était par ailleurs installée chez son ami et la mère de ce dernier, à laquelle B______ versait 1'000 fr. par mois pour l’entretien de E______. A______ avait pris contact avec le Service de protection des mineurs, mais aucune solution satisfaisante n’avait pu être trouvée.

Il ressort par ailleurs de la procédure que A______ a déposé plainte pour viol devant les autorités françaises à l’encontre de B______.

c. Le Tribunal de protection a sollicité un rapport du Service de protection des mineurs (ci-après : le SPMi), lequel a été rendu le 25 mai 2022. Il en ressort que E______ avait expliqué ne pas s’être sentie soutenue par sa mère lors des événements traversés en lien avec les abus sexuels dont elle avait été victime. Elle se sentait en sécurité chez son ami, refusait de regagner le domicile maternel et alléguait que ses résultats scolaires s’étaient améliorés depuis son départ de celui-ci.

Le SPMi préconisait la mise en place d’un suivi thérapeutique à des fins de médiation entre la mère et la fille et l’instauration d’une curatelle ad hoc pour la mineure, mesures autorisées par le Tribunal de protection, sur mesures superprovisionnelles le 25 mai 2022.

Une curatrice, M______, avocate, ayant pour mandat de représenter la mineure E______ dans la procédure pendante devant le Tribunal de protection, a par ailleurs été désignée par ce même Tribunal le 31 mai 2022.

d. Le 28 février 2023, le SPMi a rendu un second rapport, lequel concernait, cette fois, les quatre enfants E___/F___/G___/H______ encore mineurs.

Il en ressort, en résumé, que B______, administrateur de plusieurs sociétés, ne vivait plus à Singapour depuis plusieurs mois, mais refusait de transmettre sa nouvelle adresse, au motif que A______ pourrait lui intenter un procès, pour des raisons financières liées au divorce.

E______ et F______ effectuaient leur année de maturité à [l'école privée] N______. G______ était scolarisée [à l'école privée] O______ et H______ fréquentait l’école primaire de P______ [GE].

A______ souhaitait entreprendre une thérapie avec E______, qui aurait pu être étendue à F______ et à l’aînée, L______. E______ avait refusé et F______ ne lui adressait quasiment plus la parole et ne participait plus à la vie familiale. Il avait quitté la maison au mois d’octobre 2022 pour vivre dans un logement R______ [plateforme internet de réservation/location de logements] financé par son père, qui n’avait pas consulté la mère au préalable. Cette dernière souhaitait protéger G______ et H______ d’un potentiel enlèvement par leur père, ce d’autant plus que celui-ci refusait de communiquer son adresse et qu’étant très à l’aise financièrement, il avait les moyens de disparaître avec eux; elle souhaitait par conséquent que le droit de visite ne s’exerce que sur le territoire suisse. La communication avec B______ était inexistante.

Ce dernier a confirmé cette absence de communication, mais a contesté vouloir écarter A______ de la vie des enfants. Celle-ci n’avait pas suffisamment protégé E______ des agissements de J______, fils de son nouveau compagnon, qu’elle continuait de fréquenter. Le nouveau compagnon s’était installé au domicile de A______, ce qui avait indisposé F______. Il n’avait aucune intention d’enlever G______ et H______. Il souhaitait que A______ s’engage à protéger G______ du fils de son compagnon et demandait à pouvoir exercer son droit de visite à l’étranger.

E______ a confirmé au SPMi ne pas vouloir réintégrer le domicile de sa mère et ne pas vouloir s’investir dans une thérapie avec celle-ci. Quant à F______, il a expliqué ne pas vouloir participer à la vie de famille en raison de la présence, au domicile de sa mère, du compagnon de celle-ci. E______ et F______ ne rencontraient pas de problèmes scolaires; il en allait de même s’agissant de G______ et de H______.

