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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1593/2021

ATAS/612/2022 du 30.06.2022 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1593/2021 ATAS/612/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 juin 2022

3ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à COLOGNY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Andres PEREZ

 

 

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimé

 


 

EN FAIT

 

A. a. Né en juillet 1956, Monsieur A______ §(ci-après l’assuré) a été atteint d’une poliomyélite des membres inférieurs en 1959, ce qui a entraîné d’importantes séquelles fonctionnelles. L’assuré a subi une arthrodèse du genou droit en 1967, puis des deux pieds, en 1970. En 1982, un accident a encore diminué sa faculté à se déplacer.

b. En mars 1983, l’assuré a déposé une première demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité (ci-après : OAI) visant la prise en charge de cannes anglaises, ainsi que celle d’une voiture automatique et de sa transformation en conduite manuelle.

Par décision du 29 août 1983, l’OAI lui a accordé un reclassement professionnel en qualité d’employé de bureau et accepté le remboursement des frais d'un moyen de transport spécial.

c. En novembre 1990, l’assuré a demandé à être mis au bénéfice d’une allocation pour impotent, ce qui lui a été refusé par décision du 15 mars 1991.

d. En mars 1998, l’assuré a déposé une nouvelle demande de prestations, en évoquant une dégradation progressive de l’état de son épaule droite depuis janvier 1998. À la question de savoir s’il disposait déjà de moyens auxiliaires, il a répondu par l’affirmative, en soulignant le terme « fauteuil roulant » et en ajoutant qu’il utilisait ce dernier sur son lieu de travail.

Par décision du 12 mai 2000, l’assuré a été mis au bénéfice d’une rente entière basée sur un degré d’invalidité de 100%, confirmé par la suite au fil des révisions de son dossier (en avril 2006, puis en juin 2011).

e. Plusieurs autres décisions ont suivi, acceptant, notamment :

-          la prise en charge des frais de transformation d'un véhicule à moteur, le 16 janvier 2001;

-          la prise en charge des frais de remise en prêt d’un fauteuil roulant électrique, le 26 octobre 2004;

-          la prise en charge des frais de remise en prêt d’un fauteuil roulant, le 4 décembre 2006;

-          la prise en charge des frais d’une remorque pour le transport du fauteuil roulant avec scooter le 5 décembre 2006;

-          la prise en charge des frais de transformation du véhicule à moteur, le 28 septembre 2009;

-          la prise en charge d’un système de propulsion électrique pour le fauteuil roulant manuel le 25 février 2011 et, à nouveau, le 19 octobre 2012;

-          la prise en charge d'un fauteuil roulant manuel équipé d’une aide électrique à propulsion, le 17 juillet 2015.

B. a. Le 12 décembre 2019, l’assuré a déposé une demande d’allocation pour impotent de degré faible avec effet rétroactif de cinq ans à compter du dépôt de la demande. En effet, il considérait que son dossier démontrait sans équivoque qu’en raison de sa paraplégie, il ne pouvait se déplacer à l’extérieur de manière autonome, ni se tenir en position debout pour effectuer d’autres gestes et ce, depuis 2011 au moins. Il estimait par ailleurs avoir sauvegardé ses droits en déposant de multiples demandes depuis 1983.

b. Une enquête à domicile réalisée le 28 septembre 2020, a confirmé que l’assuré avait besoin de l’aide régulière et importante d’autrui pour accomplir deux actes ordinaires de la vie : se déplacer, d'une part, se lever/s’asseoir/se coucher, d'autre part, et ce, depuis janvier 2015.

c. Par décision du 22 mars 2021, l'OAI a reconnu à l'assuré le droit à une allocation pour impotence faible à compter du 1er décembre 2018.

De l'enquête à domicile, l’OAI a retenu que, depuis le 1er janvier 2015, l’assuré avait besoin de l’aide régulière et importante d’autrui pour accomplir deux actes ordinaires de la vie, de sorte que le droit à une allocation pour impotence de degré faible était ouvert depuis le 1er janvier 2016. Cependant, la demande ayant été déposée plus de douze mois après la naissance du droit, les prestations ne pouvaient être allouées que pour les douze mois la précédant.

