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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4012/2018

ATAS/362/2022 du 11.04.2022 ( LAA ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4012/2018 ATAS/362/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 11 avril 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Monsieur A______, domicilié c/o Madame B______, à MEYRIN, comparant avec élection de domicile en l'étude de Me Yann ARNOLD

 

 

recourant

contre

 

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Fluhmattstrasse 1, LUZERN

 

 

intimée

 


EN FAIT

A.      a. Monsieur A______ (ci-après l’assuré ou le recourant), né le ______ 1981, originaire de Macédoine, est entré en Suisse en 2001 et a exercé depuis le 23 juin 2014 comme plâtrier-plaquiste pour C______ entreprise de gypserie-peinture, Monsieur D______ (ci-après : l’employeur) ; il était assuré à ce titre, selon la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20) auprès de la CAISSE NATIONALE D'ASSURANCES EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : SUVA).

b. Le 27 juin 2014, l’assuré s’est entaillé la main gauche avec un fer d’angle. Il a été en incapacité de travail jusqu’au 13 juillet 2014. Le cas a été annoncé à la SUVA le 4 juillet 2014, laquelle l’a pris en charge.

B.       a. Le 3 septembre 2014, l’employeur a annoncé une rechute à la SUVA le 19 août 2014 entrainant une incapacité de travail totale, la plaie de l’assuré s’était rouverte alors qu’il travaillait. La SUVA a pris le cas en charge. Un diagnostic de névrome douloureux de la base du pouce gauche a été posé par les docteurs E______, du centre Helveticare SA (avis du 2 septembre 2014), et F______, FMH chirurgie de la main (avis des 19 septembre 2014 et 7 octobre 2014). Le 2 décembre 2014, l’assuré a subi une intervention effectuée par le Dr F______ (cure de névrome d’une branche sensitive du nerf radial gauche), lequel a relevé que l’assuré avait développé après son accident des douleurs importantes de type allodynique sur le trajet d’une branche sensitive du radial. Le 26 janvier 2015, il a constaté une récupération pauvre, un déficit musculaire de la main opérée et la persistance de l’allodynie au contour de la cicatrice ; le 16 février 2015, il a attesté de la persistance d’une incapacité de travail totale et d’un traitement médical en cours ; le 5 mars 2015, il a mentionné une allodynie, une hyperesthésie et une incapacité de travail toujours en cours.

b. Le 5 mars 2015, le docteur G______, FMH chirurgie orthopédique et traumatologie, médecin de la SUVA, a relevé que l’incapacité de travail était justifiée.

c. Le 17 juillet 2015, le Dr F______ a attesté d’une capacité de travail de 50 % dès le 24 mai 2015 ; l’assuré avait repris une activité de plâtrier-plaquiste à 50 %. Le 28 septembre 2015, il a attesté de progrès limités suite à l’intervention du 2 décembre 2014, l’assuré présentant des douleurs de type allodynie extrêmement gênantes, au simple attouchement de la zone de névrome ; le 1er février 2016, il a relevé un état stationnaire. Le 31 mars 2016, il a opéré l’assuré (résection de névrome de la branche sensitive du radial gauche et enfouissement intramusculaire des moignons proximal et distal au poignet gauche) et le 5 juillet 2016, il a attesté d’une évolution défavorable avec des douleurs intolérables ; il a suggéré de convoquer l’assuré à la Clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR).

d. L’assuré a séjourné à la CRR du 13 septembre au 26 octobre 2016. Les diagnostics d’allodynie en territoire de la branche superficielle du nerf radial gauche et plaie partie dorso-radiale à la base du pouce gauche suturée en urgence le 17 juin 2014, ont été posés. L’assuré présentait les limitations fonctionnelles provisoires suivantes : port de charges lourdes, activités nécessitant une préhension de force avec la main gauche ou des mouvements répétitifs avec la main gauche. La situation n’était pas stabilisée du point de vue médical et des aptitudes fonctionnelles. Le 19 janvier 2017, le Dr G______ a indiqué qu’il fallait prévoir une activité avec limitation de port des charges de la main gauche.

e. Le 3 mars 2017, l’assuré a déposé une demande de prestations d’invalidité.

f. Le 11 mai 2017, le Dr G______ a rendu un rapport suite à une appréciation médicale du 1er mai 2017 ; il a posé les diagnostics de névrome post-traumatique après une plaie au niveau de la face antéro-externe du tiers distal de l’avant-bras gauche. Persistance de douleurs, malgré deux interventions chirurgicales correctrices avec excision de névrome. L’assuré portait jour et nuit un gant de protection. Il a estimé l’atteinte à l’intégrité à 10 %. Il persistait une nette diminution de la force au niveau de la main gauche et une zone de douleurs allodyniques en regard. De nombreuses séances d’ergothérapie avaient été prescrites et l’assuré déclarait avoir retiré un grand bénéfice de son séjour à la CRR. Sur le plan professionnel, on pouvait conclure que l’ancienne activité de plaquiste nécessitant la manipulation de lourdes charges à deux mains n’était plus exigible. Sur le plan de l’exigibilité, dans une activité professionnelle réalisée indifféremment en position assise ou debout, sans limitation de port de charges du côté droit avec, pour le côté gauche, une utilisation des 4 derniers doigts ayant juste une fonction de stabilisation, sans devoir porter de charges du côté gauche, sans devoir monter sur une échelle ou un toit, on pouvait s’attendre à une activité professionnelle réalisée à la journée entière, sans baisse de rendement. Il ne devait pas exercer de travail sur des machines, compte tenu d’un traitement médicamenteux pouvant entrainer des vertiges ou des épisodes de fatigue. Le cas était stabilisé aujourd’hui.

g. Le 11 mai 2017, la SUVA a informé l’assuré qu’elle cesserait le versement de l’indemnité journalière au 31 juillet 2017 et qu’elle examinerait le droit à une invalidité partielle dès le 1er août 2017.

h. Le 12 mai 2017, l’employeur a indiqué, à la demande de la SUVA, que le gain de l’assuré en 2016 et 2017 aurait été de CHF 28.50 de l’heure.

i. Par communication du 16 juin 2017, l’OAI a pris en charge un cours de français en faveur de l’assuré et le 7 juillet 2017, la réadaptation professionnelle a clos le mandat en constatant un degré d’invalidité de 17 %. L’assuré pouvait travailler dans des activités comprenant des tâches simples de surveillance, d’accueil ou de réception, le SMR ayant estimé une capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée. Par communication du 11 juillet 2017, l’OAI a pris en charge les frais d’une orientation professionnelle auprès des EPI du 17 juillet au 15 octobre 2017.

j. Selon le questionnaire pour l’employeur du 12 juillet 2017, l’assuré percevrait un salaire depuis le 1er janvier 2016 de CHF 29.- de l’heure et actuellement de CHF 29,50 de l’heure. Il avait été licencié pour le 31 juillet 2017.

k. Le 30 août 2017, le Dr F______ a rempli un rapport médical AI attestant d’une capacité de travail de 50 % dès le 15 août 2017, date du début de l’aptitude à la réadaptation. Il a posé le diagnostic de neuropathie post-traumatique branche sensitive dorsale du nerf radial avec exclusion de force ; l’assuré pourrait travailler dans l’atelier mécanique où il était actuellement, à 50 %.

l. Le rapport des EPI du 20 octobre 2017, rendu suite à l’orientation professionnelle, mentionne que l’assuré a suivi une mesure à 100 % jusqu’au 14 août 2017 et à 50 % ensuite (selon certificat médical du Dr F______). Il a conclu à l’impossibilité pour l’assuré de rejoindre le circuit économique ordinaire, ses rendements étant inexploitables pour le placement en entreprise ; l’assuré n’utilisait que sa main droite. Toute activité comportant l’utilisation des deux mains ne pouvait être réalisée. Le fait de travailler avec une seule main engendrait une baisse significative du rythme et de la continuité dans la tâche. Ceci influençait négativement la résistance physique et diminuait la polyvalence. Les raisons suivantes expliquaient les rendements en dents de scie : pas d’utilisation du bras gauche ; tonus général faible à moyen ; polyvalence très diminuée ; gestuelle réduite à la seule utilisation du bras droit.