Au terme de son rapport, le SPMi a notamment préconisé de réserver au père un droit de visite sur les quatre enfants à raison de la moitié des vacances scolaires, pouvant s’exercer également à l’étranger; le père devait être exhorté à communiquer à la curatrice et à la mère des enfants les coordonnées et adresse du lieu dans lequel il entendait accueillir les enfants durant le droit de visite; la mère devait être exhortée à transmettre les documents d’identité des enfants au père lorsque ce dernier exerçait son droit de visite; B______ devait être invité à donner l’adresse de son domicile, E______ et F______ exhortés à entreprendre un travail de médiation familiale avec leur mère et une curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles devait être instaurée.

e. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 16 mars 2023.

Selon M______, curatrice de représentation de E______, celle-ci vivait toujours chez son ami et la mère de celui-ci. Elle parlait quotidiennement à son père. Sa principale préoccupation était de pouvoir passer des vacances avec ce dernier ainsi que ses frères et sœurs sans limitation. Sa mère avait empêché ces derniers de partir avec son père et elle à Noël, ce qui l’avait attristée. Elle n’avait que peu de contacts avec sa mère, hormis pour des questions de santé, d’école ou en lien avec des questions financières. Elle ne souhaitait pas entreprendre une thérapie avec elle. Elle était en colère contre sa mère, ayant appris que cette dernière était allée skier avec son compagnon et J______, le fils de celui-ci, ainsi qu’avec G______ et H______. Or, c’était justement J______ qu’elle accusait d’agression sexuelle.

F______ était revenu au domicile maternel; il consommait du cannabis. Selon A______, son compagnon n’était présent à son domicile que quelques jours par mois. Elle s’organisait avec B______ pour les vacances; la seule condition qu’elle avait posée était que le droit de visite s’exerce en Suisse, dès lors qu’elle ne connaissait pas l’adresse du père. Elle n’avait plus confiance en lui, au motif qu’il n’avait pas respecté ses engagements financiers. Elle avait dû initier une procédure en exequatur à Singapour pour obtenir le solde de la somme qui lui était due; B______ ne s’y trouvait toutefois plus. Pour rétablir la confiance, elle souhaitait connaître sa nouvelle adresse. A______ contestait par ailleurs ne pas avoir suffisamment soutenu sa fille E______ : elle avait en effet porté plainte contre son propre père dès la connaissance des faits en 2020 et avait également porté plainte contre J______ en avril 2022; si elle ne l’avait pas fait plus tôt, c’était en raison du refus initial de E______. Elle n’avait plus revu J______ depuis lors, sous réserve de janvier 2023, où elle l’avait croisé sur une piste de ski; elle regrettait toutefois d’avoir accepté de skier avec lui ce jour-là.

B______ s’est exprimé de la manière suivante devant le Tribunal de protection : « Je ne sais pas si je ne suis plus à Singapour, je ne veux rien dire à ce sujet. Je veux protéger ma famille. J’estime que d’imposer un droit de visite en Suisse est une forme de chantage et que cela n’a rien à voir avec la sécurité des enfants ». Ces derniers n’avaient pas l’air malheureux chez leur mère, de sorte qu’il ne voyait aucun intérêt à les enlever. Il avait deux autres enfants, issus de sa relation avec sa nouvelle compagne, avec laquelle il allait se marier.

Au terme de l’audience, la cause a été gardée à juger.

B.            Par ordonnance DTAE/5883/2023 du 16 mars 2023, le Tribunal de protection a constaté que la curatelle ad hoc instaurée en faveur de E______ avait cessé ses effets du fait de son accession à la majorité (chiffre 1 du dispositif), relevé les curateurs de leur mandat et les a dispensés de leur rapport final (ch. 2), relevé M______, avocate, de son mandat de curatrice de représentation de E______ et la dispensée de son rapport final, disant que la taxation de ses honoraires ferait l’objet d’une décision distincte (ch. 3), instauré une curatelle d’organisation et de surveillance des relations personnelles en faveur des mineurs G______ et H______ (ch. 4), désigné deux intervenants en protection de l’enfant aux fonctions de curateurs des mineurs susmentionnés (ch. 5), rejeté la requête de A______ tendant à limiter l’exercice des relations personnelles entre les mineurs et leur père au territoire suisse (ch. 6), ordonné à B______ d’informer les curateurs et la mère des enfants du lieu de vacances où il exercera ses relations personnelles (ch. 7), ordonné à A______ de remettre les documents d’identité complets des enfants à B______ dans le cadre de l’exercice de ses relations personnelles (ch. 8), fait instruction aux parents de poursuivre la thérapie familiale [auprès du centre de consultations] Q______ et de favoriser la participation de tous les enfants, le cas échéant (ch. 9), rappelé aux deux parents à leurs devoirs découlant des articles 272 ss CC (ch. 10) et déclaré la décision immédiatement exécutoire s’agissant des points 4, 5, 7, 8 et 9 du dispositif (ch. 11).