C. a. Par écriture du 7 mai 2021, l’assuré a interjeté recours contre cette décision, en concluant à ce que le droit à l'allocation pour impotent lui soit reconnu avec effet attractif (recte : rétroactif) de cinq ans depuis le dépôt de sa demande, en décembre 2019.

En substance, le recourant fait valoir que, conformément à la jurisprudence, en s’annonçant à l’assurance-invalidité avant le dépôt de sa demande formelle d'allocation pour impotence, il a sauvegardé tous ses droits à des prestations d’assurance.

Selon lui, ses difficultés à se lever et s'asseoir pouvaient être déduites des documents figurant au dossier, puisque ses problèmes d’épaules ont été documentés avant 2015.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 8 juin 2021, a conclu au rejet du recours.

Selon lui, les conditions permettant le versement rétroactif de l’allocation pour une période supérieure à douze mois ne sont pas remplies, car, entre 2015 et 2019, l’assuré n’a ni déposé de nouvelle demande, ni allégué d’aggravation de son état de santé, ni de nouveau document médical. L'OAI en tire la conclusion qu’il n’avait dès lors aucun élément ou indice lui permettant de conclure que l’assuré pouvait, cas échéant, prétendre une prestation telle qu’une allocation pour impotent.

Pour le surplus, l’assuré n’a pas démontré une impossibilité objective ou due à des circonstances personnelles qui l’aurait empêché de déposer sa demande d’allocation pour impotent antérieurement à 2019.

d. Dans sa réplique du 5 août 2021, le recourant a persisté dans ses conclusions. Il argue que sa situation n'est pas comparable à celle d'un assuré qui dépose une première demande de prestations tardive, puisque sa demande d'allocation pour impotence a été précédée de plusieurs autres, dont il estime qu'elles lui ont permis de sauvegarder ses droits. Il rappelle pour le surplus que l'enquête ménagère est parvenue à la conclusion qu'il avait besoin d'aide pour deux actes de la vie depuis janvier 2015 déjà.

e. Par écriture du 30 août 2021, l’intimé a persisté dans ses conclusions en rejet du recours.

f. Les autres faits seront repris - en tant que de besoin - dans la partie "en droit" du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

2.2 Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA, applicable au litige.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, sont entrées en vigueur les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705).

3.2 En cas de changement de règles de droit, la législation applicable reste, en principe, celle en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits et le juge se fonde, en règle générale, sur l'état de fait réalisé à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1 et les références).

3.3 En l’occurrence, la décision querellée a été rendue antérieurement au 1er janvier 2022, de sorte que les dispositions légales applicables seront citées ci-après dans leur ancienne teneur.

4.             Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA; art. 62ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

5.             Le litige se limite à la question de savoir si le recourant peut se voir verser l'allocation pour impotence de degré faible antérieurement aux douze mois précédant sa demande.

6.              

6.1 Selon l’art. 42 al. 1 1ère phrase LAI, les assurés impotents (art. 9 LPGA) qui ont leur domicile et leur résidence habituelle (art. 13 LPGA) en Suisse ont droit à une allocation pour impotent.

Est réputée impotente toute personne qui, en raison d’une atteinte à sa santé, a besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir des actes élémentaires de la vie quotidienne (art. 9 LPGA). Ces actes sont ceux que la jurisprudence antérieure à l’entrée en vigueur de la LPGA désignait par « actes ordinaires de la vie » (Michel VALTERIO, Commentaire de la Loi fédérale sur l’assurance-invalidité [LAI], 2018, n. 10 ad art. 42 LAI).