m. Le 24 octobre 2017, le service médical régional (ci-après : SMR) a estimé que l’incapacité de travail était totale depuis le 17 (recte : 27) juin 2014 et que l’on pouvait retenir une exigibilité entière dans une activité adaptée (légère, épargnant le membre supérieur gauche) dès la sortie de la CRR le 27 octobre 2016, exigibilité confirmée par le Dr G______ le 1er mai 2017. Il a retenu les limitations fonctionnelles suivantes : pas de port de charges avec le membre supérieur gauche, pas de sollicitation répétée du membre supérieur gauche, pas de travail en hauteur ou sur engin dangereux, pas de conduite automobile professionnelle ; préférer une activité légère effectuée indifféremment en position assise ou debout, sans travail de force ni travail de précision avec la main gauche, celle-ci pouvant être utilisée uniquement à une fonction de stabilisation d’un objet par les 4 derniers doigts.

n. Par projet de décision du 8 janvier 2018 et décision du 19 février 2018, l’OAI a rejeté la demande de prestations du recourant au motif qu’il aurait eu droit à une rente entière d’invalidité dès le 12 novembre 2015 (incapacité de travail totale du 12 novembre 2014 [sic] au 27 octobre 2016 ) mais que sa demande était tardive et que dès octobre 2016 son degré d’invalidité était de 17 % (soit des revenus en 2015 sans invalidité, de CHF 64'182.- et d’invalide de CHF 53'380.-, celui-ci étant fondé sur l’ESS 2014, tableau TA1, homme, total, niveau 1, pour un horaire hebdomadaire de travail de 41,7 h, indexé à 2015, avec une déduction de 20%).

o. Par décision du 26 février 2018, la SUVA a refusé à l’assuré le droit à une rente d’invalidité au motif que son degré d’invalidité était de 1,38 % et lui a alloué une indemnité pour atteinte à l’intégrité (IPAI) au taux de 10% de CHF 12'600.-.

p. Le 2 mars 2018, le Dr F______ a écrit à l’OAI que l’ancienne activité n’était plus exigible et qu’il convenait de reclasser l’assuré, à défaut d’une rente, l’usage de sa main gauche étant difficile, sinon impossible.

q. Le 14 mars 2018, l’assuré a fait opposition à la décision de la SUVA.

C.      a. Le 23 mars 2018, l’assuré, représenté par un avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision de l’OAI du 19 février 2018 (cause A/1014/2018 - AI), en concluant à son annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès le 12 novembre 2014, subsidiairement à l’octroi de mesures professionnelles et plus subsidiairement au renvoi de la cause à l’OAI afin qu’il procède dans le sens des considérants que la chambre de céans décidera. Il était totalement incapable de travailler et rencontrait même des limitations dans de simples activités de la vie quotidienne ; l’OAI n’avait pas mentionné les activités exigibles et n’avait pas tenu compte des effets secondaires de son traitement. Il a communiqué un bilan ergothérapeutique du 12 mars 2018, selon lequel il n’utilisait pratiquement pas sa main pendant les activités de la vie quotidienne à cause des douleurs que cela lui provoquait ; en effet, le moindre mouvement incontrôlé du pouce ou du poignet provoquait des douleurs très importantes ; il utilisait parfois sa main pour stabiliser par exemple une feuille et utilisait la prise « index-majeur » et non « pollici-digitale » sauf dans les situations où il n’avait pas le choix ; il avait beaucoup de difficultés à réaliser les activités de la vie quotidienne.

b. Le 25 mai 2018, le recourant a complété son recours et requis une expertise judiciaire, l’audition du Dr F______ et celle de sa fiancée, Madame B______. Le Dr F______ avait certifié d’une capacité de travail de 50 % dans le cadre de son stage aux EPI et la CRR avait indiqué un pronostic de réinsertion limité ; une baisse de rendement aurait dû être prise en compte. Si l’on retenait une hypothétique capacité de travail de 50 %, avec une baisse de rendement de 50 %, on aboutissait à un degré d’invalidité de 80 % ; il était disposé à bénéficier de mesures professionnelles.

c. Le 22 juin 2018, le SMR a confirmé une capacité de travail totale dans une activité adaptée.

d. Le 2 juillet 2018, l’OAI a conclu au rejet du recours, au motif qu’il s’était fondé sur le dossier de la SUVA, probant, et qu’une expertise judiciaire n’était pas nécessaire, que le recourant avait bénéficié d’une orientation professionnelle mais que son engagement n’avait été que moyen, que le Dr G______ avait tenu compte des effets du traitement médicamenteux en évaluant la capacité de travail du recourant, que les avis médicaux primaient les observations des EPI, que le revenu d’invalidité était représentatif de ce que le recourant était en mesure de réaliser, qu’enfin des mesures professionnelles n’entraient pas en ligne de compte car le taux de 17 % ne permettait pas un reclassement, que le recourant, étant apte à travailler à 100 % sans limitations qui l’entravaient dans ses recherches de travail, une aide au placement n’était pas justifiée, et que des mesures ne sauraient être ordonnées si le recourant n’avait pas de perspective réaliste que son séjour soit légalisé et un permis de travail octroyé.

e. Le 11 juillet 2018, le Dr G______ a rendu une appréciation médicale selon laquelle le traitement médicamenteux contre-indiquait l’utilisation de machine industrielle agressive ou potentiellement coupante et une IPAI de 10 % était justifiée.

f. Le 3 août 2018, le recourant a répliqué en relevant que des facteurs psychosociaux ou socio-culturels n’étaient pas pertinents dans son cas, son incapacité de travail relevant d’une atteinte physique ; il allait épouser Madame B______, ressortissante suisse ; il renouvelait sa demande d’une expertise judiciaire ; il s’était investi dans les thérapies et mesures ordonnées ; l’OAI n’avait pas indiqué les activités adaptées exigibles ; la diminution de rendement durant la mesure avait été objectivée (mouvement incontrôlable et utilisation du seul bras droit, fatigue) ; le salaire statistique se référait à des activités compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes, ce qui n’était pas son cas ; il avait été admis qu’il ne pouvait réaliser d’activités avec les deux mains et qu’il était quasi privé de l’usage d’une main.

g. Par décision du 13 août 2018, la SUVA a annulé sa décision du 26 février 2018 et reconnu à l’assuré une rente mensuelle de CHF 536.80, sur la base d’une incapacité de gain de 14 % (revenu sans invalidité de CHF 62’257.- et revenu d’invalide de CHF 53'655.-) ainsi qu’une IPAI de 10 % (CHF 12'600.-). La décision mentionne qu’elle est soumise à la voie de l’opposition.

h. Le 3 septembre 2018, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle (cause A/1014/2018 - AI). Le recourant a notamment déclaré : « Ma santé va très mal. J’ai des décharges électriques qui remontent jusqu’à la tête surtout lorsque je bouge le poignet, suite à la rupture du nerf radial, opéré par le Dr F______. Cette deuxième opération n’a pas amélioré du tout ma situation, laquelle a même plutôt empiré. Je m’estime capable de travailler à un certain pourcentage selon les indications des médecins, dans une activité qui soit adaptée à mon problème. Je suis prêt à être réadapté dans un nouveau métier ».

La représentante de l’intimée a déclaré : « Nous nous sommes alignés sur le rapport de la CRR car il s’agit d’un pur cas accident sans aggravation postérieure. Nous refusons d’ordonner des mesures professionnelles supplémentaires car une activité légère est exigible du recourant, son degré d’invalidité étant par ailleurs inférieur à 20 % ».

i. Le 13 septembre 2018, l’assuré, représenté par son avocat, a fait opposition à l’encontre de la décision du 13 août 2018 de la SUVA, en sollicitant une expertise médicale et l’audition de sa compagne, Mme B______ et en contestant une capacité de travail de 100 % ; il a requis une rente entière d’invalidité et une IPAI de 40 %. Cette opposition a été reçue à la SUVA le 14 septembre 2018.

j. Le 1er octobre 2018, le recourant a requis la suspension de la procédure A/1014/2018 - AI jusqu’à droit connu sur la procédure d’opposition. Il a communiqué une attestation du 20 septembre 2018 de l’OCPM mentionnant qu’il avait déposé une demande d’autorisation de séjour, laquelle était à l’examen.

k. Par décision du 12 octobre 2018, la SUVA a rejeté l’opposition de l’assuré en se référant à l’avis du Dr G______ du 11 juillet 2018.

l. Le 24 octobre 2018, l’OAI s’est opposé à la suspension de la procédure, la SUVA ayant déjà rendu une décision sur opposition.

