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Décisions | Chambre civile

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C/5529/2022

ACJC/468/2023 du 04.04.2023 sur OTPI/756/2022 ( SDF ) , CONFIRME

Normes : CPC.276
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/5529/2022 ACJC/468/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 4 AVRIL 2023

Entre

Monsieur A______, domicilié c/o Madame B______, ______, appelant d'une ordonnance rendue par la 14ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 30 novembre 2022, comparant en personne,

et

Madame C______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Pierluca DEGNI, avocat, Degni & Vecchio, rue du Général-Dufour 12, case postale 220, 1211 Genève 8, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/756/2022 du 30 novembre 2022, reçue par les parties le 12 décembre 2022, le Tribunal de première instance, statuant par voie de mesures provisionnelles, a supprimé, dès le 1er juin 2023, la contribution d'entretien de 3'100 fr. en faveur de A______ que C______ a été condamnée à payer par l'arrêt de la Cour de justice ACJC/1491/2018 rendu le 30 octobre 2018 entre les parties (ch. 1 du dispositif), modifié en conséquence le dispositif de l'arrêt précité (ch. 2), réservé le sort des frais (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Le 21 décembre 2022, A______ a formé appel de cette ordonnance, concluant principalement à ce que la Cour de justice l'annule et condamne C______ à lui verser 3'100 fr. par mois à titre de contribution d'entretien dès le 1er juin 2022 pour toute la durée de la procédure de divorce, avec suite de frais et dépens.

Il a déposé un chargé de 90 pièces à l'appui de son appel.

b. Le 2 février 2023, C______ a conclu, préalablement, à ce que la Cour déclare irrecevable les pièces nouvelles 12 et 13, 17 à 19, 35, 42 à 46, 63, 65 à 67, 80, 82, 87, 88 et 89 déposées à l'appui du mémoire d'appel, et, principalement, confirme l'ordonnance querellée avec suite de frais et dépens.

c. A______ a déposé une écriture spontanée le 8 février 2023, persisté dans ses conclusions, et produit des pièces nouvelles.

d. C______ a renoncé à déposer une écriture supplémentaire le 27 février 2023.

e. Les parties ont été informée le 27 février 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

f. La Cour a reçu le 28 février 2023 un chargé de pièces nouvelles de la part de A______ (pièces 100 à 108).

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier.

a. Les époux C______, née le ______ 1970 et A______, né le ______ 1976 à D______ [Bosnie], tous deux de nationalité suisse, ont contracté mariage le ______ 1999.

Un enfant est issu de cette union, E______, né le ______ 1999, désormais majeur.

b.a Par jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale JTPI/10815/2018 du 4 juillet 2018, le Tribunal de première instance a notamment attribué le domicile conjugal à C______ et condamné celle-ci à payer à A______ 3'100 fr. à titre de contribution à son entretien, pour une durée de 24 mois à compter de son départ du domicile conjugal (ch. 6 du dispositif).

b.b Par arrêt ACJC/1491/2018 du 30 octobre 2018, la Cour de justice a notamment annulé le chiffre 6 du dispositif du jugement précité et condamné C______ à verser à A______ la somme mensuelle de 3'100 fr. à titre de contribution à son entretien, dès son départ effectif du domicile conjugal et sans limite de temps.

Le Cour a retenu que A______, âgé de 42 ans, était mécanicien de précision dans l'horlogerie. Il disposait d'une formation de mécanicien effectuée en Bosnie et d'un diplôme de programmeur-régleur CNC (Computer Numerical Control) délivré par F______ de Genève. Il était sans emploi depuis 2012. Après avoir touché des indemnités de l'assurance chômage jusqu'en 2013, il était sans ressources financières, alors que ses charges étaient estimées à 2'945 fr.

Depuis 2014, il avait effectué plusieurs recherches d'emploi pour des postes dans la mécanique (mécanicien-régleur-opérateur CNC), ou encore en tant que réceptionniste, agent de vente, bagagiste et chauffeur. Ces recherches s'étaient avérées infructueuses. En 2014, il avait été opéré d'une pancréatectomie G avec insulinome (tumeur) bénigne. Depuis, son état de santé était instable et il était régulièrement suivi par les HUG. Il justifiait par pièces d'une incapacité de travail à 100% du 6 juin au 8 août 2018 et du 10 septembre au 1er octobre 2018, jour où une hospitalisation avait été prévue par les HUG.

