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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2692/2022

ATAS/168/2024 du 19.03.2024 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2692/2022 ATAS/168/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 mars 2024

Chambre 2

 

En la cause

A______

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né le ______ 1958, père de trois enfants majeurs issus de deux premiers mariages, a d’abord exercé la profession d’architecte indépendant avant d’être engagé en qualité de chef de service par la Ville de B______ en 1994, poste dont il a démissionné en 2014, deux ans après s’être remarié à Madame C______ (ci‑après : l’épouse ou l’ex-épouse), ressortissante thaïlandaise, née le ______ 1976. Une fois les rapports de travail terminés, l’intéressé a retiré son deuxième pilier sous forme de capital et s’est installé en Thaïlande. Selon le registre informatisé de l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM), l’intéressé est revenu de Thaïlande en Suisse, le 14 juillet 2015. Divorcé de Mme C______ depuis le 17 mai 2018, il vit chez sa mère, à Carouge, depuis le 1er juin 2018. Le 14 septembre 2022, il s’est remarié avec Madame D______, née le ______ 1974, mais vit seul à Carouge, à la même adresse.

b. Par décision du 4 juin 2021, l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) a mis l’assuré au bénéfice d’une rente ordinaire de vieillesse (anticipée) à partir du 1er juillet 2021, d’un montant mensuel de CHF 2’065.-.

c. Le 26 janvier 2022, l’intéressé a déposé une demande de prestations complémentaires à l’AVS auprès du service des prestations complémentaires (ci‑après : le SPC ou l’intimé). Il a expliqué que la prestation de libre passage de son deuxième pilier (CHF 953’320.25 en 2014) avait été investie dans la construction d’une maison en Thaïlande, qui devait servir de logement au couple. Initialement, le solde du capital était censé permettre aux époux de vivre sur place de façon modeste. Par la suite, ce projet avait pris une tournure différente parce que son épouse était tombée dans l’alcool, le jeu et la drogue, contrôlés par la mafia thaïe. Il avait alors utilisé une partie importante du solde du capital de son deuxième pilier pour rembourser les dettes de son épouse et payer des rançons, pour éviter que la mafia ne mette ses menaces à exécution. Comme la situation de sa femme ne s’était toujours pas améliorée à la fin de l’année 2015, il avait demandé le divorce et était revenu en Suisse. Dans le cadre de son divorce thaï, homologué en Suisse en 2018, il avait « perdu sa maison et [s]es moyens en Thaïlande, n’ayant aucun droit en Thaïlande en tant qu’étranger ». N’ayant plus les moyens d’être locataire de son logement, il avait emménagé chez sa mère en 2018. Sa famille et plusieurs amis l’aidaient occasionnellement et ponctuellement pour vivre et finir les fins de mois. Actuellement, la totalité du capital de son deuxième pilier était épuisée. Une bonne part de celui-ci avait été perdue dans le cadre de son divorce et le reste avait servi à subvenir modestement à ses besoins au cours de ces dernières années.

d. Le 31 janvier 2022, le SPC a reçu les avis de taxation des 25 avril 2014 et 22 août 2014, établis par l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) pour
la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, respectivement du 1er janvier au
1er septembre 2014. Il en ressort que la fortune retenue par l’AFC s’élevait à CHF 302’570.- au 31 décembre 2013 (soit CHF 472’570.- sous déduction d’une dette chirographaire de CHF 170’000.-) et à CHF 139’415.- au 1er septembre 2014.

Le SPC a également reçu les avis de taxation des 26 mai 2016 et 4 octobre 2017 pour la période du 14 juillet au 31 décembre 2015, respectivement du 1er janvier au 31 décembre 2016. Selon ces documents, la fortune retenue par l’AFC s’élevait à CHF 300’604.- au 31 décembre 2015 et à CHF 86’258.- au 31 décembre 2016.

e. Le 20 février 2022, l’intéressé a transmis au SPC, notamment :

-          un courrier du 22 octobre 2014 des Rentes Genevoises à l’intéressé, lui annonçant le versement total de sa prestation de libre passage, s’élevant à CHF 935’320.25, sur son compte bancaire n° CH23[…] auprès de l’UBS ;

-          une attestation du 1er janvier 2022 de l’UBS, informant l’intéressé que le solde du même compte était de CHF 1’822.05 au 31 décembre 2021.

