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Décisions | Chambre civile

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C/9616/2021

ACJC/248/2022 du 08.02.2022 sur JTPI/12099/2021 ( SDF ) , CONFIRME

Normes : CC.179
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/9616/2021 ACJC/248/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 8 FEVRIER 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______ (GE), appelante d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 23 septembre 2021, comparant par Me François ROULLET, avocat, Roullet & Associés, rue
Ferdinand-Hodler 11, 1207 Genève, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______ (France), intimé, comparant par
Me Antoine BOESCH, avocat, Poncet Turrettini, rue de Hesse 8-10, case postale,
1211 Genève 4, en l'Étude duquel il fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A.           a. Les époux A______, née le ______ 1984 en Ukraine, de nationalité ukrainienne, et B______, né le ______ 1979 à C______ (GE), de nationalité suisse, se sont mariés le ______ 2009 à Genève.

Les époux ont adopté le régime de la séparation de biens.

Ils sont les parents de D______, née le ______ 2008 à Genève.

b. Les époux se sont séparés le 2 septembre 2019, date à laquelle B______ a quitté le domicile conjugal de E______ (GE) pour s'installer dans un appartement dont il est propriétaire à F______ (France).

c. Parjugement JTPI/13299/2020 du 29 octobre 2020, statuant sur mesures protectrices de l'union conjugale, le Tribunal de première instance a donné acte aux époux A______ et B______ de ce qu'ils s'étaient constitués des domiciles séparés, attribué à A______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis 1______ à E______ ainsi que du mobilier le garnissant, à charge pour elle de s'acquitter de l'intégralité des charges y relatives, maintenu l'autorité parentale conjointe des époux sur la mineure D______, ordonné la mise en place d'une garde alternée, laquelle s'exercerait d'entente entre les époux, mais à défaut d'accord, à raison d'une semaine sur deux et de la moitié des vacances scolaires pour chacun des parents, et dit que le domicile légal de l'enfant D______ serait auprès de sa mère A______, soit au 1______ à E______ (ch. 1 à 5 du dispositif).

Simultanément, le Tribunal a fixé l'entretien convenable de D______ à 2'300 fr. par mois, allocations familiales de 300 fr. déduites (ch. 6), dit que chacun des parents assumerait les frais de logement et les frais composant le minimum vital de l'enfant lorsqu'il en avait la garde (ch. 7), dit que les frais d'assurance-maladie et d'activités extrascolaires de l'enfant seraient à la charge de A______ (ch. 8), dit que les frais liés à la scolarité en établissement privé de la mineure, de 1'035 fr. par mois, seraient à la charge de B______ (ch. 9), dit que les frais extraordinaires de l'enfant, en particulier ses frais d'orthodontie, seraient à la charge de B______ (ch. 10), dit que les allocations familiales en faveur de D______ devraient être versées en main de A______ (ch. 11), prononcé ces mesures pour une durée indéterminée (ch. 12), mis les frais judiciaires – arrêtés à 400 fr. – à la charge des parties à raison d'une moitié chacune, étant précisé que les frais judiciaires en 200 fr. mis à charge de A______ seraient supportés par l'Etat de Genève, sous réserve d'une décision ultérieure de l'assistance judiciaire (ch. 13), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 14) et débouté les parties de toutes autres conclusions ch. 15).

Dans son jugement du 29 octobre 2020, le Tribunal a notamment retenu, qu'en raison de la crise sanitaire, et de la réduction de son horaire de travail dès le mois d'avril 2020, A______ avait perçu un salaire mensuel net de 2'500 fr. Cela étant, le Tribunal a considéré que compte tenu de ses revenus mensuels moyens de 4'000 fr. nets par mois hors période de COVID-19, elle disposait d'un solde de 900 fr. eu égard à ses charges, arrêtées à 3'141 fr. Le Tribunal a par ailleurs retenu que B______ avait un solde de 1'500 fr. (5'400 fr. de revenus mensuels net moyen en 2018-2020 – 3'921 fr. de charges). L'intégralité de la capacité financière de ce dernier étant dévolue aux besoins de sa fille, il ne saurait être condamné au versement d'une quelconque contribution à l'entretien de son épouse.

d. Par acte du 18 mai 2021, A______ a requis du Tribunal de première instance la modification des mesures protectrices de l'union conjugale prononcées le 29 octobre 2020. Elle a conclu, pour l'essentiel, à ce que B______ soit condamné à lui verser, d'avance et par mois, allocations familiales non-comprises, un montant de 1'200 fr. au titre d'entretien de la famille, à ce qu'il soit condamné à assumer les frais d'assurance-maladie et d'activités extrascolaires de D______, ces mesures devant être prononcées pour une durée indéterminée.