6.2 La loi distingue trois degrés d’impotence : grave, moyen ou faible (art. 42 al. 2 LAI).

Le degré d’impotence se détermine en fonction du nombre d'actes (associés éventuellement à une surveillance personnelle permanente ou à un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie) pour lesquels l’aide d’autrui est nécessaire (cf. art. 37 du règlement sur l’assurance-invalidité, du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]). L’évaluation du besoin d’aide pour accomplir les actes ordinaires de la vie constitue donc une appréciation fonctionnelle ou qualitative de la situation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_350/2014 du 11 septembre 2014 consid. 4.2.2 et la référence).

6.2.1 L’art. 37 al. 1 RAI prescrit que l’impotence est grave lorsque l’assuré est entièrement impotent. Tel est le cas s’il a besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour tous les actes ordinaires de la vie et que son état nécessite, en outre, des soins permanents ou une surveillance personnelle.

6.2.2 L’art. 37 al. 2 RAI stipule que l’impotence est moyenne si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin : d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir la plupart des actes ordinaires de la vie (let. a); d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, une surveillance personnelle permanente (let. b); ou d’une aide régulière et importante d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie et nécessite, en outre, un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l'art. 38 RAI (let. c).

6.2.3 L’art. 37 al. 3 RAI dispose que l’impotence est faible si l’assuré, même avec des moyens auxiliaires, a besoin de façon régulière et importante, de l’aide d’autrui pour accomplir au moins deux actes ordinaires de la vie (let. a); d’une surveillance personnelle permanente (let. b); de façon permanente, de soins particulièrement astreignants, exigés par l’infirmité de l’assuré (let. c); de services considérables et réguliers de tiers lorsqu’en raison d’une grave atteinte des organes sensoriels ou d’une grave infirmité corporelle, il ne peut entretenir des contacts sociaux avec son entourage que grâce à eux (let. d); ou d’un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie au sens de l’art. 38 RAI (let. e).

6.2.4 Il y a en outre impotence faible dans le cas des handicapés physiques qui, en raison de leur grave infirmité corporelle, ne peuvent se déplacer aux alentours de leur domicile, même avec un fauteuil roulant, sans l’aide de tiers. En cas de paraplégie totale, une allocation pour une impotence faible peut être versée sans que l’on effectue une enquête. Une automobile remise par l’AI ne sera pas prise en considération lors de la détermination de l’impotence, puisqu’elle a été remise pour de simples raisons professionnelles et que l’AI n’indemnise pas les trajets privés (CIIAI ch. 8068).

7.              

7.1 Selon la jurisprudence, les actes élémentaires de la vie quotidienne se répartissent en six domaines : 1. se vêtir et se dévêtir ; 2. se lever, s’asseoir et se coucher ; 3. manger ; 4. faire sa toilette (soins du corps) ; 5. aller aux toilettes ; 6. se déplacer à l’intérieur ou à l’extérieur et établir des contacts sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2014 du 16 octobre 2015 consid. 3.3 et les références).

Quand il s’agit d’examiner le besoin d’une aide pour chacun des actes ordinaires de la vie, il ne doit être tenu compte de moyens auxiliaires que dans la mesure où ils sont effectivement pris en charge par l'assurance-invalidité. L’assuré incapable de marcher est réputé avoir besoin d’une aide pour ses déplacements (à l’extérieur), même s’il dispose d’une voiture automobile remise par l'assurance-invalidité ou financée par celle-ci au moyen de prestations de remplacement, car c’est uniquement en considération d’un but professionnel, et non pour couvrir des frais de déplacements privés, que l’assurance intervient dans ce cas (ATF 117 V 146 consid. 3a).