B. a. Par décision du 3 mai 2022, le SPC a fait savoir à l’intéressé, en substance, qu’il remplissait les conditions personnelles lui permettant de prétendre à des prestations complémentaires fédérales et cantonales (ci-après : PC, PCF/PCC)
à partir du 1er janvier 2022 mais qu’aucun calcul ne pouvait être réalisé dans le cas d’espèce. En effet, sa fortune nette, qui était supérieure au seuil applicable depuis le 1er janvier 2021 (CHF 100’000.- pour les personnes seules), faisait obstacle au versement de PCF et de PCC, non seulement rétroactivement (du
1er janvier au 31 mai 2022), mais aussi pour la période à venir (dès le 1er juin 2022).

b. Le 10 mai 2022, l’intéressé a formé opposition à cette décision en faisant valoir que sa seule et unique fortune au 31 décembre 2021 était constituée de son avoir bancaire de CHF 1’822.05 au 31 décembre 2021.

c. Par décision du 8 août 2022, le SPC a rejeté l’opposition. Selon les éléments en sa possession, la fortune de l’intéressé s’élevait à CHF 1’822.05 au 31 décembre 2021. Il convenait cependant d’ajouter à ce montant, à la même date, une fortune hypothétique de CHF 945’714.20. En effet, la fortune de l’intéressé avait diminué de manière non documentée à raison de CHF 163’155.- en 2014, CHF 689’905.20 en 2015 et CHF 152’654.- en 2016, ce qui représentait, sur cette période, un dessaisissement total CHF 1’005’714.20. Dans la mesure où la part de fortune dessaisie était réduite chaque année de CHF 10’000.-, la fortune hypothétique à prendre en compte se montait encore à CHF 945’714.20 au 31 décembre 2021. Ainsi, la fortune totale (effective et hypothétique) s’élevait à CHF 947’536.25 (soit CHF 1’822.05 + CHF 945’714.20) et dépassait ainsi le seuil fixé à CHF 100’000.- pour les personnes seules. Dans ces conditions, c’était à juste titre que le SPC avait refusé à l’intéressé le droit aux prestations complémentaires à l’AVS.

C. a. Le 26 août 2022, l’intéressé a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) d’un recours contre cette décision, concluant en substance à son annulation. À l’appui de sa position, il a expliqué que sa fortune réelle était nulle et que depuis juillet 2021, sa seule ressource financière provenait de sa rente AVS anticipée de CHF 2’065.- par mois. Pour expliquer la diminution drastique de sa fortune entre 2014 et 2016, il a réitéré les explications données dans son courrier du 26 janvier 2022 concernant l’utilisation de la prestation de libre passage de son deuxième pilier (CHF 953’320.25 en 2014). Il a précisé que la maison dont il avait financé entièrement la construction avait été bâtie sur un terrain appartenant à son épouse. Selon la loi du pays, les biens immobiliers pouvaient être uniquement propriété d’un citoyen thaïlandais. Ainsi, tout avait été inscrit au nom de son épouse, raison pour laquelle il n’avait rien pu récupérer au moment du divorce. Comme il était de coutume dans cette région, les travaux se faisaient sans devis écrit, sans justificatif et sans facture.

b. Par réponse du 12 septembre 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours en expliquant que dans son écriture du 26 août 2022, le recourant n’apportait aucun nouvel élément pouvant conduire à une appréciation différente du cas. Dans ces conditions, il convenait de s’en tenir à la position déjà exprimée dans la décision attaquée.

c. Par pli du 15 septembre 2022, la chambre de céans a imparti un délai au recourant pour venir consulter les pièces du dossier.

d. Par réplique du 10 octobre 2022, le recourant a indiqué en substance qu’il ne voyait pas quel « nouvel élément » il pouvait ajouter puisque de son point de vue, il avait déjà exposé l’ensemble des faits de manière claire, précise, complète et objective. Aussi n’avait-il rien à ajouter.

e. Par envoi spontané du 21 mars 2023, le recourant s’est enquis de l’avancement de son dossier.

f. Par courrier du 30 mars 2023, la chambre de céans a invité le recourant à produire, si tant est qu’ils fussent en sa possession, tous documents pouvant expliquer l’évolution de sa fortune depuis 2014 (dettes éventuelles, dépenses particulièrement importantes en Suisse ou en Thaïlande, obligations légales et/ou contre-prestations en raison desquelles il aurait aliéné des parts de fortune, etc.).
Le recourant pouvait aussi s’exprimer de manière précise à ce sujet dans le cadre d’une future audience à laquelle il serait convoqué.

g. Par pli séparé du 30 mars 2023, la chambre de céans a convoqué les parties à une audience fixée le 25 avril 2023.

h. Le 2 avril 2023, le recourant a demandé à la chambre de céans de reporter l’audience prévue après le 25 juillet 2023. En effet, il s’était remarié en septembre 2022 (en Suisse) et était actuellement en Thaïlande pour son voyage de noces et pour homologuer son mariage. Le vol retour en Suisse était prévu le 24 juillet 2023 et le billet d’avion non modifiable.