D.      a. Le 14 novembre 2018, l’assuré a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision de la SUVA du 12 octobre 2018 (cause A/4012/2018 - LAA), en concluant principalement à son annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité et d’une IPAI de CHF 50'400.-. Préalablement, il a requis la comparution personnelle des parties, l’audition des Drs H______, F______ et de Mme B______, ainsi que l’ordonnance d’une expertise.

b. Le 13 décembre 2018, la SUVA a conclu à l’irrecevabilité du recours (A/4012/2018 LAA), au motif qu’il était tardif, le délai de recours venant à échéance le 12 novembre 2018.

c. Par ordonnance du 17 décembre 2018, la chambre de céans a ordonné l’apport du dossier A/4012/2018 LAA dans la procédure A/1014/2018 AI et par arrêt incident du 18 février 2019 elle a déclaré le recours recevable (A/4012/2018 - LAA). Cet arrêt est entré en force.

d. Par ordonnance du 24 septembre 2019, la chambre de céans a confié, dans le cadre des procédures AI et LAA, une expertise au docteur I______, médecin adjoint, responsable des affections neuromusculaires, et à la doctoresse J______, médecine générale, département des neurosciences cliniques, service de neurologie des hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

e. Le 30 octobre 2019, les experts ont rendu leur rapport. L’assuré se plaignait de douleurs persistantes à la main et à l’avant-bras gauche, avec de fréquentes sensations de décharges électriques, de céphalées, d’une insomnie chronique, de troubles attentionnels et de pertes de connaissance. Ils ont posé les diagnostics de névrose, neuropathie principalement axonale et douleurs neuropathiques chroniques, de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche. Les atteintes et les plaintes avaient un substrat organique. L’état était stabilisé depuis 2016, avec des limitations fonctionnelles. L’assuré était totalement incapable de travailler comme aide plâtrier plaquiste mais capable de travailler à 75% dans une activité adaptée. Les atteintes constatées étaient dans un rapport de causalité certaine avec l’accident. Le taux de l’IPAI était de 40%, soit 30% pour la perte de la fonctionnalité de la main et 10% supplémentaire en raison des douleurs neuropathiques sévères.

f. Le 21 janvier 2020, le docteur K______, FMH neurologie, médecin de la SUVA, a rendu une appréciation neurologique selon laquelle l’expertise judiciaire était complète ; l’assuré souffrait bien d’une douleur neuropathique et de névrome de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche ; il confirmait les limitations fonctionnelles de la main gauche retenues par l’expertise judiciaire ainsi que l’incapacité de travail totale de l’assuré dans l’activité habituelle. En revanche, l’évaluation de la capacité de travail dans une activité adaptée n’était pas convaincante, tout comme la fixation de l’IPAI au taux de 40 %. Il était erroné d’ajouter un taux de 10% pour les douleurs neuropathiques au taux de 30%. Enfin, en considérant qu’un traitement pourrait avoir un effet notable sur la capacité de travail, les experts admettaient que la situation n’était pas stabilisée.

g. Le 27 janvier 2020, la SUVA a estimé qu’un complément d’expertise était nécessaire.

h. Le 27 janvier 2020, la doctoresse L______, du SMR, a rendu un avis médical. Les troubles cognitifs n’étaient pas objectivés ; les plaintes psychiatriques, postérieures à la décision, ne permettaient pas de poser un diagnostic ni de retenir des limitations fonctionnelles.

i. Le 27 janvier 2020, l’OAI a maintenu ses conclusions.

j. Le 7 février 2020, l’assuré a contesté une capacité de travail de 75 % dans une activité adaptée, laquelle était insuffisamment motivée et incohérente par rapport aux limitations fonctionnelles retenues. Il a requis un complément orthopédique. Du point de vue de l’AI, une déduction de 25% était justifiée sur le revenu d’invalide, lequel devait se fonder sur des activités plus limitées que celles retenues par l’OAI, de sorte qu’il était de CHF 27'869.60 pour une activité exercée à 75 %. Le revenu sans invalidité était de CHF 64'320.15 et non pas de CHF 64'182.-. Il a sollicité un complément d’expertise neurologique. Du point de vue de la LAA, le revenu sans invalidité était de CHF 69'979.28 (sic) et le revenu d’invalide était de CHF 26'624.- pour une activité à 75%. Il a communiqué des rapports médicaux des docteurs M______, FMH psychiatrie et psychothérapie, du 14 janvier 2020 et H______, médecin chef de clinique au service de médecine de premier recours des HUG, du 23 janvier 2020.

k. À la demande de la chambre de céans, les experts ont rendu, le 15 octobre 2020, un complément d’expertise, concluant à une capacité de travail de l’assuré de 60 % dans une activité adaptée, en raison d’une perte de rendement supplémentaire de 20 % due à la sévérité du syndrome douloureux chronique (douleurs neuropathiques et leurs répercussions psychologiques ainsi qu’un effet secondaire médicamenteux). Un examen neuropsychologique était préconisé, afin d’évaluer les troubles de la mémoire et de la concentration.

l. À la demande de la chambre de céans, Madame N______, psychologue spécialiste en neuropsychologie, a rendu un rapport d’examen neuropsychologique le 9 février 2021, concluant à une suspicion de défaut d’effort et à un problème d’attention soutenue, en particulier une fluctuation de l’attention, laquelle pouvait être due aux douleurs, à l’état dépressif avec trouble du sommeil et prise de médicaments.

m. Le 25 mai 2021, les experts ont maintenu une capacité de travail exigible de l’assuré de 60% dans une activité adaptée. L’examen neuropsychologique confirmait le déficit d’attention qu’ils avaient constaté.

n. Le 8 juin 2021, le Dr K______ a estimé que l’examen neuropsychologique était susceptible d’ébranler la notion même d’un handicap majeur chez l’assuré, aucun déficit cognitif n’ayant été confirmé, de sorte que des facteurs neuropsychiques ne justifiaient pas une baisse de la capacité de travail.

o. Le 22 juin 2021, la SUVA s’est ralliée à l’avis du Dr K______.

p. Le 25 juin 2021, le SMR a rendu un avis selon lequel les experts ne motivaient pas la diminution de l’exigibilité de 75% à 60%. Des déficits cognitifs n’avaient pas pu être mis en évidence, de sorte qu’une capacité de travail de 100% dans une activité adaptée devait être retenue.

q. Le 30 juin 2021, l’OAI s’est rallié à l’avis du SMR précité.

r. Le 15 juillet 2021, l’assuré a contesté le défaut d’effort et la majoration des symptômes ; il avait collaboré au mieux à l’examen neuropsychologique. Il requérait l’audition de son épouse et de Madame N______.

s. Le 27 septembre 2021, la chambre de céans a tenu une audience de comparution personnelle et auditionné Madame N______ (causes AI et LAA).

t. Le 21 octobre 2021, le Dr K______ a rendu une appréciation neurologique selon laquelle il paraissait arbitraire de vouloir, comme le faisait Madame N______, séparer un trouble cognitif objectivé des incohérences multiples qu’elle décrivait ; partant elle se contredisait ; elle avait cherché à établir un diagnostic psychiatrique pour expliquer la situation qui ne clarifiait pas la situation sur le plan assécurologique ; finalement, Madame N______ avait considéré que le tableau était plutôt bon dans son ensemble à part l’attention soutenue ; son examen et son audition ne permettaient pas de faire une appréciation objective de la capacité de travail de l’assuré.

u. Le 25 octobre 2021, la SUVA a observé que tout en objectivant un problème d’attention et de concentration, Madame N______ disait ne pas pouvoir en évaluer la gravité, de sorte qu’on peinait à comprendre ce qui était objectivé ; l’avis des experts ne pouvait être suivi lorsqu’ils expliquaient que l’examen neuropsychiatrique permettrait de distinguer les troubles cognitifs subjectifs directement secondaires aux douleurs neuropathiques chroniques de ceux secondaires à leurs répercussions psychologiques. En retenant une capacité de travail de 60%, Madame N______ ne tenait compte ni d’une activité adaptée, ni d’une atteinte neuropsychologique qui n’avait pu être mesurée de manière valide. Le recours devait être rejeté, subsidiairement une nouvelle expertise médicale ordonnée.