Elle a invoqué que la réduction de son temps de travail n'était pas que temporaire mais durable et que sur la base de cet état de fait erroné, le Tribunal avait retenu une quotité disponible trop élevée, ce qui l'avait mené à une mauvaise appréciation des faits.

e. Par ordonnance du 23 juin 2021, le Tribunal a ordonné une instruction orale.

Les parties ont été entendues lors de l'audience du 10 août 2021. B______ s'est opposé à toute modification des mesures protectrices en vigueur.

f. Les parties ont répliqué et dupliqué à l'audience devant le Tribunal du 15 septembre 2021, persistant dans leurs conclusions.

A l'issue de l'audience, le Tribunal a gardé la cause à juger.

g. La situation financière deA______ est la suivante :

g.a Elle travaille en qualité de vendeuse ______ à 80% au service de la société G______, dans la boutique "H______" de l'aéroport de Genève. En 2018, son revenu annuel net s'est élevé à 52'406 fr., comprenant une participation de son employeur à son assurance maladie de 1'170 fr., ainsi qu'une prime exceptionnelle de 111 fr. Son revenu mensuel net moyen s'est élevé à 4'367 fr.

En 2019, son revenu annuel s'est élevé à 47'350 fr, soit un montant mensuel net moyen de 3'945 fr. 80.

En janvier 2020, elle a perçu un salaire net de 5'201 fr. 40, comprenant une indemnité de 29 fr. 15 (TPG) et diverses commissions pour un montant total de 2'000 fr. Pour les mois de février et mars 2020, elle a perçu un salaire net de 3'593 fr. 70, respectivement, 3'343 fr 40.

g.b A compter du mois d'avril 2020, en raison de la crise sanitaire liée au
COVID-19, A______ a été mise au bénéfice du chômage partiel, ce qui a eu un impact sur ses revenus.

Pour l'ensemble de l'année 2020, son revenu mensuel net s'est alors élevé à 35'768 fr., soit une moyenne mensuelle de 2'625 fr. 50 pour les mois d'avril à décembre 2020 ([35'768 fr. – 5'201 fr. 40 – 3'593 fr. 70 – 3343 fr. 40] / 9).

En 2021, en raison de son chômage partiel causé par la persistance de la crise liée à l'épidémie de COVID-19, A______ a perçu les revenus nets moyens de 2'688 fr. 40 pour les mois de janvier à juillet 2021 (2'542 fr. 50 pour le mois de janvier 2021, 2'530 fr. 90 pour le mois de février 2021, 2'571 fr. 70 pour le mois de mars 2021, 2'878 fr. 95 pour le mois d'avril 2021, 2'688 fr. 15 pour le mois de mai 2021, 2'571 fr. pour le mois de juin 2021 et 3'035 fr. 90 pour le mois de juillet 2021).

B.            Par jugement JTPI/12099/2021 du 23 septembre 2021, notifié aux parties le 27 septembre 2021, le Tribunal a débouté A______ de sa requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale (ch. 1), arrêté les frais judiciaires à 500 fr., réparti ces frais entre les époux à raison de la moitié chacune, la part de A______ étant provisoirement laissée à la charge de l'Etat de Genève, sauf décision contraire de l'Assistance juridique, condamné B______ à payer à l'Etat de Genève un montant de 250 fr. (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

Dans son jugement, le Tribunal a retenu que la baisse des revenus de A______ ne constituait pas un fait nouveau par rapport aux éléments pris en compte dans le jugement du 29 octobre 2020 sur mesures protectrices de l'union conjugale, de sorte qu'il n'y avait pas de modification essentielle et durable des circonstances. La précitée devait donc être déboutée des fins de son action en modification du jugement précité.

C.           a. Par acte expédié le 7 octobre 2021 au greffe de la Cour de justice, A______ appelle de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation.