Pour le reste, le recourant a expliqué qu’il ne lui était pas possible de mettre à disposition des justificatifs relatifs à la construction de la maison (réalisée sans facture, comme de coutume dans la région de Thaïlande où elle avait été bâtie) et aux remboursements de dettes de jeux illégaux. Par ailleurs, il n’était pas en possession d’éventuels justificatifs de frais médicaux. Il pouvait en revanche estimer sommairement les principales dépenses expliquant, à partir de 2014, la diminution de sa fortune comme suit :

Construction de la maison familiale

≃ CHF

350’000.-

Ameublement et équipement de la maison familiale

≃ CHF

50’000.-

Aménagement et équipement du terrain

≃ CHF

30’000.-

Acquisition d’une voiture au nom de son épouse

≃ CHF

30’000.-

Paiement de dettes de jeux, de rançons et de soins médicaux

≃ CHF

80’000.-

Dépenses personnelles de 2014 à 2021 à hauteur de ≃ CHF 4’000.-

par mois durant huit ans

≃ CHF

384’000.-

Compléter sa rente AVS anticipée à raison de ≃ CHF 1’000.- par mois

≃ CHF

22’000.-

i. Le 6 avril 2023, la chambre de céans a informé les parties de l’annulation de l’audience du 25 avril 2023.

j. Par courrier du 1er mai 2023, le recourant a répété les informations ressortant déjà de ses précédentes écritures, en y joignant notamment, avec traductions en français :

-          un extrait du registre de domicile thaïlandais du 24 avril 2014, indiquant l’adresse du recourant dans un district de Thaïlande et mentionnant, sous « type d’habitation », qu’il s’agissait d’une maison, plus précisément d’un bâtiment individuel de 2 étages ;

-          un certificat de divorce thaïlandais du 17 mai 2018, enregistrant le divorce par consentement mutuel des époux et mentionnant notamment sous la rubrique « Biens » : rien à déclarer ;

-          des photos de la maison familiale en Thaïlande.

k. Par courrier du 26 mai 2023, l’intimé a indiqué que les documents que le recourant avait produits le 1er mai 2023 ne permettaient pas d’attester des dépenses alléguées. Dans la mesure où le recourant n’était pas en mesure de prouver que ses dépenses avaient été effectuées moyennant une contre-prestation adéquate, il ne pouvait pas se prévaloir d’une diminution correspondante de sa fortune mais devait accepter que l’on s’enquière des motifs de cette diminution
et, en l’absence de la preuve requise, que l’on tienne compte d’une fortune hypothétique. Au bénéfice de ces explications, l’intimé a persisté à conclure au rejet du recours.

l. Le 27 juin 2023, la chambre de céans a convoqué les parties à une audience de comparution personnelle fixée au 29 août 2023.

m. Par courrier du 21 août 2023, le recourant s’est référé à l’audience prévue
le 29 août 2023 en expliquant qu’il ne se sentait actuellement pas prêt à se battre et à défendre sa situation pour des raisons personnelles. En conséquence, il a invité la chambre de céans à « mettre en attente [son] recours ».

n. Le 22 août 2023, la chambre de céans a informé les parties de l’annulation de l’audience précitée.

o. Par pli du 22 août 2023, la chambre de céans a imparti un délai au recourant pour indiquer s’il maintenait son recours ou s’il le retirait.

p. Le 22 septembre 2023, le recourant a réitéré son souhait de voir son recours « mis en attente ». Actuellement, il ne se sentait toujours pas prêt à se battre et à défendre sa situation.

q. Par courrier du 28 septembre 2023, la chambre de céans a imparti un délai au recourant, échéant au 31 octobre 2023, pour indiquer s’il maintenait son recours ou s’il le retirait. Elle a également précisé que passé ce délai et sans nouvelles de sa part, la cause serait tranchée au fond en l’état du dossier.

r. Depuis lors, le recourant ne s’est plus manifesté.

s. Les autres faits seront mentionnés, si nécessaire, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l’art. 134 al. 3
let. a LOJ, sur les contestations prévues à l’art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

1.3 La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de
la LPGA et de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985
(LPA - E 5 10).

1.4 Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance‑invalidité [LPFC - J 4 20] ; art. 43 LPCC).

2.             La modification du 22 mars 2019 de la LPC est entrée en vigueur le 1er janvier 2021 (Réforme des PC, FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

Conformément à l’al. 1 des dispositions transitoires de ladite modification, l’ancien droit reste applicable trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente modification aux bénéficiaires de prestations complémentaires pour lesquels la réforme des PC entraîne, dans son ensemble, une diminution de la prestation complémentaire annuelle ou la perte du droit à la prestation complémentaire annuelle. A contrario, les nouvelles dispositions sont applicables aux personnes qui n’ont pas bénéficié de prestations complémentaires avant l’entrée en vigueur de la Réforme des PC (arrêt du Tribunal fédéral 9C_329/2023 du 21 août 2023 consid. 4.1).

En l’occurrence, le droit aux prestations complémentaires est né postérieurement au 1er janvier 2021, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées dans leur nouvelle teneur.