La Cour a de ce fait estimé que la durée de la contribution d'entretien ne pouvait pas être limitée à 24 mois. Il n'était en effet pas possible de déterminer si A______ pourrait effectivement retrouver une activité lucrative dans ce délai ou si, si son état de santé devait le justifier, il devrait solliciter des prestations auprès de l'assurance invalidité, lui permettant de couvrir l'entier de ses charges.

c. Le 23 mars 2022, C______ a formé une demande en divorce, assortie d'une requête de mesures provisionnelles.

Sur mesures provisionnelles, elle a conclu à la suspension du versement de la contribution d'entretien due à A______ dès la date du dépôt de la requête et pour toute la durée de la procédure.

d. A______ a conclu au déboutement de C______ de toutes ses conclusions sur mesures provisionnelles. Sur le fond, il a acquiescé au principe du divorce.

e. La situation personnelle et financière des parties est la suivante :

e.a C______ travaille en qualité d'employée de commerce pour G______ et perçoit à ce titre un revenu mensuel net, hors saisie sur salaire, de 6'020 fr. versé 13 fois l'an, soit 6'522 fr.

Ses charges telles que fixées par le Tribunal et non contestées devant la Cour sont les suivantes :

- Assurance-maladie subside déduit

 

303.00

- Télécommunication

 

182.00

- Frais médicaux non remboursés

 

152.00

- Impôts

 

274.00

- Transports

 

42.00

- Loyer

 

1'200.00

- Montant de base OP

 

1'200.00

Total :

 

3'141.00

C______ a allégué qu'elle faisait l'objet de nombreuses dettes et qu'elle n'était plus en mesure d'assumer le paiement de la contribution d'entretien de son époux.

e.b A______ est actuellement sans emploi. Lors de son interrogatoire par le Tribunal, il a indiqué en dernier lieu qu'il était capable de travailler et qu'il avait envie de le faire, mais qu'il ne trouvait pas d'emploi. Sa santé était atteinte en raison du conflit avec C______. Ses médecins pensaient toutefois que ce n'était pas le moment de faire une demande à l'assurance-invalidité. Il était suivi par un psychiatre mais il ne l'avait pas questionné sur sa capacité de travail. Il faisait l'objet de poursuites et était propriétaire d'une maison en Bosnie.

Dans son acte d'appel, A______ explique qu'il a travaillé de 2002 à 2012 dans les secteurs de la restauration, de la mécanique et de la vente. Suite à son licenciement en octobre 2012, il avait épuisé ses indemnités de chômage en 2014 et avait subi, la même année, une opération du pancréas. Il avait par la suite effectué des recherches d'emploi, lesquelles s'étaient avérées vaines. Il était toujours suivi médicalement pour les suites de sa maladie. Sa santé psychique et physique était mauvaise en raison des violences domestiques que lui avait fait subir son épouse.

Ses charges, telles que fixées par le Tribunal et non contestée en appel, sont les suivantes :

- Loyer

 

1'340.00

- Assurance-maladie subside déduit

 

 

122.00

- Télécommunication

 

120.00

- Frais médicaux non remboursés

 

40.00

- Impôts

 

180.00

- Assurance ménage et RC

 

19.00

- Transports

 

42.00

- Montant de base OP

 

1'200.00

Total :

 

3'063.00

 

f. A l'issue de l’audience du Tribunal du 4 octobre 2022 des délais ont été impartis aux parties afin de fixer la suite de la procédure. Le procès-verbal a été signé par le conseil de la demanderesse et par le défendeur comparant en personne, et la cause a été gardée à juger sur mesures provisionnelles.

g. Par courrier du 5 octobre 2022, le défendeur a fait valoir avoir exigé plusieurs fois lors de l'audience de la veille que toutes ses déclarations soient protocolées au procès-verbal, ce qui n'avait pas été le cas, et il a complété son argumentation.

Le 11 octobre 2022, il a par ailleurs déposé des pièces nouvelles accompagnées d'un courrier daté du 10 septembre 2022.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel, formé en temps utile contre une décision sur mesures provisionnelles dans une cause portant sur une valeur litigieuse supérieure à 10'000 fr. est recevable (art. 271, 276, 308 et 314 CPC).

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Elle ne traite en principe que les griefs soulevés dans la motivation écrite contre la décision de première instance (art. 311 al. 1 et 312 al. 1 CPC), à moins que les vices juridiques soient tout simplement évidents (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêts du Tribunal fédéral 4A_380/2016 du 1er novembre 2016 consid. 3.3.3; 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5).