7.2 Pour qu’il y ait nécessité d’assistance dans l’accomplissement d’un acte ordinaire de la vie comportant plusieurs fonctions partielles, il n’est pas obligatoire que la personne assurée requière l’aide d’autrui pour toutes ou la plupart des fonctions partielles; il suffit bien au contraire qu’elle ne requière l’aide directe ou indirecte d’autrui, d’une manière régulière et importante, que pour une seule de ces fonctions partielles (ATF 121 V 88 consid. 3c). Les fonctions partielles d'un acte ordinaire de la vie ne peuvent toutefois être prises en considération qu’une fois en tout lorsque l’assuré a besoin de l’aide d’autrui pour accomplir ces fonctions dans plusieurs actes ordinaires. En revanche, si l’accomplissement d’un acte ordinaire de la vie est seulement rendu plus difficile ou ralenti par l’atteinte à la santé, cela ne signifie pas qu’il y ait impotence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_360/2014 du 14 octobre 2014 consid. 4.4 et les références).

7.2.1 L’aide est régulière lorsque l’assuré en a besoin ou pourrait en avoir besoin chaque jour (arrêt du Tribunal fédéral 9C_562/2016 du 13 janvier 2017 consid. 5.3 et les références). C’est par exemple le cas lors de crises pouvant ne se produire que tous les deux ou trois jours, mais pouvant aussi survenir brusquement chaque jour ou même plusieurs fois par jour (RCC 1986 p. 510 consid. 3c).

7.2.2 L’aide est importante lorsque l’assuré ne peut plus accomplir seul au moins une fonction partielle d’un acte ordinaire de la vie (ATF 121 V 88 consid. 3c et les références ; ATF 107 V 136 consid. 1b) ; lorsqu’il ne peut le faire qu’au prix d’un effort excessif ou d’une manière inhabituelle ou que, en raison de son état psychique, il ne peut l’accomplir sans incitation particulière (ATF 106 V 153 consid. 2a et 2b); lorsque, même avec l’aide d’un tiers, il ne peut accomplir un acte ordinaire déterminé parce que cet acte est dénué de sens pour lui (par ex. si l’assuré souffre de graves lésions cérébrales et que sa vie se trouve réduite à des fonctions purement végétatives, de sorte qu’il est condamné à vivre au lit et qu’il ne peut entretenir de contacts sociaux (ATF 117 V 146 consid. 3b ; CIIAI, ch. 8026).

7.3 En ce qui concerne l’acte ordinaire de la vie « se lever, s'asseoir ou se coucher », il y a impotence lorsqu’il est impossible à l’assuré de se lever, de s’asseoir ou de se coucher sans l’aide d’un tiers. S’il peut néanmoins effectuer des changements de position lui-même, il n’y a pas impotence (ch. 8015 CIIAI).

En ce qui concerne la fonction partielle de se lever, la jurisprudence considère qu'elle est rarement un but en soi. On se lève plutôt en vue de faire quelque chose en position debout comme converser avec quelqu'un, saisir un objet, ouvrir une porte ou une fenêtre, etc. Même si un paraplégique parvient encore à se lever seul, la maîtrise de cette fonction ne lui est guère utile car, une fois debout, il n'est pas à même de se tourner vers des personnes ou des objets, mais doit se concentrer pour maintenir l'équilibre avec ses mains. Aussi la fonction partielle de se lever a-t-elle perdu toute utilité pour lui, de sorte que le besoin d'aide importante doit être reconnu pour cette fonction et, partant, en relation avec l'acte ordinaire de se lever, s'asseoir, se coucher. Le fait que l'assuré dispose d'un moyen auxiliaire sous la forme d'un système lui permettant de se redresser et de se maintenir en position debout dans son fauteuil roulant n'y change rien, dans la mesure où il existe de nombreuses situations dans lesquelles il ne peut pas faire usage de cet équipement parce que les contraintes de transport l'obligent à se servir d'un fauteuil roulant traditionnel qui est plus léger (ATF 117 V 146 consid. 3b p. 151; arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 163/00 du 21 mai 2001 consid. 2).  

Ainsi, dans un arrêt 8C_691/2014 du 16 octobre 2015 (consid. 5.3.2), le Tribunal fédéral a-t-il jugé qu'un assuré souffrant d'une tétraplégie incomplète entrainant une absence totale de force dans les membres inférieurs, le rendant incapable de se tenir en position verticale et de marcher de manière autonome, même s'il parvenait encore à se lever seul, devait se voir reconnaître un besoin d'aide importante pour cette fonction et, partant, en relation avec l'acte ordinaire de se lever, s'asseoir, se coucher. 