v. Le 8 novembre 2021, l’assuré a observé que le diagnostic de majoration des symptômes pour raisons psychologiques ne pouvait être retenu, Madame N______ n’étant pas à même de poser un tel diagnostic ; les incohérences relevées par Madame N______ étaient expliquées par la composante histrionique et un évitement des douleurs ; Madame N______ avait objectivé des problèmes de concentration et une baisse des performances dans certaines situations, il présentait une incapacité de travail d’au moins 40% dans une activité adaptée ; un taux d’IPAI d’au minimum 50% devait être retenu en tenant également compte des atteintes psychiques (trouble de la mémoire et de la concentration). Il a communiqué :

-        un rapport du 26 octobre 2021 du Dr M______ selon lequel l’assuré présentait un comportement pour éviter les douleurs qui pouvait faire penser à de l’exagération ; les éléments histrioniques présents dans le diagnostic de majoration des symptômes pour des raisons psychologiques et de la dépression permettaient d’expliquer l’attitude de l’assuré décrite par Madame N______. Les plaintes étaient, selon celle-ci, cohérentes par rapport aux diagnostics qu’il avait posés en 2020 et un trouble cognitif affectant l’attention avait été objectivé. La capacité de travail de l’assuré était de 50%, avec une diminution de rendement en raison de problèmes psychiques et attentionnels ;

-        un rapport du Dr H______ du 5 août 2021, selon lequel les diagnostics de syndrome douloureux chronique et trouble dépressif rendaient les facultés cognitives fluctuantes, ce qu’avait indiqué Madame N______ ; en tant que médecin généraliste, il n’avait jamais mis en doute la véracité des plaintes de l’assuré ; il paraissait judicieux d’effectuer une nouvelle évaluation neuropsychologique.

w. Le 8 novembre 2021, le SMR a maintenu ses précédentes conclusions et observé qu’il était surprenant qu’en présence d’un défaut d’effort, Madame N______ relève une fluctuation d’attention comme un trouble cognitif objectif, responsable d’une baisse de la capacité de travail de 40%.

x. Le 10 novembre 2021, l’OAI s’est rallié à l’avis du SMR précité.

y. À la demande de la chambre de céans, l’OAI a précisé le 6 décembre 2021 que le revenu sans invalidité devait être fixé à CHF 71'230.- en 2016, au vu du rapport employeur du 12 juillet 2017. Il a pris en compte un salaire horaire de CHF 29.50, avec un horaire effectif oscillant entre 40 et 45 heures par semaine et un 13ème salaire, ce qui aboutissait à un salaire de CHF 70'626.-, qu’il a ensuite indexé de l’année 2014 à l’année 2016. Le degré d’invalidité était de 20%, soit un revenu sans invalidité de CHF 71'230.- et un revenu d’invalide de CHF 56'783.- (fondé sur l’ESS 2016, TA1, homme, Total, niveau 1, pour un taux de 100%, avec une déduction de 15%).

z. Le 14 janvier 2022, l’assuré a observé que le revenu sans invalidité devait être celui recalculé par l’OAI de CHF 71'220.- et qu’il convenait d’appliquer une déduction de 20% et non de 15% sur le revenu d’invalide. Celui-ci devait se fonder sur l’ESS 2016, branches 10-33, 45-47- 49-53, 77-82 et 94-96 à l’exclusion des autres domaines ; en considérant une capacité de travail de maximum 60%, il avait déjà droit à une demi-rente d’invalidité.

Il a joint un courriel du Dr O______ du 25 novembre 2021 confirmant la nécessité de demander plusieurs avis d’experts et une nouvelle évaluation neuropsychologique.

E.       a. Par arrêt du 31 janvier 2022 (ATAS/79/2022) entré en force, la chambre de céans a partiellement admis le recours de l’assuré, annulé la décision de l’OAI du 19 février 2018 et dit que l’assuré avait droit à un quart de rente d’invalidité depuis le 1er septembre 2017, fondé sur un degré d’invalidité de 42%. Elle a retenu une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle et de 75% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles depuis le 27 octobre 2016. Le revenu sans invalidité était de CHF 69'429.- en 2016, sur la base d’un salaire horaire de CHF 29.-, selon la communication de l’employeur du 12 juillet 2017. Le revenu d’invalide était de CHF 40'082.- sur la base d’une capacité de travail de 75%, avec un abattement sur le salaire statistique retenu de 20%, pour tenir compte des limitations fonctionnelles de l’assuré. Les frais d’expertise judiciaire ont été mis pour moitié à charge de l’OAI.

b. Le 4 février 2022, l’assuré a observé qu’il avait perçu un salaire horaire de CHF 27.49 en 2005 et CHF 30.- en 2008 et 2009 ; il avait donc reçu, en 2014, chez son dernier employeur, un salaire horaire de CHF 24.90 qui était inférieur à celui qu’il aurait été en droit de recevoir. En conséquence, le revenu d’invalide était, en 2016, de CHF 73'245.60, calculé sur la base d’un salaire horaire, vacances et 13ème salaire inclus, de CHF 35.60.

c. A la demande de la chambre de céans, la SUVA s’est déterminée le 2 mars 2022 sur le salaire sans invalidité de l’assuré. Le salaire horaire selon la CCT romande du second-œuvre pour un travailleur de classe B était de CHF 26.95 en 2017 ; en l’occurrence, l’employeur avait indiqué le 12 mai 2017 un salaire horaire en 2016 et 2017 de CHF 28.50, de sorte que le revenu sans invalidité était de CHF 68'231.- [(CHF 28.50 x 42,5 h x 52) + 8,33%]. Il convenait de privilégier la déclaration première de l’employeur de mai 2017, plutôt que celle effectuée plus tard, en juillet 2017, indiquant un salaire horaire de CHF 29.- en 2016, sans motivation. Le salaire horaire de CHF 28.50 était déjà supérieur à celui de la CCT romande du second-œuvre.

c. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1.         

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Le 1er janvier 2021, est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA).

1.3 Le recours est recevable (ATAS/119/2019).

2.        Le litige porte sur le droit du recourant à une rente d’invalidité supérieure à 14 % et sur le taux de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité.

3.        De jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1; ATF 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

4.         

2.   

3.   

4.   

4.1 L'assurance-accidents est en principe tenue d'allouer ses prestations en cas d'accident professionnel ou non professionnel en vertu de l’art. 6 al. 1 LAA. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique ou mentale (art. 4 LPGA).

4.2 Les prestations que l’assureur-accidents doit cas échéant prendre en charge comprennent le traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA), les indemnités journalières en cas d’incapacité de travail partielle ou totale consécutive à l’accident (art. 16 LAA), la rente en cas d’invalidité de 10 % au moins à la suite d’un accident (art. 18 al. 1 LAA), ainsi qu’une indemnité pour atteinte à l'intégrité si l’assuré souffre par suite de l’accident d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique (art. 24 al. 1 LAA).

4.3 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. La responsabilité de l'assureur-accidents s'étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle et adéquate avec l'événement assuré (arrêt du Tribunal fédéral 8C_482/2014 du 6 mai 2015 consid. 3).

4.4 Le droit à des prestations de l'assurance-accidents suppose en outre l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'accident et l'atteinte la santé. Il faut que d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, l'accident soit propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 8C_628/2007 du 22 octobre 2008 consid. 5.1), au point que le dommage puisse encore équitablement être mis à la charge de l'assurance-accidents, eu égard aux objectifs poursuivis par la LAA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_336/2008 du 5 décembre 2008 consid. 3.1).

En tant que principe répondant à la nécessité de fixer une limite raisonnable à la responsabilité de l'assureur-accidents social, la causalité adéquate n'a pratiquement aucune incidence en présence d'une atteinte à la santé physique en relation de causalité naturelle avec l'accident, car l'assureur répond dans ce cas aussi des atteintes qui ne se produisent habituellement pas selon l'expérience médicale (ATF 127 V 102 consid. 5b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 8C_694/2007 du 3 juillet 2008 consid. 4.1). En revanche, il en va autrement lorsque des symptômes, bien qu'apparaissant en relation de causalité naturelle avec un événement accidentel, ne sont pas objectivables du point de vue organique. Dans ce cas, il y a lieu d'examiner le caractère adéquat du lien de causalité en se fondant sur le déroulement de l'événement accidentel, compte tenu, selon les circonstances, de certains critères en relation avec cet événement (ATF 117 V 359 consid. 6; arrêt du Tribunal fédéral 8C_339/2007 du 6 mai 2008 consid. 2.1).