Principalement, elle conclut à l'annulation des chiffres 7 et 8 du dispositif du jugement rendu sur mesures protectrices de l'union conjugale le 29 octobre 2020, et cela fait, à ce que B______ soit condamné à lui verser, d'avance et par mois, allocations familiales non-comprises, un montant de 1'200 fr. au titre de l'entretien de la famille, ainsi qu'à assumer les frais d'assurance-maladie et d'activités extrascolaires de D______, avec suite de frais judiciaires et dépens. Pour le surplus, elle conclut à la confirmation des mesures prises dans le jugement du 29 octobre 2020, et à ce que lesdites mesures soient prononcées pour une durée indéterminée.

A l'appui de son appel, elle produit diverses pièces non-soumises au Tribunal.

b. Dans sa réponse, B______ conclut au déboutement de l'appelante de toutes ses conclusions et à la confirmation du jugement entrepris, avec suite de frais judiciaires et dépens.

c. A______ n'a pas répliqué.

d. Les parties ont été avisées le 17 novembre 2021 par le greffe de la Cour de céans que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les jugements sur mesures protectrices – qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1) – dans les causes non patrimoniales ou dont la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant l'autorité inférieure est supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC).

Les jugements sur mesures protectrices étant régis par la procédure sommaire selon l'art. 271 CPC, le délai d'introduction de l'appel est de dix jours (art. 314 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, l'appel a été introduit en temps utile, selon la forme prescrite par la loi (art. 311 al. 1 CPC), et porte sur des conclusions dont la valeur litigieuse, capitalisée selon l'art. 92 al. 2 CPC, est supérieure à 10'000 fr.

Il est donc recevable.

2.             Au vu du domicile à Genève de l'enfant dont l'entretien est litigieux, c'est à juste titre que les parties – dont l'une d'elle est de nationalité ukrainienne et l'autre est domiciliée en France – ne remettent pas en cause la compétence de la Cour de justice pour connaître du litige (art. 46 et 79 al. 1 LDIP), ni l'application du droit suisse (art. 49 et 83 al. 1 LDIP; art. 4 de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires [RS 0.211.213.01]).

3.             La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). Toutefois, les mesures protectrices de l'union conjugale étant soumises à la procédure sommaire, sa cognition est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb, in JdT 2002 I 352; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2014 du 20 août 2014 consid. 1.5).

S'agissant du sort des enfants mineurs, les maximes d'office et inquisitoire illimitée s'appliquent (art. 296 al. 3 CPC). La maxime inquisitoire ne dispense cependant pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses ; il leur incombe de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_808/2012 du 29 août 2013 consid. 4.3.2).

La maxime de disposition reste applicable s'agissant de la contribution d'entretien due entre époux (ATF 129 III 417 précité; arrêt du Tribunal fédéral 5A_421/2015 du 21 janvier 2016 consid. 6.2.3).

4.             L'appelante a produit des pièces nouvelles devant la Cour.

4.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

Lorsque la procédure est soumise à la maxime inquisitoire illimitée, les parties peuvent présenter des novas en appel même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC ne sont pas réunies (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1).

4.2 En l'espèce, les pièces nouvelles produites en appel sont pertinentes pour apprécier l'obligation d'entretien des parties envers la mineure D______. Elles sont ainsi recevables, de même que les allégués de fait s'y rapportant, ce qui n'est pas contesté.

5.             La situation des parties est actuellement régie par le jugement de mesures protectrices JTPI/13299/2020 du 29 octobre 2020. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir admis que sa situation s'était modifiée de manière importante et durable depuis le prononcé de ce jugement.

5.1 Une fois que des mesures protectrices de l'union conjugale ont été ordonnées, elles ne peuvent être modifiées qu'aux conditions de l'art. 179 CC.

Aux termes de l'art. 179 al. 1 CC, le juge prononce les modifications commandées par les faits nouveaux et rapporte les mesures prises lorsque les causes qui les ont déterminées n'existent plus. Selon la jurisprudence, la modification des mesures protectrices ne peut être obtenue que si, depuis leur prononcé, les circonstances de fait ont changé d'une manière essentielle et durable, à savoir si un changement significatif et non temporaire est survenu postérieurement à la date à laquelle la décision a été rendue, si les faits qui ont fondé le choix des mesures provisoires dont la modification est sollicitée se sont révélés faux ou ne se sont par la suite pas réalisés comme prévu, ou encore si la décision de mesures provisoires est apparue plus tard injustifiée parce que le juge appelé à statuer n'a pas eu connaissance de faits importants (arrêt du Tribunal fédéral 5A_64/2018 du 14 août 2018 consid. 3.1).