8.              

8.1 En règle générale, le degré d’impotence d’un assuré est déterminé par une enquête à son domicile. Cette enquête doit être élaborée par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il s’agit en outre de tenir compte des indications de la personne assurée et de consigner les opinions divergentes des participants. Enfin, le contenu du rapport doit être plausible, motivé et rédigé de façon suffisamment détaillée en ce qui concerne chaque acte ordinaire de la vie et sur les besoins permanents de soins et de surveillance personnelle et finalement correspondre aux indications relevées sur place. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision, le juge ne saurait remettre en cause l’appréciation de l’auteur de l’enquête que s’il est évident qu’elle repose sur des erreurs manifestes (ATF 130 V 61 consid. 6.1.2).

8.2 Les personnes chargées de déterminer s’il y a impotence (médecin, collaborateurs des services sociaux) doivent se limiter à indiquer en quoi consiste l’aide accordée de manière régulière. Décider si elle est importante est en revanche une question de droit qu’il incombe à l’administration, respectivement au juge de trancher (ATF 107 V 136 consid. 2b).

9.              

9.1 Selon l’art. 42 al. 4 LAI, la naissance du droit à l’allocation pour impotent est régie, à partir de l’âge d'un an, par l’art. 28 al. 1 LAI.

Dès lors que les conditions posées par l’art. 28 al. 1 let. b LAI  s’agissant du droit à la rente d’invalidité sont applicables par analogie au domaine des allocations pour impotent, il en résulte qu’un droit à une telle prestation ne peut pas naître avant l’échéance d’un délai de carence d’une année à compter de la survenance de l’impotence (arrêt du Tribunal fédéral 9C_326/2017 du 18 septembre 2017 consid. 3.1). Le niveau de l’allocation pour impotent est alors déterminé d’une part, d’après le degré d’impotence existant au cours du délai d’attente et d’autre part, selon l’étendue de l’impotence persistant une fois le délai d’attente écoulé (ATF 111 V 226 consid. 3).

À teneur de l’art. 35 al. 1 RAI, le droit à l’allocation pour impotent prend naissance le premier jour du mois au cours duquel toutes les conditions de ce droit sont réalisées.

9.2 Selon l’art. 48 al. 1 LAI, si un assuré ayant droit à une allocation pour impotent présente sa demande plus de douze mois après la naissance de ce droit, la prestation, en dérogation à l’art. 24 al. 1 LPGA, n’est allouée que pour les douze mois précédant le dépôt de la demande.

Selon l’al. 2 de la même disposition, les prestations arriérées sont allouées à l’assuré pour des périodes plus longues aux conditions suivantes : il ne pouvait pas connaître les faits ayant établi son droit aux prestations (let. a); il a fait valoir son droit dans un délai de douze mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de ces faits (let. b).

La jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances en la matière est très restrictive dans la mesure où par « faits ouvrant droit à des prestations », il faut entendre l’atteinte à la santé physique et mentale qui cause un besoin de façon permanente de l’aide d’autrui ou d’une surveillance personnelle pour accomplir les actes élémentaires de la vie quotidienne. On ne peut entendre par cette expression la faculté subjective de l’assuré de se faire une idée de son état ; il s’agit bien plutôt de savoir si les faits ouvrant droit à prestations peuvent objectivement être constatés ou non. Ainsi, l’assuré qui connaissait les faits ouvrant droit à des prestations mais qui ignorait qu'ils lui donnaient droit à ces prestations ne peut se prévaloir de cette disposition (ATF 102 V consid. 1a p. 113).