5.        Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il convient que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3; ATF 122 V 157 consid. 1c).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsqu'au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

5.   

5.1 Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

5.2 S'agissant de la valeur probante des rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier. Ainsi, la jurisprudence accorde plus de poids aux constatations faites par un spécialiste qu'à l'appréciation de l'incapacité de travail par le médecin de famille (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc et les références). Au surplus, on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou un juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_405/2008 du 29 septembre 2008 consid. 3.2).

6.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

7.        Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu réaliser s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1 ATF 130 V 343 consid. 3.4). Dans ce contexte, on évaluera le revenu que l'assuré pourrait encore réaliser dans une activité adaptée avant tout en fonction de la situation concrète dans laquelle il se trouve. Lorsqu'il a repris l'exercice d'une activité lucrative après la survenance de l'atteinte à la santé, il faut d'abord examiner si cette activité est stable, met pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle et lui procure un gain correspondant au travail effectivement fourni, sans contenir d'élément de salaire social. Si ces conditions sont réunies, on prendra en compte le revenu effectivement réalisé pour fixer le revenu d'invalide (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 5; ATF 126 V 75 consid. 3b/aa). 

6.   

7.   

7.1 Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 et ATF 128 V 174).

7.2 Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. C'est pourquoi il se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en tenant compte de l'évolution des salaires (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1 et la référence).

7.3 Le revenu d'invalide doit être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète de l'assuré. Il correspond au revenu effectivement réalisé par l'intéressé pour autant que les rapports de travail apparaissent particulièrement stables, qu'en exerçant l'activité en question celui-ci mette pleinement en valeur sa capacité résiduelle de travail raisonnablement exigible et encore que le gain ainsi obtenu corresponde à son rendement effectif, sans comporter d'éléments de salaire social. En l'absence d'un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris d'activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible –, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l'ESS ou sur les données salariales résultant des DPT établies par la CNA (ATF 135 V 297 consid. 5.2; ATF 129 V 472 consid. 4.2.1).

Il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, à la ligne «total secteur privé» (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 124 V 321 consid. 3b/bb). La valeur statistique – médiane – s'applique alors, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3).

La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 126 V 75 consid. 5b/aa-cc).

8.        Les frais qui découlent de la mise en œuvre d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la charge de l'assurance-invalidité (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3). En effet, lorsque l'autorité judiciaire de première instance décide de confier la réalisation d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire à un COMAI parce qu'elle estime que l'instruction menée par l'autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l'ATF 137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l'autorité administrative qui aurait dû, en principe, mettre en œuvre cette mesure d'instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces conditions, les frais de l'expertise ne constituent pas des frais de justice au sens de l'art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l'art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 6.2).

Dans la mesure où, en principe, les mêmes règles de procédure, à savoir les art. 43 à 49 LPGA, sont applicables à l'instruction de la demande aussi bien en matière d'assurance-invalidité que dans le domaine de l'assurance-accidents, les principes jurisprudentiels régissant la prise en charge des frais d'expertise du COMAI par les offices de l'assurance-invalidité valent également par analogie lorsque le tribunal cantonal juge un complément d'instruction nécessaire et ordonne la mise en œuvre d'une expertise au lieu de renvoyer la cause à l'assureur-accidents. Les frais d'expertise peuvent ainsi être mis à la charge de l'assureur-accidents lorsque les résultats de l'instruction mise en œuvre dans la procédure administrative n'ont pas une valeur probatoire suffisante pour trancher des points juridiquement essentiels et qu'en soi un renvoi est envisageable en vue d'administrer les preuves considérées comme indispensables, mais qu'un tel renvoi apparaît peu opportun au regard du principe de l'égalité des armes (ATF 139 V 225 consid. 4.3). 

Cette règle ne saurait entrainer la mise systématique des frais d'une expertise judiciaire à la charge de l'autorité administrative. Encore faut-il que l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres termes, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.4).

9.        En l’occurrence, les Drs I______ et J______ ont rendu leur rapport d’expertise le 30 octobre 2019.

8.   

9.   

9.1 Fondé sur les pièces du dossier, comprenant une anamnèse, la description des plaintes du recourant, un examen neurologique, posant des diagnostics clairs, (avec une description des atteintes objectivables et des limitations fonctionnelles), l’analyse de la cohérence du tableau et une évaluation motivée et convaincante de la capacité de travail du recourant, le rapport d’expertise judiciaire répond aux réquisits jurisprudentiels précités pour qu’il lui soit reconnu une pleine valeur probante.

9.2 Selon les conclusions de ce rapport, le recourant présente un névrome de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche et une neuropathie principalement axonale de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche ainsi que des douleurs neuropathiques chroniques de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche ; les plaintes du recourant sont corrélées à un substrat organique ; l’allodynie avec décharges électriques et les douleurs au repos au niveau de la main gauche avec importantes limitations fonctionnelles sont en corrélation avec le développement d’un névrome ainsi que d’une neuropathie de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche. Les symptômes du recourant correspondent à ceux d’un névrome de la branche sensitive (superficielle) du nerf radial gauche, lequel est une complication de la lésion traumatique du nerf périphérique due à l’accident du 27 juin 2014. La neuropathie est objectivée à l’ENMG du 19 septembre 2019 (recte : 2016) et la manifestation clinique est cohérente avec cette atteinte (hypoesthésie avec composante hyperalgique, allodynie et hyperpathie dans le territoire distal de ce nerf). Les troubles attentionnels ont une origine mixte due aux douleurs chroniques neuropathiques et à un possible effet médicamenteux. Les plaintes et symptômes sont en association avec le névrome et la neuropathie post-traumatique et sont expliqués par ces diagnostics ; l’évolution reste cohérente avec la sévérité de la lésion initiale ; il n’y a pas de discordance entre les plaintes et le comportement du recourant.

Les experts ont retenu une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle d’aide plâtrier-plaquiste et de 75% dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, compte tenu d’une limitation de l’attention et de la performance sur restriction temporelle non adaptable, dans le contexte de douleurs chroniques et possible effet médicamenteux (vertiges, nausées, trouble de la vigilance, fatigue, insomnie, irritabilité, agitation, confusion, troubles attentionnels). Même dans une activité adaptée, il persiste des douleurs neuropathiques chroniques qui diminuent la capacité de travail. Les experts ont mentionné les limitations fonctionnelles suivantes : port de charges lourdes qui nécessitent une manipulation bimanuelle ; activité nécessitant une préhension de force avec la main gauche ou des mouvements répétitifs avec la main gauche ; travail de force, précision et motricité fine avec la main gauche ; travail en hauteur, sur engin dangereux (industriel ou « coupant ») et machine avec utilisation bimanuelle ; conduite automobile professionnelle ; attention soutenue (dans le contexte de douleurs chroniques) ; performance sur restriction temporelle, non adaptable (dans le contexte de douleurs chroniques). Ils ont précisé que la mobilisation active et passive de la main gauche reste très restreinte, notamment au niveau du pouce gauche, dans le contexte de l’allodynie importante, déclenchée par la stimulation externe (toucher, frottement) au niveau du dos latéral radial de la main et du pouce ainsi qu’à la mobilisation du pouce gauche ; l’utilisation effective de la main gauche est limitée à une fonction de stabilisation par les quatre derniers doigts uniquement.

9.3 Comme les experts l’ont suggéré, dans le cadre de la demande de complément d’expertise, un examen neuropsychologique a été effectué. La valeur probante des conclusions du rapport de cet examen effectué par Madame N______ sera analysée ci-après. Il peut cependant déjà être retenu que Madame N______ a conclu à la présence d’un trouble en attention soutenue, montrant surtout une fluctuation de l’attention (confirmé par des tests de validation des symptômes jugés adéquats - rapport d’examen neuropsychologique, p. 6), trouble qu’elle a confirmé lors de son audition du 27 septembre 2021, en précisant qu’il y avait objectivement un problème chez le recourant pour effectuer les tâches longues, qui n’était pas remis en cause par un déficit d’effort et que le trouble cognitif était bien objectivé au niveau de l’attention (procès-verbal d’audience du 27 septembre 2021). Dans leur complément d’expertise du 25 mai 2021, les experts ont ensuite souligné que les conclusions de l’examen neuropsychologique rejoignaient leurs propres conclusions et objectivaient un déficit de l’attention soutenue, avec des fluctuations de concentration.