La partie requérante doit fonder sa demande en modification sur de vrais nova (ATF 143 III 42 consid. 5.2-5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_154/2019 du 1er octobre 2019 consid. 4.1), c'est-à-dire des faits ou moyens de preuves qui ne sont apparus ou devenus disponibles qu'après le moment où, dans une procédure antérieure, achevée par un jugement entré en force, les moyens d'attaque et de défense pouvaient pour la dernière fois être invoqués. Sont assimilés à de vrais nova les faits qui existaient déjà au moment de la procédure précédente et qui étaient connus de la partie qui les invoque, mais qui n'ont alors pas été invoqués par celle-ci faute de pouvoir les prouver (ATF 143 III 42 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_154/2019 précité consid. 4 et les références citées). En d'autres termes, la voie de la modification est ouverte soit lorsque le fait allégué est un vrai novum, soit lorsqu'il constitue un pseudo novum, mais que le moyen de preuve apte à l'établir est un vrai novum (arrêt du Tribunal fédéral 5A_154/2019 précité consid. 4.1).

S'agissant des rapports entre la procédure d'appel contre le premier jugement et la procédure de modification de ce jugement, le Tribunal fédéral a estimé que des éléments nouveaux, sur la base desquels un changement des circonstances pouvait être invoqué, ne devaient pas être renvoyés à une procédure de modification au sens de l'art. 129 CC mais devaient être invoqués et pris en compte dans la procédure d'appel contre le jugement de divorce dans la mesure où ils étaient recevables d'après l'art. 317 al. 1 CPC. Au même titre, les moyens, sur la base desquels sont allégués, respectivement prouvés des changements de circonstances ne doivent pas permettre une modification des mesures protectrices (art. 179 CC) lorsqu'ils auraient déjà pu être invoqués dans le cadre de l'appel contre la décision de mesures protectrices (ATF 143 III 42 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_436/2020 du 5 février 2021 consid. 4.2).

En d'autres termes, les parties ne peuvent pas invoquer, pour fonder leur requête en modification, une mauvaise appréciation des circonstances initiales, que le motif relève du droit ou de l'établissement des faits allégués sur la base des preuves déjà offertes ; pour faire valoir de tels motifs, seules les voies de recours sont ouvertes (arrêt du Tribunal fédéral 5A_403/2016 du 24 février 2017 consid. 3.1), car la procédure de modification n'a pas pour but de corriger le premier jugement, mais de l'adapter aux circonstances nouvelles intervenant chez les parties (ATF 141 III 376 consid. 3.3.1 ; 137 III 604 consid. 4.1.1 ; 131 III 189 consid. 2.7.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_64/2018 du 14 août 2018 consid. 3.1).

Le point de savoir si un changement significatif et non temporaire est survenu postérieurement à la date à laquelle la décision a été rendue s'apprécie à la date du dépôt de la demande de modification (ATF 137 III 604 consid. 4.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_1001/2017 du 22 mai 2018 consid. 3).

5.2 En l'espèce, l'appelante soutient que le caractère durable de sa baisse de revenu liée à son chômage partiel causé par la pandémie de COVID 19 constitue un fait nouveau, justifiant de réapprécier le jugement JTPI/13299/2020 du 29 octobre 2020 sur la question de la contribution d'entretien.

Jusqu'en mars 2020 compris, l'appelante réalisait un revenu mensuel net d'environ 4'000 fr. A partir d'avril 2020, en raison de la pandémie de COVID-19, l'appelante, qui travaille dans un magasin H______ à l'aéroport de Genève, a été mise au bénéfice du chômage partiel, ce qui a impacté ses revenus négativement. Entre le 1er avril 2020 et le 29 octobre 2020 (date du premier jugement), le revenu mensuel net de l'appelante s'élevait ainsi à environ 2'500 fr. en moyenne, ce qui a été constaté par le Tribunal dans ledit jugement.

Pourtant, alors même que les revenus de l'appelante avaient baissé depuis plus de six mois et que la deuxième vague de la pandémie était en cours, le Tribunal a calculé le solde disponible de l'intéressée sur la base d'un revenu mensuel net de 4'000 fr., correspondant à sa rémunération "hors situation de crise liée au
COVID-19
". Il n'a notamment pas motivé sa décision sur ce point par le fait que la pandémie était sur le point de cesser et que l'appelante allait rapidement retrouver le salaire qu'elle percevait auparavant.