3.             Le litige porte sur le droit du recourant aux prestations complémentaires à compter du 1er janvier 2022, singulièrement sur les montants retenus au titre de la fortune et des biens dessaisis.

4.              

4.1 En droit fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux
art. 4, 6 et 8 LPC, ainsi que les conditions relatives à la fortune nette prévues à l’art. 9a LPC, ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente
de vieillesse de l’assurance-vieillesse et survivants, conformément à l’art. 4 al. 1 let. a LPC.

Conformément à l’art. 3 al. 1 LPC, les PCF se composent de la PC annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité.

Selon l’art. 12 al. 1 LPC, le droit à une PC annuelle prend naissance le premier jour du mois au cours duquel la demande est déposée, pour autant que toutes les conditions légales soient remplies.

4.2 En droit cantonal, en application de l’art. 2 al. 1 LPCC, ont droit aux PCC les personnes qui, notamment, ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève (let. a), qui sont au bénéfice d’une rente de l’AVS – ce qui est le cas de l’intéressé – (let. b) et qui répondent aux autres conditions de la LPCC (let. d).

L’art. 18 al. 1 LPCC reprend en substance le contenu de l’art. 12 al. 1 LPCC,
l’art. 18 al. 2 LPCC ajoutant que, si la demande d’une prestation est faite dans les six mois à compter de la notification d’une décision de rente de l’AVS ou de l’AI, le droit prend naissance le mois au cours duquel la formule de demande de rente a été déposée, mais au plus tôt dès le début du droit à la rente.

5.              

5.1 Pour ce qui est des PCF, l’art. 9 al. 1 LPC prévoit que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants, mais au moins au plus élevé des montants suivants : la réduction des primes la plus élevée prévue par le canton pour les personnes ne bénéficiant ni de prestations complémentaires ni de prestations d’aide sociale (let. a) ; 60% du montant forfaitaire annuel pour l’assurance obligatoire des soins au sens de l’art. 10 al. 3 let. d LPC (let. b).

5.2 En vertu de l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment : deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l’exercice d’une activité lucrative, pour autant qu’elles excèdent annuellement CHF 1’000.- pour les personnes seules (let. a) ; un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 30’000.- pour les personnes seules, CHF 50’000.- pour les couples et CHF 15’000.- pour les orphelins et les enfants donnant droit à des rentes pour enfant de l’AVS ou de l’assurance-invalidité (ci-après : AI) ; si le bénéficiaire de PC ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire d’un immeuble qui sert d’habitation à l’une de ces personnes au moins, seule la valeur de l’immeuble supérieure à CHF 112’500.- entre en considération au titre de la fortune (let. c) ; les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l’AVS et de l’AI (let. d).

5.3 Par ailleurs, aux termes de l’art. 9a LPC – en vigueur depuis le 1er janvier 2021 –, les personnes dont la fortune nette est inférieure aux seuils suivants ont droit à des PC : CHF 100’000.- pour les personnes seules (let. a) ; CHF 200’000.- pour les couples (let. b) ; CHF 50’000.- pour les enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI (let. c ; al. 1). L’immeuble qui sert d’habitation au bénéficiaire de PC ou à une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations et dont l’une de ces personnes au moins est propriétaire n’est pas considéré comme un élément de la fortune nette au sens de l’al. 1 (al. 2). Les parts de fortune visées à l’art. 11a al. 2 à 4 LPC font partie de la fortune nette au sens de l’al. 1 (al. 3). Le Conseil fédéral peut ajuster ces valeurs de manière appropriée s’il modifie les prestations visées à l’art. 19 LPC (al. 4).

Il découle de cette nouvelle disposition légale, appliquée a contrario, que le droit même à des PCF est désormais exclu pour les personnes assurées dont la fortune nette dépasse l’un de ces seuils fixés à l’art. 9a LPC.

5.4 Concernant la fortune nette au sens des dispositions légales ci-dessus, s’appliquent notamment les règles qui suivent.

L’art. 17 al. 1 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301) dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2021 comme les autres articles de cette ordonnance mentionnés ci-après – dispose que la fortune nette est calculée en déduisant les dettes prouvées de la fortune brute.

Conformément à l’art. 17a OPC-AVS/AI, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l’impôt cantonal direct du canton du domicile (al. 1). Lorsque des immeubles ne servent pas d’habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la PC, ils seront pris en compte à la valeur vénale (al. 4).