9.4 Les limitations fonctionnelles retenues dans le rapport précité par les experts comme justifiant la limitation de la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée, à un taux de 75%, ont été mises en lien avec les lésions accidentelles objectivées. Dans cette mesure, les douleurs dues aux lésions neurologiques et le déficit d’attention soutenue, objectivé à l’examen neuropsychologique, en tant que limitations fonctionnelles objectivées, ne commandent pas une analyse selon les indicateurs jurisprudentiels précités, applicable en présence de toute affection psychique, dont le trouble somatoforme douloureux.

9.5 S’agissant de l’expertise neuropsychologique de Mme N______, il convient de relever ce qui suit :

9.5.1 L’examen a permis d’établir un trouble de l’attention soutenue, confirmé aux tests de validation des symptômes, que Mme N______ a précisé lors de son audition, en relevant que les tâches longues qui sollicitent une attention soutenue étaient déficitaires, que ce trouble cognitif au niveau de l’attention était objectivé, qu’il n’était pas remis en cause par un déficit d’effort et que la fluctuation de l’attention pouvait être reliée au syndrome douloureux chronique. Mme N______ explique ensuite que l’intensité du trouble de l’attention est difficile à mesurer, en raison des problèmes de comportement du recourant et que celui-ci présente une majoration des symptômes pour des raisons psychologiques. Or, l’analyse du comportement du recourant par Mme N______ et les motifs donnés par celle-ci pour évoquer un diagnostic de majoration des symptômes pour des raisons psychologiques ne sont pas convaincants. Mme N______ admet d’abord qu’elle n’est pas habilitée à poser un tel diagnostic ; elle relève ensuite des incohérences et discordances qui sont dans le même temps relativisées, voire niées. À cet égard, elle mentionne qu’il est incohérent que le recourant réussisse des tests complexes et rate des tests simples en présentant parfois, pour certains tests, une bonne organisation alors que, pour d’autres tests, il est perdu. Toutefois, elle admet que l’attention peut fluctuer en raison du syndrome douloureux chronique, de sorte qu’elle n’explique pas pourquoi le recourant ne pourrait pas échouer à des tests simples, en raison du trouble de l’attention. Elle indique aussi que le recourant est moins performant lorsqu’il est seul pour réaliser une tâche, mais ne précise pas s’il était seul ou accompagné lors de la réalisation des tests simples. Elle estime en outre qu’il a présenté une attitude changeante ; par exemple, il prétendait avoir besoin de l’aide de son épouse, estimant tout oublier, mais finalement il avait réussi à répondre aux questions sans difficultés ; or, Mme N______ n’explique pas en quoi la peur évoquée par le recourant en début de séance quant à ses performances cognitives relèverait d’une incohérence. Il était aussi sorti acheter des cigarettes alors qu’il disait avoir peur de se perdre. À cet égard, Mme N______ a indiqué que le recourant avait insisté pour fumer, ce qu’elle avait refusé. Or, il apparaît légitime que le recourant, gros fumeur (trois paquets par jour) souhaite se procurer des cigarettes pour fumer lors des pauses d’un long examen tel que l’examen neuropsychologique en cause, ce d’autant que le recourant a expliqué, sans être contesté, qu’il connaissait le quartier et qu’il était donc à même, sans difficulté, de s’y orienter. Mme N______ a reconnu ensuite, lors de son audition, qu’il n’apparaissait pas compatible avec la bonne marche de l’examen que le recourant ne puisse pas fumer lors des pauses. Dans ces conditions, l’achat de cigarettes par le recourant dans un quartier qu’il connaissait, alors qu’il avait un intense besoin de fumer, n’apparaît pas constitutif d’une incohérence. Elle mentionne que le recourant, quand il a conduit, n’a pas présenté de problème, alors que la conduite était incompatible avec son trouble de l’attention. Or, le recourant a à cet égard indiqué qu’il ne conduisait plus depuis un an et qu’il ne possédait pas de voiture ; par ailleurs, Mme N______ a précisé qu’elle ne savait pas s’il conduisait bien et s’il avait effectué de longs trajets. Mme N______ n’explique ainsi pas de façon convaincante la présence d’une incohérence. Elle relève encore que le recourant s’est énervé quand elle lui a demandé pourquoi il ne pouvait pas travailler. Or, ce mouvement d’humeur peut être le signe d’une résistance psychique affaiblie du recourant face à ses perspectives d’avenir, sans constituer pour autant une incohérence avec d’autres éléments du dossier, et Mme N______ n’explique d’ailleurs pas en quoi une incohérence est réalisée. À cet égard, la consultation ambulatoire de la douleur des HUG avait déjà relevé, lors d’une consultation du 22 août 2019, que le recourant poursuivait son suivi psychologique et prévoyait de discuter son ressenti et ses angoisses quant à ses perspectives professionnelles, sa situation sociale restant à ce jour vécue comme une injustice et source de colère (rapport du Dr P______ du 10 septembre 2019). Le recourant présentait ainsi déjà, une année et demie avant l’examen de Mme N______, des sentiments d’injustice et de colère face à ses perspectives professionnelles, ce qui confirme plutôt une constance du recourant dans sa manière d’exprimer son désarroi. Par ailleurs, les constatations faites par Mme N______ de l’utilisation par le recourant de son petit doigt de la main gauche et de celle-ci lors de deux mouvements ne sont, en outre, pas à même de remettre en cause les constatations et conclusions des experts neurologues, lesquels ont bien objectivé la douleur du recourant et les importantes limitations fonctionnelles de sa main gauche. Enfin, Mme N______ admet elle-même que tous les comportements mentionnés comme incohérents peuvent aussi être le reflet de la douleur du recourant (expertise neuropsychologique p. 4). Elle relativise également les incohérences soulevées puisqu’elle considère que même dans une activité adaptée, la fatigue, les douleurs, le trouble cognitif et l’état dépressif du recourant limitent sa capacité de travail dans une mesure telle que même le taux de travail de 60% retenu par les experts est jugé élevé et qu’une diminution de rendement devrait encore, selon elle, être prise en compte.

9.5.2 Les experts neurologues, appelés à se prononcer sur le rapport de Mme N______, ont estimé que le trouble établi rejoignait leurs propres constatations, soit la présence d’un déficit d’attention soutenue avec des fluctuations de concentration et de la fatigue, directement secondaires aux douleurs neuropathiques. Quant aux troubles comportementaux et discordances relevés ainsi que le diagnostic de majoration des symptômes pour raison psychologique évoqué par Mme N______, ils étaient, selon eux, secondaires aux répercussions psychologiques et étaient en pratique observés dans le cadre de syndromes douloureux chroniques. Pour les experts, les incohérences et discordances évoquées étaient ainsi expliquées et ne mettaient pas en cause les diagnostics posés, les limitations fonctionnelles décrites et le taux de capacité de travail réduit auquel ils concluaient.

9.5.3 Dans le même sens que les experts neurologues, le Dr H______ a estimé que les douleurs étaient, selon son expérience du syndrome douloureux chronique, fluctuantes et pouvaient expliquer les discordances relevées par Mme N______. Il a souligné que Mme N______ suspectait un défaut d’effort du recourant, tout en nuançant ses propos puisqu’elle admettait que les comorbidités du recourant influençaient la faculté cognitive, qui pouvait être fluctuante. Il a par ailleurs exclu la présence de doutes sur l’authenticité du recourant, en relevant que c’était aussi le cas des spécialistes de la douleur, qui suivaient le recourant depuis 2018 ainsi que du Dr M______. Enfin, dans le même sens également que les experts neurologues et le Dr H______, le Dr M______ a souligné que le rapport de Mme N______ n’était pas clair dès lors qu’on ne comprenait pas si elle reprochait au recourant de simuler ses douleurs, et que l’attitude du recourant décrite par Mme N______ pouvait s’expliquer par une attitude histrionique, phénomène psychologique inconscient qui ne relevait pas de la simulation.