S’agissant des seules questions litigieuses devant la Chambre de surveillance, le Tribunal de protection a considéré que les parents, enlisés dans leurs conflits, instrumentalisaient leurs enfants. A raison, le jugement de divorce, qui réglait la question des relations personnelles entre les enfants et leur père, n’imposait à ce dernier aucune condition territoriale. Aucun élément objectivé dans le dossier, lié à un risque d’enlèvement, ne justifiait que l’exercice du droit de visite soit limité à la Suisse, de sorte que la requête en ce sens de A______ devait être rejetée. Il convenait par conséquent que les enfants disposent de papiers d’identité en règle pendant l’exercice du droit de visite, permettant au père de justifier leur identité et de se rendre à l’étranger sans risque d’être refoulé. Pour le surplus, le Tribunal de protection a constaté que B______ n’avait pas respecté l’art. 301a CC, puisqu’il n’avait pas informé A______ de son changement de résidence. Toutefois, les relations personnelles n’étaient exercées que durant les vacances et les congés du père, qui exprimait le souhait de pouvoir organiser des vacances communes avec tous les enfants et des rencontres avec leurs grands-parents domiciliés en France. Ainsi, l’existence d’un domicile hors de Suisse du père n’avait pas la même portée que s’il exerçait ses relations personnelles selon un droit de visite usuel. Il s’imposait toutefois que le père renseigne précisément la mère et les curateurs sur le lieu de villégiature choisi, conformément aux devoirs découlant de l’art. 272 CC, concrétisant l’obligation des parents de se comporter de manière respectueuse l’un à l’égard de l’autre.

C.           a. Le 1er septembre 2023, A______ a formé recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (ci-après : la Chambre de surveillance) contre cette ordonnance, reçue le 7 août 2023. Dans son écriture, comportant 47 pages, elle a conclu à l’annulation des chiffres 6 et 8 du dispositif de l’ordonnance attaquée et cela fait, à ce qu’il soit ordonné à B______ de communiquer son adresse officielle de domiciliation, sous la menace de la peine prévue à l’art. 292 CP, de restreindre géographiquement l’exercice de son droit de visite sur les enfants G______ et H______ au territoire suisse, aussi longtemps que le lieu exact de sa domiciliation demeurera inconnu, l’ordonnance devant être confirmée pour le surplus, les frais et dépens devant être mis à la charge de l’Etat. Subsidiairement, la recourante a conclu au renvoi de la cause au Tribunal de protection pour instruction complémentaire et nouvelle décision dans le sens des considérants.

La recourante a fait grief au Tribunal de protection, en substance, de ne pas avoir pris en compte tous les faits pertinents, de sorte qu’il convenait de compléter et de préciser l’état de fait de l’ordonnance attaquée. Le Tribunal de protection, en omettant la chronologie complète des événements, lui avait imposé de laisser partir ses enfants avec leur père, sans garantie de pouvoir les retrouver un jour. B______ avait par ailleurs déposé, le 6 juin 2023, une plainte pénale dirigée à son encontre devant le Ministère public genevois pour diffamation, voire calomnie et violation du devoir d’assistance et d’éducation. Ces éléments renforçaient un peu plus le risque d’un enlèvement international par B______, qui accusait la recourante de mise en danger des enfants, ce qui lui donnerait une justification pour ne pas les ramener au domicile maternel.

Préalablement, la recourante a sollicité la restitution de l’effet suspensif s’agissant du chiffre 8 du dispositif de la décision attaquée, requête admise par décision DAS/211/2023 de la Chambre de surveillance du 12 septembre 2023.

b. Le Tribunal de protection a persisté dans les termes de la décision attaquée.

c. B______ a conclu à la confirmation de l’ordonnance attaquée.