L’art. 11 al. 1 LPC faisant mention de la « fortune nette », il y a lieu de déduire les dettes. Il s’agit notamment des dettes hypothécaires, des petits crédits auprès des banques, des prêts entre particuliers, ainsi que des dettes fiscales. La dette doit être effectivement née, mais son échéance n’est pas une condition préalable. Les dettes incertaines ou dont le montant n’a pas encore été déterminé, en revanche, ne peuvent pas être déduites. La dette doit être correctement documentée. En outre, seules les dettes qui grèvent la substance économique des actifs peuvent être prises en compte (ATF 142 V 311 consid. 3.1 et 3.3 ; 140 V 201 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_365/2018 du 12 septembre 2018 consid. 3.2 ; ATAS/548/2022 du 15 juin 2022 consid. 6.1). Il n’y a aucun motif de ne pas appliquer cette jurisprudence également à la notion de « fortune nette » selon
l’art. 9a LPC, qui est postérieur à celle-ci (ATAS/48/2023 du 31 janvier 2023 consid. 7.4).

5.5 La question des dessaisissements fait, depuis le 1er janvier 2021, l’objet d’un article spécifique, l’art. 11a LPC. Ce dernier est précisé notamment par les règles de l’OPC-AVS/AI citées ci-après.

5.5.1 Aux termes de l’art. 11a LPC, les autres revenus – que le revenu hypothétique correspondant à la renonciation volontaire à exercer une activité lucrative que l’on pourrait raisonnablement exiger de la personne (al. 1), hypothèse non réalisée ici –, parts de fortune et droits légaux ou contractuels auxquels l’ayant droit a renoncé sans obligation légale et sans contre-prestation adéquate sont pris en compte dans les revenus déterminants comme s’il n’y avait pas renoncé (al. 2). Un dessaisissement de fortune est également pris en compte si, à partir de la naissance d’un droit à une rente de survivant de l’AVS ou à une rente de l’AI, plus de 10% de la fortune est dépensée par année sans qu’un motif important ne le justifie. Si la fortune est inférieure ou égale à CHF 100’000.-, la limite est de CHF 10’000.- par année. Le Conseil fédéral règle les modalités ; il définit en particulier la notion de « motif important » (al. 3). L’al. 3 s’applique aux bénéficiaires d’une rente de vieillesse de l’AVS également pour les dix années qui précèdent la naissance du droit à la rente (al. 4).

Selon l’al. 3 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019,
l’art. 11a al. 3 et 4 LPC ne s’applique qu’à la fortune qui a été dépensée après l’entrée en vigueur de la présente modification (1er janvier 2021 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_329/2023 du 21 août 2023, consid. 4.2). Pour les années antérieures, une diminution substantielle de la fortune doit être examinée à la lumière de l’art. 11a al. 2 LPC (CARIGIET/KOCH, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, 3e éd. 2021, p. 249, n. 640 in fine et la référence aux Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI – DPC, ch. 3532.09, valable depuis le 1er janvier 2021 ; cf. aussi ci-après : consid. 5.5.2).

Pour qu’un dessaisissement de fortune puisse être pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, la jurisprudence soumet cet acte à la condition qu’il ait été fait « sans obligation juridique », respectivement « sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente ». Les deux conditions précitées ne sont pas cumulatives, mais alternatives (ATF 131 V 329 consid. 4.4).

Le moment déterminant pour établir la valeur des parts de fortune dessaisies et de la contre-prestation éventuelle est celui du dessaisissement (OFAS, Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI – DPC, ch. 3532.04 ; ATF 120 V 182 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1).

Il y a lieu de prendre en compte dans le revenu déterminant tout dessaisissement sans limite de temps (Pierre FERRARI, Dessaisissement volontaire et prestations complémentaires à l’AVS/AI in RSAS 2002, p. 420). Ainsi, la date à laquelle le dessaisissement a été accompli n’a, en principe, aucune importance (cf. ATF 146 V 306 consid. 2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_667/2021 du 17 mai 2022 consid. 3.3 et les références ; ATAS/1180/2022 du 22 décembre 2022 consid. 7.1).

L’art. 11a al. 2 LPC contient une définition claire de la notion de dessaisissement qui faisait défaut dans le cadre de l’art. 11 al. 1 let. g aLPC, sans qu’il ne modifie toutefois la pratique actuelle en matière de renonciation à des ressources ou de dessaisissement de fortune. En particulier, une contre-prestation est considérée comme adéquate si elle atteint au moins 90% de la valeur de la prestation. Pour les biens de consommation ou les services, la contre-prestation obtenue est considérée comme adéquate si la preuve d’achat est apportée par la personne demandant les prestations complémentaires. Les jeux de hasard, les jeux de loterie et les jeux de casino n’offrent au contraire aucune contre-prestation adéquate et la fortune perdue de cette manière constitue un dessaisissement de fortune au même titre qu’une donation. Il en va de même lorsque la fortune a fait l’objet d’un investissement imprudent qu’une personne raisonnable n’aurait, au vu des circonstances, pas effectué (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires [Réforme des PC] du 16 septembre 2016, FF 2016 7249 pp. 7322 et 7323).