9.5.4 Ainsi, les médecins amenés à se prononcer sur le rapport de Mme N______ ont écarté toute incohérence de la part du recourant et confirmé l’existence du trouble de l’attention en lien avec les douleurs. Au demeurant, le rapport neuropsychologique de Mme N______ est probant en tant qu’il atteste d’un trouble de l’attention objectivé, mais ne l’est pas s’agissant des incohérences et discordances relevées. Il n’y a ainsi pas suffisamment d’éléments probants permettant de douter du trouble cognitif objectivé, lequel doit être confirmé.

9.6 Le SMR et le médecin-conseil neurologue de la SUVA ont émis des critiques à l’égard du rapport d’expertise judiciaire, lesquelles ne sont toutefois pas convaincantes.

9.6.1 Le SMR estime que les plaintes du recourant sont uniquement subjectives et n’ont pu être objectivées par des tests de dépistage (avis des 25 juin 2021 et 8 novembre 2021). À cet égard, les experts ont clairement attesté de douleurs neuropathiques dues aux atteintes objectivées, en lien avec la lésion accidentelle du nerf radial gauche et ses complications. Dans ce contexte, et contrairement à l’avis du SMR, les douleurs neuropathiques jugées importantes par les experts ne sont pas uniquement subjectives mais sont reliées à un substrat organique. Elles font partie des limitations fonctionnelles mentionnées par les experts justifiant, même dans une activité adaptée, une diminution de la capacité de travail. Il en est de même des troubles de l’attention (en attention soutenue) qui ont été relevés par les experts. Au demeurant, la critique du SMR qualifiant les douleurs et l’atteinte cognitive de manifestation uniquement subjective doit être écartée.

9.6.2 Quant au Dr K______, il a estimé, dans son appréciation du 21 janvier 2020, que le rapport d’expertise était circonstancié et complet. Il a confirmé l’atteinte, le substrat organique et la causalité des troubles attestés par les experts, tout comme les limitations fonctionnelles retenues. En revanche, il a contesté la diminution de la capacité de travail de 25% dans une activité adaptée, estimant qu’elle n’était pas motivée. Or, comme il a été relevé ci-avant, les experts ont décrit de façon convaincante les limitations fonctionnelles objectivées qui motivent une diminution de la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée. Le Dr K______ ne s’est pas déterminé sur les limitations fonctionnelles précitées et s’est contenté d’opposer à l’estimation de la capacité de travail établie par les experts celle du Dr G______, ce qui est insuffisant pour mettre en doute les conclusions de l’expertise. La diminution de la capacité de travail de 25% du recourant, présente dans une activité adaptée aux limitations fonctionnelles du recourant, objectivée par les experts est en conséquence convaincante.

9.6.3 En outre, les 8 juin et 21 octobre 2021, le Dr K______, considérant que Mme N______ se contredisait et que son rapport ne permettait pas de faire une appréciation objective de la capacité de travail du recourant, a indiqué que l’on pouvait douter de l’authenticité de la performance du recourant à l’examen neuropsychologique et donc de la réalité de ses troubles, et que cet examen était susceptible d’ébranler la notion même du handicap majeur chez le recourant, de sorte qu’on ne pouvait suivre les conclusions des experts judiciaires neurologues. À cet égard, les constatations et conclusions de Mme N______ ont fait l’objet d’une analyse de leur valeur probante ci-avant et il a été constaté qu’un trouble de l’attention soutenue était objectivé, nonobstant les critiques qui pouvaient être faites au rapport neuropsychologique, et pouvait, en conséquence, être pris en compte par les experts neurologues dans l’appréciation de la capacité de travail du recourant.

9.7 Le 15 octobre 2020, les experts ont rendu un rapport complémentaire d’expertise, à la demande de la chambre de céans.

9.7.1 Ils ont conclu à une capacité de travail du recourant non plus de 75% mais seulement de 60% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles, pour tenir compte des avis des Drs M______ et H______, en particulier de la sévérité du syndrome douloureux chronique et de ses répercussions, qui entraînaient, selon les médecins traitants précités, une capacité de travail réduite à au moins 50%.

9.7.2 En premier lieu, ce rapport complémentaire précise de façon convaincante certains aspects du rapport d’expertise. En particulier, les limitations fonctionnelles ont été détaillées comme suit : le recourant ne peut exercer qu’un travail comportant une activité légère de sa main droite valide en position assise, allongée ou debout avec possibilité de changements de positions. Sa main gauche ne peut avoir qu’une fonction très limitée de stabilisation d’objets par les 4 derniers doigts et à la condition d’éviter tout contact sur la zone-gâchette des douleurs (partie latérale et dorsale de la main et du pouce gauches). Il pourrait exercer une activité 6 heures par jour, 5 jours par semaine. Afin d’objectiver les plaintes neuropsychologiques, un examen neuropsychologique était préconisé.

9.7.3 En second lieu et en revanche, ce rapport complémentaire retient de façon non convaincante une baisse de l’exigibilité, soit une capacité de travail de 60% au lieu de 75% initialement retenue.

9.7.3.1 En effet, les experts ont ajouté une perte de rendement de 20% qu’ils n’avaient pas retenue initialement, en se basant sur les avis des médecins traitants M______ et H______. Or, le Dr M______ atteste d’un suivi depuis mars 2019 avec la présence d’un trouble dépressif sévère et d’un stress post traumatique probable, entrainant une capacité de travail nulle, voire de 50%, si les douleurs évoluaient favorablement (rapport du 14 janvier 2020). Cet avis, qui semble avoir été déterminant pour les experts, fait principalement état d’une symptomatologie psychiatrique qui outrepasse l’évaluation neurologique. Par ailleurs, le Dr M______ a attesté d’un suivi depuis mars 2019, soit postérieurement à la décision litigieuse de la SUVA du 12 octobre 2018, de sorte que les diagnostics qu’il pose et qui n’ont pas été mentionnés auparavant par d’autres médecins ne peuvent être considérés comme existants au 12 octobre 2018. Quant au Dr H______, il atteste d’un suivi depuis le 7 juin 2018 et de la présence de douleurs invalidantes avec des répercussions psychologiques et cognitives impactant le fonctionnement quotidien du recourant, incapacitantes à hauteur de 50% (rapport du 23 janvier 2020). Or, le Dr H______ a effectué un suivi non pas psychiatrique du recourant, mais à sa consultation de médecine interne générale. Il atteste par ailleurs d’un suivi par la consultation de la douleur depuis octobre 2018 et d’une péjoration depuis lors de l’état psychologique du recourant. Ces éléments sont insuffisants pour retenir la présence d’un trouble psychiatrique existant antérieurement à la décision litigieuse d’octobre 2018. En outre, il convient de rappeler qu’un éventuel trouble psychiatrique nécessite, pour être pris en charge par l’intimée, que les conditions du lien de causalité adéquate avec l’accident soient reconnues, conditions qui n’apparaissent pas en l’espèce d’emblée réunies.

9.7.3.2 Par ailleurs, les experts ont retenu, lors de leur première estimation, des limitations fonctionnelles persistantes dans une activité adaptée, liées à un défaut d’attention soutenue et à des performances diminuées sur restriction temporelle non adaptable (dues aux douleurs chroniques et à un effet médicamenteux possible), limitant la capacité de travail à un taux de 75%. Or, dans leur complément d’expertise, les experts ont repris les mêmes limitations fonctionnelles. Ils ont estimé, sans justification convaincante, qu’une diminution de rendement supplémentaire de 20% devait être admise. En effet, ils mentionnent à cet égard des douleurs neuropathiques chroniques permanentes et les effets secondaires médicamenteux, déjà pris en compte dans la diminution du taux d’activité exigible de 25%, tout en ajoutant des limitations liées aux répercussions psychologiques des douleurs qui, comme exposé ci-avant, ne peuvent être prises en compte. Ainsi la diminution de rendement supplémentaire de 20% n’est-elle pas justifiée et la capacité de travail réduite à un taux de 60% pas probante.

9.8 Les experts judiciaires ont estimé que les atteintes constatées étaient dans un rapport de causalité certain avec l’accident, ce qui n’a pas été contesté par l’intimée. Partant, la conséquence de celles-ci est à la charge de l’intimée.