Sur la page de garde de son écriture, il n’a mentionné que l’adresse de son conseil.

d. A______ a répliqué le 6 novembre 2023, persistant dans ses conclusions.

Elle a notamment allégué avoir « fortuitement » appris que B______ était domicilié à S______ [Émirats arabes unis].

e. B______ a dupliqué le 17 novembre 2023, persistant dans les siennes.

Il a soutenu que la présente procédure n’avait d’autre but que de le pousser à dévoiler son adresse actuelle, ce qui permettrait à la recourante de l’attaquer en justice pour ses prétentions propres et non celles des enfants. Or, les prétentions financières de la recourante ne faisaient pas l’objet de la présente procédure. Pour le surplus, l’intimé s’est contenté de contester, sans autres précisions, l’allégué de sa partie adverse selon lequel il résiderait à S______.

f. A______ a formulé de nouvelles observations le 4 décembre 2023.

g. Le 12 décembre 2023, B______ a, à son tour, formulé de nouvelles observations.

h. Les deux parties ont produit des pièces nouvelles à l’appui de chacune de leurs écritures.

i. La cause a été mise en délibération à l’issue de ces échanges.

EN DROIT

1.         1.1 Les dispositions de la procédure devant l'autorité de protection de l'adulte sont applicables par analogie pour les mesures de protection de l'enfant (art. 314 al. 1 CC).

Les décisions de l'autorité de protection peuvent faire l'objet d'un recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 CC et 53 al. 1 LaCC).

Interjeté par une personne ayant qualité pour recourir, dans le délai utile de 30 jours et suivant la forme prescrite, le recours est recevable (art. 450 al. 2 et 3 et 450b CC).

1.2 Compte tenu de la matière, soumise aux maximes inquisitoire et d'office illimitée, la cognition de la Chambre de surveillance est complète. Elle n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

1.3 L'art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l'exclusion du CPC (art. 450f CC cum art. 31 al. 1 let. c et let. d a contrario LaCC), ne stipulant aucune restriction en matière de faits et de moyens de preuve nouveaux en deuxième instance, ceux invoqués devant la Chambre de céans sont recevables.

Les pièces nouvelles produites par les parties seront dès lors admises.

2.         L'état de fait retenu par le Tribunal de protection a été complété dans toute la mesure utile, de sorte que le grief de la recourante en lien avec la constatation des faits ne sera pas traité plus avant.

3.         3.1.1 Le père ou la mère qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde ainsi que l'enfant mineur ont réciproquement le droit d'entretenir les relations personnelles indiquées par les circonstances (art. 273 al. 1 CC).

Lorsque l’exercice ou le défaut d’exercice de ce droit est préjudiciable à l’enfant, ou que d’autres motifs l’exigent, l’autorité de protection de l’enfant peut rappeler les père et mère, les parents nourriciers ou l’enfant à leurs devoirs et leur donner des instructions (art. 273 al. 2 CC).

Autrefois considéré comme un droit naturel des parents, le droit aux relations personnelles est désormais conçu à la fois comme un droit et un devoir de ceux-ci, mais aussi comme un droit de la personnalité de l'enfant; il doit servir en premier lieu l'intérêt de celui-ci (ATF 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3b). C'est pourquoi le critère déterminant pour l'octroi, le refus et la fixation des modalités du droit de visite est le bien de l'enfant, et non une éventuelle faute commise par le titulaire du droit (vez, Le droit de visite – Problèmes récurrents, in Enfant et divorce, 2006, p. 101 ss, 105). Le rapport de l'enfant avec ses deux parents est essentiel et peut jouer un rôle décisif dans le processus de sa recherche d'identité (ATF 127 III 295 consid. 4a; 123 III 445 consid. 3c; 122 III 404 consid. 3a et les références citées).