1.3 Les mesures provisionnelles sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire (art. 248 let. d, 271 et 276 al. 1 CPC). La cognition du juge des mesures provisionnelles est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit (arrêt du Tribunal fédéral 5A_937/2014 du 26 mai 2015 consid. 6.2.2) et les moyens de preuve sont limités à ceux qui sont immédiatement disponibles, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_476/2015 du 19 novembre 2015 consid. 3.2.2).

2. L'appelant a déposé un chargé de 90 pièces à l'appui de son appel, sans distinguer celles qui étaient nouvelles de celles qui avaient déjà été produites. Il n'a pas non plus expliqué, pour les pièces nouvelles, pourquoi elles n'avaient pas été déposées avant. Il a ensuite produit spontanément des pièces les 8 et 28 février 2023.

2.1 Selon l'article 317 CPC, les faits et moyens de preuve nouveaux ne sont pris en compte dans le cadre d'un appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard et s'ils ne pouvaient être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (al. 1).

En règle générale, les nova doivent être introduits en appel dans le cadre du premier échange d'écritures. Exceptionnellement, des nova peuvent être invoqués, aux conditions de l'art. 317 al. 1 CPC, à un stade ultérieur. Tel est notamment le cas lorsque l'autorité d'appel a ordonné un second échange d'écritures (art. 316 al. 2 CPC) ou des débats (art. 316 al. 1 CPC) ou encore si elle laisse le dossier de côté sans en clore formellement l'instruction. En revanche, à partir du début des délibérations, les parties ne peuvent plus introduire de nova, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont réunies (arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016, consid. 4.1.2).

2.2 En l'espèce, les pièces 12, 13, 17 à 19, 35, 42 à 46, 63, 65 à 67 et 80 déposées avec l'appel ne remplissent pas les conditions posées par l'art. 317 CPC, de sorte qu'elles sont irrecevables.

Il en va de même des pièces 91 à 99, produites par l'appelant avec sa réplique spontanée du 8 février, alors qu'un second échange d'écritures n'avait pas été ordonné par la Cour. Les pièces 100 à 108, reçues par la Cour après que la cause ait été gardée à juger, sont également irrecevables.

3. L'appelant formule dans son appel un certain nombre de griefs concernant la manière dont ses déclarations ont été protocolées au procès-verbal de l'audience du Tribunal du 4 octobre 2022. Il n'en tire cependant aucune conclusion et n'indique pas concrètement quels éléments pertinents auraient dû figurer dans ledit procès-verbal. Aucune pièce du dossier ne permet au demeurant de retenir que le droit d'être entendu de l'appelant aurait été violé par le Tribunal.

4. Le Tribunal a retenu qu'une contribution avait été allouée à l'appelant dans le cadre des mesures protectrices au motif que celui-ci était en incapacité de travail en 2018. Tel n'était plus le cas actuellement car l'appelant avait admis qu'il était capable de travailler, mais alléguait que ses recherches étaient restées vaines. Aucun certificat médical n'attestait d'une incapacité de travail actuelle et durable. L'amélioration de l'état de santé de l'appelant constituait un fait nouveau justifiant qu'il soit entré en matière sur la requête de suppression de la contribution d'entretien formée à titre provisionnel par l'intimée. Il ressortait des pièces produites que l'appelant avait postulé entre mai et juin 2022 à 35 offres d'emploi, dont 30 concernaient des emplois d'opérateur ou mécanicien CNC, à savoir une activité qualifiée et technique dans laquelle il n'avait plus exercé depuis plus de 15 ans, de sorte que ses chances de trouver un emploi sans formation complémentaire dans ces domaines étaient ténues. A l'inverse, le marché de l'emploi à Genève pour des postes non qualifiés, tels serveurs, plongeurs ou vendeurs, n'était pas saturé. Il incombait à l'appelant, âgé de 46 ans, de privilégier ces domaines dans ses recherches afin de favoriser ses chances de réinsertion professionnelle. En faisant les efforts que l'on pouvait attendre de lui, l'appelant était ainsi susceptible de percevoir un salaire mensuel net de 3'722 fr. pour un emploi non qualifié dans la restauration selon le calculateur statistique de salaires "Salarium", ce qui lui permettait de couvrir ses charges en 3'063 fr. Un délai d'adaptation de cinq mois et demi devait lui être accordé, de sorte que la contribution d'entretien litigieuse serait supprimée dès le 1er juin 2023.