Malgré le fait que le revenu pris en compte n'était pas celui qu'elle percevait depuis plusieurs mois et qu'aucun signe d'accalmie de la pandémie n'était alors perceptible et permettait de penser que son chômage partiel allait cesser, l'appelante n'a pas formé appel contre ce jugement, lequel est entré en force.

Elle a attendu le 18 mai 2021 pour déposer une requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale, arguant qu'au moment du jugement précité, il apparaissait que la crise liée à la pandémie de COVID-19 ainsi que sa baisse de revenu ne seraient que passagères, mais que celles-ci s'étaient désormais prolongées et semblaient encore être amenées à durer (ce qui constituait un novum justifiant la modification des mesures prononcées), de sorte que le Tribunal avait procédé à une mauvaise appréciation des faits.

Entre le 29 octobre 2020 et le 18 mai 2021 (date de dépôt de la requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale), les revenus de l'appelante sont cependant restés aux environs de 2'500 fr, et ont même légèrement augmenté à partir du mois d'avril 2021.

Aussi, il ne peut être retenu que les circonstances de fait aient changé de manière essentielle et durable, la situation étant au contraire restée stable entre le prononcé des mesures protectrices par le Tribunal et le dépôt, le 18 mai 2021, de la requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale, moment qui est seul pertinent pour apprécier une modification des circonstances en vertu des principes juridiques rappelés ci-dessus. En effet, la situation de l'appelante s'était déjà durablement modifiée au moment du premier jugement puisqu'elle subissait les effets de la crise liée à la pandémie de COVID-19 depuis six mois déjà. La simple prolongation desdits effets ne saurait constituer un changement essentiel de circonstances.

Si l'appelante estimait que le premier jugement aurait dû prendre en compte son revenu effectif d'alors, et non les revenus qu'elle réalisait préalablement à la crise liée à la pandémie de COVID-19, il lui appartenait de former appel. La procédure sur requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale ne peut servir à corriger les faits tels qu'ils ont été retenus ou une mauvaise appréciation des circonstances initiales lorsque celles-ci ne se sont pas modifiées.

C'est donc à raison que le Tribunal a débouté l'appelante des fins de sa requête en modification des mesures protectrices de l'union conjugale, faute de novum.

Il sera relevé, en tout état de cause, que le jugement du Tribunal du 29 octobre 2020 a retenu que l'intimé épuisait sa capacité financière par le paiement des charges de l'enfant, ce que l'appelante ne remet pas en cause devant la Cour. Dès lors, même si un revenu de 2'500 fr. et non de 4'000 fr. était retenu concernant l'appelante, l'intimé ne serait pas davantage en mesure de s'acquitter de la contribution d'entretien de 1'200 fr. requise "pour la famille", ce en dérogation au principe selon lequel les contributions d'entretien doivent être fixées individuellement pour chaque membre de la famille et prioritairement en faveur des enfants mineurs, conformément à l'art. 276a al. 1 CC.

Par conséquent, l'appel n'est pas fondé et le jugement querellé confirmé.

6.             6.1 Le jugement entrepris étant confirmé, il ne se justifie pas de modifier la répartition des frais et dépens de première instance (art. 318 al. 3 CPC), qui n'est d'ailleurs pas contestée.

6.2 Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 31 et 37 du Règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière civile, [RTFMC - E 1 05.10]) et mis à la charge des parties pour moitié chacune, compte tenu de la nature du litige (art. 95 et 107 al. 1 let. c CPC).

L'appelante étant au bénéfice de l'assistance judiciaire, sa part des frais judiciaires sera provisoirement supportée par l'État de Genève, lequel pourra en réclamer le remboursement ultérieurement (art. 122 al. 1 let. b et 123 CPC; art. 19 du Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale [RAJ - RS/GE E 2 05.04]). L'intimé n'étant pas au bénéfice de l'assistance judiciaire dans le cadre du présent appel, il sera condamné à payer la somme de 400 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Enfin, les parties conserveront à leur charge leurs propres dépens d'appel (art. 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 7 octobre 2021 par A______ contre le jugement JTPI/12099/2021 rendu le 23 septembre 2021 par le Tribunal de première instance dans la cause C/9616/2021.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr. et les met à la charge des parties pour moitié chacune.

Dit que la part des frais de 400 fr. à la charge de A______ est provisoirement supportée par l'État de Genève.

Condamne B______ à payer la somme de 400 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Monsieur Patrick CHENAUX, Madame   Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.