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Décisions | Chambre civile

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C/2355/2023

ACJC/84/2024 du 23.01.2024 sur OTPI/686/2023 ( SDF )

Normes : CPC.315.al5
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2355/2023 ACJC/84/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 23 JANVIER 2024

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d'un jugement rendu par la 1ère Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 3 novembre 2023, représenté par Me Albert RIGHINI, avocat, RVMH AVOCATS, rue Gourgas 5, case postale 31, 1211 Genève 8,

et

Madame B______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par Me N______, avocate,

 


Vu, EN FAIT, l’ordonnance OTPI/686/2023 du 3 novembre 2023, par laquelle le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles, a condamné A______ à payer à C______, par mois et d’avance, dès le 1er septembre 2023, le montant de 2'200 fr. pour son entretien (chiffre 1 du dispositif), condamné A______ à payer à B______, par mois et d’avance, dès le 1er septembre 2023, le montant de 22'000 fr. pour son entretien (ch. 2), fait interdiction à A______ de disposer des avoirs se trouvant sur le compte IBAN 1______ ouvert à son nom auprès de [la banque] D______ (ch. 3), prononcé cette interdiction sous la menace de la peine de l’art. 292 CP, dont la teneur a été rappelée (ch. 4), ordonné à D______ de bloquer le compte susmentionné (ch. 5), condamné A______ à payer à B______ un montant de 60'000 fr. à titre de provisio ad litem (ch. 6), réservé la décision finale du Tribunal quant au sort des frais judiciaires (ch. 7), n’a pas alloué de dépens (ch. 8) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 9);

Que le Tribunal a retenu que A______ n’avait ni allégué ni produit de pièces permettant d’arrêter son train de vie actuel et ses revenus; qu’il paraissait peu vraisemblable qu’il ait siégé pendant deux ans au sein du conseil d’administration d’une start up en Allemagne sans percevoir de salaire; qu’il n’avait pas fourni d’explications claires relatives à ses participations dans différentes sociétés; que suite à la vente d’une villa sise à E______ (France), il avait perçu un montant de 3'163'347 euros; qu’il avait certes allégué avoir remboursé des prêts pour un total de 2'075'000 euros, mais ne l’avait pas établi, puisqu’aucun preuve de mouvements bancaires n’avait été apportée; que le Tribunal a ainsi considéré que A______ disposait d’une fortune supérieure à 3'150'000 euros, ou à tout le moins de l’ordre de 1'075'000 euros si l’on devait admettre le remboursement des prêts; que dès lors, il pouvait continuer à contribuer à l’entretien de la famille; que le Tribunal a retenu que B______, qui n’avait exercé aucune activité lucrative pendant le mariage, avait rendu vraisemblable un train de vie nécessitant un montant de 22'000 fr. par mois; qu’il se justifiait par ailleurs que A______ continue de contribuer à l’entretien de son fils C______, âgé de 18 ans et qui avait obtenu son baccalauréat en juin 2023, quand bien même il prenait une année sabbatique, étant relevé que A______ n’avait pas rendu vraisemblable que son fils ne voulait plus le voir, ni que ce dernier était seul responsable de la prétendue rupture de la relation; que s’agissant de la provisio ad litem, le Tribunal a retenu un montant de 40'000 fr. permettant de couvrir l’avance de frais sollicitée par le Tribunal et 20'000 fr. pour les honoraires du conseil de B______, ce dernier montant ne paraissant pas disproportionné au vu de la complexité du cas et des démarches à entreprendre jusqu’au terme de la procédure;

Vu l’appel formé le 17 novembre 2023 par A______ contre cette ordonnance, reçue le 7 novembre 2023, concluant à son annulation;

Que A______ a sollicité l’octroi de l’effet suspensif s’agissant des chiffres 1, 2 et 6 du dispositif de l’ordonnance attaquée;

Que sur ce point, il a exposé être sans revenus, ni fortune, être endetté et disposer d’actifs pour une valeur totale de, tout au plus, 387'794,45 euros;

Que, partant, s’il devait acquitter les montants dus au jour de la notification de la décision entreprise, soit 132'600 fr., le solde de ses actifs ne s’élèverait plus qu’à un montant de l’ordre de 240'000 fr.; que sans revenus, il avait besoin desdits actifs pour subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de son fils mineur, lequel vit avec lui à F______ [Royaume-Uni];

Que le paiement des contributions d’entretien courantes aurait également pour effet de l’exposer à des difficultés financières, ses propres charges et celles de son fils mineur ayant été estimées par le Tribunal à 25'000 fr. par mois;

Que le 30 novembre 2023, A______ a transmis à la Cour de justice de nouvelles pièces, visant à établir les difficultés financières alléguées, l’absence de relations avec son fils C______ et l’intention de B______ de s’établir en Pologne avec ce dernier; qu’il a également allégué que son épouse était en possession d’une somme supérieure à 1'500'000 fr.;

Que dans ses déterminations du 22 janvier 2024 sur requête d’effet suspensif, cette dernière a conclu à son rejet;