L'appelant fait valoir qu'il a effectué de nombreuses recherches d'emploi en vain, qu'il est suivi par des psychiatres au motif qu'il a été victime d'agressions physiques et de violences psychologiques de la part de l'intimée et de son fils et que sa situation financière est précaire.

4.1.1 Les mesures protectrices de l'union conjugale demeurent en vigueur au-delà de l'ouverture de la procédure de divorce; une fois ordonnées, elles peuvent toutefois être modifiées par le juge des mesures provisionnelles (art. 276 al. 1 et 2 CPC), aux conditions de l'art. 179 CC (arrêts du Tribunal fédéral 5A_866/2013 du 16 avril 2014 consid. 2; 5A_933/2012 du 17 mai 2013 consid. 5.2; 5A_547/2012 du 14 mars 2013 consid. 4.2).

Aux termes de l'art. 179 al. 1, 1ère phrase CC, le juge prononce les modifications commandées par les faits nouveaux et rapporte les mesures prises lorsque les causes qui les ont déterminées n'existent plus.

Selon la jurisprudence, la modification des mesures protectrices ne peut être obtenue que si, depuis leur prononcé, les circonstances de fait ont changé d'une manière essentielle et durable, à savoir si un changement significatif et non temporaire est survenu postérieurement à la date à laquelle la décision a été rendue, si les faits qui ont fondé le choix des mesures provisoires dont la modification est sollicitée se sont révélés faux ou ne se sont par la suite pas réalisés comme prévu, ou encore si la décision de mesures provisoires est apparue plus tard injustifiée parce que le juge appelé à statuer n'a pas eu connaissance de faits importants (arrêt du Tribunal fédéral 5A_64/2018 du 14 août 2018 consid. 3.1).

Pour fixer la contribution d'entretien selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC, applicable par analogie aux mesures provisionnelles pendant la procédure de divorce (art. 276 al. 1 CPC), le juge doit partir de la convention conclue pour la vie commune. Il doit ensuite prendre en considération qu'en cas de suspension de cette communauté, le but de l'art. 163 CC, à savoir l'entretien convenable de la famille, impose à chacun des époux de participer, selon ses facultés, aux frais supplémentaires qu'engendre la vie séparée, notamment par la reprise ou l'augmentation de son activité lucrative. Ainsi, le juge doit examiner si, et dans quelle mesure, au vu de ces faits nouveaux, on peut attendre de l'époux désormais déchargé de son obligation de tenir le ménage antérieur en raison de la suspension de la vie commune, qu'il investisse d'une autre manière sa force de travail ainsi libérée et reprenne ou étende son activité lucrative, eu égard notamment à sa formation, à son âge et à son état de santé. Le juge peut donc devoir modifier la convention conclue pour la vie commune pour l'adapter à ces faits nouveaux. En revanche, le juge des mesures provisionnelles ne doit pas trancher, même sous l'angle de la vraisemblance, les questions de fond, objet du procès en divorce, en particulier celle de savoir si le mariage a influencé concrètement la situation financière du conjoint (arrêt du Tribunal fédéral 5A_267/2018 du 5 juillet 2018 consid. 5.1.1.).

Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur d'entretien que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle afin de remplir ses obligations. Lorsque le juge entend tenir compte d'un revenu hypothétique, il doit examiner successivement deux conditions. Il doit d'abord déterminer si l'on peut raisonnablement exiger d'une personne qu'elle exerce une activité lucrative ou augmente celle-ci, eu égard, notamment, à sa formation, à son âge et à son état de santé; il s'agit d'une question de droit. Le juge doit ensuite établir si la personne a la possibilité effective d'exercer l'activité ainsi déterminée et quel revenu elle peut en obtenir, compte tenu des circonstances subjectives susmentionnées, ainsi que du marché du travail; il s'agit là d'une question de fait (ATF 143 III 233 consid. 3.2; 137 III 102 consid. 4.2.2.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_1026/2021 du 27  janvier 2022 consid. 4.1; 5A_1046/2018 du 3 mai 2019 consid. 4.3).

Pour arrêter le montant du salaire, le juge peut se baser sur l'enquête suisse sur la structure des salaires, réalisée par l'Office fédéral de la statistique, ou sur d'autres sources, notamment le calculateur de salaire du SECO (ATF 137 III 118 consid. 3.2; arrêts du Tribunal fédéral 5A_514/2020 du 2 décembre 2020 consid. 3.1.2; 5A_435/2019 du 19 décembre 2019 consid. 4.1.2).