3.1.2 A teneur de l'art. 274 al. 2 CC, si les relations personnelles compromettent le développement de l’enfant, si les père et mère qui les entretiennent violent leurs obligations, s’ils ne se sont pas souciés sérieusement de l’enfant ou s’il existe d’autres justes motifs, le droit d’entretenir ces relations peut leur être refusé ou retiré. Le droit de visite peut aussi être restreint.

Pour imposer de telles modalités (en particulier un droit de visite accompagné), il faut également des indices concrets de mise en danger du bien de l'enfant (il ne suffit pas que celui-ci risque abstraitement de subir une mauvaise influence) : la différence réside uniquement dans le fait que ce danger paraît pouvoir être écarté autrement que par un retrait pur et simple du droit (Meier/Stettler, Droit de la filiation, 6ème éd., n. 1015).

Parmi les modalités particulières auxquelles peut être subordonné l’exercice du droit de visite (par une application conjointe des art. 273 al. 2 et 274 al. 2 CC), l’on citera notamment l’interdiction de quitter la Suisse avec l’enfant (Meier/Stettler, op. cit. n. 1018). Il faut toutefois qu’il existe un risque concret que le parent, après avoir exercé son droit de visite, ne ramène pas l’enfant à celui qui en a la garde. Un risque abstrait ne suffit pas. Savoir si un risque d’enlèvement existe dans le cas particulier est une question qui relève de l’appréciation des preuves (arrêt du Tribunal fédéral 5A_983/2019 du 13 novembre 2020 et les références citées).

3.1.3 Le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation du droit de visite (ATF 122 III 404 consid. 3d = JdT 1998 I 46).

3.1.4 Un parent qui souhaite modifier son propre lieu de résidence doit informer en temps utile l’autre parent (art. 301a al. 4 CC).

3.1.5 Quiconque participe à la procédure doit se conformer aux règles de la bonne foi (art. 52 CPC).

3.2 En l’espèce, la situation des parties et de leurs enfants encore mineurs est régie par le jugement de divorce du 19 avril 2021, lequel a maintenu l’autorité parentale conjointe, confié la garde des enfants à leur mère et réservé au père un droit de visite non précisé, devant s’exercer d’entente avec la mère et les enfants, sans fixation de limitations territoriales, étant relevé qu’au moment où ce jugement a été rendu B______ était domicilié à Singapour.

Depuis lors, la mère a rencontré d’importantes difficultés avec les enfants, plus particulièrement avec E______ et F______; l’aînée, L______, avait pour sa part quitté le domicile maternel après avoir atteint la majorité, avec l’appui financier de son père. Il résulte de la procédure que le père, au lieu de soutenir la mère dans l’éducation des enfants encore mineurs, a œuvré sans concertation avec cette dernière et a donné à E______ et à F______ la possibilité de quitter l’appartement familial, avec la précision que F______ y est ensuite retourné. Une telle manière de procéder est contraire au principe même de l’autorité parentale conjointe, laquelle impose aux parents qui en sont titulaires de collaborer entre eux et de prendre des décisions communes dans l’intérêt de leurs enfants, dynamique qui ne fonctionne pas entre les ex-époux A______/B______, lesquels semblent davantage concentrés sur leurs querelles personnelles, tant pénales que financières, que sur le bien-être de leurs enfants.

Les modalités du droit de visite de B______, qui font l’objet du recours porté devant la Chambre de surveillance, ne concernent plus que les enfants G______, âgée de 14 ans et H______, âgé de bientôt 10 ans, les autres enfants ayant atteint la majorité et pouvant dès lors s’organiser seuls avec leur père. La mère fait grief au Tribunal de protection de ne pas avoir limité le droit de visite du père au seul territoire suisse, disant craindre qu’il n’enlève les deux mineurs dans la mesure où il persiste à refuser de donner les coordonnées de son nouveau domicile.

L’attitude de B______ est certes contraire à l’art. 301a al. 4 CC et contraire à la bonne foi. Elle ne saurait toutefois être sanctionnée, pour cette unique raison, par une limitation de son droit de visite au seul territoire suisse, sauf à admettre l’existence d’un risque concret d’enlèvement, risque qu’il convient d’examiner.