9.3 Il sied de souligner que, bien que les prestations sociales ne soient en principe servies qu'à la demande de l'ayant droit (cf. ATF 101 V 261 consid. 2 ainsi que les art. 29 al. 1 LPGA et 65 RAI), le Tribunal fédéral a estimé qu'en s'annonçant à l'assurance-invalidité, l'assuré sauvegarde tous ses droits à des prestations d'assurance, même s'il n'en précise pas la nature exacte (ATF 121 V 195 consid. 2 et les arrêts cités; voir aussi arrêts du Tribunal fédéral 9C_532/2011 du 7 mai 2012 et 9C_92/2008 du 24 novembre 2008; VSI 1998 p. 212 consid. 2a).

Cependant, cette jurisprudence ne vaut pas pour les prestations qui n'ont aucun rapport avec les indications fournies par le requérant et à propos desquelles il n'existe au dossier aucun indice suffisant permettant de croire qu'elles pourraient entrer en considération. En effet, l'obligation de l'administration d'examiner le cas s'étend seulement aux prestations qui, au vu des faits et pièces du dossier, peuvent normalement entrer en ligne de compte et non pas à toutes celles qu'un assuré peut revendiquer. En d'autres termes, cette obligation n'englobe que les prestations que l'on peut mettre, raisonnablement, en corrélation avec l'état de fait et avec des pièces figurant déjà au dossier ou ajoutées récemment à celui-ci (VSI 1998 p. 212 consid. 2a; RCC 1976 p. 47 consid. 3a).

Dès lors, lorsque l'assuré allègue, plus tard, qu'il a droit à une autre prestation que celles qui lui ont déjà été accordées ou refusées par décision, il faut examiner, en tenant compte de toutes les circonstances de son cas et en observant le principe de la bonne foi, si la première demande englobait déjà le droit concrétisé plus tard. Si tel n'est pas le cas, des prestations ne peuvent être accordées, rétroactivement, que dans les limites des douze mois précédant la nouvelle demande, selon l'art. 48 al. 2 LAI. Si, en revanche, l'ancienne demande paraît suffisamment concrète, c'est le délai de prescription de cinq ans à partir de cette demande qui sera déterminant (cf. art. 24 al. 1 LPGA; ATF 121 V 195 consid. 2 p. 196 et les arrêts cités; RCC 1976 p. 47 consid. 3a).

Il découle de ce qui précède que l'annonce à l'assureur social permet en principe de préserver le délai de l'art. 24 al. 1 LPGA, selon lequel le droit à des prestations arriérées s'éteint cinq ans après la fin du mois pour lequel la prestation était due. Toutefois, lorsque l'administration a manqué à son devoir d'instruction malgré une demande suffisamment précise de l'assuré, le paiement de prestations arriérées est soumis au délai de cinq ans prévu à l'art. 24 al. 1 LPGA : seules les prestations dues pour les cinq dernières années à partir de la nouvelle demande de prestations sont versées, le droit aux prestations antérieures s'étant éteint. Autrement dit, même si l'administration a omis fautivement de donner suite à une demande initiale de prestations, qui était bien fondée, le paiement des prestations arriérées est soumis au délai de péremption absolu de cinq ans à compter de la date du dépôt de la nouvelle demande (ATF 121 V 195 consid. 5d p. 201 s.; arrêt M 12/06 du 23 novembre 2007 consid. 5.3). Le but de cette jurisprudence est essentiellement d'éviter que le paiement rétroactif de prestations pour une période couvrant plusieurs années ne vienne alimenter une fortune plus ou moins importante alors que ces prestations étaient destinées à compenser les besoins vitaux ordinaires du requérant (arrêt du Tribunal fédéral 9C_574/2008 du 27 mars 2009 consid. 2.2 ; 9C_532/2011 du 7 mai 2012).

9.3.1 Ainsi, dans le cas d'une assurée qui avait demandé des mesures médicales et une rente, le Tribunal fédéral a estimé que l'administration aurait également dû examiner le droit à une allocation d'impotent dans la mesure où il ressortait du rapport d'un médecin que l'assurée avait besoin de l'aide d'autrui pour s'habiller, prendre ses repas et faire sa toilette (RCC 1976 p. 45ss).