Si le juge entend exiger d'un époux la prise ou la reprise d'une activité lucrative, ou encore l'extension de celle-ci, il doit généralement lui accorder un délai approprié pour s'adapter à sa nouvelle situation; ce délai doit être fixé en fonction des circonstances du cas particulier (ATF 129 III 417 consid. 2.2; 114 II 13 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 5A_192/2021 du 18 novembre 2021; 5A_484/2020 du 16 février 2021 consid. 5.1; 5A_534/2019 du 31 janvier 2020 consid. 4.1). Selon les cas, le juge peut même n'accorder aucun délai d'adaptation notamment lorsque les changements étaient prévisibles pour la partie concernée (arrêt du Tribunal fédéral 5A_685/2018 du 15 mai 2019 consid. 5.1).

La modification des mesures provisionnelles prend effet, en règle générale, au moment du dépôt de la requête (ATF 111 II 103 consid 4).

4.1.2 Selon l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe au recourant de motiver son appel, c'est-à-dire de démontrer le caractère erroné de la décision attaquée. Pour satisfaire à cette exigence de motivation, il ne suffit pas à l'appelant de renvoyer aux moyens soulevés en première instance, ni de se livrer à des critiques toutes générales de la décision attaquée. Sa motivation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre aisément, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique (ATF 141 III 569 consid. 2.3.3; 138 III 374 consid. 4.3.1).

4.2 En l'espèce, l'appelant, au fil d'une argumentation confuse et prolixe, se limite à répéter les affirmations qu'il a déjà formulées devant le Tribunal en se référant à des événements ne ressortant pas de pièces du dossier qui se seraient déroulés il y a plusieurs années, notamment le fait qu'il aurait subi des violences de la part de l'intimée et de son fils, lesquelles auraient eu des conséquences négatives sur sa santé.

L'appelant ne critique cependant pas de manière motivée, pièces à l'appui, les considérants circonstanciés du Tribunal, selon lesquels aucun document produit à la procédure n'atteste du fait qu'il est actuellement durablement incapable de travailler. Le certificat médical produit pour la première fois en appel, établi par le service d'urgence de la clinique des Grangettes et faisant état d'une incapacité de travail à 100% du 3 janvier au 6 janvier 2023, n'est pas suffisant à cet égard.

L'appelant n'explique pas non plus pourquoi le Tribunal aurait erré en lui imputant un revenu hypothétique correspondant à une activité non qualifiée dans le domaine de la restauration. Il ne rend pas vraisemblable avoir fait des recherches d'emploi sérieuses et suivies, ciblées sur un travail qu'il serait concrètement susceptible d'obtenir, comme une activité non qualifiée. Comme l'a relevé à juste titre le Tribunal, le marché de l'emploi pour des postes non qualifiés n'est pas saturé. Les affirmations de l'appelant selon lesquelles il ne lui est pas possible de trouver un travail qui lui procurerait un revenu lui permettant de couvrir ses propres charges ne sont dès lors pas vraisemblables. En particulier, les pièces nouvelles 40 et 41 produites par l'appelant à l'appui de ses allégués de recherches d'emploi en octobre et novembre 2022 n'ont pas de force probante car il s'agit uniquement de listes établies par ses soins. Le fait que l'appelant se rende, selon ses dires, chaque mois chez son conseiller de l'Office cantonal de l'emploi, dans l'espoir qu'il lui propose un travail, ne constitue pas quant à lui une démarche suffisante pour retenir que l'appelant déploie toute la diligence requise pour se réinsérer dans la vie professionnelle.

Il faut au contraire considérer, comme l'a fait le Tribunal, que, en faisant les efforts que l'on peut attendre de lui, l'appelant est vraisemblablement à même de trouver un emploi lui permettant d'assurer sa subsistance.

Le délai au 1er juin 2023 octroyé par le Tribunal pour ce faire est approprié à la situation et n'est au demeurant pas critiqué en appel.

L'ordonnance querellée sera dès lors confirmée.

5. Les frais judiciaires d'appel, seront mis à charge de l'appelant qui succombe
(art. 106 CPC). Ils seront fixés à 800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC) et compensés avec l'avance versée, acquise à l'Etat de Genève (art. 111 CPC).

Compte tenu de la nature familiale du litige, il ne sera pas alloué de dépens à l'intimée (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre l'ordonnance OTPI/756/2022 rendue le 30 novembre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/5529/2022.

Au fond :

Confirme l'ordonnance précitée.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Met les frais judiciaires d'appel, arrêtés à 800 fr. et compensés avec l'avance versée, à la charge de A______.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.