B______ est parti s’installer à Singapour alors que la procédure de divorce était encore en cours. Il n’a jamais manifesté l’intention d’obtenir la garde des enfants, celle-ci ayant été attribuée à la mère d’accord entre les parties. B______ semble avoir exercé régulièrement un droit de visite sur les enfants, y compris à l’étranger, sans que leur retour en Suisse n’ait posé de difficultés. Les trois enfants aînés des parties, désormais majeurs, vivent par ailleurs toujours en Suisse, alors même que, ayant peu de contacts avec leur mère, ils auraient pu librement faire le choix de rejoindre leur père; tel n’a toutefois pas été le cas. Enfin, B______, bien qu’il ait formulé des critiques à l’encontre de la recourante et porté plainte contre elle, n’a pas sollicité la modification du jugement de divorce en revendiquant l’octroi de la garde des enfants. Il n’existe dès lors aucun indice d’un risque concret d’enlèvement.

La recourante a certes soutenu que le fait que B______ continue de refuser de fournir son adresse étayait le risque d’un non-retour des enfants; dans une telle hypothèse, elle serait totalement dépourvue de moyens d’action, puisqu’elle ne saurait pas à quel for agir. Il ressort toutefois des explications de B______ que son refus de dévoiler l’adresse de son nouveau domicile n’est pas lié à une quelconque volonté d’enlever les deux mineurs, mais de se prémunir contre les tentatives de la recourante d’obtenir l’exécution forcée du jugement de divorce. Par ailleurs, si le risque d’enlèvement était réel, il persisterait même si B______ fournissait son adresse. Rien ne l’empêcherait en effet, compte tenu des moyens dont il semble disposer, de quitter son nouveau domicile, de s’en créer un autre sans en informer au préalable la recourante et d’y emmener les enfants. En l’absence du moindre indice d’un risque concret d’enlèvement, la recourante ne saurait en créer un, artificiellement, en se fondant sur le seul refus du père de dévoiler son adresse, alors même que ce refus est fondé sur d’autres motifs. Il convient en outre de relever que B______ n’exercera son droit de visite que durant des périodes de vacances, comme l’a relevé à juste titre le Tribunal de protection. Or, l’ordonnance attaquée lui impose d’informer les curateurs et la recourante du lieu de vacances où il exercera son droit de visite, ce qui paraît suffisant. Contraindre le père à exercer son droit aux relations personnelles sur le seul territoire suisse aurait par ailleurs pour effet de priver G______ et H______ de la possibilité de partir à l’étranger non seulement avec leur père, mais également avec leurs frère et sœurs, ce qui paraît contraire à leur intérêt et risquerait de déclencher chez eux une réaction d’opposition à leur mère, qu’ils ne manqueraient pas de rendre responsable de la situation.

Au vu de ce qui précède, le chiffre 6 du dispositif de l’ordonnance attaquée sera confirmé.

Il en ira de même du chiffre 8, dans la mesure où le père devra être en possession des documents d’identité des mineurs G______ et H______ lorsqu’il exercera son droit de visite.

3.3 La recourante a conclu à ce qu’il soit ordonné à B______ de communiquer son adresse, sous la menace de la peine de l’art. 292 CP. Il ne sera toutefois pas donné suite à cette conclusion, qui excède l’ordonnance attaquée. La question portant sur les modalités du droit de visite ayant par ailleurs été tranchée conformément à ce qui précède, il ne se justifie pas de donner une suite favorable à cette conclusion.

4. La procédure, qui porte sur les modalités des relations personnelles, n’est pas gratuite (art. 81 al. 1 LaCC a contrario; art. 77 LaCC). L’émolument forfaitaire de décision sera fixé à 2'000 fr. (art. 67A et 67B RTFMC). Il sera mis à la charge de la recourante, qui succombe et qui sera condamnée à le verser à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Compte tenu de la nature familiale du litige (art. 107 al. 1 let. c CPC), il ne sera pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé par A______ contre l’ordonnance DTAE/5883/2023 rendue le 16 mars 2023 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/8972/2022.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête l’émolument forfaitaire de décision à 2'000 fr.

Le met à la charge de A______ et la condamne à le verser à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.