Dans un arrêt du 28 janvier 2016, la Cour de céans a jugé qu'une assurée ayant requis des prestations de l’OAI en utilisant le formulaire intitulé « demande de prestations AI pour adultes : mesures professionnelles/rente » pouvait légitimement penser qu’il s’appliquait à toutes les prestations de l’assurance-invalidité pour adultes relatives à son atteinte à la santé, ce d’autant plus que, dans le langage commun, les mots « rente » et « allocation » pouvaient avoir la même signification; si l’OAI estimait nécessaire que l’assurée remplisse un formulaire spécifique relatif à l’allocation pour impotent, il lui appartenait d’en informer l’assurée; en conséquence la demande initiale de l’assurée portait bien sur toutes les prestations fondées sur la LAI, soit y compris sur l’allocation pour impotent (ATAS/77/2016).

Dans un arrêt ATAS/511/2017 du 19 juin 2017 (consid. 6), la Cour de céans a estimé, s'agissant d'une assurée ayant déposé une demande de mesures médicales, qu'au regard de la jurisprudence du Tribunal fédéral, une allocation pour impotent pouvait entrer en ligne de compte. En effet, des rapports médicaux figurant au dossier faisaient état de difficultés cognitives globales entrainant des difficultés majeures dans la vie quotidienne et la vie scolaire, les gestes les plus simples de la vie quotidienne comme s’habiller, se moucher, couper les aliments étant difficiles. Était également mentionné un retard du développement cognitif et moteur, avec scolarisation en école spécialisée. Dès lors, une allocation pour impotent était susceptible d’entrer en ligne de compte.

10.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

11.         En l'espèce, il convient tout d'abord de déterminer à partir de quelle date les conditions ouvrant droit à une allocation pour impotence de degré faible ont été remplies.

Le recourant se réfère au chiffre 8058 (recte : 8068) de la CIIAI, cité supra, lequel, pour mémoire, ouvre automatiquement droit à une telle allocation aux handicapés physiques qui, en raison de leur grave infirmité corporelle, ne peuvent se déplacer aux alentours de leur domicile, même avec un fauteuil roulant, sans l’aide de tiers. En cas de paraplégie totale, une allocation pour une impotence faible peut être versée sans que l’on effectue une enquête.

En l'occurrence, la paraplégie de l'intéressé n'est pas totale. En revanche, il a été reconnu lors de l'enquête à domicile que le recourant avait besoin de l'aide régulière et importante d'autrui pour se déplacer à l'extérieur, même en fauteuil roulant et ce, depuis son plus jeune âge (cf. rapport du 29 septembre 2019 ch. 4.1.6).

Il en résulte qu'en application de la jurisprudence concrétisée au chiffre 8068 CIIAI, le droit à une allocation pour impotence de degré faible était ouvert antérieurement à janvier 2015 déjà.

Reste à déterminer si le dossier constitué antérieurement à la demande d’allocation pour impotent, en 2019, comportait des indications médicales permettant à l'OAI de s'en rendre compte, tant il est vrai qu'un assuré invalide à 100%, soit un assuré totalement incapable de travailler et de réaliser un gain dans un circuit économique normal, n’est pas nécessairement impotent, l'inverse étant également vrai. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer les définitions de l'invalidité et de l’impotence. L’invalidité est, au sens du droit des assurances sociales, une notion économique et non médicale ; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer. L'impotence est l'état d’une personne qui, en raison d'une atteinte à sa santé, a durablement besoin d’une aide régulière et importante d’autrui pour certains actes ordinaires de la vie et/ou d'un accompagnement durable pour faire face aux nécessités de la vie. Les conditions pour bénéficier de ces prestations ne sont ainsi pas les mêmes en matière de rente d’invalidité et d’allocation pour impotent et l'octroi de l’une des prestations n'implique pas forcément l'octroi de l'autre (voir ATAS/254/2017 du 3 avril 2017 consid. 8a).