Dans son message, le Conseil fédéral a relevé, en se référant à l’ATF 121 V 204, que l’accomplissement d’un devoir moral, tel que le fait de verser à un proche des contributions d’entretien qui excèdent ses besoins vitaux, n’est pas une raison suffisante de ne pas reconnaître la renonciation à une part de la fortune comme un dessaisissement (Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur les prestations complémentaires [Réforme des PC] du 16 septembre 2016, FF 2016 7249 p. 7322). La question de savoir si la renonciation à un élément de fortune en accomplissement d’un devoir moral constitue un dessaisissement de fortune, au sens de l’art. 3c al. 1 let. g aLPC, a toutefois été laissée ouverte par le Tribunal fédéral (ATF 131 V 329 consid. 4.2 à 4.4).

5.5.2 Lorsque la fortune diminue de façon substantielle sans que le bénéficiaire des prestations complémentaires puisse prouver l’utilisation qu’il en a faite, on suppose, en principe, qu’il y a dessaisissement (DPC, ch. 3532.09).

Si le bénéficiaire des prestations complémentaires et les membres de sa famille disposaient de revenus suffisants pendant les années où la fortune a diminué, le montant du dessaisissement de fortune correspond à celui de la diminution de la fortune. À l’inverse, s’ils ne disposaient pas de revenus suffisants, le montant du dessaisissement de fortune correspond à la différence entre la diminution non justifiée de la fortune et la part de la fortune dépensée pour son entretien usuel (DPC, ch. 3532.10).

Le revenu est considéré comme suffisant s’il est supérieur à un montant forfaitaire applicable pour l’entretien usuel, et insuffisant s’il est inférieur à ce montant. Pour déterminer le montant forfaitaire applicable et le revenu, il faut tenir compte du bénéficiaire des prestations complémentaires, de son conjoint et des enfants qui étaient mineurs ou qui n’avaient pas encore achevé leur formation et étaient âgés de moins de 25 ans au moment du dessaisissement de fortune (DPC, ch. 3532.11).

Selon le ch. 3532.12 des DPC, le montant forfaitaire pour l’entretien usuel est déterminé en multipliant le montant destiné à la couverture des besoins vitaux pour les personnes seules pour l’année correspondante, soit CHF 19’610.- depuis le 1er janvier 2021 (art. 10 al. 1 let. a ch. 1 LPC) par le facteur applicable tel que défini à l’annexe 8, soit 3.2 pour une personne seule sans enfants, respectivement 5.3 pour un couple sans enfants (cf. p. 264 des DPC).

Le montant de la part de fortune qui a dû être utilisé pour l’entretien usuel en cas de revenus insuffisants correspond à la différence entre le montant forfaitaire pour l’entretien usuel applicable, y compris les contributions d’entretien, et le revenu effectif (DPC ch. 3532.15).

Selon l’art. 17e OPC-AVS/AI, le montant de la fortune qui a fait l’objet d’un dessaisissement au sens de l’art. 11a al. 2 et 3 LPC et qui doit être pris en compte dans le calcul de la prestation complémentaire est réduit chaque année de 10 000 francs (al. 1). Le montant de la fortune au moment du dessaisissement doit être reporté tel quel au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement pour être ensuite réduit chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

Conformément à cette disposition, il faut qu’une année civile entière au moins se soit écoulée entre le moment où l’intéressé a renoncé à des parts de fortune et le premier amortissement de fortune (Ralph JÖHL, Die Ergänzungsleistung und ihre Berechnung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, p. 1816 n. 247).

5.6 Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale, selon l’art. 23 OPC-AVS/AI, les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 1). Pour les assurés dont la fortune et les revenus déterminants à prendre en compte au sens de la LPC peuvent être établis à l’aide d’une taxation fiscale, les organes cantonaux d’exécution sont autorisés à retenir, comme période de calcul, celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification de la situation économique de l’assuré n’est intervenue entre-temps (al. 2). La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 3).

5.7 Pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes, les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l’année civile en cours (art. 9 let. a LPCC), la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est demandée (let. b). En cas de modification importante des ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle (al. 3).

Pour le surplus, en l’absence d’une révision législative de la LPCC à la suite de la réforme de la LPC entrée en vigueur le 1er janvier 2021 (et donc en l’absence d’une disposition cantonale divergente), le canton de Genève applique également depuis cette date le seuil d’entrée sur la fortune pour l’octroi des PCC du fait du renvoi général qu’opère la LPCC à la LPC, la loi cantonale étant muette à ce sujet (ATAS/521/2023 du 29 juin 2023, consid. 12).

6.              

6.1 Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références ; ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a et la référence).