Qu’elle a notamment contesté que son époux ait des difficultés financières, compte tenu de son train de vie à F______ [Royaume-Uni]; qu’ainsi, il finançait, pour le mineur M______, la prestigieuse école privée G______; que selon l’enfant, son cadre de vie à F______ était meilleur que celui qu’il avait à Genève; que père et fils vivaient vraisemblablement dans le quartier notoirement dispendieux de H______; que A______ possédait un véhicule I______/2______ [marque, modèle] d’une valeur minimale de l’ordre de 108'000 fr., ainsi que deux montres de marques J______ et K______; qu’il était par ailleurs actionnaire de deux groupes financiers importants et avait siégé en qualité d’administrateur au sein d’une société allemande; qu’il était le fondateur de L______, laquelle détenait des actions d’une valeur supérieure à 3'000'000 fr.; qu’il était assisté de deux conseils dans le cadre de la procédure, sans avoir sollicité le bénéfice de l’assistance judiciaire;

Considérant, EN DROIT, que l'appel n'a pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC);

Que toutefois, l'exécution des mesures provisionnelles peut exceptionnellement être suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable (art. 315 al. 5 CPC);

Que saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité cantonale d'appel doit procéder à une pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références citées; 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_514/2012 du 4 septembre 2012 consid. 3.2.2);

Que concernant le paiement d'une somme d'argent, à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, il appartient à la partie recourante de démontrer qu'à défaut d'effet suspensif, elle serait exposée à d'importantes difficultés financières ou qu'elle ne pourrait pas obtenir le remboursement du montant payé au cas où elle obtiendrait gain de cause au fond (arrêt du Tribunal fédéral 5A_708/2013 du 14 mai 2014 consid. 1.1);

Que le Tribunal fédéral accorde généralement l'effet suspensif pour le paiement des arriérés de pensions (arrêts du Tribunal fédéral 5A_954/2012 du 30 janvier 2013 consid. 4; 5A_783/2010 du 8 avril 2011, let. D);

Que l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 137 III 475 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_941/2018 du 23 janvier 2019 consid. 5.3.2);

Qu’en l’espèce, la situation de l’appelant apparaît pour le moins opaque; qu’elle fera l’objet d’un examen approfondi dans le cadre de l’arrêt qui sera rendu sur le fond; qu’à ce stade de la procédure, l’appelant n’a toutefois pas rendu suffisamment vraisemblable le fait qu’il serait sans revenus;

Que ses déclarations sont par ailleurs contradictoires, puisque tout en affirmant être endetté, il allègue disposer d’une fortune supérieure à 387'794,45 Euros;

Que pour sa part, l’intimée n’a pas travaillé pendant la durée du mariage, l’appelant assumant seul les charges de la famille;

Que dès lors, la suspension de l’effet exécutoire ne saurait être accordée s’agissant des contributions d’entretien courantes, correspondant à celles dues à compter du prononcé de l’ordonnance attaquée, soit, par mesure de simplification, dès le 1er novembre 2023;

Qu'en revanche, le paiement de l'arriéré des contributions d'entretien, soit celles dues pour les mois de septembre et octobre 2023, porte sur une période révolue;

Qu’il peut dès lors être exigé de l’intimée et de l’enfant majeur des parties qu’ils attendent l’issue de la présente procédure pour obtenir, le cas échéant, le versement des contributions d’entretien dues pour la période susmentionnée;

Que pour le surplus, il ne se justifie pas, compte tenu de la fortune dont l’appelant allègue disposer, de suspendre l’effet exécutoire attaché au chiffre 6 du dispositif de l’ordonnance attaquée;

Que l’appelant n’a en effet pas rendu suffisamment vraisemblable que le versement de la somme de 60'000 fr. lui causerait un préjudice difficilement réparable;

Que quoiqu’il en soit, l’appelant soutenant que l’intimée possède des avoirs à hauteur de plus de 1'500'000 fr., il ne saurait craindre qu’elle soit dans l’impossibilité de lui rembourser un éventuel trop perçu s’il devait obtenir gain de cause dans la procédure au fond;

Qu'il sera statué sur les frais et dépens liés à la présente décision avec l'arrêt au fond (art. 104 al. 3 CPC).

 

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Statuant sur requête de suspension du caractère exécutoire de l'ordonnance entreprise :

Suspend le caractère exécutoire attaché aux chiffres 1 et 2 du dispositif de l’ordonnance OTPI/686/2023 rendue par le Tribunal de première instance le 3 novembre 2023 en tant qu'ils portent sur les contributions d'entretien dues pour la période allant du
1er septembre au 31 octobre 2023.

Rejette la requête pour le surplus.

Dit qu'il sera statué sur les frais liés à la présente décision dans l'arrêt au fond.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente; Madame Sandra CARRIER, greffière.

 

La présidente :

Paola CAMPOMAGNANI

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (ATF 137 III 475 consid. 1
et 2), est susceptible d'un recours en matière civile (art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005; LTF -
RS 173.110), les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 93/98 LTF).

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.