En principe, par le dépôt de ses multiples demandes, le recourant a sauvegardé ses droits à une allocation pour impotence, étant rappelé qu'après le rejet de sa première demande en ce sens, par décision du 15 mars 1991, il a déposé une nouvelle demande de prestations en 1998, suivie de plusieurs autres.

Qui plus est, la paraplégie partielle du recourant a été évoquée plusieurs fois par le passé par les différents médecins qui se sont prononcés, de sorte que l'intimé ne pouvait donc l'ignorer. Force est cependant de constater qu'avant le dépôt de la demande d'allocation pour impotence du 12 décembre 2019 et l'enquête qui a suivi, aucun élément au dossier n'aurait pu donner à penser à l'intimé que l'assuré ne pouvait se déplacer sans l'aide de tiers aux alentours de son domicile, même avec un fauteuil roulant et qu'en conséquence, ce besoin d'aide venant s'ajouter à celui pour se lever, le droit à l'allocation pouvait être ouvert.

Certes, dans un rapport du 14 février 2000, le docteur B______, a expliqué que son patient souffrait d’une impotence de l’épaule droite en raison d’une rupture de la coiffe des rotateurs. Par la suite, dans un rapport du 22 novembre 2010, le docteur C______, a mentionné une lésion des épaules incompatible avec la marche à l’aide de cannes. De même, la Fédération suisse de consultation en moyens auxiliaires pour personnes handicapées et âgées (FSCMA), dans un rapport du 17 février 2011, a admis la nécessité d’un fauteuil roulant électrique, l’assuré étant dans l’obligation médicale de ménager ses articulations suite à ses problèmes d’épaules. Cela n'était toutefois pas suffisant pour que l'intimé doive en conclure que l'assuré ne pouvait se déplacer sans l'aide de tiers à l'extérieur. D'autant moins que, dans un courrier adressé à l'intimé le 20 mars 2015, l'intéressé lui-même alléguait précisément le contraire : il indiquait certes qu'il lui était de plus en plus difficile de charger son fauteuil roulant dans le coffre de sa voiture, mais ne faisait nullement allusion à un besoin d'aide, ni à une incapacité à pouvoir se déplacer seul à l'extérieur. Au contraire, il indiquait avoir essayé un nouveau fauteuil et une nouvelle motorisation plus légers lui permettant de "retrouver son autonomie d'avant", autonomie au demeurant confirmée par la FSCMA qui, dans son rapport du 14 juillet 2015, indiquait : "Le choix du fauteuil roulant manuel Sopur Xenon et de ses accessoires est simple et adéquat pour ce renouvellement. Il va permettre à l'assuré de conserver son autonomie de déplacement et son autonomie pour le chargement de son véhicule" (p. 2 in fine).

Dès lors, si les problèmes d’épaules de l'assuré ont effectivement bien été documentés avant 2019 et même avant 2015, cela ne suffisait pas à conclure que les conditions permettant l'octroi d'une allocation pour impotent étaient réunies. Qui plus est, entre 2015 et 2019, l'assuré n'a déposé aucune nouvelle demande, ni allégué d'aggravation de son état de santé. Dans ces conditions, on ne saurait reprocher à l'intimé de ne pas avoir mené d'investigations supplémentaires en la matière. Les conditions posées par la jurisprudence pour permettre de considérer le délai de l'art. 24 al. 1 LPGA comme préservé ne sont donc pas réunies.

Les conditions posées par l’art. 48 al. 2 LAI permettant le versement rétroactif de l’allocation pour une période supérieure à douze mois ne le sont manifestement pas non plus. D'ailleurs, le recourant ne soutient pas qu'il aurait été dans l'impossibilité objective d'agir.

Eu égard aux considérations qui précèdent, la décision litigieuse n'est pas critiquable. Le recours est rejeté et le recourant condamné au paiement d’un émolument de CHF 200.- (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge du recourant.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le