6.2 Par ailleurs, la procédure est régie par la maxime inquisitoire. En vertu de ce principe, il appartient au juge d’établir d’office l’ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d’administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires. En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l’allégation ni celui de l’administration des preuves. Cette maxime n’est cependant pas absolue et doit être relativisée par son corollaire, soit le devoir des parties de collaborer à l’instruction de l’affaire. Celui-ci comprend en particulier l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués. Si le principe inquisitoire dispense les parties de l’obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d’absence de preuve, c’est à la partie qui voulait en déduire un droit d’en supporter les conséquences. Cette règle ne s’applique toutefois que s’il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d’établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité
(ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

Dans le cadre de son obligation de collaborer, la personne qui requiert l’octroi de prestations complémentaires doit participer à l’établissement des faits pertinents. En cas de diminution extraordinaire de sa fortune, elle doit notamment alléguer et, dans la mesure du possible, prouver les faits qui excluent un dessaisissement. Si un patrimoine n’existe plus, il lui incombe de prouver qu’il a été donné en exécution d’une obligation légale ou moyennant une contre-prestation adéquate. La simple possibilité d’un état de fait déterminé ou la vraisemblance ne suffisent pas, mais la preuve au degré de la vraisemblance prépondérante est requise. Ce critère est rempli lorsque des raisons objectives parlent en faveur de la véracité
de l’allégation de fait, à tel point que d’autres possibilités imaginables n’entrent raisonnablement pas en ligne de compte de manière déterminante. En l’absence de preuve, c’est-à-dire lorsque le demandeur de prestations ne parvient pas à prouver une diminution (supérieure à la moyenne) de sa fortune ou à en exposer les raisons à satisfaction de droit, on admet qu’il a renoncé à sa fortune et on lui impute une fortune hypothétique ainsi que le revenu qui en découle (ATF 146 V 306 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_377/2021 du 22 octobre 2021 consid. 3.3). Mais avant de statuer en l’état du dossier, l’administration devra avertir la partie défaillante des conséquences de son attitude et lui impartir un délai raisonnable pour la modifier ; de même devra‑t‑elle compléter elle-même l’instruction de la cause s’il lui est possible d’élucider les faits sans complications spéciales, malgré l’absence de collaboration d’une partie (cf. ATF 117 V 261 consid. 3b ; ATF 108 V 229 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 59/02 du 28 août 2003 consid. 3.3 et les références).

7.              

7.1 En l’espèce, dans la décision sur opposition litigieuse (comme dans la décision initiale), l’intimé n’a pas cherché à déterminer et comparer les dépenses reconnues et les revenus déterminants au sens notamment de l’art. 9 al. 1 LPC, mais a exclu tout droit du recourant à des PCF – et aussi à des PCC – au motif que sa fortune nette dépasserait le seuil applicable pour une personne seule de
CHF 100’000.- selon l’art. 9a al. 1 let. a LPC.

Il est parvenu à cette conclusion après avoir retenu des dessaisissements de fortune – soit des diminutions de fortune non documentées pour les années 2014 à 2016 – en application de l’art. 11a al. 2 LPC, qu’il a illustrés par ce tableau dans la décision sur opposition :

 

2014

2015

2016

Gains d’activité lucrative nets

119’344.00

0.00

0.00

Produits de la fortune (intérêts)

209.00

11.00

66.00

Total (revenus)

119’553.00

11.00

66.00

Besoins vitaux

19’210.00

19’290.00

19’290.00

Facteur2

5.30

5.30

3.20

Total (consommation admise)

101’813.00

102’237.00

61’278.00

Déficit (revenus – consommation admise)

17’740.00

-102’226.00

-61’662.00

Fortune mobilière au 31.12. de l’année précédente1

302’570.00

1’092’735.20

300’604.00

Fortune au 31.12.

139’415.00

300’604.00

86’288.00

Diminution de la fortune

163’155.00

792’131.20

214’316.00

À déduire (déficit)

0.00

102’226.00

61’662.00

Dessaisissement

163’155.00

689’905.20

152’654.00

Dessaisissements (Total)

1’005’714.20

1Selon avis de taxation ; fortune au 31.08.2014 = 139’415.00 ; fortune au 31.12.2014 = 139’415.00 + 935’320.25 (avoir de libre passage) ;

2voir annexe 8 des DPC ; 2014-2015 = couple ; 2016 : personne seule

Pour établir l’ampleur des dessaisissements, le SPC s’est basé sur les avis de taxation de l’AFC et l’attestation de versement de la prestation de libre passage du 22 octobre 2014 (CHF 935’320.25). À la lumière de ces documents, il a reporté dans ledit tableau les diminutions de fortune survenues depuis 2014 en tenant compte, dès 2013, de la fortune au 31 décembre de chaque année, pour en déduire la diminution de fortune intervenue année par année (CHF 163’155.- en 2014 ;
CHF 792’131.20 en 2015, CHF 214’316.- en 2016).