9.9 Au demeurant, les conclusions initiales des experts, selon leur rapport du 30 octobre 2019, peuvent être suivies, soit une capacité de travail du recourant nulle dans son activité habituelle et de 75% dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles. L’aptitude à la réadaptation, non contestée, a été fixée au 27 octobre 2016 par l’OAI et a été confirmée par l’arrêt de la chambre de céans du 31 janvier 2022. En l’occurrence, l’intimée a versé des indemnités journalières jusqu’au 31 juillet 2017, de sorte que la capacité de travail du recourant, telle qu’établie par l’expertise judiciaire, peut à tout le moins être retenue dès le 1er août 2017. Il doit à cet égard encore être relevé que selon le Tribunal fédéral, pour des personnes considérées comme monomanuelles et limitées à des activités légères, il existe suffisamment de possibilités d’emplois dans un marché équilibré de travail (arrêt du Tribunal fédéral 8C_772/2020 du 9 juillet 2021), de sorte qu’une activité à un taux de 75% est effectivement exigible de la part du recourant.

10.         Il convient en conséquence de calculer le degré d’invalidité du recourant sur la base d’une capacité de travail de 75% dans une activité adaptée dès le 1er août 2017.

10.1 S’agissant du revenu sans invalidité, il a fait l’objet d’un nouveau calcul par l’OAI le 6 décembre 2021 et a été fixé, en 2016, à CHF 71'230.-, sur la base du rapport employeur du 12 juillet 2017 et d’un salaire horaire de CHF 29.50. La chambre de céans a toutefois considéré, dans son arrêt précité, que l’employeur avait indiqué que dès le 1er janvier 2016, le salaire horaire du recourant aurait été de CHF 29.-. C’était donc ce montant qui était pertinent pour l’année 2016, celui de CHF 29.50 étant mentionné comme salaire horaire « actuel », soit à la date de la signature du rapport, en 2017. Quant au salaire de CHF 24.90 retenu par la SUVA, il était indiqué comme versé depuis le 23 juin 2014 et non pas en 2016, année de référence. Dans sa dernière écriture, la SUVA a d’ailleurs admis qu’il convenait de retenir un salaire horaire supérieur à celui initialement considéré, soit CHF 28.50 en 2017, aboutissant à un revenu annuel de CHF 68'232.-, sur la base des indications fournies par l’employeur le 12 mai 2017.

A cet égard, il convient en effet de s’écarter du salaire horaire retenu dans l’arrêt de la chambre de céans du 31 janvier 2022, dès lors que l’employeur, comme le souligne l’intimée, n’a pas expliqué pour quel motif il modifiait, le 12 juillet 2017, le salaire horaire indiqué deux mois auparavant, en l’estimant à CHF 29.50, en 2017, au lieu de CHF 28.50. Il est à cet égard constaté que cette question n’était pas pertinente dans le cadre de l’estimation de la rente de l’assurance-invalidité, dès lors que tant un revenu sans invalidité fondé sur un salaire horaire de CHF 28.50 que de CHF 29.50 aboutit à l’octroi d’un quart de rente d’invalidité.

Le revenu sans invalidité est ainsi, en 2017, de CHF 68'232.- :

[(CHF 28.50 x 42.5 x 52) + (8,33% x CHF 62'985)]

10.2 S’agissant du revenu d’invalide, il a été établi par l’OAI, en 2016, à CHF 66'803.- sur la base de l’ESS 2016, TA 1, homme, total, niveau 1, pour 41,7 h de travail par semaine. Ce calcul peut être confirmé conformément à la jurisprudence précitée ; il convient en effet, en règle générale, de se fonder sur la table TA1, ligne total secteur privé ; on peut parfois se référer, comme le requiert le recourant, aux salaires mensuels des secteurs particuliers, voire des branches particulières dans les cas dans lesquels, avant l’atteinte à la santé, l’assuré concerné avait travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et où une activité dans un autre domaine n’entre pratiquement plus en ligne de compte (arrêt du Tribunal fédéral 8C 405/2021 du 9 novembre 2021), ce qui n’est toutefois pas le cas du recourant. En outre, seules des tâches de niveau de compétence 1 ont été retenues, soit des tâches physiques ou manuelles simples, correspondant aux aptitudes du recourant. Il convient encore de tenir compte d’une capacité de travail de 75%. Quant à l’abattement, il se justifie de retenir un taux de 20%, au motif que, nonobstant une réduction de l’exigibilité à un taux de 75%, le handicap du recourant est particulièrement intense, l’activité possible étant réduite à une activité quasi monomanuelle et l’utilisation effective de la main gauche étant limitée à une fonction de stabilisation de la main gauche par les 4 derniers doigts uniquement. À cet égard, il a d’ailleurs été admis un abattement maximal de 25% pour un assuré ne pouvant exercer qu’une activité monomanuelle avec sa main non dominante, à un taux de 100% (arrêt du Tribunal fédéral 8C_772/2020 du 9 juillet 2021). En conséquence, compte tenu en l’espèce de l’activité quasi monomanuelle exigible du recourant et des limitations fonctionnelles importantes qu’il subit, une réduction de 20% se justifie.

Le revenu d’invalide est ainsi, en 2016, de CHF 40'082.- :

([75% x CHF 66'803] – [20% x CHF 66'803])

Indexé à l’année 2017 (+ 0,4%), il est de CHF 40'242.-.

 

10.3 Le degré d’invalidité est en conséquence de 41%, soit :

68’232 – 40'242 = 41.02% = 41%

68'232

Ce degré donne droit à une rente d’invalidité du même taux.

11.          

11.1 Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase); elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2ème phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).

L'indemnité pour atteinte à l'intégrité est une forme de réparation morale pour le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l'existence etc.) subi par la personne atteinte, qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d'admettre qu'il subsistera la vie durant. Elle n'a pas pour but d'indemniser les souffrances physiques ou psychiques de l'assuré pendant le traitement, ni le tort moral subi par les proches en cas de décès. L'indemnité pour atteinte à l'intégrité se caractérise par le fait qu'elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références).

11.2 L’annexe 3 à l'OLAA comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 113 V 218 consid. 2a; RAMA 1988 p. 236) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent (ATF 124 V 209 consid. 4bb).

La Division médicale de la SUVA a établi plusieurs tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA (disponibles sur www.suva.ch). Ces tables n'ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3; ATF 124 V 209 consid. 4.cc; ATF 116 V 156 consid. 3).

11.3 En l’occurrence, s’agissant de l’IPAI, les experts ont confirmé un taux de 40% en considérant que les conséquences fonctionnelles et les répercussions psychologiques correspondaient à une amputation de la main, suivie de douleurs invalidantes du membre fantôme. A cet égard, la critique du Dr K______ du 21 janvier 2020 est pertinente, en ce sens que le taux de 30% correspond déjà à l’atteinte due aux douleurs neuropathiques, de sorte qu’il ne se justifie pas de majorer ce taux de 10%. En effet, la perte de l’utilisation de la main gauche du recourant est due aux douleurs et ne correspond pas à une perte réelle du membre. Quant au taux de 30%, il correspond selon l’expertise judiciaire à la perte de la fonctionnalité motrice de la main gauche.

Partant, le taux de l’IPAI sera fixé à 30%.

12.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision litigieuse annulée. Il sera dit que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 41% dès le 1er août 2017 et à une IPAI au taux de 30%, sous réserve du montant déjà versé par l’intimée.

12.1 Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 3'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émolument et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA – E 5 10.03]).

12.2 S’agissant des frais de l’expertise neurologique judiciaire en CHF 5'277.30, il y a lieu, en application de la jurisprudence précitée, de les mettre par moitié à la charge de l’intimée, étant constaté que l’instruction médicale a uniquement consisté en la mise en œuvre du médecin-conseil de l’intimée, dont l’avis quant à la capacité de travail du recourant était sérieusement contesté par d’autres avis au dossier.


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.      Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimée du 12 octobre 2018.

4.        Dit que le recourant a droit à une rente d’invalidité de 41% dès le 1er août 2017 et à une IPAI au taux de de 30%.

5.        Alloue une indemnité de CHF 3'000.- au recourant, à charge de l’intimée.

6.        Met la moitié des frais de l’expertise, à hauteur de CHF 2'638.65, à la charge de l’intimée.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le