Sachant que les revenus totaux, composés des gains d’activité lucrative nets
(CHF 119’344.- en 2014, CHF 0.- en 2015 et 2016 ; cf. art. 10 al. 3 let. a et c LPC et 11 al. 1 let. a LPC) et des intérêts de la fortune (CHF 209.- en 2014, CHF 11.- en 2015, CHF 66.- en 2016 ; cf. art. 11 al. 1 let. b LPC) se montaient à
CHF 119’553.- en 2014, CHF 11.- en 2015 et CHF 66.- en 2016, le SPC a également examiné si sur chacune de ces années, l’intéressé disposait de revenus suffisants. À cette fin, il a comparé ses revenus effectifs avec le montant forfaitaire applicable pour son entretien usuel (montant selon l’art. 10 al. 1 let. a LPC – qui était de CHF 19’210.- en 2014 et de CHF 19’290.- en 2015 et 2016 – multiplié par le facteur 5.3 en 2014 et 2015, et le facteur 3.2 en 2016, conformément à l’annexe 8 DPC, l’intéressé ayant vécu en couple en 2014 et 2015, mais seul en 2016). Le tableau précité indique ainsi le « déficit », soit les revenus sous déduction du montant forfaitaire pondéré (à 5.3, respectivement 3.2) ou, exprimé autrement, le montant qu’il est possible de retenir comme diminution justifiée de la fortune, pouvant être porté en déduction du dessaisissement injustifié de fortune pour l’année considérée.

Enfin, le SPC a déduit pour chacune des trois années (l’éventuel) déficit de revenu de la diminution de fortune intervenue en 2014, 2015 et 2016 de manière à déterminer, année par année, s’il existait un dessaisissement de fortune et, le cas échéant, son étendue. Par ce biais, le SPC a abouti à un dessaisissement de fortune de CHF 1’005’714.20 entre 2014 et 2016. Le SPC a également effectué un amortissement annuel de CHF 10’000.- dès 2016 (cf. ci-dessus : consid. 5.5.2 in fine), si bien que le montant à prendre en compte à titre de biens dessaisis s’élevait à CHF 945’714.20 au 1er janvier 2022. Compte tenu également d’une fortune effective de CHF 1’822.05 au 31 décembre 2021, la fortune totale (effective et hypothétique) était de CHF 947’536.25 (CHF 1’822.05 + CHF 945’714.20) au 31 décembre 2021 et donc supérieure au seuil de CHF 100’000.-, empêchant ainsi l’octroi de PCF et PCC.

7.2 La chambre de céans constate que nonobstant les termes figurant au tableau reproduit plus haut (« consommation admise »), l’intimé n’a pas procédé à un contrôle du niveau de vie du recourant selon l’art. 11a al. 3 LPC – ce qui est conforme à l’al. 3 des dispositions transitoires de la modification du 22 mars 2019 (cf. ci-dessus : consid. 5.5.1) – mais retenu un dessaisissement de fortune uniquement parce que les diminutions de cette dernière dans les années 2014 à 2016 n’étaient pas documentées.

Pour sa part, le recourant ne conteste pas – juste titre – le calcul aboutissant à un dessaisissement de CHF 945’714.20 au 1er janvier 2022, établi conformément aux principes énoncés plus haut. En revanche, il soutient en substance n’avoir pas dilapidé volontairement son capital du 2ème pilier et impute sa situation financière actuelle au « hasard de la vie ». Il détaille, pour le surplus, les montants approximatifs qui auraient été affectés à la construction de la maison familiale en Thaïlande (CHF 350’000.-), à son ameublement (CHF 50’000.-), à l’équipement du terrain (CHF 30’000.-), à l’achat d’une voiture au nom de son épouse
(CHF 30’000.-), au paiement de dettes de jeux, de rançons et de soins médicaux (CHF 80’000.-), à des « dépenses personnelles » à hauteur de CHF 384’000.- de 2014 à 2021. Il explique également avoir perdu, dans le cadre de son divorce thaï, « sa maison et [s]es moyens en Thaïlande, n’ayant aucun droit en Thaïlande en tant qu’étranger ».

Sachant que le recourant n’a pas fourni d’autres précisions/moyens de preuve après y avoir été invité par la chambre de céans, qu’il a également renoncé à se rendre à l’audience de comparution personnelle à laquelle il avait été convié et qu’il a également été informé, suite à ces actes d’instruction infructueux, que la cause serait tranchée en l’état du dossier, la chambre de céans constate que les informations dont elle dispose sur l’évolution de la fortune entre 2014 et 2016 permettent de considérer que les dépenses alléguées par le recourant sont seulement possibles mais pas établies au degré de la vraisemblance prépondérante, indépendamment de la question de savoir si de telles dépenses auraient pu justifier ou non une réduction du dessaisissement (question qui peut demeurer indécise).

Il s’ensuit que l’intimé était fondé à retenir un dessaisissement et, corrélativement, à imputer au recourant une fortune hypothétique de CHF 945’714.20 au 1er janvier 2022.

8.             Compte tenu de ce qui précède, le recours est rejeté.

9.             La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et vu l’art. 61 let. fbis LPGA).

 

*****

 

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF ‑ RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le